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Eté 2008 - Vol.11. No. 02

Le Cameroun face au discours des genres : de la cuisine à la gestion économique

Vincent Sosthène Fouda
Journaliste, socio politicologue. Département de sociologie de l'Université de Laval à Québec

Le Cameroun face au discours des genres : de la cuisine à la gestion économique

Résumé : Ce travail prend son origine dans le vaste mouvement dit « gender and mainstreaming » traduit généralement par « genre et approche intégrée ». Notion qui se propose d’intégrer les caractéristiques spécifiques de la place et de la situation des femmes et des hommes, dans l'élaboration des politiques et des mesures économiques et sociales, dans leur mise en œuvre mais aussi dans l’analyse des incidences de tous ordres que ces mesures pourront avoir sur les femmes et sur les hommes. Nous avons voulu arrimer à cette approche la microfinance dont l’objectif est de lutter contre la pauvreté des plus pauvres par conséquent des femmes. Une étude genre et microfinance nous permet de dégager des conclusions instructives pour que la femme puisse sortir du commerce de subsistance pour une économie de développement.  

Abstract: This work takes its origins in the vast movement called “Gender and Mainstreaming”. It considers socio-economic policy-making, implementation; as well as their consequences on the situation of women and men in developing countries. The article examines how microfinance can be integrated in a gender study framework to assess how it can alleviate women’s poverty.

La nouvelle politique des instances internationales de gouvernance tels que la Banque Mondiale [BM], le Fonds Monétaire International [FMI], après avoir disqualifié l’Etat-providence ou le Welfare State jugé d’improductif, semble disqualifier l’homme en tant que genre masculin pour le remplacer par la femme dans la gestion de la chose économique dans plusieurs pays d’Afrique noire [1]. Cette « intrusion » de la femme dans les champs autrefois réservés à la gent masculine se fait par le truchement des microfinances. La femme - excellente gestionnaire de la cuisine entendue ici comme case nourricière d’une nombreuse famille au lignage bien étendu - pourrait-elle être aussi dirigeante de la grande maison, c’est-à-dire, de la gestion économique générale tant dans la famille que de la communauté et du pays par extension.

De nombreuses études ont été consacrées à ce phénomène dans les pays d’Amérique Latine et d’Asie. L’ouverture de ces études à l’Afrique en général et à l’Afrique centrale en particulier se fait timidement. D’un autre côté de nombreuses recherches sont faites dans le domaine de la « gouvernance et de la microfinance » dans les pays dits émergeants, malheureusement avec une timide ouverture vers le rapport de ces deux concepts au genre. Une autre lacune que l’on rencontre dans ces études c’est aussi leur focalisation au développement économique, confirmant par ce fait même que le progrès humain, sa lutte contre la pauvreté passe nécessairement par la croissance économique. Aussi par cette étude, nous nous proposons d’étudier le phénomène de la microfinance au Cameroun et son rapport à la lutte contre la pauvreté en rapport aux femmes, depuis la création d’un ministère chargé des questions relatives à la femme en 1984, afin de mener une politique « sur l’égalité entre les sexes et la démarginalisation des femmes » jusqu’aux initiatives directes axées principalement autour du renforcement des capacités gestionnaires des femmes par le canal de la microfinance.

Nous définirons dans un premier temps l’environnement institutionnel au sein duquel se développe la microfinance au Cameroun. Par la suite nous verrons comment celle-ci lutte contre la marginalisation et la pauvreté dont les premières victimes sont les femmes et les enfants. Enfin nous montrerons sur le plan sociologique les limites de cette politique parfois assez occidentalo-centriste [2].

Bien évidemment, ces trois aspects ont été choisis non seulement pour faire ressortir les mesures prises par le Cameroun face aux exigences des institutions internationales, de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International, mais aussi et surtout pour répondre aux besoins particuliers des femmes en matière de développement social. Les conclusions que nous dégagerons nous permettront à coup sûr de mieux saisir l’importance des cadres institutionnels et stratégiques dans l’élaboration de réformes efficaces susceptibles d’aider les femmes à sortir de la pauvreté. C’est aussi une tentative d’ouvrir sans cesse le questionnement théorique occidentalo-centriste vers une réalité sociale empirique camerounaise sans cesse mouvante.

Avant d’amorcer toute analyse susceptible de nous entraîner dans un labyrinthe sans fond, quelques remarques préliminaires semblent nécessaires. Celles-ci vont de la femme rurale à la femme en milieu urbain. En effet traiter de la situation de la femme camerounaise en rapport avec la gouvernance par le canal de la microfinance nous oblige à distinguer la femme rurale de la femme en milieu urbain. Il nous est aussi presque indispensable de ne point dresser de frontière infranchissable entre les deux communautés. De nombreuses études faites sur la femme africaine en général et de la femme camerounaise en particulier ont péché à ce niveau. Au risque de faire face à un problème d’homologie, en quoi l’étude d’une microsociété peut-elle nous instruire sur la situation de la femme camerounaise en générale ?

La population camerounaise reste encore dans son ensemble rurale mais non paysanne et les frontières entre la ville et la campagne ne sont pas souvent si rigides bien au contraire ! Les villes se vident toutes les fins de semaine pour repeupler les campagnes et ces populations nomades méritent l’attention du chercheur. Le village est très souvent le lieu d’expression du génie créateur des habitants de la ville à cause de l’attachement des uns et des autres à la terre, lieu d’expression politique et économique. Cette observation est encore plus vraie dans le secteur de la microfinance car le village constitue un double enjeu à la fois anthropologique et sociologique. On est fils et fille d’un village. L’argent va sans cesse de la ville vers le village et du village vers la ville, suivant des logiques parfois difficiles à cerner. On se fait une image politique au village avec l’argent de la ville et vice versa, le siège dans l’administration urbaine est la résultante du rayonnement politique voir économique que l’on a dans et ou au village.

Environnement institutionnel et mise en place de la microfinance au Cameroun

Beaucoup de sociologues africains affirment que « les femmes africaines disposent et ont toujours disposé d’un pouvoir réel dans leur ménage et au sein de la parentèle, malgré la hiérarchie formelle des rôles sexués qui leur confère une position d’infériorité » (Simon David Yana). Cette affirmation pourrait être nuancée dans les deux sens, à la lecture des deux derniers rapports du Pnud sur l’état de la pauvreté dans le monde, qui montrent une grande disparité sur la répartition de la pauvreté entre hommes et femmes dans le monde et au Cameroun en particulier ; le fossé est sans cesse grandissant. De l’autre côté, la grille de lecture sur l’infériorité de la femme africaine dans l’organisation sociale des Afriques traditionnelles reste à démontrer. Point n’est ici nécessaire d’appuyer notre étude par des statistiques [3] pour nous rendre compte de cette réalité.

D’un autre côté, deux grands sommets mondiaux peuvent être identifiés comme point de départ de la prise en compte des difficultés particulières qui sont celles des femmes en matière de pauvreté et de développement. En premier, il est à citer le sommet de Beijing qui en 1995 a permis de prendre conscience de la « féminisation de la pauvreté » dans le monde et dans les pays en voie de développement en particulier. Aussi quand dans une région du monde, 5 personnes vivent avec moins de 1$ USA par jour, [4] sont des femmes et cette réalité est plus plausible en Afrique et dans certains pays d’Asie.

L’Afrique a cependant la particularité d’avoir des statistiques souvent assez floues et les études qui lui sont consacrées laissent parfois penser à une certaine homogénéité au niveau des conclusions. La réalité est cependant plus complexe et les conclusions qui ne voient l’Afrique que comme « un continent qui s’enfonce » ou comme un « conservatoire des maux de l’humanité » [5]  pourraient perdre face devant certaines réalisations. Le sommet des Nations Unies de 2000, dans les Objectifs dits du millénaire [ODM], se fixait pour objectif de « promouvoir l’égalité des sexes » mais et surtout d’œuvrer « à l’autonomisation des femmes » clef de leur participation préalable à la vie économique et sociale de leur société. A ces deux sommets mondiaux, il convient de mentionner les directives du FMI et de la Banque Mondiale soutenues par les bailleurs de fonds et les pays donateurs dans les coopérations latérale, bilatérale et multilatérale, qui outre les objectifs de bonnes gouvernances exigent de plus en plus la pleine implication des femmes dans la gestion de la chose publique. C’est un peu en réponse à ces exigences que dès 1984, le Cameroun crée le ministère de la Condition féminine [6] qui fonctionnera de manière autonome jusqu’en 1987 [7], date à la laquelle il est jumelé au ministère des Affaires sociales. En décembre 1997, pour répondre aux exigences des institutions internationales le ministère de la condition féminine retrouve son autonomie par décret n°97/205 du 7 décembre 1997 [8] du Président de la République. Tout au long des deux décennies qui viennent de s’écouler le Cameroun par son gouvernement a essayé de comprendre d’abord les exigences des institutions internationales et des bailleurs de fonds en matière de politique de genre et ses exigences, comme on peut notamment le constater à travers les difficultés rencontrées notamment pour la mise sur pieds d’un organigramme devant présider à la bonne marche du ministère de la condition féminine. Ainsi, pendant cinq ans, ce ministère ou sa dénomination n’a été qu’une division du ministère des affaires sociales et six ans après sa création il était difficile d’avoir un organigramme [9]. Cependant sur le plan national mais en référence à l’international, grâce au soutien du BIT, le Cameroun va mettre sur pied un Plan d’Action National d’Intégration de la Femme au Développement [PANIFD] avec pour objectif la promotion du statut de la femme dans les domaines économique, socioculturel avec à la clef une déclaration de politique d’Intégration de la Femme au Développement [10] [IFD].

C’est dans le cadre de cette déclaration d’Intégration de la Femme au Développement que les microfinances vont trouver un espace d’expression à la fois juridique mais aussi sociale dans la mesure où, si la microfinance par définition est une offre de services financiers (microcrédit, microassurance, etc.) aux populations pauvres, exclues du système bancaire, sans ressource ni droit de propriété, pour être efficace, la microfinance a besoin d’un espace juridique bien défini et une définition ou un quadrillage de la population cible. 

En identifiant la population avec laquelle ils allaient travailler, les promoteurs de la microfinance ont dans un premier temps fait face à l’opposition ville/campagne ou village. En effet les femmes de la ville n’ont pas souvent les mêmes problèmes que leurs consoeurs de la campagne et leur statut est loin d’être une simple opposition ville/campagne. En effet, les femmes de la ville ont très souvent une double casquette ou une double carte d’affaire. Elles sont commerçantes ou femmes d’affaires, agents de l’Etat ou fonctionnaires, employées du secteur parapublic ou du privé. A ces emplois officiels vient très souvent se greffer celui de responsable de tontine, d’ONG, de Responsable des élites telle ou telle localité ; elles sont rarement femme au foyer. Les femmes rurales quant à elles n’ont généralement qu’une seule activité, celle de cultivatrices vendant de temps en temps dans les marchés du chef lieu d’arrondissement ou de la ville le surplus de leurs productions. Les femmes de la ville sont le plus souvent instruites ou alphabétisées contrairement à leurs sœurs de la campagne qui ne savent ni lire ni écrire.

Dans un second temps il a fallu identifier celles qui sont exclues des systèmes monétaires institutionnels tout en tenant compte des réalités des tontines qui fonctionnent déjà dans les villes et les campagnes comme des microfinances. Ici, les résultats ne pouvaient que toucher une large proportion de la population tant citadine que rurale étant donné que l’ouverture d’un compte courant au Cameroun nécessite un dépôt deux millions de francs cfa et celle d’un compte d’épargne une somme de deux cents mil francs cfa. 95% de la population féminine rurale est incapable de réunir ces sommes selon l’Afriland First Bank. En ville seule 30% de femmes actives sont capable d’avoir un compte d’épargne.

Définition des objectifs des microfinances

C’est au sein de la gouvernance que la microfinance trouve sa définition, en effet parmi les définitions données à la « gouvernance », on pourrait retenir que celle-ci est une conception restreinte centrée sur la gestion saine de l’économie et ceci implique une vision plus large qui englobe des projets tels que la libéralisation des politiques et la réduction de l’inégalité sociale. La féminisation de la pauvreté fait ainsi partie de la lutte contre les inégalités dont sont victimes en particulier les femmes en général et les femmes camerounaises en particulier, notamment en matière d’autonomie financière, du droit à la succession soit au sein de leur famille soit au sein du couple au décès du mari. L’une des inégalités sur lesquelles va agir la microfinance est l’inégalité des femmes à l’accès au crédit elle-même découlant notamment de l’inégalité de l’accès à l’éducation dont sont victimes les femmes dans l’ensemble du pays à des proportions variées.

Ainsi les femmes sont notamment moins scolarisées dans les régions Nord du pays qui sont constituées de trois provinces, l’Extrême Nord, le nord et l’Adamaoua tandis que le taux de scolarisation, dans les provinces du Centre, du sud et du Littoral, est de 86% pour les femmes et de 87% pour les hommes si l’on se réfère aux statistiques de l’Unesco de 2004. Ce taux de scolarisation des filles est légèrement bas, mais de façon insignifiante, dans le reste des provinces du pays qui en compte dix dans l’ensemble, par rapport aux garçons. Cependant, le taux de scolarisation est loin de représenter le taux d’alphabétisation, car de nombreuses filles sortent du système scolaire sans savoir ni lire, ni compter ni écrire et au final sans aucun diplôme pouvant leur permettre de s’assumer financièrement [11] système mais les conséquences sont moins dramatiques.

Si l’on se réfère à la définition que la Banque Mondiale donne de la gouvernance à savoir « la manière dont l’Etat exerce et acquiert son autorité », on pourrait assez facilement comprendre comment les politiques et les mouvements sociaux dans un pays comme le Cameroun se mettent en mouvement pour définir la gouvernance. Ainsi donc dans le domaine politique, le gouvernement camerounais par des actes certes financés par les organisations comme le BIT et le Centre de Recherche pour le Développement International, organisme canadien a organisé dès 1999 de nombreux séminaires à travers la république pour sensibiliser les populations aux injustices que subissent les femmes. On a vu ainsi naître des fonds spéciaux de soutien aux jeunes filles dans diverses disciplines universitaires, la suppression des mesures qui jadis pénalisaient les femmes notamment la limite d’âge à l’accès à l’enseignement supérieur, (les mêmes restrictions étaient faites aussi aux garçons), la promotion socio-juridico-économique pour les filles n’ayant plus l’âge requis pour l’école classique dans les structures d’éducation non formelle. La mise sur pied d’un programme national d’alphabétisation fonctionnelle et d’éducation non formelle de la jeune fille mais et surtout l’organisation des séminaires d’information et formation à la création des groupements d’intérêt communautaire (GIC) support sur lequel allait agir les microfinances [12]. Les mouvements sociaux quant à eux se sont formés à « demander des comptes » aux structures de l’Etat et surtout à pouvoir lire comment les actes illicites peuvent être détectés et punis.

Comment les microfinances se mettent-elles en place et quels sont leurs statuts communautaires ?

Afin de comprendre l’organisation et le champ d’expression de la microfinance au sein de la structure sociétale rurale camerounaise, il est nécessaire de saisir sa typologie. En effet, la microfinance camerounaise s’exprime à la fois sur un champ informel et sur un champ formel avec un intermède pour employer une expression musicale, de semi-formel. Aussi au niveau de l’informel, il faut identifier la tontine sous différents aspects mais qui se présente en général comme un « tiroir social ».

Les tontines sont restées assez longtemps méconnues des analystes économiques mais la faillite des secteurs bancaires institutionnels dès les années 70 va mettre les tontines en orbite. Bouman les définira comme étant des associations rotatives d’épargne et de crédit. Mais il convient en parlant de tontines camerounaises de les définir comme étant des associations de personnes qui, unies par des liens familiaux, d'amitiés, de profession, de clan ou de région [13]  se retrouvent à des périodes d'intervalles plus ou moins variables afin de mettre en commun leur épargne en vue de la solution des problèmes particuliers ou collectifs d’un de leur membre suivant un calendrier accepté de tous et portant sans cesse la solution au problème posé vers le bien communautaire.

Cette définition, est proche de celle donnée par Bouman en1977 qui explique que « les tontines sont des associations regroupant des membres d'un clan, d'une famille, des voisins ou des particuliers, qui décident de mettre en commun des biens ou des services au bénéfice de tout un chacun, et cela a tour de rôle », nous permet de saisir à la fois la dimension économique de la tontine mais aussi sa dimension sociale et communautaire. La forme la plus élémentaire de la tontine consiste en une formule mixte d'épargne et de crédit qui fonctionne comme suit. Les participants versent régulièrement des cotisations de montant fixe à un fonds commun qui est distribué tour à tour à chacun des membres, désigné en général par tirage au sort mais aussi en fonction des projets et de l’intérêt communautaire. Quand chaque membre a reçu le fonds une fois, le cycle doit normalement recommencer.

  Il faut noter que le premier membre à recevoir le fonds bénéficie d'un prêt sans intérêt, tandis que le dernier à le recevoir épargne tout au long du cycle sans être rémunéré (voire même un taux d'intérêt négatif si l'inflation est forte) pour toucher à la fin le même montant qu'il aurait accumulé en épargnant régulièrement à titre individuel. Les autres membres se trouvent, selon leur rang d'accès au fonds, en position de débiteur ou de créditeur : leur participation leur permet néanmoins de bénéficier de la somme totale plutôt que s'ils avaient épargné par eux-mêmes. Les tontines camerounaises se sont d’abord développées dans les sociétés traditionnelles et après en marge des institutions financières formelles. Mais dès la crise des années 70, elles vont attirer l’attention des chercheurs, sociologues et anthropologues et en 1989 la Banque Mondiale dans son rapport sur le développement va leur consacrer un chapitre et les présenter comme étant des sources de mobilisation de l’épargne domestique.  

Dès les années 90 avec l’instauration des Plans d’Ajustement Structurel et par la suite l’assujettissement de l’aide internationale à l’instauration de la bonne gouvernance ainsi que nous l’avons défini plus haut, vont voir naître, par une action ad intra et ad extra des établissements de microfinances selon deux typologies [14].

La première suivant la structure interne de l’entreprise, on pourrait ici dire qu’elle se définit par le haut et se veut formelle. On a ainsi les Coopéc ([Coopérative d’Epargne et de Crédit], les crédits solidaires et enfin les Caisses Villageoises d’Epargne et Crédit Autogérées).

 La seconde typologie se veut informelle suivant une organisation externe et en relation avec d’autres organisations suivant un mode de fonctionnement en réseaux. On parle alors d’initiative isolée, des Institutions de Microfinance (IMF) et d’ONG de microcrédit soit en local soit en international. Si à l’origine les tontines se présentent comme des tiroirs sociaux informels, avec l’apparition de cette double typologie il est de plus en plus difficile de les situer. Aussi pour certains chercheurs, des juristes notamment, la tontine relève du secteur formel car elle relève de la structure interne d’une association type loi n° 90:053 du 19 décembre 1990 portant sur la liberté des associations. Mais un autre courant développé par certains sociologues et au sein duquel se reconnaît l’Association Camerounaise des Institutions de Microfinance, les tontines restent et demeurent des structures informelles de circulation des économies domestiques en marge des structures financières établies et œuvrant dans la lutte contre la pauvreté dont les femmes et les enfants sont les premiers bénéficiaires. Un coup d’œil assez rapide et qui tire trop sur les généralités ne nous permet pas généralement de percevoir des différences significatives entre ces différentes typologies ni de percevoir les idéologies qui structurent et gouvernent la microfinance qui elle-même reste une institution assez mouvante dans un Cameroun sans cesse en mutation.

Au-delà donc d’un cahier de charge établi par les commanditaires, le système de microfinance défini comme « the provision of small loans to very poor people for self employment projects that generate income » se présente comme un ensemble de défis à relever dans la distribution des crédits tout en les faisant rembourser suivant un système qui esquive les canaux des banques institutionnelles. Il s’agit aussi pour les microfinances de mettre en place les conditions nécessaires à l’ouverture du monde bancaire aux populations qui en sont exclues en offrant des services de qualité qui répondent à leur demande de façon durable i.e. en faisant supporter les coûts générés par cette opération par ceux qui en bénéficient. Nous pouvons cependant avancer que les tontines, sorte de tiroirs sociaux ont su s’adapter au temps et aux côtés des institutions de la microfinance.

En adoptant la définition de Michel Lenoir [15] sur la notion de finance informelle (1990, p.50) qui voudrait que ce soit des mécanismes originaux qui permettent en effet de faire circuler la monnaie en contrepartie d'une accumulation temporaire des créances et des dettes, nous pouvons dire que les tontines sous diverses formes ont gagné leur droit de siéger au banquet des institutions de la microfinance, à la fois informelle et formelle, mobilisent une épargne importante, jouent sur l’économie domestique mais participent-elle efficacement au développement ? Les tontines ainsi que beaucoup de chercheurs le reconnaissent aujourd’hui (tout en reconnaissant la difficulté à fournir des chiffres) participent à l’amélioration qualitative de la vie, de la santé, de l’éducation, mais qu’en est-il au niveau macroéconomique ?

 La microfinance face au défi du genre

Il est à présent connu et accepté de tous que la seule façon de remédier et ou de réduire la pauvreté des femmes passe nécessairement par la mise en œuvre des politiques sur le terrain [Mignot-Lefèbre in F. Sarr, 1994]. Jusqu’à présent, nous n’avons pas abordé de façon directe et significative le rôle joué et que joue la microfinance dans la lutte contre la pauvreté des femmes. Nous avons cependant constaté que l’économie informelle est mobilisatrice des ressources financières domestiques mais jusqu’où participe-t-elle au développement qui est synonyme de sortie de la pauvreté ?

Les travaux de Zeller et de Sharma (2000) nous ont appris que la microfinance dans les pays émergeants s’adresse généralement aux femmes, et surtout que celles-ci utilisent tout particulièrement la microfinance. Johnson (1999) note cependant que la conception des produits prend rarement en compte les aspects spécifiques au sexe de l’utilisateur des services financiers. Comment les Camerounaises des campagnes intègrent-elles la microfinance et comment celle-ci contribue-t-elle à leur donner un statut autre que celui de mère et d’épouse ? Comment passent-elles de ménagères à chômeuses ?

Pendant très longtemps au Cameroun, les tontines ont été une activité qui se déclinait au féminin. Plusieurs raisons peuvent justifier ce fait. En effet, la tontine, considérée comme « tiroir social » tire son origine du système de solidarité traditionnelle où les femmes se retrouvent entre elles pour s’entraider dans la culture des champs. Ceci est aussi valable pour la préparation des denrées devant être vendues dans les marchés de la ville, (couscous composé de farine de manioc, ou de maïs, récolte des vivres, pêche à l’épuisette, poissons séchés, viande boucanée fruit de la chasse par les hommes). Ainsi les femmes se prêtent leur main d’œuvre afin de se sentir solidaires les unes les autres sans que ceci les rendent indépendantes de leurs familles, maris et enfants. Tout au long de leurs évolutions, les tontines ont acquis le statut de « banques paysannes » aussi avec la crise économique surtout des années 90 qui a connu son point culminant avec la fermeture de trois banques commerciales, la SCB, la BIAO, le Crédit Agricole sans oublier la faillite de la Procure des missions sorte de caisse de dépôts de l’Eglise. Beaucoup d’associations regroupées tout autour des paroisses chrétiennes et ayant en leur sein des tontines ont vu ainsi leurs économies disparaître à la suite du décès de l’archevêque de Yaoundé le 20 mars 1998.

  Les tontines ont pris un grand boom avec la naissance des microfinances dont la structure n’était pas très différente de celle des tontines. Les microfinances ont donc intégré le champ d’action des tontines en tenant un discours plus cohérent et organisé. Ainsi de nombreux groupement d’intérêt commun (GIC) ont vu le jour dans les villages avec le soutien financier des organismes internationaux dès 1990. On estime aujourd’hui à 400 le nombre d’établissements de microfinances qui sont recensés au Cameroun mais ce chiffre est loin de signifier qu’ils fonctionnent tous. Ces 400 établissements desservent actuellement 450.000 clients soit un taux de pénétration inférieur à 8% du marché potentiel. Tous ces établissements ont vu le jour en s’intéressant d’abord aux activités tontinières des femmes et en leur proposant l’amélioration de leurs épargnes. C’est ainsi qu’avec les encouragements de nombreuses ONG du Nord des IMF en réseau, des Initiatives Isolées pour ce qui est de la deuxième typologie telle que nous l’avons énoncée plus haut, ont vu le jour. Dans des villages les femmes ont été initiées à l’épargne dite de développement et à la gestion, à travers de nombreux séminaires à l’intérieur du pays. Pour les initiateurs de ces projets, les petits prêts tels que vécus au sein des tontines n’étaient pas viables pour les femmes déjà pauvres et exposées à la pression de la famille et des maris voulant boire et jouer (Kabeer, 2001).

Pour les tenants de cette thèse, un prêt se transforme en dette, et en cas de disparition d’une source prévue de financement du remboursement, les femmes se retrouvent en situation de crise. (Rogaly, 1996). Les femmes sont aussi sensibilisées au fait que les tontines ne soient pas en mesure de remplir en même temps les deux fonctions qui caractérisent un intermédiaire financier, c'est-à-dire collecter des ressources courtes et transformer celles-ci en emplois longs pour financer les besoins de financement dont elles peuvent avoir besoin. Si les tontines semblent pouvoir acquérir de l'information sur les emprunteurs à moindre coûts et maintenir la confiance des déposants, principalement pour les zones rurales, il ne semble pas pouvoir supporter le coût lié à la défaillance éventuelle des emprunteurs (bien que ceci arrive rarement du fait de la pression sociale exercée par le groupe). Ainsi, les prêts accordés dans le secteur informel seront surtout des prêts à court terme limitant ce risque de défaillance de l'emprunteur le plus souvent emprunteuse. Beaucoup de tontines sont ainsi devenues soient des microfinances en ouvrant une IMF en réseau, soient une coopéc (Coopérative d’Epargne et de Crédit Solidaire) suivant la première ou la seconde typologie. Ce qui a nécessité la mise en place par les IMF, des formations dans le secteur de l’épargne.

Des campagnes d’alphabétisation ont ainsi vu le jour avec le soutien des organismes comme l’OIT, l’Université Catholique de Yaoundé, la coopération canadienne par l’entremise de l’ACDI sous la coordination du Ministère de la Condition Féminine (MINCOF) suivant les six axes adoptés par le gouvernement en 1999 relatifs à l’Intégration de la Femme au Développement. Ainsi pour un village comptant 200 habitants, les populations ont été encouragées à rejoindre ce genre de regroupements financiers sans que cet appel soit spécifique aux femmes. Mais comme elles étaient déjà organisées et structurées en association ayant en interne des tontines, ceci a été plus facile. En Afrique en général et le Cameroun n’y échappe pas, le secteur de la petite économie est contrôlé par les femmes et nous entendons par petite ici toute activité qui échappe au secteur industriel et qui repose sur les grands investissements et de gigantesques infrastructures. La crise économique des années 80 a obligé les femmes à multiplier les activités rémunératrices ; commerce, production, transformations alimentaires et services. Dans les campagnes qui nous intéressent particulièrement dans cette étude la plupart de ces activités sont d’abord effectuées dans le cadre de l’autosuffisance familiale ; ce sont les « surplus » qui sont utilisés. Toutes ces activités exercées par les femmes sont le plus souvent des activités à faible rentabilité, exigeant peu de capital, une haute intensité de main-d’œuvre, peu de formation académique, adaptable à leurs horaires morcelés. Il convient aussi de souligner que le Cameroun a connu trois cycles de crise économique, celle des années 70, celle des années 80 et celles des années 90. A chacun de ces cycles correspondent des propositions de solutions en externe et en interne. La crise des années 90 est donc celle qui est la plus concernée par cette étude et il en est de même pour ce qui est des solutions.

Ceci étant dit, on a pu ainsi désigner des bénévoles chargées de collecter l’épargne et une aide a été accordée pour la construction d’un coffre fort au sein du village. Les femmes ont pu se regrouper en GIC afin de se lancer notamment dans l’élevage de la volaille et les poussins leur ont été offerts. Dans le domaine de l’agriculture, des intrants ont été gratuitement livrés. Ces différentes initiatives portent des fruits même si en termes de statistiques, il est difficile d’avancer des chiffres. Il est cependant possible de constater que les rentrées scolaires, la rénovation de l’habitat, les funérailles et les mariages s’organisent mieux et le recours autrefois permanent aux usuriers ou à la vente de biens en urgence est en nette diminution au sein de la population féminine. On peut aussi constater que les différents projets mis sur pied, les différentes formations organisées à l’échelle villageoise ont réussi à briser l’isolement des femmes et à réduire leur marginalisation.

La mise en marche d’activités socio-économiques a jeté les bases d’un nouveau statut et d’une nouvelle reconnaissance des femmes, ainsi que d’une participation accrue à la vie des villages et de la société en général, sans pour autant séparer le développement des femmes de celui des hommes et de la communauté.

En 1987, s’inspirant de l’exemple du système de petit crédit à caution solidaire développé par Yunus au Bangladesh, un ancien de l’université de Laval, l’économiste Paul Fokam, après avoir constaté que 95% de la population du Cameroun est exclue des banques classiques, tout en constatant l’existence d’une importante épargne rurale mobilisable, a fondé la CCEI Bank aujourd’hui Afriland First Bank. Elle se veut une passerelle « entre les secteurs économiques formels et informels » [16]. En 1992 en son sein voit le jour Les Mutuelles communautaires de Croissance du Cameroun (MC²) avec la question en filigrane de savoir s’il est possible d’allier le professionnalisme et la rigueur de la banque et les techniques financières de pointes de la microassurance avec le fait de desservir des populations rurales pauvres et exclues des services financiers classiques ?

Les MC² apparaissent alors comme étant une réponse du monde paysan et rural au monde bancaire [17]. Ainsi la population villageoise est le seul acteur (la seule actrice ?) à pouvoir prendre l’initiative de créer une nouvelle mutuelle de croissance, cependant l’Afriland First Bank reste la véritable initiative du réseau et apparaît alors à la fois comme banque mais aussi comme organisation de la microfinance. On peut le voir dans ses différentes activités, notamment dans la formation bancaire des agents villageois chargés de la collecte de l’épargne, elle avance aussi des fonds aux villageois pour la mise sur pied et le développement d’une mutuelle. Elle contrôle des ratios et participe à la sécurisation des liquidités. On note aussi une centralisation des données comptables [18] des mutuelles et des contrôles sont régulièrement effectués.

  Les MC² sont présentes depuis 2002 dans l’ensemble des dix provinces que compte le Cameroun et plusieurs ont à leur tête des femmes qui à l’origine contrôlaient déjà 70% du marché informel. En effet ces femmes ont vite compris l’intérêt qu’il y a à vouloir développer une épargne de développement au détriment d’une épargne de subsistance.

 Limites d’une action au demeurant occidentalo-centriste

 La microfinance telle qu’elle se développe au Cameroun est d’abord la conséquence des pressions extérieures, aussi rencontre-t-on encore aujourd’hui de nombreuses difficultés quant à son positionnement sur le marché financier camerounais. Entre banques au sens classique du terme et institutions de microcrédit la frontière semble mince tant pour les économistes que pour les sociologues. Le même flou persiste sur le plan juridique où la loi régissant les associations n’a été promulguée qu’en 1990 alors que de nombreuses institutions de microfinance existaient déjà sans aucun statut juridique.

 L’action envers les femmes et les enfants reste aussi difficile à cerner car les structures locales de microfinance cherchent toujours à obéir à un cahier de charge très souvent éloigné des réalités de terrain. Comme l’affirme avec justesse Marèma Touré Thiam, si l'on questionne les théories et les paradigmes qui dominent la thématique des "femmes dans le développement" on ne peut que constater la limite de l'audience des intellectuelles du Tiers Monde, particulièrement celles d'Afrique. L'hégémonie des mouvements féministes occidentaux se fait ressentir sur la manière dont on a jusqu'ici envisagé le problème. Depuis leur postulat commun d'une oppression universelle de la femme par l'homme jusqu'à leurs confrontations sur ce qu'il faut considérer comme prioritaire dans la libération, les femmes du Tiers-Monde.

Il en ait ainsi de tous les séminaires [19] initiés autour de la femme chef de famille dans des sociétés patriarcales mais qui reconnaissent à la femme un rôle de stabilisatrice de la société tant traditionnelle que moderne. Cette difficulté est due principalement à la confusion des champs et des finalités. La frontière entre « lutte contre la pauvreté des femmes » et « revendications féministes » est presque inexistante.

L’autre difficulté est à situer au plan interne, dans la relation entre la ville et le village, entre citadines et femmes rurales. La direction de plusieurs GIC s’est retrouvée dès leur création entre les mains des femmes de ville, plus instruites mais aussi pourvoyeuses de fonds. Conséquence, l’argent a été utilisé à des fins inavouées. Les femmes de la ville sont arrivées avec des plans tout faits et très souvent pas pour l’intérêt des femmes du village. Ce sont les femmes de la ville qui traitent avec les bailleurs de fonds et les ONG, elles sont aussi les initiatrices des projets le plus souvent à des fins électoralistes pour elles ou pour leur conjoint. Le lieu d’implantation du GIC a souvent aussi causé problème car échappant au contrôle de l’ensemble des membres ou de ceux et celles qui ont été désignés à cet effet.

 Conclusion

 Au terme de cette étude nous pouvons déjà reconnaître combien de fois il est difficile de faire une globalisation des constats sur « genre et pauvreté en Afrique » en général et même à l’échelle d’une microsociété. Les contextes sont dispersés et disparates, la ville se mêle sans cesse à la campagne dont elle oriente les choix et dicte les décisions. Il devient de plus en plus difficile pour le chercheur de délimiter les frontières d’une recherche. La persistance d’une division sexuée du travail qui confine les femmes dans les cultures dites de rente et les hommes dans l’agriculture d’exportation comme le cacao, le palmier à huile et le café.

Nous avons cependant relevé des limites quant à la contribution de la microfinance à lutter contre la pauvreté des femmes et de sa contribution au développement. L’une des difficultés que rencontrent les institutions de la microfinance sur le terrain est l’inadéquation entre la structure régissant la microfinance et la pratique sur le terrain. En effet, les structures qui régissent la microfinance malgré leur jeunesse (moins de 20 ans), pêchent surtout par le fait qu’elles sont d’inspiration étrangère, soit des ONG internationales influencées par un discours féministe et occidentalo-centriste fortement enracinées dans les revendications qui ne sont pas celles des femmes du sud et notamment des femmes camerounaises.

Les institutions internationales ont conditionné dès les années 1990 toute aide au développement à la bonne gouvernance qui rime avec partage du « pouvoir familial » entre hommes et femmes, un accès équitable aux ressources, une revendication du contrôle de la production par les femmes, un contrôle de leur corps par les femmes dans des sociétés dont les hiérarchies ne sont point pyramidales. Les sociétés camerounaises sont loin d’être des sociétés en forme d’escalier mais plutôt des sociétés en forme de damier où il faut sans cesse répondre aux questions suivantes :

 Que font les hommes ? Que font les femmes ?... Où sont les hommes ? Où sont les femmes ? … Quelle est l'organisation du temps des femmes et des hommes ?

Dans toutes les activités professionnelles, familiales, culturelles, politiques, sociales, et en corollaire : De quelles ressources - compétences, niveau de formation, revenus… mais aussi libertés - disposent les femmes et les hommes ? Qui (femmes et hommes) va bénéficier directement de l’action ou du projet de développement, de formation, d’insertion… ? Quels seront les effets à court terme, à long terme et à différents niveaux, sur les femmes, sur les hommes, sur le groupe concerné ?

 Se poser ces questions et surtout y apporter des réponses permettrait d’obtenir des statistiques sexuées et d’analyser la place des femmes et des hommes dans un groupe donné non en se référant exclusivement à la norme masculine comme cela est le cas en ce moment, mais en observant les activités des femmes.

Se poser aussi ces questions réduirait le faussé à la fois subtile et apparent qui existe entre les travaux des chercheurs du Tiers-Monde, nature plutôt empirique et « dépendant très souvent de la commande des institutions de coopération » et les travaux théoriques du Nord souvent taxés d’hégémoniques. Nous sortirons ainsi d’une double déficience fondatrice de la Recherche sur le Genre dans le continent africain.

Tout au long de ce travail nous avons montré comment la microfinance se forge une place dans des sociétés traditionnelles camerounaises où la communauté prime sur l’individu et au sein de laquelle la femme au-delà des responsabilités qui sont les siennes, ne pose pas les problèmes en termes de genre mais d’épanouissement collectif au sein d’une famille, d’une communauté et d’un village. On doit mettre à l’actif de la microfinance d’avoir sorti même de façon partielle l’activité économique des femmes des secteurs « involutifs », offrant de faibles perspectives d’expansion dans lesquels elle était enfermée.

Aujourd’hui de nombreuses femmes rurales évoluent dans des secteurs ayant certaines perspectives et se considèrent comme des travailleuses, ou des chômeuses si elles ont perdu leur emploi et non plus tout simplement comme ménagères inscription portée encore dans les pièces d’identité au moment de décliner leur profession.

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Différents rapports

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Sur la micro finance :

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Les femmes et les micro-crédits, doc. 9696, fév. 2003, rapport sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, Assemblée Parlementaire.
Planet finance, la Microfiance dans le monde Etat des lieux et perspectives, juin 2005.
Rapport aux organes de surveillance - comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW/C/CMR/1, mai 1999.
Ministère de la Condition féminine du Cameroun, Questionnaire sur l’évaluation décennale de la mise en œuvre des plates- formes de Dakar et de Beijing (Contribution du Cameroun) non daté.
SOS FAIM, n° 6, novembre 2001, n° 1 décembre 2003, N° 13, juin 2004.
Vonderlack, Rebecca M. « femmes, microfinance et épargne: quelques propositions tirées de l’analyse des pratiques informelles », Centre for Social Development Washington University de St. Louis, 2003.


 

[1] De plus en plus les ouvertures des postes dans les administrations publiques et parapubliques, dans les organismes africains portent la double mention suivante : « les candidatures féminines sont encouragées – à compétence égale les candidatures de femmes sont retenues ». Sorte de discrimination positive, saupoudrage pour satisfaire les institutions internationales ou volonté réelle d’impliquer les femmes dans tous les compartiments de la gestion politique et économique des pays africains ?

[2] Pour Marèma Touré - Depuis leur postulat commun d'une oppression universelle de la femme par l'homme jusqu'à leurs confrontations sur ce qu'il faut considérer comme prioritaire dans la libération des femmes du Tiers-Monde, les mouvements féministes du nord donnent toujours le ton et la substance du discours international sur les femmes. Les femmes du sud suivent alors le mouvement ou c’est les rames qui se détachent de la locomotive.

[3] Lire à cet effet Christine Oppong « les femmes africaines : des épouses, des mères et des travailleuses » in Population et sociétés en Afrique au Sud du Sahara sous la direction de Dominique Tabutin, Paris, L’Harmattan – Bibliothèque Développement, 1988. L’étude de Necla Tschirgi « Le paradoxe du développement » parue dans l’ouvrage collectif sous la direction de Daniel Morales-Gomez, La réforme des politiques sociales, montre le fossé qui subsiste entre le Nord et le Sud en matière de développement et de lutte contre la pauvreté et les statistiques positives que peut produire le Pnud sont assombries par la situation de la femme et de l’enfant africains aussi par exemple quand le rapport de 1997 signale des progrès spectaculaires réalisés au cours des 50 dernières années : baisse du taux de mortalité infantile qui s’élève à moins de 60 pour 1 000 naissances (réduction de près de 60 pour 100) ; la hausse de l’effectif des écoles primaires, qui accueillent désormais plus des trois quarts des enfants d’âge scolaire et un nombre croissant de filles, on ne saurait passer sous silence que 1,3 milliards de personnes dans les pays en développement (surtout des femmes et des enfants) subsistent avec un revenu de moins d’un dollar américain par jour, 800 millions de personnes souffrent de malnutrition et l’écart entre les riches et les pauvres demeure important dans la plupart des régions, surtout en Afrique et en Amérique latine.

[4] Nous pourrons sans limite énumérer les statistiques de cette nature publiées par différents organismes et dans diverses disciplines sans peut-être toucher le nœud du problème que nous essayerons d’identifier ici mais à titre de rappel notons que : Les femmes représentent la moitié de la population mondiale, et effectuent les deux tiers du temps de travail. Leur rôle est essentiel, notamment en matière de nutrition et de sécurité alimentaire. Cependant les femmes ne gagnent qu’un tiers du revenu mondial. Elles possèdent moins de 10% des ressources totales ; elles représentent 2/3 des analphabètes. Au Cameroun elles sont très souvent exclues du pouvoir politique, économique et social, sur 250 partis politiques existant sur la scène politique camerounaise, un seul est dirigé par une femme.

[5] Le Monde, 28 février 1990.

[6] Il n’est pas de trop de signaler que le terme de « condition féminine » dans le monde politique francophone fut employé pour la première fois par le président français Valéry Giscard d’Estaing en 1974 quand il nomme la première secrétaire d’Etat non « pas au aux droits des femmes mais à la condition féminine », cette condition désigne alors la manière dont les femmes s’inscrivent dans les représentations et les réalités des sociétés conduites par les hommes et la place que leur réserve les lois, les mœurs, les cultures et les religions. La condition féminine est alors un aspect de la civilisation. Certaines féministes diront alors que les femmes « en condition » jouent des partitions inventées et dirigées par les hommes. Le Cameroun des institutions en 2000 en est encore à ce stade au niveau des nominations qui elles-mêmes pourraient nous en dire beaucoup sur les réalités sur le terrain dans la mesure où le signifiant dit toujours le signifié. Lire à cet effet l’importante recherche d’Evelyne Sullerot sur la transition féministe et ses effets.

[7] Décret n°88/1281 du 21 septembre 1988 portant fusion du ministère des affaires sociales et du ministère de la Condition Féminine.

[8] Dans le même décret présidentiel, dans son alinéa 8 de l’article 5 sont fixés les objectifs de ce ministère : « Le ministère de la Condition Féminine est chargé de l’élaboration et de la mise en œuvre des mesures relatives au respects des droits de la femme et à l’accroissement des garanties d’égalité dans les domaines politique, économique, social et culturel… » .

[9] Le gouvernement du 8 décembre 2004 a vu la redéfinition, la réorientation des missions et le changement de dénomination du ministère de la Condition féminine en ministère de la promotion de la promotion de la femme et de la famille.

 [10] Plan approuvé par le gouvernement camerounais en 1999.

[11] Christine Oppong, « Les femmes africaines : des épouses, des mères et des travailleuses » in Population et sociétés en Afrique au sud du Sahara sous la direction de Dominique Tabutin. Il n’y a pas une spécifique sur l’analphabétisme villageois mais nous pouvons l’estimer entre 75 à 80%.

[12] Les microfinances vont voir le jour en même temps que les Mutuelles Communautaires de Croissance (MC²) dont les objectifs semblent être les mêmes que ceux des microfinances.

[13] De plus en plus les tontines sont aussi à base religieuse notamment avec la prolifération depuis les années de la crise (1990) des nouvelles religions (naître de nouveau) venues particulièrement des Etats-Unis. Elles expriment leur implantation dans les communautés avec un développement de solidarités qui épousent l’organisation de structure de la société traditionnelle.

[14] On rencontre aussi une autre typologie à trois paliers, les banques commerciales, les tontines et le secteur dit intermédiaire, lire à cet effet les travaux de Vinciane Sebrand sur l’accès des pauvres aux services de la microfinance : le cas des Mutuelles communautaires de croissance (MC²) au Cameroun, août 2001.

[15] Pour Michel Lenoir, la finance informelle englobe tout mécanisme non officiel qui permet de faire circuler temporairement des créances et des dettes. La finance informelle regroupe donc l'ensemble des transactions effectuées, en marge des règles établies, par des intermédiaires non agrées et/ou non enregistrées. Mais, on peut signaler que ces mécanismes ne sont pas dans la majeure partie des cas illégaux car bien souvent les autorités publiques les tolèrent.

[16] www. Afriland First Bank.org.

[17] Zoom microfinance, SOS FAIM, n° 6 novembre 2001.

[18] En effet une ONG a été créée au sein de l’Afriland First Bank pour faire ce travail mais aussi pour servir d’intermédiaire entre les MC² et les organisations internationales et nationales.

[19] Tous ces séminaires ont rencontré beaucoup de réticence ainsi que le montre les travaux F. SARR (1994:47) elle ajoute à cet effet que "le féminisme comme mouvement social a rencontré une grande réticence de la part des Africaines, qui, ont souvent été préoccupées par les dangers du plaquage d'un modèle unique, faisant du féminisme un dogme. C'est pourquoi les chercheurs du Tiers Monde proposent, à cet effet, une ouverture à la diversité donnant au féminisme une dimension plurielle (voir AFARD, 1983 et « Femmes du sud, autres voix pour XXIe siècle », 1992.