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Canadian Journal of Rural Medicine
CJRM Summer 2000 / été 2000

Correspondance / Letters

Please send us your comments and opinions. Letters to the editor should be addressed to: Canadian Journal of Rural Medicine, Box 1086, Shawville QC J0X 2Y0; fax 819 647-2845; cjrm@fox.nstn.ca

CJRM 2000;5(3):161-2.


Le 10 avril 2000

Lettre adressée à la Ministre Madame Pauline Marois
Ministère de la Santé et des services sociaux

Depuis plusieurs décennies, les services de santé en régions rurales ont fait face à plusieurs crises. Un des problèmes récurrents majeur est la pénurie de médecin. Cette pénurie semble s'accentuer malgré les nombreuses solutions que les différents gouvernements, le Collège des médecins du Québec et les fédérations des médecins ont tentés d'apporter. En fait, le nombre de praticiens a diminué d'environ 7 % entre 1994 et 1998. La population rurale compte pour 22,4 % de la population générale au Québec mais seulement 17,5 % des médecins généraliste y travaillait en 1998. Nous pouvons observer une inégalité frappante dans la proportion des médecins pratiquant en région rurale par rapport à ceux et celles pratiquant en région urbaine. Le ratio de médecin par mille individus est nettement inférieur en région rurale.

Cette pénurie restreint l'accès à des services, compromet la qualité de ceux-ci même si plusieurs citoyens pense le contraire. Les médecins toujours en place dans les régions rurales travaillent de façon acharnée pour maintenir un accès à une meilleure qualité de soins possible. Par contre, l'excès d'heures travaillées, souvent au-delà de 80 heures par semaine, provoquent une fatigue parfois chronique. Cette fatigue est à l'origine de plusieurs erreurs médicales ou amènent les médecins à prendre plusieurs raccourcis lors de prise de décision clinique. Ceci risque de se faire au détriment de la santé du patient.

Plusieurs solutions ont été proposées pour remédier à cette situation mais sans succès convaincants. On a qu'à penser aux primes d'éloignement, à la facturation bonifiée à 115 %, aux bourses d'études et même à l'octroi des permis aux médecins étrangers en échange de quelques années de services en régions éloignées. Il est évident qu'avec une baisse d'environ 7 %, les objectifs n'ont pas été atteints. La situation n'est guère mieux pour les spécialistes, particulièrement chez les chirurgiens. Par conséquent, des situations de crises telles qu'on a vues en Abitibi, les fermetures d'urgences dans certains centres hospitaliers de l'Outaouais risquent de se multiplier. La situation est pire pour les spécialistes œuvrant en région éloignée là où leur départ peut souvent signifier la fermeture d'un service (ex. chirurgie, anesthésie, obstétrique).

Plusieurs bureaucrates misent beaucoup sur les banques de dépannage. Ceci ne fait qu'ajouter un diachylon sur une hémorragie. Au plus, ça ne permet qu'un bref repos insuffisant chez des médecins souvent surmenés. Cette banque de dépannage n'est qu'une solution à très court terme sans compter les inconvénients qu'elle peut engendrer. Elle ne permet pas d'assurer une continuité adéquate des soins des patients. Plusieurs médecins ont quitté des postes réguliers pour ne faire que du dépannage beaucoup plus avantageux financièrement. Les médias font souvent la manchette avec les conditions et les demandes salariales des médecins. Ces demandes salariales ne reflètent pas la priorité qu'accorde la majorité des médecins ruraux envers la problématique de recrutement. On ne peut pas acheter du temps supplémentaire lorsque les médecins travaillent de 60 à 120 heures par semaine.

L'idée de capitation a déjà circulée. Un tel système est impensable partout où il y a un manque d'effectif médical. Le sacrifice de la santé personnelle et familiale du professionnel n'a aucun prix monétaire.

Par conséquent, nous vous demandons de préciser, Madame la ministre, qu'elles sont vos intentions, vos projets pour corriger le problème qui semble prendre de l'ampleur malgré les différents gouvernements qui se sont succédés. Les études abondent et les comités débordent. Il est évident que nous, les médecins des régions rurales sous desservies, attendons des solutions concrètes et surtout, des résultats. De plus, nous ne cherchons pas les coupables de cette crise.

Plusieurs solutions doivent être envisagées et elles doivent adopter plusieurs chemins innovateurs. Le tout commence par le nombre de postes en médecine et les conditions de leur attribution. La formation médicale doit permettre au futur médecin de développer les aptitudes nécessaires et la polyvalence indispensable lui permettant d'offrir une multitude de service de qualité en région. La fréquence et la durée des stages en région rurale doivent être accrus. La polyvalence en question implique nécessairement l'accès à des formations supplémentaires pour les omnipraticiens dans des domaines critiques tels l'obstétrique, l'anesthésie, l'urgence et la chirurgie. L'accès à une formation en région non-urbaine pour les résidents en spécialité devrait être accru et encouragé.

La qualité des soins passe par un rehaussement technologique diagnostique et thérapeutique. Il est important d'offrir aux professionnels de la santé les moyens nécessaires leur permettant d'offrir des soins de qualité en régions rurales. La mise en place d'un système de télé radiologie et l'accès à des équipements spécialisés tel le CT scan deviennent une nécessité grandissante.

Dans le domaine multidisciplinaire qu'est la santé, les ressources humaines en quantité insuffisante doivent être corrigées dans les plus brefs délais. Là aussi, la mise en place de solutions concrètes s'impose. Bien sûr il est question du nombre nécessaire d'infirmières et d'autres professionnels dans notre système de santé. Le manque d'effectif a un impact sur la qualité des soins. Il faut aussi penser à intégrer d'autres professionnels de la santé récemment reconnus tels les sages femmes aux équipes multidisciplinaires. Y a-t-il lieu de reconsidérer la structure de gestion de notre système de santé? Par exemple, la création des bureaux régionaux rurale ou bien d'un réseau rural de la santé qui gère les moyens mis à sa disposition dans les domaines du recrutement, de la gestion des budgets, etc. Est-il possible de gérer une enveloppe budgétaire non rattachée à celle du milieu urbain? Par contre, la structure et la hiérarchie administrative devront y être beaucoup plus simples, moins lourdes et moins frustrantes. Les services de santé en région rurale doivent être une entité palpable qui n'est pas diluée avec les problèmes que peuvent rencontrer les régions urbaines.

Pour revenir à la rémunération des médecins, elle devra refléter les priorités sociales. Elle doit aussi encourager la polyvalence essentielle au maintien des services indispensables en région éloignée.

Bref, nous demandons un plan précis de comblement des postes disponibles en médecine en région. Nous demandons que les moyens qui permettront d'offrir des soins de qualité à la population rurale soient présentés et appliqués dans les plus brefs délais. La société de médecine rurale, section Québec, et plusieurs médecins co-auteurs de cette lettre sont prêt à seconder le gouvernement dans la mise en pratique des solutions qui vont dans le sens des recommandations de cette lettre.

Nous espérons pouvoir travailler avec vous pour un système de santé efficace.

Sincèrement

Signé

Pascal Croteau
Président du CMDP, CLSC-CH-CHSLD du Pontiac

Maurice Lamarche
Président, Comité québécois de la SMRC

Martin Benfey
DSP, CLSC-CH-CHSLD du Pontiac

Vydas Gerukas
DSP, Centre de la santé Témiscamingue

Pierre Saint-George
DSP, CLSC-CH-CHSLD des Forestiers

Gary Satenstein
DSP, CH Gatineau Mémorial

© 2000 Société de la médecine rurale du Canada