![]() |
![]() |
Réforme curriculaire et statut des disciplines : quels impacts sur la formation professionnelle à l'enseignement ?, Volume XXVIII , No 2, automne-hiver 2000. |
Dans cet article (1), nous présentons quatre conceptions de la discipline scolaire que nous avons dégagées de l'analyse de la documentation scientifique. La première conception considère les disciplines scolaires comme un prolongement des disciplines scientifiques académiques dont elles portent les noms. La deuxième conception considère que les disciplines scolaires constituent un produit et un enjeu sociaux. La troisième conception considère que les disciplines scolaires constituent une production culturelle de l'école, par l'école et pour l'école. La quatrième conception, enfin, considère que les trois premières conceptions, loin de constituer trois pôles mutuellement exclusifs, reflètent trois aspects d'une même réalité et doivent servir ensemble à définir ce que constituent les disciplines scolaires.
This article presents four concepts of school disciplines identified by a study of the scholarly literature on the subject. The first concept treats teaching the various school subjects as an extension of the academic disciplines they come under. The second considers school subjects as products and social issues. The third considers them as a cultural production of the school, by the school and for the school. The fourth concept encompasses the first three; in other words, it does not view them as mutually exclusive, but rather as three aspects of the same reality. As such, they should work together to help us define what goes into the teaching of school subjects.
En este artículo presentamos cuatro concepciones de las asignatures escolares que hemos obtenido a partir del análisis de la documentación científica. La primera concepción considera las asignaturas escolares como una prolongación de las disciplinas científicas académicas de las cuales obtienen sus nombres. La segunda concepción considera que las asignaturas escolares constituyen un producto y un reto social. La tercer concepción considera que las asginaturas escolares constituyen una producción cultural de la escuela, por la escuala y para la escuela. La cuarta concepción considera, enfin, que las tres primeras concepciones, lejos de constituir tres polos mutamente excluyentes, reflejan tres aspectos de una misma realidad y deben servir para definir lo que constituyen las asignaturas escolares.
La formation professionnelle à l'enseignement primaire, mais aussi à l'enseignement secondaire, est largement dominée par le modèle disciplinaire qui caractérise le système scientifique au sein des Universités. Cette emprise touche non seulement la formation psychopédagogique et la formation aux fondements de l'éducation, mais aussi la formation dans les disciplines d'enseignement, celles qui feront l'objet d'apprentissage par les élèves.
Or, si «le maître n'existe, en tant que maître, que dans la mesure où il sert la formation de l'élève» (Sachot, 1997), et si la mission de l'école n'est pas de préparer tous les élèves à l'université mais de les préparer d'abord à la vie, il est nécessaire de questionner sérieusement les liens que doivent avoir les disciplines scientifiques avec les disciplines en vigueur dans les écoles, à savoir les disciplines ou les matières scolaires. Et, rappelons-le, s'il y a besoin, c'est à l'enseignement de celles-ci que les enseignants doivent être préparés.
Pour mieux saisir la place et à la fonction des savoirs disciplinaires dans la formation à l'enseignement primaire, il est nécessaire donc de clarifier le lien que les disciplines scolaires doivent entretenir avec le système des disciplines scientifiques. C'est un travail qui nécessite aussi une clarification du concept de discipline scolaire lui-même. C'est l'objet du texte que nous présentons ici.
En effet, en retenant trois composantes principales qui peuvent interagir dans la détermination des disciplines scolaires considérées du point de vue de leurs contenus et de leurs finalités - l'école avec ses réalités et ses exigences, la société avec ses influences et ses attentes et les disciplines scientifiques comme sources de savoir confirmé - quatre principales conceptions de la discipline scolaire (2) sont dégagées de la documentation scientifique (voir Figure 1).
Pour construire le modèle que nous proposons ici, nous nous sommes basés sur les oppositions explicitement énoncées par divers auteurs que nous avons consultés. En effet, des auteurs comme Grossman & Stodolsky (1994) et Goodson (1981, 1987) avaient déjà souligné la forte opposition entre certains philosophes de l'éducation et certains sociologues de l'éducation (ceux appartenant surtout à la nouvelle sociologie de l'éducation) dans leur conception de ce que constitue une discipline ou une matière scolaire. Nous avons repris cette opposition pour distinguer entre deux pôles : le pôle épistémologique et le pôle sociologique.
Par ailleurs, d'autres auteurs comme Chervel (1988, 1998), Goodson (1981, 1987) et Layton (1972) se sont intéressés à l'histoire des disciplines scolaires et ont fortement critiqué l'une ou l'autre des deux positions précédentes. Nous nous sommes inspirés des travaux de ces auteurs pour proposer le troisième pôle : le pôle historique. La quatrième conception, occupant la position centrale entre les trois pôles, est une conception intégrant les trois précédentes.
Figure 1. Les disciplines
scolaires entre les
disciplines scientifiques, la société et l'école.
Les quatre sections composant cet article exposent respectivement les quatre conceptions que nous venons de présenter.
Dans la première conception (voir Figure 1, flèche no 1), la discipline scolaire s'inscrit en continuité avec la discipline scientifique dite de référence ou, du moins, comme découlant principalement de celle-ci. Parmi les auteurs qui ont traité explicitement des fondements de cette conception, nous pouvons citer : Bruner (1964); Hirst, (1965, 1975a); Phenix (1964, 1976); ou Schwab (1964, 1978). Cette conception est également partagée par nombre de didacticiens.
Gardner (1975), en se basant sur les écrits de Bruner, de Schwab et d'autres auteurs, résume la conception qu'ils partagent au sujet des matières scolaires dans ce qu'il nomme la théorie de structure-of-knowledge. Il y a une théorie, écrit-il :
«which has come to be known as the structure-of-knowledge, theory which has been described in the writings of Bruner, Schwab, and others. All of these writers have argued that school subjects should serve as faithful and valid introductions to the academic disciplines whose names they bear [...]
The elements of the structure-of-knowledge theory can be economically expressed in a few sentences. Knowledge is produced by a variety of disciplines. Each discipline operates upon a domain; practitioners of the discipline operate upon the domain by means of a substantive structure and a syntactical structure [...]» (3).
(Gardner, 1975, p. 1-2)
Dans cette conception, la centration sur les disciplines scientifiques ne vise pas toujours l'acquisition du savoir et des structures disciplinaires comme principale finalité. Chez certains auteurs comme Hirst (1975a) et Schwab (1978) cette centration constitue aussi le meilleur moyen pour assurer le développement d'une pensée rationnelle chez l'élève, ou encore pour lui assurer une éducation libérale (liberal education). C'est principalement à travers les idées exprimées par ces deux auteurs que nous allons exposer les fondements de cette première conception de la discipline scolaire.
Hirst (1975c), dans un texte intitulé Liberal education and the nature of knowledge, explique ce que désigne la liberal education dans le contexte actuel et comment elle se distingue de la conception qui a été véhiculée par les grecs. Il y explique aussi le lien entre ce type d'éducation et l'acquisition des savoirs disciplinaires.
En effet, l'auteur rappelle que la notion grecque de liberal education a été fondée sur un ensemble de doctrines dont deux sont considérées comme principales. La première concerne la relation du savoir avec le développement de l'esprit. Elle postule que l'acquisition du savoir représente le meilleur accomplissement de l'esprit et la meilleure satisfaction de celui-ci. La deuxième concerne la relation du savoir avec la réalité. Elle postule que le bon usage de la raison permet de connaître le fond des choses et peut donc permettre l'appréhension du réel, de ce qui est immuable, de ce qui est vrai.
La justification que ces doctrines fournissent à ce concept d'éducation, ajoute l'auteur, est triple. Premièrement, une telle éducation est basée sur ce qui est vrai et non sur de quelconques opinions ou croyances incertaines ou encore de quelconques valeurs temporaires. Elle a par conséquent une finalité qu'aucune autre forme d'éducation ne peut avoir. Deuxièmement, le savoir devenant lui même une vertu humaine distinctive, l'éducation libérale a une valeur d'accomplissement de l'esprit de la personne, une valeur qui n'a rien à voir avec des considérations utilitaires ou professionnelles. Troisièmement, et puisque le savoir nous permet de déterminer ce que représente la bonne vie dans sa globalité, l'éducation libérale est essentielle pour permettre à l'homme de bien vivre, individuellement et socialement.
En tout, la justification d'une éducation libérale comme soutenue par les doctrines du réalisme classique est basée sur la valeur du savoir (considéré comme étant dicté et déterminé par la réalité) et sur la signifiance du savoir pour l'esprit et pour la bonne vie. Les grecs ont désigné ce type d'éducation de libérale (liberal) non seulement parce que c'est une éducation qui concerne plus les hommes libres que les esclaves, mais aussi parce qu'elle est considérée comme une éducation libératrice de l'esprit, de la raison et de la conduite.
Après avoir rappelé la signification originale du concept de liberal education, Hirst (1975c) souligne qu'une éducation de ce type ne doit pas nécessairement s'inscrire dans une philosophie de type réaliste, comme c'était le cas dans la conception grecque. À la limite, et c'est une conception qu'il a aussi fortement critiqué, on peut concevoir une éducation libérale exprimée totalement en terme de certaines qualités de l'esprit à développer chez l'enfant, sans se référer directement aux savoirs (4). Ceux-ci deviendraient de simples véhiculent de ces qualités de l'esprit.
Hirst (1975c) considère, en suivant la définition originale du concept de liberal education, que le savoir est primordial pour le développement de l'esprit, du fait de son caractère objectif et du rationnel qu'il véhicule. Cependant, il souligne que le savoir ne peut être considéré comme une expression exacte du réel. L'éducation doit alors être basée sur les formes de savoir en considérant celles-ci comme un produit de l'activité humaine. Par ailleurs, la distinction entre les différentes formes du savoir ne peut se baser sur une quelconque hiérarchie de celles-ci, mais doit se baser entièrement sur l'analyses de leurs caractéristiques conceptuelle, logique et méthodologique.
Hirst (1975c) poursuit la présentation de sa conception de la liberal education en soulignant que le savoir à inclure dans la détermination du curriculum et des disciplines scolaires (school subjects) n'implique pas uniquement un savoir factuel (des faits et des concepts) mais aussi la complexité des schèmes conceptuels, les techniques et les différents types de raisonnement et de jugement relevant de la science. Ainsi, les disciplines scolaires doivent être construites de façon à introduire les élèves le plus loin possible dans les formes principales du savoir que véhiculent les disciplines scientifiques.
Pour résoudre le problème du choix des contenus qu'implique l'accroissement exponentiel du volume des connaissances dans les disciplines scientifiques, l'auteur prône la valeur «d'exemplarité», la valeur «paradigmatique», des objets de savoir à sélectionner. Dans cette optique, même si l'éducation libérale est mieux assurée par l'étude directe des diverses branches disciplinaires, il est possible de construire des programmes qui sont organisés autour de certains champs disciplinaires seulement, mais qui doivent être choisis parce que, mis ensemble, ils peuvent être suffisants pour développer la compréhension de toutes les différentes formes du savoir.
Dans le même sens, Schwab (1964, 1978) considère que la détermination des disciplines scolaires (subject matter) composant le curriculum passe par une bonne compréhension des structures des disciplines scientifiques à deux niveaux : le premier niveau porte sur l'«organisation» de l'ensemble des disciplines. Il consiste à déterminer les principales disciplines qui constituent le savoir actuel et la manière dont elles sont reliées les unes aux autres. Ce travail vise le regroupement de celles-ci dans un nombre de champs reflétant des formes distinctes de savoir afin de faciliter le choix et l'organisation de ce qui est à enseigner. Ainsi, pour Schwab :
«to identify the disciplines that constitute contemporary knowledge and mastery of the world, is to identify the subject matter of education, the material that constitutes both its resources and its obligations. To locate the relations of these disciplines to one another is to determine what may be joined together for purposes of instruction and what should be held apart; these same relations will also weigh heavily in determining our decisions about the sequence of instruction, for it will tell us what must come before what, or what is most desirably placed first, or second, or third» (5).
(Schwab, 1964, p. 11)
Le deuxième niveau porte sur la structure de chacune des disciplines. Schwab (1964) distingue deux types de structures :
la structure substantielle («substantive structure») se référant aux principaux concepts et aux relations qui les organisent dans une discipline donnée;
et la structure syntaxique («syntactical structure») se référant principalement, aux voies de la découverte et aux critères de vérification de la qualité des données et du savoir.
L'auteur insiste sur la nécessité de connaître la structure substantielle et la structure syntaxique des disciplines scientifiques pour penser les disciplines scolaires (subject matter). La structure de celles-ci doit constituer le reflet de celles-là. Schwab (1964) réclame aussi que les élèves apprennent non seulement les structures des disciplines scientifiques, mais aussi comment et dans quelles conditions le savoir disciplinaire est produit, notamment l'épistémologie et l'histoire des sciences.
Une des conséquence de la position présentée ci-dessus, où les disciplines scientifiques sont conçues comme une source de laquelle doit découler l'éducation des élèves, est que les scientifiques doivent occuper une place privilégiée dans toute réforme ou constitution du curriculum (6). Dans ce sens, Ford et Pugno rappellent que :
[...] those concerned with the curriculum of the schools must in some way maintain close contacts with scholars in the disciplines so that the nature and contributions of the disciplines are accurately reflected (7).
(Ford & Pugno (1964), p. 4)
Enfin, il est important de noter que dans cette conception de la discipline scolaire le savoir (8) scientifique n'est pas considéré comme un produit à importer tel qu'il est du milieu scientifique au milieu scolaire. Il doit d'abord être retravaillé et adapté à ce milieu et au niveau des élèves.
Dans ce sens, la distinction entre le content knowledge et le pedagogical content knowledge introduit par Shulman (1986), en se positionnant dans la continuité des travaux de Schwab, est bien connue dans le monde anglophone. Pour Shulman (1986), the «content knowledge» refers to the amount and organization of knowledge per se in the mind of the teacher (p. 9), et il renvoie aux disciplines scientifiques telles qu'elles sont. Le pedagogical content knowledge réfère au savoir enseignable et constitue le résultat d'un processus impliquant une sélection et une transformation. Dans le même sens, la distinction entre le «savoir savant» et le «savoir à enseigner» est largement connue dans le monde francophone avec l'introduction du concept de transposition didactique.
La position exposée ci-dessus n'est pas sans susciter de nombreuses critiques. Beaucoup d'entre elles portent sur sa centration sur des questions exclusivement disciplinaires, faisant de l'école le lieu de la seule acquisition du savoir scientifique, ou encore sur «l'hyperintellectualisme» que cette démarche de pensée véhicule (Forquin, 1989). Il faut aussi noter que dans plusieurs cas les disciplines scolaires ont soit divorcé de leur disciplines de base soit qu'elles n'ont pas du tout découlé d'une discipline scientifique de référence.
Par ailleurs maints travaux ont montré, du moins pour le champ des sciences sociales, mais aussi pour d'autres matières scolaires (par exemple Chervel, 1988, 1992, 1998; Perrenoud, 1992), que «le référent des savoirs scolaires n'est pas la construction scientifique des historiens et des géographes : il est le vaste monde et les traces que les hommes d'hier et ceux d'aujourd'hui y ont laissées. C'est un grand bazar où l'on fait ses courses selon les besoins et les opportunités» (Audigier, 1993, p. 119).
Et Meirieu (1991) de signaler, si besoin est, qu'«il faut se rappeler [...] que les disciplines enseignées ne recouvrent pas aujourd'hui - et de très loin - les catégories épistémologiques des chercheurs» (Meirieu, 1991, p. 124). Exemples à l'appui, Audigier (1992) rappelle que «les savoirs de référence, côté scientifique, et les disciplines scolaires ne découpent pas les mêmes objets de la même manière, font un usage différent des outils et des concepts classés sous le même nom» (Audigier, 1992, p. 371). Ajoutons conséquemment que les finalités sont également différentes, les unes ayant pour raison d'être principale la production de nouveaux savoirs, les autres l'agglomération de savoirs, de savoir-faire et de savoir-être à faire acquérir : «la création, comme la transformation des disciplines (scolaires) n'ont qu'une seule visée : rendre possible l'enseignement» (Chervel, 1988, p. 90).
Enfin, rappelons Sachot (1997) qui, en soulignant les limites de la didactisation dans la constitution des disciplines scolaires, note que les didactiques des disciplines :
[...] en s'emparant du trop fameux «triangle didactique», ont opéré une double substitution [...]. La première substitution a consisté à remplacer l'objectif des disciplines scolaires par le savoir, lequel n'est pourtant qu'un support de médiation dans la constitution de l'enfant-élève [...]. La seconde substitution a consisté à définir le savoir scolaire dans la figure du savoir savant de référence, à remplacer le premier par le second, quitte, ensuite, à inventer la notion de transposition didactique pour réintroduire un écart que la réalité impose. (Sachot, 1997, p. 11)
À l'opposé (voir Figure 1, flèche no 2) de la conception épistémologique se retrouve une vision que l'on peut qualifier de «sociologique» (Goodson, 1981, 1987; Grossman & Stodolsky, 1994). Dans cette vision, Musgrove avait proposé dès 1968 de considérer les disciplines scolaires comme des systèmes sociaux, animés par des mouvements sociaux et des rapports de forces véhiculant des options idéologiques, ainsi que des intérêts distincts.
L'influence qui a cependant le plus marqué cette perspective est sans doute celle qui a été identifiée, à la suite de l'édition par Young (1971a) du collectif Knowledge and Control, comme «la nouvelle sociologie de l'éducation». Celle-ci s'est intéressée directement aux contenus d'enseignement (9).
Dans le collectif de 1971, Bernstein introduit son texte avec une formulation qui résume l'hypothèse fondamentale de ce courant :
How a society selects, classifies, distributes, transmits and evaluates the educational knowledge it considers to be public, reflects both the distribution of power and the principles of social control. From this point of view, differences within and change in the organization, transmission and evaluation of educational knowledge should be a major area of sociological interest. (10).
(Bernstein, 1971, p. 47)
Ainsi, les disciplines d'enseignement, loin de transmettre un savoir scientifique désintéressé, reflètent et maintiennent la distribution du pouvoir dans une société et, par conséquent, elles sont socialement déterminées.
De façon globale, dans ce courant, que nous allons illustrer par les écrits de Bernstein et de Young, trois niveaux d'analyse des disciplines scolaires sont considérés. Le premier niveau est celui de la stratification ou de la hiérarchisation du savoir. À ce niveau, il s'agit de se demander comment et dans quelle mesure différents domaines et différents types de savoirs peuvent donner lieu à des formes différentes d'appréciation et de rémunération sociales. En d'autres termes, il s'agit de se demander comment certaines disciplines scolaires sont socialement mieux reconnues et valorisées que d'autres. Le deuxième niveau est celui de la spécialisation qui consiste à voir jusqu'à quel degré les disciplines scolaires suivent le découpage et la spécialisation des disciplines scientifiques. Le troisième niveau est celui de la segmentation ou du cloisonnement des matières scolaires. En effet, «les programmes d'études peuvent varier, selon cette dimension, des plus ouverts (là où les démarcations entre les matières d'enseignement sont brouillées et indécises) aux plus fermés (là où les démarcations sont clairement dessinées et où les matières d'enseignement sont isolées les unes par rapport aux autres)» (Young, 1997, p. 188).
Au premier niveau d'analyse, Young (1971b, 1997) souligne que la sélection et l'organisation des contenus cognitifs et culturels de l'enseignement traduisent les présupposés idéologiques et les intérêts sociaux des groupes dominants. Il affirme que le processus par lequel différents domaines de savoirs se voient conférer une valeur sociale différentielle doit être expliqué indépendamment des mécanismes de différenciation de ce savoir. Ce processus peut être expliqué par le caractère restrictif de l'accès à certains types de savoirs et par l'occasion qui est donnée à ceux qui bénéficient d'un tel accès de légitimer par ce moyen leur statut social supérieur et d'exercer un contrôle sur la façon dont les autres peuvent y accéder. En d'autres termes, ce n'est pas la valeur objective du savoir en elle-même qui détermine son statut au sein de l'école, mais c'est l'association de ce savoir avec les intérêts des groupes sociaux dominants qui lui confère ce statut. Dans ce sens,
[...] l'hypothèse sociologique est que la relation la plus explicite entre l'ordre institutionnel dominant et l'organisation du savoir concernera la dimension de la stratification. Ainsi les mouvements qui tentent à «déstratifier» (en accordant une valeur égale aux différentes sortes de savoir), ou bien à «restratifier» (en légitimant d'autres critères de valorisation), rencontreront des résistances, du fait qu'ils représentent une menace pour la structure de pouvoir correspondant à cet «ordre». Cependant, des mouvements en vue d'élargir l'éventail des savoirs qui composent un curriculum (c'est-à-dire allant dans le sens d'une diminution de la spécialisation) et pour «ouvrir» davantage les relations entre les champs du savoir menaceront aussi les types de relations sociales qu'impliquent les formes de curriculum plus restreintes et moins intégrées et rencontreront également des résistances. (Young, 1997, p. 189)
Au deuxième niveau d'analyse, et dans des textes consacrés à l'enseignement des sciences, Young (1976, 1977) dénonce la spécialisation de cette discipline et sa conception selon le découpage scientifique académique. En effet, il considère que cette discipline ainsi conçue s'est détournée de la vraie vie des élèves et tente de les conduire dans la voie des chercheurs. À ce sujet, il note que :
[...] school science separates science from pupils' everyday lives, and in particular their non-school knowledge of the natural world. It is learnt primarily as a laboratory activity, in a room full of a special rules, many of which have no real necessity except in terms of the social organization of the school (11). (Young, 1976, p. 53)
Le cloisonnement des sciences à l'école en des objets semblables à la division en vigueur dans le système de reconnaissance et de financement des laboratoires de recherche conduit, souligne l'auteur, à une séparation de la science non seulement de son utilisation sociale mais aussi de la vie des enseignants et des élèves comme personnes (de leur biologie, de leur physique et leur chimie, de leur relation avec l'environnement...).
En poursuivant son analyse Young (1976) conclue que l'enseignement des sciences, structuré suivant le modèle académique, déconnecté de la technologie et de la vie des personnes, au lieu d'aboutir à l'émancipation des apprenants conduit à la production de trois types de personnes :
Le premier est celui des «scientifiques purs», dont la relation avec la nature et avec le monde est surtout celle d'une compréhension abstraite.
Le deuxième est celui des «scientifiques appliqués» dont l'identité est fondamentalement pragmatique.
Le troisième est celui de la majorité qui ne peut profiter de l'enseignement des sciences et qui est composée de deux catégories :
La première catégorie est celle des «manquants de la science», les anti-science et anti-technologie, qui ne voient la science que comme moyen de domination au service des personnes qui la maîtrise - alors que la science comme moyen de domination est en elle-même un produit historique.
La deuxième catégorie est celle de la masse du peuple qui apprend lors de sa scolarisation que la science est une activité spécialisée, une affaire de génies, pour laquelle elle ne peut avoir accès et sur laquelle elle ne peut avoir de contrôle.
Dans le même sens, Esland (1971) prévient contre «l'illusion positiviste» selon laquelle la connaissance est considérée comme reflétant la réalité objective et que les séparations existantes au sein du curriculum sont censées correspondre à des séparations qui existeraient au niveau des choses mêmes. Il souligne alors que le système des savoirs scolaires ne repose sur aucune justification objective, et qu'en particulier la séparation entre les diverses matières d'enseignement ne fait que refléter les habitudes corporatives, les préjugés ou les intérêts de certains groupes professionnels et sociaux (Forquin, 1991).
Bernstein (1971, 1997a, 1997b) quand à lui s'est particulièrement intéressé au troisième niveau d'analyse que la nouvelle sociologie de l'éducation a consacré au savoir scolaire, celui de la structure du curriculum ou de la segmentation des disciplines scolaires. En considérant les frontières entre les contenus, cet auteur distingue entre deux types de curriculums. Dans les curriculums de type cloisonné (collection code), les contenus sont nettement délimités et séparés en fonction du découpage des savoirs disciplinaires. Dans les curriculums de type intégré (integrated code) les contenus des différentes entités d'enseignement entretiennent entre eux des relations ouvertes. C'est sur le premier type de curriculum qu'il dirige sa forte critique. Ce qu'il reproche essentiellement à celui-ci c'est qu'il se réfère aux savoirs disciplinaires comme une forme de contrôle, comme un bien qu'il faut acquérir, un mérite, et non comme un droit pour chacun :
[...] si le savoir est considéré comme sacré dans un système cloisonné, il apparaît aussi comme très semblable à la propriété privée avec diverses sortes de clôtures symboliques, et ceux qui le détiennent ressemblent assez à des détenteurs de monopoles. Les élèves et les étudiants sont aussi soigneusement filtrés, afin qu'on puisse établir une distinction entre les élus et les exclus. Et une fois ce tri réalisé, il est très difficile pour quelqu'un, parfois même impossible, de changer d'identité éducative. Avec un enseignement marqué par la spécialisation, le bon grain doit être rapidement séparé de l'ivraie, laquelle est revêtue de tous les attributs de la souillure. (Bernstein, 1997b, pp. 168-169).
Bernstein (1971) considère également que l'exposition au curriculum cloisonné à laquelle les élèves sont soumis constitue un processus de socialisation par lequel ceux-ci intègrent des structures cognitives de référence qui affectent négativement les interrelations avec la réalité et la vie quotidienne.
Bref, si pour la position épistémologique la discipline scientifique constitue la référence et la source - ou du moins la source première - de la discipline scolaire dont elle détermine les savoirs à considérer et la logique de les organiser dans le but de garantir une formation scientifique et objective des élèves, la position sociologique adopte pour sa part une autre perspective. Celle-ci considère que le lien directe des disciplines scolaires et des disciplines scientifiques répond à un certain ordre et une certaine distribution du pouvoir dans la société et constitue un obstacle pour une véritable formation de tous les élèves. Elle opte pour une démystification des savoirs scientifiques et pour la constitution des disciplines scolaires en prenant en compte d'abord la réalité sociale des élèves avant de considérer le système des disciplines scientifiques en vigueur.
En somme, cette position implique au moins trois considérations : la déstratification des disciplines et leur décloisonnement ainsi qu'une centration sur la vie quotidienne et sociale des élèves. Dans cette perspective les disciplines scolaires ne visent pas les seules savoirs scientifiques ou le seul développement de l'esprit, mais visent avant tout la maîtrise de l'environnement social ainsi que la justice et l'adéquation sociales. Elle vise la formation de personnes qui soient capables de comprendre la vie et les problèmes sociaux qui les entourent et qui soient capables de vivre dans leur société et d'y agir de manière adéquate.
L'apport principal de l'approche sociologique dans l'étude des contenus des disciplines scolaires réside dans la démystification, la dénaturalisation des contenus en provenance des disciplines scientifiques. Forquin (1989, 1991) rapporte quelques critiques rapprochées à ce courant. L'une de ces critiques porte sur le manque de validation empirique et un certain manque de mise en perspective historique. Notons cependant que des auteurs comme Ball (1990), Cooper (1997) et Goodson (1981, 1987) se sont intéressés à cette dernière question afin de comprendre, en particulier, comment naissent et évoluent les disciplines scolaires. Il faut souligner aussi que le courant sociologique a glissé parfois de l'intérêt pour l'étude des contenus scolaires à l'intérêt pour l'étude des luttes sociales entourant leur contrôle.
Comme le souligne Forquin (1991), il est pertinent de se demander :
[...] si tous les savoirs enseignés dans les écoles ne sont vraiment que le résultat d'une sélection et d'une transposition effectuée à partir d'un corpus culturel préexistant, et si l'on ne peut pas considérer l'école comme étant aussi véritablement productrice ou créatrice de configurations cognitives et d'habitus originaux qui constituent en quelque sorte le noyau central d'une culture scolaire sui generis. (Forquin, 1991, p. 30)
Certains auteurs ont examiné la question d'un point de vue historique et ils rejettent fortement le déterminisme des disciplines scientifiques ou de la société en général dans la formation des disciplines scolaires. Ainsi, pour Chervel (1988, 1992, 1998), par exemple, une discipline scolaire est avant tout le résultat d'une production de l'école, dans l'école et pour l'école (voir Figure 1, flèche no 3). Dans le même sens, Petitat (1982), dans une analyse historique des fonctions sociales de l'école, considère que celle-ci contribue aussi à la production et à l'adaptation de novations culturelles. Ainsi, à la vision «descendante» que mettent de l'avant les conception sociologique et épistémologique, ces auteurs opposent une conception historique «ascendante».
Chervel (1988, 1992, 1998) refuse la conception selon laquelle d'aucuns estiment que les contenus d'enseignement sont imposés à l'école par la société qui l'entoure et par la culture dans laquelle elle baigne, ou encore que l'école enseigne les sciences qui ont fait leurs preuves ailleurs. Pour l'auteur, l'école détient une autonomie forte qui lui assure la possibilité de produire, en fonction des finalités tant socialement énoncées que réellement poursuivies, des objets d'enseignement qui lui sont propres :
Les contenus de l'enseignement sont conçus comme des entités sui generis, propres à la classe, indépendantes dans une certaine mesure de toute réalité culturelle extérieure à l'école, et jouissant d'une organisation, d'une économie intime et d'une efficace (sic) qu'elles ne semblent devoir à rien d'autre qu'à elles-mêmes, c'est-à-dire à leur propre histoire.
(Chervel, 1988, p. 64).
Ainsi, poursuit l'auteur, «chargée par la société de quelques consignes très générales qui sont les finalités de l'enseignement, l'école reçoit en revanche carte blanche pour mettre au point les modalités de cet enseignement» (Chervel, 1988, p. 81).
L'exemple de l'histoire de la grammaire sert à l'auteur d'illustration pour justifier sa position :
[...] l'école enseigne, sous ce nom, un système, ou plutôt un assortiment de concepts plus ou moins reliés entre eux. Mais trois résultats de l'analyse historique interdisent définitivement de considérer cette matière comme une vulgarisation scientifique. Elle montre d'abord que, contrairement à ce qu'on aurait pu croire, la «théorie» grammaticale enseignée à l'école n'est pas l'expression des sciences dites, ou présumées, de «référence», mais qu'elle a été historiquement créée par l'école elle-même, dans l'école et pour l'école [...]. En second lieu, la connaissance de la grammaire scolaire ne fait pas - à l'exception de quelques concepts généraux comme le nom, l'adjectif ou l'épithète - partie de la culture de l'homme cultivé [...]. Enfin, la genèse même de cette grammaire scolaire ne laisse aucun doute sur sa finalité réelle. La création de ses différents concepts a constamment coïncidé dans le temps avec son enseignement, ainsi qu'avec l'enseignement de l'orthographe, dans un vaste projet pédagogique.
(Chervel, 1988, p. 66).
Ainsi, déduit l'auteur, qui met en évidence l'importance des méthodes d'enseignement dans la caractérisation des disciplines scolaires, «la grammaire scolaire n'est qu'une méthode pédagogique d'acquisition de l'orthographe; l'analyse grammaticale, une méthode pédagogique d'assimilation de la grammaire, et ainsi de suite» (Chervel, 1988, p. 67).
Ce que Chervel récuse en adoptant une telle position, souligne Sachot (1993), c'est la double dérive - celle que véhiculent les deux positions épistémologique et sociologique - : «soit faire d'abord dépendre le savoir enseigné du savoir savant [...]; soit faire d'abord dépendre les contenus de l'enseignement de la société en général, et de milieux sociaux spécifiques en particulier (Sachot, 1993, p. 140).
Notons aussi que des auteurs qui s'inscrivent dans la conception sociologique, comme Goodson (1981, 1987) et Layton (1972), soutiennent aussi l'idée selon laquelle les disciplines scolaires émergent d'abord dans l'école. Goodson (1981), par exemple, en présentant comment la géographie a évolué en tant que discipline scolaire en Grande-Bretagne montre que celle-ci est passé d'un bas statut dans les écoles, où elles ont émergé sous l'initiative d'enseignants qui collectionnaient quelques faits disparates à enseigner parce qu'ils les considéraient intéressants pour la formation des élèves, à un statut où l'université a pris le contrôle de ce qui doit être enseigné dans les écoles par le biais de la prise en charge de le formation des enseignants.
Mais, tout en affirmant que dans plusieurs cas les disciplines scolaires se constituent d'abord dans l'école, ces auteurs affirment aussi qu'ultérieurement à leur première émergence, et suite à la constitution d'un corps professionnel, celles-ci deviennent de plus en plus déterminées par les disciplines académiques et par les jugements et les pratiques des spécialistes, ce qui les soumet aux contraintes sociales externes à l'école.
Enfin, si la perspective historique rapportée par Chervel (1988, 1998) et par les autres auteurs partageant cette conception montre que certaines disciplines scolaires (ou certaines unités de celles-ci) sont avant tout une création de l'école, et si elle montre les limites des deux positions précédentes, épistémologique et sociologique, la conception qu'elle défend ne peut s'étendre à l'ensemble des disciplines scolaires. En effet, si celles-ci, «considérées notamment sous l'angle du contenu d'enseignement ne sont sous le dictat [sic] ni de la science, ni de la société» (Sachot, 1993, p. 140), elles ne peuvent non plus être considérées comme une pure création de l'école. Et si l'on veut bien suivre à nouveau Chervel (1992), il importe de distinguer entre «les finalités des enseignements qui sont imposées par la société à l'école» (Chervel, 1992, p. 197) et qui constituerait mutatis mutandis le point de vue sociologique, et le lieu de production de la culture scolaire, des contenus d'enseignement, des disciplines scolaires, lieu qui serait principalement l'institution scolaire elle-même.
Loin de constituer trois pôles mutuellement exclusifs, les savoirs scientifiques (dimension épistémologique), les influences et les attentes de la société (dimension sociologique) et le rôle de l'école (dimension historique) reflètent trois aspects d'une même réalité et peuvent servir ensemble à définir ce qu'est une discipline scolaire (voir Figure 1, flèches no 4).
En effet, la constitution des disciplines scolaires doit tenir compte d'une part du savoir établi au sein des disciplines scientifiques. Celui-ci peut avoir des liens avec les finalités éducatives allant dans les deux sens. Dans un premier sens, le savoir peut être sélectionné dans le but de répondre à certaines finalités retenues, et il possède par conséquent une fonction instrumentale. Dans un deuxième sens, le savoir peut inspirer la sélection de certaines finalités dans la mesure où ce savoir constitue une fin en soi jugée nécessaire à la formation de l'élève. Cependant, le savoir scientifique ne peut s'intégrer dans les disciplines scolaires tel qu'il est formulé dans les disciplines scientifiques; des procédures de traitement de nature didactique s'imposent.
Soulignons, toutefois, que si les savoirs scientifiques en provenance des disciplines académiques sont nécessaires à l'élaboration des disciplines scolaires, ils ne peuvent être les seuls. Des savoirs d'autre nature comme ceux en provenance ou en lien avec le monde professionnel ou encore le monde technologique (Fourez, 1994, 1998) le sont aussi. Dans ce sens, la notion de pratiques sociales de référence, introduite par Martinand (1986), constitue un apport enrichissant dans la mesure où elle élargit le domaine du savoir à considérer dans l'élaboration de la discipline scolaire. Cette notion suppose, dans la constitution des enseignements scolaires, une référence à plusieurs types de savoirs comme ceux provenant de la recherche scientifique, de l'ingénierie, de la production industrielle ou artisanale, des activités domestiques et des activités culturelles, idéologiques et politiques.
La constitution des disciplines scolaires doit tenir en compte d'autre part la dimension sociale qui renvoie aux attentes que la société a envers l'école et, par conséquent, à l'égard de chacune de ces disciplines scolaires. Ces attentes doivent être animées en même temps autant par les intérêts de l'élève (développement personnel) que par ceux de la société en général (efficience et efficacité sociale). Ces attentes ont à déterminer les finalités des disciplines scolaires ainsi que la nature des savoirs à considérer : des savoirs en lien avec les activités de la vie quotidienne, se centrant sur la vie telle que vécue par les élèves maintenant, et/ou des savoirs en provenance des disciplines scientifiques établies, c'est-à-dire des savoirs permettant à l'enfant, en quelque sorte, de s'outiller et de se préparer à sa vie future en faisant de lui un homme libre au sens véhiculé par le concept de la liberal education.
La constitution des disciplines scolaires doit enfin tenir compte de l'action autonome de l'école comme institution participant de façon active au façonnement de la culture et de la société. Il s'agit alors de se placer du point de vue de la fabrication de «l'enseignable» (Chervel, 1988) et de la production d'un savoir et d'une culture propres à l'école et s'inscrivant dans un projet de formation de l'élève.
C'est dans ce sens que Meirieu (1993) appelle, pour définir une discipline scolaire, à la collaboration de trois types d'homme, représentant chacun un pôle organisateur des disciplines : le «concepteur de la société», le pédagogue et le didacticien. C'est dans ce sens aussi que Rogers (1997) prône pour un partage des «pouvoirs» dans la détermination du contenu des disciplines scolaires entre la vie réelle, le savoir scientifique et les préoccupations des enfants.
Si l'analyse que nous avons présentée nous a permis de dégager quatre principales conceptions, elle montre aussi que l'organisation des disciplines scolaires, et par conséquent celle des disciplines de formation des enseignants selon le découpage en vigueur dans le système scientifique, n'est pas une nécessité épistémologique.
Dans ce sens, Sachot (1997) souligne qu'il est urgent d'élaborer une didactique du primaire, une didactique qui puisse proposer des modèles susceptibles d'éclairer la nature et les modalités de la formation que reçoivent les enfants au niveau primaire et de ne pas laisser le modèle surdéterminé par les disciplines universitaires envahir le primaire comme s'il s'agissait d'une extension naturelle.
Les travaux qui s'intéressent à l'analyse du concept de discipline scolaire, en clarifiant les types de savoirs à considérer dans la formation des élèves et en mettant ceux-ci en lien avec les finalités de l'école, constitue un point de départ nécessaire pour réfléchir sur la place que le système des disciplines scientifiques doit occuper dans la formation à l'enseignement et pour consolider les fondement d'une didactique du primaire. L'analyse que nous avons présentée dans ce texte se veut une participation à ce débat et à cette didactique.
Soulignons cependant que dans ce texte, notre but n'était nullement celui de couvrir tous les sens donnés au concept de discipline scolaire dans la documentation scientifique. Il consistait plutôt à dégager les grands pôles, les noyaux organisateurs, autour desquelles ces conceptions peuvent s'articuler, et par conséquent ceux à prendre en considération dans la formation scolaire des élèves et dans la formation des enseignants.
![]() |
Association canadienne d'éducation de langue française
(ACELF) 268, rue Marie-de-l'Incarnation, Québec (Québec) G1N 3G4 Téléphone: (418) 681-4661 - Télécopieur: (418) 681-3389 Site Internet: http://www.acelf.ca/c/revue/ © Copyright ACELF, Québec 2000. |