Meena Sharify-Funk

Cet article fait l’analyse d’un conflit très public entre deux organisations à but non lucratif musulmanes, le Congrès islamique canadien et le Congrès musulman canadien, comme il s’est manifesté sur les pages des journaux canadiens et sur des sites Internet. Déclenché par des convictions profondément divergentes à propos des normes du genre et alimenté par des modèles contradictoires de ce que c’est “être musulman au Canada”, ce conflit incendiaire a été éventé par la couverture médiatique canadienne. En se concentrant largement, mais non exclusivement, sur les débats de 2003-2005 portants sur les alternatives de résolution de disputes basées sur le Shari’ah en Ontario, je vais soutenir que les médias ont joué un rôle dans la construction des débats internes musulmans et dans la négociation d’identités concernant ce que ça veut dire être véritablement Canadien et authentiquement musulman à travers le journalisme conduit par la controverse qui a surligné les pôles opposés des axes libérale/ progressiste et conservateur/traditionnel dans une quête pour les prises de position “point/contrepoint”. À travers des nouvelles et des commentaires à propos de sujets controversés qui juxtaposent deux voix organisationnelles de plus en plus antagonistes, les médias n’ont pas simplement représenté les réalités musulmanes, mais ont aussi aidé à les formuler et à renforcer la polarisation entre une culture “majorité musulmane” qui cherche à se garantir une place dans la société canadienne et une culture “dissidente musulmane” qui cherche à consolider l’appui externe pour le changement interne.