Vingt ans d'action soutenue pour le renouveau


Notre rapport contient des centaines de recommandations. Conformément à notre mandat, nous avons examiné tous les grands problèmes auxquels les autochtones sont confrontés dans le cadre de leur relation avec le Canada. Chacun s'est avéré difficile à résoudre. Ensemble, ils paraissent encore plus insolubles. C'est du moins ce que nous avons pensé lorsque nous avons commencé notre travail.

En approfondissant notre réflexion, nous en sommes venus à reconnaître l'occasion unique qui s'offrait à la Commission d'aborder la relation entre le Canada et les Premiers peuples sous un jour nouveau - de façon holistique. Nous nous sommes rendu compte que la stratégie habituelle - attaquer les problèmes l'un après l'autre, séparément - équivalait à traiter une jambe cassée avec de l'aspirine. Nous proposons donc un programme complet de changement.

Nous traitons de façon détaillée de nouvelles structures pour l'exercice de la fonction gouvernementale, de nouvelles stratégies de développement économique, de nouveaux types de programmes sociaux. Notre but véritable est toutefois un changement plus radical. Il s'agit de modifier des vies, de veiller à ce que les enfants autochtones grandissent avec la certitude qu'ils sont importants, que leur vie est précieuse, qu'ils méritent l'amour et le respect et qu'ils possèdent les clés d'un avenir prometteur en tant qu'égaux au sein de la société.

C'est là le but du programme de changement de la Commission. Mais le défi demeure: par où commencer?

Les fondements d'une nouvelle relation

Le point de départ est la reconnaissance du fait que les autochtones ne sont pas, comme certains Canadiens semblent le croire, un groupe minoritaire sans importance dont il faut régler les problèmes et moderniser les attitudes désuètes. Ils forment des entités politiques distinctes et occupent au sein du Canada une place unique, différente de celle des autres.


La passivité et le silence n'équivalent pas à la neutralité: ils appuient le statu quo.


Parce que les autochtones sont les premiers occupants du pays, que les traités ont reconnu leurs droits, que la Constitution confirme ces droits et qu'ils forment des peuples qui ont conservé leur identité, les autochtones constituent des nations au sein du Canada, c'est-à-dire des collectivités qui ont leur caractère et leurs traditions propres, qui ont droit à l'autonomie gouvernementale et qui occupent une place spéciale dans le fédéralisme souple qui définit le Canada.

Notre tâche consistait essentiellement à définir un meilleur équilibre des pouvoirs politiques et économiques entre les gouvernements autochtones et les autres gouvernements canadiens. Les progrès sur les autres plans, s'ils ne s'accompagnent pas de cette transformation, ne feront qu'entretenir un statu quo insatisfaisant.

Tout au long de notre rapport, nous insistons sur l'importance d'une bonne compréhension de l'histoire. Nous ne pouvons espérer repartir sur des bases nouvelles si nous n'acceptons pas de tenir compte du passé.

Nous ne proposons pas de nous appesantir sur ce passé. Ni les autochtones, ni les non-autochtones ne le souhaitent. Il faut toutefois que tout le monde reconnaisse que les autochtones ont subi des torts immenses.

On ne constate toutefois guère de manifestations d'une telle reconnaissance aujourd'hui. Au contraire, alors que la renaissance des nations et des cultures autochtones semble offrir un nouvel espoir de mieux-être, une réaction se prépare - une réaction caractérisée par des slogans comme «tous les Canadiens sont égaux» et «personne ne doit avoir de statut particulier» - mais elle repose sur des bases complètement erronées.

On ne peut soutenir que tous doivent être traités également, quelle que soit l'inégalité des situations.


Nous avons essuyé les assauts du Canada contre notre identité et contre
nos droits. Notre existence même témoigne de notre détermination et de
notre volonté de survivre en tant que peuple. Nous sommes prêts à
participer à l'avenir du Canada – mais seulement à des conditions qui
s'accordent avec le legs que nous avons reçu.
               Wallace Labillois
               Conseil des anciens
               Kingsclear
               (Nouveau-Brunswick)


On ne peut fermer les yeux devant le dénuement et le racisme qui façonnent les conditions de vie des autochtones et bouchent leurs perspectives.

On ne peut ignorer les droits historiques dont jouissent encore les autochtones en tant qu'entités politiques autonomes - des droits que le Canada s'est engagé à protéger à l'époque où notre nation était encore en gestation.

Les tenants de cette approche prétendument «égalitaire» affirment que le renouveau et la réorganisation tels que nous les proposons établiront un régime d'«apartheid» au Canada. Au nom de l'égalité, ils sont prêts à refuser aux autochtones la chance de protéger leurs cultures et d'évoluer en tant que sociétés conformément à leurs valeurs.

Cette façon de penser est l'équivalent contemporain de l'attitude qui nous a donné la Loi sur les Indiens, les pensionnats, les réinstallations forcées - et les autres instruments d'assimilation du xixe siècle.


Comme nos ancêtres, nous considérons le droit à la différence non pas
comme un obstacle, mais comme la base de notre coexistence en tant que
peuples distincts.
               Anthony Mercredi
               Grand chef du Traité 8


Nous demandons à ces personnes de revoir leur position. Ses conséquences sont à l'opposé de l'égalité, elles consacrent le déséquilibre des pouvoirs et l'écart actuel entre autochtones et non-autochtones.

Un mot au sujet de la Constitution

Le point de départ

En premier lieu, le gouvernement du Canada doit s'engager sans équivoque à renouveler la relation entre les autochtones et les non-autochtones, en suivant les principes de la reconnaissance, du respect, du partage et de la responsabilité.

Un changement de cette importance ne peut être mis en uvre par une réforme partielle des programmes et services existants - malgré l'utilité d'une telle réforme. Il faut poser un geste officiel manifestant une intention nationale - une déclaration d'intention symbolique mais substantielle, accompagnée des lois nécessaires à sa mise en pratique.

La meilleure façon d'y parvenir, c'est d'adopter une nouvelle proclamation royale, qui serait signée par la Reine, chef du Canada et gardienne historique des droits des peuples autochtones, et de la présenter à la population du Canada à l'occasion d'une assemblée spéciale convoquée à cette fin.


Votre rapport final et vos recommandations n'auront guère de poids si
la volonté politique, les connaissances et la capacité d'en concrétiser
l'esprit font défaut.
               Le chef Robert Pasco
               Conseil tribal des Nlaka'pamux
               Merritt
               (Colombie-Britannique)


Cette proclamation établirait les principes régissant la nouvelle relation et préciserait les lois et les institutions nécessaires pour traduire ces principes dans la réalité. Elle ne remplacerait pas la Proclamation royale de 1763, qu'on a qualifiée de Magna Carta des peuples autochtones, mais elle l'appuierait et la moderniserait.

Avec cette nouvelle proclamation, le gouvernement du Canada s'engagerait à respecter ses intentions ainsi affichées, en adoptant de nouvelles lois et en créant de nouvelles institutions pour les mettre en uvre. Ces lois et ces institutions seraient créées grâce à une législation complémentaire que le Parlement adopterait:

La proclamation et la législation complémentaire relèvent des seuls pouvoirs du gouvernement fédéral. Il serait toutefois préférable, dans l'intérêt de la future relation et des négociations qu'il faudra mener, que les gouvernements du Canada, des provinces, des territoires et des nations autochtones collaborent les uns avec les autres dès le début.

Nous préconisons des consultations poussées auprès des peuples autochtones et des gouvernements provinciaux, au sujet du contenu de la proclamation et de la législation complémentaire, qui commenceraient dans les six mois suivant la publication de notre rapport.

Les gouvernements provinciaux et territoriaux ont largement profité des terres et des ressources enlevées aux peuples autochtones. Sur les plans moral et juridique, ils ont l'obligation de participer pleinement aux efforts visant à restaurer l'autonomie économique et politique, y compris la redistribution des terres, le réaménagement des responsabilités gouvernementales et les ententes de cogestion des ressources communes.

À cette fin, nous demandons qu'une rencontre entre les premiers ministres et les dirigeants autochtones soit convoquée dans les plus brefs délais, au plus tard six mois après la publication de notre rapport. Cette rencontre aura pour objet l'examen de nos principales recommandations, la tenue de consultations au sujet de la proclamation royale proposée et la création d'une tribune où les ministres et les représentants des grandes organisations autochtones élaboreront un accord-cadre pancanadien pour négocier les principaux éléments du programme de changement, notamment:

Ce cadre accélérerait notablement le processus et réduirait le coût des négociations de traités qui suivront. On devrait se fixer l'an 2000 comme échéance.


Si la richesse de nos territoires ancestraux est équitablement partagée
avec nous, si rien ne vient entraver notre façon de vivre, nous pourrions
retrouver et exercer pleinement notre capacité traditionnelle de
gouvernement.
               Le vice-chef
               John McDonald
               Conseil tribal
               de Prince Albert
               La Ronge (Saskatchewan)


Ressourcement et moyens d'action

Jusqu'à maintenant, nous avons exposé des mesures structurelles visant à rééquilibrer les pouvoirs entre les peuples autochtones et les gouvernements canadiens. Or ce ne sont pas les structures qui font les changements, ce sont les gens. Les autochtones doivent retrouver l'espoir que leurs droits seront reconnus et que leur dénuement sera un jour chose du passé. C'est à cette condition qu'ils pourront libérer leurs énergies, apporter des milliers de solutions individuelles et concrétiser le changement.

Si l'on veut que les autochtones puissent accomplir les tâches auxquelles ils vont devoir s'attaquer pour édifier leurs nations, il faudra que le changement structurel - les nouvelles lois et les nouveaux organismes destinés à les mettre en uvre - s'accompagne de mesures visant à ranimer l'espoir des populations autochtones, à doter les individus de nouvelles capacités d'autogestion et à leur insuffler la confiance nécessaire pour prendre en charge leurs collectivités et leurs nations.


Nous ne pouvons devenir un peuple indépendant, comme nous le souhaitons
et comme nous en avons le droit, si nous n'avons pas accès aux ressources
de ce pays très prospère.
               Sophie Pierre
               Conseil tribal des Ktunaxa/Kinbasket
               Cranbrook
               (Colombie-Britannique)


À cette fin, il faut agir sans retard dans quatre secteurs: guérison, développement économique, perfectionnement des ressources humaines et création d'institutions autochtones.


Il faut nous permettre de faire nos propres erreurs. Il faut nous
permettre de trébucher de temps à autre et de nous relever. Cela fait
partie du processus par lequel nous apprendrons à nous gouverner
nous-mêmes en tant que peuples et en tant que nations.
               Gerald Morin
               Président, Ralliement national des Métis


Les coûts élevés du statu quo

La nécessité de conclure un nouveau contrat avec les peuples autochtones est indiscutablement liée à la justice réparatrice et à la reconnaissance des droits historiques des autochtones. Elle repose aussi sur de solides motifs économiques: le Canada ne peut plus se permettre de maintenir le statu quo.

Éliminer les coûts supplémentaires que doivent supporter les Canadiens pour les politiques du passé est un puissant argument en faveur de la mise en uvre du programme de changement de la Commission.

Manques à gagner et à produire

Plus des deux tiers du coût du statu quo sont imputables au fait que les autochtones sont plus susceptibles que les autres Canadiens d'être victimes du chômage et, lorsqu'ils ont des emplois, de toucher une rémunération inférieure.

En tant que groupe, les autochtones vivent en marge de l'économie canadienne. Ils produisent moins et, par conséquent, ils apportent une contribution moins importante que la moyenne des Canadiens à la richesse nationale. Parce qu'ils gagnent moins, ils ont un niveau de vie considérablement inférieur à celui de la moyenne nationale.

Si ces écarts disparaissaient, les autochtones viendraient ajouter 5,8 milliards de dollars de biens et services à l'économie canadienne en 1996. Il ne s'agit pas d'un phénomène provisoire. Des pertes considérables sont encourues depuis longtemps, et de 1981 à 1991 ces pertes ont en fait augmenté.

Le taux de chômage des autochtones a augmenté de façon exponentielle au cours des 10 dernières années - beaucoup plus rapidement que celui de l'ensemble des Canadiens - et leur revenu moyen a diminué. Cette évolution s'est produite malgré une diminution de l'écart entre le niveau de scolarité des autochtones et celui des Canadiens non autochtones. La tendance s'est fort probablement maintenue au cours des années 90, car les jeunes arrivent sur le marché du travail et les emplois demeurent rares.

Cette situation est un handicap majeur pour les autochtones et les collectivités et elle accroît sensiblement la dette publique. Plus de 150 000 autochtones adultes n'ont pas la satisfaction de toucher un revenu décent, ni d'être indépendant sur le plan économique.


La pauvreté, la mauvaise santé, le manque d'instruction et de forts
taux de mortalité sont tous symptomatiques des effets à long terme de
l'attitude colonialiste. Il faut prendre pour point de départ la
conception que les peuples autochtones ont de leurs besoins et de leurs
intérêts; c'est ça le sens véritable du terme «autodétermination».
               Marlene Buffalo
               Hobbema (Alberta)


Coût de l'aide gouvernementale

En 1992-1993, dernière année pour laquelle l'information de tous les gouvernements a été publiée, le gouvernement fédéral a consacré 6 milliards de dollars aux autochtones, essentiellement en vertu des programmes destinés aux Indiens inscrits et aux Inuit. Les autres gouvernements (surtout les provinces) ont consacré 5,6 milliards de dollars - soit un total de 11,6 milliards de dollars.

Les gouvernements dépensent de l'argent pour tous les citoyens, surtout au titre des programmes de santé et d'éducation, pour stimuler l'économie, pour faciliter les transports, etc. La somme consacrée aux autochtones, par personne, est de 57 % supérieure à celle dépensée pour chacun des Canadiens pris dans leur ensemble.


Les peuples autochtones sont l'une des ressources humaines inexploitées
du Canada, et lorsque nous serons en mesure de prouver que nous sommes et
que nous avons toujours été des gens vaillants, nous deviendrons un atout
et nous serons considérés comme tel.
               Wilfred Collins
               Président, établissement métis d'Elizabeth
               Elizabeth (Alberta)


Pourquoi? Certaines dépenses du gouvernement fédéral sont occasionnées par des programmes spéciaux, notamment les services de santé non assurés et l'éducation postsecondaire, fournis en vertu des traités ou de la Loi sur les Indiens. Des facteurs géographiques et démographiques interviennent en outre:

D'autres facteurs liés à la situation sociale et économique des autochtones rendent plus nécessaires certains programmes et services:

Les coûts liés aux facteurs géographiques et à la croissance démographique sont inévitables. Une grande partie du coût de l'aide financière individuelle et des programmes correctifs en matière de santé et de services sociaux pourrait cependant être éliminée si l'on adoptait des solutions stratégiques judicieuses.

La différence entre ce que l'on dépense pour les autochtones et ce que l'on dépense pour un nombre équivalent d'autres Canadiens est estimée à 2,5 milliards de dollars en 1996. (Ce chiffre comprend 0,8 milliard de dollars au titre de l'aide financière et 1,7 milliard de dollars au titre des programmes correctifs.)

La perte de recettes fiscales attribuable au chômage et aux emplois mal rémunérés est estimée à 2,1 milliards de dollars en 1996. Si on y ajoute les 2,5 milliards de dollars du calcul précédent, on obtient un total de 4,6 milliards de dollars. C'est ce qu'il en coûte aux gouvernements canadiens de continuer à appliquer aux autochtones une politique qui ne donne pas les résultats voulus. C'est à peu près la somme que le gouvernement du Nouveau-Brunswick dépense chaque année pour administrer l'ensemble de la province.

On peut aller plus loin. On estime à 2,9 milliards de dollars les revenus potentiels perdus par les autochtones en 1996 à cause de la situation de l'emploi et de la rémunération. Cette somme s'ajoute aux 4,6 milliards de dollars déjà perdus, ce qui donne un total de 7,5 milliards de dollars - le coût total que le Canada doit supporter pour laisser les autochtones dans leur situation sociale et économique actuelle.

Si le Canada n'apporte pas de changements fondamentaux, ces chiffres augmenteront sensiblement. Si les tendances actuelles se maintiennent, l'économie du Canada perdra annuellement non plus 7,5 milliards de dollars, mais bien 11 milliards de dollars (en dollars de 1996) d'ici quelques années, simplement en raison de l'augmentation démographique (voir tableau 1).

Tableau 1
Coûts annuels actuels et futurs du statu quo
(en milliards de dollars)

Notes
1. Les coûts du statu quo figurent en italique. Les autres chiffres montrent comment se répartissent ces coûts.
2. La majeure partie du manque à gagner (5,8 milliards de dollars en 1996) est supportée par les autochtones sous forme de revenu perdu. Le reste est supporté par les gouvernements : recettes fiscales perdues et diverses prestations versées. Les coûts pour les gouvernements ne sont pas compris dans les coûts pour les autochtones.

Un bon investissement

Le programme de changement de la Commission peut réduire sensiblement les coûts de la marginalisation, du mauvais état de santé et de la misère sociale des autochtones. Des changements d'une telle ampleur ne se concrétisent toutefois pas facilement. Lorsque les problèmes sont à ce point profonds, il faut que les solutions s'attaquent à leur racine même. Une fois définies et mises en uvre, ces solutions sont longues à porter fruit.

Le Canada a tout à gagner à mettre en application nos propositions. Les autochtones s'en trouveront mieux parce qu'ils auront une plus grande productivité et des revenus plus élevés. Les autres Canadiens bénéficieront des économies et des recettes réalisées par les gouvernements. Le renouveau politique, économique et social peut aider le Canada à équilibrer son budget.


En réglant le problème de la dépendance, en favorisant l'indépendance
des individus et des collectivités, nous changerons la façon dont nos
collectivités fonctionnent et nous serons en mesure de contribuer à la
prospérité non seulement de nos collectivités mais aussi de notre pays.
                Francis Frank
                Conseiller, collectivité de Première nation
                de Tla-O-Qui-Aht
                Port Alberni
                (Colombie-Britannique)


Nos propositions nécessitent une mise de fonds, mais elles entraîneront aussi des économies. Les économies et les nouvelles recettes fiscales finiront par égaler, puis par dépasser, le coût de la stratégie. Nous estimons qu'il faudra entre 15 et 20 ans pour en arriver à ce point.

Par conséquent, nous recommandons fortement que les gouvernements augmentent leurs dépenses annuelles de sorte que cinq ans après le début de la stratégie proposée, les dépenses soient plus élevées qu'aujourd'hui dans une proportion de 1,5 milliard à 2 milliards de dollars, et qu'ils maintiennent ce niveau de financement pendant une quinzaine d'années.

Nous demandons aux Canadiens d'examiner les dépenses supplémentaires en gardant quatre facteurs à l'esprit:

Nous estimons que la moitié des gains à escompter de meilleures conditions sociales et économiques pourraient se concrétiser au cours d'une période d'investissement de 20 ans. Au-delà de cette échéance, le rétablissement social et économique se poursuivra sans apport extérieur. Durant ces 20 ans, le flux des investissements devrait évoluer en trois étapes:

On voit au tableau 2 un résumé de l'évolution comparative des coûts et des avantages pour les gouvernements.

Les gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux et autochtones devront assumer une part du coût supplémentaire que représente le programme de changement. Les coûts que nous décrivons seront supportés en partie par les gouvernements autochtones et financés grâce à leurs efforts dans le domaine fiscal.


Le coût du règlement des revendications autochtones semble considérable
si l'on tient compte de la situation financière actuelle. Pourtant, si
l'on songe au coût que les événements historiques ont fait supporter aux
Shuswaps, nous avons payé beaucoup plus que ce que le gouvernement et la
population du Canada ont dû débourser pour nos terres et nos ressources.
                Le chef Nathan Matthew
                Nation secwepemc
                Kamloops
                (Colombie-Britannique)


À long terme, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux profiteront largement des effets suivants:

Les commissaires demandent instamment à leurs concitoyens du Canada d'affecter les ressources nécessaires aux mesures que nous décrivons, afin de réduire de 50 % l'écart économique entre autochtones et non-autochtones et d'améliorer les conditions sociales au cours des 20 prochaines années.

Il faudra peut-être plus longtemps. Toutefois, au cours de cette période de 20 ans, un énorme élan peut être donné. En 2016, les autochtones devraient se trouver dans une bien meilleure situation qu'aujourd'hui et continuer à progresser.

Cela aura d'énormes retombées humaines et financières pour les autochtones, et, à plus long terme, des avantages financiers encore plus importants pour tous les Canadiens.

Tableau 2
Variations des finances gouvernementales attribuables à la stratégie
(en millions de dollars)

Notes
1. Dans ce tableau, les dépenses (nombres sans parenthèses) s'entendent des dépenses additionnelles que tous les gouvernements doivent engager pour mettre la stratégie en uvre. 2. Les réductions sont indiquées entre parenthèses dans la colonne 2016. Ces réductions correspondent aux sommes économisées par suite de la stratégie mais qu'il aurait fallu engager en cas de maintien du statu quo, ainsi qu'aux recettes supplémentaires des gouvernements. Voir le chapitre 3 du volume 5 dans le rapport de la Commission pour une explication complète de ces chiffres. 3. Les chiffres sont arrondis à la tranche de 25 millions de dollars la plus proche.

Sensibilisation et bonne entente

Les tâches que nous avons définies en vue de renouveler la relation entre les autochtones et les non-autochtones sont herculéennes, mais ce n'est rien si l'on songe qu'il faut aussi changer le cur et l'esprit des Canadiens pour que la majorité d'entre eux comprennent les aspirations des autochtones et reconnaissent leurs droits historiques.


Si la sensibilisation ne s'améliore pas radicalement, il est très peu
probable que les Métis occuperont un jour la place qui leur revient dans
la société.
                 Gerald Thom
                 Nation métisse de l'Alberta


Le changement social et structurel ne se produira pas sans l'appui des Canadiens. Le leadership des gouvernements est nécessaire, mais il ne suffira pas. Les Canadiens doivent comprendre les raisons sous-jacentes au programme de changement proposé par la Commission - et leur caractère équitable. Ils doivent pousser les gouvernements lorsque ceux-ci hésitent, et être prêts à accepter les reculs et les surprises qui accompagnent inévitablement le changement.

On nous a souvent répété, au cours de nos travaux, que la plupart des Canadiens connaissaient mal la réalité et moins encore l'histoire des autochtones. L'information fournie par les programmes scolaires est limitée. Les données diffusées dans les médias sont souvent incomplètes. Peu de gouvernements, d'organismes et d'organisations uvrent en vue de sensibiliser leurs membres, leurs employés et leurs collègues aux questions autochtones.

Pourtant, en l'absence d'une compréhension mutuelle, une relation renouvelée est impossible.

L'information constitue une partie de la réponse à ce problème. Nous recommandons un certain nombre de mesures à prendre pour accroître et améliorer la qualité de l'information au sujet des autochtones et de leurs préoccupations. L'information, à elle seule, ne fera pas crouler les murs de l'indifférence, voire de l'hostilité. Les autochtones et les non-autochtones ont besoin de bien d'autres occasions de se rencontrer face à face et d'apprendre à mieux se connaître.

Nous invitons les Canadiens à participer à une vaste campagne novatrice visant à sensibiliser la population. Notre rapport peut constituer un point de départ - une base sur laquelle les églises, les syndicats, les écoles et les hôpitaux, les entreprises locales et les grandes sociétés peuvent s'appuyer pour organiser des groupes d'étude, des conférences, des réunions et des échanges au sujet des efforts à déployer pour mieux comprendre et accepter les autochtones et leurs préoccupations.

La passivité et le silence n'équivalent pas à la neutralité: ils appuient le statu quo.

Suivi des progrès

Les autochtones se sont présentés devant la Commission pour poser une question: pouvez-vous nous promettre que vos recommandations n'iront pas dormir sur une étagère? Les autochtones en ont assez des belles paroles: ils veulent un changement véritable.

Le programme de changement de la Commission est, de toute évidence, une entreprise à long terme. Il est donc logique d'en suivre les progrès jusqu'à ce que les changements soient accomplis.

Nous proposons que le gouvernement fédéral établisse une commission d'examen de la situation des peuples autochtones, qui évaluera les mesures adoptées par les gouvernements en vue d'exécuter les tâches définies dans le programme de changement.

L'importance de cette commission d'examen sera fonction de son indépendance et de sa capacité d'inciter les législateurs et les gouvernements à se concentrer sur le processus continu de renouvellement. La commission devrait être indépendante des gouvernements et relever directement du Parlement.

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  Mise à jour : 2000-06-21


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