Journal de l'Assocation médicale canadienne
1995; 153 : 306-308
Santé Canada, 1994
Reproduit avec la permission du Ministre des Approvisionnements
et Services, 1996
Il peut être très difficile de prévoir le risque d'exposition même dans les zones géographiques où l'on sait que le méningocoque est actif, parce que les taux de transmission varient. Ainsi, l'endroit où s'est produite l'exposition et la durée de celleci ne sont pas les seuls facteurs à considérer. Les conditions climatiques, qui peuvent varier d'une année à l'autre, influent de façon marquée sur le degré de risque. Le type d'exposition joue également un rôle important, notamment le fait de vivre dans un endroit surpeuplé, d'avoir des contacts étroits ou de résider dans un établissement dans une région endémique. Il faut en outre considérer l'état de santé du voyageur au moment de l'exposition. L'âge constitue un important facteur de risque de maladie. Au nombre des cas récents signalés au Canada, 29,1 % sont survenus chez des nourrissons de moins de 2 ans, 42,4 % chez des enfants de 2 à 19 ans et 28,6 % chez des personnes de plus de 19 ans (Laboratoire de lutte contre la maladie [LLCM], Ottawa, données inédites, 1995). Les rapports font état de données similaires pour les ÉtatsUnis[1]. Parmi les autres facteurs déterminants, citons la splénectomie et la fonction immunitaire déprimé.
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Les données épidémiologiques sur l'infection à méningocoque dans les pays en développement où la maladie est active indiquent que ce sont les enfants qui sont le plus fortement exposés et que le taux d'incidence est le plus élevé chez les moins de 2 ans. Les données révèlent de plus que les adultes courent un risque appréciable (fermeté de la déclaration : catégorie A; qualité des preuves : classe III[2]).
Les régions de l'Afrique subsaharienne font partie des zones où la méningite à méningocoque a toujours été endémique (voir la liste en fin d'article). Dans ces régions, la maladie est saisonnière, et l'incidence peut grandement dépasser celle observée dans d'autres régions du monde.
Outre les régions connues pour leur activité méningococcique, les zones où le méningocoque est apparu récemment sont indiquées dans des mises à jour fréquentes publiées par le LLCM; il convient d'utiliser ces données pour déterminer si une vaccination est nécessaire. Avant de recommander l'immunisation contre l'infection à méningocoque, le clinicien doit évaluer judicieusement les risques pour le voyageur à l'étranger et tenir compte de l'exposition géographique possible, de l'état de santé de la personne et des activités prévues.
Les vaccins antiméningococciques polysaccharidiques autorisés au Canada sont sûrs, immunogènes et contiennent les sérogroupes A et C, qui sont les plus fréquemment associés aux épidémies de méningococcie. On devrait songer à immuniser les personnes «à risque» qui se trouvent, ou se rendront, dans une zone où le taux d'incidence de l'infection causée par l'un des sérogroupes inclus dans le vaccin est élevé.
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Chez les enfants de 3 à 5 mois, l'immunogénicité contre le polysaccharide du groupe A est faible 3 mois après l'administration de deux doses du vaccin monovalent : le taux d'anticorps sériques dirigés contre le polysaccharide du groupe A s'élève à moins de 2 µg/mL chez 36 % des sujets et à 1 µg/mL chez 60 % d'entre eux[3,4]. De même, chez les enfants qui ont reçu à l'âge de 3, 7 et 12 mois le vaccin du groupe A ou C ou les deux, les concentrations d'anticorps chutent rapidement entre l'âge de 13 et 24 mois. Dans le cas des anticorps du groupe C, la baisse observée est plus spectaculaire[4,5] (fermeté de la déclaration : catégorie A; qualité des preuves : classe II).
Dans un rapport plus récent faisant suite à un programme de vaccination mis en oeuvre à Ottawa, on a mesuré les taux d'anticorps chez 50 enfants de 6 à 12 mois. Un mois après l'immunisation, la réponse immunitaire au vaccin du groupe A était très faible, passant de 0,13 µg/mL avant à 1,58 µg/mL après. Les chercheurs ont en outre fait état d'une piètre corrélation entre l'activité bactéricide et les taux d'anticorps contre le méningocoque du groupe C chez les très jeunes enfants[5,6] (fermeté de la déclaration : catégorie A; qualité des preuves : classe II).
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L'efficacité du vaccin contre le méningocoque du groupe A diminue rapidement chez les enfants qui ont reçu une seule dose avant l'âge de 4 ans (1 an, 2 ans et 3 ans après la vaccination, l'efficacité du vaccin est de 100 %, 52 % et 8 %, respectivement). Des études ont montré que la réponse immunitaire au polysaccharide A était également faible un an après l'administration du vaccin quadrivalent à des enfants de 2 à 8 ans[4,6,7] (fermeté de la déclaration : catégorie A; qualité des preuves : classe II).
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Afin de déterminer la nécessité d'une dose de rappel du vaccin contre le méningocoque du groupe A et C après la primovaccination (une ou deux doses du vaccin contre le méningocoque du groupe A ou C), on a étudié le cas du vaccin bivalent (groupes A et C combinés) administré aux enfants nordaméricains en santé à l'âge de 2 ans et de 5 ½ ans[4,8] (fermeté de la déclaration : catégorie A; qualité des preuves : classe II).
On a observé une diminution des taux d'anticorps dirigés contre le groupe A, 2 ans et 5 ans après la primovaccination, chez des enfants africains âgés de 1 à 4 ans qui avaient reçu une dose unique du vaccin bivalent (A + C). L'administration d'une dose de rappel du vaccin 2 ans après l'immunisation n'a pas eu d'effet sur les taux d'anticorps[2,8] (fermeté de la déclaration : catégorie A; qualité des preuves : classe II).
Le calendrier de primovaccination devrait être conforme aux recommandations contenues dans le Guide canadien d'immunisation[9]. Des anticorps protecteurs apparaissent environ 15 jours après la vaccination et l'immunité persiste pendant au moins 3 à 5 ans chez les adultes.
Il faudrait envisager d'immuniser les personnes suivantes lorsqu'elles prévoient visiter des pays où le risque d'infection par le méningocoque est élevé.
La vaccination n'est pas recommandée pour les gens d'affaires ou les touristes qui séjourneront brièvement dans les zones d'activité méningococcique accrue et qui auront peu de contacts étroits avec la population locale.
On observe souvent des épidémies de méningite à méningocoque, principalement de type A, durant la saison sèche (de décembre à juin) dans les pays suivants. Ces pays se trouvent dans ce qu'on appelle la ceinture de méningite à méningocoque de l'Afrique subsaharienne : Bénin, BurkinaFaso, Cameroun, Côted'Ivoire, Djibouti, Éthiopie, Gambie, Ghana, Guinée, GuinéeBissau, Mali, Niger, Nigeria, République centrafricaine, Ruanda, Sénégal, Somalie, Soudan, Tchad, Togo. [Retourner à la Déclaration 1]
Au cours des dernières années, les pays suivants ont signalé des épidémies ou des éclosions importantes de cas de méningite à méningocoque : Brésil (sérotype B), Burundi, Chili, Cuba, Haïti, Inde, Kenya, Malawi, Népal, Ouganda, Tanzanie.
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Membres : Dr D.W. MacPherson (président), Dr S. Dumas, Dr G. Horsman (Comité consultatif de l'épidémiologie), Dr J.S. Keystone, Dr D. Lawee, Dr J.D. MacLean, Dr J. Robert, Dr R. Saginur, Dr D. Scheifele (Comité consultatif national de l'immunisation) et Mme R. Wilson (Service universitaire canadien outremer [CUSO]). Membres d'office : Dr P. Percheson (Direction générale de la protection de la santé [DGPS], Santé Canada), Dr E. Gadd (DGPS, Santé Canada), Dr S. Mohanna (Direction générale des services médicaux, Santé Canada), Dr R. Nowak (ministère de la Défense nationale), Dr M. Tipple (Centers for Disease Control and Prevention des ÉtatsUnis), Dr C.W.L. Jeanes (secrétaire), Dr J.S. Spika (Laboratoire de lutte contre la maladie [LLCM], Santé Canada), Mme S. Ladouceur (responsable du secrétariat du Comité consultatif), Dr J. Losos (LLCM, Santé Canada) et Mme S. Herman (secrétaire).
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