CMAJ/JAMC Santé publique
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Utilisation de l'amantadine au cours des poussées de grippe dans des établissements de soins de longue durée

CMAJ 1997;157:1575-6

© 1997 Association médicale canadienne


Même lorsqu'on met en oeuvre des programmes d'immunisation, des poussées de grippe peuvent éclater dans des établissements de soins de longue durée parce que des personnes âgées réagissent mal au vaccin. On utilise l'amantadine, médicament antiviral, pour interrompre les poussées de grippe A dans ce contexte1­3.

L'amantadine a une efficacité de 70 à 90 % dans la prévention des maladies causées par les virus grippaux A, mais elle est inefficace contre le virus grippal B2. Lorsqu'on administre simultanément de l'amantadine à tous les résidents dès qu'on repère une poussée de grippe A, la poussée s'interrompt habituellement brusquement. Pour que cette stratégie donne de bons résultats, l'établissement doit toutefois être bien préparé.

Plan d'urgence et commandes d'amantadine

Les établissements de soins de longue durée devraient mettre au point des plans d'urgence afin de lancer rapidement une prophylaxie à l'amantadine4. Il peuvent notamment obtenir d'avance des ordonnances de médecins (par exemple, l'automne ou au moment de l'admission de chaque résident) que le médecin conseil ou le comité de lutte contre les infections peuvent utiliser au besoin. Le médecin conseil ou le comité devraient aussi pouvoir mettre fin à la prophylaxie à l'amantadine le moment venu.

L'amantadine a peu d'effets secondaires lorsque la posologie est calculée avec soin. La dose prophylactique recommandée pour les plus de 65 ans est de 100 mg une fois par jour, mais elle est trop forte pour de nombreux résidents frêles. La déclaration annuelle sur la vaccination anti-grippale du Comité consultatif national sur l'immunisation contient une table de posologies comportant des rajustements pour déficience rénale (Tableau 1). Il est très utile de déterminer la clairance de la créatinine et la posologie de l'amantadine de chaque résident avant la saison de la grippe. C'est souvent le pharmacien de l'établissement qui fait les calculs. En cas d'urgence, toutefois, on peut prescrire aux résidents une dose initiale de 100 mg pendant que l'on calcule le niveau de la créatinine4.

Décision d'utiliser l'amantadine

En cas de poussée confirmée ou soupçonnée de grippe A dans un établissement de soins de longue durée, il faut amorcer une prophylaxie à l'amantadine le plus rapidement possible, de préférence après avoir consulté le service local de santé publique. Si la prophylaxie est retardée, beaucoup plus de résidents risquent de tomber malades. L'analyse rapide d'écouvillonnages du nasopharynx peut confirmer rapidement le diagnostic, mais l'analyse peut produire des résultats faussement négatifs. Il est raisonnable de commencer à administrer l'amantadine avant la confirmation par le laboratoire si les symptômes sont compatibles avec le grippe A et si le médecin hygiéniste indique que le virus grippal A circule dans la région.

Il faudrait administrer l'amantadine à tous les résidents en même temps, qu'ils aient été vaccinés ou non. L'amantadine ne sera toutefois pas bénéfique pour les résidents qui sont déjà malades depuis plus de 48 heures ou qui se sont déjà rétablis, et il ne faudrait pas leur en donner. On peut aussi offrir de l'amantadine aux membres du personnel qui n'ont pas été vaccinés. La prophylaxie doit continuer pendant au moins 2 semaines, ou jusqu'à ce qu'il se soit écoulé environ 1 semaine après l'apparition du dernier cas.

Si des sujets continuent de tomber malades en grand nombre, ce qui indique que la poussée est attribuable à une autre cause ou qu'il se crée une résistance, il faut cesser d'administrer l'amantadine.

Surveillance des effets secondaires

Il faut suivre attentivement les résidents qui reçoivent de l'amantadine et modifier les posologies ou cesser d'administrer le médicament si des effets secondaires sérieux font leur apparition2,3. Les effets secondaires sont habituellement bénins et s'atténuent après la première semaine. L'amantadine peut causer des symptômes liés à la fois au système nerveux central et à l'appareil gastro-intestinal. Parmi les effets secondaires graves occasionnels, mentionnons les changements marqués de comportement, le délire, les hallucinations, l'agitation et les crises d'épilepsie. Ces effets secondaires sont plus fréquents chez les personnes âgées et chez les personnes qui ont des troubles épileptiques, des troubles psychiatriques ou une insuffisance rénale. Lorsque les posologies sont fondées sur la clairance de la créatinine, des effets secondaires sérieux sont peu fréquents.

Traitement des résidents malades

Chez un adulte en bonne santé, l'amantadine réduit la fièvre et raccourcit la durée de la maladie, mais on n'en connaît pas l'efficacité comme moyen de prévention des complications chez les patients à risque élevé2. De plus, des virus résistant à l'amantadine peuvent faire leur apparition au cours du traitement et provoquer d'autres cas de grippe5,6. Il faut limiter à 3 à 5 jours la durée du traitement à l'amantadine des résidents sérieusement grippés, qu'il faut isoler dans la mesure du possible des résidents qui reçoivent une prophylaxie à l'amantadine3,4.

Susan E. Tamblyn, MD, DPH
Directrice médicale
Unité sanitaire du district de Perth
Stratford (Ont.)

Références

  1. Chapman LE. Amantadine use for control of institutional influenza A. In: Hannoun C, Kendal AP, Klenk HD, Ruben FL, editors. Options for the control of influenza II. Amsterdam: Elsevier Science Publishers; 1993. p. 343-7.
  2. Comité consultatif national de l'immunization. Déclaration sur la vaccination antigrippale pour la saison 1997­1998. Can Commun Dis Rep 1997;23(DCC-2):1-12.
  3. Prevention and control of influenza: recommendations of the advisory committee on immunization practices (ACIP). MMWR 1997;46(no. RR-9):1-25.
  4. Gomolin IH, Leib HB, Arden NH, Sherman FT. Control of influenza outbreaks in the nursing home: guidelines for diagnosis and management. J Am Geriatr Soc 1995;43:71-4.
  5. Mast EE, Harmon MW, Gravenstein S, Wu SP, Arden NH, Circo R, et al. Emergence and possible transmission of amantadine-resistant viruses during nursing home outbreaks of influenza A (H3N2). Am J Epidemiol 1991;134:988-97.
  6. Degelau J, Somani SK, Cooper SL, Guay DRP, Crossley KB. Amantadine-resistant influenza A in a nursing facility. Arch Intern Med 1992;152:390-2.

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| CMAJ December 1, 1997 (vol 157, no 11) / JAMC le 1er décembre 1997 (vol 157, no 11) |