Societas Criticus
On n'est pas vache…on est critique!
Vol. 3, no.2 Printemps-été 2001
Cette
revue est éditée à compte d'auteurs.
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Les questions éditoriales du
Critiqueur
Gouvernements, Société Civile et Citoyens!
Le sommet de Québec… ou l’affrontement des anarchistes !
Conclusion ou la mondialisation
humaine!
Pour nous rejoindre:
C.P. 182, Succ. St-Michel
Montréal (Québec) Canada H2A 3L9
Vous trouverez sur notre site des liens vers l'Agenda
et les Musts de Societas, le courrier critcus, nos
hyperliens de références, graffiti et autres. A
vous d'explorer les ressources que nous vous offrons et de nous faire part de
vos commentaires et liens d'intérêts.
Les co-éditeurs:
Michel
Handfield, M.Sc. Sociologie, Cynique-réaliste et Délinquant Intellectuel
pour penser autrement!
Gaétan
Chênevert, M.Sc. Adm. (productivité humaine), Diogénien
Soumission de texte:
Les envoyer par courriel. Si votre texte est en
fichier attaché, si possible le sauvegarder en format "rtf" (rich
text format) sans notes automatiques.
############## Index
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« Sur quoi il y a lieu d’observer que la haine est
autant le fruit des bonnes actions que des mauvaises; d’où il suit, comme je
l’ai dit, qu’un prince qui veut se maintenir est souvent obligé de n’être pas
bon; car lorsque la classe de sujets dont il croit avoir besoin, soit peuple,
soit soldats, soit grands est corrompue, il faut à tout prix la satisfaire pour
ne l’avoir point contre soi; et alors les bonnes actions nuisent plutôt
qu’elles ne servent. »
Machiavel, Le Prince, chapitre XIX
***
« Et qu’on ne vienne pas nous bassiner avec les
injustices de notre société, les tares de notre capitalisme et les
contradictions de nos esprits. Un monde libre est justement un monde ou on est
libre d’être injuste, taré et bourré de contradictions. Sinon, ça ne vaut pas
la peine! »
WOLINSKI, Ils vont tout casser (Le Square-Albin Michel, 1981), in Jérôme
Duhamel, 1985, Le grand méchant dictionnaire, Paris : Seghers, p. 296
***
« Une société n’est pas seulement un
système qui maintient ses règles et son organisation. Elle est aussi capable de
s’adapter à des changements internes et externes. Plus encore, à partir de ses
orientations culturelles et à travers ses conflits, ses mouvements sociaux et
ses décisions politiques, elle choisit ses modes de fonctionnement et de
changement. »
Touraine, Alain, (1973) 1993, Production de la Société, Paris: Le livre
de poche – biblio essais (sur la jaquette arrière)
############## Index
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La
ZLÉA… paradoxale!
Michel Handfield
Au moment où nous
mettons ce numéro de Societas Criticus en chantier, on est dans la semaine de
négociation de la Zone de Libre Échange des Amériques (ZLÉA), du Sommet des peuples à Québec et de la
Conférence de Montréal (semaine du 16 avril 2001). Societas Criticus ne peut
passer à côté de ces événements. Cependant, nous le ferons à la manière
Societas. Les grands quotidiens auront rapportés toutes les nouvelles
quotidiennes. Vous aurez tout vu le sensationnalisme et vous n’en aurez très
peu entendu parler après!
Nous, on rapportera ce
que nous aurons vu à Montréal et Québec. Mais nous aurons aussi réfléchis à
certains aspects que cela implique. On posera des questions à la manière de
Diogène le cynique, qui questionnait la validité des idées reçus, des dogmes et
des idéologies!
Le premier dogme
qui mérite d’être questionné est celui
des Amériques. Comme s’il y avait les Europes ou les Afriques! C’est là
reconnaître que l’Amérique, c’est d’abord les Etats-Unis. D’ailleurs, les
citoyens des États-Unis se qualifient d’Américains et non d’États-Uniens! Et
l’Amérique veut s’étendre au nord et au sud, Cela ne peut que colorer les
discussions.
Ainsi, quand on parle
de protection culturelle au sommet des Amériques, de quelle culture s’agit-il?
Quand on parle d’ouverture des marchés de l’eau et de l’énergie, c’est au
profit de qui? Quand on parle de permettre la libre circulation des biens,
c’est pour quel motif? Pour permettre aux entreprises des États-Unis de
produire là où les salaire sont les plus bas? Pourquoi, si on parle d’une zone
de libre échange des Amériques, ne parlent-on pas aussi de la libre circulation
des citoyens des Amériques? Pourquoi, le mexicain ou le salvadorien qui traverse la frontière
des États-Unis est-il hors la loi, mais pas le chandail qu’il fait dans une
usine sous payé alors que l’on a fermé une usine du Nord où les employés
syndiqués gagnaient un salaire décent? Pourquoi l’AFL-CIO ou la FTQ n’ont pas
le droit de le syndiquer? La libre-circulation syndicale, qui en parle?
Le sommet des Amériques ne changera pas cela,
que ce soit cette année ou dans les prochaines rondes de négociation. Car pour
ce faire il devrait s’appeler le sommet de l’Amérique et insister sur le fait
que l’Amérique est un continent où cohabitent différentes cultures et où l’égalité
– à défaut de l’équité – entre tous les américains est recherchée… Mais qui dit
égalité, dit aussi perte de conditions favorables de profitabilité pour les
entreprises multinationales qui peuvent jouer sur ces différences à leur
profit. Imaginer que la Chevrolet
cavalier ou la « New Beetle » de VW, toutes deux construite au
Mexique, devraient être vendues au ratio du salaire mexicain par rapport au
salaire États-Uniens ou canadien? Le consommateur bénéficierai ainsi de la
ZLÉA. Mais ce ne sont pas les consommateurs qui la négocient. En effet, comme
le travailleur mexicain gagne en moyenne moins de 2$/heure, alors que le
travailleur canadien de l’auto gagne en moyenne 20$ l’heure (1), lorsque vous
irez voir votre concessionnaire et qu’il voudra vous vendre sa voiture faite au
Mexique au prix d’une voiture faite au Canada, aux États-Unis ou en Allemagne,
dite lui que le salaire mexicain étant 10 fois moindre que le notre, sa facture doit être coupé d’autant! Le libre
marché, ça doit au moins nous servir à économiser, si ça coupe nos emplois! On
ene peut être perdant sur toute la ligne…
Le sommet des
Amériques est purement économique. Pour les États-Unis, c’est d’avoir accès à
une main-d’œuvre bon marché près de chez-eux qui importe. Pourquoi produire
dans les pays asiatiques et accroître ses coûts de contrôle et de transport
quand on peut produire à coût équivalent au Sud de ses frontières? Pour ses
voisins, c’est d’avoir accès au marché des États-Unis qui les fait saliver. Car
pourquoi chercher à exporter vers d’autres continents quand on est à côté d’un
des plus grands marchés du monde? Mais
quels seront les effets de cette vision égocentriste à long terme? Car on parle
d’ouverture, alors qu’en fait il s’agit d’une fermeture sur soi, sur le
continent. On ne regarde pas vers les autres continents. On se referme sur soi.
Il y a aussi un autre
paradoxe dans ce sommet. On nous parle de la ZLÉA comme devant favoriser la
libre circulation des produits et services dans les Amériques. Depuis une
décennie on nous chante que ce qui importe dans les entreprises d’aujourd’hui,
c’est le capital humain. Que nous sommes dans la société du savoir. Pourtant,
en même temps que l’on négocie cette zone de libre échange, on arrête aux
frontières tous les opposants potentiels à la ZLÉA. Et le libre échange des
idées on en fait quoi? Il semble qu’il est plus facile pour un film de cul de
passer la frontière, au nom du libre marché culturel, en ces jours de sommet,
que pour un Ph.D. de Harvard qui s’oppose à la ZLÉA! Vous dites libre
circulation… Êtes-vous sûr de ce que vous dites?
1. A sujet, voir Peso
Paradox: Mexican Economy Lures
Investment, but Is It Too Much Too Fast?, b y R O N S T A R N E R from From Site Selection
magazine, November 2000
Les questions éditoriales du Critiqueur
Argent à donner!
Michel Handfield
Annonce du Québec:
Pas
d'argent pour la Santé;
Pas d'argent pour l'éducation;
Pas d'argent pour les logements sociaux;
Par contre nous avons des millions en banque pour tous les demandeurs
corporatifs. Une seule condition: avoir un nom d'entreprise! Car on veut faire
partie du grand jeu de la Zone de Libre Échange des Amériques (ZLÉA) et de la
mondialisation.
Ce qui m'agace ce n'est pas la guerre des drapeaux lors de ce sommet de la
ZLÉA. C'est la connerie des discours politiques: tout le monde politique et des
affaires parle du libre marché et de la supériorité de l'économie de marché sur
l'économie planifiée ou étatisée. Tous sont à genoux implorant des
privatisation pour la bonne marche des affaires (ce que nous a confirmé
l’allocution de Jacques Lamarre, « L’État entrepreneur, l’État partenaire
et l’État rentier », à la Conférence de Montréal. L'État ne sait pas gérer
disent-ils... mais tous implorent les subventions gouvernementales et le
Gouvernement du Québec court après les entreprises pour les subventionner! Et
si on n’a pas assez d’entreprises à subventionner, on subventionne la Bourse!
Car la spéculation, c’est davantage important que de soutenir les écoles et les
hôpitaux!
Alors à quoi bon être à la table de la ZLÉA, si c'est pour parler de libre
marché et faire tout le contraire: de l’interventionnisme et de la
subventionnite aiguë! Soutenir des BS corporatifs (1)! Vaudrait mieux s'occuper
des citoyens!
Alors Monsieur Landry, si vous avez trop d’argents, donnez-en à Societas
Criticus, car nous distribuons notre revue gratuitement et la faisons à notre
compte. Ça ne nous paie pas, mais on considère que notre instruction doit
servir à quelque chose. Car avec une maîtrise, pas grand monde veut nous
engager dans une économie de chaîne de montage et de filiales de
multinationales! Peut être ne vous êtes vous jamais fait dire :
« C’est intéressant des gens avec votre formation, mais lorsqu’on en a
besoin on se tourne vers notre siège social aux États! » mais moi oui.
Alors quand on me parle de l’importance de l’éducation, que l’on coupe dans
l’éducation et que l’on subventionne les chaînes de montage, j’ai comme un frisson
dans le dos!
Que l’on soit d’accord ou non avec nos propos, Societas Criticus force le
lecteur à se questionner et à réfléchir. On fait donc œuvre d’éducation. Comme les cyniques le faisaient en un autre
temps où ce mot avait encore un sens noble. Dans une entrevue accordée à
Jacques Folch-Ribas, Gerald Messadié (auteur de Madame Socrate - Roman,
France: JC Lattès) nous dit de Diogène
le Cynique, que…
Diogène, un génie, qui nous
apprend à nous méfier de tous les systèmes de pensée. Le premier esprit libre,
bien plus que Socrate ou Aristote... et qui est absent de l'enseignement
universitaire, alors qu'il est le continuateur d'Héraclite, ou de Zénon...
Diogène qui se promenait nu, insolent, cynique, et professait le doute absolu,
analysant un système en fonction d'un autre système, et les trouvant tous
grotesques. Bien plus libre que Socrate, ou Platon qui a raconté des choses
qu'il n'a jamais vues. (2)
***
Pour ceux que la question des
cyniques intéresserait, nous vous conseillons la lecture de Michel Onfray,
1990, Cynismes, Paris : Le livre de poche, biblio essais
Notes :
1. Cette expression nous fut inspiré par Time Magazine qui a publié une
série d’articles sur le corporate welfare il y a quelques années.
2. La Presse, Dimanche 3 décembre 2000
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Le
centralisme!
Michel Handfield
Depuis des
décennies le Parti québécois en a contre le fédéralisme centralisateur. Par
contre ce même parti, qui revendique plus de pouvoirs au Québec, voir tous les
pouvoirs avec la souveraineté, décide des fusions municipales de façon
unilatérale au nom de l’efficacité économique! Bref on est face à un
nationalisme tout aussi centralisateur (et peut être même davantage
centralisateur, car il n’y aurait plus de partage des pouvoirs entre le Fédéral
et le Provincial dans un Québec souverain)
que le système Fédéral qu’il dit combattre! Ceci soulève déjà des questions évidentes.
Cependant il en est une qui l’est moins et que nous devons soulever.
Le centralisme est-il une caractéristique québécoise?
Si nous soulevons
cette question, c’est que les premiers ministres que le Québec qualifient de
promoteurs du fédéralisme centralisateur sont pour la plupart tous issues du
Québec – principalement Trudeau et Chrétien – d’un côté. D’un autre côté, le
Parti québécois a une forte tendance à centraliser tous les pouvoirs à Québec.
Même lorsqu’il parle de décentralisation,
il a tendance à faire des structures – comme le Ministère d’État à la
Métropole – pour s’assurer le contrôle des décisions.
C’est une
question à réfléchir, car la chicane Ottawa/Québec est-elle une chicane avec le
Canada ou une chicane entre québécois qui veulent tirer la couverte chacun pour
soi, c’est-à-dire avoir tous les pouvoirs là où ils sont (soit à Québec ou à
Ottawa) au dépends de l’autre partie? Peut être faut-il d’abord résoudre ce
problème entre nous avant de faire des choix socio-politiques qui engageront
notre avenir collectif. Car si le choix de la souveraineté en est un contre le
« centralisme » d’Ottawa et que nous nous réveillons le lendemain
matin avec un Québec centralisateur et paternaliste, serons-nous mieux comme
citoyens? Aurons-nous gagné ou perdu des espaces de libertés, car lorsque
personne n’a tous les pouvoirs peut-être les citoyens en ont-ils un peu? En sommes nous conscient et prêt à l’exercer?
Ce sont là des
questions que les citoyens et les militants des différents partis doivent
commencer à se poser, car il y a des rumeurs d’élections au Québec – fondées ou
non. Je sais, on va me dire que les gens ne s’intéressent plus à la politique.
En est-on si sûr, car en même temps qu’il y a une désaffection des jeunes
envers les Partis Politiques, ceux-ci étaient dans la rue pour défendre leurs
droits citoyens face à la Zone de Libre Échange des Amériques. On ne peut donc
parler d’un désintérêt de la Politique et de la chose publique. Par contre on
peut parler d’un désabusement face à la politique partisane et aux idéologies
des partis en place! Les politiciens et leurs équipes devraient peut être
commencer à s’inquiéter et à écouter les citoyens.
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Michel
Handfield
17 avril 2001
La conférence de Montréal a lieu du 17 au 20 avril 2001 et
s’intéresse à la question des Amériques et de la nouvelle économie. Une
occasion d’en savoir plus sur cette grande question, mais en même temps une
occasion d’échanges plus libre que dans les discussions officielles. C’est
l’impression que j’en ai eu ce soir à l’occasion de l’ouverture de la
conférence.
Il y eut aussi la présentation des lauréats du concours
Défi – Portes ouvertes sur les Amériques organisé pour les étudiants du niveau post-secondaire
par la Société pour l’Expansion des Exportations et la Fondation Canadienne
d’Éducation Économique. Les lauréats ont des préoccupations fort intéressantes
concernant le Commerce, la Démocratie et la Prospérité pour tous. Comme
certains l’ont remarqué, ils auraient pu être avec les manifestants à
l’extérieur. Ils ont plutôt partagé leurs préoccupations. Une façon de
travailler à l’avenir que l’on veut. C’est là une ouverture intéressante pour
une Conférence qui, somme toute, n’engage ni les Gouvernements, ni les
citoyens. (Le communiqué de presse du concours Défi – Portes ouvertes sur les
Amériques se trouve plus bas.)
Peut être que les
prochaines réunions de la ZLÉA (qui elles engagent les citoyens) devraient
s’inspirer de cette idée du partage et s’ouvrir, par Internet, à tous les
citoyens qui pourraient ainsi suivre les débats et émettre des commentaires.
Car veut-on d’une Amérique répondant à un modèle économique à la mode ou d’une
Amérique répondant à ses citoyens?
***
La FCEE
et la SEE félicitent les lauréats du Défi - Portes ouvertes sur les Amériques OTTAWA - Le 10 avril
2001 - La Fondation canadienne d'éducation économique (FCEE) et la Société pour
l'expansion des exportations (SEE) ont le plaisir d'annoncer les lauréats du
" Défi - Portes ouvertes sur les Amériques ", concours national qui
s'adresse aux étudiants de niveau post-secondaire basé sur les thèmes clés
qui seront abordés au Sommet des Amériques. Hier, au Cercle
national des journalistes à Ottawa, huit finalistes ont présenté leur plan
d'action respectif sur les moyens qui permettront aux jeunes Canadiens de
mieux saisir le nombre croissant d'occasions qui émergent un peu partout dans
les Amériques. Les diverses équipes se disputaient un premier prix de 5 000 $
et la chance de présenter leur plan aux délégués de la Conférence de Montréal
et du Sommet des Amériques. Les trois lauréats sont
les suivants : Brodie Boland, de la University of Calgary, Michelle Audas, de
l'Université du Nouveau-Brunswick et une équipe de l'Université McGill menée
par Stephanie Axmann ( et qui incluait Laen Herschler, Ketav Patel et Ameila
Smtih et Suzanne Pude). Ils recevront des prix de 5 000 $, 2 500 $ et 1 000 $
respectivement. Ils se rendront par la suite à Montréal, où ils présenteront
leurs idées aux délégués de la Conférence de Montréal, un sommet économique
annuel. Des copies des plans primés seront en outre distribuées aux délégués
du Sommet des Amériques, qui se tiendra à Québec vers la fin d'avril. Étudiant en
préadministration , M. Boland a soutenu l'hypothèse voulant que
l'entrepreneurship doit être appuyé par des stratégies qui favorisent la
collaboration, l'éducation et l'innovation comme catalyseurs de l'évolution
des Amériques sur les plans de l'économie, du développement social, de
l'éducation et du développement personnel. M. Boland est un passionné de
l'entrepreneurship et du développement international et il souhaite
contribuer au perfectionnement des personnes et de la société en appuyant
l'entrepreneurship dans les pays en développement. Mme Audas est étudiante
de première année du programme de MBA, et elle détient un baccalauréat en
Sociologie et en Études des femmes. Dans son plan d'action, elle proposait
l'établissement d'un programme d'échange interculturel visant à renforcer
l'importance de l'éducation et à créer des occasions d'emploi pour les
étudiants diplômés du niveau post-secondaire des pays développés. Comme
aspirations professionnelles, elle aimerait combiner son intérêt pour les
sciences sociales et son goût des affaires de sorte à travailler à
l'élaboration et à l'instauration de politiques publiques. Pour sa part, l'équipe
dirigée par Mme Axmann a proposé de mettre sur pied une organisation qui
favorisera le dialogue et l'éducation grâce à un forum de communication sur
Internet à l'intention de l'ensemble des jeunes des Amériques. Les jeunes des
divers pays pourraient alors partager des expériences, ce qui favoriserait l'avènement
de changements économiques et sociaux positifs dans leurs localités. Mme
Axmann et ses co-équipiers achèvent le programme de Développement
international. Organisé par la
Fondation canadienne d'éducation économique (FCEE) et la Société pour l'expansion
des exportations (SEE), le " Défi - Portes ouvertes sur les Amériques
" invitait les étudiants de niveau post-secondaire à rédiger un plan
d'action qui, dans un premier temps, devait exposer les raisons pour
lesquelles les jeunes Canadiens doivent participer à la vie économique des
Amériques et, dans un deuxième temps, définir les moyens à prendre pour
qu'ils soient plus aptes à saisir les occasions offertes sur ces marchés. De
façon plus précise, les étudiants ont été invités à exprimer leurs vues sur
les thèmes clés qui seront abordés au Sommet des Amériques : le renforcement
de la démocratie, la création de la prospérité, la réalisation du potentiel
humain et le renforcement des liens qui unissent les collectivités. Établie en 1974, la
FCEE est un organisme de bienfaisance apolitique sans but lucratif, qui a
pour mandat d'aider les Canadiens à parfaire leurs connaissances de
l'économie et leurs compétences à cet égard. La SEE offre aux
exportateurs et aux investisseurs canadiens des services de financement du
commerce extérieur et de gestion des risques sur quelque 200 marchés au
total. Créée en 1944, la SEE est une société d'État qui fonctionne comme une
institution financière commerciale. |
***
Hyper liens :
Fondation
Canadienne d’Éducation Économique
***
18 avril 2001
Aujourd’hui j’ai assisté au Forum
“Trade and prosperity at the summit of the Americas in Québec”.
Pour la première partie j’étais mal placée – près des
traducteurs – et les différentes langues se mêlaient aux conférenciers. Après
la pause je fus mieux placée. Malgré que l’anglais ne soit pas mangue première,
j’ai quand même assez bien suivi. Et voici ce que j’en retiens, mêlé à mes
réflexions.
En gros, il est clair que la mondialisation ouvre à la
fois des opportunités de développement (nouveaux marchés) mais amène aussi de
nouveaux concurrents. Des entreprises et des secteurs industriels devront se
réajuster face aux conditions des autres pays (qui ont des normes sociales et
environnementales beaucoup plus faibles). Pour certains cela signifie des
conditions à la baisse. C’est d’ailleurs la position des opposants à la ZLÉA.
Mais pour
d’autres, les gens de ces pays vont vouloir améliorer leurs conditions. Des
liens vont s’établir entre groupes de pressions (syndicats, féminisme,
environnement, etc.). Des alliances supra-nationales se créeront aussi dans les
groupes revendicatifs. On le voit d’ailleurs avec le Sommet des peuples.
Internet y jouera aussi un rôle pour diffuser autant
les bonnes que les mauvaises informations. Des pressions pourront ainsi se
faire. La globalisation (à l’Amérique) et la mondialisation contribueront ainsi
à accroître les standards de vie. Naturellement l’implication citoyenne et du
travail politique sera nécessaire pour faire de l’Amérique du libre-échange
économique une Amérique sociale et politique répondant à ses citoyens.
Cette conférence était organisé par la Fondation
Canadienne pour les Amériques. Leur site est :
******
19 et 20 avril, 2001
Le 19 j’ai d’abord assisté au forum sur les
biotechnologies et ce fut fort intéressant. Craintes et espoirs se côtoient.
Nous y reviendrons dans la revue, car nous avons plusieurs choses à vérifier
sur ce dossier. En après-midi ce fut le
Forum sur les énergies. Là on parle de libéralisation des marchés de l’énergie
comme étant à l’avantage des consommateurs! Ici j’ai des doutes, car le marché
du pétrole est un libre marché… et la concurrence est loin de signifier une
baisse des prix. J’ai d’ailleurs souligné ce fait à la période de question. La
réponse fut qu’un libre marché permet d’ajuster sa consommation aux hausses et
aux baisses de prix! C’est Thierry Vandal, « Executive Vice President –
Generation » à l’Hydro-Québec qui m’a fait cette réponse. Est-ce à
dire que lorsque les prix vont être bas on va pouvoir dire à l’Hydro que l’on
paie tout de suite notre consommation annuelle! Ah oui, je n’ai pas mis son
titre en anglais par erreur. Ce monsieur à dit « Je souhaite à tous un
séjour agréable et fructueux dans notre métropole. » et tout le reste de
son allocution fut en anglais. Après le Gouvernement Québécois nous parlera du
Québec français! Les sud-américains n’avaient pas honte de leur langue eux et
parlaient espagnol. Et les représentants fédéraux que j’ai vu passaient
allègrement du français à l’anglais et je les en félicite d’ailleurs!
Le vendredi, au forum sur les services publics, le
même phénomène linguistique m’a frappé. Michel Vennat, de la Banque de
Développement du Canada, parlait allègrement dans les 2 langues. Jacques
Lamarre, président et chef de la direction de SNC-Lavalin, a parlé en anglais
et les gens d’Amérique latine en
espagnol. La période des question fut exclusivement en français et seulement 1
ou 2 personnes avaient recours à la traduction – moins que lorsque c’était en
anglais. C’est donc dire que le français aurait facilement pu être utilisé par
les francophones. J’en ai pas contre l’anglais, loin de là. Sauf que si la
langue pour avancer dans la vie et devenir cadre supérieur au Québec est
l’anglais – et c’est le message que le Québec m’envoyait à cette conférence –
alors qu’on montre l’anglais à l’école et qu’on arrête les chichis sur le
français et la loi 101. Car là mon impression est que le Québec veut des élites
qui parlent anglais et une main-d’œuvre limitée au français pour être ainsi des
prisonniers géo-linguististiques. Le Québec pourra ainsi offrir une
main-d’œuvre captive à rabais. Pour le profit de qui?
Quant au sujet de ce forum, sur les services publics
et privés, ce qui m’a frappé, fut l’allocution de Jacques Lamarre sur
« L’État entrepreneur, l’État partenaire
et l’État rentier »! Bref le privé gère mieux! En fait cela m’a
heurté, car les gestionnaires du privé et du public sortent souvent des mêmes
écoles! Alors, je n’ai pu m ‘empêcher d’intervenir à la période des
questions pour souligner que si le privé gère mieux, testons-les. Fermons tous
les ministères à vocation économique et arrêtons tous les programmes de
subvention aux entreprises, car plusieurs entreprises à succès reçoivent des
millions et des millions du publics en aide…
S’ils réussissent sans aide de l’État, alors ce sera la preuve que c’est
vrai. Sinon… Ne privatisons donc pas trop vite.
M. Vennat, de la BDC, a effectivement reconnu que certaines entreprises
publiques sont bien gérées. Cependant dans certains cas la politique leur nuit.
D’autres formes doivent alors être examinées et pas uniquement les
privatisation. Des OSBL publics peuvent aussi être formées.
############## Index ##################
Gaétan Chênevert
Québec, le jeudi 19
avril 2001
Sous le chapiteau
situé au vieux port de Québec, j'assiste à un grand rassemblement du Sommet des
peuples où plusieurs centaines de personnes provenant des différents pays de
l'Amérique, discutent les conclusions des ateliers ― forum sur les droits
humains, des femmes, des communications, le rôle des États, de l'éducation,
l'environnement, l'agriculture et le forum syndical ― et à l'arrangement
final de la déclaration des peuples. La
société civile s'exprime haut et fort en français, anglais, espagnol et
portugais. Je n'ai jamais vu autant de diversités sous un chapiteau, l'Amérique
est multiple. Une société civile vivante, hétérogène, articulée, militante et
passionnée qui a son mot à dire dans la construction de l'Amérique.
Juste à côté dans un
Hall d'exposition se trouvait la salle de presse où les principaux
organisateurs du Sommet des peuples et des ateliers tenaient leurs conférences
de presse. Toujours pleine à craquer,
plusieurs représentants d'organismes tels que "Social Watch, l'Alliance
sociale continentale et plusieurs autres venaient tour à tour annoncer et présenter aux médias alternatifs
et traditionnels les conclusions de leurs rapports ou d'autres communiqués
importants. Bravo aux représentants du
Sommet des peuples qui ont accompli un travail gigantesque. Mission accomplie.
Seule ombre au
tableau, à l'exception du chef du nouveau parti démocratique à Ottawa Mme Alexa
McDonough, et quelques députés du bloc québécois dont Stéphane Tremblay, Pierre
Paquette et sûrement quelques autres qui étaient présents dont je n'ai pas vu ─
je les félicite d'ailleurs de leur présence et de leur soutient et engagement ─
où était donc nos élus, les plus que vrais, ceux qui peuvent amener, débattre
et décider de ces enjeux majeurs aux parlements ? Savent-ils vraiment de quoi il est question
avec la ZLÉA ? Preuve qu'ils n'ont aucun pouvoir sur ces grandes questions, ils
sont évacués du processus même de négociation. Au lieu de débattre dans nos
parlements des enjeux cruciaux qui auront un impact sur tous les peuples de
l'Amérique, on débat sous un chapiteau dans le vieux port de Québec. C'est la
société civile qui prend en main les dossiers, les analysent, les dissèquent et
proposent des solutions aux chefs d'États. N'oublions pas que le Sommet des
peuples ― pour répondre au totalitarisme imposé par les financiers et les
multinationales dont nos gouvernements sont complices ― a été organisé
par la société civile et non les parlementaires. C'est une honte et une preuve
sérieuse du recul de la notre démocratie telle qu'on l'a connue.
Approuver et soutenir
la société civile en public est gênant, on pourrait se faire réprimander par
son parti, ses pairs ou essuyer une motion de blâme de l'assemblée nationale
dont le chef de l'opposition Le Grand Jean Frisé Charest est passé maître. La sanction est lourde de conséquence,
rétrogradé ou mise à la porte. La
carrière est beaucoup trop importante, y a des moments où il faut tenir ça
mort. Vous savez, la ligne de partie et la solidarité ministérielle, faut pas y
déroger vous risquez d'être lynchés. À
Québec vous avez perdu encore plus notre confiance, vous n'êtes plus crédible.
À quoi servez-vous donc ? Comme le dit
si bien notre chanteur préféré Daniel Boucher ces temps ici, «Vous êtes dont où
?».
Gaétan Chênevert
Voici les textes des
conclusions des principaux ateliers et la déclaration finale du deuxième sommet
des peuples, Ville de Québec, avril 2001.
Le texte du forum des communications est en anglais et celui agraire est
en portugais je crois. Vous trouverez
également le texte intégral de la Déclaration de Québec cosignée par les 34
chefs d'États et de gouvernement au IIIe Sommet des Amériques.
Forum
Communications(anglais)
Déclaration finale du Deuxième Sommet des peuples
des Amériques
Ville de Québec, le 19
avril 2001
La déclaration de Québec (Sommet officiel)
Ville de Québec, le 22
avril 2001
·
La déclaration universelle des droits de l'Homme et les traités des
droits humains qui en découlent ont préséance sur tout traité international, y
compris sur les accords de commerce. Les
accords bilatéraux ou multilatéraux concernant les échanges commerciaux ou les
investissements doivent en conséquence répondre explicitement au principe de la
primauté des droits humains. Les États
parties à ces accords doivent s'engager à respecter de façon inconditionnelle
les Pactes et Conventions internationaux et régionaux énonçant aussi bien les
droits civils et politiques que les droits économiques, sociaux et culturels,
le droit à la paix, le droit au développement, et le droit à un environnement sein
et protégé. Tout au long du Forum sur
les droits humains, nous avons constaté que les accords de libre-échange en
vigueur ou en négociation sont incompatibles avec les droits humains.
·
La négociation de tout accord d'intégration ou de commerce doit répondre
aux exigences de transparence et de démocratie.
Les négociations ou accords qui ne respectent pas ces règles doivent
être interrompus. Les citoyens et
citoyennes ainsi que les organisations les représentant doivent avoir plein
accès aux informations concernant le contenu des négociations
intergouvernementales ainsi que les moyens et l'opportunité de pouvoir se
prononcer sur le contenu et l'éventuel ratification des accords. Les gouvernements doivent leur assurer les
ressources nécessaires à l'exercice de cette participation citoyenne.
·
Le système de protection interaméricain des droits humains doit
s'assurer que tout accord de commerce soit assujetti au principe de la primauté
des droits humains. Les États des
Amériques doivent prendre l'engagement d'augmenter immédiatement et de façon
significative le financement et les ressources du système interaméricain de
protection des droits.
·
Le Forum des droits humains a décidé de prendre les moyens pour le
développement d'un travail commun jusqu'au prochain sommet afin de permettre
une plus grande connaissance et appropriation du principe de la primauté des
droits, et d'assurer un suive des autres recommandations du Forum.
Résumé des grandes conclusions du forum des femmes
Depuis le 1er
Sommet des peuples des Amériques à Santiago en 1998 le vécu quotidien des
femmes s'est dégradé:
·
Victimes de l'érosion de la protection sociale dans tous les pays des
Amériques;
·
Victimes des coupures massives dans les services publics les
contraignant à accroître le travail domestique et les responsabilités
familiales (soin des malades, des personnes âgées, des enfants, etc.);
·
Exacerbation des violences envers les femmes dans le cadre du travail
comme dans la famille et dans la société;
·
Appauvrissement des femmes par la généralisation massive du chômage, de
la précarisation et de la flexibilité du travail;
·
Atteinte aux droits démocratiques en particulier au sein des
maquiladoras et des zones franches, etc.
Bref, les femmes sont
vraiment les premières victimes de la mondialisation !
Notre analyse…
L'ensemble des débats
a réaffirmé la pertinence de l'analyse féministe et des rapports sociaux de
sexe. En effet, nous constatons que
partout dans le monde les femmes ont à souffrir d'une oppression spécifique
basée sur des discriminations massives et des traitements inégalitaires. La mondialisation exacerbe cette
oppression. La mondialisation est
sexiste.
Nos alternatives…
Le Sommet des peuples
a été pour les femmes présentes au forum une suite logique de la Marche mondiale
des femmes en l'an 2000 par son implication concrète dans la lutte
anti-mondialisation néo-libérale. Nous
avons donc réaffirmé notre volonté de continuer à porter les revendications de
notre plate-forme mondiale notamment concernant la pauvreté.
De plus, les femmes
ont tenu à dire haut et fort leur volonté de développer encore davantage les
liens de solidarité entre les femmes du sud et du nord, toutes concernées par
les effets de la mondialisation vécue dans les Amériques. Elles ont aussi dit l'importance de
travailler avec l'ensemble des réseaux féministes présents dans les Amériques
incluant le Réseau femmes de l'alliance sociale continentale.
Il nous a semblé
indispensable de continuer à construire et à consolider notre réseau féministe
mondial, seul instrument capable de porter notre lutte afin de construire un
monde égalitaire entre les hommes et les femmes.
Il est par conséquent
incontournable que les militantes et militants présents dans les autres forums
se saisissent de l'analyse féministe et l'intègre dans leur combat quotidien.
Message aux chefs
d'État:
Soutien financier aux
groupes luttant pour l'égalité des femmes et des hommes !
S'engager à mettre en
place les grandes recommandations préservant les droits des femmes dans les conventions
internationales, l'analyse différenciée selon les sexes, etc.
Une société
démocratique se juge par la façon dont les femmes sont prises en compte : EN
AVANT POUR L'ÉGALITÉ RÉELLE ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES !
At the
first People's Summit, communication was not even conceived of as a sector in
its own right. Therefore, it was not
recognized as a critical strategic sector in the struggle to democratize
society. Since 1998, four major trends
have matured :
A kind of «universal,
neutral» information has been imposed negating pluralism, and cultural,
linguistic and gender diversity. Despite
these trends, there has been phenomenal growth of the community and independent
media sector, evidenced by the forum on communications which has been held at
the 2nd People's Summit of the Amaricas.
We urge the
People's Summit at large to join with the Forum on communications in
recognizing that communications is a critical sector of social struggle and
that it is a human right that underpins all other human rights. Consider the media campaign that has been
launched to oppose the FTAA. Further, we
urge the People's Summit to consider this reality in future planning and to
give the topic of importance it deserves on both the theoretical and practical
levels. Finally, we call for your
support of the following recommendations:
Based on
these recommendations, this is a work in progress. This document is a preliminary version of the
chapter on communications to be included in the Alternatives of the Americas
document. A fuller version will be
developed over the next few months prior to the compilation of the next edition
of the Alternatives of the Americas document based on the ongoing input from
the participants of the Communications Forum and the existing networks and
organizations which have been parties to this process. The Communications Forum submits this process
for approval and support to the plenary session of the 2nd People's
Summit.
The Forum
on Communications at the 2nd People's Summit of the Americas was
attended by representatives from Nunavut to Tierra Del Fuego who gathered to
strategize about means of insuring the democratization of media and thereby our
societies. We recognize that the Right
to Communicate is a universal human right which serves and underpins all other
human rights and which must be preserved and extended in the context of the new
challenges of globalization. It should
be recognized that community media has directly and substantially contributed
to the democratization of political system including the overthrow of
repressive regimes. Although we came
together primarily from the Western Hemisphere, we believe these principles to
be universal and commit to the realization of them globally.
Rapport du forum sur le rôle des États…
Nouveaux éléments
depuis Santiago
Le néo-libéralisme
s'accentue comme courant dominant et l'arrivée au pouvoir du président Bush
accentue cette tendance. Contrairement à
toute logique Cuba est toujours absent des négociations. Déjà plusieurs pays, dont le Canada et le
Mexique, ont été poursuivis dans le cadre de l'ALÉNA et ont perdu des millions
de dollars contre les multinationales.
Par ailleurs, la marche mondiale des femmes a bien illustré la
conscientisation grandissante des peuples sur les conséquences du courant
néo-libéral dans l'accentuation de l'exclusion, de la pauvreté et de la
violence. En dépit de cette
mobilisation, on constate partout la mise en place de conditions favorisant
l'application d'une éventuelle ZLÉA.
Plusieurs pays du Sud sont sur la voie de la dollarisation. Nous observons aussi une augmentation de la
violence policière et de la répression.
Les murs qui entourent la négociations actuelles en sont un symbole
éloquent.
Les Alternatives identifiées
1.
Que les gouvernements défendent le bien commun. La prise en compte du bien commun devant
s'exercer dans le cadre :
Ø
D'une démocratie participative au niveau local, régional et international,
reposant sur l'équité, la justice sociale et l'autodétermination des
peuples. Tout accord doit, dans ce sens,
être soumis à un référendum populaire;
Ø
D'une politique fiscale qui garantisse une véritable redistribution de
la richesse et un filet de sécurité sociale permettant d'assurer les besoins
essentiels;
Ø
De moyens légaux permettant de poursuivre en justice les entreprises qui
portent atteinte aux droits fondamentaux.
2.
Que les gouvernements reconnaissent la primauté des conventions et des
pactes internationaux en matière de droits humains sur toute forme d'accord
économique, social ou autre;
3.
Que l'État reconnaisse le droit inaliénable à la santé avec un accès
véritable à des services publics universels, accessibles et gratuits;
4.
Que la dette publique des pays du Sud soit abolie afin de leur permettre
de se doter de services sociaux adéquats;
5.
Que les gouvernement concernés se retirent de l'ALÉNA.
6.
Que les clauses sur la protection de la propriété intellectuelle soit
abolies de tout accord;
7.
Que l'aide publique au développement des pays du Nord vers les pays du
sud serve véritablement les intérêts des pays du Sud et non `renforcer les
politiques commerciales.
Cette aide doit
appuyer prioritairement les programmes sociaux et les organisations de la
société civile.
Le plan d'action
Consolider l'Alliance
sociale Continentale :
Ø
En se dotant d'une organisation plus permanente et mieux structurée à
l'échelle continentale dans le but de réaliser ses objectifs;
Ø
Dans son rôle d'éducation populaire pour une prise de conscience
grandissante de la population à propos des enjeux de ces accords
particulièrement sur les conditions de vie des femmes, des enfants et des
personne vulnérables;
Ø
En élaborant des définitions communes des concepts utilisés fréquemment
comme : consensus, équité, développement, économie solidaire, etc.
Ø
En organisant une campagne internationale sur les enjeux de la ZLÉA et
en exigeant que les gouvernements se retirent de l'ALÉNA;
Ø
En consolidant les alliances entre le mouvement syndical et le mouvement
social à l'intérieur de chaque pays et à l'échelle continentale.
Message aux chefs d'États
Considérant que la
ZLÉA signifie l'effritement de la souveraineté des États;
Considérant la
nécessité de la primauté des droits sociaux et humanitaires sur les accords de
commerce;
Considérant que nous
refusons la marchandisation des services publics;
Considérant que le
rôle de l'État consiste prioritairement à redistribuer équitablement la
richesse et à défendre le bien commun;
Considérant que la
ZLÉA signifiera l'accroissement de l'exclusion sociale et des reculs dans les
acquis sociaux;
Nous nous opposons à
la signature de la ZLÉA.
En signant cet accord
vous trahissez vos peuples et vous perdez votre légitimité d'élus. Nous serons sur votre chemin pour vous en
empêcher.
LA CONJONCTURE
DEPUIS LE SOMMET DE SANTIAGO
·
La majorité des pays ont continué à investir en éducation moins de 5% de
leur PIB.
·
Près de 50 millions de personnes analphabètes, en grande majorité des
femmes et presqu'en totalité des pauvres, se retrouvent dans nos pays.
·
5% des enfants sont toujours à l'extérieur de l'école.
·
35% des enfants et des jeunes ne font pas plus de 5 années d'école.
·
50 millions d'indigènes ou autochtones ne sont pas respectés au plan
culturel et linguistique.
·
Les réformes éducatives se font dans l'improvisation et dans la majorité
des cas sans aucune participation.
·
La qualité de l'éducation publique est encore loin des besoins de la
société et des engagements de Santiago.
·
La marchandisation et l'utilisation des normes du milieu des affaires
(exemple coût-bénéfices) s'accroissent à l'intérieur du système éducatif au
détriment des valeurs de développement intégral de la personne.
·
L'éducation technique et professionnelle est devenue utilitariste pour
répondre aux demandes du marché et des entreprises au dépend d'une formation
large et polyvalente.
·
La recherche sociale, scientifique et technique est mal financée et soumise
à des contraintes et des intérêts qui réduisent son autonomie.
·
Les États continuent de transférer leur responsabilité eu égard au
financement de l'éducation publique au niveau des communautés locales et des
familles par la privatisation et la décentralisation.
Tout le continent
connaît une augmentation de la pauvreté, du chômage, de l'injustice et de la
violence sociale. L'équilibre écologique
est fragile et menacé par la déforestation e la pollution. Ainsi les droits démocratiques et l'éducation
en subissent les conséquences.
L'école ne peut pas à
elle seule solutionner ces problématiques et nous demandons une intervention
active de la part des états à renverser la situation.
ALTERNATIVES ET
PROPOSITIONS
·
Refuser d'inclure l'éducation dans l'accord de la ZLÉA et dans les
autres traités commerciaux
·
Assurer que l'éducation est une politique des états
·
Accroître à au moins 8% du PIB la part de la richesse collective
destinée à l'éducation publique
·
Réduire des budgets consacrés aux dépenses militaires et au financement
de la dette illégitime et réinvestir les sommes dégagées dans les programmes
sociaux, notamment en éducation
·
Se doter d'un plan triennal d'investissement fondé sur des objectifs
précis d'alphabétisation, de scolarisation, d'augmentation de l'accessibilité
et de la réussite ainsi que sur des objectifs de réduction des inégalités
·
Mettre fin au processus de privatisation et de décentralisation, en
cours
·
Créer et renforcer les services à la petite enfance, notamment les
services de santé, les services de garderie et l'éducation préscolaire
obligatoire et gratuite pour les enfants de 4 et 5 ans, en encourageant l'accès
des filles
·
Élaborer et mettre en œuvre, en consultation et en concertation avec la
société civile, des programmes d'action en faveur d'une plus grande justice
sociale, surtout par le biais d'un soutien aux enfants et aux familles à fin de
réduire les inégalités
·
Respecter les accords, déclarations ou pactes internationaux signés,
notamment la Convention des Nations Unies relatifs aux droits de l'enfant,
particulièrement en ce qui concerne la suppression du travail des enfants
·
À tout mettre en œuvre à fin que les adultes soient alphabétisées et
scolarisés avec l'étroite collaboration des organisations éducatives et
syndicales
·
assurer un accès égalitaire et gratuit à tous les niveaux d'éducation, y
compris à l'enseignement supérieur
·
Financer adéquatement la recherche en enseignement supérieur pour
assurer son autonomie
·
Assurer que les réformes éducatives répondent aux besoins des peuples et
des populations les plus démunies avec la participation des organisation
syndicales et communautaires
·
Prioriser la formation, le perfectionnement et le recyclage des
travailleurs et des travailleuses de l'éducation de façon continue, gratuite et
accessible
·
Favoriser l'utilisation des NTIC sans toutefois que ces technologies
remplacent une éducation de qualité assurée par les éducateurs eux-mêmes
·
Offrir aux communautés indigènes et aux peuples autochtones une
éducation qui respecte leur culture et leur langue
·
Assurer une éducation qui valorise la diversité ethnique et la pluralité
culturelle ainsi que l'égalité entre les femmes et les hommes quelles que
soient leur origine ethnique, leur orientation sexuelle ou leurs croyances.
Nous rejetons toute
limitation au droit d'apprendre. Nous
exigeons la pleine démocratisation du système éducatif par un enseignement pour
toute la vie, adapté aux besoins des étudiantes et des étudiants, en particulier
les femmes, les adultes, les enfants de la rue et de la guerre, les personnes
handicapées, les personne marginalisées.
PLAN D'ACTION
Afin d'assurer
l'atteinte des objectifs de la Déclaration commune issue du Forum continental sur
l'éducation tenu les 17 et 18 avril 2001, les organisations hôtes s'engagent à
rechercher le financement nécessaire à la réalisation du plan d'action suivant
auquel collaboreront les organisations régionales, continentales et mondiales. NOUS VOULON:
·
Assurer la surveillance des engagements pris par les chefs d'états en
matière d'éducation lors des Sommets de Santiago et de Québec ainsi que des
travaux sur l'éducation qui seront réalisés sous la direction des ministres de
l'éducation du continent, notamment en ce qui a trait aux projets des
indicateurs continentaux en éducation et d'évaluation de l'éducation
·
Poursuivre les actions et les stratégies organisationnelles visant à
soutenir l'éducation publique comme droit des peuples et à promouvoir comme une
option supérieure à la privatisation et à la commercialisation
·
Agir au plan international continental, régional et national pour exiger
des chefs d'États l'exclusion de l'éducation à titre de services pouvant être
marchandisés
En ce sens, les
organisations présentes au forum s'engagent à :
·
Collaborer à la réalisation du plan d'action
·
Assurer la diffusion la plus large possible de la déclaration commune
dans une perspective d'information, de sensibilisation et d'éducation
·
Favoriser la participation au Forum sur l'éducation du Forum social
mondial qui se tiendra à Porto Alegre au début de 2002.
MESDAMES ET MESSIEURS
LES CHEFS D'ÉTAT:
L'ÉDUCATION N'EST PAS
À VENDRE, L'ÉDUCATION EST UN DROIT SOCIAL FONDAMENTAL.
Déclaration du Forum Environnement
Nous citoyennes et
citoyens des Amériques, acteurs et actrices de la société civile engagé(e)s à
protéger l'environnement, nous nous opposons aux accords annoncés de la ZLÉA et
de tout autre accord de même nature.
Nous observons et
dénonçons :
·
Que les accords de libre-échange aggravent les inégalités entre riches
et pauvres, entre hommes et femmes, entre pays du Nord et pays du Sud, et
détruisent les liens écologiques entre l'espèce humaine et
l'environnement. 20% de la population
mondiale consomme 80% des ressources naturelles de la planète.
·
Que les accords de libre-échange des Amériques vont à l'encontre de la
démocratie, du respect de l'environnement et des droits humains ainsi que de la
diversité culturelle.
·
Que les accords de libre-échange contribuent au développement d'une
économie orientée vers l'exportation au détriment des besoins des communautés
locales. On assiste à la consolidation
du pouvoir économique et légal corporatif au détriment du pouvoir des citoyens.
·
Que les traités de libre-échange favorisent la marchandisation des biens
communs de l'humanité et de la planète (eau, patrimoine génétique, etc.). Cette privatisation des richesses collectives
accorde des droits exclusifs à une minorité de nantis et contribue à
l'appauvrissement de la majorité. La
logique néo-libérale réduit le citoyen en simple consommateur et ultimement, en
marchandise. Elle brime les approches
culturelles holistiques ou spirituelles.
·
Que les accords de libre-échange contribuent à l'intensification des
modes de production et de consommation non-durables et entraînent la
destruction de l'environnement. Ils
favorisent les rendements à courts termes sans comptabiliser les coûts
environnementaux et sociaux des biens et services. La dette écologique et sociale créée n'est
pas assumée par les entreprises qui en profitent mais par l'ensemble des
habitants actuels et futurs de la planète.
·
Que les accords de libre-échange incite le démantèlement des États et l'affaiblissement
de leurs lois environnementales et sociales, notamment par le biais de la
déréglementation afin d'accroître leur compétitivité sur les marchés
internationaux. Puisque les coûts
environnementaux et sociaux ne sont pas inclus dans le prix payé par les
consommateurs, le libre marché stimule des pratiques qui mettent en péril
l'équilibre écologique de notre planète, exploitent la main d'œuvre et
hypothèquent les capacités de la population et des générations futures à
subvenir à leurs besoins. Les traités de
libre-échange actuels se traduisent donc en accords de "libre
exploitation" des ressources environnementales et humaines.
·
Au moyen de leurs structures légales les accords de libre-échange ont
généralement préséance sur les accords internationaux, visant la protection de
l'environnement et de ses habitants et sur les lois nationales. Ils affaiblissent donc le pouvoir de telles
initiatives et dans certains cas ils les rendent même caduques.
Afin d'assurer la
mondialisation des solidarités, c'est-à-dire une mondialisation citoyenne qui
respecte l'environnement et les droits de la personne et cela pour les
générations présentes et futures, nous croyons que les conditions nécessaires
sont :
Par la présente,
nous affirmons notre engagement à travailler solidairement à la mise en œuvre
de stratégies locales, régionales, nationales et internationales assurant la
protection de l'environnement et le respect des droits économiques, sociaux et
culturels des populations. Ces mesures
et initiatives émergent du local vers le global et non l'inverse. Celles-ci doivent s'appuyer sur :
·
L'instauration et l'amélioration de normes de production et de
commercialisation qui respectent l'environnement et la société. Celles-ci doivent être adaptées aux réalités
sociales, économiques et écologiques de chaque région. Les études d'impacts environnementales et
communautaires faisant l'objet de consultations publiques démocratiques doivent
être obligatoires. Les décisions doivent
être prises en considérant les impacts sur les sept générations futures. Les résultats doivent être évalués
publiquement et démocratiquement.
·
L'investissement immédiat et continu dans l'éducation et la
sensibilisation aux enjeux environnementaux de la citoyenneté. Les groupes de base doivent pouvoir
bénéficier de fonds leurs permettant d'offrir des contre-expertises lorsque nécessaire
et d'interpeller l'ensemble de la population aux impacts de la mondialisation
sur leurs communautés.
·
La mise en place de programmes d'éducation relative à l'environnement,
autant dans le milieu scolaire que communautaire. Ces programmes, de même que l'ensemble du
milieu scolaire, doivent être exempts de publicité et de commandites privées.
·
L'investissement en entreprises sociales et communautaires respectueuses
de l'environnement et axées sur le développement économique local et régional
en gestion de déchets, foresterie, agriculture, consommation, énergie, etc., et
ce, afin de consolider et développer les alternatives émergeantes.
·
La création d'une Alliance civile continentale et la mise en œuvre d'un
secrétariat permanent de réseautage des organisations citoyennes afin de
faciliter le partage d'information et la coopération entre organismes de la
société civile de tout le continent et la mise en place de mécanismes originaux
d'autofinancement indépendants des entreprises et des gouvernements. Ce secrétariat faciliterait l'implication des
groupes de base dans le processus décisionnel aux niveaux local, national et
régional. Il contribuerait ainsi à mieux
protéger les intérêts des citoyennes et des citoyens ainsi que
l'environnement. Il créerait un
contrepoids aux forces de lobbies industriels et financiers.
·
L'imposition d'un système d'étiquetage national et international
informant les consommateurs et consommatrices des impacts environnementaux et
sociaux des produits mis sur le marché.
La mise en œuvre du
contenu de cette déclaration nécessite l'engagement des gouvernements, des
entreprises, des acteurs et actrices de la société civile ainsi que des
citoyens et des citoyennes.
N.B. : Les points
présentés dans ce document résume du mieux possible l'ensemble des discussions
du Forum Environnement. Un document plus
complet rapportant les recommandations de chaque atelier et de la plénière sera
disponible dans les prochaines semaines au Réseau québécois des groupes
écologistes (RQGE).
« L’Amérique
n’existe pas sans nous ! »
Les
participants au Forum agraire des 17 et 18 avril se sont mis d’accord sur le
fait que le libre-échange a dévasté l’agriculture à la grandeur du continent.
Parmi les quelques 100 fermiers, travailleurs du domaine agricole,
organisateurs et militants représentant
près de 20 pays, le leitmotiv était que la déréglementation
gouvernementale, la surproduction pour les marchés étrangers et l’utilisation
irresponsable de technologies nouvelles et non éprouvées ont fait plonger les
standards environnementaux, les normes du travail et les revenus nets des
fermiers dans des abîmes inédits, en plus de forcer plusieurs agriculteurs à se
défaire de leurs terres.
Selon la National Farmers Union (NFU), les revenus générés par les
exportations canadiennes des produits de l’agriculture ont triplé entre 1974 et
2000. Au cours de la même période, cependant, les revenus nets des fermiers ont
chuté, leurs fournisseurs récoltant jusqu’à 100 % de leurs profits bruts.
« On nous avait promis un immense nouveau marché pour nos
semences, au Sud », déclare David Orchad, un fermier biologique et
cofondateur du groupe Citoyens concernés par le libre-échange. À la place de ce
nouvel éden, les fermiers de sa communauté, en Saskatchewan, on vu leurs
revenus nets chuter de 10 % en dix ans.
Des témoignages similaires se sont succédé tout au long des deux jours
de discussions. Renwick Rose, entre autres, un organisateur de Via Campesina, de
St-Vincent, a décrit comment une décision de l’Organisation mondiale du
commerce, interdisant à l’Union européenne d’établir un régime
préférentiel pour l’importation de
bananes a coûté leur emploi à plus d’un tiers des bananiers des Caraïbes.
La nécessité pour les peuples indigènes de se réapproprier leur droit à
la terre, ainsi que leur propriété culturelle et intellectuelle, fut mentionnée
à maintes reprises comme étant une priorité absolue. Dans une lettre lue à par
l’un de ses membres, le Congrès national indigène mexicain a dénoncé le
gouvernement mexicain pour l’ouverture de ses frontières aux corporations
transnationales et au pillage aveugle de ses ressources naturelles.
« Le Mexique n’existe pas sans nous. L’Amérique n’existe pas sans
nous. Nous ne renoncerons pas à nos droits d’exister en tant que
communauté. Nous ne pouvons accepter la destruction de nos territoires, ni les
projets et "méga-projets " qui détruisent notre biodiversité. »
La voix des fermiers indigènes américains et canadiens était notablement
absente au forum. Parmi ceux qui étaient présents, cependant, leur compte rendu
n’était pas totalement pessimiste. Plusieurs participants ont parlé de
l’agriculture biologique comme d’une alternative durable aux méthodes de
production imposées par les accords internationaux de libre-échange.
« Le secteur qui progresse le plus rapidement à l’heure actuelle en
agriculture est le secteur biologique », a dit David Orchard, en
mentionnant une récente étude qui dévoilait que moins de 15 % des fermiers
«biologiques » en Ontario (la province canadienne la plus productive dans
le secteur agricole) considèrent que leurs profits sont insuffisants. Il a
poursuivi en soulignant que l’absence de Cuba aux tables de négociation du
Sommet des Amériques va priver les autres pays du continent de l’expérience
cubaine en agriculture biologique durable.
Le Forum s’est conclu sur une décision de proposer l’inclusion d’un
référendum continental sur le libre- échange dans le document Des
alternatives pour les Amériques, qui doit être adopté en plénière dans le
cadre du Deuxième Sommet des peuples des Amériques.
Ce qui a changé
depuis le premier Sommet des peuples (Santiago) de 1998
·
La précarité de l'emploi a fortement progressé dans la plupart des pays
des Amériques
·
La flexibilisation des marchés a atteint le marché du travail
·
Les gouvernements renoncent de plus en plus volontairement à leur propre
souveraineté
·
Les entreprises poursuivent de plus en plus, pour entraves à leur
capacité de faire des profits, les gouvernements qui prennent des décisions
dans l'intérêt du public (environnement, santé publique…)
·
La diversité culturelle et les droits à la santé, à l'éducation et à la
protection sociale sont de plus en plus menacés
·
Les multiples composantes des diverses sociétés civiles ne se contentent
plus de dénoncer les accords commerciaux, elles proposent des alternatives de
mieux en mieux définies
·
Les parlementaires contestent de plus en plus la concentration du
pouvoir politique entre les mains des seuls chefs d'état et de gouvernement
·
Plus d'échanges soutenus dans le mouvement syndical
Nos alternatives
enrichies
Nous proposons :
·
Que l'on intègre à tout éventuel accord commercial le respect des droits
fondamentaux du travail : le droit à la syndicalisation et à la négociation
collective, l'interdiction du travail des enfants et du travail forcé, la
non-discrimination en emploi.
·
Que les organisations syndicales soient associées aux prises de
décisions qui concernent les travailleurs et les travailleuses. Des structures permanentes de consultation et
de suivi doivent être mises en place un peu à l'exemple de celles instituées en
Europe.
Notre plan d'action
et de suivi
·
Nous nous engageons à renforcer et à consolider le mouvement syndical
des Amériques pour en faire un acteur incontournable de la coopération entre
les peuples.
·
Nous nous engageons à resserrer les liens entre nos organisations et à
coordonner nos luttes. Nous
multiplierons pour ce faire les échanges entre nous et mettrons sur pied des
réseaux d'information permanente.
·
Dans chacun de nos pays, nous exigerons de nos gouvernements qu'ils
assujettissent les accords commerciaux au bien commun des populations; pour ce
faire, ils ne doivent renoncer à aucun des pouvoirs qui leur permettent de
défendre et promouvoir les services publics et le développement économique de
leur pays.
·
Nous appelons nos organisations nationales et les structures régionales
de nos organisations internationales, de même que l'Alliance sociale
continentale (ASC) à mettre en place des mécanismes de surveillance des
agissements des entreprises multinationales et des gouvernements en ce qui
concerne le respect des droits humains et des droits fondamentaux du travail.
·
Avec les structures régionales de nos organisations internationales,
nous participerons à l'organisation de conférences syndicales sous-régionales
pour surveiller le processus d'intégration des Amériques, combattre les
violations des droits individuels et collectifs et promouvoir nos alternatives.
·
Nous travaillerons au développement et à la précision de ces
alternatives, spécialement en matière de travail.
·
Nous participerons à des activités syndicales communes pour le respect et
la promotion des droits syndicaux que nous demandons aux structures régionales
de nos organisations internationales d'organiser.
·
Nous nous retrouverons au sein d'une conférence syndicale à l'occasion
du prochain Forum social mondial, à Porto Allegre en 2002.
UN AUTRE MONDE EST
POSSIBLE
D'AUTRES AMÉRIQUES
SONT POSSIBLES
À PARTIR
D'AUJOURD'HUI, DEMAIN NOUS APPARTIENT
À PARTIR
D'AUJOURD'HUI, LES PEUPLES DES AMÉRIQUES SE RÉAPPROPRIENT LEUR AVENIR
LE LIBRE-ÉCHANGE MET
DES BARRIÈRES SUR LA VOIE DE NOTRE AVENIR COLLECTIF
LES ÉCHANGES SONT
LIBRES, LES CAPITAUX CIRCULENT LIBREMENT, AU TOUR DES PEUPLES DE DÉFINIR LEUR
AVENIR EN TOUTE LIBERTÉ
POUR QUE LIBERTÉ RIME
ENFIN AVEC ÉGALITÉ
LA SOLIDARITÉ FERA
TRIOMPHER LA VRAIE LIBERTÉ
Voici la synthèse des
travaux réalisés au Forum des parlementaires qui s’est tenu le 17 avril dans le
cadre du Sommet des peuples à Québec.
Premier constat: Le
manque de transparence et le déficit démocratique corrompent le processus même
de la négociation de la Zone de libre-échange.
Tout le monde n'a pas
le même accès aux décideurs. Le processus en cours en est un d'exclusion. Seul
le Forum des gens d'affaires est reconnu par les 34 chefs d'État et de
gouvernement et associé étroitement à la négociation. Le reste de la société
civile ainsi que la population en particulier les femmes, les jeunes, les
autochtones sont exclus des négociations. Les mesures de sécurité prises pour
le troisième Sommet des Amériques illustrent cette coupure entre les chefs
d'État et la population.
L'exclusion de Cuba
est aussi inadmissible.
Les parlementaires ne
peuvent jouer leur rôle de représentants élus de la population et de défenseurs
de l'intérêt public. Les parlements qui devraient au premier chef être les
lieux du débat démocratique concernant les enjeux de la ZLEA sont tenus à
l'écart. Le pouvoir se concentre au sein des exécutifs, affaiblissant du même
coup la démocratie représentative. Or, ceci est en parfaite contradiction avec
les déclarations des 34 chefs d'État et de gouvernement qui disent vouloir
renforcer la démocratie dans le cadre de l'intégration des Amériques.
Pour corriger cette
situation, il faut non seulement que les textes de base et des rapports sur
l'état de la négociation de la ZLEA soient rendus régulièrement publics, mais
il faut aussi que les positions des différents gouvernements soient connues sur
l'ensemble des sujets en discussion. Il faut que les parlements non seulement
débattent et votent sur tout accord final concernant la ZLEA, mais aussi qu'ils
soient associés à la démarche tout au long de la négociation pour ne pas être pris devant un
fait accompli lors d'un éventuel accord.
De même, les sociétés
civiles des Amériques doivent être véritablement consultées de façon continue
tout au long de la négociation ce qui implique la reconnaissance par les 34
chefs d'État et de gouvernement de l'Alliance sociale continentale comme un
interlocuteur majeur, représentant d'une partie importante des sociétés civiles
des Amériques.
Le Forum sur les
parlementaires croit aussi qu'il faut multiplier les occasions et les lieux de
débats, d'abord en faisant de la ZLEA un enjeu électoral dans tous les pays où
auront lieu des élections d'ici la conclusion d'un éventuel accord. De même la
tenue de référendums doit être envisagée pour permettre à la population
elle-même de prendre la décision finale concernant la ZLEA. Finalement, il faut
utiliser plus largement et plus efficacement les nouvelles technologies de
l'information pour élargir le débat démocratique et tendre vers un parlement
virtuel des Amériques. D'ailleurs, le Forum a utilisé l'Internet pour permettre
à plus de 400 personnes, parlementaires ou non, de suivre les discussions du
Forum à travers toutes les Amériques.
Deuxième constat:
le contenu de l'accord tel qu'il se dessine ne constitue pas un projet valable
pour les peuples des Amériques.
Au premier chef, il ne
faut pas qu'un éventuel accord de la ZLEA prenne pour modèle de base l’ALENA.
Il est maintenant clair que dans l'ALENA, les intérêts privés sont protégés au
détriment de l'intérêt collectif. C'est particulièrement clair avec le chapitre
11 de l'ALENA. Il est donc important de poursuivre le bilan des effets de
l'ALENA et de partager ce bilan à l'échelle des Amériques.
Notre vision de
l'intégration des Amériques a d'abord pour base une coopération accrue en
faveur du développement économique et social de l'ensemble des pays des
Amériques. A cet égard, une solution durable au problème de la dette extérieure
est incontournable.
D'autre part, il faut
absolument que l'accord contienne des obligations concernant le respect des
droits fondamentaux de la personne, du travail et de l'environnement.
Déclaration
du Deuxième Sommet des peuples des Amériques
Québec, le 19 avril 2001-04-28
NON À LA ZLÉA !
D'AUTRES AMÉRIQUES
SONT POSSIBLES !
Nous, déléguées et
délégués du Deuxième Sommet des peuples des Amériques, déclarons notre opposition
au projet de Zone de libre-échange des Amériques (ZLÉA) concocté conjointement
et secrètement par les 34 chefs d'État et de gouvernement et le Forum des gens
d'affaires des Amériques.
Qui sommes-nous ? Nous sommes l'Alliance sociale continentale. Nous venons de tous les coins des Amériques
faire entendre la voix des organisations syndicales, populaires et
environnementales, des groupes de femmes, des organismes de défense des droits
humains, des groupes de solidarité internationale, des associations
autochtones, des paysans et paysannes, des étudiants et étudiantes, ainsi que
des groupes œcuméniques.
Nous rejetons ce
projet de libéralisation des échanges et des investissements, de
déréglementation et de privatisation.
Nous nous opposons à un projet néolibéral raciste, sexiste, inéquitable
et destructeur de l'environnement.
Nous proposons de
bâtir de nouvelles voies d'intégration continentale basées sur la démocratie,
l'égalité, la solidarité, le respect des droits humains et de l'environnement.
DES PROMESSES NON
TENUES
Depuis le Sommet de
Miami de 1994, les chefs d'état et de gouvernement se sont engagés à renforcer
la démocratie et les droits de la personne, à soutenir l'éducation et à réduire
la pauvreté dans les Amériques. Depuis
sept ans, rien n'a été fait. Le seul
dossier qui a progressé à la faveur du déficit démocratique, c'est la
négociation de la Zone de libre-échange des Amériques (ZLÉA).
Ce n'est pas la
première fois que présidents et chefs d'État nous promettent un monde meilleur. Ce n'est pas la première fois qu'on demande
aux peuples des Amériques d'attendre les hypothétiques fruits du
libre-échange. Ce n'est pas la première
fois que nous sommes forcés de constater que les chefs d'État n'ont pas tenu
leurs promesses.
Le projet de ZLÉA
constitue une charte des droits et libertés des investisseurs, consacre la
primauté du capital sur le travail, transforme la vie et le monde en
marchandise, nie les droits humains, sabote la démocratie et mine la
souveraineté des États.
DES AMÉRIQUES
ASYMÉTRIQUES
Nous vivons dans des
Amériques marquées par des inégalités intolérables et d'injustifiables
asymétries politiques et économiques :
·
Une population de 800 millions de personnes, dont près de 500 millions
vivent en Amérique latine et dans la pauvreté;
·
Une dette inacceptable de 792 milliards de dollars US due au Nord, dont
123 milliards en paiement pour le service de la dette pour la seule année 1999;
·
Une concentration des capitaux, des technologies et des brevets au Nord;
·
80% du poids économique détenu par les États-Unis et le Canada à eux
seuls;
·
un marché du travail où une forte proportion des emplis sont dans le
secteur informel, un secteur sans voix où les droits du travail sont
constamment bafoués.
Les accords de libre-échange
aggravent les inégalités entre riches et pauvres, entre hommes et femmes, entre
pays du Nord et pays du Sud ; ils détruisent les liens écologiques entre
l'espèce humaine et l'environnement.
Seulement 20% de la population mondiale consomme 80% des ressources
naturelles de la planète. Ces accords
orientent l'économie vers l'exportation au détriment des besoins des
communautés locales. On assiste à la
consolidation du pouvoir économique et juridique des entreprises au détriment
du pouvoir souverain des peuples.
Les accords de
libre-échange favorisent la marchandisation du patrimoine de l'humanité et de
la planète. La logique néolibérale
renvoie le citoyen au rang de simple consommateur. Elle recherche le rendement à court terme
sans tenir compte des coûts sociaux et environnementaux.
Sous la pression des
grandes industries agroalimentaires et des politiques de dumping, les accords
de libre-échange menacent l'agriculture locale (surtout assumée par les
femmes), mettant en péril la sécurité alimentaire.
Les accords de
libre-échange favorisent la privatisation systématique des services publics
tels que la santé, l'éducation et les programmes sociaux, par le biais des
programmes d'ajustements structurels au Sud et des compressions budgétaires au
Nord.
Les accords de
libre-échange entretiennent la marginalisation des peuples autochtones et
l'appropriation marchande de leurs connaissances.
Les accords de
libre-échange entraînent une féminisation croissante de la pauvreté et une
exacerbation des inégalités déjà existantes entre les femmes et les
hommes. Ils augmentent notamment les
inégalités salariales, le travail dans des conditions pénibles et souvent
dégradantes, sans droit à la syndicalisation.
Ils accroissent aussi le travail non rémunéré et non reconnu que
constitue la prise en charge de la famille et de la communauté, la violence
familiale ainsi que la traite sexuelle des femmes.
Il n'y a pas d'accord
équitable possible dans un tel contexte.
CE QU NOUS VOULONS
Nous voulons que soit
assurée la primauté des droits humains et des droits collectifs, tels qu'ils
sont définis dans les instruments internationaux, sur les accords
commerciaux. Ces droits doivent être
respectés sans distinction ni exclusion fondée sur le sexe, l'orientation
sexuelle, l'âge, l'ethnie, la nationalité, la religion, les convictions
politiques ou les conditions économiques.
Nous exigeons le
respect absolu des droits humains, qui sont universels, égaux et indivisibles.
Nous voulons bâtir des
ponts entre les peuples des Amériques, nous nourrir du pluralisme de nos
histoires et de nos cultures, nous renforcer mutuellement dans l'exercice d'une
démocratie représentative et participative.
Nous voulons une
véritable égalité entre les femmes et les hommes, des soins assurés à tous les
enfants, le respect de l'environnement et le partage équitable des richesses.
Nous voulons le
respect intégral des droits fondamentaux du travail, dont le droit
d'association, le droit à la négociation de conventions collectives et le droit
de grève. Ces droits doivent s'appliquer
également aux travailleurs migrants.
Nous accueillons la
déclaration du Sommet des peuples autochtones tenu à Ottawa du 29 au 31 mars
2001 et nous réclamons la reconnaissance de leurs droits fondamentaux.
Nous voulons des États
promoteurs du bien commun, capables d'intervenir activement pour assurer le
respect de tous les droits humains, y compris, pour les femmes, le droit à une
maternité librement consentie; pour renforcer la démocratie, incluant le droit
à la communication ; pour assurer la production et la distribution de la
richesse.
Nous voulons que les
États garantissent l'accès universel et gratuit à une éducation publique de
qualité, à des services sociaux et à des services de santé, incluant les
services destinés aux femmes (maternité, contraception, avortement) ; qu'ils
éliminent la violence envers les femmes et les enfants ; qu'ils assurent le
respect de l'environnement pour les populations actuelles et les générations
futures.
Nous voulons des
investissements socialement productifs et écologiquement responsables. Les règles applicables à l'échelle
continentale doivent encourager les investissements créateurs d'emplois de
qualité plutôt que les investissements spéculatifs. Elles doivent également favoriser une
production durable et la stabilité économique.
Nous voulons un
commerce équitable.
Nous exigeons la levée
de l'embargo américain contre Cuba.
Nous réclamons l'arrêt
immédiat du plan Colombie, qui militarise l'ensemble de la région et aggrave la
situation déjà déplorable des droits humains.
Nous exigeons des
mécanismes démocratiques d'adoption de tout éventuel accord, incluant sa
ratification par référendum.
Nous accueillons avec
enthousiasme les conclusions des différents forums du Sommet des peuples. Ces travaux enrichiront notre projet
alternatif pour les Amériques.
Nous appelons les
populations des Amériques à intensifier leur mobilisation pour combattre le
projet de ZLÉA et développer d'autres modes d'intégration fondés sur la
démocratie, la justice sociales et la protection de l'environnement.
D'AUTRES AMÉRIQUES
SONT POSSIBLES !
Dimanche le 22 avril 2001
Voici le texte intégral de la Déclaration de Québec cosignée par les 34 chefs d'États et de gouvernement au IIIe Sommet des Amériques (les intertitres sont du Devoir).
"Nous, les chefs d'État et de gouvernement démocratiquement élus des Amériques, réunis à Québec, à notre troisième Sommet, renouvelons notre engagement à l'égard de l'intégration hémisphérique et de la responsabilité nationale et collective quant à l'amélioration du bien-être économique et de la sécurité de nos peuples. Nous avons adopté un Plan d'action visant à renforcer la démocratie représentative, promouvoir la saine gestion des affaires publiques et protéger les droits de la personne et les libertés fondamentales.
"Nous cherchons à créer une plus grande prospérité et à élargir les débouchés économiques tout en favorisant la justice sociale et le développement du potentiel humain.
"Nous réaffirmons notre engagement ferme à l'égard des principes et des objectifs des Chartes des Nations Unies et de l'Organisation des États américains (OÉA) et notre adhésion à celles-ci.
"La diversité et la richesse de nos traditions offrent des possibilités sans pareille pour la croissance et pour le partage des expériences et du savoir de même que pour la création d'une famille à l'échelle de l'hémisphère, au nom d'un ordre international plus juste et démocratique. Pour y parvenir, nous devons relever les défis inhérents aux différences de taille et de niveau de développement social, économique et institutionnel dans nos pays et dans notre région.
"Nous avons progressé dans la mise en oeuvre des engagements collectifs que nous avons pris à Miami en 1994 et approfondis à Santiago en 1998. Nous reconnaissons la nécessité de continuer de remédier aux faiblesses de nos processus de développement et d'accroître la sécurité humaine. Nous sommes conscients qu'il reste beaucoup à faire si nous voulons que le processus du Sommet des Amériques ait sa place dans le cadre de la vie quotidienne de nos peuples et contribue à leur bien-être.
Démocratie
"Nous reconnaissons que les valeurs et les pratiques de la démocratie sont fondamentales pour l'atteinte de tous nos objectifs. Le maintien et le renforcement de l'état de droit et du respect scrupuleux du système démocratique sont à la fois un objectif et un engagement commun, ainsi qu'une condition essentielle de notre présence à ce Sommet et aux Sommets futurs. Par conséquent, toute altération ou interruption inconstitutionnelle de l'ordre démocratique dans un État de l'hémisphère constitue un obstacle insurmontable à la participation du gouvernement de cet État au processus du Sommet des Amériques. Tenant dûment compte des mécanismes hémisphériques, régionaux et sous-régionaux actuels, nous nous entendons pour tenir des consultations dans l'éventualité d'une interruption du système démocratique d'un pays participant au processus du Sommet.
" Aujourd'hui, les menaces à la démocratie prennent diverses formes. Pour nous aider à les contrer, nous demandons à nos ministres des Affaires étrangères de préparer, dans le cadre de la prochaine Assemblée générale de l'OÉA, une Charte démocratique interaméricaine, laquelle renforcera les instruments de l'OÉA pour la défense active d'une démocratie représentative.
"Notre engagement à l'égard du plein respect des droits de la personne et des libertés fondamentales est fondé sur des convictions et des principes partagés. Nous soutenons le renforcement et le perfectionnement de l'efficacité du système interaméricain des droits de la personne, qui inclut la Commission interaméricaine des droits de l'homme et la Cour interaméricaine des droits de l'homme. Nous chargeons la XXXIe Assemblée générale de l'OÉA d'envisager une augmentation adéquate des ressources pour les activités de la Commission et de la Cour en vue d'améliorer les mécanismes des droits de la personne et de promouvoir la mise en application des recommandations de la Commission et le respect des jugements de la Cour.
Paix et sécurité
"Nous réaffirmons notre engagement à l'égard du maintien de la paix et de la sécurité grâce au recours efficace à des modes hémisphériques de règlement pacifique des différends et à l'adoption de mesures de renforcement de la confiance et de la sécurité. Nous appuyons et saluons les efforts déployés par l'OÉA à ce propos. Nous réaffirmons notre pleine adhésion au principe qui oblige les États à s'abstenir de recourir à la menace ou à la force, en conformité avec le droit international. Fidèles aux principes du droit humanitaire international, nous condamnons énergiquement les attaques menées contre les populations civiles. Nous prendrons toutes les mesures à notre disposition pour que les enfants de nos pays ne participent pas à des conflits armés et nous condamnons l'utilisation d'enfants par des forces irrégulières. Nous réitérons que la subordination constitutionnelle des forces armées et des forces de sécurité aux autorités civiles légalement constituées de nos pays ainsi que le respect de l'état de droit de la part de toutes les institutions nationales et tous les secteurs de la société sont fondamentaux pour la démocratie. Nous nous efforcerons de limiter les dépenses militaires, tout en maintenant les effectifs correspondants à nos besoins légitimes en matière de sécurité, et nous encouragerons une meilleure transparence dans les acquisitions d'armes.
"Nous réitérons notre engagement à faire face aux nouvelles menaces multidimensionnelles à la sécurité de nos sociétés. Soulignons parmi celles-ci, le problème mondial de la drogue et les crimes s'y rattachant, le trafic illicite et l'usage criminel des armes à feu, le danger croissant que représente le crime organisé et le problème général de la violence dans nos sociétés. Reconnaissant que la corruption mine les valeurs démocratiques fondamentales, ébranle la stabilité politique et nuit à la croissance économique, et de ce fait, menace les intérêts vitaux dans notre hémisphère, nous nous engageons à raviver notre lutte contre la corruption. Nous reconnaissons également la nécessité d'améliorer les conditions favorables à la sécurité humaine à l'échelle de l'hémisphère.
"Nous renouvelons notre engagement à l'égard de la mise en oeuvre totale de la Stratégie antidrogue de l'hémisphère, fondée sur les principes de la responsabilité partagée, d'une approche globale et équilibrée, et d'une coopération multilatérale. Nous saluons le développement du Mécanisme multilatéral d'évaluation et réaffirmons notre engagement à faire de ce mécanisme unique au monde un des piliers centraux d'une coopération hémisphérique efficace dans le contexte de la lutte contre l'ensemble des facteurs qui constituent le problème mondial de la drogue. Nous exprimons notre soutien aux programmes de développement alternatif efficaces visant à éradiquer la culture illicite et nous nous efforcerons de faciliter l'accès au marché pour les produits qui résultent de ces programmes.
Sida
"Nous reconnaissons que le VIH/sida constitue une autre menace importante à la sécurité de nos peuples. Nous sommes unis dans notre détermination à adopter des stratégies multisectorielles et à développer notre coopération afin de lutter contre cette maladie et ses conséquences.
"Nous réaffirmons l'importance d'un ordre judiciaire indépendant et notre détermination à garantir l'égalité d'accès à la justice et une administration opportune et impartiale de celle-ci. Nous nous engageons à accroître la transparence à tous les paliers gouvernementaux.
"Des économies libres et ouvertes, l'accès aux marchés, des mouvements d'investissements soutenus, la formation de capital, la stabilité financière, des politiques publiques appropriées, l'accès à la technologie ainsi que le développement et la formation des ressources humaines sont essentiels pour réduire la pauvreté et les inégalités, élever les niveaux de vie et promouvoir le développement durable. Nous collaborerons avec tous les secteurs de la société civile et avec les organisations internationales pour faire en sorte que les activités économiques contribuent au développement durable de nos sociétés.
Zléa
"Nous saluons les progrès importants réalisés à ce jour quant à la création de la Zone de libre-échange des Amériques (ZLÉA), y compris l'élaboration d'un avant-projet d'Accord de la ZLÉA. Tel que convenu lors du Sommet de Miami, le libre-échange, exempt de subventions et de pratiques déloyales, accompagné d'un flux croissant d'investissements productifs et d'une plus grande intégration économique, encouragera la prospérité à l'échelle régionale, permettant ainsi d'élever le niveau de vie, d'améliorer les conditions de travail des peuples des Amériques et de mieux protéger l'environnement. La décision de rendre public l'avant-projet de l'Accord de la ZLÉA démontre clairement notre engagement collectif à l'égard de la transparence et d'une communication accrue et soutenue avec la société civile.
"Nous demandons à nos ministres de s'assurer que les négociations relatives à l'Accord de la ZLÉA soient conclues au plus tard en janvier 2005, et de voir à son entrée en vigueur le plus tôt possible ou au plus tard en décembre 2005. Ceci constituera un des éléments clés favorisant la croissance économique et la prospérité à l'échelle de l'hémisphère, contribuant ainsi à l'atteinte des objectifs généraux du Sommet. L'Accord doit être équilibré, global et conforme aux principes et disciplines de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et constituera un engagement unique. Nous accordons beaucoup d'importance à l'élaboration d'un accord qui tienne compte des différences de taille et de niveau de développement des économies participantes.
Environnement
"Nous reconnaissons le défi que représente la gestion de l'environnement dans l'hémisphère. À cet effet, nous demandons à nos gouvernements de s'engager à renforcer la protection de l'environnement et l'utilisation durable des ressources naturelles en vue d'établir un équilibre entre le développement économique, le développement social et la protection de l'environnement, ceux-ci étant des éléments interdépendants qui se renforcent mutuellement. Notre objectif est d'atteindre un développement durable dans l'ensemble de l'hémisphère.
"Nous favoriserons le respect des normes fondamentales du travail reconnues au niveau international, telles qu'elles ont été incluses dans la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail et son suivi adoptée en 1998 par l'Organisation internationale du travail (OIT). Nous prendrons en considération la ratification ou l'adhésion des ententes de base de l'OIT, comme il convient. Afin de concrétiser notre engagement à créer de meilleures possibilités d'emploi, à enrichir les compétences des travailleurs et à améliorer les conditions de travail dans l'ensemble de l'hémisphère, nous reconnaissons la nécessité d'aborder dans les forums hémisphériques et internationaux pertinents les questions de la mondialisation liées à l'emploi et au travail.
"Nous demandons à la Conférence interaméricaine des ministres du Travail de poursuivre son étude des questions liées à la mondialisation ayant un impact sur l'emploi et le travail.
Énergie
Reconnaissant l'importance de l'énergie comme l'une des principales assises du développement économique et de la prospérité de la région ainsi que d'une meilleure qualité de vie, nous nous engageons à poursuivre les initiatives en matière d'énergie renouvelable, à étendre l'intégration de l'énergie et à parfaire les cadres de réglementation et leur application, tout en préconisant les principes du développement durable.
"La démocratie et le développement économique et social sont interdépendants et s'épaulent mutuellement, étant tous deux des conditions fondamentales à la lutte contre la pauvreté et l'inégalité. Nous ne ménagerons pas nos efforts pour libérer nos concitoyens des conditions déshumanisantes de la pauvreté absolue. Nous nous engageons à déployer davantage d'efforts pour atteindre les objectifs en matière de développement international, notamment une réduction de 50 % de la proportion de personnes vivant dans la pauvreté absolue, et ce, d'ici l'année 2015.
"Nous nous engageons à promouvoir divers programmes visant l'amélioration de l'agriculture et de la vie rurale, ainsi que des agro-industries, ces programmes constituant une contribution essentielle à la réduction de la pauvreté et au développement intégral.
"Nous nous engageons à renforcer la coopération dans l'hémisphère ainsi que les capacités nationales pour mettre au point une approche plus intégrée de la gestion des catastrophes naturelles. Nous continuerons à mettre en oeuvre des politiques renforçant notre capacité de prévenir et d'atténuer l'impact des catastrophes naturelles ainsi que d'intervenir dans de telles situations. Nous convenons d'étudier des mesures permettant de faciliter un accès opportun aux ressources financières nécessaires pour répondre aux besoins en cas d'urgence.
Culture
"Nous reconnaissons les contributions culturelles et économiques des migrants aux sociétés qui les accueillent ainsi qu'à leurs communautés d'origine. Nous nous engageons à assurer le respect de la dignité des migrants, un traitement humain et des protections juridiques appropriées, la défense des droits de la personne ainsi que des conditions de travail saines et sécuritaires. Nous renforcerons les mécanismes de coopération hémisphérique pour répondre aux besoins légitimes des migrants et adopter des mesures efficaces contre le trafic de personnes.
"L'avancement vers des sociétés plus démocratiques, des économies en expansion et l'équité sociale repose sur une population instruite et une main-d'oeuvre qualifiée. Nous avons convenu d'une série de politiques visant à améliorer l'accès à une éducation de qualité par le biais de la formation des enseignants, l'enseignement des valeurs civiques et l'utilisation des technologies de l'information à la fois dans nos salles de classe et pour mesurer les progrès réalisés vers l'atteinte de ces objectifs. De meilleures politiques en matière d'éducation et un investissement accru dans nos systèmes d'éducation aideront à réduire la disparité des revenus et à combler le fossé numérique dans notre hémisphère.
"Les efforts que nous déployons collectivement à l'échelle de l'hémisphère seront plus efficaces grâce à l'utilisation novatrice des technologies de l'information et des communications pour brancher nos gouvernements et nos peuples et pour partager les connaissances et les idées. Notre Déclaration sur la connectivité souligne cette conviction.
"Nous soulignons que la bonne santé et l'égalité d'accès aux soins médicaux, à des services de santé et à des médicaments à un coût abordable sont essentiels au développement humain et à l'atteinte de nos objectifs politiques, économiques et sociaux.
Droits et liberté
"Nous réitérons notre engagement à l'égard de la protection des droits de la personne et des libertés fondamentales de tous, y compris ceux qui sont vulnérables, marginalisés, handicapés ou qui ont besoin d'une protection particulière. Nous sommes déterminés à mettre fin à toute forme de discrimination, dont le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et autres formes connexes d'intolérance dans nos sociétés, ainsi qu'à promouvoir l'égalité des sexes et à atteindre la pleine participation de tous à la vie politique, économique, sociale et culturelle de nos pays.
"Nous nous efforcerons de nous assurer que les résultats issus du Conclave des peuples autochtones des Amériques, tenu au Guatemala, et du Sommet des peuples autochtones des Amériques, tenu à Ottawa, seront prises en considération dans la mise en oeuvre de la Déclaration et du Plan d'action du Sommet des Amériques. Nous appuyons les efforts déployés pour permettre la conclusion hâtive et fructueuse des négociations concernant le Projet de Déclaration américaine sur les droits des peuples autochtones, laquelle favorisera et protégera leurs droits humains et leurs libertés fondamentales.
"Nous considérons que la diversité culturelle qui caractérise notre région est source de grande richesse pour nos sociétés. Le respect et la valorisation de cette diversité doivent constituer un facteur de cohésion qui fortifie le tissu social et le développement de nos nations.
"C'est à nos gouvernements qu'incombe la principale responsabilité de la coordination et de la mise en oeuvre du Plan d'action ci-joint. Les rencontres ministérielles donnent d'importants résultats en appui aux mandats des Sommets. Nous continuerons à développer cette coopération.
"Nous apprécions le soutien actif de l'Organisation des États américains et de ses organes spécialisés, notamment l'Organisation panaméricaine de la santé, l'Institut interaméricain de coopération pour l'agriculture et l'Institut interaméricain de l'enfant, ainsi que la Banque interaméricaine de développement, la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes et la Banque mondiale. Nous invitons ces institutions et d'autres organisations régionales et internationales à développer une plus grande coordination pour le soutien à la mise en oeuvre et au suivi du Plan d'action de ce Sommet.
"L'OÉA joue un rôle central dans la mise en oeuvre des décisions des Sommets des Amériques. Nous chargeons nos ministres des Affaires étrangères de faire avancer et approfondir, lors de la prochaine Assemblée générale, le processus de réformes au sein de l'OÉA, soutenu par des ressources appropriées, afin d'améliorer le fonctionnement de l'Organisation et de lui permettre de mieux mettre en oeuvre les mandats du Sommet.
"Nous accueillons avec satisfaction et apprécions les contributions de la société civile à notre Plan d'action, incluant des associations des chefs d'entreprises et des syndicats. Nous affirmons que l'ouverture et la transparence sont vitales à la sensibilisation du public et à la légitimité de nos travaux. Nous faisons appel à tous les citoyens des Amériques afin qu'ils contribuent au processus des Sommets.
"Nous, les chefs d'État et de gouvernement des Amériques, avons accepté l'offre du gouvernement de la République argentine de recevoir le Quatrième Sommet des Amériques.
"La raison d'être des Sommets des Amériques est de servir les peuples. Nous devons mettre au point des solutions efficaces, pratiques et solidaires, pour répondre aux problèmes auxquels sont confrontées nos sociétés. Nous ne craignons pas la mondialisation et ne sommes pas aveuglés par son éclat. Nous sommes unis dans notre détermination à léguer aux générations futures un hémisphère démocratique et prospère, plus juste et généreux, un hémisphère où personne n'est laissé pour compte. Nous nous engageons à faire de ce siècle le siècle des Amériques."
Le Venezuela réserve sa position.
Le Devoir ─
édition internet, le Lundi 23 avril 2001
############## Index
##################
Gouvernements,
Société Civile et Citoyens!
Michel Handfield
D’un coté, les
gouvernements négocient actuellement différents accords de commerce
internationaux et de libre échange, dont la Zone de Libre Échange des
Amériques!
De l’autre côté, des
groupes organisées manifestent contre ces accords - en tout ou en partie. Ce
sont aussi bien des syndicats que des groupes environnementaux, des groupes de
femmes, des groupes religieux, des groupes politiques, etc. Des commentateurs
de la scène journalistique ont mis en cause leur représentativité. Ce ne sont
pas les représentants de la société civile, puisqu’ils ne sont pas élus,
clament-ils en cœur! C’est vrai, mais…
Quand on regarde le
nombre de pays où les élections sont libres et démocratique, tous les
Gouvernements ne peuvent se prévaloir du titre glorieux de représentant du
peuple. Et même dans les pays où la démocratie existe, quand les taux de
participation atteignent difficilement les 50%, le Gouvernement est-il
réellement représentatif?
Pour les uns oui, car
ils ont été élus démocratiquement. Ceux qui n’ont pas voté l’ont fait par choix
diront-ils et ils cautionnent ainsi les
électeurs - si peu nombreux soient-ils! Amen, le dogme démocratique est sauf.
Mais, si ceux qui ne
votent pas le font par manque de choix. Quand une campagne électorale coûte des
centaines de millions de dollars, tous n’ont pas la possibilité de se présenter
ou de former un parti politique, même si leurs idées rejoignent une large part
de la population. Certaines tendances ne sont donc pas représentée au niveau
politique. Alors quand cette tendance se définit comme émergeante de la Société
Civile, à défaut des moyens financiers pour se présenter comme tendance
politique, pourquoi n’aurait-elle pas
la même crédibilité qu’un président États-Uniens élus dans la controverse d’un
bulletin électoral litigieux et dont la campagne est en partie soutenu par les
dons corporatifs?
Peut être bien que
ceux qui se disent les représentants de
la Société Civile n’en sont pas; mais n’en sont pas davantage certains
gouvernements et organismes mondiaux qui nous imposent leurs vues. En fait si
on veut représenter les citoyens, invitons à ces négociations mondiales autant
les Gouvernements, les Organismes Non Gouvernementaux , les Syndicats, les groupes écologiques, etc. et
mettons tout ce monde en interaction avec les citoyens par le biais des moyens
de communication de masse à notre disposition!
On dira que cela
ralentirait les négociations. Mais est-ce vraiment une priorité de favoriser
les échanges commerciaux? Au moment où on favorise la production de voitures au
Mexique, en vue de leur vente au Canada et aux États-Unis, combien de personnes
au Mexique manquent de biens essentiels? Combien de personnes meurent de faim
en Afrique pendant que l’on tue des animaux infectés par des maladies, dues en
partie à la production industrielle des
viandes, en Europe? Combien de personnes, au Canada et aux Etats-Unis, perdent
leur emploi non pas parce-que l’entreprise pour laquelle ils travaillent n’est
pas rentable, mais parce qu’elle n’a pas vu ses profits croître autant qu’elle
le croyait (Nortel Telecom)?
Le tout au marché
économique n’est pas davantage une forme de gouvernement représentatif que le
refus de tous progrès. C’est peut être pour cela que le citoyen ne se déplace
plus pour aller voter, mais se déplace pour aller manifester dans la rue… ou
pour voter pour une fille qui vient du communautaire dans Mercier. (1)
Note:
1. A ce moment-ci le
Parti Libéral du Québec est fier de sa victoire sur le PQ avec l’élection de
Nathalie Rochefort, qui vient du communautaire et de l’action auprès des jeunes
de la rue, dans le Comté montréalais de Mercier. Cependant, sauront-ils relever
le défi du libéralisme social et changer de discours, c’est-à-dire proposer une
meilleure redistribution de la richesse, de meilleurs services à la population
et des réinvestissements collectifs avant les baisses d’impôts aux plus hauts
revenus et les subventions aux entreprises? Je le souhaite.
############## Index
##################
« The Wall »
Gaétan Chênevert
Ville de Québec
« Le mur » « The Wall
»
Il est conseiller de
lire cet article en écoutant « The Wall » de Pink Floyd au coton.
Vendredi, le
20 avril 2001
Vendredi matin 10h00, le
bus me débarque au coin des rues Turnbull et St-Jean. Il ne peut aller plus loin en raison du
périmètre de sécurité. Je demande au
chauffeur si pour revenir ce soir je prends le bus au même endroit ? Il me dit que oui. Je suis à environ dix minutes de marche du «
mur de la honte » et une belle journée ensoleillée s'annonce.
Me voilà face au mur composé à la base de blocs de ciment ─
que l'on retrouve un peu partout lorsqu'on bloque des rues pour dévier la
circulation, effectuer certains travaux de voiries ou pour séparer des
stationnements ─ montés d'une clôture de broche. On peut apercevoir à cet endroit, des
brassières et des petites culottes accrochées à la clôture. On peut y lire « nous ne sommes pas une marchandise
». Je veux voir tout le mur, y toucher,
voilà que je me mets à marcher pour y faire le tour. J'emprunte la partie nord du mur, du côté de
la base ville.
On rencontre du monde
un peu partout, les gens sont curieux, on vient voir le mur de la honte. On peut apercevoir plusieurs policiers de la
SQ, de la GRC et municipaux. Ils sont
tous situés de l'autre côté du mur. Déjà
les journalistes sont à l'œuvre, on les voit à l'intérieur près du mur en train
de faire des reportages, on aime bien la foule comme fond d'image, on a hâte
qu'il se passe quelque chose. Déjà on
sent une tension, d'un côté il y a nous et de l'autre il y a eux. Le monde est séparé. La police est omniprésente à l'intérieur du
périmètre, ils ne portent pas encore leur cuirasse et leur masque, on peut leur
voir le visage. Sur la rue St-Jean,
certains commerces se sont barricadés, d'autres s'apprêtent à placarder leurs
fenêtres, on voit les menuisiers à l'œuvre d'autres n'ont rien fait.
Je continue mon
périple, me voilà près du Château Frontenac, il est aux alentours de 11h30,
j'accoste un policier de la SQ qui se fait chauffer au soleil. Je lui demande s'il est bien au soleil; oui
me répond-il. Connais-tu la ZLÉA, ce
qui se trame derrière la barricade ? Plus de réponse. Je lui demande s'il peut s'exprimer la-dessus; toujours pas de réponse. Je lui dis qu'il a le droit de s'exprimer, de
penser, de réfléchir, de se faire une
opinion, de parler, c'est pas parce que tu es dans la police que tu ne peux pas
le faire ! Embarrasser et froisser, il
me répond « je pense à l'intérieur de moi et dans le salon chez moi ». J'ai sûrement trop insisté, je voulais tout
simplement lui faire comprendre qu'il était du mauvais côté de la clôture, à
défendre des brigands contre son peuple.
Ah, quand on a l'âme du pèlerin!
Derrière, deux cadreurs de la CBC télévision filment la scène. Je ne
savais pas je m'en suis aperçu après, tant mieux, l'un d'eux me félicite avec
son pouce ponté vers le haut. Je repars.
En marchant, on
rencontre des gens d'un peu partout, Québec, Vancouver, Alberta, Toronto à qui
je parle. Tous savent pourquoi ils sont
ici. Pour dénoncer le secret et
manifester leurs oppositions entourant les négociations. On voit de plus en plus de gens, je suis à
l'Est du périmètre de sécurité à l'entrée de la porte St-Jean. À cet endroit se
trouve une porte d'entrée dans le périmètre pour les gens qui y habitent ou y
travaillent. Cette porte est protégée par des policiers. Pour le moment, j'ai seulement longé le mur
de la barrière de la rue St-Jean côté ouest vers le Château Frontenac, on ne
peut aller plus loin, le château est clôturé.
J'ai faim, je vais manger, j'ai trouvé un bon restaurant italien sur la
rue St-Jean. À travers la fenêtre du
restaurant, la foule s'active, on s'amuse et on danse.
Me voilà de retour à
la porte St-Jean, ça circule, on est plus nombreux que cet avant-midi. Je veux aller vers la porte St-Louis,
impossible, c'est barré. Je redescends vers la porte St-Jean, j'apperçois un
banc à quelques pas de la porte d'entrée dans le périmètre, je m'assieds et
j'attends. Je profite du soleil, je jase
et je ronge mon frein. On commence à
s'entasser près de la clôture, on discute avec les policiers, je me lève, je
m'approche, je suis mêlé à la foule en avant de la porte.
Il doit être environ
14h30, on apprend qu'un groupe d'environ 5000 à 6000 sont partis de
l'Université Laval et marchent vers le mur.
Il y aurait également un autre groupe de 8000 personnes qui auraient
emprunté un chemin différent et se dirige également vers le mur.
Au même moment, on voit
apparaître des mini vans aux fenêtres teintées remplies de policiers casqués,
masqués, ils portent leur masque à gaz.
Que se passe-t-il? Ils passent et
montent vers la porte St-Louis. Peu de
temps après, les yeux nous chauffent, on s'éloigne de la porte, il y a du gaz
dans l'aire. Je subis mon baptême de
gaz. Est-ce que les policiers nous ont
gazés se demande-t-on ? On n'a rien fait, c'est pacifique. Les revoilà de nouveau,
ils arrivent par derrière sur la rue St-Jean, des camions et mêmes deux bus
(style Orléans Express), ils sont arrêtés, ils attendent, mais quoi? Ils font demi-tour, ils repartent, ça sent de
nouveau les gaz, on revient près de la porte, tout est calme. Nous provoque-t-on ? C'est épeurant, prépare-t-ils un assaut ? C'est impossible, on fait rien. Peu de temps après, on apprend qu'on vient de
jeter le mur par terre de l'autre côté du périmètre, je suis au mauvais
endroit, l'action se passe du côté ouest du périmètre. Le vent amenait les gaz de notre côté. On avait commencé à gazer.
Je quitte pour l'autre
côté, je longe de nouveau le mur mais en sens inverse cette fois ici. Je passe par une petite ruelle bondée de
monde, une escouade anti-émeute est à l'œuvre en bas de la côte, des gens sont assis
en avant des policiers, on leur bloque le chemin. On sent la tension montée d'un autre cran,
quelque chose se prépare, ça ne peut pas rester comme ça. L'investissement de 105 millions doit être
justifié. Je suis là depuis plus d'une
demie-heure, les policiers avancent, reculent, marchent de côté, c'est
impressionnant, on nous prépare à quelque chose, je trouve cela
provoquant. Je crains que ça éclate, vu
l'espace restreint ça risque d'être dangereux avec tout ce monde, je change de
place et m'en vais sur Dufresne/Montrency.
Encore un
attroupement, on est plusieurs centaines de personnes, ça joue du tam tam, ça
danse, ça chante. Rien de violent, on
s'amuse. Encore une fois, on dirait
qu'on attend que quelque chose se passe.
Je suis sur une rue importante, celle qui mène au palais des congrès et
au parlement. Je suis dans une
côte. En bas, on voit les viaducs des
autoroutes. Est-ce Dufresne ou Montrency ?
Voilà les policiers arrivent par la ruelle où j'étais tantôt. Ils marchent en rangs serrés, même une mouche
ne pourrait passer, ils se dirigent sur Dufresne/Montrency. Ils arrivent, ils longent la clôture et se
mettent au garde à vous. N'oublions pas
qu'ils sont de ce côté ici du mur, avec nous.
Le temps m'apparaît interminable, on sent très bien que la tension vient
de grimper d'une autre coche, les gens continuent à chanter, à jouer du tam
tam, plusieurs s'assoient en cercle pour former une chaîne humaine, rien de
plus pacifique. Et puis voilà, on gaz,
Que sait-il passé ? Je ne sais pas, je
ne peux être partout à la fois et tout voir, ce que je sais par exemple c'est
qu'on gaze, on étouffe, les yeux nous chauffent, on s'éloigne et l'on
revient. Voilà, le bal vient de
commencer. Toute la soirée et une bonne
partie de la nuit on gazera à qui mieux mieux tout ce qui bouge. C'est dangereux, quant les gens se sauvent en
courant, après avoir été gazé, au nombre qu'on est, il faut faire attention de
ne pas se faire piétiner, alors on cri aux gens de ne pas courir mais plutôt
marcher pour éviter justement de se faire blesser.
Qu'importe où je vais,
il y a des attroupements et ça sent le gaz partout. Deux hélicoptères survolent le périmètre et
les alentours pour détecter les rassemblements de foule. Elles sont énervantes. Je monte à la rue St-Jean, même chose. Je veux m'assurer si j'ai bien retenu la
place où je dois prendre mon bus au coin de Turnbull et la rue St-Jean. M'y voilà, c'est plein de monde et l'on gaze
ici aussi, même loin du mur, on y goûte.
Il est sûr que je ne prendrai pas mon bus ici ce soir. Je verrai à cela plus tard. Je retourne au mur rue St-Jean en espérant
avoir une bouffée d'air plus frais de temps en temps. On peut s'y approcher encore, il se fait
tard, peut-être 22h30, je longe le mur encore une fois, les policiers sont
partout le long du mur, blindés au bout.
Entre le mur et un bloc de maisons, j'entends trois fois le fracas de
bouteilles qu'on a lancées aux policiers.
Je suis fatigué, gazé, et le jeux du chat et de la souris se continuera
jusqu'au petites heures du matin. Que se passe-t-il ailleurs, aux autres portes
? Y a du monde partout. Je retourne à la rue Turnbull, c'est calme,
mais le bus ne viendra pas, je marche plus loin, une femme attend depuis un bon
moment, elle a appelé son mari, je fais de même, j'appelle Luc qui vient me
chercher. Pendant tout ce temps, il y
avait encore du monde qui descendait la rue St-Jean vers le mur.
Samedi, le 21
avril 2001
Aux nouvelles
télévisées de ce matin, on annonce que la police sera beaucoup plus rigoureuse
dans ses actions pour éviter les
débordements de vendredi soir. Ça
promet. On nous prépare, ça veut tout
simplement dire qu'on s'attend à de la casse.
Aujourd'hui, on prévoit 25000
personnes nous dit-on. Faut dire qu'hier
on était déjà environ 20000 et qu'un
nombre tout aussi important viendra s'ajouter pour participer à la marche
pacifique qui aura lieu aujourd'hui dans la base ville. Y va avoir du monde. Encore une journée ensoleillée et chaude tant
au niveau de la température que de la manifestation.
Le bus ne se rend plus
au coin de Turnbull et St-Jean comme c'était le cas la veille. Ah ! Le périmètre de sécurité serait-il
agrandit ? Le chauffeur me dit où
débarquer et je transfère de bus. Il
m'amène directement au vieux port de Québec où à lieu le départ de la marche
pacifique.
Des milliers de
participants sont entassés au vieux port.
C'est plein à craquer. On voit du
monde partout. Je n'ai jamais vu une
foule aussi imposante pour une manifestation.
Ce ne sont pas les pancartes et les affiches qui manquent, tous les
groupes sont identifiés. Le départ doit
se faire à midi. Il est 14h00 et l'on
n'a pas encore décollé. Sur le
boulevard Charest près de la gare centrale, on voit bien les manifestants qui
avancent, on ne s'est pas trop si c'est le devant du peloton, ça bouge presque
pas. Qu'attend-t-on pour décoller ? Y a tellement de monde qu'il parait que ça
fait un bon moment que les premiers sont partis. Après quelques heures d'attente on quitte
enfin le vieux port. Tout le long du
parcours on cause, on se fait de nouveaux amis, on dépasse, comme si on voulait
arriver les premiers. On marche
calmement, rien de particulier. Avant de
tourner sur la rue de la Courronne, un manifestant juché au milieu d'un poteau
fait signe aux marcheurs de tourner à gauche pour monter à la haute ville près
du mur. Même ici, si loin du mur, on
sent les gaz. C'est donc dire qu'en
haute ville la police s'en donne à cœur joie, elle s'amuse avec ces nouveaux
jouets, faut bien dépenser les 105 millions de dollars. On voit au loin, la grande escalier et la rue
menant à la haute ville remplit de manifestants se dirigeant vers la rue
St-jean et plus haut. Nous, on continue
notre marche pacifique jusqu'au fin fond d'un grand stationnement où nous
attend quelques groupes musicaux pour nous divertir. Il y a quelques cantines mais peu pour le
nombre de personne qu'on est. Je suis
avec Michèle, elle a perdu son ami, on prend une liqueur et l'on retourne sur
nos pas. Elle doit retourner à son auto
quant à moi, je veux retourner où l'action se passe, monter la grande escalier
et me rendre sur la rue St-Jean, près du mur de la honte.
Ouf qui y a du monde,
encore plus qu'hier, c'est l'enfer, on se croirait en état de guerre. Je n'ose
pas m'approcher près du mur, y a trop de monde et je ne tiens pas à me faire
piétiner, de plus, je ne tiendrai pas le coup, j'ai pas de masque à gaz. Les deux hélicoptères ne cessent de survoler
la haute et la base ville, ça sent le gaz à plein nez. Où je suis, à quelques rues du mur, des
policiers sont dans des rues transversales au nord de la rue St-Jean et l'on
gaze les manifestants. Il n'est pas
nécessaire de voir de la fumée pour dire qu'on nous gaze, on marche et bang, ça
nous prend aux yeux et à la gorges, un gaz vient d'être lancé s'en qu'on l'est
vu venir ou entendu. Pourtant, je ne
vois rien de violent, tout le monde est pacifique. Qu'importe où l'on va, on se fait gazer, on
ne veut pas nous voir, on veut nous repousser vers la base ville. J'ai passé la journée et la soirée sur la rue
St-jean à jouer au chat et à la souris avec les policiers. On voit plein de manifestants caméra à la
main, d'autres prennent des photos sur le toit des maisons. J'espère que ces
photos et films passeront quelque part sur Internet, ça risque d'apporter une
vision différente des événements. J'ai
rencontré des gens de Chicago, Texas, du Massachussets, de Toronto, Ottawa,
etc. Tous les genres sont représentés
dans cette foule, des cheveux raides ou frisés, rouges ou verts, en pointu, des
veilles dames (les grannies d'Ottawa et du Massachussets) des punks, des
groupes communautaires, du monde ordinaire, des jeunes des moins jeunes, des
noirs, des blancs, des hispaniques, des groupes radicaux, moins radicaux,
pacifiques, des environnementalistes etc. la société civile est bien
présente. Plus diversifiés que cela, tu
meurs. Une société hétérogène.
En milieu de soirée,
vers 21h00, je vois dans une rue transversale au sud de la rue St-Jean, une
fourgonnette de la police, on peut voir l'emblème sur la porte. Oh !
Ça va chauffer, on veut nous prendre en sandwich ou quoi ? Il se prépare quelque chose. On ne veut pas que la soirée d'hier se
répète. Je m'éloigne un peu pour ne pas
me faire prendre. Je me dirige donc vers
les policiers. J'aperçois trois
camionnettes et deux bus (style Orléans Express), les fenêtres sont teintées,
on ne voit rien. Je ne peux pas dire si
elles sont vides ou remplies de policiers mais elles ne sont sûrement pas là
pour rien. Un policier cuirassé se tient
en avant du camion. Je
l'interpelle. Pourquoi faites-vous ça
? Vous défendez un gang de bandit qui
négocie en catimini des choses qui auront un impact important sur nous tous, y
compris toi. J'étais disons un peu
pompé. Comment voulez-vous qu'on
manifeste notre indignation si ce n'est par la manifestation dans la rue ? Nos députés, supposés nous représenter ne
sont pas là, ils n'ont aucun pouvoir, ils ne font même pas parti des
négociations, ils ne savent pas ce qui se négocie mais ils sont prêts à
signer. À qui voulez-vous que je
m'adresse ? On n'a plus confiance en
eux. C'est rendu qu'on s'adresse aux ong
(organisation non gouvernementale) et à des groupes de pressions qui prennent
et poussent ces dossiers pour défendre les intérêts du peuple. La démocratie est en perte de vitesse, alors
qu'est-ce que je fais ? Qu'est-ce qui me
reste pour m'exprimer ? Vous êtes de
leur côté, vous défendez le capital, on se sert de vous pour nous opprimer,
c'est ça la démocratie ? Un État
policier ! Je le vois. Voilà un peu les
commentaires que je voulais partager avec lui.
Il me répond « je suis d'accord avec toi », je sais lui répondis-je,
mais t'as un job à faire et tu dois obéir, mais t'es quand même du mauvais
côté. Je suis parti, furieux mais
satisfait.
Par la suite, j'ai
resté à l'écart, j'ai parlé avec des chiliennes de Toronto qui trouvaient cela
abominable, une répression qui leur rappelait de mauvais souvenirs. Il se faist tard, une fumée grisâtre envahit
le périmètre de sécurité, les gens continuent d'abonder et le même scénario se
répète, gaz, gaz et gaz.
CONCLUSION
La première fois que
j'ai frappé « The Wall », l'impression qui m'est venue à l'esprit est que le
monde est divisé en deux camps. D'un
côté les bons de l'autre les mauvais. À
l'intérieur du périmètre, il y a les bons, les biens pensants, les justes, les
détenteurs de la vérité, les démocrates, ceux qui croient qu'ils ont le mandat
du peuple pour négocier, touts ceux qui veulent notre bien. À l'extérieur du périmètre, il y a nous, ceux
qui ne comprennent rien, les ignorants, les moins que rien, les analphabètes,
la plèbe, les antimondialistes comme les médias aiment nous le rappeler. On veut nous homogénéiser, nous standardiser,
nous uniformiser. Avec tout ce monde que
j'ai rencontré au Sommet des peuples et dans la rue comme manifestants, c'est
tout le contraire, l'Amérique ou les Amériques sont hétérogènes, diversifiés et
multiples. Y a contradiction.
Pour défendre nos intérêts,
on retrouve entre les deux, les militants, les participants au Sommet des
peuples qui font de gigantesques efforts avec les moyens qu'ils ont pour
sensibiliser, exprimer et formuler des alternatives à la population et aux
chefs d'États afin de réduire et d'éliminer les conséquences négatives des
négociations en cours. Les solutions alternatives méritent d'être reçues
et examinées. Un autre monde est
possible.
Et puis il y a nos
élus, la ligne de partie, la solidarité ministérielle, les démocrates, « La
Démocratie ». L'exclusion de nos
parlementaires au processus de négociation nous démontre un autre indice du
déficit démocratique. Pour les grands de
ce monde, ils sont insignifiants. Les
enjeux négociés sont majeurs et se répercuteront sur tous les peuples de
l'Amérique. Ces députés sont supposés
nous représenter et défendre nos intérêts, alors ils doivent faire partie
intégrante des négociations pour être en mesure de se faire une tête et débattre de ces enjeux afin d'être capable de
retourner aux peuples pour lui expliquer et lui demander son approbation. Si les députés provinciaux et fédéraux
avaient à expliquer actuellement les grands enjeux de la ZLÉA, seraient-ils
capable de rencontrer leurs électeurs pour en parler ? Pas sûr.
On doit les contourner si on veut faire avancer nos revendications.
Malheureusement, ils sont devenus à nos yeux stériles et superflus. On leur consigne des mandats qu'ils ont a
effectuer pour mettre en application les grandes décisions prises ailleurs par
des chefs de gouvernements, le monde de la finance et des affaires. Exécutez, point à la ligne.
Quant à la police, ces
"robot cops"sortis directement d'un film de "Stars War", on
s'en sert pour défendre les grands (détenteurs de capitaux et leurs complices de
gouvernement) des truands (le peuple).
Ils sont l'instrument docile dans les mains des magnats et des
aristocrates de ce monde. Ces gens ne
font qu'obéir aux ordres. S'ils ont a penser, qu'ils le fassent intérieurement
ou dans le salon chez eux, par contre il
ne faudrait pas que ça nuise à leur travail.
Au travail, faut pas penser trop fort.
Que veux-tu, on a un job à faire ! Arrêter les manifestants c'est pas
trop compliqué, ils sont très efficaces, par contre d'arrêter les vrais bandits
(la très haute gomme), et bien là, ils le sont moins.
À ce qui a trait aux
médias, certaines couvertures étaient médiocres et laissaient à désirer. Y
avait un parti pris. Il était beaucoup
plus important de couvrir les quelques personnes qui s'acharnaient à jeter le
mur par terre que de parler des vraies affaires, le contenu des
négociations. En fait d'analyses
fouillées et approfondies, fallait pas trop se fier aux spécialistes de tout
acabit souvent achetés et vendus à leurs propriétaires. À part la radio de radio-Canada,
qui a très bien couvert les enjeux, les contenus et les manifestations, les
autres ont du chemin à faire. C'est vrai
que le contenu passe mal à la télévision, ça fait pas une belle image. Un mur par terre avec quelques manifestants
couchés les mains menottés par des agents de Stars War, c'est plus
sensationnel, ça passe mieux à la télé et les chrétiens clients en on plein la
vue. On répond à leurs attentes, ils
sont bien informés. Allez endormis,
dormez encore plus. Même les
journalistes sont en perte de crédibilité, l'éthique en mange un coup. Avec la concentration de la presse, on est
pas prêt de s'améliorer. Le rôle des
grands médias est de faire passer les manifestants pour des criminels
puisqu'ils défient un ordre imposé comme "légitime" lequel nul n'a le
droit de remettre en cause au risque de se faire "lyncher" sur la
place publique. Pas de salut en dehors
de la pensée unique mais on sait qu'un autre monde est possible. À la prochaine manifestation.
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Le
sommet de Québec… ou l’affrontement des anarchistes !
Michel
Handfield
Aux nouvelles sur le sommet de Québec, nous avons vu les manifestants
anarchistes qui ont mis à terre la clôture et qui se sont col taillés avec les
forces de l’ordre. De par définition les anarchistes sont contre l’État, donc
contre tout Gouvernement. Ils ne doivent
donc pas être confondus avec les groupes de gauche, revendiquant
l’interventionnisme et la protection de l’État pour les citoyens, au
Sommet des peuples! Par contre, ils peuvent les rejoindre en ce qui a trait à
la protection de la société civile et la défense citoyenne, car pour les
anarchistes sociaux on parle davantage de mutualisme, de coopération et de
communautarisme. Mais il doit être clair que le Sommet des peuples n’était pas
anarchique… même si des anarchistes pouvaient y assister et manifester.
De l’autre coté, au Sommet de Québec, l’officiel, celui des
négociations de la Zone de Libre Échange des Amériques, se trouvaient les
défenseurs des privatisations et du recul de l’État. L’État ne doit plus
s’occuper de commerce; doit se retirer de ses sphères d’activités économiques -
pour laisser place aux entreprises privées; et ne plus faire de lois qui
nuisent au commerce, même si c’est pour protéger l’environnement ou la santé de
ses citoyens! C’est ainsi que la société
américaine Ethyl Corporation a poursuivi le gouvernement du Canada pour 250
millions quand Ottawa a banni certains additifs de l’essence nuisible à
l’environnement. (Boisvert, 2001) ou que
Jacques Lamarre, dans son allocution au forum sur les services publics de La
Conférence de Montréal, a été clair sur ce sujet en titrant son
intervention « L’État entrepreneur, L’État partenaire et l’État
rentier » ! Bref l’État, à défaut de disparaître, ne doit s’occuper
que du minimum : la protection des biens! Bref l’État police.
On en vient ainsi très près de l’anarcho-capitalisme. (1)
D’ailleurs les penseurs derrière la Zone de Libre Échange des Amérique (ZLÉA)
et du défunt Accord Multilatéral sur les
Investissements (AMI) sont familiers de ce mouvement. (2) D’où l’incompréhension entre les participants
au contre-sommet, qui sont davantage des social-démocrates, avec les
négociateurs de la ZLÉA . Le schisme entre les socialistes et les anarchistes,
qui mit fin à la première internationale ouvrière en 1876, se poursuit donc
sous d’autres formes. Tout comme l’opposition entre les anarchistes et les
anarcho-capitalistes. Québec ne fut
qu’une autre répétition de l’histoire des idéologies sociales, politiques et
économiques de l’humanité!
Références :
Bernard, Michel, 1997, L'utopie néolibérale, Québec: l'aut'journal et Chaire
d'études socio-économique de l'UQAM.
Boivert, Yves, 2001, Les surprises du libre-échange. L’histoire du chapitre
XI, ou comment les avocats réécrivent les traités, in La Presse, 15 avril, p. A
14
Lemieux, Pierre, 1988, L'anarcho-capitalisme, Paris: PUF, coll. "que
sais-je?" # 2406
Notes:
(1) Ici, tout est privé. L'État n'a plus sa raison d'être. Même la police
et la justice sont privées. Remarquez que ce sont des services que le privé
offre maintenant de plus en plus. Au lieu d'entreprendre des poursuites
judiciaires, certaines entreprises offrent des services de médiation auxquels
les clients consentent à se plier au même titre qu'à la justice d'État. C'est
le marché dans toutes les sphères de la société. Le marché a renvoyé l'État et
congédié les gouvernements!
Michel Handfield, Les idéologies modernes, in Societas Criticus , Vol. 3, no. 1, Mars 2001
(2) Dans un livre très intéressant sur l'anarcho-capitalisme, Pierre
Lemieux (1988) nome David Friedman, Robert Nozik et Murray N. Rothbard comme
théoriciens anarcho-capitalistes et Friedrich Hayek comme penseur
apparenté! Le même Hayek, prix Nobel,
est considéré comme un des grands penseurs du néolibéralisme et les autres
auteurs y sont aussi associés. (Bernard, M., 1997) Ceci montre les relations
assez étroite entre ces deux courants qui servent de base aux négociations sur
la Zone de Libre Échange des Amériques (ZLÉA) et de l'Organisation Mondiale du
Commerce (OMC). Nos gouvernements sont
peut être en train de négocier leur propre disparition. Attention, danger!
(Ibid.)
############## Index
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Ce texte fut diffusé lors de ma présence à Québec dans le Journal officiel du Deuxième Sommet des peuples des
Amériques, Continent, et vu son importance, nous
prenons la liberté de le diffuser dans nos pages. Gaétan Chênevert.
Continent
Journal officiel du Deuxième Sommet des peuples
des Amériques
Ce texte fut diffusé lors de ma présence à Québec dans le Journal officiel du Deuxième Sommet des peuples des Amériques, Continent, et vu son importance, nous prenons la
liberté de le diffuser dans nos pages.
Jeudi, le 19 avril 2001
Fuite du chapitre
sur l'investissement de la ZLÉA
Les pires inquiétudes se confirment
Par Jean-Pierre
Larche
À 14 heures,
hier, l'organisme WTOWatch ( mettait en ligne sur son site web le texte du
chapitre sur l'investissement de la ZLÉA.
Trois heures de lecture et de consultation plus tard, la conclusion
s'est avérée amère quoique appréhendée : l'esprit du chapitre 11 de l'ALENA et
du mort-né Accord multilatéral sur l'investissement (AMI) s'est trouveé un
nouveau squelette des plus ambitieux, la ZLÉA.
Le texte du
chapitre sur l'investissement, quoique encore bourré de parenthèses, confirme
en effet les pires craintes exprimées par les opposants à la ZLÉA. Bien que le ministre canadien du Commerce
international Pierre Pettigrew ait répété à plusieurs occasions que le Canada
n'apposerait pas sa signature à un accord de libre-échange panaméricain dans
lequel serait transposé le controversé chapitre 11 de l'ALENA, force est de
constater que la ZLÉA n'est qu'une extension de l'ALENA à l'ensemble des
Amériques et qu'elle va même plus loin.
On retrouve donc
dans la ZLÉA, que nos chefs d'État entendent metre sur pied d'ici 2005, les
mêmes mécanismes tant dénoncés de l'ALENA et de l'AMI. Les notions du traitement national et de la
nation la plus favorisée qui handicaperaient fortement la capacité des États à
contrôler leur développement économique national seraient reproduites dans la
ZLÉA. Il en va de même de l'interdiction
pour les États d'apposer des conditions relatives à une obligation de résultat
aux investissements, par exemple certaines obligations relatives à
l'approvisionnement ou à la transformation au niveau local ou au transfert de
technologie ce qui s'avère carrément néfaste au développement durable des
économies américaines.
« Il s'agit du
triomphe des droits des investisseurs et des entreprises sur les droits
humains, des travailleurs et de l'environnement, s'est exclamé Dorval Brunelle
du Réseau québécois sur l'intégration continentale. Ce document étendrait l'application d'une
charte des droits et libertés des investisseurs à la grandeur des trois
Amériques. » Le chapitre sur l'investissement
de la ZLÉA renferme en effet cette disposition qui met à égalité entreprises et
États en permettant aux investisseurs de poursuivre les gouvernements pour
obtenir compensation lorsque leur « droit au profit » est entaché par des
expropriations ou des législations jugées contraires à l'esprit de
l'accord. En fait, le texte va encore
plus loin que l'ALENA puisqu'il reprend certaines dispositions de l'AMI qui
permettraient aux investisseurs d'obtenir compensation en cas de guerre, de
révolution ou de conflit social. Une
interprétation forte de ces termes pourrait éventuellement donner droit à de
telles compensations en cas de grève.
Nos gouvernements
se refusent toujours à ouvrir le dialogue.
Ils opposent une fin de non recevoir aux revendications légitimes de la
société civile quant à un encadrement strict des échanges commerciaux. Ils ne font pas davantage écho à nos demandes
relatives à la promotion et à la défense des droits humains et de la démocratie.
En même temps,
ils négocient en catimini rien de moins qu'une charte des droits des
investisseurs.
Cette fuite
confirme que la ZLÉA, telle que conçue par les architectes du libre-échange et
endossée par nos gouvernements, est à des lieues des préoccupations des
citoyennes et citoyens et qu'elle est taillée sur mesure pour le capital.
Sites à consulter
:
WTOWatch
La fuite
ALENA (chapitre
11 sur l'investissement)
http://www.nafta-sec-alena.org/french/index.htm
Assemblée
nationale, Québec : commission des institutions
Le Québec et la
Zone de libre-échange des Amériques : Effets politiques et socioéconomiques
http://www.assnat.qc.ca/archives-36leg1se/fra/Publications/rapports/rapci1.html
AMI (accord
multilatéral sur les investissements)
http://www.monde-diplomatique.fr/dossiers/ami/plan.html
Déclaration des
droits de l'homme (droits humains)
http://www.un.org/french/aboutun/dudh.htm
############## Index
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Michel Handfield
La mondialisation est
sur toutes les lèvres actuellement. Mais que signifie-t-elle? En fait elle signifie
l’ouverture des frontières au commerce et l’abandon des protections nationales!
On parle de démocratie par le commerce, le libre-marché devenant synonyme de
liberté et démocratie. Ainsi le marché, deviendrait la nouvelle place démocratique, où tout serait
accessible à tous. Que ce soit des voitures, des parfums, la nourriture, l’eau,
les soins de santé, l’éducation! Absolument tout serait marchandise et tous
seraient égaux devant le marché… à condition d’avoir de l’argent pour y
accéder!
C’est une forme de
libéralisme primaire, car tous n’ont pas les moyens de se payer les biens
essentiels nécessaire à leur survie. Certains pays ont un revenu moyens par
habitant de beaucoup moins de 1000$ annuellement. Alors comment se payer de
l’eau à 3$ le litre? Égalité devant le marché est loin de signifier égalité des
chances et équité!
Des penseurs se
penchent donc sur cette délicate question. C’est le cas de Ricardo Petrella et
du Groupe de Lisbonne. Comme un très bon
livre en résulte, nous vous en conseillons plutôt la lecture. L’idée en est
que…
Le contrat mondial de l’eau se fonde sur le principe que l’eau
appartient aux habitants de la Terre. Il reste inspiré par deux
finalités : l’accès de base à l’eau pour tous et sa gestion solidaire et
durable, impliquant des devoirs de solidarité, de cohérence [,] pour ne pas
mettre en péril les libertés et les droits des générations futures [,] et de
protection et de respect envers l’écosystème Terre. (selon la jaquette arrière
du livre)
Bref, l’eau doit être
une ressource partagée. Mais comment? Par le marché, comme le pétrole, avec
tout ce que cela implique de tractation et de spéculation? Et au profit de qui?
Ou, l’eau, un bien mondial sous la gestion des Nations-Unies? Les pays n’ayant
pas le droit de la vendre, mais ayant l’obligation de la protéger. Cependant,
les embouteilleurs et les exportateurs pourraient-ils tirer profit du
traitement et du transport de l’eau? Et cela sans n’avoir rien à payer pour la
ressource (c’est un bien mondial et gratuit!) en retour!
Que fait-on des
cultures locales qui ont un rapport particulier à l’eau – comme les Indous et
le Gange! Si leur culture ancestrale crée des problèmes de pollution des eaux,
comment faire coïncider culture
ancestrale, religion et notions environnementales modernes?
Est-il être
envisageable de taxer la vente commerciale de l’eau (comme Perrier) et que
cette taxe aille à un fond mondial de l’eau qui permettrait de développer des
techniques de dépollution, de protection et d’accessibilité à l’eau, car
pendant que certains ont une piscine dans leur cour, ailleurs dans le monde,
des populations entières ont un accès limité à l’eau :
Peut-on espérer qu’en laissant dépendre la gouvernance de l’eau des
orientations politiques qui prédominent actuellement dans les pays riches du
monde et des moyens dont disposent les pays pauvres, on parviendra à empêcher
que plus de 3 milliards d’êtres humains sur les 8 milliards qui habiteront la
Terre entre 2020 et 2025 n’aient pas accès à l’eau « source de vie »?
(Petrella, 1998, p. 32)
Quand vous boirez un
verre d’eau en bouteille et que vous laverez à grande eau votre trottoir, au
lieu de tout simplement le balayer, pensez aux personnes qui meurent dans le
mode par manque d’eau. Pensez aux conflits entre États – et c’est une partie
des problèmes du Moyen-Orient – pour un petit cours d’eau qui passe à la limite
de plusieurs pays et qui peut être détourné de son cours pour le profit de l’un
au dépends de l’autre! (1) Vous verrez que la mondialisation, ce n’est pas une
question si éloigné que l’on croit. Nous en faisons tous partie, sauf qu’il
faut sortir de la vision strictement commerciale que l’on nous présente pour le
bien de notre humanité. Nous sommes tous dans un même vaisseau spatial, la
Terre, comme le disent certains environnementalistes.
Note :
1. Philippe Rekacewicz, L'eau convoitée, in Le Monde diplomatique, juin 2000
Bibliographie
Petrella, Ricardo,
1998, Le manifeste de l’eau – Pour un contrat mondial, Belgique : Labor
Sorman, Guy.
2000, Le génie de l’Inde, France : Fayard
Stead, W. Edward and Stead, Jean Garner, 1996, Management for a small
planet, Sage Publications
Références
Internet
http://www.mri.gouv.qc.ca/la_bibliotheque/eau/
http://www.catholink.ch/cotmec/action.htm
############## Index
##################
Gaétan Chênevert
Qu'est-ce que le néo-libéralisme ?
Dans son livre «L'utopie néolibérale» Michel Bernard1 mentionne
que le néolibéralisme est une gigantesque machine à persuasion et à résignation
qui nous invite à une quiétude passive devant une présumée harmonie naturelle
du marché. Quant à J.-Claude St-Onge, il
signale dans «L'imposture néolibérale2 », que les néolibéraux
adhèrent à une philosophie politique où la propriété et le marché sont des
valeurs plus importantes que la liberté et la vie.
Le marché est une construction idéale qui
convient parfaitement aux économistes […].
En se cramponnant à la notion de marché concurrentiel et impersonnel,
les économistes s'accrochent à la matière de leur enseignement […]. J'imagine que les sorciers s'accrochaient
énergiquement à la sorcellerie (John Kenneth Galbraith, cité par J-Claude
St-Onge).
D'autres chez Autonomie avancent qu'il
s'agit d'une idéologie, d'une idéologie nouvelle, une utopie d'exploitation
sans limites, pour conclure enfin, une révolution conservatrice.
" La révolution conservatrice se
réclame du néo-libéralisme, se donnant ainsi une allure scientifique, et la
capacité d'agir en tant que théorie. Une des erreurs théorique et pratique de
beaucoup de théories - à commencer par la théorie marxiste - a été d'oublier de
prendre en compte l'efficacité de la théorie. Nous ne devons plus commettre
cette erreur. " (Bourdieu)
" Nous avons affaire à des adversaires
qui s'arment de théories, et il s'agit, me semble-t-il, de leur opposer des
armes intellectuelles et culturelles. " (Bourdieu)
On peut s'attendre d'une définition à quelque chose de précis et
bref. Disons que dans le cas du
néolibéralisme, c'est un peu plus compliqué et ça laisse le néophyte un peu
perplexe. Il faut comprendre qu'un tel
néologisme ne se définit pas en quelques mots et ne nous est pas apparu
brusquement du jour au lendemain.
Nous retrouvons donc dans ces livres et textes l'essentiel du
néolibéralisme. Pour mieux le comprendre
afin de pouvoir se prémunir de ses dangers, il faut remonter dans l'histoire du
néolibéralisme pour voir de quelle façon des intellectuels bien organisés et distribués ont construit à
partir d'idées économiques du passé, une idéologie dite nouvelle et
révolutionnaire qui deviendra au fil du temps une pensée unique dont on
s'appliquera minutieusement à nous faire avaler. J.-Claude St-Onge traduit bien dans son
chapitre premier l'ascension du mouvement néolibéral. C'est avec plaisir que je veux partager avec
vous «l'acte de naissance et priorités du néolibéralisme», l'histoire explique
beaucoup de chose.
Gaétan Chênevert
CHAPITRE PREMIER
Acte de naissance et
priorités du néolibéralisme
J.-Claude St-Onge, chapitre premier p.19 - 38.
Vous, les dirigeants politiques, vous devez
savoir que vous êtes désormais sous le contrôle des marchés financiers (M.
Tietmeyer3)
CES PAROLES DU PRÉSIDENT d'une des institutions financières les plus
puissantes de la planète capturent on ne peut mieux l'air du temps: la
domination de la finance sur la politique et la subordination de la vie aux
impératifs du marché. Ces propos
tenus devant 350 ministres et premiers ministres, avec toute l'assurance et
l'arrogance que confère la richesse, illustrent bien les priorités du
néolibéralisme. Les néolibéraux
adhèrent à une philosophie politique où la propriété et le marché sont des
valeurs plus importantes que la liberté et la vie. La liberté, c'est la liberté économique,
c'est-à-dire le privilège exorbitant de disposer du travail d'autrui, ou le
«droit naturel» d'acquérir des richesse.
C'est en invoquant la primauté de la propriété que le néolibéralisme
considère tout forme de partage des revenus comme du vol, car le principe qui
doit régler la distribution des richesses est: «À chacun selon ce que
produisent lui-même et les instruments qu'il possède.»4 La justice se résume donc à la possession, et
une société juste répartit bienfaits et obligations dans le respect des titres
de propriété légitime. Celui qui ne
possède rien doit s'en remettre à la charité privée, et la justice sociale est
rangée au musée des horreurs. D'après
Hayek, cette conception frauduleuse attise l'animosité envers les gens beaucoup
plus aisés5. Des enfants
meurent, mais tant que les droits de propriété ne sont pas violés, il n'y a
rien d'injuste. La primauté de la
propriété justifie la demande de retrait de l'État et le rejet des droits
économiques et sociaux, tels le droit à des soins de santé et le droit au
travail.
À l'origine, le libéralisme est fondé sur une philosophie et une éthique
naturalistes. Ce vieux naturalisme,
revu, corrigé et amélioré par Hayek, prétend que les principales institutions
sociales obéissent à des lois naturelles ou quasi naturelles. La société est plus ou moins réglée comme le
mouvement des planètes, et elle échappe pratiquement à tout contrôle humain et
à toute tentative de l'orienter et de la diriger. Le mécanisme de coordination de la réalité
sociale est le marché, dont les lois sont aussi inflexibles que celles de la
nature. Tel un chef d'orchestre, si ce
n'est Dieu en personne, il harmonise les intérêts divergents, coordonne la
production, distribue les ressources efficacement et garantit la liberté. Il en découle que toutes formes
d'interventionnisme économique (médecine sociale, salaire minimum, sécurité au
travail) et de planification sont superflues et nocives, puisque le marché
génère spontanément l'ordre et la prospérité.
Aux relations sociales réelles, aux rapports entre les hommes, modifiables,
transitoires et historiques, on substitue des abstractions et des lois
éternelles. À l'instar du ciel, le
marché serait un fait de nature. La
démocratie libérale, fondée sur le marché, représenterait la fin de l'histoire,
l'«horizon indépassable de notre temps».
L'effondrement du pseudo-communisme soviétique n'est-il pas la preuve
qu'il n'y a point de salut hors du marché?
L'internationale néolibérale: les travailleurs de l'ombre.
C'est à Paris, en 1938, au cours du colloque Walter-Lippman, que les
premiers balbutiements de l'avant-garde néolibérale se font entendre. Deux ans après la publication de l'ouvrage de
Keynes, La théorie générale, une trentaine d'intellectuels se réunissent
dans le but de répliquer à la «dérive étatiste de l'Occident», et au
«socialisme rampant. Le modèle
économique et social keynésien commence déjà à supplanter le modèle libéral
traditionnel discrédité par la grande crise de 1929. de plus, la montée du fascisme et la
consolidation du régime soviétique, de mauvais augure pour le libéralisme,
exigent une riposte vigoureuse. Les
participants au colloque soutiennent que la planification économique est
incompatible avec la liberté, car elle «implique l'État totalitaire», et ils
s'opposent à toutes les déviations «collectivistes» qui, dans leur optique
comprennent aussi bien le keynésianisme que les régimes fascistes et
soviétique. Un professeur qui enseigne à
la London School of Economics depuis 1931 est aux premières loges. Il s'agit de l'économiste autrichien et prix
Nobel Friedrich von Hayek (1899-1992).
En 1950, Milton Friedman – qui deviendra conseiller du président Reagan
– l'invite à dispenser son enseignement à l'université de Chicago, place forte
du néolibéralisme. Jusqu'à ce jour, le
nom de Hayek est pratiquement inconnu, sauf dans des cercles restreints, mais
son influence dans les coulisses du pouvoir est inversement proportionnelle à
son degré de notoriété auprès du grand public.
Ce colloque n'aura pas de suites immédiates en raison de la guerre.
Mais ce n'est que partie remise.
À l'initiative de Hayek, plusieurs des participants à la conférence de
Paris et des intellectuels prestigieux, notamment le philosophe Karl Popper,
assistent à une rencontre, en Suisse, au mont Pèlerin, en 1947. Parmi les invités à la conférence inaugurale,
des économistes qui seront couronnés par le prix Nobel: Maurice Allais, Milton
Friedman, Friedrich Hayek. Des
journalistes de Fortune Magazine, Newsweek, Time and Tide et Reader's Digest
sont au rendez-vous pour assurer un débouché médiatique aux idées
néolibérales. L'acte de naissance du
néolibéralisme est signé avec la mise sur pied de la Société du
Mont-Pèlerin. Le but de cette
«société savante», dont les idées sont tout à fait marginales à l'époque, est
de changer le climat d'opinion en faveur d'un libéralisme tous azimuts, fondé
sur les prétendues vertus de l'économie de marché. Pendant longtemps, ses membres travailleront
dans l'ombre et à contre-courant.
Aujourd'hui la Société du Mont-Pèlerin regroupe 5000 membres recrutés
parmi l'élite politique, économique et universitaire. Elle compte des hommes d'affaires, des
représentants de ces fameuxes boîtes à idées (think tanks), ainsi que plusieurs
anciens ministres et politiciens de presque tous les coins du monde (Etats-Unis,
Italie, Nouvelle-Zélande, Japon, Grande-Bretagne, etc.). La Société reçoit le soutien d'hommes
d'affaires, tel le milliardaire suisse Hunold, et de fondations privées, telle
la William Volker Fund. Le financier
Sylvio Berlusconi, un temps premier ministre italien, membre d'une loge
maçonnique d'extrême-droite, présida aux destinées de la Société de 1988 à
1990.
À partir de 1947, les membres et sympathisants de la Société du
Mont-Pèlerin tisseront une véritable toile d'araignée qui s'étendra partout à
travers le monde, y compris au Québec et au Canada, comme nous le verrons. Pour les intellectuels néolibéraux, l'exportation
des idées est aussi vitale que l'exportation des capitaux et des
marchandises. Sous le patronage de la
Société, une kyrielle de boîtes à idées néolibérales voient le
jour. Un des membres fondateurs et
soutien financier de la Société, le milliardaire britannique Antony Fisher,
fervent admirateur de Hayek qui a fait fortune dans l'élevage industriel des
poulets, devient le principal bailleur de fonds de l'Institute of Economic
Affairs (IEA) (http://www.iea.org.uk/), créé en 1955 en
Grande-Bretagne. L'IEA est la première
boîte à vulgariser les thèse de Hayek et de Friedman. Elle organise des séminaires et des déjeuners
pour diffuser la bonne parole aux hommes d'affaires et aux journalistes. Plusieurs membres de l'entourage de Margaret
Thatcher, première ministre britannique élue en 1979, font partie de
l'IEA. L'institue publie des
documents sur la politique économique keynésienne, les errements de
l'État-providence, les «privilèges» syndicaux, l'inefficacité du secteur
public, et fait l'éloge du «marché dans tous les domaines de la vie éconoqique
se sociale».
Anticommuniste notoire, Fisher est partout à la fois. En 1975, il devient codirecteur du Fraser
Institute de Vancouver; sa mission est de recueillir des fonds pour cette
boîte. Le Fraser a été fondé un an plus
tôt par l'homme d'affaires canadien Pat Boyle.
En véritable croisé, Fisher contribue à la création d'organisations
semblables en Australie, à San Francisco et à New York. Les documents officiels de la nouvelle
organisation new-yorkaise sont signés par Bill Casey, qui deviendra directeur
de la CIA. Infatigable, Fisher participe
à la fondation de l'Atlas Institute, dont la mission est de créer des think
tanks néolibéraux à travers le monde.
L'une de ces organisations, l'Adam Smith Institute (ASI), qui voit le
jour aux Etats-Unis en 1976, se distingue par son prosélytisme et son
radicalisme. Deux anciens étudiants de
l'université de Saint Andrews, en Écosse, dont Madsen Pirie, fonent une branche
de l'ASI en Grande-Bretagne. Hayek,
toujours lui, en fut le président d'honneur, pendant que Friedman et le prix
Nobel d'économie James Buchanan en inspirent les travaux. Ce dernier, qui s'est joint à la Xociété du
Mont-Pèlerin, vient d'être nommé au «conseil scientifique» de l'Institut
économique de Montréal (voir plus bas).
Les conférences annuelles de l'ASI sur la privatisation sont courues,
notamment par les dirigeants des pays de l'ancien bloc de l'Est. Elle publie des brochures et des manuels
destinés à promouvoir la déréglementation et la privatisation. Pirie, l'un des auteurs du Manuel de
privatisation (1989), a fait ses premières armes à l'Heritage Foundation,
aux États-Unis, un think tank de 150 permanents. Une semaine après la victoire de Reagan en
1980, la fondation publie Mandate for Leadership, le manifeste
néolibéral de Reagan.
L'internationale néolibérale a ses antennes à Montréal: il s'agit du
Saint Lawrence Institute et de l'Institut économique de Montréal (IEDM), dont
les activités sont débuté en juin 1999.
Les néolibéraux ne désarment pas.
L'IEDM se présente comme un institut de recherche «indépendant» qui
étudie le «fonctionnement des marchés» et qui œuvre à la «promotion de
l'approche économique dans l'étude des politiques publiques». C'est le fruit de l'initiative commune
d'entrepreneurs, d'universitaires et d'économistes de Montréal. Il a le même statut qu'un organisme
charitable et «ne reçoit aucun financement public» – lire aucun financement
direct – puisque les contributions aux organisations charitables sont
déductibles d'impôts! L'IEDM organise
des conférences et des séminaires, et diffuse de nombreuses publication. En juin 2000, son site Internet rend compte
d'une conférence prononcée par un professeur d'économie américanin La taille de
l'État et la richesse des nations». Le
conférencier soutient que si les gouvernements s'en tenaient à leurs activités
de base, ni plus ni moins que le programme préconisé par Adam Smith (défense,
ordre public, routes, éducation), les dépenses gouvernementales seraient
réduites à 15% du PIB. Plusieurs cadres
de la Banque de Montréal assistaient à la rencontre, et le président de la
Banque a remis un chèque à l'Institut, heureux qu'il était de «contribuer aux
efforts de l'IEDM». Monique
Jérôme-Forget, critique pour les finances du Parti libéral du Québec, était
présente dans la salle. Un autre
déjeuner-conférence faisait le point sur les récentes réformes de l'éducation
en Angleterre et aux Etats-Unis. Parmi
les mesures citées en exemple le conférencier souligne les incitations
salariales, un système d'évaluation efficace des enseignants, la transformation
des directeurs d'école en gestionnaires avec le pouvoir d'embaucher et
licencier, et la mise en œuvre d'une ddée de Milton Friedman, à savoir des bons
d'éducations payés par le gouvernement permettant aux parents de choisir leur
école (voir chapitre VI). Jean-Luc Migué
préside le «conseil scientifique», de l'IEDM, dont font partie James Buchanan
et Pierre Lemieux. Ce dernier enseigne
en sciences administratives à l'Université du Québec à Hull. M. Lemieux est l'auteur d'un ouvrage intitulé
L'anarcho-capitalisme, dont nous reparlons au chapitre VI, et milite
pour différentes causes comme le droit de porter des armes et de posséder des
esclaves. M. Migué, qui a été
successivement professeur à l'Université Laval et à l'École nationale d'administration
publique, a publié récemment Étatisme et déclin du Québec. En 1994, il a reçu la médaille d'argent du
Sir Antony Fisher Memorial Prize (du nom du membre de l'IEA et fondateur du
Fraser Institute!) pour son ouvrage Federalism and Free Trade publié par
l'IEA de Londres. M. Migué est Senior
Fellow du Fraser de Vancouver. Le
site Internet de l'IEA nous renvoie à cinq autres instituts semblables au
Canada, à 13 aux États-Unis et à trois outre-mer.
Une conjoncture favorable aux idées néolibérales
Ce long travail de préparation idéologique n'aurait pas porté ses fruits
sans les bouleversements survenus au milieu des années 1970. les premiers signes annoncçant la fin du
consensus keynésien surviennent au début de cette décennie, alors que les taux de
profit commencent à fléchir. Successo,
la revue du patronat italien, dans sa livraison de septembre 1972, titre: «Les
profits : dieu déchu?» En mai 1973, la
revue Fortune s'inquiète : «The Clouded Prospects for Corporate
Profits». La tarte à partager diminue et
va commander l'imposition d'un nouvel ordre mondial. La crise de croissance est profonde, et le
capitalisme n'arrive plus à retrouver son souffle.
En effet, le tournant de 1975 sonne le glas des Trente Glorieuses,
trente années de croissance inégalée dans l'histoire du capitalisme. Soudain, l'histoire change de cap. L'économie mondiale entre dans une phase de
mutation, et la création de nouvelles richesses est coupée de moitié. Bienvenue aux «trente piteuses». Ces conditions vont permettre à l'idéologie
néolibérale de se transformer en véritable force politique. À partir de ce moment, les vieilleries
conceptuelles sur les «lois du marché», qu'on croyait bel et bien enterrées
après la grande crise de 1929, seront promues au rang de vérités universelles.
Un sociologue allemand du XIXe siècle, qu'il n'est plus de
bon ton de citer, écrivait que «la dissolution des vieilles idées va de pair
avec la décomposition des anciennes conditions de vie» (Manifeste communiste,
de Marx et Engels). Le développement
fulgurant du néolibéralisme est la conséquence de la décomposition des
anciennes conditions de vie, qui se présente sous la forme d'un double
effondrement. D'une part, l'affaissement
de la croissance des années d'après-guerre qui entraîne le libéralisme
keynésien dans sa chute. D'autre part,
l'écroulement des oppositions organisées, du syndicalisme au marxisme. Avec la déconfiture du marxisme historique,
une digue importante vient de céder. Ses
différents modèles sont inutilisables, et la théorie de Marx est depuis
longtemps pétrifiée en dogme stérile.
L'effondrement du «marxisme» et le discrédit jeté sur les théories de
Keynes créent un vide idéologique. Les
vieux repères ont disparu. Dès lors, la
voie est grande ouverte au règne sans partage de l'idéologie néolibérale, qui
triomphe faute de combattants.
Quels sont les principaux signes de cette mutation sur le plan
économique?
À partir de 1975, les taux de croissance des pays industrialisés (voir
tableau 1) sont coupés de plus de moitié.
Fait remarquable, de 1989 à 1996 le taux d'accroissement des nouvelles
richesses (le PIB ou produit intérieur brut) est divisé par quatre au
Canada, où la magie néolibérale aurait créé, selon certains observateurs, une
«prospérité évidente». Tels sont les
résultats mirobolants de 20 ans de médecine néolibérale. On notera que la France, censée représenter
l'ancien modèle fondé sur l'intervention de l'État, fait mieux que le
Royaume-Uni, donné comme étalon de la nouvelle économie. Soulignons que l'analyse qui ramène les
problèmes de vitalité économique à un seul facteur, soit le rôle plus ou moins
grand de l'État, est d'une pauvreté inouïe et d'un vide d'une profondeur
insondable comme le suggère le tableau de la page 30 (tableau 1).
Tableau 1
Taux de croissance
annuels (en pourcentage) |
|||
Période |
1960-1973 |
1973-1989 |
1989-1996 |
Monde |
5,4 |
2,9 |
3,1 |
Pays industrialisés |
5,3 |
2,8 |
1,8 |
Pays en développement |
5,7 |
3,8 |
5,9 |
Bloc de l'Est |
5,4* |
3,6** |
-6,4 |
Canada |
5,3 |
3,4 |
1,2 |
États-Unis |
4,2 |
2,8 |
1,9 |
Royaume-Uni |
3,1 |
2,0 |
1,2 |
France |
5,3 |
2,4 |
1,3 |
Source: l'état du monde
1998, p.94 * 1969-1979, L'état du
monde 1988-1989, p. 584 ** 1976-1985, L'état du
monde 1995, p. 570 |
Dans plusieurs pays, le chômage atteint des sommets, soit le double et
le triple des taux affichés dans les années 1960. Au Canada, l'emploi entre dans «une nouvelle
ère glaciaire»: entre 1989 et 1993 la création nette d'emplois est nulle; on
enregistre même un déficit de 103 000 emplois.
Nous vivons à l'ère des mises à pied massives. Bell congédie au-delà de 20% de ses
effectifs. Au Canadien National, malgré
des profits records, la main-d'œuvre diminue de moitié. Entre 1991 et 1996, les banques abolissent 11
000 emplois. Aux États-Unis, selon le Washington
Post, les sociétés inscrites en Bourse employant plus de 5000 personnes
suppriment 3,37 millions d'emplois entre 1991 et 1995.
Les fruits de cette croissance relativement médiocre sont confisqués par
les classes dominantes. Au Québec, de
1975 à 1995, le salaire réel des travailleurs (compte tenu de l'inflation)
diminue de 18%. Pendant ce temps, celui
des dirigeants d'entreprises augment de 19% avant impôts. Le nombre de familles faisant partie de la
classe moyenne passe de 60% en 1973 à 44% en 1996. En France, la part des salaires dans le PIB
baisse de 9,1% entre 1982 et 1995.
L'économie mondiale est assise sur un volcan, une montagne de dettes
contractées par les gouvernements, les entreprises et les consommateurs. Au début des années 1990, les entreprises
et les consommateurs canadiens croulent sous près de 900 milliards de dollars
de dettes, soit le double de la dette publique. Mais c'est cette dernière qui fait
scandale. Vers la fin des années 1980,
elle fait l'objet d'un véritable délire médiatique. Photos à l'appui, les manchettes rugissent;
«Ce bébé vient de naître: il doit déjà 12 300$». Rien n'est épargné. Encore hier, on brandissait la menace d'une
mise en tutelle du Canada par le Fonds monétaire international.
Un «nouveau» discours
Le contexte créé par la fin des Trente Glorieuses diffère des
turbulentes années 1960. Finie la Great
Society du président américain Lyndon Johnson (1963-1968). Exit la Société juste de Pierre Elliot
Trudeau (1919-2000), premier ministre canadien élu en 1968, qui prétendait, à
l'instar de Johnson, mettre fin aux injustices sociales et à la pauvreté. Terminés les gouvernements qui ont un préjugé
favorable aux travailleurs. La justice
sociale? Surtout pas. Une «superstition», une «fraude», au mieux un
«concept vide de sens». Il faut
dégonfler les aspirations des Trente Glorieuses et rappeler les
«irresponsables» à l'ordre. Pour faire
accepter la nouvelle réalité, il faut déconstruire l'ancien discours
«archaïque» et «dépassé», et le remplacer par un discours «nouveau»,
«moderne» et «révolutionnaire». Ce
nouveau discours est puisé dans le vieux fonds de commerce intellectuel du
libéralisme.
Le discours néolibéral mise sur la répétition inlassable des mêmes
formules creuses sur la «mondialisation», le «village planétaire», le
«progrès». Le néolibéralisme se pare des
signes de la modernité et repose sur l'art de maîtriser l'euphémisme, comme le
signale Bourdieu6. La
«flexibilité» devient une façon déguisée de faire accepter la précarité et le
chômage massif. L'«excellence» et la
compétition avec les pays où l'on travaille 12 heures par jour sont des
prétextes pour «dociliser» la main-d'œuvre et faire avaler les coupes
salariales. Le «tout le monde doit faire
des efforts» est devenu synonyme de «lâchez vos acquis sociaux». Et la référence incontournable aux «lois du
marché», un moyen d'avaliser la loi du plus fort.
Comme toute idéologie, le néolibéralisme fait tenir la réalité sur sa
tête. Le grand bond en arrière du
thatchérisme est présenté comme une «révolution», et Mike Harris, premier
ministre ontarien, fait passer ses mesures réactionnaires pour la «révolution
du bon sens». Les «nantis» ne sont pas les
milliardaires, mais les travailleurs qui ont la sécurité d'emploi, et les
«privilégiés», ceux qui ont encore du travail.
Ce discours excelle dans l'art de culpabiliser les «gras durs» qui ont
réussi à conserver les maigres avantages issus des luttes sociales.
Ce discours fort, parce qu'il compte sur des moyens proprement
extraordinaires, est propagé par des organismes comme la Banque mondiale, le
Fonds monétaire international (FMI) l'Organisation de coopération et de
développement économique (OCDE) et l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Les associations patronales, les ténors de la
finance et de la grande industrie, les experts et la plupart des éditorialistes
entonnent le message en chœur. La hausse
des profits et la diminution des salaires favorisent la croissance, le
désengagement de l'État engendre la prospérité, et les syndicats sont un
obstacle à la bonne santé de l'économie.
Ce consensus devient signe de vérité.
Sous des allures de «message de libération», on nous livre un message
fataliste et on nous laisse croire à l'impossibilité de lui opposer tout autre
discours. Le message est tellement bien
intégré qu'il a conduit à la démission et à la démobilisation, et disqualifié
tout autre forme de discours. Ceux qui
parlent encore de «changement social» et de «solidarité» sont des «passéistes»
et des «dinosaures» qui refusent obstinément les nouvelles réalités. Les «penseurs de la nouvelle économie» sont
là pour leur insuffler une bonne dose de «réalisme».
Comme de bons élèves, les politiciens puisent dans ce credo qu'ils
répètent, comme jadis nous répétions les leçons du petit catéchisme, parfois
fidèlement, d'autres fois grossièrement.
L'éditorialiste de La Presse souligne, à juste titre, qu'on abuse
du terme «néolibéral». Il tente de nous
convaincre que plusieurs politiciens ne sont pas des néolibéraux dans l'âme,
sous prétexte que les «néolibéraux, les vrais, remettent l'État en cause». Ce qui est inexact, comme nous le
verrons. Il est vrai que certains
politiciens, tels Mike Harris ou Stockwell Day, de la nouvelle coalition de
droite, l'Alliance canadienne, s'identifient davantage au néolibéralisme. Il n'en demeure pas moins que le gouvernement
Bouchard a administré la même médecine de cheval dans l'éducation et la santé
que les conservateurs ontariens, et que les socialistes français ont privatisé
avec autant d'entrain que le gouvernement Chrétien a sabré dans les programmes
sociaux. Si tous n'en meurent pas, personne
n'y échappe. Et il importe peu que les
grands financiers et les politiciens soient néolibéraux par conviction, par
opportunisme ou par «nécessité». Un coup
de pied ne fait pas moins mal parce qu'il vient de celui qui prétend agir pour
notre bien.
Imposer le nouvel ordre
En 1979, Margaret Thatcher, la Dame de fer, remporte ses élections avec
le slogan «Faisons reculer les frontières de l'État». Reagan, de son côté, jure d'avoir la tête du
«monstre», l'État-providence. Le mot
d'ordre est partout le même: il faut «réduire la taille de l'État». En réalité, cette formule est une façon
polie de dire qu'il faut laisser libre cours aux «lois du marché», c'est-à-dire
créer des conditions favorables à l'accumulation du capital. Nous verrons au chapitre VII quelles ont été les
conséquences de ces politiques.
Mais cela prend plus que des mots et des slogans pour imposer un nouvel
ordre économique et social. Le
rétablissement des conditions propices à l'accumulation du capital implique une
condition essentielle: la mise au pas des travailleurs. En 1981, à peine installé à la
Maison-Blanche, Reagan congédie les contrôleurs aériens en grève. En 1982, la Dame de fer obtient la tête des
syndicats du charbon et des transports ferroviaires. La ligne dure paie: le nombre d'heures de
grèves en Grande-Bretagne passe de 1,3 million en 1972 à 250 000 en 1997. En 1982 les travailleurs québécois de la
fonction publique sont dans la mire des négociateurs patronaux, dirigés par M.
Lucien Bouchard, alors négociateur en chef du gouvernement du Québec. Les syndicats, qui seraient à l'origine du
déclin de l'empire britannique, comme Hayek le prétend sérieusement, sont la
cible des gouvernements et des entreprises.
Aux Etats-Unis, le taux de syndicalisation passe de 34,5% en 1956 à
14,5% en 1997, et celui de la France fléchit de moitié. Le Québec fait pratiquement figure
d'exception avec un taux qui passe de 49,7% en 1992 à 40,3% en 1997. robert Borosage, fondateur du mouvement
Campaign for America's Future, signale que 10 000 travailleurs sont congédiés
chaque années, en toute impunité, pour activités de recrutement syndical. Un chercheur de l'Université Cornell affirme
que le tiers des entreprises ont avoué avoir congédié illégalement des
militants syndicaux. Ce pourcentage
s'élevait à 8% dans les années 1960. Au
paradis du néolibéralisme, l'employeur peut fouiller votre vestiaire, votre
boîte à lunch, votre ordinateur, votre courriel.
La stratégie de confrontation directe avec les travailleurs et les
syndicats s'accompagne de diverses mesures pour faire pencher le rapport de
forces en faveur du capital. Soulignons
des mesures telles que la relocalisation d'entreprises, la modernisation des
industries traditionnelles (acier, automobile), la révolution informatique et
les fusions.
Aux stratèges économiques et politiques qui n'auraient pas compris,
l'OCDE, financée à même les deniers publics, fournit la recette. Dans ses encycliques, elle proclame qu'il
faut accroître «la flexibilité du temps de travail, créer un climat favorable à
l'entreprise, [,,,] revoir les dispositions relatives à la sécurité
d'emploi». Elle énumère les acquis des
réformes britanniques: affaiblissement du «monopole syndical», «fréquence
réduite des grèves», »souplesse des conditions d'embauche et de licenciement», «progression
du salaire réel inférieure à la productivité». Pour s'assurer de leur loyauté, 400 patrons
américains ont fait signer des contrats d'exclusivité à 35% de leurs employés:
interdiction de révéler les secrets d'entreprise et d'aller travailler chez un
concurrent. Des hôpitaux aux
multinationales, on cherche à transformer la main-d'œuvre en pâte à modeler par
la précarisation, l'évaluation et l'individualisation des objectifs pour chaque
salarié. Et la grande entreprise n'a
jamais tant parlé d'éthique de confiance, de loyauté
On a donc réussi un tour de force peu banal: remplacer les idées d'hier
par celles d'avant-hier et les présenter comme celles de demain. On préfère s'accrocher à la vieille
philosophie naturaliste de John Locke (1632-1704) et d'Adam Smith (1723-1790),
puisque Marx (1818-1883) et Keynes (1883-1946) seraient dépassés.
Quelques citations :
«La rente et le profit mangent les salaires, et les classes supérieures
de la nation oppriment l'inférieure»
Adam Smith, cité par René Passet, dans L'illusion néo-libérale, Fayard,
2000, p.21
« Les malheurs particuliers font le bonheur général, de sorte que plus il
y a de malheurs particuliers et plus tout est bien. »
Pangloss, le philosophe de Voltaire, Voltaire, Candide ou l'optimisme,
chap. IV
Tous les Pangloss (les grands maîtres économiques du monde)de notre temps
le proclament, la misère des humbles est le prix de la prospérité générale, et
cela est fort bon. Ce n'est pas leur
faute si les malheurs particuliers sont pour toi et le bonheur général, pour
eux. Les choses sont ainsi et tu as
simplement tiré le mauvais numéro.
René Passet, L'illusion néo-libérale, Fayard, 2000, p.20-21.
« Le gouvernement civil […] est, dans la réalité, institué pour défendre
les riches contre les pauvres (Adam Smith, cité par Jean-Claude St-Onge, 2000,
L’imposture néolibérale, Montréal : écosociété, p. 123).
Notes :
Les passages
soulignés sont de l'éditeur (Gaétan Chênevert)
1Bernard, Michel., L'utopie néolibérale, les Éditions du Renouveau québécois et la Chaire d'études socio-économiques de l'UQAM, (1997).
2St-Onge, J.-Claude., L'imposture
néolibérale: Marché, liberté et justice sociale, les Éditions
Écosociété, (2000).
3Ces paroles du président de la Bundesbank furent pronocées au World Economic Forum en 1996, à Davos, en Suisse. M. Tietmeyer s'adressait à 2000 invités recrutés parmi le gratin internanional de la finance et de la politique. Cité dans Riccardo Petrella, «Urgence: re-créer la cotoyenneté», dans L'État aux orties?, sous la direction de Sylvie Paquerot, Montréal, Éditions Écosociété, 1996.
4 Friedman, Milton, Capitalisme et
liberté, Paris Éditions Robert Laffont, 1971, p. 202.
5Hayek, Friedrich, Droit, législation et
liberté, t. 2, Paris, Presse Universitaires de France, 1982, p. 118.
6Bourdieu, Pierre., Contre-feux,
Paris, Éditions Liber et Raisons d'agir, 1998.
Bibliographie
Keynes, John
Maynard. Essais sur la monnaie et
l'économie, Paris, Éditions Payot, 1971.
Locke, John, Traité
du gouvernement civil, Paris, GF- Flammarion, 1992.
Marx, Karl, Le
Capital, livre premier, Paris, Éditions sociales, 1967.
Smith, Adam, Recherches
sur la nature et les causes de la richesse des nations, Paris, Guillaumin
& Cie, 1859.
Références internet:
·
CETTE
UTOPIE, EN VOIE DE RÉALISATION, D'UNE EXPLOITATION SANS LIMITE
L'essence du néolibéralisme
http://www.monde-diplomatique.fr/1998/03/BOURDIEU/10167.html
·
Autres regards critiques sur les rapports entre économie et société
http://www.cam.org/~pgauth/sites-fr.html
·
Neoliberasism, Michael Peters, University of Auckland
Introduction: Hayek and the Austrian
School
http://www.educacao.pro.br/neoliberalism.htm
·
La Fabrique sociale (Histoire et leçon du néolibéralisme, Von Hayek: des
postulats largement diffusés, La Société du Mont-Pélerin).
http://www.fastnet.ch/PAGE2/p2_neolib_intro.html
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Michel Handfield
Aujourd'hui, j'ai
visité le Salon International de l'Alimentation, des
Boissons, Vins et Spiritueux, le SIAL, au Palais des Congrès à Montréal (du 4 au 6 mars). C'est le premier SIAL en Amérique du Nord. Il
n'est cependant pas ouvert au grand public; seulement aux professionnels de
l'alimentation.
Un très beau salon. La
nourriture ne semble pas manquer sur la planète. Il y avait des exposants de
tous les continents. J'ai vu des entreprises qui ne sont pas présente ici. Il y
avait vraiment un caractère international à l'événement, ce n'était pas juste
un nom. J'ai vu et goûté des choses intéressantes comme de l'autruche, du moût
de pomme, et du cœur de palmier... Du chocolat aussi! Vous trouverez donc
quelques adresses Internet à la fin du texte.
Malheureusement
plusieurs entreprises ont un courriel, mais pas de site Internet! Plus de 60%
de celles à qui nous avons parlé (ce n'est donc pas scientifique), n'avaient
pas de site Internet. C'est donc dire que certains producteurs ont moins de
chance d'être connu et de vendre à l'étranger, où il y a des besoins. Car tous
les produits ne sont pas des produits de luxe. Certains sont des produits de
base et les surplus pourraient très bien aider les pays pauvres. Il existe donc,
encore, des problèmes d'informations et de distribution dans le secteur
alimentaire dans notre monde globalisé! On parle de mondialisation, mais…
On remarque aussi dans
un tel salon que si l'on entend souvent parler des conglomérats (Nestlé, Heinz,
Général Foods, etc.) dans ce secteur, plusieurs entreprises n'en sont pas. Il
existe beaucoup de PME et d'entreprises familiales avant-gardistes dans ce
domaine. Il y a aussi des entreprises coopératives et des entreprises des
premières nations. Malheureusement, les grands circuits de distribution leur
sont moins accessibles, car ils peuvent difficilement remplir les commandes des
grandes chaînes en terme de quantité. Ceci fait en sorte que leurs produits ne
sont pas connus, sauf localement et par ceux qui font du tourisme alimentaire.
Et comme ils sont moins visibles, ils ont probablement accès à un financement
moindre. Avec de tels salons internationaux et Internet, ils auront peut être
l'idée du réseautage, car leurs produits méritent d'être connus. Et des réseaux
et des coopératives de producteurs alimentaires peuvent devenir une
alternative rentable vis à vis des
multinationales agroalimentaires pour les producteurs et assurer un libre
marché pour les consommateurs.
Et pourtant, il y a un
problème de faim sur la planète. Ce n'est
donc pas faute de production. (1) C'est un problème de moyens. Une
partie de la planète n'a pas les moyens d'acheter de la nourriture. Cela est
vrai de plusieurs pays du Sud. Mais c'est aussi le cas de plus en plus de
citoyens des pays riches. En même temps que certaines fortunes se calculent en
milliards de dollars, des citoyens, dans les centres-ville de Montréal, Toronto
et New York n'ont pas les moyens d'avoir un toit et quêtent pour se nourrir. On
coupe dans les dépenses sociales, soi-disant que l'économie se porte bien. Mais
que l'économie se porte bien n'est pas un gage de redistribution. Si l'on ne
veut pas que le XXIe siècle soi celui du retour en arrière et des révolutions
populaires, mieux vaut regarder ce problème d'un œil avisé.
Justement, après ma
visite au SIAL, je suis allé signer la pétition de l'Action
Terroriste Socialement Acceptable (l'ATSA) pour la tenue, encore cette année, de leur camp de réfugiés en
plein centre-ville de Montréal. Car nous avons nos sous-alimentés des pays
riches. Nous ne devons pas les oublier sous prétexte que l'économie financière
va bien.
Peut être que lors des
négociations de la Zone de Libre Échange des Amériques (ZLÉA) et de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) on pourrait aider à résoudre ce problème
de la faim et de la pauvreté dans le monde. Dans ces forums on parle de mettre
fin aux barrières tarifaires entre les pays. Si on en profitait, au lieu de les
éliminer, pour les réduire à un taux de
2 à 4% maximum et que cet argent était perçu par l'ONU pour réduire la faim et
la pauvreté dans le monde, ne serait pas socialement plus acceptable? Si
mondialisation il y a, redistribution mondiale il doit y avoir aussi.
Voilà ma suggestion à
nos négociateurs nationaux et aux négociateurs mondiaux, car il est beau de
parler de création de la richesse et je ne suis pas contre. Mais pourquoi ne
pas l'associer aussi à la redistribution.
Michel Handfield
Note:
Quelques liens
d'intérêts du salon de l'alimentation:
Association d'affaires des premiers
peuples
United States Dept. of Agriculture
Délégation
commerciale d'Italie
Les producteurs de dindons du Québec
Faculté des sciences de l'agriculture et
de l'alimentation de l'Université Laval
(Québec)
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Conclusion ou la mondialisation humaine!
Michel Handfield
La mondialisation peut prendre le virage commercial et ultra-libéral, avec
tout ce que cela implique de négatif. Mais elle peut aussi prendre un virage
plus humain. C’est ce qui est souhaitable.
Dans le cas d’une mondialisation à visage humain, l’on peut penser couper
les droits de douane actuels de moitié par exemple, mais de réorienter l’autre
moitié vers des programmes de développement nationaux et internationaux!
Ainsi on aurait des dollars à investir dans l’éducation et la formation
professionnelle, la santé, l’habitation et le revenu minimum garanti. L’aide
humanitaire pourrait aussi se financer à partir de ces taxes. A cela pourrait
s’ajouter la taxe Tobin sur les échanges mondiaux de capitaux. (1) Car il est
vrai qu’il faut d’abord encourager la création de richesse. Mais ceci ne
dispense pas d’encourager une certaine répartition de celle-ci en même temps.
C’est là l’essence du libéralisme social:
"Tout État est
affaibli par une trop grande disproportion entre les citoyens. Chacun, si c'est
possible, devrait jouir des fruits de on travail, par la pleine possession de
tout ce qui est nécessaire à la vie, et de plusieurs des choses qui la rendent
agréable. Nul ne peut douter qu'une telle égalité soit ce qui s'accorde le
mieux avec la nature humaine et qu'elle ôte bien moins au bonheur du riche
qu'elle n'ajoute à celui du pauvre. Elle augmente aussi le pouvoir de
l'État, et elle est cause que les taxes ou impositions extraordinaires
seront payées de meilleur gré. Là où les riches s'engraissent sur le dos du
petit nombre, il faut que leur contribution aux nécessités publiques soit très
large; mais dès lors que les richesses sont répandues sur une multitude, le
fardeau semble léger à chaque épaule, et les taxes n'apportent pas de
différence bien sensible dans la façon de vivre de chacun." (Hume, La liberté comme nécessité historique, in Mikaël Garandeau, Le
libéralisme, GF Flammarion, corpus, p. 63)
1. A ce sujet voir le
texte explicatif de la taxe Tobin sur notre page Mondialisation et la page d’ATTAC qui milite
pour cette taxe.
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Mise au point :
Un lecteur m’a
fait remarquer que nos critiques sont toutes bonnes, et c’est vrai. Mais ce
n’est pas parce que nous recevons des copies pour en faire la critique et que
nous voulons faire plaisir à ceux qui nous les envoient, car nous ne recevons
pas tout ce dont nous voulons parler.
Nous pouvons vous donner l’exemple du Dictionnaire du siècle rebelle,
paru il y a un an ou deux. Nous l’avons demandé à Larousse France et nous
n’avons jamais eu de réponse… alors nous ne l’avons pas. Nous en aurions
pourtant fait une bonne critique, car nous l’avons feuilleté souvent en librairie !
Nous en payons
aussi de notre poche – plus souvent pour ce qui est des CDs que des
livres – et nous achetons aussi des livres usagés, car certains titres ne sont
plus disponibles en copie de presse ou même chez l’éditeur (comme La pensée
unique), mais cela n’en fait pas nécessairement un ouvrage moins
intéressant ou moins important pour les domaines que couvre Societas Criticus
Et avant de
demander un CD ou un livre, nous sommes souvent allé voir ce qu’il a l’air en
magasin. Quand nous en faisons la demande on est généralement assez sûr que
cela réponds à nos critères, alors notre critique sera rarement négative. Bref
on agit en bon consommateur et on essai d’éviter la consommation
impulsive.
Notre but est de faire une critique
informative. D’ailleurs vous aurez remarqué que nos critiques nous permettent
souvent de faire des liens avec d’autres sujet et d’aller plus loin que la
simple lecture ou écoute. La critique est support à la réflexion et la
réflexion est support à l’appréciation d’un CD, d’un film ou d’un livre.
Societas Criticus fait une critique différente et aime les découverte.
Et quand nous
recevons des titres de livres non reliés à nos intérêts – ce qui était vrai au
début, mais ce qui est rare maintenant, notre style étant connu des éditeurs de
livres – s’ils n’entrent pas dans nos cordes, nous ne faisons que les
mentionner dans les livres reçus. Vous ne les trouverez pas par la suite dans
nos critiques ou en référence dans nos textes. Il est vrai que ceci peut
arriver à l’occasion pour certains livres que nous avons sollicité en vue d’en
faire une critique en même temps que la publication d’un dossier, mais que le livre soit arrivé trop tard pour qu’on
puisse en faire la critique. A ma souvenance cela est peut être arrivé pour un
ou deux titres seulement.
Michel Handfield
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Exceptionnellement,
nous avons reçu 3 DVDs et quelques disques classiques, mais nous en reparlerons
seulement au prochain numéro, car pour
ce numéro spécial j’ai choisi 3 CDs avec lesquels je pouvais
faire des liens vers la mondialisation…
Sylvie Paquette, Souvenirs de Trois, VIK 74321-80819-2
Je l’ai acheté
pour une « toune! » « Le Sud », un «Blues torride». Une
chanson de Nino Ferrer. Chanson qui illustre que pour les échanges on n’a
pas besoin de négociation de la mondialisation! Un genre blues Nouvelle-Orléans écrite en
français, par un auteur qui est née en Italie (1934), mais qui a vécu 5 ans en
Nouvelle-Orléans avant de retourner en Italie et de finalement aller vivre en
France à l’âge de 13 ans. Il s’est suicidé à l’âge de 64 ans (1998). Bref,
quand les choses sont de qualité, elles prennent un caractère mondial. Il en
est ainsi de la culture! On n’a pas eu besoin d’un accord de libre échange pour
importer livres et disques européen. Je fais donc du Sud ma « toune »
de la mondialisation!
Par contre, tel
est de moins en moins le cas. En même temps que l’on parle de mondialisation,
les multinationales, par des pirouettes techniques, empêchent les produits
culturels de circuler librement. J’aurais aimé avoir « Des nouvelles du
bon Dieu », un film de Didier Le
Pêcheur, en DVD. Il semble que ce ne soit pas possible, car les formats sont
programmés pour être incompatible entre l’Europe et l’Amérique! (Ici il n’est
disponible qu’en VHS) Vous dites libre-échange et mondialisation du commerce?
Je dis protectionnisme et main-mise continentale des Firmes Multinationales! Un
mirage! Sylvie Paquette ne peut être plus à point quand elle dit, dans la
chanson « Quand le monde », les paroles qui suivent :
Quand le monde s’allume
Pour vendre ses mirages
Il me reste la nuit et
La lumière de tes yeux
J’ai acheté un CD
pour une « toune », j’ai eu un album de plaisirs! (Michel Handfield)
***
Bhangra Betz, Naxos world, 76012-2
Le Bhangra est la
musique traditionnelle de l’Asie du Sud, le Penjab. Cette musique, au cours du
XXe siècle s’est ouverte aux autres musiques pour se transformer – avec les
vagues d’émigration. Dans les années 80. cette musique fut remixée par de
jeunes DJ d’origine sud-asiatique utilisant les techniques hiphop. Cette
musique est ainsi devenue le son des jeunes indous du Royaume Uni. Ça donne un
son occidentalo-asiatique d’aujourd’hui
avec des saveurs – des sonorités – traditionnelles. Un son qui a à la fois une
saveur d’Asie, des sonorités occidentales
et un beat disco ou Rock & Blues! A écouter et découvrir. Découvrir dans le
sens de découvrir cette musique, mais aussi découvrir différentes sonorités,
car ce CD est une compilation sur laquelle on retrouve DJ Sheick, Jazzy B.,
Balbir Bittu et plusieurs autres. Si l’aventure vous intéresse et qui vous
n’avez pas peur de découvrir des sonorités différentes. Conservateurs
s’abstenir ! (Michel Handfield)
***
Racines Acadie, Patrie sans frontière… (2CD 3051572)
Un CD double de musique
"acadienne" (Distribution PLAGES) au sens large du terme, la francophonie
en terre d'Amérique ayant des racines acadiennes! Ce CD regroupe Beausoleil
Broussard, Édith Butler, Marie-Jo Therio (avec Évangéline à donner le frisson),
Zachary Richard, etc. Bref on voit que la terre d’Acadie était l’Amérique dans
la tête et le cœur des gens. La politique a fait des frontières. L’économique
aujourd’hui tente de les abolir à son profit. Il faut que les citoyens, comme
le laisse entendre le titre de ce CD, reprennent les choses en mains et affirment
que l’Amérique c’est nous, ses habitants. Ce n’est pas une question de marché,
c’est une question d’occupation du territoire et d’humanité! Ce coffret-livre
compte 48 pages de textes et illustrations sur l’Acadie, l’histoire et les
artistes… La culture n’est pas affaire de commerce, mais de cœur, de beauté et
de sonnorités… sur ce CD. (Michel Handfield)
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Konaté, Moussa, Simard, Paule, Giles, Claude, et Caron, Lyne, 1999, Sur les petites routes de la démocratie, Québec : écosociété – avec une Préface de Riccardo Petrella
Ce livre concerne
« l’expérience d’un village malien » avec la démocratie. Suite à un
échange interculturel de Jeunesse Canada Monde, des jeunes Maliens et des
jeunes Canadiens séjournent à Saint-Élizabeth, un village agricole de la région
de Lanaudière au Québec. Les familles d’accueil décident de développer des
liens avec un village africain et il s’ensuit une aventure humaine et
démocratique intéressante… Ce livre en est le récit.
Parmi les
réflexions suscitées chez les africains du village de Sanankoroba,
celle-ci : si on reçoit de l’argent et qu’on l’attend chaque année, on
devient dépendant… alors pourquoi pas des Investissements, avec la participation
de toute la communauté dans les choix? Cela remet en cause des traditions, mais
est aussi fort stimulant… Si on dit Investissements, on dit aussi
ré-investissements pour sortir de la dépendance! On dit aussi revenus pour le village!
De notre côté,
occidental pour qui la démocratie est aussi commune que les moustiques l’été,
on n’en fait plus de cas. On ne la défend plus, on ne s’y implique plus. Elle
est banalisée, même elle nous « achale » au point que la
participation au vote baisse sans cesse et nous changeons de poste lorsqu’on
parle politique à la radio ou à la télé. Alors lire ce livre, qui est en même
temps une quête de la démocratie, nous montre ce que nous avons oublié :
« La démocratie, c’est l’association de tout le monde aux affaires de la
cité » (Ricardo Petrella dans sa préface, p. 11) . Si nous ne voulons pas
n’être que des clients de nos villes et nos États… Si nous croyons encore un
peu plus au mot pays qu’à Nike!
Michel Handfield
***
Dans le cadre de
la mondialisation, les 3 livres suivants m’apparaissent prometteurs. Cependant,
si j’ai eu l’occasion de les consulter ou de les feuilleter, je n’ai pas eu le
temps de les lire au sens traditionnel et global du terme. Mais vu ce numéro
spécial mondialisation, je me devais d’en glisser mot!
Laplante, Laurent, 2000, L’utopie des droits universels – L’ONU à la lumière de Seattle, Montréal : écosociété
Les droits
humains sont protégés depuis la signature de la Déclaration Universelle des Droits
de l’Homme il y a plus de 50 ans. L’ouverture des frontières aux produits
économiques (le libre marché) est en négociation accéléré. Pourtant il est plus
facile pour un film porno et violent de passer les frontières que pour un
philosophe anti-mondialisation! On est encore emprisonnée pour ses idées
politiques ou pour syndicalisme dans plusieurs pays, bref les droits de l’homme
sont une déclaration universelle, mais ne sont pas encore universellement réel!
***
Sauloy, Mylène, et Le Bonniec, Yves, 1992, A qui profite la cocaïne?, France: Calmann-Lévy/Pluriel
La question posée
en arrière du livre nous a fait l’acheter : « Les États prétendent
combattre « l’argent de la drogue ». Mais les finances américaines et
mondiales –sevrées de pétrodollars- sont-elles
en mesure de renoncer aux dizaines de milliards de « coca- dollars »
qu’elles recyclent chaque année? »
Et de
poursuivre : la cocaïne est
« une arme de propagande et d’intervention clandestine », « une
arme politique, diplomatique et économique ».
Et dans le cadre
de la mondialisation et plus particulièrement du chapitre 11 de la ZLÉA, où une
entreprise peut poursuivre un État dont les lois l’empêchent de commercer, un
cartel de la drogue pourrait-il se défendre sur le droit au libre marché et au
fait que les lois anti-drogue l’empêchent de faire des affaires? Et comment
pourra-t-on opposer la protection de la santé publique, quand une entreprise
(Ethyl), dont l’additif est banni par le Canada pour des raisons
environnementales et de santé (1), a gagné pour des raisons de liberté
commerciale? La même chose pourrait être
vraie de la prostitution aussi, car elle n’est pas illégale au Canada. Seule la
sollicitation l’est! L’interdire, alors que l’on permet le télé-marketing et
toutes autres formes de sollicitation commerciale, serait-donc une entrave au
libre commerce de la peau et des sens!
1. Boisvert,
Yves, Les surprises du libre-échange. L’histoire du chapitre XI, ou comment les
avocats réécrivent les traités, in La Presse, 15 avril 2001, p. A 14 et Lachapelle, Judith, L’essence sans plomb
n’est peut-être pas sans danger , in Le Devoir, 30 octobre 1999.
***
Collectif, 1997, la culture libertaire – Actes du colloque international, Grenoble, mars 1996, Lyon : Atelier de création libertaire
Ce sont les actes
d’un colloque organisée par l’ Atelier de création libertaire et le Centre de
sociologie des représentations et des pratiques culturelles sous le thème de la
culture libertaire. Bref, tout pour attirer mon attention, moi qui s’intéresse
aux courants sociaux-politiques (anarchisme ou libertaire étant synonyme et
l’anarchisme, malgré qu’il fut un courrant marginal en terme de popularité, a
toujours eu une importance dans l’histoire des idées, les chartes des droits en
ayant d’ailleurs été largement influencé!), à la culture et étant sociologue,
au salon du livre de Montréal 2000! Malheureusement, je n’ai pas eu le temps de
le lire – si on entends par là de la première à la dernière ligne.
Mais les
manifestations de Québec ont ramené les anarchistes comme étant des casseurs.
Il est important de souligner que des casseurs il en a de toutes tendances,
même des conservateurs! Les anarchistes se sont aussi des intellos qui
s’intéressent et s’interrogent sur leur société : Ainsi, Ronald Creagh,
pour ne citer qu’un des textes de ce livre, parle de « L’anarchisme en
mutation », car depuis que quelques penseurs ont jetés les bases de
l’anarchisme il y a près de deux siècles, bien des choses ont changées!
Certains théoriciens économiques, qui sont restés fixés à Adam Smith et
Malthus, devraient s’en inspirer!
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Livres reçus
Nous remercions le Centre de Recherche pour le Développement
International pour : The Crucible
II Group, 2000, Seeding Solutions Vol. 1, copublished by
International Development Research Center, International Plant Genetic
Ressources Institute and the Dag Hammarskjöld Foundation
Nous remercions Hachette pour :
Finkielkraut, alain, et Soriano, Paul,
2001, Internet l’inquiétante extase, Mille et une nuits.
CDs reçus
Nous remercions
distribution
PLAGES de nous avoir fait parvenir
Racines Acadie,
Patrie sans frontière…
(2CD 3051572) un CD double de musique
"acadienne" au sens large du terme, la francophonie en terre
d'Amérique ayant des racines acadiennes! Ce CD regroupe Beausoleil Broussard,
Édith Butler, Marie-Jo Therio (avec Évangéline à donner le frisson), Zachary
Richard, etc.
Nous remercions
Naxos pour les
CDs suivants…
J. S.
Bach, Cello Suites, Nos 1-6, Pablo Casals, 8.110915.16 (2 CDs)
Stravinsky,
Piano Music: Sonata, Serenade, Three movements from Petruska, Peter
Hill, 8.553871
Mark Isaacs,
Closer, Naxos Jazz, 86065-2
Jere
Laukkanen’s Finnish Afro-Cuban Jazz orchestra, Naxos Jazz,
86056-2
Bhangra Beatz, Naxos World,
76012-2
Et les les DVDs
ARTHAUS:
Claudio
Monteverdi, L’incoronazione di POPPEA, from the
SCHWETZINGER FESTIPIELE 1993, 100 109
Hector Berlioz,
La damnation de Faust, 100 018
Live concert from the SEMPER OPERA DRESDEN (Vivaldi, Weber, Wagner,
Strauss), 100 029
Le fouineur Societas
Ce que nous avons acheté
(U) Jaubert, A., et Lévy-Leblond, J.M.,
1975, (Auto)critique de la science, Paris : Seuil, Points Sciences
(U) Kahn, Jean-François, 1995, La pensée
unique, Fayard, col. Pluriel
(U) Leclerc, Yves, La démocratie
cul-de-sac, 1993, Montréal-Paris: L’étincelle éditeur
(U) Messadié, Gérald, 1988, Requiem pour
superman – la crise du mythe américain, Paris : Robert Laffont
(Reçu en cadeau de
fête) Morgan, Marlo, 1995, Message des hommes vrais au monde des mutants,
Paris : J’ai lu
(U)= Usagé
############## Index
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Texte paru dans le criticus rapidus depuis le dernier
numéro.
Montréal, le
mercredi, 14 mars, 2001
S’exduquer!
Michèle Ouimet,
La Presse
C’est avec
intérêt que j’ai lu votre éditorial « incident isolé ?» concernant la lecture du texte d’André
Lemelin « Le bloc de ciment » par des jeunes de secondaire 3. En même temps aux nouvelles de midi on parlait d’un « présumé violeur arrêté à
Laval » qui recrutait ses victimes sur un site Internet, où les jeunes
filles envoient leur photo et demandent si elles sont belles? Certaines
indiquent même un numéro ICQ pour chatter. Certaines photos sont en bikinis,
d’autres disent qu’elles sont célibataires, « avis aux beaux mecs »,
ou aime « crouser » (sic!). La plupart ont le poids et la grandeur.
Leur âge? Je n’en ai regardé que quelques-unes entre 14 et 17 ans. Donc de
secondaire 2 ou 3 à secondaire 5! Il est assez facile, pour qui le veut, d’en
rencontrer après avoir établi une relation de confiance par « chat »,
car plusieurs donnent leur # ICQ.
C’est l’âge des
rêves, de rencontrer le prince charmant, du roman Arlequin. Mais c’est aussi
l’éveil de la sexualité, les consultations pour la pilule anticonceptionnelle
(sans avoir besoin de l’autorisation des parents), les grossesses non désirées
et, parfois, l’avortement. La plupart de ces jeunes filles rencontreront un
ados, mais certaines rêvent du gars plus vieux (en mon temps plusieurs filles
de cet âge rêvaient du gars de 20 ans, plus mature avec un char et cela existe
encore!). Quelles en seront les conséquences? C’est aussi, pour une minorité,
les problèmes de violence familiale et, parfois, d’inceste.
Sous prétexte de
montrer un texte cru, dont le français n’est pas correct, c’est le moins que l’on
puisse dire, et les descriptions vulgaires, je crois que l’on peut sensibiliser
sur certaines problématiques difficilement approchables autrement. Tout est,
selon moi, dans la manière de faire. Car les parents ne discutent pas tous avec
leurs ados. L’ère de la communication se résume souvent à écouter la
« TiVi » ou des vidéos ensemble. Combien de parents naviguent avec
leurs jeunes sur Internet pour leur montrer la richesse de l’information
disponible sur des sites comme La Presse, Le Monde Diplomatique, l’Agora,
Societas Criticus, The Globe and Mail, New York Times, The Times (Londre),
etc.? Plusieurs sont content de savoir qu’ils sont à la maison plutôt que dans
la rue. Mais, que font-ils sur l’Internet? Quels sites visitent-ils? Avec qui
chattent-ils?
Peut être que ce
texte devrait-il être repris dans les journaux pour favoriser les discussions.
Tant qu’à éduquer! Cela ferait certainement un beau débat de société et nous
sortirait des débats stériles que le PQ fait actuellement. Car ce n’est pas à cacher
les choses que l’on évolue. Ce n’est pas non plus en les gobant sans discuter.
Apprenons à débattre, car c’est le premier pas vers une autonomie de pensée et
d’action, vers notre véritable rôle de citoyen. Car être citoyen ce n’est pas
juste voter en se disant que l’État va éduquer, soigner et subventionner les
entreprises. C’est questionner et s’opposer aussi. Mais pour cela il faut
d’abord apprendre à débattre en famille, dans notre milieu et sur la place
publique. Que ce texte serve à éduquer! Voilà mon vœux.
Michel Handfield,
M.Sc. et Délinquant Intellectuel