Les préoccupations des avocats de l'administration et de l'entreprise

Avenir de la profession et contingentement

France Rochon, avocate

Si, en 1982, les avocats de l'administration et de l'entreprise (voire les avocats hors pratique privée?) s'intéressaient peu ou pas aux prises de position du Barreau sur les questions de l'heure, il semble bien que ce ne soit plus le cas en 1997.

Me Geneviève Pichet et Me Gilles Legault, respectivement secrétaire et président du Comité des avocats de l'administration et de l'entreprise. (Photo: Réjean Meloche)
Me Geneviève Pichet et Me Gilles Legault, respectivement secrétaire et président du Comité des avocats de l'administration et de l'entreprise. (Photo: Réjean Meloche)

C'est du moins ce que révèle un sondage effectué en mai dernier par Le Groupe Multi-Réso Inc. auprès des avocats oeuvrant dans une entreprise ou un organisme.

Ainsi, indique le sondage, 67 % des avocats hors pratique privée - qui représentent 40 % du membership du Barreau du Québec - se préoccupent des questions touchant l'avenir de la profession et le contingentement.

En outre, si le Service de la formation permanente a su maintenir sa popularité au sein de ce groupe et que le Service aux membres, tout comme le Journal du Barreau, se sont taillés une place de choix, il reste que le Barreau a encore à faire au chapitre de la représentation de ces membres. À cette fin, le Comité des avocats de l'administration et de l'entreprise, qui a commandé le sondage, a laissé savoir qu'il poursuivrait davantage sa consultation afin de mieux identifier les besoins et les attentes des avocats «hors pratique privée».

La consultation

En 1982, un sondage effectué auprès des avocats n'oeuvrant pas en pratique privée avait démontré une insatisfaction générale de ces derniers à l'égard du Barreau, qui était alors très orienté vers la pratique privée. C'est donc à cette époque que le Comité des avocats de l'administration et de l'entreprise a été créé afin de défendre les intérêts des avocats hors pratique privée?, d'expliquer Me Gilles Legault, président du Comité. Depuis sa création en 1984, le Comité a été restructuré et a présenté un nouveau plan d'action qui fut entériné par le Barreau. En 1996, on a décidé qu'il était plus que temps qu'on consulte à nouveau les membres afin de déterminer si leurs besoins avaient changé?, de poursuivre Me Geneviève Pichet, secrétaire du Comité. C'est dans cette perspective que le Comité commandait en mai dernier un sondage permettant de recueillir l'opinion de ses membres sur leur identification au Barreau, leur participation aux activités, leur recours aux services du Barreau et leurs attentes face au Barreau et au Comité. Le sondage a été effectué par voie téléphonique entre le 5 et le 12 mai 1997 auprès d'un échantillon de 549 membres sur les 7915 membres oeuvrant hors la pratique privée. La marge d'erreur est de plus ou moins 5.2 %, 19 fois sur 20. Il a porté sur les mêmes sujets que ceux de 1982.

Satisfaits...

On note une évolution de la satisfaction générale à l'égard du Barreau sur la façon dont ce dernier représente les avocats de l'administration et de l'entreprise. Ainsi, près de 40 % des membres interrogés démontrent en effet un certain degré de satisfaction à l'égard du Barreau. Me Pichet constate que, dans les faits, les avocats provenant de l'administration ou des entreprises participent un peu plus qu'en 1982 aux différents comités formés par le Barreau. D'ailleurs, le sondage révèle que parmi les activités organisées par le Barreau (Tournée du bâtonnier, Fondation du Barreau, etc.), les comités du Barreau constituent l'activité la plus utile par les trois quarts des membres interrogés. Il reste qu'en dépit de ce jugement positif, on peut s'interroger sur le faible taux de participation à un comité (18 %) et aux activités du Barreau en général (33 %), tout comme sur la diminution de la participation au Congrès annuel (20 % comparativement à 38 % en 1982). Me Legault et Me Pichet entendent mesurer à moyen terme l'évolution de l'implication des membres dans le temps et les raisons avancées pour ne pas participer. Les deux principales raisons invoquées dans le sondage ont été le manque de temps et le manque d'intérêt. «Les restrictions budgétaires expliqueraient peut-être partiellement la baisse de participation au Congrès du Barreau mais, selon Me Legault. Il est important de rechercher l'ensemble des motifs susceptibles de distancer ces membres de leur association professionnelle et de raffermir la présence du Barreau.»

Si les comités retiennent un peu moins l'attention des avocats interrogés, ce n'est pas le cas pour les prises de position du Barreau. En 1982, la plupart des prises de position apparaissent aux membres comme étant sans pertinence ou demeuraient tout simplement ignorées des membres. Les questions de l'heure sont maintenant beaucoup mieux connues: 67 % connaissent le dossier sur l'avenir de la profession; 57 %, le dossier sur le contingentement et 41 %, le dossier sur la justice devant les caméras. Près de huit membres sur dix considèrent le dossier de l'avenir de la profession comme étant «très ou assez pertinent». Ce sont d'ailleurs le dossier sur l'avenir de la profession et celui du contingentement qui constituent les priorités numéros un et deux des avocats consultés. «En tant que membres du Comité des avocats de l'administration et de l'entreprise, nous nous sommes posés la question suivante: qu'est-ce qui préoccupe davantage les avocats concernant le dossier sur l'avenir des professions? Est-ce le Rapport sur l'avenir de la profession, la position du Barreau sur l'avenir de la profession, les inquiétudes de chacun sur leur avenir ou les nouvelles ouvertures qui se créent? Certains membres ont répondu qu'ils connaissaient la position du Barreau sur l'avenir de la profession alors qu'ils ont avoué ne pas connaître l'approche Singapour qui fait pourtant partie intégrante du rapport sur l'avenir de la profession. Il sera donc important de bien cerner les préoccupations des avocats interrogés. L'aspect plus particulier du dossier, voire les nouvelles méthodes de travail, l'informatisation, l'approche « le client d'abord» retient-il davantage l'attention que son aspect général, soit l'avenir en général de la profession? Il en est de même pour le dossier du contingentement: les avocats connaissent le dossier mais on ne sait pas s'ils sont pour ou contre le contingentement.

Des services populaires

On ne peut passer sous silence la popularité du Service de la formation permanente et du Service aux membres. Près de trois membres sur quatre (72 %) déclarent en effet avoir déjà participé à des cours, des colloques ou autres activités organisées par le Service de la formation permanente du Barreau. Ce sont les activités qui concernent le Code civil qui sont les plus populaires. On a d'ailleurs participé à 3,52 activités en moyenne durant les deux dernières années. «L'arrivée du nouveau Code civil du Québec en 1994 de même que la baisse du prix des cours offerts par le Service y sont sans doute pour quelque chose, croit Me Legault. Ce résultat met également en relief la préoccupation des avocats consultés pour la formation continue.»

Le Service aux membres, qui n'existait pas en 1982, a aussi de quoi se réjouir. Les différents services qu'il offre sont connus par une majorité importante et, à une exception près, ils sont jugés utiles par la majorité. Parmi les services les plus utiles et les mieux connus, mentionnons le Régime collectif d'assurance-vie (90 %), le RÉER collectif
(85 %), le Régime d'assurance-auto (80 %), le Service de location d'auto à long terme (70 %) et le Service d'aide à l'emploi (69 %).

Quant aux sources d'information juridique, le Journal du Barreau est sans contredit et de beaucoup la source d'information la plus lue des membres. Il est également considéré comme plutôt utile par plus des trois quarts des membres interrogés.

Un suivi

Afin de mieux comprendre les résultats du sondage et de mieux saisir les attentes des avocats oeuvrant dans une entreprise ou un organisme, Me Legault et Me Pichet rencontreront, dans un premier temps, les membres des exécutifs d'associations (telles que l'Association des secrétaires et chefs de contentieux, l'Association des juristes de l'État, l'Association des cadres juridiques de la fonction publique, etc.) pour préparer des rencontres avec leurs membres. Ils se proposent ensuite de rencontrer les membres de ces associations. D'autres groupes seront éventuellement consultés.

Un compte-rendu des préoccupations et des attentes sera enfin soumis au Barreau du Québec, qui a manifesté une volonté certaine de mieux connaître et de mieux servir ces avocats qui représentent une proportion importante de son membership. *

Journal du Barreau - fin d'article volume 29 - numéro 17 - 15 octobre 1997 page précedente...vers le haut de la pagepage suivante