Mot du rédacteur en chef
 English
 

Journal de l'Association médicale canadienne 1997; 156 : 149

© 1997 Association médicale canadienne


Les femmes âgées de 40 à 49 ans devraient-elles subir une mammographie annuelle de dépistage? Anthony B. Miller et ses collègues se sont attaqués à cette question dans le cadre d'une étude contrôlée et randomisée de grande envergure[1] et n'ont trouvé aucune donnée probante démontrant une de la mammographie. La controverse qui a suivi a porté avant tout sur la stratégie de randomisation : les femmes à risque plus élevé de cancer du sein étaient-elles plus susceptibles d'avoir été référées au hasard dans le groupe de sujets ayant subi une mammographie, ce qui expliquerait les résultats médiocres du dépistage? L'Institut national du cancer et l'Université de Toronto ont demandé aux épidémiologistes John Bailar et Brian MacMahon d'examiner les protocoles d'inscription à l'étude et de randomisation. On publie leur rapport dans le présent numéro (page 193). Norman F. Boyd (page 207) conclut que même si Bailar et MacMahon présentent des arguments convaincants pour démontrer que la modification des noms dans les registres de répartition ne pourrait qu'avoir eu un effet négligeable sur les résultats de l'étude, les auteurs n'arrivent cependant pas à être aussi persuasifs pour ce qui est d'exclure entièrement d'autres possibilités de corruption délibérée de la randomisation.

Les études randomisées multicentriques sont essentielles à la solution de questions pivot en médecine, mais elles sont difficiles à concevoir et encore plus difficiles à réaliser. La méthode de randomisation adoptée il y a 20 ans pour l'étude nationale sur le dépistage du cancer du sein ne serait pas utilisée aujourd'hui. La randomisation efficace n'est pas aussi simple que tirer à pile ou face et beaucoup d'études ont toujours des problèmes de randomisation[2].

Qu'est-ce que les médecins devraient faire au sujet de la mammographie de dépistage? Heather Bryant nous rappelle la distinction cruciale entre le dépistage et la recherche de cas (page 213). D'une part, les recommandations relatives au dépistage doivent être fondées sur des données probantes claires qui démontrent que les avantages l'emportent de loin sur les inconvénients. De l'autre, les médecins et les patientes peuvent déterminer si la mammographie serait utile dans un cas en particulier. Chez certaines femmes âgées de 40 à 49 ans, une mammographie annuelle est logique.

Les augmentations des prix des cigarettes font une différence, comme le montrent Vivian H. Hamilton et ses collègues (page 187). Au moment d'aller sous presse l'irascible industrie du tabac exerce de fortes pressions contre la législation plutôt édentée que le ministre de la Santé David Dingwall a présentée pour réduire l'exposition des jeunes poumons aux agents cancérogènes contenus dans les cigarettes. Ne vacillez pas, M. Dingwall.

Aussi dans ce numéro, Tara Young, lauréate du Prix Logie, décrit ses expériences du mensonge et de la duperie dans le contexte de demandes d'inscription à des programmes de résidence (page 219). David M. Patrick décrit un nouveau protocole agressif de prophylaxie contre le VIH après une blessure par piqûre d'aiguille (page 233). Enfin, nous attirons votre attention sur Médicogramme, une nouvelle chronique du JAMC. Chaque chronique contiendra un ensemble intéressant de données et une brève interprétation. Lisez-la à la dernière page.--JH

Références

  1. Miller AB, Baines CJ, To T, Wall C. Canadian National Breast Screening Study: 1. Breast cancer detection and death rates among women aged 40 to 49 years. CMAJ 1992;147:1459-76.
  2. Schulz KF, Chalmers I, Grimes DA, Altman DG. Assesing the quality of randomisation from reports of controlled trials published in obstetrics and gynecology journals. JAMA 1994;272:125-8.

| JAMC le 15 janvier 1997 (vol 156, no 2) |
>