LE CANADA ET LA GUERRE

TEMPÉRANCE ET EFFORT DE GUERRE TOTAL

DISCOURS PRONONCÉ À LA RADIO

par

le très honorable

W.­L. MACKENZIE KING, M.P.

Premier Ministre du Canada

Ottawa, le 16 décembre 1942



Le peuple canadien a clairement démontré. depuis le début de la guerre, qu'il désire aider par tous les moyens à rendre l'effort de guerre du Canada aussi efficace que possible. La majorité de nos gens ont répondu de façon splendide à tous les appels, qu'il s'agisse de recrues pour l'armée, de contributions financières, de travail dans les industries de guerre, de demandes de médicaments, de volontaires pour les services auxiliaires, pour la défense civile et la défense passive, de donateurs de sang, de rationnement volontaire de récupération et de conservation, ou des centaines d'autres manières par lesquelles les particuliers peuvent servir.

Comment chacun peut aider


Les vieux et les jeunes, dans toutes les sphères de la vie, non seulement sont prêts à contribuer à la victoire mais désirent vivement le faire. De toutes les parties du Dominion, on ne cesse de poser au Gouvernement la question suivante: Que puis-je faire pour contribuer à l'effort de guerre? Ce soir, je désire répondre à cette question, à un point de vue du moins, et en ce faisant je vous demanderai encore une fois de servir le pays d'une autre façon. Comme toutes les autres formes de service, celle-ci comporte une certaine mesure de renoncement, et encore davantage, peut-être, une certaine subjugation de soi. Le renoncement et la maîtrise de soi, cependant, sont les qualités prédominantes d'un bon soldat, on le reconnaîtra. Personne ne peut s'exempter du service que j'ai l'intention de lui demander à cause de son âge, d'infirmités physiques, du manque d'occasion ou pour toute autre raison. Je veux parler de la tempérance dans l'usage des boissons alcooliques en tant que contribution à l'effort de guerre total. Tous les Canadiens peuvent aider la cause par ce moyen.

Pour réussir à écraser la puissance de l'Allemagne et du Japon, les Nations-Unies doivent toutes et chacune en particulier tendre nettement et instamment vers un effort de guerre total. L'effort de guerre total au Canada exigera des hommes et des femmes de toutes les provinces une mesure de plus en plus grande d'abnégation et de discipline.

La tempérance est essentielle à l'effort total


Quelle que soit notre attitude à l'égard de la prohibition la tempérance ne prête, en temps de guerre, à aucune protestation raisonnable. L'importance de cet élément essentiel dans la poursuite d'un effort de guerre total se fonde sur des faits qui sont d'eux-mêmes fort probants. C'est de cet aspect de l'effort de guerre du Canada que je désire, au nom du Gouvernement, vous entretenir ce soir.

Personne ne voudra nier que l'usage excessif de l'alcool et des boissons alcooliques serait, plus que tout autre élément, de nature à rendre impossible un effort de guerre total. Heureusement, de par ses dispositions mêmes, le peuple canadien est un peuple tempérant. Je me demande, cependant, si nous nous rendons bien compte jusqu'à quel point la guerre elle-même, l'agitation et les occasions qu'elle fait naître sont de nature à encourager les inclinations et les dispositions dangereuses. L'usage croissant des boissons alcooliques au Canada depuis le début de la guerre en est une preuve évidente. Nous n'apprécions pas davantage ce que l'augmentation de la consommation des boissons alcooliques en temps de guerre représente en risques et en pertes d'efficacité pour les membres des forces combattantes et pour les ouvriers de notre pays.

Accroissement de la consommation de spiritueux, vins et bières


Depuis l'ouverture des hostilités, la consommation des spiritueux, des vins et des bières a suivi dans notre pays une courbe ascensionnelle constante. On estime que les dépenses faites de ce chef doublent presque en dollars celles d'avant la guerre.

Notons cependant que le chiffre en dollars ne représente pas l'accroissement exact de la consommation et que celle-ci reste en deçà de ce que plusieurs sont portés à croire. L'impôt a, chaque année, subi une majoration. Chaque année. par conséquent le dollar affecté à l'achat de boissons alcooliques s'est traduit par une quantité moindre. Afin d'établir l'indice à peu près juste du relèvement de cette consommation, il faut se reporter aux quantités de spiritueux. de vins et de bières mis sur le marché.

Au cours des douze mois immédiatement antérieurs au conflit, les spiritueux, de provenance domestique et étrangère, mis en vente au Canada dépassaient trois millions et demi de gallons de preuve. Le chiffre correspondent pour la troisième année de la guerre, n'atteint pas tout à fait cinq millions de gallons de preuve, ce qui représente une augmentation de 37½ p. 100.

Durant les douze mois qui ont précédé la déclaration de guerre, il y avait à vendre, au Canada un peu plus de trois millions de gallons de vin domestique. Dans la troisième année de guerre, il y en avait près de quatre millions de gallons. Ce qui représente une augmentation de plus de 25 p. 100.

L'indication la plus sûre d'une augmentation dans la consommation de la bière, c'est l'augmentation de l'emploi du malt pour la fabrication de la bière. Durant l'année précédant la déclaration de la guerre, on utilisa près de 140 millions de livres de malt. Le chiffre correspondant pour la troisième année de guerre est de plus de 232 millions de livres. Ce qui représente une augmentation de plus de 60 p. 100.

Effets sur le moral


J'ai souligne l'augmentation de la consommation des boissons alcooliques en temps de guerre. Je voudrais maintenant vous dire quelques-uns des effets de cette consommation accrue sur notre effort de guerre.

Permettez-moi d'abord de vous parler des conséquences générales sur le moral de la population. Pour une raison ou pour une autre, il est devenu nécessaire d'imposer des restrictions sur l'usage de plusieurs denrées, y compris plusieurs denrées nécessaires à l'existence.

Il est aussi devenu nécessaire de restreindre les modes de voyage au point d'interdire à bien des gens de se déplacer à leur guise et même de jouir continûment des douceurs de la vie domestique, de la société, de leurs amis ou des réunions de famille. Une multitude de personnes éprouvent de bien sérieuses difficultés à s'acquitter des obligations que leur impose leur travail quotidien.

A un moment où l'essence et le caoutchouc sont rationnés, où l'énergie électrique et les moyens de transport deviennent de moins en moins utilisables et où la main-d'oeuvre se fait rare, d'aucuns ont peine à concevoir que l'on veuille y recourir plus largement encore si ce n'est pour les plus impérieuses nécessités de la guerre.

A une époque où presque tous les citoyens font preuve d'abnégation, ou se voient refuser les douceurs et plaisirs qu'en temps normal ils en étaient venus à considérer comme des nécessités de la vie, le fait de voir d'autres dépenser plus d'argent que jamais à l'achat de boissons alcooliques ne peut que provoquer du ressentiment. Cela tend à détruire l'esprit d'appui mutuel et de collaboration collective qui n'est jamais si nécessaire qu'en temps de guerre.

A moins qu'on ne puisse démontrer que l'accroissement qui s'est produit dans la production, la distribution et la vente des boissons alcooliques a non pas diminué mais augmenté le nombre de ceux qui peuvent contribuer à servir le pays et que l'accroissement dans la consommation représente un accroissement correspondant de l'efficacité de ceux qui préparent et dirigent notre effort de guerre et de ceux qui participent activement à sa réalisation, il est évident qu'un accroissement dans la production ou la consommation des boissons alcooliques, loin d'affermir, ne peut que miner l'effort qu'exercent les autres pour remporter la victoire.

Effets sur les travailleurs


Notre effort de guerre, - et non seulement le nôtre, mais aussi à un degré considérable, celui des Nations-Unies, - dépend des réalisations des ouvriers et des ouvrières du Canada. Leur travail est une contribution essentielle à l'alimentation, l'habillement, l'équipement et l'armement des forces armées alliées. Chaque heure de travail utile est précieuse. Les travailleurs industriels sont les associés de guerre des combattants. Il est certes peu douteux que l'absence des ouvriers ou l'inefficacité de leur travail proviennent souvent de l'intempérance. A une époque où chaque instant compte, l'absence des ouvriers dans les industries de guerre essentielles peut entraîner des pertes considérables. A notre ère de mécanisation à outrance, l'absence d'un seul technicien peut ralentir la production industrielle d'un grand nombre d'ouvriers.

Les accidents industriels sont attribuables aussi dans une grande mesure à la même cause. A cet égard également la défaillance d'un seul individu peut mettre en péril plusieurs autres vies. J'ai noté dernièrement que dans une seule province, le taux des accidents dans l'industrie équivalait à l'inscription mensuelle d'une division entière sur les listes de blessés, morts ou disparus du fait de l'ennemi.

Je ne veux pas donner à entendre que la plupart des accidents industriels proviennent de l'intempérance. Mais certes la tempérance n'a jamais manqué d'en réduire le nombre.

Chose certaine que ce soit à l'usine ou à l'atelier, dans l'exploitation minière ou forestière, au bureau ou à la maison, tout ce qui diminue le rendement de la main-d'oeuvre aura presque certainement pour conséquence d'accroître le nombre de nos soldats, de nos marins ou de nos aviateurs tués ou blessés.

Effet sur les forces armées


II ne saurait y avoir le moindre doute quant aux avantages de la tempérance dans l'entraînement de nos forces armées et quant à ses bienfaits chez nos combattants.

L'affaiblissement de la capacité physique par suite de l'usage des boissons alcooliques a sûrement pour effet de ralentir le progrès de la recrue à l'entraînement. De nos jours, à une époque où la vivacité de corps et d'esprit est plus nécessaire que jamais sur terre, sur mer ou dans les airs, un tel affaiblissement de la capacité physique est grandement de nature à accroître la possibilité d'accidents qui pourront atteindre des personnes autres que l'homme en faute. De même qu'une défectuosité dans un avion ou un canon ou un navire peut entraîner la perte de vies humaines, ainsi un moment d'inattention ou de négligence chez le marin, le soldat ou l'aviateur met en péril la vie de ses camarades et risque de causer de graves désastres dans l'entraînement ou dans les combats.

En outre, l'intempérance contribue à faire naître des habitudes susceptibles d'occasionner plus tard l'effondrement du moral. Ainsi que des militaires aguerris ont pu l'observer fréquemment, l'intempérance porte les soldats à s'exposer d'une façon insouciante au feu de l'ennemi, ce qui entraîne des pertes inutiles.

Seuls ceux qui savent s'imposer une discipline sévère peuvent endurer la fatigue écrasante que comporte la guerre moderne. Les militaires qui font un usage trop fréquent et abusif des boissons alcooliques failliront à la tache. Ce fait a été manifesté pendant la dernière guerre et il l'est encore davantage dans le conflit actuel.

Autres considérations importantes

Si je signale avec autant de franchise les dangers de l'intempérance pour les membres de nos forces armées, c'est que nous nous préoccupons tous d'une façon particulière du bien-être de ceux qui risquent leur vie pour faire triompher la cause de la liberté.

L'anxiété que ressentent la plupart des parents lorsque leurs fils ou leurs filles s'enrôlent n'est pas faite uniquement de la crainte des dangers physiques auxquels ils pourront être exposés. Nombreuses sont, au Canada, les mères et les épouses qui se sont endurcies à l'idée de perdre leurs hommes, - si la chose est nécessaire, - au service de l'humanité. Elles ont le courage d'envisager cette perte. La perte qu'elles ne peuvent pas envisager est celle qui ne se serait pas produite n'eût été quelque erreur de jugement qui aurait pu être évitée. Elles redoutent peut-être plus encore, chez ceux qui leur sont chers, la perte du caractère.

Si nous voulons accomplir notre devoir envers les braves jeunes gens, hommes et femmes, qui subissent l'instruction militaire ou sont en activité de service, nous nous devons de faire tout en notre pouvoir afin de les protéger, dans toute la mesure du possible, contre les risques, les périls et les tentatives propres à une période de guerre.

Rappelons-nous aussi, qu'en temps de guerre, presque chaque cerveau est soumis à une forte tension. Au moment même où l'on a besoin de toute son intelligence pour faire face aux dures réalités, il arrive trop souvent qu'on donne libre cours à des tendances dangereuses, en vue tout simplement d'échapper aux réalités. Sous l'influence des stimulants, on commet facilement des fautes qui sont souvent irrémédiables. La meilleure sauvegarde contre de pareils risques, consiste à pratiquer la tempérance en toutes choses.

Le détournement des matériaux et des effectifs humains


Comme nation, nous ne saurions déployer un effort de guerre maximum, tant que chacun des individus qui composent notre peuple n'est pas décidé, par esprit d'abnégation et de discipline, à fournir un rendement individuel maximum, et aussi longtemps que chacun n'est pas prêt à faire passer les exigences des forces armées et des industries qui servent l'effort de guerre avant tous les autres besoins.

Jamais le Gouvernement n'a refusé d'accorder la préférence aux besoins des services de nos armées et de nos industries de guerre. Le changement de l'économie de paix à l'économie de guerre est déjà si considérable qu'il constitue au Canada une véritable révolution industrielle. En effectuant pareil changement, on a dû nécessairement tenir compte de l'économie de la nation, en général, ainsi que des moyens les plus aptes à produire, à la longue, les résultats désirés.

Le Gouvernement dispose sous l'empire de la Loi des mesures de guerre, de l'autorité la plus vaste pour faire servir matériaux et capital humain aux exigences du temps de guerre. Les pouvoirs du ministère des Munitions et approvisionnements sont établis de façon à assurer, en ce qui concerne l'utilisation des matériaux, la priorité à la production de guerre et à l'approvisionnement des forces armées. La commission des prix et du commerce en temps de guerre a également le pouvoir de prendre des mesures, tout en sauvegardant la production et la distribution des denrées essentielles aux civils, en vue de rendre disponible notre capital humain. La responsabilité incombe par conséquent à l'organisme du service sélectif national de répartir ce capital humain afin de répondre aux exigences des forces armées et des industries de guerre et d'assurer une rnain-d'oeuvre suffisante pour les besoins essentiels des civils.

Le 10 novembre, le Gouvernement donnait plus d'ampleur aux pouvoirs de la commission des prix et du commerce en temps de guerre pour qu'elle puisse régir toutes les entreprises d'affaires et restreindre ou éliminer certaines d'entre elles. La commission s'est servi de cette autorité et continuera de le faire en vue de supprimer les pratiques de gaspillage dans l'industrie. Elle y procède avec toute la célérité compatible avec l'affectation ordonnée du capital humain ainsi libéré aux entreprises essentielles du temps de guerre. Aucun objectif utile ne serait atteint par l'élimination arbitraire d'emplois existants avant que des exigences plus essentielles en hommes s'imposent.

Mesures déjà prises par le Gouvernement


Le Gouvernement a déjà restreint plus qu'on ne le croit généralement le commerce des boissons alcooliques. J'ai parlé plus haut des impôts et de leurs effets sur la majoration des prix. On estime sans crainte d'erreur à plus de 60 p. 100 la proportion du revenu des ventes au détail de spiritueux qui prend la direction des caisses des provinces ou du Dominion. Il est certain que les impôts, en majorant les prix, ont contribué à diminuer la consommation.

Le rationnement du sucre a eu pour conséquence de restreindre la production des vins domestiques.

Le 1er novembre, on a affecté toutes les distilleries canadiennes à la production de l'alcool industriel nécessaire aux industries de guerre et aux besoins essentiels de la population civile.

Le 23 octobre, la commission des prix et du commerce en temps de guerre, afin d'empêcher l'augmentation du personnel des brasseries, a promulgué une ordonnance empêchant les brasseries, à partir du 1er novembre, d'obtenir le malt à un rythme supérieur à celui des douze mois précédents. A cette époque, la commission avait soin d'indiquer que c'était le premier pas dans le chemin des restrictions imposées à cette industrie qui devrait plus tard fournir des hommes pour des fins militaires.

Réduction des quantités et de la teneur alcoolique


Par décret du conseil adopté sous l'empire de la loi des mesures de guerre et sanctionné aujourd'hui par Son Excellence le Gouverneur général, le cabinet a pris d'autres dispositions importantes en vue de réduire notablement le débit et la consommation des boissons alcooliques afin de réaliser un effort de guerre total.

Le ministère du Revenu national a reçu l'ordre de diminuer la quantité de boissons alcooliques, tant fabriquées au pays qu'importées, qui devront être dédouanées et mises en vente. La limitation se fonde sur les quantités mises dans le commerce pendant la période de douze mois commencée le 1er novembre 1941. Quant à la période de douze mois commencée le 1er novembre de cette année, la quantité de bière sera diminuée de 10 p. 100, celle du vin de 20 p. 100 et celle des spiritueux de 30 p. 100.

On a aussi décidé d'abaisser à un niveau d'au plus 30 p. 100 au-dessous de preuve, la teneur en alcool de tous les spiritueux. Cette diminution de la teneur en alcool entrera en vigueur dès que seront épuisés les stocks actuellement emballés et prêts à vendre. L'alcoolisation des vins est interdite.

Interdiction des annonces de boissons alcooliques


Si la consommation des boissons alcooliques a fortement augmenté c'est dû en très grande partie à l'accroissement de la puissance d'achat qu'ont occasionné les dépenses du temps de guerre. Aussi toutes les raisons qui justifient l'imposition de restrictions dans la fabrication, la distribution, la vente et la consommation des boissons alcooliques s'appliquent-elles également aux annonces destinées à en stimuler la vente. On n'a évidemment pas besoin de faire de la réclame pour stimuler la vente et, du reste la réclame n'a plus de raison d'être si l'on veut diminuer les ventes et la consommation.

C'est pourquoi le Gouvernement a pris la decision d'interdire les annonces de spiritueux, de vin et de bière dans toutes les parties du Canada pour la durée de la guerre.

Les intéressés disposeront d'un délai d'environ six semaines pour apporter les modifications nécessaires à leurs programmes publicitaires. La réclame des boissons alcooliques sera toutefois formellement interdite partout au Canada à compter du premier février 1943.

Appel aux provinces pour limiter les heures de vente


Il faut maintenant dire un mot des rapports entre les Gouvernements provinciaux et le fédéral concernant la fabrication et la vente des alcools et des boissons alcooliques. Au Gouvernement fédéral appartiennent la production et l'importation; aux gouvernements provinciaux la vente et la distribution. Autrement dit, si le Gouvernement fédéral est à même de réglementer les quantités de spiritueux, de bière et de vins qui seront mis sur le marché, la régie de la vente au détail des boissons alcooliques est laissée à la discrétion de chaque province.

Il est vrai qu'en vertu de la Loi des mesures de guerre, quand les exigences de guerre le demandent, l'autorité du fédéral prédomine en ce domaine comme dans les autres. Le gouvernement a cru qu'il ne serait pas justifié d'exercer ces pouvoirs, sauf à propos de questions pressantes se rapportant à la conduite de la guerre. Pour ce motif, le gouvernement fédéral s'est abstenu jusqu'ici de prendre à cet égard toute mesure dont on pouvait prévoir l'adoption par les provinces elles-mêmes.

Journées de vente de huit heures


A la lumière des besoins actuels de la guerre, le Gouvernement fédéral se voit dans l'obligation de joindre aux mesures que je viens d'annoncer. un appel à la collaboration des provinces pour qu'elles restreignent davantage la vente des boissons alcooliques. On a déjà noté que dans les provinces qui l'ont adoptée, la réduction des heures de vente diminue automatiquement la consommation des boissons alcooliques et il est évident que l'effort de guerre du Canada en bénéficie. Bien que chaque province soit mieux en mesure de décider des endroits et des heures de vente. le gouvernement fédéral croit que, dans l'intérêt de l'effort de guerre, le nombre d'heures durant lesquelles la vente des spiritueux, du vin et de la bière dans un établissement quelconque où elle est permise, ne doit pas dépasser huit heures par jour.

Au nom du gouvernement fédéral, je fais maintenant un appel public à la coopération des provinces pour qu'elles facilitent l'effort de guerre du pays en imposant le plus tôt possible ces restrictions très nécessaires.

La force de l'exemple


Pour encourager la tempérance, il faut pouvoir compter sur quelque chose de plus que l'intervention du gouvernement. Le succès de cette entreprise dépend plus de l'attitude de chacun de nous et de l'opinion publique que de tout autre chose.

L'appel à la tempérance est, comme je le disais au début, une invite à servir en temps de guerre. La tempérance est une vertu essentielle si nous tenons à ce qu'hommes et femmes soient employés le plus utilement possible selon l'aptitude physique et l'habileté de chacun. Rien de moins n'assurera un effort total.

Bien peu oseraient nier que la tempérance accroît l'efficacité d'une nation en guerre et pourtant, plusieurs hésitent à prôner ses avantages et à donner l'exemple nécessaire.

Les sentiments les plus chevaleresques demandent toujours que l'on tienne compte des sentiments des autres. Nous le savons tous, nombre de personnes, jeunes et vieilles, acceptent des stimulants uniquement parce qu'elles croient faire plaisir aux autres. Elles désirent ne pas indisposer les gens en refusant de prendre un verre offert par hospitalité. Pour certaines natures extrêmement sensibles se dérober à quelque habitude, mode ou coutume admises dans la société exige beaucoup plus de courage qu'il ne leur en faut pour affronter un réel danger. La noblesse de caractère exige toujours qu'on tienne compte des sentiments des autres. On pourrait même faire en sorte qu'un changement d'attitude dans certains domaines en temps de guerre constitue un nouveau code d'honneur.

De même que, dans le conflit actuel pour la suprématie mondiale. de nouvelles méthodes et de nouvelles armes en sont venues à remplacer les anciennes méthodes et les anciennes armes qui étaient moins efficaces, ainsi un effort total de guerre en est venu à signifier une nouvelle orientation dans chaque ville, dans chaque groupement social, dans chaque usine, dans chaque caserne et dans chaque foyer, et un exemple que tous seront tentés de suivre.

La protection divine


En cette saison de Noël, et à la fin de la présente année, au cours de laquelle le sacrifice d'autres vies a épargné les nôtres, ne prendrons-nous pas la résolution de faire tout notre possible pour éviter d'autres sacrifices de vies humaines et pour abréger la durée de cette terrible guerre? Au cours de l'année prochaine nos forces armées seront probablement engagées dans une lutte à mort avec l'ennemi. Nous verrons peut-être la plus grande épreuve que notre jeune pays ait été appelé à traverser. Pour être à la hauteur de cette épreuve, il faut recourir à la protection divine.





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