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Canadian Journal of Rural Medicine
Spring 1999/Printemps 1999

Comme le disait si bien Yogi Berra, la nostalgie n'est plus ce qu'elle était

Gordon Brock, MD, CCMF

CJRM 1999;4(2):66

© 1999 Société de la médecine rurale du Canada


Le Dr C, médecin de famille qui a pratiqué ici au cours des années 1960, est très vénéré dans notre petite ville. De mémoire publique, il était de garde tous les soirs et toutes les fins de semaine, recevait tous les patients à toute heure du jour et de la nuit, faisait des visites à domicile : pendant toutes ces années, il n'a jamais perdu ni son sourire, ni le pli bien pressé de son costume.

Je n'ai pas à vous rappeler que le nombre de nuits où nous sommes — ou devrions être — de garde constitue un enjeu majeur et que l'insatisfaction face aux horaires de garde est un des grands facteurs qui poussent les médecins à quitter les régions rurales. Certains d'entre nous sont de garde à peu près tous les soirs, ou un soir sur deux (dans notre ville, nous sommes de garde un soir sur quatre). On signale que de plus en plus de médecins — autant médecins de famille que spécialistes — refusent des périodes de garde qu'ils jugent trop fréquentes. Un arbitre a décidé en fait au Québec qu'on ne peut forcer un médecin à être de garde plus souvent qu'une nuit sur cinq et l'on a proposé une nuit sur sept au maximum en Ontario.

Les médecins peuvent être insatisfaits de périodes de garde trop fréquentes — et commencer à s'y opposer — pour plusieurs raisons : une société de plus en plus litigieuse rend moins pardonnables les erreurs attribuables à la fatigue aiguë ou chronique. À cause de la rectitude politique, nous avons plus de difficulté à faire face au personnel et aux patients lorsque nous sommes fatigués ou de mauvaise humeur. La rémunération que nous touchons pour les soins médicaux dispensés en dehors des heures normales est jugée insuffisante. Certains d'entre nous (quelle horreur!) veulent avoir du temps qu'ils peuvent vraiment considérer comme le leur et passer plus de temps avec leur famille qui souffre depuis longtemps de leurs absences fréquentes. Enfin, personne d'entre nous ne rajeunit.

Beaucoup d'entre nous se rappellent l'époque où nos villes recevaient leur électricité d'une compagnie d'électricité locale et où les services ambulanciers municipaux étaient dirigés par l'entrepreneur local des pompes funèbres. La société a décidé depuis que ces services devraient être des services publics et que la responsabilité ne devrait pas en incomber seulement à des entrepreneurs locaux. C'est peut-être le temps de décider que c'est au gouvernement et à nos hôpitaux ruraux, et non seulement aux hommes et aux femmes qui exercent la profession en milieu rural, qu'il incombe de fournir des services médicaux 24 heures sur 24.

Comme médecins ruraux, nous devons reconnaître nos limites et chercher à obtenir des horaires de garde raisonnables. La société ne s'attend pas que des pilotes épuisés et surchargés de travail soient aux commandes d'un gros porteur et elle ne le tolérerait pas non plus. Elle ne devrait pas s'attendre non plus à ce que des médecins ruraux surchargés et épuisés dispensent des soins médicaux à une ville. Il faut reconnaître que nous devons exercer des pressions afin qu'on établisse des calendriers raisonnables de garde pour le bienfait ultime de nos patients, et pour le nôtre aussi.