Préparé pour : Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada
Nom du fournisseur : Pollara Strategic Insights
Numéro du contrat : CW2250771
Valeur du contrat : 99 779 $ (y compris la TVH)
Date d’attribution : 02-12-2022
Date de livraison : 31-03-2023
Numéro d’enregistrement : ROP-085-22
Pour obtenir de plus amples renseignements sur ce rapport, veuillez communiquer avec IRCC à :
IRCC.COMMPOR-ROPCOMM.IRCC@cic.gc.ca
This report is also available in English.
La présente recherche sur l’opinion publique présente les résultats d’une série de discussions qualitatives en groupe menées par Pollara Strategic Insights au nom du ministère de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada (IRCC). Cette étude a consisté en 15 discussions de groupe en ligne et en 6 entrevues approfondies auxquelles ont participé au total 62 employés d’IRCC. L’étude visait à comprendre les expériences actuelles de racisme au sein du Ministère et à connaître les perceptions de la gestion du racisme en milieu de travail par la direction et à recueillir des propositions de changements à apporter aux politiques et aux pratiques à l’avenir.
Cette publication est aussi disponible en anglais sous le titre : IRCC 2022-23 Anti-Racism Employee Qualitative Research.
Cette publication peut être reproduite à des fins non commerciales
uniquement. Une autorisation écrite préalable doit être obtenue auprès
d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Pour obtenir plus de
renseignements sur ce rapport, veuillez communiquer avec Immigration,
Réfugiés et Citoyenneté Canada par courriel à
IRCC.COMMPOR-ROPCOMM.IRCC@cic.gc.ca
ou encore à l’adresse suivante :
Direction générale des communications
Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada
Tour Jean-Edmonds Sud
365, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario) K1A 1L1
Numéro de catalogue :Ci4-244/2023F-PDF
Numéro international normalisé du livre (ISBN) : 978-0-660-48413-6
Publications connexes (numéro d’enregistrement : ROP-085-22) :
Numéro de catalogue : Ci4-244/2021E-PDF (rapport définitif en anglais)
ISBN : 978-0-660-48412-9
© Sa Majesté le Roi du chef du Canada, représenté par le ministre d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, 2023
La Stratégie de lutte contre le racisme 2.0 (2021-2024) d’IRCC énonce plusieurs engagements concrets visant à continuer de définir les répercussions injustes et néfastes du racisme systémique au sein du Ministère et à éliminer les obstacles à l’équité et à l’inclusion des personnes racisées au Canada. L’engagement continu auprès des employés pour recueillir des commentaires et des perspectives représente la pierre angulaire de ces efforts.
À ce titre, IRCC a réalisé une deuxième enquête sur l’antiracisme auprès des employés à l’automne 2022 et a chargé Pollara Strategic Insights de mener une étude qualitative de suivi, dont les résultats font l’objet du présent rapport.
La Recherche qualitative sur l’antiracisme auprès des employés d’IRCC 2022-2023 a été conçue pour permettre au Ministère d’approfondir les expériences vécues par les employés en matière de racisme, ce qui n’est pas possible avec les enquêtes ministérielles sur l’antiracisme. Elle procure également un canal indépendant et confidentiel par lequel les employés d’IRCC peuvent, en toute sécurité, faire part de leurs commentaires au Ministère et au sujet de ce dernier.
Les objectifs de cette étude comprenaient notamment l’exploration de ce qui suit :
Les résultats de cette recherche ont pour but d’aider IRCC à déterminer les domaines à améliorer au sein du Ministère et de permettre aux employés de donner leur avis sur la manière dont ces améliorations devraient être apportées.
Nous avons recommandé une méthode hybride pour cette étude afin de maximiser notre capacité à atteindre simultanément trois objectifs clés, à savoir :
Cette année, les participants ont été choisis parmi ceux qui ont répondu à un appel lancé dans tout le Ministère les invitant à participer à l’étude. Les personnes ayant manifesté leur intérêt ont reçu un questionnaire à remplir, dans lequel il leur était notamment demandé de se classer en fonction de leur âge, de leur identité sexuelle, de leur race, de leur appartenance religieuse, de leur direction générale et de leur niveau d’emploi, ainsi que de leurs connaissances et de leur expérience dans les domaines susmentionnés. Le nombre de groupes de discussion et d’entrevues approfondies ainsi que leur composition, qui est résumée ci-dessous, ont été déterminés en fonction de la taille et des caractéristiques de ce groupe de volontaires.
Caractéristiques communes des participants | Nombre de groupes de discussion | Nombre d’entrevues approfondies |
---|---|---|
Employés faisant partie des cadres intermédiaires/ayant une expérience décisionnelle en matière d’embauche et de promotion | 1 | 2 |
Employés ayant une connaissance de l’impact du racisme sur la prestation de programmes et de services – Opérations (OPS) | 1 | |
Employés ayant une connaissance des répercussions du racisme sur la prestation de programmes et de services – Politique stratégique et de programme (PSP) et Secteur de la stratégie numérique, des services et de l’innovation (SSNSI) | 1 | |
Employés racisés ayant une expérience actuelle ou passée en matière d’affectations à l’étranger | 1 | 2 |
Cadres (dont certains ont une expérience actuelle ou passée dans des affectations à l’étranger) | 1 | 2 |
Employés noirs | 3 (dont 1 en français) | |
Employés non noirs racisés | 3 (dont 1 en français) | |
Employés autochtones | 1 | |
Employés blancs | 2 | |
Employés issus de minorités religieuses | 1 | |
Nombre total de séances | 15 | 6 |
Au total, 15 groupes de discussion en ligne d’une durée de deux heures et six autres entrevues individuelles approfondies en ligne d’une durée de 20 à 40 minutes ont été menés auprès d’un échantillon représentatif d’employés d’IRCC à différents niveaux de l’organisation et dans plusieurs directions générales, y compris des employés des opérations, des services à la clientèle, des politiques et de l’élaboration des programmes, ainsi que des services internes tels que les ressources humaines et les finances. Au total, 62 employés ont participé à cette étude. Les séances ont eu lieu du 6 au 21 février 2023.
Les tableaux ci-dessous fournissent des renseignements supplémentaires sur les caractéristiques démographiques des participants.
Autochtone | 2 |
Personne noire | 21 |
Personne non noire racisée | 26 |
Personne blanche | 11 |
Non indiqué | 2 |
Femme | 45 |
Homme | 15 |
Autre sexe | 2 |
Christianisme | 25 |
Bouddhisme | 2 |
Hindouisme | 3 |
Islam | 3 |
Judaïsme | 1 |
Sikhisme | 4 |
Spiritualité traditionnelle (autochtone d’Amérique du Nord) | 1 |
Autre religion ou tradition spirituelle | 6 |
Pas de religion et perspectives laïques | 15 |
Préfère ne pas répondre | 2 |
Compte tenu de la nature confidentielle de la discussion, comme c’est souvent le cas dans les groupes de discussion des employés, ces séances n’ont pas été enregistrées. Les conclusions présentées dans ce document sont le produit des notes détaillées prises par l’équipe de Pollara. Il convient également de noter que, conformément aux conventions de recherche, certains renseignements qui nous ont été communiqués pourraient devoir être masqués ou dissimulés afin de protéger la confidentialité et l’anonymat des répondants.
En raison de la nature qualitative de cette étude, les résultats ne peuvent être extrapolés à un public plus large et devraient donc être considérés comme indicatifs plutôt que définitifs. En outre, même si les participants ont été choisis au hasard à partir d’une liste de participants potentiels, cette liste a été générée au moyen d’un processus d’adhésion plutôt que par une sélection aléatoire. Par conséquent, l’échantillon d’employés qui ont participé ne peut être considéré comme représentatif de tous les employés d’IRCC.
Nom du fournisseur : Pollara Strategic Insights
Numéro du contrat : CW2250771
Valeur du contrat : 99 779 $ (y compris la TVH)
Date d’attribution : 02-12-2022
Date de livraison : 31-03-2023
J’atteste, par les présentes, à titre d’agent principal de Pollara Strategic Insights, que les produits livrables sont en tous points conformes aux exigences de neutralité politique du gouvernement du Canada énoncées dans la Politique sur les communications et l’image de marque et dans la Directive sur la gestion des communications.
Plus précisément, les produits livrables ne comprennent pas de renseignements sur les intentions de vote électoral, les préférences quant aux partis politiques, les positions des partis ou l’évaluation du rendement d’un parti politique ou de ses dirigeants.
Signé :
Craig Worden
Président
Pollara Strategic Insights
Les participants de cette recherche estiment qu’IRCC devrait être le Ministère qui donne l’exemple, et un nombre d’entre eux sont fiers de travailler pour un ministère qui le fait.
Les participants signalent de nombreux signes de progrès depuis 2021, le plus important étant la reconnaissance apparente, par les actions et les communications du Groupe de travail anti-racisme (GTAR) et de certains cadres supérieurs du Ministère, que le racisme est un problème réel à IRCC et qu’il faut s’y attaquer. Cela a permis de passer de l’agitation du drapeau rouge à la réflexion sur des solutions.
Les participants indiquent que bien qu'il y ait eu des progrès visibles dans certains domaines, tels que l’augmentation des occasions de parler du racisme et l’augmentation naissante de la représentation raciale dans les postes à responsabilité, ils sentent qu'il y a encore beaucoup à faire, en particulier dans les domaines considérés comme essentiels à la transformation de l’organisation.
En résumé, deux ans plus tard, les participants sentent que la confiance à l’égard du Groupe de travail anti-racisme reste forte et les communications du Ministère ont créé un changement positif dans le climat interne. Toutefois, les participants souhaitent désormais que des mesures plus fermes soient prises pour relever certains des défis les plus difficiles que pose la transformation organisationnelle.
Comme nous l’avions fait lors de l’itération précédente de ce travail, étant donné que le reste de la discussion se concentrerait nécessairement sur les domaines nécessitant des améliorations, nous avons commencé chaque séance en demandant aux participants de faire-part brièvement de ce qu’ils aiment le plus dans leur travail à IRCC. Les réponses que nous avons entendues montrent clairement qu’il existe un fort consensus parmi les participants sur les atouts d’IRCC en tant que ministère où il fait bon de travailler et que le Ministère attire des employés qui sont profondément engagés dans le travail consistant à continuer de bâtir l’héritage du Canada en tant que nation forgée par la diversité et l’immigration.
Le ton des discussions de cette année montre clairement que, à l’exception de l’environnement des affectations à l’étranger (que nous aborderons plus en détail dans la suite de ce rapport), en ce qui concerne le racisme interne au sein d’IRCC, les participants estiment que le Ministère n’est pas dans la même situation qu’il y a deux ans.
En 2021, les participants ont exprimé un désir urgent d’être entendus et de voir quelqu’un se lever et prendre conscience de la réalité et de l’ampleur des expériences vécues de racisme au sein d’IRCC. Le besoin des participants de se défouler en décrivant les expériences de discrimination raciale qu’ils avaient vécues, les situations qu’ils avaient observées et les conversations qu’ils avaient entendues était alors très fort, ce qui rendait difficile l’orientation de la conversation vers des solutions. Si cette tension était encore présente chez certaines personnes cette année, le besoin de raconter, de divulguer et de ressasser était nettement moins intense.
En effet, ce que nous avons observé, et ce que certains participants ont explicitement déclaré, c’est que la reconnaissance générale du fait que le racisme est un problème au sein du Ministère, associée à l’engagement officiel d’IRCC à faire quelque chose à ce sujet, ont été des premières étapes d’une importance cruciale. À l’exception de ceux qui sont affectés à l’étranger, les participants estiment qu’il est désormais généralement reconnu que le racisme est un problème réel et important pour le Ministère et sont donc prêts à se pencher sur les solutions à apporter.
« Il y a eu une évolution dans la reconnaissance de l’existence d’un problème. Et maintenant, nous avons des données qui indiquent qu’il y a un problème. »
En outre, de nombreux participants se disent convaincus que le Groupe de travail anti-racisme et ses dirigeants prennent au sérieux leur engagement de faire avancer les choses. Cette situation, combinée à la pression politique extérieure et à la surveillance publique exercée sur le Ministère, leur permet d’espérer que les progrès se poursuivront, du moins pour l’instant.
Enfin, les participants s’accordent à dire que l’engagement d’IRCC en faveur de la lutte contre le racisme fait actuellement l’objet d’une importante communication et que les employés ont déjà commencé à remarquer les effets de certaines des initiatives conçues pour résoudre le problème.
Il convient de noter que quelques participants ont souligné l’importance de reconnaître que, bien que le racisme au sein d’IRCC soit réel et présent et qu’il ait fait l’objet d’une grande attention de la part du public, cela ne signifie pas que le Ministère se trouve dans une position plus défavorable que les autres à cet égard.
« J’ai vu beaucoup plus de cas [de racisme] dans mon ancien ministère. »
« Compte tenu de ce que nous représentons en tant qu’organisation, nous devrions être un ministère chef de file dans ce domaine. »
Parmi les autres aspects sur lesquels les participants disent avoir constaté des progrès, on peut citer :
« Ces initiatives nous incitent à en parler davantage. Cela m’a aidé parce que je sais que ce n’est pas seulement moi. Notre ancien sous-ministre disait que si vous voyez quelque chose qui ne va pas, dites-le, car c’est le seul moyen de faire changer les choses. Je me sens plus en sécurité maintenant parce qu’on reconnaît davantage qu’il faut élever la voix. »
Moins d’exposition à des microagressions ouvertement racistes dans l’environnement professionnel, bien que plusieurs s’empressent de mentionner que cela a pu être facilité par le passage au travail à distance qui a réduit l’occurrence des situations dans lesquelles ces incidences ont tendance à se produire.
« J’ai l’impression d’être dans l’incertitude. Les microagressions se sont dissipées, mais c’est peut-être parce que nous ne sommes plus au bureau. »
Lorsqu’on leur demande d’évaluer dans quelle mesure le racisme est un problème au sein d’IRCC aujourd’hui, en utilisant une échelle où 1 = « pas du tout un problème » et 10 = « un problème important », la note moyenne donnée est de 7/10.
(Il est important de noter que la méthodologie de l’étude ne nous permet PAS d’établir si ces différences ont ou non une signification statistique.)
La plupart des participants qui attribuent de faibles notes expliquent qu’ils se basent sur leurs expériences personnelles et leur environnement de travail immédiat ou leur équipe, tout en reconnaissant que d’autres employés peuvent avoir des expériences très différentes.
Ceux qui obtiennent des pointages élevés le font pour plusieurs raisons que nous examinerons plus en détail dans la suite de ce rapport.
D’une part, malgré les premiers signes de progrès mentionnés dans les pages précédentes, certains disent avoir observé une certaine opposition chez certaines personnes ou certains groupes de personnes particuliers. Les participants indiquent avoir vu ou vécu :
L’épuisement du message chez certains collègues et supérieurs hiérarchiques qui estiment que la communication et les activités de lutte contre le racisme font déjà l’objet de trop d’attention.
« Parmi les personnes à qui je parle, certaines disent que nous avons un problème permanent à régler. Et d’autres disent qu’il arrive rapidement et furieusement sous un trop grand nombre d’angles. »
« Il y a une certaine lassitude au sein de l’organisation… c’est un peu comme si nous devions faire attention à ne pas donner l’impression de tout simplement nous plaindre. »
Réticence (au cours de certains trimestres) à permettre aux employés de prendre plus de temps sur leurs tâches principales pour participer à des initiatives de lutte contre le racisme (ainsi qu’une hésitation à le demander).
« J’ai dû envoyer trois ou quatre courriels pour obtenir l’autorisation de participer à ce groupe de discussion de deux heures »
Quelques-uns affirment que ces réactions négatives les incitent à réfléchir à deux fois avant d’être perçus comme trop impliqués dans des initiatives de lutte contre le racisme, afin de ne pas être montrés du doigt ou étiquetés de manière négative.
En outre, la résistance à des efforts antiracistes du Ministère est considérée par beaucoup des participants comme une preuve supplémentaire de l’enracinement du racisme au sein de l’organisation. Nombreux sont ceux qui pensent que, si certains hauts responsables sont sincères et sérieux dans leur engagement à éliminer le racisme au sein du Ministère, d’autres ne le sont pas. Ils affirment que tant qu’il y aura des personnes, en particulier des personnes ayant un pouvoir de décision, qui résisteront ou réagiront à la lutte contre le racisme, il y aura une limite à l’évolution de la situation.
« Je ne suis toujours pas convaincu. Certaines personnes sont de véritables racistes purs et durs. C’est la façon dont ils réagissent, en protestant subtilement. »
« Lorsqu’il s’agit de directeurs qui parlent d’équité en matière d’emploi, même… les commentaires qui sortent de leur bouche.... il n’y a pas de formation visant à les convaincre du pourquoi de la chose. »
Plusieurs participants sont sceptiques quant à la capacité d’IRCC à maintenir la dynamique actuelle.
Plusieurs pensent que la volonté actuelle de lutter contre le racisme au sein du Ministère est principalement alimentée par des forces externes (pression politique et examen public) et que lorsque cet élan s’estompera, l’engagement interne en fera de même. En outre, on craint que la pression exercée sur le Ministère pour qu’il augmente sa productivité afin de répondre aux objectifs croissants en matière d’immigration ne finisse par prendre le pas sur la lutte contre le racisme.
Cela peut s’expliquer en partie par le manque de renseignements sur les mesures prises. Certains disent qu’il y a tellement de communication qu’il est difficile de toutes les suivre. En effet, plusieurs d’entre eux ont appris l’existence de ces initiatives parce qu’elles avaient été mentionnées par d’autres personnes au cours des groupes de discussion. Cela peut également provenir du fait que le travail de certains employés les expose à des initiatives que d’autres n’ont tout simplement pas l’occasion de voir à l’œuvre.
« Je n’ai pas vu beaucoup de mesures concrètes qui inspirent la confiance. »
Quelle que soit la raison de la méconnaissance des mesures concrètes entreprises pour lutter contre le racisme au sein du Ministère, le sentiment général parmi les participants veut qu’il y a eu plus de paroles que d’actions. À terme, cela alimente la méfiance qui persiste chez de nombreuses personnes, qui pensent que tous les dirigeants du Ministère ne soutiennent pas véritablement l’engagement d’éliminer le racisme.
Au-delà de ce qui est communiqué, les participants signalent également des mesures précises qu’ils considèrent comme mal conçues ou mal mises en œuvre, ce qui leur donne l’impression qu’il y a un manque d’engagement ou de financement suffisant pour réaliser le changement. Quelques exemples sont énumérés ci-dessous.
La formation obligatoire sur les préjugés inconscients dispensée dans l’ensemble du Ministère a été universellement critiquée par les participants comme une occasion manquée. Bien que le fait de rendre la formation obligatoire ait envoyé un signal fort, les participants ont été unanimes à dire que la formation manquait de profondeur et d’impact et qu’elle était facilement rejetée par certains gestionnaires et employés comme « une simple case à cocher ». Il convient également de noter que peu de personnes semblent savoir que la direction a suivi une formation approfondie.
« La formation sur les préjugés inconscients était très évidente, sans aucune nuance. »
« Un certain nombre de personnes ont admis qu’elles n’avaient pas fait attention parce qu’elles avaient beaucoup de travail, et les gens ont dit que ce n’était que du bla-bla. »
« Notre gestionnaire nous a mis la pression en nous disant que cela ne prenait pas beaucoup de temps et qu’il fallait simplement le faire. Il nous a prévenus qu’il y a un test et que l’on peut le refaire si l’on échoue la première fois. »
« Ils disent que les choses sont désormais liées à leurs EGR, mais ils continuent d’essayer de se décharger sur des employés de niveau inférieur comme moi… nous devons trouver les idées et élaborer les plan »
Si les participants signalent un manque d’action dans plusieurs domaines, les participants estiment que les points suivants semblent essentiels pour renforcer la conviction des employés qu’un changement durable est possible :
L’absence de progrès perçu par les participants dans ces domaines fait craindre que les mesures de lutte contre le racisme se limitent à celles qui sont performatives et acceptables pour les personnes au pouvoir. Elle renforce également la conviction parmi plusieurs participants qu’il existe un « club des dinosaures » à IRCC qui protège le statu quo, et elle érode la confiance des employés dans la capacité du Ministère à réussir.
« La confiance est le point de départ de tout. »
Dans ce qui suit, nous fournissons plus de détails sur les commentaires des participants et les suggestions d’amélioration dans chacun des domaines particuliers abordés.
Les participants affirment que, pour IRCC, l’objectif ne devrait pas s’arrêter à l’élimination des impacts du racisme, mais s’étendre à la création d’une organisation où tous les employés font preuve d’un niveau de conscience des préjugés et de compétence interculturelle adapté à une organisation dont le mandat est centré sur la diversité.
Dans ce contexte, la compétence interculturelle signifie une capacité accrue à appliquer une optique de lutte contre le racisme, d’équité, de diversité et d’inclusion dans toutes les situations où l’on a affaire à des personnes ayant des antécédents et des expériences différents.
« En tant que Ministère axé sur les nouveaux arrivants, vous devez disposer d’une base de compétences culturelles. Il est inconcevable que même la demande la plus simple se heurte à une résistance ou que je doive justifier ce qu’elle signifie exactement. Les personnes qui donnent le ton dans ce Ministère sont tout simplement complètement déconnectées de ces compétences. Nous ne prévoyons pas de temps pour la compétence culturelle, mais nous devons le faire. »
Selon les participants, un changement aussi profond de la culture de l’organisation nécessitera un mélange d’expériences transformationnelles et de contrainte.
Les participants déclarent que les formations sur la diversité, l’équité, l’inclusion et la lutte contre le racisme doivent être expérientielles, interactives et immersives et conçues pour toucher les participants sur le plan émotionnel, et ce, afin d’être efficaces et de faire appel à la capacité humaine d’empathie dans le but de favoriser une compréhension des répercussions du racisme et des autres formes de discrimination et d’injustice. Certains donnent des exemples d’autres formations qu’ils ont suivies afin de souligner qu’il existe des méthodologies plus efficaces dans ce domaine.
« Nous avons besoin de plus de conversations et de moins de formation en ligne. Le réseau de la fierté a un module d’apprentissage interactif fondé sur un scénario en ligne qui était bien adapté à la formation virtuelle...mais le contact avec les personnes est important. Afin d’examiner les préjugés inconscients, il faut interagir avec des personnes ayant des points de vue différents et les écouter. »
« La formation doit créer des conversations qui font en sorte que les personnes peuvent se mettre à la place des autres. »
« Si cela ne trouve pas écho chez les personnes, cela ne fera pas ce que c’est censé faire. »
Les participants pensent aussi que les gestionnaires doivent être mieux outillés pour réagir adéquatement lorsque des incidents de racisme sont portés à leur attention et pour tenir les conversations difficiles au sujet du racisme pour lesquelles ils sont encouragés à créer l’espace nécessaire. Les participants disent que lorsque la direction réagit en devenant défensive ou en faisant du détournement cognitif en prenant les incidents à la légère ou en suggérant que c’est la personne qui porte plainte qui est trop sensible, cela mine la confiance et la volonté de s’affirmer.
« Les directeurs et les gestionnaires essaient d’en faire davantage l’objet d’une discussion, mais ils ne savent pas comment . »
« Les cadres intermédiaires sont hésitants et trop occupés pour aborder le racisme puisque l’aspect émotionnel est trop lourd. C’est tellement délicat, tellement difficile pour eux de traiter le sujet. Ils ont peur d’aborder le sujet, peur de faire des erreurs. »
« Les personnes deviennent défensives au lieu de considérer cela comme un véritable problème systémique...oh vous pensez que j’ai dit quelque chose de mal, peut-être que vous l’avez mal pris...ça se retourne toujours contre vous, vous ne l’avez pas pris comme il le fallait, vous êtes trop facilement blessé. »
« [Après avoir signalé un commentaire raciste à un gestionnaire] ...la personne problématique n’a pas été réprimandée, on m’a plutôt dit d’essayer de comprendre ce qu’elle essayait réellement de dire. »
Plusieurs personnes disent que, pour lutter avec succès contre le racisme, il faut comprendre que l’association et la discrimination sont inhérentes à la façon dont l’esprit humain fonctionne et que la lutte contre le racisme nécessite la création d’une culture qui encourage que chacune accepte la responsabilité personnelle de ses schémas de pensée. Cela est essentiel pour changer les conversations au sujet du racisme du caractère défensif qui, selon les participants, persiste au sein de l’organisation aujourd’hui pour des conversations qui favorisent l’empathie et la compréhension.
Prenez note aussi qu’un certain nombre de participants, en particulier des participants racisés qui appartiennent à des groupes marginalisés de multiples intersectionnalités (p. ex. employés en situation de handicap, membres de la communauté 2SLGBTQ+ et femmes) ont mis l’accent sur l’importance de lier les discussions sur la lutte contre le racisme à la discrimination en général afin d’inclure tous les groupes marginalisés.
« Il ne peut y avoir aucun changement si l’on ne reconnaît pas ses propres préjugés. »
« La plupart des gestionnaires ne veulent pas être racistes, mais ne réalisent pas à quel point ils le sont. »
« Les personnes ne veulent pas croire qu’elles sont racistes...donc elles disent des choses comme “je ne voulais pas te faire sentir comme cela ou j’ai des amis racisés alors comment puis-je être raciste”. »
« Même moi, j’ai mes préjugés, mes idées au sujet du colorisme. Ces conversations seront inconfortables. Nous devons le reconnaître et être prêts à l’accepter. »
Reconnaissant qu’il faut du temps pour changer les mentalités, les participants disent que ces efforts doivent être accompagnés d’une embauche de plus de personnes racisées à des postes de décideurs afin qu’elles puissent agir comme catalyseurs et apporter leurs perspectives et expériences aux échelons supérieurs du ministère.
« Le changement de culture ne se produit pas sans les personnes occupant les bons postes. Il faut des personnes qui ont vécu des expériences. Il faut que des personnes avec des expériences vécues occupent des postes de pouvoir. »
Les participants estiment qu’il est aussi parfois nécessaire de forcer le changement, parce qu’ils croient qu’il y a des personnes à IRCC qui semblent résistantes aux efforts de lutte contre le racisme.
« Il y a des forces qui sont nettement contre cela…Il y a encore beaucoup de personnes à IRCC qui sont entièrement contre l’équité en matière d’emploi. »
« Les personnes qui ont de la difficulté avec la diversité ne devraient pas travailler ici. »
De nombreux participants pensent que le ministère devrait avoir une politique de tolérance zéro à l’égard des comportements racistes. Selon ces participants, un changement durable nécessite une volonté de démontrer que le racisme ne sera pas toléré en appliquant des conséquences et, au besoin, en retirant les employés qui refusent de s’acquitter de leurs responsabilités d’une façon qui est conforme aux valeurs énoncées du ministère.
De nombreux participants trouvent difficile d’accepter le fait que malgré ce qu’elles considèrent être des signalements d’incidents racistes évidents au sein de l’organisation, elles ne sont toujours pas au courant d’exemples d’employés subissant des conséquences négatives pour un tel comportement.
« Si quelqu’un dit j’ai grillé un feu rouge, ou j’ai conduit avec les facultés affaiblies, vous savez quelles sont les conséquences. Si un gestionnaire dit j’ai été convoqué pour du racisme, savons-nous ce qui se passera? NON. Nous n’avons aucun exemple de cela. »
« Nous devons commencer à aborder cela moins comme un sujet qui concerne les sentiments, et plus comme une question de responsabilité. Si vous allez à l’encontre des valeurs, vous pourriez être congédié. Certaines personnes ont besoin d’être congédiées et pas seulement de recevoir de la formation. Si vous êtes un problème, vous êtes une responsabilité légale, et certaines personnes doivent être retirées. »
« Il y a des personnes extrêmement cyniques. Je le vois dans les formations. Nous devons éliminer ces personnes. Si vous n’appuyez pas cela, ne travaillez pas dans notre ministère. »
« Nos valeurs doivent être communiquées dans le cadre de votre rôle en tant qu’employé, tout comme devez respecter les valeurs et l’éthique associées au fait d’être un fonctionnaire. »
La réalisation d’un changement de culture profond nécessite également un soutien visible de la direction. Les participants mettent l’accent sur le besoin de ces changements pour être entièrement appuyés par les personnes au sommet de l’organisation, et ils croient que cela est essentiel pour garder la confiance des employés et le momentum.
« Il y avait beaucoup d’engagement et d’efforts honnêtes et louables des cadres. Par contre, je n’ai pas vu les points de vue des nouveaux cadres. Cela ne signifie pas qu’il ne se passe pas beaucoup de choses. C’est juste que nous n’entendons pas beaucoup la vision des niveaux supérieurs. Les efforts sont plus éloquents quand quelqu’un au niveau décisionnel les appuie. »
« Ces initiatives ont besoin d’une approche descendante. Le soutient de la haute direction est nécessaire. Si l’on remonte au moment où le mouvement battait son plein, si une réunion du GTAR était organisée, l’un des 2 ministres se présentait à la réunion, ce qui envoyait le message que les choses étaient prises au sérieux. Même juste 5 minutes. Et parfois, à certaines réunions, ils restaient pendant toute l’heure. Il faut prendre le temps. »
Compte tenu du moment où ont eu lieu les consultations, nous avons inclus quelques questions pour évaluer la façon dont les participants considéraient le récent ordre de retour au bureau et son impact du point de vue de la lutte contre le racisme.
Même si les participants disent que le travail à distance a réduit l’exposition aux commentaires ouvertement racistes et aux microagressions, nombre de participants pensent que cela était dû aux circonstances et s’attendent à ce que cela commence à se produire plus souvent quand ils interagiront en personne avec certains. Nombre de participants ne croient pas que les personnes qui sont les plus grandes responsables du climat raciste qui existait au ministère avant les confinements aient fondamentalement changé.
« Je me sentais mieux en travaillant de la maison parce que je n’avais pas à entendre ces conversations, ces remarques. Mais ce n’est pas une solution. »
« Travailler derrière mon écran a été libérateur : il n’y avait pas de conversations au sujet de mes cheveux et de mon apparence physique, conversations qui sont épuisantes. »
« La seule raison pour laquelle les choses se sont améliorées est que je ne suis pas au bureau. Je détestais être au bureau parce que je savais que j’allais subir une forme quelconque de microagression. Et maintenant que nous devons retourner au bureau, j’ai beaucoup plus d’anxiété grave à ce sujet. Je ne pense pas que les choses se soient améliorées. »
« Je prévois de me rendre à un bureau où je n’aurai pas à voir ces personnes. Je dois d’abord penser à ma santé. »
Les participants disent que lorsqu’ils continuent d’entendre certains collègues ou supérieurs réagir de façon défensive ou prétendre qu’ils ne voulaient pas être racistes ou que les personnes qui se plaignent sont trop sensibles lorsque les commentaires racistes sont montrés du doigt, cela met en lumière le manque de compréhension.
De nombreux participants ont aussi mentionné des expériences avec les séances de discussion virtuelles qui ont été tenues au sujet du retour au bureau, lors desquelles les préoccupations des employés étaient parfois minimisées ou rejetées, ce qui prouve encore à quel point les choses ont peu changé.
Plusieurs ont aussi dénoncé les réponses de la haute direction aux préoccupations exprimées. Ces participants estiment que, compte tenu de tout ce qui a été signalé au sujet du manque de confiance à l’égard de la direction, la perception de l’absence de conséquences pour les auteurs des actes de racisme et des représailles contre les plaignants, le fait de dire des choses comme “ma porte est ouverte, venez me parler [si vous avez des préoccupations]” est reçu “comme une gifle en plein visage” et est considéré comme une preuve de plus que la direction est “insensible” et n’a pas conscience de la nature et de la portée du problème.
« Le travail de la maison effaçait mon exposition aux microagressions quotidiennes. Le fait de ne plus les avoir dans mon environnement de travail m’a aidé. Mais maintenant, lorsque les personnes parlent de leurs préoccupations, tout ce qu’ils obtiennent [de la direction] est cette formule disant qu’IRCC se soucie de l’équité au lieu de dire qu’IRCC comprend. »
« Je conviens que les choses sont mieux [en général] parce qu’il y a eu plus d’attention [mise sur le racisme]. Nous sommes davantage capables d’en parler. Mais pour ce qui est de la haute direction, notre foi en elle a disparu. La façon dont elle étouffe les question lors des séances de discussion …voir comme les gestionnaires répondent, tout cela diminue ma foi envers les gestionnaires. »
« J’ai travaillé sur des dossiers où j’ai constaté du racisme envers des employés. Maintenant, vous me demandez de revenir au bureau. Que faites-vous pour m’appuyer? Je reçois un courriel du DG disant que sa porte est ouverte, qu’il faut aller lui parler si on vit quelque chose. Comment les personnes vont-elles parler à une personne si elles pensent que rien ne sera fait? »
« Comprendre que, en tant qu’organisation, tout défaut de répondre à des questions comme à celle sur le retour au bureau fait diminuer la confiance ... ça semble si malhonnête. »
Enfin, plusieurs mentionnent que l’ordre de retour au bureau aura vraisemblablement des répercussions négatives sur les efforts d’IRCC pour embaucher et promouvoir des personnes racisées à des postes plus élevés puisque nombre de ces postes sont réservés aux personnes de la Région de la capitale nationale, où la diversité raciale est moindre que dans d’autres régions. En fait, plusieurs participants affirment qu’ils sont personnellement au courant de promotions récentes d’employés racisés d’un bureau régional à un poste au sein d’une équipe de l’AC qui ont été possibles grâce au fait que les employés pouvaient travailler à distance. Trouver des façons créatives d’atténuer cette répercussion est l’une des principales recommandations des participants pour l’avenir.
« Je suis dans une région. La mobilité vers le haut, pour nous, était limitée avant la pandémie; cela a changé depuis la pandémie. »
Les participants croient que rien n’a encore été fait pour offrir un mécanisme sûr et efficace permettant aux employés de signaler les incidents de racisme et d’en faire part aux échelons supérieurs. L’absence d’action dans ce domaine contribue aux perceptions selon lesquelles il y a peut-être du protectionnisme institutionnel en jeu. Cela renforce aussi la croyance selon laquelle le fait de signaler les incidents de racisme entraînera des représailles.
La crainte de subir des représailles pour avoir signalé des incidents de racisme a souvent été mentionnée, comme elle l’a été en 2021. Cependant, comme le mentionnent quelques participants, l’augmentation des discussions publiques au cours des 2 dernières années au sujet des expériences de racisme a exposé des « histoires d’horreur de représailles » et pourrait amplifier l’hésitation à signaler les cas.
« Il est difficile de trouver le courage de parler. À l’époque, j’occupais un poste intérimaire. Alors veux-tu risquer ce poste intérimaire et peut-être te faire dire après de retourner à ton poste d’attache, qui est parfois deux échelons de rémunération plus bas? »
Les participants pensent aussi que les formes actuelles de recours offertes par IRCC ne sont pas sûres ou efficaces.
« IRCC doit apprendre du secteur privé... Si je signale une situation, à moins que cela ne soit absolument nécessaire, il ne devrait y avoir aucune interaction entre moi et le gestionnaire à l’égard duquel je fais un signalement. »
« Je suis supposé m’adresser à mon gestionnaire, mais il est bon ami avec le superviseur. Ils vont se parler. »
Par conséquent, aujourd’hui, presque tous les participants estiment que la seule solution viable est que les cas signalés soient gérés à l’externe, par une entité que certains appellent un bureau de l’ombudsman, qu’ils s’attendent à voir avoir un pouvoir et des responsabilités allant au-delà de ceux conventionnellement attribués à un ombudsman.
Pour que le mécanisme de signalement des incidents de racisme à IRCC soit fiable et efficace, les participants disent qu’il devrait inclure ce qui suit.
Être entièrement externe et indépendant d’IRCC.
« La confiance dans l’employeur est brisée à tout jamais. La seule façon est de travailler avec un tiers indépendant. Le ministère doit être supervisé. »
Avoir la capacité de recevoir les plaintes de façon anonyme et de protéger les plaignants des représailles.
« Nous aidons les personnes à quitter leur pays et à obtenir une protection au Canada, et à IRCC, nous ne pouvons même pas obtenir cette protection. Nos carrières et salaires sont en jeu [si nous décidons de faire un signalement]. »
Avoir une certaine capacité de dévoiler la nature et la portée des conséquences imposées.
« Nous avons besoin d’un forum où les personnes peuvent faire part d’expériences anonymes et d’une équipe qui fait enquête sur elles et publie ce qu’elle a fait pour régler la situation. Nous ne sommes au courant de rien de ce qui a été fait. »
« Si IRCC était transparent à l’égard de ce qui a été fait, je serais peut-être prêt à faire un signalement. »
Les participants affirment également qu’IRCC devrait prendre des mesures pour faciliter de façon proactive l’obtention d’information au sujet du racisme qui demeure probablement dissimulée. Cela servirait en partie à prévenir des situations mineures d’empirer, mais pourrait également aider à cerner les secteurs (par exemple, des équipes précises) où le racisme est un problème sous-déclaré parce qu’il n’existe pas de mécanisme de signalement ou par crainte de représailles. Ils proposent quelques façons de procéder.
Une suggestion des participants est de demander aux employés de répondre régulièrement à des sondages anonymes à l’échelle du ministère sur le climat de travail en ce qui concerne le racisme et les problèmes avec leur équipe. De cette façon, le ministère pourrait faire un suivi en enquêtant dans les secteurs où cela semble nécessaire et intervenir au besoin.
« Il n’y a pas assez de choses faites pour gérer certaines personnes qui font l’objet d’un signalement après l’autre. »
« Il ne suffit pas d’avoir une boîte ouverte pour recevoir les plaintes. Il faut que quelqu’un demande, proactivement, si nous avons quelque chose à dire au sujet des 3 derniers mois. S’ils entendent quelque chose, même quelque chose de communiqué anonymement, ils doivent faire enquête activement. »
« Les personnes n’y croiront pas sauf si vous réglez les problèmes en suspens de façon substantielle. »
« Les incidents doivent faire l’objet d’une enquête, même si la personne ne dépose pas de plainte officielle. Il faut que davantage d’efforts soient déployés pour réviser le système entier en place en ce moment. »
Plusieurs participants suggèrent aussi que les gestionnaires soient systématiquement évalués par leurs employés. Il y a un certain scepticisme quant à l’efficacité de cela, puisqu’il y a une croyance selon laquelle les dirigeants d’IRCC se protégeront probablement entre eux. Quelques participants précisent que la personne qui reçoit cette rétroaction devrait être au moins à deux échelons de celui du gestionnaire évalué.
« Il n’y a rien de prévu dans les évaluations du rendement pour indiquer comment nous avons été traités par la direction. »
Les participants suggèrent des améliorations aux initiatives de lutte contre le racisme déjà entreprises ainsi qu’à de nombreuses autres initiatives.
Tout d’abord, les participants disent que l’objectif est souvent communiqué comme étant d’encourager l’embauche et la promotion des employés racisés « sans faire de compromis pour ce qui est de la compétence ». Les participants estiment que cela est trompeur et contre-productif, car cela impose à l’employé racisé le fardeau de prouver qu’il a des compétences égales. Selon eux, ce qui devrait être communiqué comme objectif est d’encourager l’embauche et la promotion d’employés racisés pour corriger les préjugés systémiques qui nuisent à une reconnaissance adéquate de leurs compétences. Les participants estiment que cela serait plus précis et placerait la responsabilité là où ils pensent qu'elle devrait incomber, à l’organisation et à son défaut d’éliminer les répercussions du racisme systémique, et non à l’employé racisé.
« J’ai entendu cette gestionnaire dévier du sujet en disant qu’elle doit choisir des personnes de groupes visés par l’équité en matière d’emploi et qu’elle ne comprend pas pourquoi on lui demande de passer outre des personnes plus qualifiées. C’était il y a 1 an. Ils ne sont juste pas rendus là encore. Comment pouvait-elle s’imaginer que c’était correct de dire cela? »
Une autre initiative bienvenue est le programme de mentorat et de parrainage conçu pour repérer et préparer les employés racisés en vue d’une promotion à des rôles de leadership. Les participants croient que les employés et les gestionnaires le ressentent, et que ce programme, en particulier le parrainage, peut grandement contribuer à augmenter le bassin d’employés racisés prêts à être embauchés à des postes supérieurs. Les participants estiment que le problème ici est un manque de ressources : il y a beaucoup trop peu de mentorés et de parrains mobilisés jusqu’à maintenant.
Bien qu’il s’agisse d’un bon départ, les participants mentionnent un certain nombre d’autres façons par lesquelles l’embauche et l’accès aux promotions pourraient être abordés.
En premier lieu, comme il a été mentionné dans une section précédente, des participants affirment que l’accès aux postes de direction, en particulier ceux qui sont responsables des décisions d’embauche, devrait exiger la preuve d’un niveau minimal de conscience des préjugés et de compétence interculturelle.
« Les gestionnaires d’embauche devraient être choisis par le biais d’un système de pointage pondéré en fonction d’un véritable engagement envers l’équité culturelle... S’ils ne s’y intéressent pas sincèrement, on ne peut pas les former dans cette optique. »
« La fonction publique a mis en place des tests pour mesurer notre façon de réagir lorsqu’on est confronté à des situations interculturelles. »
« De la même manière qu’il faut passer un test de dépistage de drogues pour travailler à la GRC, IRCC doit avoir en place un test quelconque pour éviter d’embaucher des racistes. »
« Je suis outré par les propos que des consultants ont tenus. Il n’y a pas de processus de vérification approprié pour les consultants. »
Libérer et réhabiliter les employés qui sont coincés dans des milieux de travail malsains en les éloignant des gestionnaires oppressifs et en les aidant à regagner leur confiance et leur efficacité professionnelles.
« On entend beaucoup parler de nomination, de parrainage et de recrutement, mais le pilier manquant est celui qui consiste à reconnaître les personnes dont le potentiel élevé peut passer inaperçu auprès de la direction. »
Des participants estiment également que le personnel des ressources humaines est débordé et n’est pas outillé pour soutenir adéquatement les gestionnaires d’embauche. Ils sont d’avis que les gestionnaires d’embauche ne sont pas des spécialistes et qu’ils n’ont pas le temps, les connaissances et la formation nécessaires pour s’acquitter comme il se doit des aspects de leur rôle ayant trait aux RH.
Les participants croient que les spécialistes des RH devraient se voir offrir des moyens d’action et être tenus responsables non seulement de conseiller les gestionnaires d’embauche quant à la manière de réduire au minimum l’incidence des préjugés raciaux sur leur prise de décision, mais aussi d’aller plus loin et de veiller à ce que la gestion des ressources humaines à IRCC soit exempte de préjugés. Ils estiment que cela est particulièrement important dans le contexte actuel où la pression pour multiplier les embauches afin d’atteindre les objectifs de production donne lieu à un recours accru aux processus d’embauche informels. Les participant croient qu’il faut à cette fin :
Soumettre à des audits occasionnels les décisions d’embauche et de promotion afin de cerner les problèmes naissants avant qu’ils ne s’aggravent.
« Les conseillers en RH ne sont pas aussi utiles qu’on pourrait l’espérer. À l’heure actuelle, le processus d’embauche repose entièrement sur les gestionnaires d’embauche : rédaction de l’offre d’emploi, rédaction de l’examen, évaluation de l’examen. Avoir ce soutien supplémentaire signifierait qu’on ne se contente pas de s’en occuper à temps perdu. »
« Avant 2009, lorsqu’on accédait à un poste de direction, on recevait une foule de formations. Depuis 2018, il y a eu très peu de formation en gestion pour les chefs d’équipe et, comme les gestionnaires sont davantage habilités à promouvoir des gens selon le principe du choix de la bonne personne, ils offrent des promotions à des personnes qu’ils aiment bien, mais qui ne sont pas nécessairement qualifiées. »
« Les gestionnaires ne devraient pas être ceux qui embauchent. Ils ont des préjugés inconscients et certains d’entre eux n’ont pas l’expérience, la formation ou le temps nécessaire pour bien faire les choses. Il devrait y avoir une équipe d’embauche qualifiée. »
« Les équipes des RH devraient s’impliquer davantage et disposer d’une sous équipe de la diversité afin d’apporter des outils servant à évaluer les préjugés inconscients et de contribuer à l’élaboration de questions d’entrevue exemptes de préjugés raciaux. Les RH doivent être mieux outillées à cette fin. »
Les stratégies d’entrevue privilégiées.
« Le mensonge que l’on m’a répété à maintes reprises est qu’IRCC est une méritocratie. On dit que la promotion repose sur l’expérience et les capacités, mais en réalité, il y a beaucoup de favoritisme, de népotisme et d’embauche de personnes qui nous ressemblent. »
« La transparence peut contribuer à réduire la méfiance. Si je pense que je ne suis pas promu parce que je suis racisé, racontez-moi toute l’histoire. Peut-être que vous ne m’offrez pas de promotion parce que vous n’avez pas le budget nécessaire. Ne pas comprendre le contexte qui sous-tend vos décisions crée de l’anxiété et de l’incompréhension. Racontez aux gens toute l’histoire, de manière proactive. »
« Nous essayons de mieux consigner les raisons pour lesquelles nous gérons un bassin et qui a accès à ces renseignements. À l’heure actuelle, cette démarche repose principalement sur un processus de plainte, mais elle devrait être plus transparente. »
« La manière dont les candidats sont évalués est différente de ce que certaines cultures jugeraient acceptable. Par exemple, le fait de s’approprier un projet serait considéré comme une agression et un manque d’humilité dans ma culture, alors qu’à IRCC, vous êtes pénalisé si vous dites “nous l’avons fait” lors d’une entrevue. Ils veulent que vous disiez “c’est moi qui l’ai fait”. Ces aspects de l’entrevue doivent être explicités. »
« Le processus d’entrevue pour les postes de direction se déroule dans un cadre très spécial. C’est un jeu auquel vous devez apprendre à jouer pour réussir. »
« [Les personnes en position de pouvoir] ont toutes la même façon de s’exprimer, des antécédents similaires. Où elles sont allées à l’école. C’est l’école d’immersion pour l’élite franco-canadienne, l’élite laurentienne. C’est un peu comme un club dont nous ne faisons pas partie, et nous ne savons pas comment y entrer. C’est un problème qui touche l’ensemble du gouvernement, mais à IRCC, nous devrions être meilleurs, parce que nous faisons venir des immigrants au pays. »
Selon les participants, une autre pièce manquante est l’absence de mise en œuvre d’évaluations du rendement et de création et de suivi de plans de perfectionnement professionnel pour les employés. Les participants estiment que cela semble être attribuable en partie à des objectifs de production élevés, mais aussi à une formation et à un soutien insuffisants de la part des cadres. Les participants font valoir que le Ministère a besoin d’une équipe spécialisée dans le perfectionnement professionnel vers laquelle les gestionnaires peuvent aiguiller les employés pour les aider à établir leur cheminement professionnel idéal et les encadrer dans leur parcours au sein de l’organisation.
Certains affirment également que le fait de confier cette tâche à des personnes qui ne font pas partie de l’équipe de gestion immédiate peut aider à éviter les situations où les employés racisés se retrouvent coincés sous la direction de gestionnaires qui ne les soutiennent pas dans leur cheminement professionnel.
« La consignation du rendement n’est pas notre point fort. Je n’ai pas eu d’entente de rendement valide depuis 2014. »
« Nous devons être plus cohérents en ce qui concerne la consignation du rendement. On ne m’a pas appris à mesurer le rendement et à encadrer les gens. »
« En tant que gestionnaires, nous avons trop à faire, nous n’avons ni le temps ni les compétences pour le faire. »
« Il est très important d’offrir aux gens des occasions dès le début de leur carrière. Les cadres se demandent pourquoi il n’y a pas de personnes plus haut placées parmi lesquelles choisir. Le mentorat est essentiel. Il faut commencer dès le début. »
« Je sais pertinemment qu’il y a des gestionnaires partiaux. Certains n’acceptent d’encadrer et de conseiller que des employés d’une certaine race. »
Comme il a été indiqué au début du présent rapport, des discussions avec des employés ayant une expérience récente des affectations à l’étranger (y compris des personnes dans des postes au niveau d’entrée et des postes de direction, ainsi que des expatriés et des employés recrutés sur place [ERP]) ont indiqué clairement qu’ils estiment que les progrès observés à IRCC au Canada au cours des deux dernières années n’ont pas été reproduits dans les bureaux du Ministère à l’étranger.
Ces employés semblent encore demander avec véhémence que leurs expériences de racisme soient entendues, qu’elles soient prises au sérieux et qu’on y mettent fin. De plus, comme nous l’avons souligné dans notre rapport de 2021, les manifestations de racisme vécues par les participants dans le contexte des affectations à l’étranger d’IRCC ont des répercussions particulièrement graves.
Plusieurs participants ont dit avoir souvent et à plusieurs reprises été témoins ou victimes de microagressions racistes, de harcèlement et de marginalisation professionnelle. Les tentatives de signalement ou de déclaration aux échelons supérieurs de ces situations étaient souvent balayées du revers de la main ou faisaient l’objet de représailles et, dans certains cas, même de menaces de la part de la direction. De plus, les participants disent que les contrevenants connus continuent souvent d’être nommés à d’autres postes (y compris dans des pays à majorité racisée) sans subir de conséquences et ils croient également que beaucoup sont même promus.
« Le fait d’être une personne noire est un sport extrême. Ce n’est pas une blague. Nous ne sommes pas protégés. »
Comme les participants l’ont souligné, ils croient que c’est important de régler la situation parce que :
Les participants ayant de l’expérience dans des affectations à l’étranger ont fait part de nombreux cas récents de commentaires ouvertement racistes et de harcèlement en milieu de travail à l’étranger, et également de la façon dont leurs plaintes ont été traitées. Voici quelques exemples vécus par les participants :
Les participants mettent en lumière un certain nombre de facteurs qui créent un environnement où de tels comportements peuvent persister sans conséquence.
Les participants disent aussi que, dans ces bureaux, les employés d’IRCC relèvent parfois de gestionnaires d’autres ministères, ce qui crée une rupture dans la chaîne de responsabilisation. Ils estiment que les employés qui cherchent à signaler ou à communiquer aux échelons supérieurs des incidents peuvent ne pas disposer d’une chaîne de commandement claire au sein d’IRCC pour le faire ou, s’il y en a une, il peut être difficile de s’y retrouver. Dans certains cas, les participants croient que si la personne fautive provient d’un autre ministère, IRCC peut avoir un pouvoir limité de mise en œuvre des conséquences.
« Il y a un grand manque d’uniformité lorsqu’on essaie de régler les plaintes, car il y a plusieurs organismes de réglementation différents qui se renvoient souvent la balle entre eux. Le processus est très incohérent. De plus, compte tenu de l’immunité diplomatique, etc., il ne semble pas y avoir de responsabilisation, même dans les cas les plus graves. »
Les participants croient que les postes de direction d’IRCC à l’étranger ont également tendance à être occupés par un cercle serré de personnes qui occupent à tour de rôle des postes à l’étranger et qui forment donc un groupe serré dont les membres ont tendance à se défendre mutuellement. Les participants estiment aussi que comme bon nombre d’entre eux sont en poste pour une période limitée, les plaintes sont souvent reportées jusqu’à ce que l’agresseur passe à la prochaine affectation, sans suivi ni conséquence.
« Ce que j’ai rencontré à l’étranger, c’était du personnel canadien carrément raciste d’une façon qui m’a choqué. Au Canada, on ne parle pas de ces choses. Mais si vous êtes à l’étranger depuis longtemps ou que vous êtes affecté à des endroits où ce n’était pas très important, vous vous sentez à l’aise d’exprimer ces choses. Et l’espace le permet. C’est comme voir un exemple choquant d’une formation qui se déroule devant vous. Exprimé par un homme blanc plus âgé »
« Ils y sont affectés pendant des années à la fois. Ils sont en rotation en tant qu’amis. Ils ne veulent pas créer de problèmes pour leurs amis, et ils peuvent épuiser le temps alloué aux plaintes. »
« Les gens se sentent menacés de parler parce que les agresseurs savent qu’ils peuvent s’en tirer impunément et qu’ils ont du pouvoir en nombre. »
De plus, les participants croient que la petite structure organisationnelle plutôt hiérarchique des affectations à l’étranger fait en sorte que les gestionnaires ont peu d’options pour renvoyer les personnes dont le comportement pose problème sans avoir d’incidence importante sur les opérations. De plus, il n’y a pas toujours un représentant local des RH ou du BRC (Bureau de résolution des conflits) vers qui se tourner pour obtenir du soutien en cas de racisme ou de harcèlement en milieu de travail. Si des représentants sont présents, les participants estiment qu’ils ont tendance à être particulièrement inefficaces en raison de leur proximité avec les gestionnaires locaux.
« À l’étranger, la hiérarchie est plus marquée. On ne peut pas déplacer les gens horizontalement. Il n’y a pas moyen de se déplacer latéralement... J’ai dû prendre quelqu’un à part et lui dire que je ne tolérais pas ces choses, mais que je ne pouvais pas en faire rapport parce qu’il fallait quand même produire. Vous devez quand même exécuter votre mandat. C’est semblable à la dynamique de nos petits bureaux d’IRCC à l’intérieur du pays, où il faut composer avec une culture de népotisme. »
Les participants proposent les solutions suivantes :
Les participants mentionnent plusieurs exemples observés ou soupçonnés de répercussions du racisme sur la prestation des programmes et des services d’IRCC, notamment :
Les différences entre les efforts déployés pour faire face aux crises des réfugiés (plus particulièrement, les différences entre la manière dont on a composé avec la récente crise des réfugiés ukrainiens comparativement à la situation qui avait lieu dans d’autres pays, comme la Syrie, l’Afghanistan et Haïti).
« Pendant mon intégration, j’ai vu les taux d’approbation liés à divers pays et les différences relatives à l’acceptation du fait de soutenir les arrivants afghans par rapport aux Ukrainiens... je m’attendais à une différence. Je ne suis naïf. Mais c’est la mesure dans laquelle la différence était importante qui m’a surpris. »
« Les décisions prises concernant l’Ukraine étaient sans fondement, et les personnes racisées s’en sont rendu compte immédiatement. Le fait d’ouvrir les portes, et de dire juste “allez, venez“...on n’avait jamais fait ça avant. Pas même au Yémen, pas même en Syrie... »
Les participants estiment que les résultats liés au traitement des cas suggèrent clairement que des préjugés axés sur la race ont des répercussions sur la prestation des programmes et des services. Ce qui est moins clair, c’est d’où viennent ces préjugés et ce qu’il faut faire à leur sujet. Bien que les participants aient communiqué leurs pensées sur la façon dont les politiques et les processus internes peuvent engendrer ces répercussions, ils ont plus de questions que de réponses à cette étape-ci.
Quelques participants reconnaissent que bien qu’il y ait toujours un degré de subjectivité dans les décisions liées à l’approbation des demandes, il est possible que les préjugés raciaux au niveau du traitement individuel des dossiers des clients puissent avoir des répercussions. En fait, certains disent que les commentaires qu’ils entendent de la part du personnel chargé du traitement des cas sont une source de préoccupation.
« J’ai déjà été décideur pour les demandes de citoyenneté, et des commentaires que j’ai entendus de la part de collègues me font douter de la prise de décisions à certains niveaux. Si vous exprimez des choses de ce genre, j’ai l’impression que vous faites de la discrimination à l’égard de certains candidats. »
En revanche, certains soutiennent qu’au niveau de l’agent de traitement des cas individuel, il existe des incitatifs compensatoires afin d’approuver plutôt que de rejeter une demande, parce qu’approuver une demande : (1) prend moins de temps (et contribue donc à atteindre les cibles de production); (2) est moins risqué (parce qu’il y a moins de risque que la décision ne soit contestée) et (3) est satisfaisant sur le plan personnel (selon l’hypothèse voulant qu’il est habituellement plus satisfaisant de dire oui que de dire non à quelque chose).
Les participants disent que dans certains secteurs, il y a eu un mouvement vers le traitement des demandes en lots comme moyen d’accroître l’efficacité. Cela signifie qu’au lieu de considérer tous les aspects du dossier d’un candidat pour obtenir une vision globale de sa situation, différentes équipes analysent différentes parties d’une demande dans le but de détecter des indicateurs précis suggérant qu’une demande devrait être retenue en vue d’un examen approfondi. Comme des participants le font remarquer, ces « signaux d’alarme » sont parfois fondés sur des hypothèses non corroborées (par exemple, regarder si les gens sourient sur une photo de mariage sans tenir compte des contextes culturels dans lesquels cela pourrait ne pas être la norme, ou des hypothèses au sujet de timbres dans le passeport d’un demandeur sans données fermes pour appuyer ce que ces timbres devraient impliquer).
« Je dois examiner des dossiers complets de cas, et parfois les notes de cas révèlent des hypothèses fondées sur des stéréotypes et des anecdotes, et non pas sur des faits. »
« Quiconque examine les annonces chaque année au sujet des objectifs d’IRCC... en ce qui concerne les résidents permanents, c’est maintenant en termes de millions, et nous manquons d’employés pour traiter ces demandes depuis un certain temps. Ainsi, l’accent est mis sur les cas plus difficiles... les escrocs, ceux qui rendent nos vies difficiles... Cela façonne la culture d’IRCC... Nous commençons à observer des tendances... de gens qui essaient de frauder le système. »
Bien qu’il ne soit peut-être pas faisable d’éliminer toutes les répercussions du racisme sur la conception des programmes et des politiques, de nombreux participants estiment que, dans le cadre de l’engagement d’IRCC à lutter contre le racisme, celui-ci devrait bien examiner les répercussions des hypothèses qui sous-tendent ses politiques et ses programmes, et au moins examiner si elles sont justifiées et harmonisées avec les objectifs actuels du Ministère.
Un autre exemple mentionné par les participants renvoie aux hypothèses qui sous-tendent le système de points d’immigration économique du Canada, qui favorise les immigrants instruits, riches et habitant dans les villes qui, comme certains l’ont souligné, ont également tendance à avoir un profil qui ressemble aux profils socioéconomiques de la plupart des décideurs stratégiques d’IRCC. Les participants estiment que ce système repose sur des hypothèses concernant le type de personnes les plus susceptibles de contribuer positivement au développement économique du Canada. Cependant, les participants croient que dans les réalités économiques d’aujourd’hui, il peut y avoir d’autres caractéristiques plus bénéfiques que l’on devrait favoriser, comme le fait d’avoir une expérience agricole, par exemple, à titre de moyen de sélectionner des immigrants qui pourraient être plus enclins à peupler des régions rurales en décroissance du Canada ou à favoriser les immigrants des catégories entrepreneuriales.
« Avec notre approche axée sur le capital humain en vue de la sélection des immigrants permanents de la catégorie économique, l’hypothèse sous-jacente est que les gens qui gagnent plus d’argent et qui réussissent bien à l’école seront de meilleurs citoyens parce que ce sont les préjugés des gens qui ont créé ces politiques. Nous choisissons des gens qui ont les mêmes qualités que les cadres supérieurs de notre fonction publique. »
« Cela en grande partie en raison de l’origine de la création de notre ministère. Comment décidons-nous si quelqu’un va être un bon immigrant? »
« Nous sommes fiers d’avoir un système objectif, transparent et équitable. Par exemple, nous ne faisons pas passer d’entrevue aux candidats parce que les entrevues peuvent causer des préjugés. D’autres pays le font, mais c’est un choix que nous avons fait. Alors nous devrions peut-être examiner d’autres choses que nous faisons et nous demander : “Y a t-il quelque chose que nous faisons qui n’est pas correct? Sommes-nous myopes?“... Je ne sais pas quelles sont les réponses, mais je pense que nous devons nous poser les questions. »
Comme plusieurs le font remarquer, il devrait également y avoir une plus grande collaboration entre les directions générales qui conçoivent les politiques et les programmes et la Direction générale des opérations responsable de leur mise en œuvre. Ces deux volets du Ministère ont tendance à travailler en vase clos, ce qui signifie qu’il y a peu de possibilités de tenir compte des incidences des décisions prises par l’un sur les décisions prises par l’autre.
« Nous [les Politiques] ne savons même pas comment fonctionne le traitement et comment ces objectifs que nous fixons ont une incidence sur les gens. Les directions générales ne se parlent pas. Les Opérations ne parlent pas à l’Établissement ni à l’Intégration, et il n’y a pas de lien établi entre les directions générales. »
Finalement, les participants soulignent l’importance de s’assurer que l’analyse de l’incidence du racisme est menée avant l’automatisation des processus, car une fois l’automatisation mise en marche, il devient presque impossible de revenir en arrière.
« Nos objectifs de production ambitieux nous font progresser rapidement vers des solutions technologiques. La création de ces systèmes peut être risquée si une perspective rattachée à la diversité et à l’inclusion (DI) n’est pas correctement appliquée avant qu’elle soit automatisée parce qu’une fois que la machine est lancée et que les activités ont lieu, c’est difficile d’essayer de la modifier. »
Reconnaissant que l’élimination du racisme dans une organisation aussi vaste et aussi complexe qu’IRCC est une tâche monumentale, à l’exception de la situation liée aux affectations à l’étranger, selon les progrès réalisés jusqu’à maintenant, les participants ont généralement bon espoir et sont fiers de faire partie d’une organisation qui met la barre haute en matière de lutte contre le racisme au sein du gouvernement fédéral.
Toutefois, les participants estiment que les gains réalisés jusqu’à présent sont considérés comme étant dans des domaines relativement faciles à régler. Ils croient que le Ministère doit maintenant démontrer la force de son engagement à l’égard de la lutte contre le racisme en allant au-delà du fait de compenser pour le racisme systémique et en commençant à le démanteler. Les participants estiment que cela nécessitera ce qui suit :
Les participants suggèrent également un grand nombre d’améliorations aux initiatives déjà amorcées ainsi que d’autres mesures à prioriser. Les plus importantes d’entre elles comprennent :
Les instruments qualitatifs en anglais et en français sont fournis dans un document distinct.