LA RIVIÈRE SEAL
MANITOBA
Des quatre principales rivières du nord du Manitoba, la
rivière Seal est la seule qui soit demeureé sauvage. Elle est
encore totalement inexploiteé. Contrairement aux rivières
Churchill et Nelson, sur lesquelles on a érigé des barrages,
et à la rivière Hayes dont l’ histoire est riche en épisodes
liés à la traite des fourrures et à l'exploration, la rivière
Seal ne témoigne pratiquement d’ aucune activité humaine
moderne. Elle qui, avant l’ histoire écrite, traversait un
important territoire de chasse et de péche autochtone, n’
attire plus maintenant que quelques autochtones et de petits
groupes d’ excursionnistes aguerris.
Pour ces groupes, la descente de la rivière peut demander de
deux à quatre semaines de navigation difficile mais
exaltante, d'abord dans les eaux froides d’ un vaste lac où
les vents peuvent former de dangereuses vagues. Suivent de
nombreux et de longs rapides où l’ environnement subarctique,
totalement isolé, peut mettre l’ épreuve les techniques de
survie des spécialistes même les plus expérimentés.
Finalement, les voyageurs doivent naviguer dans l’ estuaire
plein de moraines de fond.
La province du Manitoba a mis la rivière Seal en candidature
au titre de rivière du patrimoine canadien en juin 1987. La
section mise en candidature mesure 260 km de long et s’ étend
à partir du confluent des rivières North Seal et South Seal
au lac Shethanei, jusqu'à la baie d' Hudson.

La rivière Seal prends son nom des phoques communs qu'on peut
apercevoir loin en amont jusqu'au lac Shethanei.
GÉOGRAPHIE
La rivière Seal est situeé dans une région sauvage et
dépourvue de route au nord du Manitoba, soit 1 000 km par
charter de Winnipeg. L’ estuaire de la rivière Seal se trouve
45 km de Churchill, en passant par la baie d' Hudson. Outre
Churchill (population de 1 300 âmes), le seul établissement
qu'on trouve dans la région est Tadoule (250 âmes), petite
communauté tchippewayane sur le lac Tadoule, le long de la
rivière South Seal.
La rivière Seal prend sa source au lac Shethanei, entouré d'
eskers magnifiques au sommet de sable qui composent en bonne
partie le paysage de la rivière. Le long des peuplements d’
épinettes noires, elle coule plus rapidement vers le delta de
la rivière Big Spruce, puis ce sont soudainement les rapides
et les gorges qui entourent l'île Great. Au-delà de l'île, la
rivière quitte la forêt boréale pour entrer dans une région
de transition subarctique clairsemée de toundra et de
bruyère, baptisée par les autochtones "Terre des petits
bâtons". Finalement, la rivière sillonne la toundra arctique
stérile, les champs immenses de moraine de fond et le dédale
de rapides pour aller se jeter dans un magnifique estuaire où
ses eaux douces se mêlent à l’ eau saleé de la baie d'
Hudson.
Exception faite de moins de deux douzaines d' excursions en
canot et en radeau organisées chaque anneé par des experts,
et du passage de chasseurs ou de trappeurs autochtones, il
n'y a pour ainsi dire aucune activité humaine le long de la
Seal. L’ éloignement et l' absence de routes transforment
toute activité minière ou autre en une entreprise coûteuse
que doit appuyer l'avion. Quant à l'exploitation du potentiel
hydro-électrique, il n’ en sera pas question avant bien des
années.
PATRIMOINE NATUREL
La mise en candidature de la rivière Seal comme rivière du
patrimoine canadien est fondée principalement sur son
patrimoine naturel exceptionnel:
- La Seal est la plus grande rivière encore inexploiteé du nord
du Manitoba.
- La valleé de la rivière représente parfaitement la forêt
boréale du Bouclier précambrien et la toundra arctique des
basses-terres de la baie d' Hudson.
- La valleé est aussi l’habitat de 33 espèces de plantes rares
au Manitoba, et elle contient des peuplements d’ épinettes
blanches et de mélèzes aux dimensions inhabituelles.
- Des exemples de glaciation abondent tout le long de son
cours. D’ immenses eskers de 300 mètres de largeur
s’étendent sur plusieurs centaines de kilomètres même en
direction nord-sud, formant parfois des péninsules de lac ou
des formes de relief submergées. Les glaciers ont formé ici
les plus grands champs de drumlins et de vastes champs de
moraine de fond du nord du Manitoba.
- La région de l’ estuaire est représentative du processus d’
équilibre isostatique découlant du passage des glaciers; elle
s’ élève d’ environ 53 cm par siècle, soit l’ un des rythmes
les plus rapides au monde.

Troupeau de bélugas dans l’estuaire de la rivière Seal
- La Seal est aussi l'habitat de populations fauniques à peine
perturbées. Parmi les espèces courantes, mentionnons
l’orignal, l'ours noir, le loup, le renard, le livre d’
Amérique, la perdrix des neiges, l’oie du Canada, le canard,
la loutre et le castor. On y trouve aussi des espèces plus
rares: le carcajou, l'aigle à tête blanche, l'aigle royal, le
balbuzard, et l' ours polaire. Phénomène plus important,
l’estuaire de la rivière est une aire d’ élevage et de mise
bas d'une population de 3 000 bélugas, une partie de la plus
forte concentration au monde. La Seal est aussi l'aire
d’hivernage d’une partie du troupeau (400 000 têtes) de
caribous des toundras Kamanuriak.

Une île rocheuse divise la rivière Seal s’écoulant à travers
le chenal sud le long de l' île Great.
HISTOIRE
La région de la rivière Seal a joué un rôle important pour
les voyageurs, les pêcheurs et les chasseurs autochtones.
L’homme blanc toutefois n’a pas trouvé la région bien
accueillante. Isolée et difficile à parcourir, avec ses sols
stériles et son climat froid, on l'a vite éliminée comme
corridor de transport, de commerce et d’ établissement. La
mise en candidature de la rivière Seal n’ est pas fondée
principalement sur son patrimoine humaine, mais elle présente
plusieurs caractéristiques d’ intérêt:
- Le nombre des artefacts préhistoriques et des sites
archéologiques le long de la Seal est inhabituellement élevé.
À la surface des eskers des lieux de campement et le long des
pistes de caribous, entre Tadoule et l'île Great, on voit
souvent des traces de feu de camp, des éclats, des
projectiles et des percuteurs. L' âge de ces objets témoigne
de l’ existence des peuples du Paléo-indien d'il y a 7 000
ans et d'une période moins ancienne, celle de la tradition
Taltheili.
- Les camps de trappeurs européens et tchippewayans et les
tombes de plus de cent ans délimitées par des piquets sur le
dessus des eskers reflètent une occupation plus récente.
- La rivière est aussi étroitement associée à un explorateur
européen. Samuel Hearne, de la Compagnie de la baie d'Hudson,
quitta Fort Prince of Wales, près de Churchill en février
1771. C'était la deuxième de ses trois expéditions à la
recherche des champs de cuivre qui, d'après les Amérindiens,
bordaient l’ océan Arctique. Après avoir subi de cures
misères, il suivit le cours de la Seal à pied, l’ intérieur
des terres, jusqu’au lac Shethanei. Puis, il rebroussa chemin
jusqu’ à la rivière Wolverine qu’il suivit vers le nord dans
les terres désolées. Hearne devint le premier Blanc à avoir
découvert l'océan Arctique; son journal et ses cartes
constituent une contribution majeure à la connaissance qu'on
a du Nord canadien jusqu'au début du 20 siècle.
- Un camp abandonné d'exploration minière sur l'île Great,
exploité par le Great Seal Prospecting and Developing
Syndicate entre 1953 et 1958, est représentatif des camps du
Nord pendant les années 1940 et 1950. Des habitations de bois
rond bien conservées, un camp d'entreposage de la dynamite,
une plate-forme de forage et autres vestiges sont dispersé
sur le site.
UTILISATIONS RÉCRÉATIVES
La mise en candidature de la rivière Seal comme rivière du
patrimoine canadien est fondée sur le fait qu'on peut y faire
des excursions exceptionnelles sur ses eaux vives et
sauvages. Voici quoi ressemble une excursion
de Tadoule la baie d'Hudson: 20 km de parcours sur lacs,
trois séries de gros rapides et un champ de moraine de fond
entre Tadoule et le lac Shethanei; 40 km en eau peu profonde
et à découvert dans le lac Shethanei où les vagues
dangereuses et les vents violents empêchent parfois tout
déplacement pendant des jours; 64 km de chenaux variables à
travers nombre de rapides périlleux et une gorge étroite et
profonde; 28 km d'eaux vives intermittentes le long du chenal
panoramique de l'île Great, avec la possibilité d’ un portage
de 3 km; 124 km d’ un plat pays, d'une forêt de toundra
subarctique et de champs de moraine de fond parsemés de
rapides; 4 km à travers le labyrinthe de marais, de vasières,
d'îles, de plateaux et de récifs qu'on ne peut franchir que
par le chenal nord et à marée haute; et finalement, un
rendez-vous avec l’hydravion ou le bateau-taxi depuis
Churchill sur la rive de la baie d'Hudson.

La Seal offre des excursions exceptionnelles sur ses eaux vives et
sauvages
Outre les excursions sur une rivière sauvage, la Seal offre
d'autres possibilités récréatives:
- Au lac Shethanei, on peut pêcher des truites fardées dignes
des plus beaux trophées, et dans la rivière elle-même,
l'omble et le grand brochet foisonnent. Au sommet des eskers
et des monticules rocheux, on a une vue à 360º d'une région
tout à fait naturelle.
- Les promenades plus courtes le long des eskers et des plages
ou sur l'île Great permettent aux explorateurs d'aujourd'hui
de suivre la voie de migration que le caribou de la toundra
emprunte depuis toujours. Les visiteurs peuvent aussi suivre
les traces de Samuel Hearne en grimpant sur l'esker qui lui
servait de point d'observation sur le lac Shethanei.
- On peut aussi faire du camping sauvage à maints endroits sur
les deux tiers de la région occidentale. Cependant, plus on
approche de la baie d'Hudson, plus il faut se contenter des
camps mal drainés sur les rives plantées de saules de la
rivière.
INFORMATIONS À L'INTENTION DU VISITEUR
Accès : La route permanente la plus proche passe à 275 km au
sud-ouest de la rivière. On peut emprunter la voie des airs à
partir de Lynn Lake, Flin Flon, Thompson ou Churchill à
destination de Tadoule, du lac Shethanei ou des extrémités
est ou ouest de l'île Great. On peut se rendre à Churchill
à partir du sud du Canada par la voie des airs tous les jours
ou par train trois fois par semaine à partir de Winnipeg et
de The Pas. Ceux qui désirent prolonger leur voyage de 200 km
ou plus peuvent partir d'un point quelconque un peu plus haut
en amont, en atterrissant en hydravion sur n'importe lequel
des lacs le long des rivières North Seal et South Seal, sur
le lac Nueltin, ou encore commencer leur périple au lac
Southern Indian qui est accessible par route.
La traversée est aussi difficile. En radeau motorisé, on peut
franchir les 45 km de hauts-fonds périlleux et de l'eau libre
de la baie d' Hudson jusqu'à Churchill, ce qui est beaucoup
plus risqué en canot et en kayak. Les excursionnistes sont
priés de prendre les dispositions pour qu'un bateau-taxi ou
un avion les prenne dans l’estuaire de la rivière Seal.
Hébergement et services : Aucun service d'hébergement ou autre
service ne sont offerts le long de la rivière Seal . Tadoule
est dotée d' une piste d' atterrissage, d'une infirmerie et
d'une épicerie, mais elle n’offre aucun autre service.
Churchill et Thompson sont les principaux centres qui offrent
des services de soutien et d’hébergement aux voyageurs, même
si on peut obtenir les services de pourvoyeurs et de guides à
Flin Flon, Lynn Lake, The Pas et Winnipeg. On peut aussi
recourir aux excursions organisées dans des camps, soit au
lac Nueltin ou sur la rivière South Knife.
On invite les intéressés à établir bien à l'avance des plans
détaillés de leur périple. Les risques sont fort nombreux:
les eaux sont rapides, peu profondes et glaciales; les
chavirements et les cas d'hypothermie sont fréquents; les
rapides sont souvent longs, peu profonds et parsemés de
moraine de fond. La rivière rest impraticable pour les
embarcations motorisées lorsque les précipitations sont
faibles et il n'y a pas encore de parcours de portage. Pour
parcourir l'estuaire et la baie d' Hudson, il faut connaître
les tables des marées et faire preuve de prudence face aux
imprévus météorologiques, à la glace et aux ours polaires.
Cartes topographiques : On peut se procurer les cartes de la
rivière Seal au Bureau des cartes du Canada, 615, rue Booth,
Ottawa (Ontario) K1A 0E9: cartes l'échelle 1:250 000 - 54L,
54M, 64I et 64J; cartes l’échelle 1:50 000 - 54L 13, 14 et
15; 54M 2, 3 et 4; 64I 13, 14, 15 et 16; et 64J 9, 10 et 16 .
On peut obtenir des cartes l’échelle de 1 po = 4 mi de tous
les parcours du Manitoba auprès du Ministre des Ressources
naturelles, Direction des levés et des cartes, 1007, rue
Century, Winnipeg (Manitoba) R3H 0W4.
AUTRES RENSEIGNEMENTS
La rivière Seal - Services, permis et règlements : Ministre des Ressources naturelles du Manitoba, Direction des parcs, 4e étage, 258, ave. Portage, Winnipeg (Manitoba) R3C
0B6.
Informations touristiques - Routes manitobaines de canoe,
camps de chasse et pêche, guides, hébergement et services pour
les visiteurs : Travel Manitoba, 155, rue Carlton, Winnipeg
(Manitoba) R3C 3H8.
Réseau des rivières du patrimoine canadien : Le Secrétaire,
Commission des rivières du patrimoine canadien, Ottawa (Ontario) K1A 0M5; ou Représentant
du Manitoba, Commission des rivières du patrimoine canadien,
Sous-ministre adjoint, Ministre des Ressources naturelles du
Manitoba, casier postal 50, pièce 800, 1495, rue St. James,
Winnipeg (Manitoba) R3H 0W9.
Lectures supplémentaires :
- Beals, C.S. ed. Science History and Hudson Bay. Imprimierie de la Reine.
Ottawa. 1969.
- Halloy, Uilliam. "Paddling Manitoba". Explore. mars-avril 1987.
- Travel Manitoba. "Land of Little Sticks". Brochure sur les routes de canoe. Travel
Manitoba. Winnipeg (Manitoba) R3C 3H8. std.
LE RÉSEAU DES RIVIÈRES DU PATRIMOINE CANADIEN
Le Réseau des rivières du patrimoine canadien (RRPC) est un
programme conjoint conçu et géré par les organismes
responsables des parcs des gouvernements fédéral, provinciaux
et territoriaux en vue d'accorder une reconnaissance
nationale aux rivières importantes du Canada. Le principal
objectif du programme est d'assurer que les rivières qui sont
des exemples exceptionnels du patrimoine naturel du Canada,
qui ont joué un rôle important dans l'histoire canadienne ou
qui offrent des occasions exceptionnelles de loisirs soient
gérées de manière que leur valeur distinctive soit conservée
et que leur utilisation à des fins récréatives soit mise en
valeur.
La Commission des rivières du patrimoine canadien a été
établie le 18 janvier 1984. Elle a pour mandat de gérer le
Réseau de rivières du patrimoine canadien et d'encourager et
recommander aux ministres responsables la candidature et la
désignation des rivières remarquables au RRPC. La Commission
est maintenant composée de deux représentants du gouvernement
fédéral et de dix autres représentants, un de chaque
gouvernement provincial et territorial participant au Réseau.
En date du 1 janvier 1997, des tronçons de 29 rivières,
d'une longeur totale de 6500 km, ont été mises en candidature
au Réseau.
Bien que les candidatures puissent être proposées seulement
par les gouvernements participants, des particuliers ou des
groupes peuvent prsenter à l'organisme des parcs de la
province ou du territoire responsable le cas d'une rivière
dont la candidature mérite d'être étudiée.



Rédigé par : M. Greco
Traduction : Secrétariat d'État
Conception cartographique : D. Batista
Photos fournies par : Parcs Canada
Révisé en 1990