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Revues Internet en ligne
Societas Criticus
Revue de critique sociale et politique
On n'est pas vache…on est critique!
&
D.I. revue d’actualité et de culture
Où la culture nous émeut!
Vol. 9 no. 2 (22 mars 2007)
Spécial élection québécoise (26 mars) et
beaucoup de cinéma
Cette revue est éditée à compte d'auteurs.
Pour nous rejoindre:
C.P. 182, Succ. St-Michel
Montréal (Québec) Canada H2A
3L9
Les co-éditeurs:
Michel
Handfield, M.Sc. Sociologie et Délinquant Intellectuel pour penser autrement!
Gaétan Chênevert, M.Sc. Adm. et Diogénien
Soumission de texte:
Les envoyer par courriel. Si votre texte est en
fichier attaché, si possible le sauvegarder en format "rtf" (rich
text format) sans notes automatiques.
Festival de films sur
les droits de la personne de Montréal
Si les clips de
nos politiciens vous ennuient… Je vous conseille une expérience de cinéma
maison suivi de Le néolibéralisme sauce péquiste!
Quelques explications sur la politique
québécoise!
Le Journal/Fil de presse:
Égypte : Le blogueur
"Kareem Amer" condamné à quatre ans de prison; Cuba : Reporters sans frontières réagit aux déclarations du
ministre de la Communication à propos d'Internet;
Commentaires livresques : Sous la jaquette!
L’argent
dans la culture moderne
25e FESTIVAL INTERNATIONAL
DU FILM SUR L'ART (FIFA) (Conférence de presse)
CITIZEN LAMBERT: JEANNE D'ARCHITECTURE
L'art, le
nazisme et la société de droit!
L’art du nu : Qu’est-ce qu’être modèle; La collaboration modèle/artiste; et
L’art homo érotique
PALMARÈS (Lauréats des films en compétition)
LA MOUETTE D’ANTON TCHEKHOV
(Théâtre)
Le Diable en partage
(Théâtre)
Je vais bien, ne
t'en fais pas
Les Rendez-vous
du cinéma québécois 2007
Skull and Bones et The Good Shepherd
BREAKING AND ENTERING / PAR EFFRACTION
L’amour est un
opéra muet (Théâtre)
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Festival de films sur les droits de la personne de Montréal
Commentaires de Michel Handfield
« La
création artistique est utile, non pas pour changer le monde, mais pour rendre
l'impossible vraisemblable. » Abderrahmane Sissako, cinéaste.
8 mars 2007
Ce festival, qui aura lieu du 23 au 29
mars 2007, se déroule dans la suite de la semaine d’action contre le racisme (www.inforacisme.com/), qui elle va du 15 au 25 mars. S’il regarde des problèmes d’adultes,
on n’oublie pas les droits des enfants. Pensons aux mariages forcés des filles
dans certaines cultures par exemple, mais qui se passent ici aussi au nom de
coutumes traditionnelles venant d’ailleurs. Cette semaine, ce fut un sujet
d’actualité à l’occasion de la journée internationale de la femme du 8 mars.
(1) Mais, cela pose aussi un problème d’équilibre entre les droits de la
personne en tant qu’être humain et en tant qu’être culturel et religieux.
Des chocs sont possibles entre les
désirs individuels et les obligations
culturelles et religieuses valorisées
par une politique du multiculturalisme ou de
l’interculturel. Des dérapages aussi! Nos normes sont elles assez
claires? Qu’est ce qui est négociable et qu’est-ce qui ne l’est pas dans nos
valeurs face à celles des autres? Le féminisme doit-il être négocié face à Dieu?
Ou Dieu doit-il être remis au rang de croyances face à des valeurs humanistes,
démocratiques, laïques et scientifiques? Les femmes peuvent-elles remettre Dieu
à sa place?
Je ne sais pas le contenu des films,
mais le montage qu’on nous a présenté fut suffisant pour savoir que le terrain
est certainement riche. Ce genre cinématographique a de la place pour poser un
regard et crée un dialogue. C’est une occasion de découvrir toutes sortes de
réalités; des drames, mais aussi de l’espoir et des réussites à travers le
monde.
Le cinéma a le pouvoir de mettre un
visage sur les choses, de dénoncer les abus et de célébrer les réussites. C’est
ce que célèbre ce festival.
Si c’est un festival montréalais, il
s’inscrit dans un réseau international de villes qui présentent ce genre de
films ou de festival, regroupés sous l’Human
Rights Film Network (www.hrfn.org/). Ce n’est certes pas un hasard. C’est
que les droits de la personne sont d’abord un sujet urbain, peut être parce que
ce sont d’abord les villes qui reçoivent l’immigration.
En effet, les villes semblent de tout temps avoir eu un effet
d’attraction sur les populations migrantes, que ce soit d’abord des populations
intérieures, venant de la campagne vers la ville, ou, ensuite, des populations
extérieures, venant d’abord de pays limitrophes et ensuite de continents et de
cultures de plus en plus éloignées, mais aussi de plus en plus proche avec
l’accélération des échanges et des communications mondiales.
Si tel est le cas, c’est que les villes
offrent par définition davantage de services, de travail et de discrétion qu’un
petit village par exemple. Elles sont donc les premiers lieux d’intégrations et
de frictions entre des ethnies et des coutumes différentes; les premières
concernées par les questions de droits de la personne et de relations
interculturelles.
L’autre question que cela pose est celle
du racisme. Ce que nous qualifions de racisme ici, par rapport à ce qui se
passe ailleurs dans le monde (2) est-il toujours du racisme? Si nous pouvons
clairement dire oui dans certains cas, dans d’autres il ne s’agit que de
préjugés; d’une méconnaissance de l’autre, ce qui peut changer avec le temps,
l’éducation et surtout le contact avec ceux que nous appelons « autres »,
« étrangers » ou « ethniques »; ou d’un choc entre des identités culturelles et
des façons de vivre différentes. Un choc des cultures. La nouvelle qui se
confronte à celle qui était déjà là et l’ancienne qui se sent remise en cause
et menacée par cette présence. Des coutumes qui s’affrontent, comme la liberté
des filles d’ici face à certains diktats religieux et coutumiers d’autres
cultures qui sont perçues comme un recul.
Je suis né et je vis dans un quartier
multiculturel de Montréal et s’il y a parfois des préjugés des « de
souche » envers les ethnies, il y en a aussi d’ethnies envers d’autres
ethnies je peux vous l’assurer. J’en suis occasionnellement témoins. Mais, attention, je dis bien occasionnellement!
La cause? La proximité ou la promiscuité.
En banlieue, il est peut être plus facile d’être chacun dans sa bulle et
d’avoir une distance avec les autres, mais en ville on est plus proche. Plus
facile de se piler sur les pieds ou de se tomber sur les nerfs peut être.
Prenons les concepts de propreté, de bruits ou d’odeurs en exemple. Dans un
bloc appartements, si je suis allergiques au poisson et que je sens la friture
de poisson de mes voisins de pallier, vu la promiscuité des lieux, cela ne peut
que créer des tensions et des conflits que je n’aurais pas avec les mêmes
voisin en banlieue, ayant quelques mètres de distance entre nos maisons. Je
vais vous donner un exemple tout simple. Quand j’étais jeune, à l’âge de 8 ou
12 ans peut être, on entrait parfois dans un bloc voir des amis et on trouvait
que ça sentait l’italien. C’était probablement une odeur de cuisine nouvelle à
nos sens. Mais à leur contact, mes sauces sentent maintenant
« l’italien », car j’utilise les mêmes variétés de piments forts et
de tomates qu’eux, de l’ail aussi. Je fais même un jardin pour faire mes
sauces! Ma mère a aussi demandée comment faire des pâtes à une voisine
italienne et même si je ne le fait pas, je sais les faire, car ma mère me l’a
ensuite montré. C’est signe que des échanges et des apprentissages culturels se
font entre voisins de quartiers multiethniques. S’il y a parfois des frictions,
il y a aussi des échanges. On n’est plus tout à fait ce qu’on était et eux non
plus.
La même chose est vraie des bruits et de
la « propreté » relative des lieux. Cette notion est cependant plus exacerbée chez le petit propriétaire qui
habite son immeuble, celui-ci ayant une conception bien précise de la propreté
et de la tranquillité des lieux. Ce sont des sources de conflits que certains
auraient même avec des amis ou des membres de leur famille s’ils avaient à
vivre cette proximité. Oui il y a du racisme, mais tout n’est pas réductible à
cette question.
Ceci pose une dernière question :
si certains problèmes de relations interculturelles sont davantage un fait urbain,
devrait-on faire de la discrimination positive envers les résidents des grands
centres dans l’attribution de certains postes? Cette question peut sembler
particulière et il me fait même drôle de la poser ici, mais il faut la poser.
La réponse ne sera certes pas évidente, car si la question des relations
interculturelles concerne davantage les urbains que les ruraux, au même titre
que le ministère de la condition féminine peut faire de la discrimination
positive envers les femmes, les organismes publics devrait-ils avoir recours à
de la discrimination positive (parfois temporaire ou sporadique) envers des
urbains pour certains postes spécifiques? Le fait d’être urbain et de vivre en
milieu multiculturel constitue-t-il une forme de compétence pratique qui
devrait se voir attribuer un pointage pour certains postes par rapport à
quelqu’un qui viendrait d’un milieu très homogène par exemple? Elle n’est peut
être pas si bête que cela ma question finalement.
Pour en revenir à ce festival, il y aura
beaucoup de documentaires engagés, mais aussi plus légers à voir. Occasion
d’apprentissages, de discussions et, surtout,
d’une compréhension mutuelle.
Notes :
1. Marier de force, Enjeux,
émission du mercredi 7 mars 2007, Radio-Canada Télé :
www.radio-canada.ca/actualite/v2/enjeux/
2. J’ai vu une pièce sur le conflit Bosniaque Le Diable en partage,
le même soir que cette
conférence de presse, soit le 7 mars. Cette pièce est à l’affiche d’Espace
libre jusqu’ au 24 mars 2007. www.espacelibre.qc.ca/
***
Festival de films sur les
droits de la personne de Montréal
34 pays, 115 films dont 74 films en compétition + 3 cartes blanches + un
programme de 28 courts métrages sur le Liban et la Palestine + Débats
Du 23 au 29 mars 2007
Cinéma du Parc
3575, avenue du Parc
Tl.
514-281-1900
INFOS ET
PROGRAMMATION :
www.ffdpm.com www.cinemaduparc.com
Séances: 5 $
---
Les
vraies questions
Michel Handfield
8 mars 2007
Sur la question référendaire
Mettons 2 choses au clair. Au lendemain
de l’élection d’un nouveau gouvernement – même si c’est le PLQ on parle de
nouveau gouvernement en termes techniques – il n’y a pas de changement de
statut du Québec au Canada. L’élection ne change rien sur ce point à moins
qu’elle ne soit référendaire.
Par contre, au lendemain d’un référendum
gagnant, dans un coup de tête, le Canada pourrait décider de ne plus retirer
d’impôts du Québec et de ne plus faire de paiement de transfert, nous considérant hors du système fédéral. On
ne peut réclamer un remboursement chez Chapters (Canada) pour un livre acheté
chez Archambault (Québec)! Simple logique.
Cependant, comme en avril vous allez
payer vos impôts 2006, si le Québec devient indépendant en 2007, il pourrait
recevoir les paiements de transfert auxquels il avait droit pour 2006 ou au
moins ce qu’il a envoyé à Ottawa pour 2006, vu l’année de retard de
l’imposition. Mais, ce n’est pas un paiement de 2007. C’est le paiement différé
de 2006. Dès 2008, le Québec ne pourrait plus réclamer pour 2007 si en 2007 il
n’était plus au Canada et qu’il n’avait pas fait sa part. Ou on sort du régime
avec ce que cela implique ou on reste dedans avec ce que cela implique aussi.
Cependant, il faut savoir que si on
reçoit plus que ce que l’on donne on aura un effort collectif à faire pour
combler le manque à gagner. Ce pourrait être par des baisses de salaires, un
accroissement des impôts ou les deux à la fois. Là est la vraie question :
Qu’êtes-vous prêt à sacrifier pour l’atteinte du la souveraineté si vous votez
pour le PQ et le Bloc Québécois?
Certains pourraient se demander pourquoi
je parle du Bloc Québécois ici, mais c’est qu’il s’agit d’une filiale du PQ à
Ottawa visant à protéger les
intérêts du Québec en attendant la
souveraineté (1) et qui se mêle de l’élection québécoise. (2) Ce parti ne croit pas à la nécessité de
participer à un gouvernement national canadien pour le Québec et ne peut le
faire de toute façon, n’ayant qu’une représentation québécoise. Cela peut
signifier que l’argent que nous envoyons à Ottawa pourrait être dépensé par
d’autres sans que nous n’ayons un mot à dire dans les décisions
gouvernementales si nous ne sommes pas présents au gouvernement quel qu’il soit
ou si nous y sommes en minorité comme
actuellement, car plusieurs décisions peuvent être prises de façon
administratives sans que la chambre des communes n’y puisse rien. Par exemple,
le Québec n’a peut être pas reçu sa
juste part dans le contrat des avions militaires que le gouvernement Fédéral a
accordé à Boeing pour l’achat de C-17 au mois de février dernier parce que sa
présence est minoritaire au sein du gouvernement conservateur et que
l’opposition ne peut rien pour ce genre de décision administrative. (3) Le Bloc a peut être le pouvoir de dénoncer,
de grogner, de faire de beau clips aux nouvelles, mais aucun de décider ni de dépenser
pour nous! Aucune participation au caucus où sont prises les décisions. Les choix de gérer et de dépenser les taxes
et impôts que l’on envoie à Ottawa sont faits par les autres…
Cette prise de conscience est
importante, car si le PQ se retrouve encore à être l’opposition officielle ou,
pire pour les péquistes, s’il est devancé par l’ADQ et se retrouve en troisième
place, la question du Bloc Québécois devrait alors se poser avant la prochaine
élection fédérale si le gouvernement conservateur leur laisse le temps de le
faire avant de déclencher ou de provoquer des élections anticipées. A-t-il
toujours un rôle à jouer à Ottawa, si ce n’est d’empêcher le Québec de
participer au gouvernement Fédéral et d’avoir son mot à dire dans la gestion
des sommes que nous y envoyons? Peut-on continuer encore longtemps de ne pas
participer au gouvernement Fédéral sans dommages pour le Québec? Ces questions
seront pressante en cas de défaite du PQ et urgentes s’il se retrouve derrière
l’ADQ, car les élections fédérales suivront rapidement. Pourra-t-on se prévaloir
encore longtemps de ne pas participer au gouvernement Fédéral? En cas de
défaite du PQ, le Bloc Québécois devra-t-il se saborder s’il veut vraiment le
bien du Québec? Societas
Criticus ose poser la question.
L’aide sociale et l’ADQ
« Malgré la croissance économique soutenue qui dure depuis plus d’une
décennie, le Québec n’a pu réintégrer, de manière significative, les
bénéficiaires de l’aide sociale sur le marché du travail ? Le Québec compte
quelque 500 000 personnes bénéficiaires de l’aide sociale sur une population
active d’un peu plus de 4 millions de personnes. » (Solidarité
sociale, rétablir la dignité, p. 14 du programme de l’ADQ)
« METTRE
EN PLACE UNE VASTE RÉFORME DU PROGRAMME D’AIDE SOCIALE. L’objectif de la
réforme serait la bonification de l’aide à la clientèle inapte au travail et le
retour en emploi nécessaire des bénéficiaires aptes au travail. » (Ibid., p. 15)
Attention, la croissance économique c’est une
statistique. Si je suis un fabricant de vélo ou de vêtement par exemple, je
peux accroitre mon chiffre d’affaires et ma profitabilité sans créer un emploi,
même en réduisant l’emploi. Je ferme l’usine (- 200 employés par exemple), je
conserve mes dessinateurs (aucun changement d’emplois), j’ouvre un entrepôt (+
35 employés) et j’importe maintenant de Chine (+ 5 courtiers), ce qui fait que
mon profit s’accroît (croissance économique) en même temps que l’emploi a
diminué de 160 personnes! Alors lier
emplois et croissance, c’est une fausse relation causale comme dire que de faire
des potagers accroît la natalité puisqu’en banlieue il y a à la fois plus de
jardins et plus d’enfants qu’en ville!
Si vous voulez que les assistés sociaux
travaillent, comme rien ne se crée seul, combien êtes-vous prêt à investir? Si
vous travaillez ou que vous recevez une pension du travail, êtes-vous prêt à
acheter un produit plus cher fait au Québec/Canada face à un produit chinois,
car ce produit fait davantage travailler ici? Êtes-vous prêt à subventionner
davantage les entreprises en plus de leur donner congé de taxes pour
concurrencer la Chine? Êtes-vous prêt à réduire votre salaire ou votre pension
pour que l’on soit concurrentiel? Êtes-vous prêt à accroitre vos taxes pour que
l’on engage quelques milliers de cols bleus de plus, car quand vous dites
« on peut les faire balayer les rues », ça veut dire qu’on en fera
des cols bleus? Êtes-vous prêt à ne pas remplacer votre automobile et à prendre
le transport en commun, car le Québec fabrique des autobus et des wagons de
métros, mais pas d’automobiles? Si vous répondez oui à toutes ces questions, je
crois que l’on peut baisser le nombre de bénéficiaires d’aide sociale avec
votre aide.
Si vous avez répondu non par contre, c’est que
vous pensez à votre poche, mais pas à la solidarité sociale nécessaire à
l’atteinte de cet objectif collectif.
C’est beau de vouloir enlever les gens de
l’aide sociale, encore faut-il les employer avec un salaire, car il y a
beaucoup d’emplois temporaires qui n’offrent pas assez d’heures pour faire
vivre une famille. Il y a aussi des emplois à commission, comme le
télémarketing, où vous ne conserverez pas votre emploi plus que quelques
semaines si vous n’atteignez pas vos objectifs de ventes. Êtes-vous prêt à
avoir 10 assurances, 5 cellulaires, 3 compagnies de téléphones et 6 balayeuses
hyper puissantes tout en mettant des REER dans 8 institutions financières
différentes pour soutenir leurs emplois? Quand je regarde les offres d’emplois,
ces entreprises sont à la recherche de centaines de télévendeurs par semaine
depuis des années, mais n’ont jamais ajouté un étage à leur siège social sinon
le centre ville de Montréal serait un véritable chantier de construction. S’il
en est ainsi, c’est qu’il y a un énorme taux de roulement dans ces emplois. On
ne crée donc pas des emplois, on y « roule » le personnel!
Vous avez encore besoin de réfléchir à la
question avant de voter l’ADQ sur un coup de tête je crois.
***
Quant au PLQ, si le passé est garant de
l’avenir, je n’ai pas grand-chose à dire, sauf de regarder les taux de
satisfaction (!) de ce gouvernement. Remarquez qu’on peut toujours se dire que
l’on a payé assez cher pour qu’ils apprennent… qu’on pourrait leur donner une
autre chance!
Il y a aussi les tiers partis, Québec
Solidaire er les Verts (4), qui sont quelque peu utopistes, mais que le contact
du pouvoir, en ayant quelques sièges dans l’opposition par exemple, pourrait
aider à devenir plus réaliste et
pragmatique. On se doit de les préparer à la « real » politique,
car ils peuvent être la solution de demain. Mais, pour cela, ils devront être
prêts, car on ne s’improvise pas chef de l’État. On l’a déjà vu me semble,
alors donnons leur la chance d’apprendre. Plus tard, on pourra peut être leur
donner le pouvoir ou la balance du pouvoir dans un gouvernement minoritaire ou
une forme de proportionnelle qui serait souhaitable selon moi.
Notes :
1. « Le Bloc Québécois est un
parti politique souverainiste, implanté exclusivement au Québec. » (Historique, sur le site du Bloc Québécois)
2. PC, Duceppe met en garde les étudiants contre
Charest et Dumont, in Le Devoir, Édition du mercredi 07 mars 2007 : www.ledevoir.com/2007/03/07/133841.html.
Rappelons aussi qu’en
temps d’élection ces deux machines, celles du Bloc et du PQ, travaillent main
dans la main sur le terrain, partageant un même objectif : la
souveraineté.
3. Achat d'avions C-17. Un contrat
fortement critiqué, SRC Nouvelles/Politique, vendredi 2 février 2007 à 16 h 15 :
www.radio-canada.ca/nouvelles/Politique/2007/02/02/001-boeing-annonce-officielle.shtml
4. Ces derniers sont d’ailleurs plus forts en Europe. Selon le site du
Parlement européen on compterait 42 députés du Groupe des Verts/Alliance libre
européenne. Pour la liste, voir : www.europarl.europa.eu/members/expert/politicalBodies/search.do?group=1538&language=FR Si ce lien ne fonctionne pas, le lien du
Parlement européen est le suivant : www.europarl.europa.eu/
Références politiques :
ADQ : http://adqaction.com/
Programme de
l’ADQ : http://adqaction.com/media/ADQ_Programme.pdf
PLQ : www.plq.org/
PQ : www.pq.org/
Québec Solidaire : www.quebecsolidaire.net/
Verts : www.pvq.qc.ca/
Bloc Québécois : www.blocquebecois.org/
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Si les clips de nos politiciens vous ennuient…
Je vous conseille une expérience de cinéma maison
Michel Handfield
26 février 2007
La campagne électorale vous tape déjà
sur les nerfs, ne changez pas de canal télé; allez au club vidéo le plus près
et louez quelque chose de plus inspirant. J’ai nommé les séries le
temps d’une paix, d’une qualité historique impressionnante, et les cinq
Don
Camillo, classique de la fin des années 50 en noir et blanc, mais
toujours savoureux!
Dans le
temps d’une paix vous retrouverez un vrai rouge (Joseph-Arthur Lavoie) et
un vrai bleu (Siméon Desrosiers), puis un curé qui tempère les choses, car on
était au temps où être rouge signifiait être libéral et bleu être conservateur!
Ce n’était pas une pâle imitation comme
aujourd’hui, où les rouges peuvent être conduits par un ancien chef bleu (1) et
où les bleus peuvent être des néolibéraux! (2)
En plus, le langage est savoureux et la reconstruction historique
excellente, car cela se passe dans l’entre-deux-guerres, entre 1918 et 1939!
Oubliez aussi Mario Dumont (ADQ) et
Françoise David (Québec Solidaire) pour comprendre les valeurs plus à droite ou
plus à gauche. Je vous propose de vrais réactionnaires, des solides, des
convaincus : Don Camillo (Fernandel) pour la droite chrétienne et Péppone
(Gino Cervi), le maire communiste de la commune de Brescello, pour les
solidaires! (3) Là vous saurez de quelles valeurs on se chauffe. Pas de
compromis à moins d’être chèrement (dé)battus!
Avec ces conseils, vous serez bien
équipé pour écouter les dernières heures de la campagne électorale; bien la
comprendre et, surtout, bien en rire! Je ne sais pas si votre choix sera
meilleur, mais vous saurez c’est quoi d’être bleu, rouge, de la droite
chrétienne ou communiste-solidaire! Peut-être même mieux que certains poteaux
qui défendent ces couleurs par opportunisme.
Notes :
1. Jean Charest fut chef du Parti progressiste-conservateur du Canada du
14 décembre 1993 au 30 avril 1998. Source : www.assnat.qc.ca/fra/Membres/notices/c/chaj5.shtml
2. Voir le texte suivant, Le néolibéralisme sauce péquiste!, qui
se devait d’abord être une note.
3. Don Camillo : http://fr.wikipedia.org/wiki/Don_Camillo
Le Petit Monde de Don Camillo :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Petit_Monde_de_Don_Camillo
Références DVD :
Le Petit Monde De Don
Camillo (1951); Le Retour De Don Camillo
(1953); La Grande Bagarre De Don Camillo (1955)
Don Camillo...Monseigneur! (1955); et Don Camillo En Russie (1965)
Le temps d’une paix, 6 coffrets plus le DVD Spécial de Noël, sous étiquette ImaVision: www.imavision.com
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Le néolibéralisme
sauce péquiste!
Michel Handfield
26 février 2007
André
Boisclair me semble avoir certaines tendances néolibérales, à moins que ce ne
soit dû au hasard. Il faut se rappeler qu’il n’y a pas si longtemps encore le
Chef péquiste a recruté Daniel Audet « de l'Institut économique de Montréal, un
think tank de droite qui prône un rôle accru du secteur privé dans toutes les
sphères d'activité publiques.»
Remarquez que ce monsieur n’est
pas un nouveau au PQ, ayant «été chef de
cabinet de Bernard Landry alors que celui-ci était ministre des Finances »
nous apprenait Kathleen Lévesque il y a quelques mois. (1)
Daniel Audet avait déjà aidé André
Boisclair lors de sa course au leadership en 2005 et a des relations avec Québec Inc. C’est le moins qu’on puisse
dire, car :
« La Presse a appris que Daniel Audet, directeur du
bureau de relations publiques National, à Montréal, a annoncé vendredi qu'il
quittait ses fonctions.
« Depuis juin, M. Audet était déjà
parmi les principaux conseillers d'André Boisclair.
(…)
« À 45 ans, M. Audet était chef du cabinet de
Bernard Landry quand le PQ a pris le pouvoir avec Jacques Parizeau, en 1994. Il
a ensuite été vice-président de Vidéotron, puis le gouvernement Bouchard l'a
nommé délégué général du Québec à Londres. » (2)
Par hasard et sans relations entre les
deux événements, il est cependant intéressant de souligner que la Caisse
de Dépôt du Québec s’est associée à Quebecor
depuis (2000-1) pour fonder Quebecor
Média Inc. (QMI) et acheter
Vidéotron, où monsieur Audet a déjà travaillé. Cela est le propre des
petites sociétés où les gens circulent d’une entreprise à l’autre, faisant même
des allers-retours entre la fonction publique et le privé. Cependant, ce qui
est cocasse, et c’est pour cela que je le souligne, c’est qu’André Boisclair
nous disait il n’y a pas si longtemps encore, sur les ondes de Radio-Canada, qu’« il faut soulager le capital, il faut que le Québec devienne l'endroit
au monde où le capital est le mieux accueilli possible, créant de l'emploi et
donnant de la richesse aux gens » (3) comme si les entreprises n’étaient
pas déjà bien traitées ici. Le Québec le fait depuis longtemps! Ainsi, pour en
revenir à QMI…
«QMI compte deux actionnaires, Quebecor avec une
participation de 54,72 % et Capital Communications CDPQ (Capcom) avec 45,28 %
des actions. Capcom est une filiale à part entière de la Caisse de dépôt et
placement du Québec (la Caisse), organisme créé par le gouvernement du Québec
en 1965 pour gérer les fonds du Régime des rentes du Québec. À ce titre, elle
est une société d'état et mandataire de Sa Majesté du chef du Québec,
assujettie aux Instructions au CRTC (Inadmissibilité aux licences de
radiodiffusion).» (4)
Québec est déjà derrière Québec Inc. Difficile de faire plus à
moins de tout privatiser et de payer la facture en plus! « Lorsque Réjean Thomas demande à M. Boisclair
s'il est « de gauche », ce dernier
répond : « Ça veut dire quoi, être de gauche? » et note alors que le PQ, par le
passé, a commis des «excès» en ce sens. » (5) J’en suis pantois. Le
PQ, trop à gauche? Ce parti a pourtant aidé Québec
Inc. ou je rêve. Mais, en même temps, il est vrai que le PQ a aussi une
aile gauche très forte et bien organisée qui le démange : le SPQ libre (www.spqlibre.org), qui veut ratisser la même clientèle que Québec Solidaire. Son Président, Marc
Laviolette, et son secrétaire, Pierre Dubuc, sont même candidats du PQ dans
l’élection du 26 mars prochain. Tout est en place pour un affrontement
idéologique interne comme seul ce parti en est capable, qu’il soit dans
l’opposition ou au Pouvoir!
À cela s’ajoute que depuis quelques mois
Quebecor se veut le défenseur de l’entreprise privée et s’en prend à
Radio-Canada. Pourtant, l’État québécois est en bonne partie derrière cette
entreprise, à hauteur de 45% en fait! Si on avait investit ces sommes dans Télé-Québec, le portrait télévisuel
québécois serait probablement fort différent. Cela me laisse un malaise, même
si ces relations sont « normales » dans une petite société comme la
notre.
Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai une lumière
rouge qui s’allume de plus en plus souvent dans mon cerveau. J’ai beau me dire
que je me fais des idées, elle me signale toujours… Attention : le privé n’est
pas si privé que ça, car le courant passe beaucoup plus qu’on ne le dit entre
l’État et l’entreprise privée au Québec comme ailleurs dans le monde. Si le
cœur est à gauche, le portefeuille est à droite!
1) Le chef péquiste sera candidat
dans la circonscription de Pointe-aux-Trembles - Boisclair recrute à droite,
Le Devoir, 9 juin 06: www.ledevoir.com/2006/06/09/111232.html
2) Denis Lessard, COURSE À LA
DIRECTION DU PQ. Boisclair prépare la transition, in La Presse, 13 novembre
05 : www.cyberpresse.ca/article/20051113/CPACTUALITES/511130411/5032/CPACTUALITES
3) Antoine Robitaille, Les
Québécois ont «peur du succès», dit André Boisclair, Le Devoir, 30
sept. 2006: www.crtc.gc.ca/archive/FRN/Decisions/2001/DB2001-283.htm. Ce texte se réfère à l’émission L'autre
midi à la table d'à côté... diffusée sur la première chaîne de Radio-Canada
le 30 sept. 06 avec André Boisclair et Réjean Thomas :
www.radio-canada.ca/radio/profondeur/9525.html
4) Point 5, Décision du CRTC
2001-283, Ottawa, 23 mai 01: www.crtc.gc.ca/archive/FRN/Decisions/2001/DB2001-283.htm
5)
Antoine Robitaille, Op. Cit.
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Index
Essais
Quelques explications sur la
politique québécoise!
Michel Handfield
22 mars 2007
Comme Mario Dumont et l’ADQ gagnent en
popularité, ceci commande un regard de notre part, mais aussi sur les autres
partis pour bien comprendre les choses. On s’aperçoit alors de la distinction
québécoise.
***
D’abord, quand Mario parle de négocier d’égal à égal avec le Canada, il
oublie un détail de taille : les autres provinces! Ça ne passera pas
facilement si ça passe, car ce serait comme reconnaître que le Québec est déjà
un pays. En fait, seul un pays négocie
« d’égal à égal » avec un autre. Et encore, ce n’est pas toujours le
cas, car certains pays ont plus de poids que d’autres dans une négociation.
Pensons aux États-Unis par exemple. (1)
Si le Québec veut faire des
changements, il devrait plutôt démontrer aux autres provinces le bien-fondé de
ces changements pour elles aussi; qu’elles les utilisent dans l’immédiat ou les
conservent en réserve de la république, c’est-à-dire comme une possibilité pour
plus tard! Ce qui est anormal, c’est qu’une constitution soit barrée à double
tour comme l’est la constitution canadienne. Une constitution doit avoir une
certaine adaptabilité en vue des développements futurs de la société. C’est un
contrat social entre les citoyens (2), pas une prison. À quoi nous a servi le
rapatriement constitutionnel de 1982 si c’est pour mettre la constitution dans
un coffre fort?
Ensuite, avec l’objectif de réduire les coûts de l’État, Mario propose
« l’abolition des commissions scolaires » (3). Il y a effectivement
des changements à faire dans l’éducation, mais je ne crois pas que ce soit
l’abolition des commissions scolaires qui soit la solution. Peut-être qu’une
certaine modernisation organisationnelle est nécessaire, mais de là à les
abolir, je suis loin d’être certain de l’efficacité de cette mesure. Ce qu’ils
font devra continuer à être fait de toute manière. L’entretien des bâtisses
sera la responsabilité de qui? Du municipal ou de l’école? Les salaires seront
au mieux comparables et au pire plus élevé, les employés municipaux ayant une
meilleure convention collective que ceux de l’État québécois. À moins de
congédier tout ce beau monde et d’avoir recours à des entrepreneurs privés, des
travailleurs autonomes ou des employés au salaire minimum, il n’y aura pas de
grandes économies. C’est changer quatre 25 sous pour une piastre, sans compter
les coûts de réforme du système!
D’ailleurs, L’ADQ reconnaît que le personnel des commissions scolaires a
un rôle à jouer, car il est écrit dans son programme que l’ADQ va…
« Décentraliser et
redistribuer les ressources humaines et financières vers les écoles et les
élèves en réduisant considérablement la structure administrative du système
d’éducation québécois, notamment par l’abolition des commissions scolaires.
(…)
Enrichir les responsabilités
des conseils d’établissement pour en faire de véritables conseils
d’administration et renforcer le rôle du directeur de l’école afin qu’il puisse
exercer pleinement son leadership en matière de pédagogie et d’administration. » (4)
Ainsi, les services et les commissaires qui se trouvaient à la
commission scolaire vont se retrouver en partie dans la nouvelle bureaucratie
d’école; au conseil d’établissement notamment. Une copie du modèle de l’école
privée en lieu et place des commissions scolaires. Les choix de fermer une école plutôt qu’une autre, quand le nombre
d’élève ne sera plus suffisant incombera donc aux parents. Et s’ils choisissent
de la conserver malgré l’évidence, devront-ils en assumer eux même les coûts ou
les transmettront-ils aux payeurs de taxes de leur quartier? Avant nous avions
une instance démocratique, les commissaires, pour en décider. Là, nous ne
l’aurons plus.
De plus, même les écoles privées se plaignent de ne pas recevoir assez
d’argent de l’État, alors il n’est pas sûr qu’on réalise autant d’économie que
Mario Dumont en espère de la fermeture des commissions scolaires, d’autant plus
que certaines économies d’échelles
n’existeront plus. Au mieux, ce sera équivalent, le surplus de
bureaucratie économisé étant dépensé dans les pertes d’économie d’échelle.
Par contre, revoir les structures et la bureaucratie scolaire, incluant
le Ministère de l’Éducation, serait
probablement bienvenu. A-t-on besoin du Comité
de gestion de la taxe scolaire de l'île de Montréal (l’ancien Conseil
Scolaire de l’île de Montréal) par exemple? Devrait-on remplacer les
commissions scolaires par des régies régionales de l’éducation comme en santé,
les commissions scolaires n’ayant pas de liberté sur le programme éducatif par
exemple et étant souvent assimilées à un simple gestionnaire pour le ministère?
Peut-on donner plus d’autonomie aux commissions scolaires et revoir le rôle du
ministère? Peut-être. (5)
Mais, la réforme des structures en éducation devrait être l’occasion de
corriger la réforme scolaire. Pourquoi pas davantage de liberté sur les
programmes éducatifs pour répondre à des clientèles particulières? Un programme
régulier qui est fait pour la vaste majorité des élèves du primaire par
exemple, mais avec, à côté d’eux, des programmes plus spécifiques pour les
étudiants ayant des besoins différents. Si certains peuvent mieux apprendre par
objectifs, pour d’autres il faudrait peut-être un encadrement plus strict, plus
traditionnel. Certains pourraient aussi naviguer entre les deux selon les
matières, comme le français à l’ancienne et les arts et les sciences en liberté
relative s’ils ont un sens artistique ou une pensée rationnelle nettement au
dessus de la moyenne!
Au secondaire, ce serait plus particulier. Encore là, le programme régulier ferait pour la
majorité, mais des aménagements pourraient être faits pour empêcher d’en
perdre, car le décochage est élevé. Trop élevé. C’est ainsi qu’avec une
maîtrise en sociologie, j’aimerais pouvoir enseigner le français à des groupes
contestataires et proches du décrochage de secondaire IV et V. Des anars qui
rêvent de changer le monde et qui sont prêts à devenir « squeegee » en attendant! Le genre
qui ne veut pas lire un roman. On pourrait peut-être les conserver autrement à
l’école; avec une approche plus sociale et d’autres lectures, car n’existe pas
que le roman. Moi-même j’ai lu très peu de romans dans ma vie, car j’ai toujours
été un lecteur d’essais, mais, je suis un lecteur quand même. Les quelques fois
où j’ai été au Salon du livre anarchiste de Montréal (6), j’y ai pourtant vu
plusieurs jeunes de ce genre. C’est dire qu’ils lisent. Faudrait tabler là
dessus pour les amener ailleurs, mais ce n’est pas nécessairement ce que le
professeur d’une classe régulière peut faire. C’est là que des gens d’autres
formations professionnelles pourraient aider à ne pas les perdre et même à
poursuivre leur développement intellectuel. Mais, ce n’est certainement pas en
abolissant les structures qu’on le fera. C’est mon hypothèse. Par contre, des
gens comme moi, j’ai une maîtrise en sociologie, ne peuvent travailler dans le milieu scolaire malgré la pénurie
de personnel, car pour enseigner le français par exemple, il faut être diplômé
en littérature française si on n’a pas étudié en éducation. Mais, ces jeunes de
secondaire IV et V, contestataires en plus, sont-ils prêts à lire de la
littérature? Quand je pose la question, la réponse est non! Pourquoi ne pas
essayer autre chose avec eux? Par peur d’un renouveau? Et s’ils réussissaient,
poursuivaient leurs études et changeaient le monde? Un peu menaçant pour
l’establishment, alors mieux vaut ne pas les récupérer…
Il faudrait des discussions beaucoup plus larges que des discussions
partisanes pour arriver à une véritable solution aux problèmes de l’éducation
au Québec. Et même là, on ne pourrait pas y arriver, car les choses ne sont pas
statiques. La société bouge, le monde change et les solutions ont toujours une
date de péremption. La premier pas vers une société mature est probablement de
le réaliser.
Finalement, super Mario veut couper dans la fonction publique. Faire le
ménage! Mais comment? En privatisant? En coupant dans les services? En
transférant des activités au privé? Par la seule attrition (7) comme il vient
de le dire! Pas sûr, car quand je lis le programme de l’ADQ j’y apprends que
l’on encouragera « la diversité des
fournisseurs de biens et services publics : le public, le privé, l’économie
sociale, les coopératives, etc. » (8) Pourtant, ce n’est pas toujours
gage d’économie. Pensons au scandale Enron
aux États-Unis! Pensons aussi à ces entrepreneurs prêts à faire la leçon à
l’État, mais qui demandent des subventions et des allégements fiscaux à
répétition sous menace de fermeture ou de délocalisation de leur entreprise
vers d’autres cieux ayant des lois plus
clémentes, notamment en matière de santé sécurité, de normes de travail et d’environnement.
En fait, il y a des problèmes dans l’État québécois; une accumulation de
problèmes laissés pour compte par de nombreux gouvernements qui ont géré à
courte vue, que ce soit le PQ et le PLQ près de nous, ou l’Union Nationale que
l’on voit dans le rétroviseur de l’histoire! Cela semble peut-être loin en
arrière, mais quand un gouvernement a établi un précédent, même dans les années
1950 ou 60, il est difficile de revenir dessus et de faire comme s’il n’avait
jamais existé.
Ce qui est particulièrement fascinant de l’Union Nationale, c’est
qu’elle n’est pas totalement étrangère à l’ADQ. Plusieurs y voient une parenté
d’ailleurs. Ce n’est pas sans raison, sauf que cette filiation se retrouve
aussi dans les autres partis politiques québécois.
***
En disparaissant, l’Union Nationale a vu une partie de sa base se
répartir entre le PQ et le PLQ. Quant à ceux qui balançaient entre les deux
depuis, les positions de Mario Dumont les ont probablement ralliés 30 ans plus
tard! D’ailleurs, pour supporter cette hypothèse, le slogan de l’Union Nationale
était « Égalité ou indépendance ».
Que nous propose l’ADQ aujourd’hui? L’égalité! Le PQ? L’indépendance. Les fils
de Daniel Johnson se sont retrouvés où? Tous les deux premiers ministres du
Québec suite à une course à la chefferie dans leurs partis respectifs :
Pierre-Marc au PQ et Daniel Jr au PLQ! Donc l’un pour l’indépendance, l’autre
pour la poursuite du statu quo canadien, mais sans l’égalité!
La seule chose qui a brouillé les cartes de l’Union Nationale fut le
schisme de la question nationale sinon ce parti existerait encore et aurait été
longuement au pouvoir depuis si l’on se fie au courant de conservatisme qui a
balayé notre voisin du Sud durant ces nombreuses années – et avec qui nous
avons toujours aimé nous coller même dans les milieux nationalistes, sauf
depuis l’ère belliqueuse de George W. Bush. Les milieux nationalistes ont
d’ailleurs été les premiers défenseurs du libre échange avec les États-Unis. Le
PQ a toujours pris en exemple les échanges Nord-Sud plutôt qu’Est-Ouest pour défendre
le modèle de la souveraineté du Québec. ((9)
L’élection actuelle est donc la démonstration la plus éclatante que les
idées de l’Union Nationales sont toujours là et que notre conservatisme n’est
pas mort. Il s’est collé à notre progressisme social pour se cristalliser avec
le statu quo constitutionnel au PLQ; l’égalité à l’ADQ; et l’indépendance
(quelle que soit l’astuce sémantique pour la nommer) au PQ! Mais sur le plan
social, tous jouent dans les eaux d’un certain progressisme conservateur (est-ce
que ça vous rappelle le beau risque du PQ de René Levesque avec le Parti
conservateur de Brian Mulroney?), plus ou moins au centre droit ou à droite,
mais pas à l’extrême droite comme on le voit ailleurs cependant. Même le PQ,
plus à gauche dans son discours social, est de centre droit dans la gestion de
l’État. Boisclair, par exemple, ne renie pas ce qu’a fait le PQ sous Bouchard.
Puis, dans ses proches conseillers, on retrouve des gens de ce courant. (10) Il disait même il n’y a pas si longtemps encore, sur les
ondes de Radio-Canada, qu’« il faut soulager le capital, il faut que le
Québec devienne l'endroit au monde où le capital est le mieux accueilli
possible, créant de l'emploi et donnant de la richesse aux gens »! (11) Je
ne referai pas l’histoire du PQ, mais ils ont « frenché » avec le
conservatisme économique à plus d’une occasion dans leur histoire!
***
Je suis à peu près d’accord avec les diagnostics posés par nos trois
grands partis politiques quand ils disent que ça va mal. C’est avec les solutions
que ça se gâte. Pour quelques bonnes
idées, combien sont des simplifications démagogiques. Beaucoup trop. Et combien
de faux-fuyants aussi?
Prenons la question de la privatisation des services publics. L’ADQ a
clairement pris position en ce sens dans son programme. Le PLQ le fait en
partie par les partenariats publics privés (PPP) et la réingénierie de l’État.
(12) D’ailleurs, que fera le PLQ des paiements de transfert qu’il vient de
recevoir du Fédéral? Les investira-t-il en santé et en éducation pour améliorer
les choses? Non. Il les redonnera en baisse d’impôts (13), car améliorer les
choses ce serait probablement redonner plus de place à l’État alors que
l’objectif n’est pas là, mais bien dans les PPP!
Le PQ, lui, s’est prononcé pour la défense du secteur public après
l’avoir égorgé! N’oublions pas que le PQ a fermé plusieurs hôpitaux et coupé
dans les professionnels de la santé, sous le règne de Lucien Bouchard, au nom
de la lutte au déficit tout en subventionnant la grande entreprise. Comme
politique de gauche, on repassera! Ces coupures massives dans la santé ont eu
leur effet et ont réduit les services en plus de faire monter l’insatisfaction
de la population. Comme la réingénierie de Charest n’a pas amélioré les choses,
cette politique ne pourra que conduire tôt ou tard (et peut-être même plus tôt
que tard!) les citoyens à revendiquer une plus large place du privé pour aider
le système et recevoir les services auxquels on a droit. C’est dans cette
optique, et sous prétexte d’un élan de compassion, que si le prochain
gouvernement est péquiste, il en viendra sans doute à accorder sa bénédiction à
plus de privés dans la prestation des services publics, principalement en
santé.
Naturellement, on sera contre par principe, mais il ne faudrait pas
oublier qu’on aura tout fait pour provoquer l’arrivée du privé dans le décor
tout de même! De façon insidieuse et
stratégique, on aura ainsi forcé le peuple à revendiquer plus de privés pour
lui donner satisfaction par compassion même si cela va contre nos principes! Du
grand Machiavel (14) contrairement au PLQ qui l’amène par la porte d’en
arrière, sous le nom de PPP, et à l’ADQ qui y va directement contre vent et
marée. Le PQ dit non dans le discours, mais fait tout pour que le peuple
revendique le recours au privé par ses actions. Il ne faudrait pas oublier
qu’il y avait un ministre du nom d’André Boisclair dans ce gouvernement de
droite que fut le gouvernement Bouchard et qu’il ne renie en rien ce
gouvernement auquel il a participé!
Que font les syndicats pendant ce temps? Pas plus fins, dès que le
gouvernement se gagne une marge de manœuvre, ils demandent des hausses
salariales. Si, à la place ils offraient un gel de salaire pour le temps d’une
convention collective et exigeaient en retour des réinvestissements massifs
dans les services publics, le gouvernement serait bien mal pris, découvert dans
tout son machiavélisme. Les syndiqués viendraient de saboter cette stratégie
qui vise à faire passer les privatisations sous prétexte de fournir un service
de qualité à la population comme étant le dernier recours!
Ce n’est pas pour rien que l’on procède ainsi; c’est que l’on prépare un
noyau d’employés capable de superviser le personnel sous-payé, contractuel ou
externe qui fera le travail; l’État se contentant de la gestion et des
politiques des services. On veut faire exactement comme les multinationales
l’ont fait en ayant recours à de l’outsourcing
pour faire exécuter le travail sous supervision. C’est ce qui se dessine
présentement, mais personne ne semble le voir. Pourtant, la gestion de l’État a
toujours suivi la gestion privée. Il n’est donc pas compliqué de le voir, sauf
que la recherche du scoop ne permet pas
ce type d’analyse dans les médias. Il faut donc des revues comme la notre pour
le faire, mais qui ne recevons aucun financement, car vaut mieux financer ceux
qui distraient et informent plutôt que ceux qui analysent! Societas Criticus vous aura au moins mis sur
la piste si les autres ne l’ont pas fait.
C’est ce que Mario nous propose en éducation. C’est ce qui se fait en
santé depuis des années. Et si ça passe, ce sera le prochain modèle de la
fonction publique. Regardez bien aller nos gouvernants. On dit qu’ils pensent à
court terme, mais les hauts fonctionnaires derrière eux pensent à long terme
tout comme les gens d’affaires qui conseillent les partis et les chefs
politiques. Et quel serait leur intérêt, croyez-vous? Un État entrepreneur ou
un État maître d’œuvres qui aura recours aux entrepreneurs pour faire le
travail et rendre les services? Poser la question c’est y répondre.
***
Enfin, il faudrait en finir avec la question nationale pour un bon bout
de temps si ce n’est pas pour de bon, car la souveraineté, depuis les accords
de libre échange et la mondialisation économique, est de plus en plus
sémantique. Il est temps de passer à autre chose. Refaire un parti conservateur
à droite, construit autour de l’ADQ; revenir à un parti de centre, qui
balancerait entre le centre gauche et le centre droit, réuni autour du PLQ qui
pourrait alors remettre son nom de Libéral à l’avant-plan; et, enfin, refaire
l’unité de la gauche autour de Québec solidaire et des verts, sous la bannière
de Québec solid’vert par exemple! On pourrait aussi avoir nos partis
minoritaires et plus radicaux pour permettre l’expression d’une pluralité
d’opinions tant à l’extrême gauche qu’à l’extrême droite, mais il n’est pas dit
qu’ils seront élus.
On pourrait aussi militer pour une Amérique ressemblant à la communauté
européenne. Je serai prêt à militer dans un parti de l’Amérique d’ailleurs, car
il y a longtemps que j’en suis là.
Il est à souhaiter un gouvernement minoritaire lors de l’élection du 26
mars pour forcer les partis à se repenser, car tout est encore possible. Par la
même occasion, on devrait aussi plancher sérieusement sur la réforme du mode de
scrutin. Voulons-nous conserver le système actuel ou le modifier en allant vers
une forme de proportionnelle? Changer le scrutin pour que l’on vote pour un
premier ministre et un député de façon indépendante comme on le fait déjà au
municipal? Sur ce, bon vote et n’hésitez pas à regarder les tiers partis si
vous ne trouvez pas les principaux aspirants inspirants!
Notes :
1. Chomsky, Noam, 1996, Les
dessous de la politique de l’Oncle Sam, Québec : écosociété; Chomsky, Noam, 2001, De la guerre comme politique étrangère des États-Unis,
Marseille : Agone/ Montréal : Comeau & Nadeau
2. Rousseau, Jean-Jacques, 1992 [1762], Du contrat social, France: Grands
écrivains.
3. ADQ, Une vision.
Un plan. Une parole. Un plan A pour le Québec, p. 11 (http://adqaction.com/media/ADQ_Programme.pdf)
4. Ibid., p. 11
5. La Fédération québécoise des directeurs
d'établissement d'enseignement se pose elle aussi la question nous
apprenait Le Devoir au moment où nous corrigions ce texte. On ne pouvait donc
pas passer à côté, surtout qu’on se rejoint sur certains points même si on
n’utilise pas le même vocable ou la même approche, car eux sont dans le système
et moi à l’extérieur. Marie-Andrée Chouinard, Les commissaires d'école sont-ils encore utiles?, Le Devoir,
Édition du mercredi 21 mars 2007 : www.ledevoir.com/2007/03/21/135976.html. Le site de la Fédération est le www.fqde.qc.ca/
6. Effectivement,
comme il y a un salon du livre à chaque année il y a aussi un salon du livre
anarchiste. Ça n’a pas la même ampleur, mais ça existe. Si je visite le Salon
du livre à chaque année, je vais occasionnellement au Salon du livre
anarchiste, car, comme revue de critique sociale et politique, on se doit
d’être au courant du mainstream, mais
aussi de la marge. Ainsi, pour votre information, le 8e Salon du livre
anarchiste de MONTRÉAL se tiendra le 20
mai 2007 au CEDA, 2515 Delisle (métro Lionel-Groulx), de 10h à 18h. Voir :
www.anarkhia.org/article.php?sid=1413
7. « Dans cette
colonne de revenus, l’ADQ table sur 560 millions qui viendront de la réduction
de 1 % de la taille de l’État. Celle-ci se fera par attrition seulement, sans
mise à pied, dans le respect de la sécurité d’emploi des employés de l’État, a
assuré M. Taillon. » Robert Dutrisac, Neuf mois pour réduire de 25 000 le
nombre d'assistés sociaux, Le Devoir, Édition du mercredi 21 mars 2007 : www.ledevoir.com/2007/03/21/135978.html
8. ADQ, Op. Cit., p. 25
9. De mémoire je me
rappelle un texte d’introduction à un livre d’économie du Québec, où Monsieur
parlait de ce sujet. Mais au cégep je parle d’il y a 30 ans, entre 1976 et
1979, alors ne me demandez pas le titre du livre! Par contre, un ouvrage
beaucoup plus récent peut être lu sur le sujet : Gélinas, Jacques B., Le virage à droite des élites politiques québécoises, Montréal :
écosociété ISBN 2-921561-94-8, 247 pages
10. Il
faut se rappeler qu’il n’y a pas si longtemps encore le Chef péquiste a
recruté Daniel Audet « de l'Institut économique de Montréal, un think tank de droite qui prône un rôle accru du secteur
privé dans toutes les sphères d'activité publiques.» Kathleen Lévesque, Le chef péquiste sera candidat dans la circonscription de
Pointe-aux-Trembles - Boisclair recrute à droite,
Le Devoir, 9 juin 06: www.ledevoir.com/2006/06/09/111232.html
11. Antoine
Robitaille, Les Québécois ont «peur du
succès», dit André Boisclair, Le Devoir, 30 sept. 2006: www.crtc.gc.ca/archive/FRN/Decisions/2001/DB2001-283.htm. Ce texte se réfère à l’émission L'autre
midi à la table d'à côté... diffusée sur la première chaîne de Radio-Canada
le 30 sept. 06 avec André Boisclair et Réjean Thomas :
www.radio-canada.ca/radio/profondeur/9525.html
12. Rouillard, Christian, Montpetit, Éric, Fortier, Isabelle, et Gagnon,
Alain-G., 2004, La réingénierie de
l’État. Vers un appauvrissement de la gouvernance québécoise, Québec : Les presses de l’université
Laval
13. Kathleen
Lévesque, Tout aux baisses d'impôt, in Le Devoir, Édition du mercredi 21 mars
2007 : www.ledevoir.com/2007/03/21/135979.html
14. Machiavel, Nicolas, 1996 [1532], Le
prince, Paris: Booking International.
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Michel Handfield
Ou commentaires
autour des débats actuels sur l’accommodement raisonnable à la lumière d’Incendies
de Wajdi MOUAWAD (France :
Actes Sud et Québec : Leméac, 96 pages)
14 février 2007
J’ai reçu ce livre (Mouawad, 2003) peu de temps après avoir vu la pièce,
car je l’ai demandé. J’avais mes raisons. Je l’ai cependant laissé reposer
quelques temps pour ne pas avoir la pièce en tête en le lisant. Je la voyais
quand même à la lecture, car elle fut marquante.
Pour être honnête l’idée de demander ce livre m’est venue après avoir
écrit ces quelques lignes en conclusion de mon texte sur la pièce
(Societas Criticus, Vol. 8, no. 7):
« C’est une pièce intéressante sur laquelle j’aurais pu écrire davantage,
mais il est plus plaisant de la découvrir au théâtre. C’est aussi un texte fort
qui mériterait d’être lu, surtout si vous ne voyez pas la pièce. Car en
démontant les mécaniques de la production/reproduction de la haine, cette pièce
démonte les mécaniques de la guerre, de toutes les guerres. Après, une fois que
nous aurons compris, il faudra consoler, guérir et reconstruire. Une pièce à
voir. Une pièce qui devrait être jouée à l’ONU.
Si le Canada veut
vraiment faire de quoi pour la paix, il devrait en offrir une représentation à
l’ONU, rien de moins! »
Je voulais donc voir la force du texte seul. Je ne fus pas déçu :
le texte porte. Il est costaud, mais pas lourd, vu la pointe d’humour qu’y met
le notaire Hermile Lebel avec ses péronismes dont voici un exemple :
« On vous demande pas d’inventer le
moteur à quatre trous. » Ça dit tout!
Ce serait un texte à faire lire à la fin du secondaire ou au début du
cégep, car il susciterait des discussions intéressantes sur les préjugés, mais
aussi les coutumes et les traditions qui étouffent les citoyens, qu’elles
soient culturelles ou religieuses. Sur l’éducation comme moyen de sortir de
l’ignorance et de la haine qui se perpétue sans qu’on ne sache vraiment
pourquoi elle est là. On n’aime pas l’autre seulement parce qu’il est autre. Et
c’est pareil de sa part, car la haine c’est comme le bonheur : ça se
partage et ça se transmet de génération en génération, peut être même plus
facilement que la paix et le bonheur.
Malheureusement!
« Nazira [la grand-mère sur
son lit de mort]. Je m’en vais Nawal. Pour moi, ça se termine, la lumière sera
bientôt là, mais toi Nawal, toi… ça ne fait que commencer… Nous, notre famille,
les femmes de notre famille, sommes engluées dans la colère depuis si
longtemps : j’étais en colère contre ma mère et ta mère est en colère
contre moi tout comme tu es en colère contre ta mère. Toi aussi tu laisseras à
ta fille la colère en héritage. Il faut casser le fil. Alors apprends à lire,
apprends à écrire, apprends à compter, apprends à parler. Apprends. Puis
va-t’en. » (Mouawad, p. 29)
Il faut donc briser cette chaîne pour s’en sortir. Là est tout le propos
de la pièce.
92 pages de texte signifiant. Cette pièce pourrait être montée par des étudiants en
français théâtre (cégep) par exemple et être l’occasion de discussions par la
suite. Mais, si elle pourrait être au
programme du cégep, j’en placerai quand même la lecture en secondaire IV ou V
pour des raisons stratégiques : rejoindre le plus grand nombre de citoyens
en devenir. Il y a de ces textes qui sont formateurs. C’en est un et on ne doit
pas passer à côté. Pourtant je ne suis pas un lecteur de littérature, mais
d’essais. Par contre je sais en reconnaître un quand je le vois.
***
Ce texte a un caractère universel. Si on peut « identifier »
le Québec, vu le langage de Simon (fils de Nawal) et du notaire, on peut aussi
identifier l’ailleurs : le Liban ou l’Afghanistan par exemple. Et même si
l’on est porté à identifier le premier, sachant que l’auteur est né au Liban
avant de venir à Montréal en passant par la France, en d’autre temps, c’eut pût
être l’Allemagne nazie, la France collabo, l’Italie mussolinienne, l’Algérie ou
n’importe quelle dictature religio-ethnique, car la mécanique de la haine et de
la violence est la même partout. Transmise, intériorisée et, enfin, organisée
et tournée vers un « ennemi » que l’on identifie comme le mal! Celui
qui nous terrorise, qui a le
« mauvais œil », qui « vole nos jobs » ou qui menace nos traditions selon les
endroits et le langage populaire. (D’après Societas Criticus, Vol. 8, no. 7)
Aujourd’hui on peut penser au débat sur la place de la religion et des
accommodements raisonnables dans la société québécoise. Ce texte pose donc des
questions fondamentales qui traversent toutes les sociétés et toutes les
époques. Les croyances versus la science. Le Pouvoir de l’ethnie, de la
religion, du groupe ou du clan versus la démocratie citoyenne et les droits de
la personne. Une question qui se pose ici avec acuité, car le
multiculturalisme, le droit de la culture et de la tradition, peut aller contre
le droit individuel. Le désir et le droit d’émancipation face à sa culture.
Nawal a quitté son pays pour fuir ces ancrages qui la consumaient, qui
l’emprisonnaient dans une tradition qu’elle refusait. Ils ont maintenant
rejoint ses enfants au nom du multiculturalisme! Un jugement à d’ailleurs été
rendu il y a quelques années sur ce sujet. Le texte que j’avais écrit à cette
occasion se trouve en annexe, car il est encore signifiant près de 10 ans plus
tard.
Depuis la nuit des temps, des esprits rationnels et scientifiques sont
condamnés pour avoir mis en cause des « vérités » religieuses ou
culturelles; des croyances des anciens :
« En mars 1616, l'Inquisition sanctionne
Copernic pour sa théorie héliocentriste. Dix-sept ans plus tard, un autre
astronome de génie [Galilée] est réduit
au silence par l'Eglise, qui ne l'a toujours pas réhabilité
officiellement. » (Chélini, Jean)
Les questions changent, mais ce
sont toujours des croyances et des traditions qui affrontent la science; une
parole divine ou traditionnelle, « véridique » et immuable par
définition, qui fait face (ou front!) aux découvertes scientifiques et de la
modernité. Un ordre divin du monde face à un savoir qui le remet en cause et le
renvoi au rang de croyance et de mythologie. La connaissance et la rationalité scientifique face à une parole donnée, soit
par Dieu, les extra-terrestres, les gourous, les prophètes ou les anciens, mais
surtout immuable. Une culture donnée
face à une personne de moins en moins monolithique, mais de plus en plus
exposée à de multiples influences culturelles et scientifiques, mais aussi à
des influences sectaires, ésotériques et idéologiques pour ne nommer que celles
là.
Une personne appelée à faire des choix de plus en plus complexes, mais pas nécessairement outillée
pour le faire, face aux méthodes de recrutement (d’enrégimentement!) de
certains groupes idéologiques, spirituels ou religieux, car l’éducation est de
moins en moins centrée sur le développement d’un esprit critique et indépendant
que sur des valeurs utilitaristes et d’employabilité. La personne est laissée
seule face à des groupes et des entreprises qui ont une machine de recrutement,
de marketing et de relations publiques bien rodée; qui ont les moyens
financiers de leurs ambitions; et, surtout, qui ont souvent les moyens de créer l’opinion et la demande
en manipulant l’information. Tu es obligé
de penser comme on te le dit pourrait résumer la pensée de Nawal ici. Mais
où fuir, quand c’est le propre de la mondialisation d’homogénéiser les choses?
L’individu, le citoyen, devrait pourtant être irréductible à un seul
trait de sa personnalité ou une seule caractéristique que l’on attribue à son
groupe d’appartenance, car cela est réducteur et fausse la réalité. Cela crée
aussi de fausses perceptions chez les gens, ce qui est probablement à l’origine
des préjugés et du racisme. Pourquoi une musulmane ne pourrait-elle pas être
socialiste ou anarchiste; un juif ou un chrétien communiste; tout comme un
états-unien conservateur ne pourrait pas promouvoir le développement
d’entreprises vertes? L’Homme naît bon, l’idéologie le corrompt et les médias
le confirment pourrait-on dire pour
paraphraser Rousseau! Suffit de regarder derrière ce masque pour retrouver sa
vraie nature pourtant. (1)
Si la religion ne constitue qu’une facette parmi d’autres, pour
certaines personnes c’est la seule cependant
au point de refuser la réalité d’aujourd’hui et la modernité. On ne peut
négocier avec Dieu! C’est ainsi que dans certaines écoles on peut enseigner le
créationnisme malgré les preuves scientifiques qui vont à l’encontre de cette
théorie biblique qui n’a d’autres fondements que la croyance qu’on y porte. On
peut aussi enseigner que la terre est au centre du monde et que c’est le soleil
qui tourne autour d’elle au delà de tout entendement!
Au besoin, l’enseignement escamotera totalement la science et la
modernité pour se concentrer sur les saintes écritures, formant ainsi des
ignorants que la religion manipule. Des exemples de ce genre, il y en a dans
toutes les confessions. Chez certains juifs par exemple…
« les 60 garçons qui
fréquentent l'établissement ne reçoivent aucune éducation générale laïque, mais
seulement des cours de religion. « La philosophie religieuse l'emporte sur
toutes les autres philosophies, explique M. Bensimhon. C'est leur façon de
vivre, de voir les événements. » Ces jeunes Québécois étudient l'ensemble de la
tradition juive pendant cinq ans. Il s'agit d'études théologiques poussées,
mais aucun cours de français, de biologie ou d'histoire canadienne n'y est
dispensé. » (SRC Nouvelles, 6 septembre 2006)
Mais, nous avons aussi nos sectaires pure
laine! À l’école de la Mission de
l'Esprit-Saint de la région de Joliette, un groupe Chrétien « enseigne que la Terre est toute seule dans
l'univers, que le Soleil est une illusion qui représente Satan. » (SRC Nouvelles/Montréal, Mission de
l'Esprit-Saint: Des résultats scolaires désastreux)
C’est contre ce fondamentalisme d’une grande noirceur que s’est battue
Nawal suivant les conseils de sa grand-mère (Nazira) :
« Apprends à lire, à écrire,
à compter, à parler : apprends à penser. Nawal. Apprends. »
(Mouawad, p. 29)
Le changement, la transformation, vient du savoir, car à sa lumière
reculent les mythes et les préjugés qui préfèrent les zones d’ombres pour faire
peur et contrôler. C’est ainsi que
l’écriture et la lecture doivent être contrôlées; les livres et les journaux
mis à l’index ou brûlés; le cinéma et l’internet censuré tout comme la musique,
car les idées représentent un danger :
« Soldat 1. Tu raisonnes. Alors
vous êtes peut être ces deux femmes que nous cherchons depuis deux jours. Toute
notre milice les cherche et les militaires venus du pays au sud, ceux qui nous
aident, les cherchent aussi. Elles écrivent et mettent des idées dans la tête
des gens. » (Mouawad, p. 54)
Une question qui pourrait se poser à la suite de cette lecture serait la
suivante : Doit-on accepter toutes les coutumes et traditions ou certaines
d’entres elles doivent être discutées sur la place publique et reconsidérées,
notamment si elles vont à l’encontre des valeurs de savoirs, d’égalité et de
justice de la société? (2)
Si cette question est d’actualité ici, elle se pose aussi ailleurs. Des
réformistes et des démocrates, il y en a de toutes cultures et nationalités,
croyants ou non croyants, même si souvent ils ne parlent pas par peur de
représailles. Ce n’est pas que la majorité serait contre eux, mais certains
conservateurs ont des moyens de coercitions qui font taire encore davantage la
majorité silencieuse! « [D]ans une
situation pareille, les souffrances d’une mère comptent moins que la terrible
machine qui nous broie. » (Mouawad, p. 58)
Si, au nom de Dieu, cela peut être vrai dans un petit village du Liban,
d’Irak, d’Israël ou d’Afghanistan, cela peut aussi l’être dans le « Bible Belt » États-uniens ou dans certains petits villages québécois et
canadiens. Un athée ferait parfois mieux de ne pas s’afficher comme tel et de
ne passer que pour un non pratiquant aux yeux du village. Un homosexuel ne
devrait pas s’afficher, surtout aux États-Unis où la loi contre la sodomie a
encore bien des supporteurs malgré un jugement rendu par la cour suprême le 26
juin 2003. Certains États ont d’ailleurs contourné ce jugement en n’appliquant
cette loi qu’aux homosexuels ou en condamnant la sollicitation pour sodomie.
(Voir Sodomy Laws in the United States) Bref, au pays des libertés il y a
encore bien des tabous religieux qui sont respectés! Ce n’est donc pas le
travail de quelques mois que de changer cela.
Si les croyances sont au Pouvoir, changer les mentalités ne sera pas
facile. Cela ne peut se faire qu’en séparant l’éducation des faits
(scientifiques) de celle des des croyances. Mais, obtenir une éducation laïque
et scientifique n’est pas une mince affaire si ce sont les groupes religieux et
fondamentalistes qui sont au pouvoir et qui ont la responsabilité d’éduquer
selon leurs traditions et coutumes. L’éducation pourrait ne pas s’appliquer aux
filles par exemple. Si ici il ya longtemps que l’on parle d’égalité dans
l’éducation, ailleurs ce n’est pas nécessairement le modèle qui prime :
« La discrimination à
l’endroit des filles commence très tôt. Les coutumes accordent souvent la
préférence aux garçons. Si les parents n’ont pas les moyens de payer des études
à tous leurs enfants, seuls les garçons fréquenteront l’école. Si les
collectivités sont trop démunies pour construire des écoles distinctes pour les
filles et pour les garçons, alors elles le feront pour ces derniers seulement.
Les fillettes doivent souvent faire des travaux ménagers et assumer des
responsabilités domestiques qui leur laissent peu de temps pour l’école. »
(ACDI)
Par contre, au nom du multiculturalisme, certains pourraient être tentés
d’importer ce modèle au nom de leurs
coutumes, croyances ou cultures, ce qui irait à l’encontre de nos droits
et libertés individuelles. C’est là que les deux piliers dont le Canada est le
plus fier s’affrontent : les droits de la personne et le multiculturalisme
(l’interculturel dans le cas du Québec).
Quand je dis cela, je ne vise pas les communautés culturelles dans leur
ensemble, mais certainement quelques éléments plus intégristes de ces
communautés. Mais attention, nous avons aussi nos intégristes pure laine qui
voudraient eux aussi revenir à des valeurs ancestrales sur les même principes
juridiques de l’appel à une culture et une tradition passée ou religieuse. Il
faut en être conscient. Nous avons nos fascistes dans nos rangs.
Par opposition, la majorité, au contraire, est fière de voir ses enfants
aller à l’école et même à l’université, car ils ont souvent quitté leur pays et
ses coutumes qu’ils jugeaient comme un empêchement à leur développement et à
celui de leurs enfants. D’ailleurs, et c’est universel, les parents cherchent
généralement le bonheur et la sécurité pour leur progéniture. Leur
développement. Sur ce point, on se ressemble et on devrait s’entendre. À
Montréal il n’est d’ailleurs pas rare de croiser des filles de toutes
nationalités et confessions religieuses à l’université, tant francophones
(Montréal et UQAM) qu’anglophones (Concordia et McGill). Certaines peuvent
porter le voile, d’autres non, même si elles sont de culture musulmane. Tant
que c’est un choix personnel et non une obligation qui leur est faite, cela
respecte leurs droits comme celui de porter le jeans, la robe, ou la minijupe.
Si la cornette de sœur est moins fréquente, c’est tout simplement que les
nouvelles vocations sont une rareté chez nous.
Cependant, il y a des idéologues qui vont s’opposer à cette émancipation
au nom d’une culture ou d’une idéologie, qu’elle soit ethnique ou religieuse.
On doit donc défendre nos droits et libertés fondamentales face à ces dérives
faites au nom d’une culture ou d’une religion, mais cela s’adresse autant à des
juifs, musulmans, chrétiens ou toutes autres sectes, car certains de ces
idéologues sont aussi de souche. On ne le répétera jamais assez je crois. Par
exemple, à la Mission de l’Esprit-Saint de Joliette…
« De plus, les jeunes filles
qui sont membres de cette communauté se marient souvent à l'âge de 14 ans et
abandonnent l'école pour faire des enfants et s'occuper d'eux. « Les
filles se marient vraiment à 14 ans, j'en ai vu. Et une fois mariées, elles ne
vont plus à l'école », assure une ex-membre. » (SRC Nouvelles/Montréal, Mission de
l'Esprit-Saint: Des résultats scolaires désastreux)
Il faut donc faire très attention aux dérives, aux généralisations et
aux préjugés faciles même s’il ne faut pas craindre de poser certains
principes. Par contre, ce peut être difficile, car notre constitution reconnaît
d’abord Dieu et ensuite la primauté du droit. La PARTIE I de la CHARTE CANADIENNE
DES DROITS ET LIBERTÉS débute d’ailleurs sur ces mots :
« Attendu que le Canada
est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la
primauté du droit ». (3)
En conséquence, Dieu
est premier, le droit second, ce qui fait que si l’on parle au nom de Dieu,
peut-on remettre en cause non seulement les droits, mais aussi les lois? Les
idéologues de tout acabit peuvent donc en profiter. Cela est plus inquiétant de
mon point de vue.
Dieu devrait-il être enlevé de notre constitution? Je crois que oui pour
raison de messages contradictoires de sa part à moins que tous s’entendent sur
un et un seul message de Dieu.
Malheureusement nous n’avons aucun texte écrit et signé de sa main pour nous
guider, car il est soi-disant toujours passé par des intermédiaires. Même si je
crois en Dieu, j’ai toujours un doute sur ce qu’on nous en dit ou sur ceux qui
parlent pour lui. Je suis aussi conscient que c’est une croyance tant de croire
en son existence qu’en sa non existence sous quelques formes que ce soit. Cela
permet de relativiser les choses. D’ailleurs, même Nietzsche à écrit sur
Dieu : « Serait-ce possible! Ce vieux saint dans sa forêt n’a pas
encore entendu dire que Dieu est mort! »
(Nietzsche, F., 1998, p. 17)
Même si la religion a perdu sa place dominante depuis quelques décennies
au Québec, c’est un gain encore fragile. Certains groupes et individus
préfèrent encore une éducation idéologico-religieuse pour leurs enfants plutôt
qu’une éducation laïque et scientifique malgré toutes les dérives possibles
d’une telle formation. Il n’y a pas si longtemps Le Devoir nous apprenait
« que certaines écoles privées de
confession chrétienne, malgré le fait qu'elles soient reconnues par le
ministère, ne respectent pas le régime pédagogique » et que le
créationnisme est enseigné dans certaines d’entre elles. (Lussier, Judith,
2006) Pensons aussi à l’enseignement du Dessein intelligent qui n’a aucun fondement scientifique sauf l’appui de groupes religieux et
du Président George W. Bush aux
États-Unis. Même s’il fut refusé dans plusieurs États, ce n’est pas partout. Par exemple, « Kansas schools can teach 'intelligent design' » (USA Tooday,
2005-11-08).
Certains obtiennent aussi des dérogations pour faire l’école à la maison
ou dans la communauté au détriment de la qualité de l’éducation de leurs
enfants. C’est notamment le cas de certaines sectes comme la Mission de l'Esprit-Saint dont nous
avons parlé plus haut. Ces dérives datent de bien avant celles des
« accommodements raisonnables ». En fait, il y a des principes non
négociables qui doivent être affirmés, comme l’égalité des droits entre hommes
et femmes et le droit de disposer de son corps et de son esprit par exemple. Il
y a donc une limite à imposer nos choix aux autres, même à nos enfants.
Question de logique cependant, ces limites ne sont pas les mêmes dans toutes
les sphères de la vie. Il y a une différence entre vérifier ce que son enfant
regarde à la télé ou imposer qu’il ne soit pas opéré s’il en a besoin, au
risque de mourir au nom d’une croyance religieuse! La Foi ne doit pas devenir
un permis de tuer par procuration par exemple. Il y a aussi une différence
entre punir une enfant de 13 ans qui s’est saoulée dans le sous-sol et imposer
l’avortement contre son gré à sa fille. On peut par contre lui expliquer notre
point de vue et lui faire rencontrer des professionnels.
Nawal aurait certainement aimé que ces limites soient posées dans son
milieu pour assurer sa liberté de choix :
« Selon Marie McAndrew,
titulaire de la chaire en relations ethniques et professeure à la faculté des
sciences de l'éducation de l'Université de Montréal, «le gouvernement ne peut
pas empêcher les parents d'envoyer leurs enfants à l'école de leur choix, mais
il doit protéger les droits des enfants. C'est comme une garde partagée!».
Interrogée au sujet de
l'enseignement donné aux juifs hassidiques, elle explique que «l'enfant doit
connaître ce qui existe à l'extérieur de sa religion et savoir qu'il peut en
sortir». Reste à savoir si un enfant baignant dans un apprentissage
exclusivement centré sur la Bible peut s'ouvrir à d'autres perspectives... » (Lussier, Judith, 2006)
Il ne faudrait jamais oublier qu’une croyance est une croyance, non une
vérité vérifiable et vérifiée. Croire n’est pas une preuve. La religion, comme
toutes croyances, est donc du domaine privée. On ne peut, ni ne doit, l’imposer
à ceux qui n’y croient pas ou à ceux qui la pratiquent autrement. On ne peut
non plus leur imposer nos dictats et obligations. Par contre des accommodements
et des aménagements sont possibles.
Si on ne peut imposer une salle de prière dans un lieu laïc ou public,
il est peut être possible d’avoir un espace communautaire non confessionnel où
certains iront prier et d’autres méditer. Il y a tellement d’espaces réservés
au commerce de la boisson gazeuse et du junk food en machine distributrice à
certains endroits qu’il y a probablement moyen de faire quelque chose de ce
côté dans certains cas. Et si cela servait à diminuer la malbouffe, ce serait
déjà ça de pris!
Mais, si ce lieu ne peut être dans l’enceinte même de l’édifice (comme
les bureaux de la ville, une université, un cégep ou une entreprise) pour des
raisons de neutralité ou d’espaces par exemple, il pourrait être ailleurs.
Nombre d’églises ferment et fermeront dans les prochaines années alors il serait peut-être facile d’en transformer
quelques-unes en lieu communal où il y aurait aussi bien des espace-temps
culturels, des « services » et des mariages civils, que des espaces
de recueillement qui pourraient servir aux citoyens et aux passants du secteur. Un bouddhiste
pourrait y croiser un musulman, une personne âgée qui est allé dire son
chapelet et un punk athée qui est allé faire le vide… Pourquoi pas? C’est cela
une communauté.
Il ne faudrait pas non plus mélanger ethnicité et religions; racisme et
laïcisme; car tous les arabes ne sont pas musulmans et tous les musulmans ne
sont pas arabes. Tous les chrétiens ne sont pas catholiques comme tous les
juifs ne sont pas hassidiques. Cela est dit.
Être contre certaines coutumes n’est pas nécessairement du racisme non
plus. Ce peut être une façon de défendre des valeurs démocratiques et largement
partagées que l’on juge non négociables. Des valeurs d’ouverture envers les
femmes par exemple. Un exemple serait la scolarisation des filles. Certaines
religions sont contre, pas nous. La scolarisation est obligatoire nonobstant la
religion. C’est une valeur démocratique non discutable ici peu importe les
croyances. Pourtant certains y dérogent. Ça ne devrait pas.
Enfin, juifs et palestiniens sont des Sémites (4) par exemple, donc de
la même ethnie. Pourtant, ils s’affrontent, car
la croyance religieuse mêlée à la politique les sépare tout comme elle a
séparé les irlandais catholiques et protestants pendant des décennies. C’est
dire que si la culture religieuse peut être porteuse de valeurs humanistes,
elle peut aussi être porteuse de valeurs contraires à la démocratie. On a alors
le devoir de le dire même si une part de notre culture est d’héritage
religieux. On ne doit jamais oublier qu’une religion est d’abord une croyance
même si on y croit. Et au nom d’une croyance, il y a des choses qui ne sont pas
acceptables, comme de menacer, d’emprisonner ou d’exécuter une personne parce
qu’elle raisonne tout simplement.
Cette pièce fait donc réfléchir par son universalité. Elle traverse
aussi le temps, car ces questions ont traversés toutes les sociétés et les
époques. Même si on les règles, elles réapparaîtront sous d’autres formes, en
d’autres lieux et en d’autres temps, car elles sont au fondement même de
l’Homme : partager et s’entraider ou thésauriser et dominer? Certains
verront d’ailleurs des filiations entre Incendies
et certaines œuvres classiques. D’autres
avec certains mythes fondateurs de la civilisation, comme celui d’Oedipe. Mais,
Incendies ne peut y être réduit, car
cette pièce puise un peu dans tout cela et le dépasse en même temps comme le
tout dépasse la somme des parties. Sur ce, bonne lecture, car c’est une pièce
qui éveille et suscite la réflexion. Si elle est reprise au théâtre, je vous la
conseille.
Notes
1. On cite couramment Jean-Jacques Rousseau disant «l'homme nait naturellement bon, c'est la
société qui le corromps. »
C’est donc cette phrase que j’ai paraphrasé. Par contre dans le livre
Émile ou de l’éducation, j’ai trouvé ce
passage beaucoup plus juste et significatif pour notre propos :
« Qu'il sache que l'homme est
naturellement bon, qu'il le sente, qu'il juge de son prochain par lui-même ;
mais qu'il voie comment la société déprave et pervertit les hommes ; qu'il
trouve dans leurs préjugés la source de tous leurs vices ; qu'il soit porté à
estimer chaque individu, mais qu'il méprise la multitude ; qu'il voie que tous
les hommes portent à peu près le même masque, mais qu'il sache aussi qu'il y a
des visages plus beaux que le masque qui les couvre. » (Rousseau, Jean-Jacques, 1762, Émile ou l’éducation, Livre IV, p. 28
édition électronique préparé par
Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi, à
partir du livre de Jean-Jacques Rousseau, Émile ou de l’Éducation. (1762).
Voir : http://classiques.uqac.ca/
section des auteurs classiques et voir Jean-Jacques Rousseau pour en
consulter la copie.
2. Je ne dis pas
société d’accueil, car si nous avons accueillis des fondamentalistes religieux,
nous en avons aussi produits.
3. La CHARTE
CANADIENNE DES DROITS ET LIBERTÉS CANADIENNE est disponible en ligne à
l’adresse suivante :
http://lois.justice.gc.ca/fr/Charte/index.html
4. Se dit des
différents peuples provenant d'un groupe ethnique originaire d'Asie occidentale
et parlant des langues apparentées (sémitique). Les Arabes, les Éthiopiens, les
Juifs sont des Sémites. (Petit Robert 2007 sur CD-ROM)
Références et Hyperliens
(J’ai mis quelques
références concernant les juifs et les
musulmans vu qu’ils sont plus souvent stigmatisés que les chrétiens par
exemples ou que les philosophies orientales. Ces dernières suscitent même une
certaine sympathie de notre part contrairement aux religions. Par exemple, même
sans fondement scientifique, certaines médecines
douces sont populaires auprès du public malgré toutes les réserves que l’on
pourrait avoir à leur sujet. Si vous voulez en savoir plus sur ce sujet voir
« Alternative Medicine »
dans le dictionnaire sceptique (en anglais): www.skepdic.com/)
ABITBOL, Michel,
2005, Les amnésiques -Juifs et Arabes à
l’ombre du conflit du Proche-Orient, France : Perrin, 408 p, ISBN :
2-262-01967-3 - www.editions-perrin.fr/
ACDI (Agence
Canadienne de Développement International),
L’éducation des filles, Une prophétie
qui se réalise?, www.acdi-cida.gc.ca/CIDAWEB/acdicida.nsf/Fr/REN-218125534-PZP
CHEBEL, Malek, 2005, L'Islam et la
Raison, France : Perrin
Chélini,
Jean, non daté, Moments
d'Histoire, XVIIe siècle, Galilée, condamné pour excès de foi... scientifique,
in Historia mensuel : www.historia.fr/data/mag/711/71103201.html
Dessein
intelligent : http://fr.wikipedia.org/wiki/Dessein_intelligent
Geisser. Vincent, 2003, La
nouvelle islamophobie, Paris: La découverte
Hajji, Sadek, et Marteau, Stéphanie, 2005, Voyage dans la France musulmane, France : Plon
Handfield, Michel (Commentaires de), Incendies, 5 novembre 2006, in Societas Criticus Vol. 8 no. 7.
Hertzberg, Pr. Arthur, 2004, Les
origines de l’antisémitisme moderne, France : Presses de la
renaissance
Judith Lussier, 2006, Foi et
éducation - Le créationnisme se répand au Québec, in Le Devoir, édition du
samedi 23 et du dimanche 24 septembre 2006 : www.ledevoir.com/2006/09/23/118606.html
MOUAWAD, Wajdi, 2003,
Incendies (Pièces), France :
Actes Sud et Québec : Leméac, 96 pages, ISBN 2-7427-4373-1 / F79759, www.actes-sud.fr
Nietzsche, F., 1998 (1883-5), Ainsi
parlait Zarathoustra, France: Maxi-poche classiques étrangers.
Rabkin, Yakov M., 2004, L’opposition
juive au sionisme, Québec : Les presses de l’université Laval
Rousseau, Jean-Jacques, 1762, Émile ou l’éducation, Livre IV, édition électronique préparé
par Jean-Marie Tremblay, professeur de
sociologie au Cégep de Chicoutimi, à partir du livre de Jean-Jacques Rousseau,
Émile ou de l’Éducation. (1762). Voir : http://classiques.uqac.ca/
Rousseau, Jean-Jacques, 1992 [1762], Du
contrat social, France: Grands écrivains. Il est aussi disponible sur http://classiques.uqac.ca/
SRC Nouvelles/Montréal, École Toldos Yakov Yosef. Entorse à la loi,
Mise à jour le mercredi 6 septembre 2006 à 17 h 22 :
SRC Nouvelles/Montréal, Mission de l'Esprit-Saint :
Le ministre défend l'école à
la maison, Mise à jour le vendredi 29 septembre 2006 à 21 h
30 : www.radio-canada.ca/nouvelles/societe/2006/09/29/006-reax-mission-esprit-saint.shtml
Des résultats scolaires
désastreux, Mise à jour le vendredi 29 septembre 2006 à 11 h 30,
www.radio-canada.ca/nouvelles/societe/2006/09/28/004-mission-saint-esprit.shtml
Une école clandestine à
Montréal-Nord, Mise à jour le mardi 3 octobre 2006 à 22 h
53 : www.radio-canada.ca/nouvelles/regional/modele.asp?page=/regions/Montreal/2006/10/03/010-Clandestine-Ecole-ES.shtml
L'école clandestine
fermée, Mise à jour le mercredi 4 octobre 2006 à
23 h 02 : www.radio-canada.ca/nouvelles/regional/modele.asp?page=/regions/Montreal/2006/10/04/008-Esprit-Daint-Ministere.shtml
L'éducation de 144
élèves en jeu, Mise à jour le mardi 3
octobre 2006 à 14 h 07 : www.radio-canada.ca/nouvelles/regional/modele.asp?page=/regions/Montreal/2006/10/03/006-Enseignement-Mission-E-S.shtml
St-Onge, J-Claude, 2002, Dieu est
mon copilote, Montréal: écosociété
Sodomy Laws in the United
States: www.sodomylaws.org/usa/usa.htm
Toppo, Greg, Kansas schools can
teach 'intelligent design', in USA Tooday, 2005-11-08: www.usatoday.com/tech/science/2005-11-08-kansas-science-standards_x.htm
Arrière de la couverture d’Incendies de Wajdi MOUAWAD.
Lorsque le notaire
Lebel fait aux jumeaux Jeanne et Simon Marwan la lecture du testament de leur
mère Nawal, il réveille en eux l'incertaine histoire de leur naissance : qui
donc fut leur père, et par quelle odyssée ont-ils vu le jour loin du pays
d'origine de leur mère ? En remettant à chacun une enveloppe, destinées l'une à
ce père qu'ils croyaient mort et l'autre à leur frère dont ils ignoraient l'existence,
il fait bouger les continents de leur douleur : dans le livre des heures de
cette famille, des drames insoupçonnés les attendent, qui portent les couleurs
de l'irréparable. Mais le prix à payer pour que s'apaise l'âme tourmentée de
Nawal risque de dévorer les destins de Jeanne et de Simon.
Annexe
Le multiculturalisme à l'encontre de l'égalité?
Michel Handfield, M.Sc. sociologie,
Montréal, le 27
janvier 1998
(Texte paru dans La Presse, 28 janvier 1998, p. B 2)
Suite au jugement de l'Honorable juge Monique Dubreuil, qui a laissé
sortir deux violeurs avec une peine à purger «dans la collectivité» vu le «contexte
culturel particulier à l'égard des relations avec les femmes» chez les
haïtiens, cela soulève une question fondamentale: le multiculturalisme va-t-il
à l'encontre de l'égalité?
Prenons un autre exemple pour souligner l'incongruité de la chose. Si au
lieu d'un viol, il s'agirait de relations de travail. Des haïtiens auraient-ils
le droit d'engager d'autres haïtiens à un salaire moindre que nos normes
puisqu'il n'y a pas de telles normes en Haïti? Je crois que non. Pourquoi en
est-il autrement des relations hommes/femmes?
On voit là que le recours aux cultures, le multiculturalisme si cher à
Trudeau, va à l'encontre de l'égalité entre les individus. On se doit de
choisir si nous sommes une société égalitaire ou multiculturelle. On ne peut
être les deux à la fois comme l'a montré Alain Finkielkraut dans La défaite de la pensée (Gallimard,
1987). Un livre à lire pour nos Honorables juges, politiciens et Citoyens pour
dépasser cette illusion du multiculturalisme et de l'égalité.
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Égypte : Le blogueur "Kareem Amer" condamné à quatre ans
de prison
Reporter sans frontières (www.rsf.org/) 22.02.2007
Abdel Kareem Nabil Suleiman ("Kareem Amer")
a été condamné, le 22 février 2007, à quatre ans de prison pour avoir
"incité à la haine de l'islam" et insulté le président égyptien sur
son blog. "Cette sentence est honteuse. Hosni Moubarak avait promis il y a
trois ans presque jour pour jour de supprimer du code pénal les peines de
prison pour les délits de presse. La condamnation de Kareem est un message
d'intimidation adressé au reste de la blogosphère égyptienne, qui avait prouvé
ces dernières années qu'elle constituait un contre-pouvoir efficace aux dérives
autoritaires du gouvernement ", a déclaré Reporters sans frontières.
La suite sur www.rsf.org/article.php3?id_article=21074
Cuba : Reporters sans frontières réagit aux déclarations du
ministre de la Communication à propos d'Internet
Reporter sans frontières (www.rsf.org/)
13.02.2007
Le ministre de la Communication, Ramiro Valdes, a
déclaré, le 12 février 2007, qu'il considérait Internet comme un "outil
d'extermination globale" (Tool for global extermination) et qu'il fallait
impérativement que cette "arme sauvage" (wild colt) soit
"contrôlée". L'officiel cubain a par ailleurs expliqué que si très
peu de ses citoyens accédaient à Internet, la faute en revenait à l'embargo
américain, qui empêche son pays de se raccorder au Web dans de bonnes
conditions. Reporters sans frontières rappelle que le retard de Cuba en matière
d'Internet résulte avant tout de la volonté du gouvernement de contrôler la
circulation de l'information sur son territoire.
La suite sur www.rsf.org/article.php3?id_article=20998
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Commentaires livresques : Sous la
jaquette!
L’argent dans la culture moderne
Commentaires de Michel Handfield autour du livre d’Alain Deneault, (textes choisis et présentés
par), 2006, George Simmel. L’argent dans la culture moderne et autres
essais sur l’économie de la vie,
Québec : PUL (www.pulaval.com) / Éditions de la maison des sciences de l’homme, Paris (www.msh-paris.fr/) Publié avec le concours du Goethe-Institut
22 mars 2007
Il y a déjà quelques temps que j’ai terminé la lecture de ce livre, mais
avant d’en parler je voulais voir la place que la culture occuperait dans la
campagne électorale québécoise. A quelques jours des élections, elle est faible,
très faible. (1) Pourtant, les pugilistes en liste pour le poste de premier
ministre du Québec promettent de l’argent neuf pour à peu près tout; tout sauf
la culture faut croire.
L’argent dans la culture moderne et autres essais sur l’économie de la
vie serait une lecture à leur suggérer, car l’argent est culturel. C’est un code
culturel. Avant l’argent, la personne était attachée à la propriété et à son
travail. Elle échangeait son produit contre un autre. Le travail contre le
logement et la nourriture par exemple. Avec l’argent, cette relation s’est transformée
:
« Une telle adéquation entre
la personnalité et les relations matérielles en vigueur dans les temps de
l’économie naturelle, l’économie de l’argent la dissout. À tout moment, elle
insère entre la personne et la chose qualifiée de manière déterminée l’instance
totalement objective en soi dépourvue de qualité que sont l’argent et la valeur
monétaire. Elle produit un éloignement entre la personne et la propriété en
faisant intervenir une médiation dans le rapport entre les deux. De ce fait,
elle a à ce point différencié la cohésion jadis étroite entre l’élément
personnel et l’élément local que je peux aujourd’hui recevoir à Berlin mes
revenus de compagnies ferroviaires américaines, d’hypothèques norvégiennes ou
de mines d’or africaines. Cette forme de propriété agissant à distance, que
nous admettons aujourd’hui comme allant de soi, n’a été rendue possible qu’à
partir du moment où l’argent est intervenu, avec sa double faculté de séparer
et de relier la propriété et le
propriétaire. » (p. 22)
L’argent est culturel. On n’en sort pas, car il faut d’abord y croire
pour que le système monétaire existe et fonctionne. Physiquement, l’agent n’est
qu’une pièce de métal, un chiffre sur un relevé bancaire ou un imprimé, d’autant
plus qu’il n’est plus garantie par une convertibilité or depuis les Accords de Bretton Woods de 1944. (2) Il est même de plus en plus électronique en
fait, circulant à travers le monde d’un clic de souris. Vos dépôts à la caisse
de votre quartier peuvent être en partie investit sur les marchés
internationaux et servir à capitaliser l’entreprise asiatique qui concurrencera
votre employeur et vous fera peut être perdre votre emploi d’ici quelques mois
s’il ne réagit pas promptement! Ce qui fait qu’on lui reconnaît une valeur,
c’est une convention de la même manière que l’on donne une valeur à une toile
de Picasso ou de Gauguin chez les collectionneurs. D’autres toiles peuvent être
tout aussi belles, mais sans valeur, car il n’y a pas de marché pour l’artiste tout
simplement. Du moment où il y aura un marché, il prendra de la valeur, car la
valeur est question de marché et l’argent est l’outil qui facilite cet échange
par convention!
Ici attention, car il y a valeur et valeur! La valeur d’échange, la
valeur d’usage, la valeur sentimentale... sont toutes des formes de valeurs,
mais inégales. Certaines choses ont un prix, c’est leur valeur d’échange. C’est
ce qui fait qu’une douzaine d’œufs coûtent moins cher qu’une vache par exemple.
D’autres ont une valeur d’usage, c’est-à-dire la valeur que nous accordons à ce
que nous achetons pour l’utilisation que nous en ferons. Par exemple, pour le
fermier, une trayeuse automatique peut avoir une plus grande valeur d’usage que
sa valeur d’échange (son prix), car il sait qu’il tirera un profit plus grand
de son usage que ce qu’il lui aura coûté. Pour l’urbain, par contre, cela
n’aurait aucune valeur d’usage par manque d’utilité. Quant à la valeur sentimentale, c’est la
valeur que nous accordons à des choses qui nous tiennent à cœur, mais qui
n’auraient peut être aucune valeur d’échange ou d’usage pour d’autres, comme un
objet fait par votre mère ou votre grand-père. Enfin, il y a certaines choses
si distinctes, qu’on dit qu’elles n’ont pas de prix. C’est le cas de certaines
œuvres d’arts ou architecturales que l’on ne pourrait plus refaire par exemple,
comme la chapelle Sixtine. Mais, c’est aussi la photo d’un enfant qui reçoit son premier vélo rouge! Il y a d’ailleurs une série
de publicités de carte de crédit qui joue très bien là-dessus : il y a des choses qui ne s’achètent pas,
pour tout le reste il y a MasterCard. (3)
La valeur est donc un concept particulier et multi facettes. Cette
explication, qui peut sembler loin de la culture, est au contraire très importante
pour comprendre les problèmes qui concernent son financement. Notre système est
basé sur des lois commerciales et de marché alors que la culture est d’abord
basée sur des principes artistiques; des critères qualitatifs de beauté et de
goût. L’art pour l’art, comme on le dit souvent, est appréciable, mais
difficilement quantifiable. Alors, comment financer la culture si elle n’entre
pas dans les paramètres du système économique? C’est là tout le problème.
On peut subventionner une industrie culturelle, mais la culture? Une imprimerie,
un diffuseur ou un presseur de disque, c’est de la production traditionnelle en
quelque sorte. Cela se quantifie et se finance. L’État peut justifier que
l’imprimerie à produit 50 000 livres et revues dans les derniers mois ou
qu’elle fait travailler 250 employés pour ainsi la financer. Mais, le contenu,
que ce soit de l’écrit ou de la musique, ça l’État a de la difficulté à le
financer, car c’est impalpable et qualitatif; parfois, une question de goût, de
jugement de valeurs ou d’utilité, comme pour les revues en sciences sociales. La
création est donc difficile à financer selon ces critères alors que financer la
production de 25 000 CD ou de 2500 revues imprimés est beaucoup plus facile
à gérer pour le système. C’est ainsi qu’on finance beaucoup plus facilement les
producteurs, éditeurs ou distributeurs que les créateurs, même si sans ces
derniers il n’y aurait pas d’industrie culturelle. Le financement est par
principe basé sur des critères quantitatifs alors que la culture est par
essence qualitative! Elle manquera ainsi toujours de financement, même si on y
investit de plus en plus, car on finance surtout une industrie culturelle;
beaucoup plus rarement le créateur ou l’artiste qui est la base de cette
industrie, sauf de rares exceptions!
Pour changer les choses, il faudrait changer cette vision; considérer la
valeur qualitative des choses. Mais, ce n’est pas facile, car la culture de
l’argent fait en sorte que n’a de valeur que ce que l’on peut quantifier en
étalon monétaire :
« Aussi la valeur la plus
intrinsèque des choses souffre-t-elle de la convertibilité uniforme des
réalités les plus hétérogènes en argent, et c’est pour cela que le langage
désigne à juste titre ce qui est tout à fait particulier, ce qui possède une
distinction propre, comme « n’ayant pas de prix. » » (p.
30)
C’est donc un livre qui aide à comprendre bien des choses, surtout que
l’argent prend de plus en plus de place dans nos vies et en politique. Simmel a
vraiment réfléchi à l’argent et à son rôle social; à son influence aussi, car
elle a transformé notre relation aux choses et aux autres. Si j’ai pris ici
l’angle culturel proprement dit pour des raisons d’espace et d’actualité,
j’aurai pu en dire autant de tous les aspects qu’il regarde, car Simmel a fait
le tour du sujet à travers 5 textes : l’argent
dans la culture moderne; sur la
psychologie de l’argent; la différenciation
et le principe de l’économie d’énergie; l’argent
et la nourriture; et, finalement, le
tournant vers l’idée. Mais, même sur les autres thèmes on peut revenir à
l’idée de culture. Quant à l’introduction d’Alain Deneault, c’est une bonne
mise en contexte.
Je conseille donc ce livre aux citoyens (malgré une certaine complexité
conceptuelle, car il s’agit de philosophie tout de même) pour comprendre ce
qu’est l’argent, la culture et la culture de l’argent. On voit que les
philosophes n’ont pas toujours rêvé en couleur comme le veut la croyance
populaire. Ils ont aussi réfléchi et conceptualisé les choses pour nous les
faire comprendre. Mais je le conseille surtout aux milieux politiques et
économiques, car cette pensée devrait vous aider à bien structurer la votre! Je
le conseille enfin aux milieux artistiques et culturels, car vous devriez
trouver de l’intérêt dans cette lecture qui allie culture et argent.
Notes :
1. « Évacuée des débats par les formations
politiques, la vaste question culturelle force de plus en plus son entrée sur
la scène électorale. Après le Mouvement pour les arts et les lettres (MAL)
mardi, avant l'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et
de la vidéo (ADISQ) aujourd'hui, c'était hier au tour de l'Union des artistes
(UDA) de déplorer l'absence de considération pour la culture dans le cadre de
la campagne. » (Stéphane Baillargeon, Et la culture?, in Le Devoir, Édition
du vendredi 16 mars 2007: www.ledevoir.com/2007/03/16/135192.html
2. Accords de Bretton Woods : http://fr.wikipedia.org/wiki/Accords_de_Bretton_Woods
3. www.mastercard.com/ca/gateway/fr/index.html
Arrière de couverture
Couverture rouge : Éditions de la maison des sciences de l’homme, Paris;
Couverture blanche : PUL, Québec
« L’argent est la seule
création culturelle qui soit de pure énergie, qui s’est complètement abstrait
de son support matériel, n’étant plus qu’absolu symbole. Il est le plus
significatif des phénomènes de notre temps dans la mesure où sa dynamique a
envahi le sens de toute théorie et de toute pratique. »
La Philosophie de l’argent de Georg Simmel, dont la première édition
parut en 1900, suivie d’une édition augmentée en 1907, a donné à la sociologie,
au moment même où elle naissait en Allemagne, un tour très particulier. Comme
le marxisme, Simmel traite du capital et du travail ; comme Max Weber il traite des formations sociales et des forces
morales qui les portent. Mais il le fait en des termes qui, tout à la fois,
sont profondément marqués par le contexte spirituel de l’époque - en
particulier la « philosophie de la Vie » — et ont révélé toutes leurs potentialités critiques en ce qui
concerne l’interprétation de la « vie moderne ».
Les cinq textes de ce recueil portent précisément sur le rapport entre l’argent
et « l’économie de la vie ». Il ne s’agit nullement de parerga mais, dans l’optique de la
sociologie de la culture dont Simmel est le fondateur, d’études qui permettent
d’appréhender l’ensemble de sa pensée et qu’il a d’ailleurs en partie intégrées
à certaines de ses publications majeures, et notamment à son ouvrage-testament Lebensanschauung.
Traduction réalisée par Alain Deneault avec le concours de Céline
Colliot-Thélène, Philippe Despoix, Alexandre Dupeyrix, Daniel Meyer, Gérard
Raulet et Vanessa Vilkening.
Alain Deneault est
titulaire d’un doctorat de philosophie de l’Université de Paris-VIII portant
sur la philosophie de l’argent de Georg Simmel. Il est stagiaire post-doctoral
au Centre canadien d’études allemandes et européennes de l’Université de
Montréal.
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Reçu le 7 mars 2007 : Levaray, Jean Pierre, Putain d’usine suivi d’Après
la catastrophe et de Plan social,
France (Marseille), 2005, 224 pages, ISBN : 2 7489 0052 9 : www.agone.org
Cet ouvrage constitue une réédition des écrits d’usine de l’auteur
(Putain d’usine, L’Insomniaque, 2002), revue et augmentée de la chronique Après
la catastrophe (L’Insomniaque, 2002) et de l’épilogue industriel Plan social
(inédit).
« Tous les jours pareils. J’arrive au boulot et ça me tombe dessus,
comme une vague de désespoir, comme un suicide, comme une petite mort, comme la
brûlure de la balle sur la tempe. Un travail trop connu, une salle de contrôle
écrasée sous les néons – et des collègues que, certains jours, on n’a pas envie
de retrouver. On fait avec, mais on ne s’habitue pas. On en arrive même à
souhaiter que la boîte ferme. Oui, qu’elle délocalise, qu’elle restructure,
qu’elle augmente sa productivité, qu’elle baisse ses coûts fixes. Arrêter,
quoi. Qu’il n’y ait plus ce travail, qu’on soit libres. Libres, mais avec
d’autres soucis.
On a remplacé l’équipe d’après-midi, bienheureuse de quitter l’atelier. C’est
notre tour, maintenant, pour huit heures. On est installés, dans le réfectoire,
autour des tasses de café. Les cuillères tournent mollement, on a tous le même
état d’esprit et aussi, déjà, la fatigue devant cette nuit qui va être longue. »
###
Michel Handfield
22 mars 2007
Dans le cadre de la série Les
concerts paroles et musique Air Canada, j’ai vu le programme de l’OSM (www.osm.ca/) consacré au cinéma le 20 mars dernier.
Un excellent programme avec Jacques Lacombe comme chef. Il me faisait
plaisir de le revoir, car j’ai été abonné de nombreuses années à l’OSM, ce que
je peux moins me permettre, ayant du travail d’écriture pour tenir cette revue
à compte d’auteur. Mais, la soirée d’hier me donnait le goût de voir entre
3 et 5 concerts si possible par année.
Au programme il y avait :
1. Assassinat du Duc de Guise / Saint-Saëns
2. Gone with the Wind / Steiner
3. Citizen Kane / Hermann
4. Ben Hur / Rozsa
5. Cinama Paradiso / Moricone
6. Les uns et les autres / Legrand
7. An American in
Paris / Gershwin
Entracte
8. L’Homme
éléphant, Platoon, El Norte / Barber
9. Amadeus / Mozart
10. The Mission / Moricone
11. Séraphin / Cusson
12. Les Portes tournantes / Dompierre
13. La liste de Schindler / Williams
14. E.T. l'extra-terrestre/ Williams
Ce concert était animé par
Sophie Durocher avec, le comédien Guy Nadon qui a raconté quelques anecdotes
dans le ton de la soirée.
J’y allais pour le plaisir,
mais je n’ai pu m’empêcher de prendre quelques notes. D’abord, le chef a pris
la peine de donner quelques explications et cela fut certainement apprécié, la
salle Wilfrid-Pelletier étant pleine non seulement d’amateur de classique, mais
aussi de films. Ces explications aidaient à comprendre ce lien entre musique et
cinéma pour les novices de l’un ou l’autre art. Cela nous a aussi permis
d’apprendre qu’il a déjà joué dans un film. En effet, l’organiste dans Jésus de Montréal de Denis Arcand n’est
nul autre que Jacques Lacombe. Ce sera su sur l’internet!
Moi, qui voit plusieurs films
par année et qui aime le classique, ce que j’ai apprécié le plus fut le son
grandiose de l’orchestre. La musique de film prenait une toute autre dimension
que celle qu’elle a dans une salle de cinéma, même si je compare avec les films
que j’ai vu à la Place des Arts dans le cadre du Festival des Films du Monde dont j’ai pourtant souligné toute la
richesse de l’expérience sonore!
Certaines musiques, comme
celle de Les uns et les autres de Michel Legrand sont aussi une signature
cinématographique. On voit du Lelouch pour qui suit le cinéma! Tout comme
lorsqu’on a joué la musique de Citizen
Kane (1941), j’ai aussi pensé à un autre film du même réalisateur (Orson Welles) : le procès (1962), d’après le roman de Kafka, car je l’ai vu au
théâtre et je l’ai aussi en DVD. La
musique, c’est fort évocateur…
Ce concert m’a donnée une idée que je veux partager
avec l’OSM. Le palmarès des musiques de cinéma est si riche que ce genre de
concert pourrait faire l’objet d’un événement annuel, surtout lorsqu’on voit le
succès de l’événement qui vous a obligé d’ajouter une matinée le lendemain. Et,
pour un autre concert du même genre, je vous conseille une pièce : Van den Budenmayer de la double vie de Véronique (concerto en
E mineur), une musique signé Preisner. À craquer! (Preisne’s Music, Virgin/EMI,
7243 8 412582 0). Ce compositeur est assez prolifique, car on lui doit les
musiques de films comme Le Décalogue,
Le jardin secret, 3 couleurs : Bleu / Blanc /Rouge et
plusieurs autres.
Enfin, ce concert donnerait
certainement matière à un nouveau CD de l’OSM. Ce serait un cadeau parfait pour
les fêtes et une excellente promotion pour l’OSM.
---
Montréal, le 14 février 2007. Il
n’y a pas bien longtemps de cela, à peine quelques mois, Abé carré cé carré, le
Théâtre du Nouveau Monde et le Centre des auteurs dramatiques (CEAD) mettaient sur pied, à l’occasion des
représentations d’Incendies de Wajdi Mouawad au TNM, un projet qui avait pour
but d’inviter des auteurs libanais et israéliens à écrire sur la guerre qui a
éclaté cet été entre les deux pays. Tout au long des représentations, nous
avons invité les spectateurs à participer en donnant à la hauteur de leurs moyens
pour que ce projet puisse exister. Ils ont été nombreux et généreux ! C’est
bouleversant ! Grâce à eux, grâce aux comédiens, aux scénographes, aux équipes
techniques, ce projet aura lieu. Il aura lieu. Né de rien, de notre volonté
commune, il existera. MERCI. Nous étions ébranlés par cette guerre et la
manière avec laquelle nous avons essayé de répondre à cet ébranlement était
déjà le début d’une consolation.
Grâce aux dons, reçus à la suite d’une invitation à la « générale
bénéfice » et également récoltés soir après soir dans une boîte disposée dans
le hall du théâtre, nous avons pu réunir la somme de 20 000 $. Cette somme sera
donc répartie en quatre bourses de 5 000 $ qui seront attribuées à quatre
auteurs professionnels dont deux auteurs libanais et deux auteurs israéliens,
avec l’invitation d’écrire un texte à partir de ces événements d’ici janvier
2008. Le choix des auteurs, dont au
moins une pièce a déjà été jouée ou éditée, sera effectué en mai prochain par
un comité de sélection.
Au Moyen-Orient, la paix est devenue l’unique solution à une addition
flamboyante de violence qui dure depuis un demi-siècle. Les bombes ne tombent
plus sur le Liban : de plus, la réunion de Paris 3 aura permis de réunir une
somme impressionnante de plusieurs milliards de dollars pour venir en aide à
l’économie libanaise. Mais aujourd’hui c’est le spectre de la guerre civile qui
hante de nouveau l’ensemble de la région. On dirait une horrible sculpture
inspirée de Calder qui tourne et tourne sans arrêt rapprochant et éloignant
pour mieux rapprocher les cauchemars et les catastrophes d’hier et de demain.
Les gestes que nous tentons de poser de loin, ne peuvent en aucun cas avoir la
prétention d’apporter une solution, mais seulement faire exister un témoignage,
aussi humble soit-il, de notre désarroi. Et c’est déjà énorme.
Les équipes d’Incendies, d’Abé carré cé carré, du Théâtre du Nouveau
Monde et du Centre des auteurs dramatiques tiennent à remercier du fond du cœur
tous ceux et celles qui ont contribué si généreusement à ce projet qui, un
jour, nous l’espérons, permettra d’entendre ici quatre textes écrits par des
dramaturges venus des deux côtés du front.
###
Commentaires de Michel Handfield (21
février 2007)
Du
8 au 18 mars 2007, ce sera le FIFA : une chance de visionner des films que
l’on a rarement l’occasion de voir ailleurs. Ce festival me semble prometteur
en découvertes, car le film sur l’art constitue un regard et un point de vue
différent sur le monde; sur notre relation au monde.
L’art
étant communication, l’on peut parler d’une ouverture
« civilisationnelle » et communicationnelle! Ce festival pose donc un
regard intellectuel, mais aussi humain sur le monde, car si on peut penser le
monde à travers l’art, on peut aussi mettre la main à le fabriquer et à le
transformer, que ce soit par le cinéma ou l’architecture par exemple. Ce peut
être très basique comme très intello ou documentaire, mais dans tous les cas
c’est une prise de parole et de position, soit sur l’art ou par l’art!
Dans
les clips que j’ai vu, j’en ai notés quelques uns que j’aimerais bien
voir : OLIVER STONE; CITIZEN LAMBERT : JEANNE D'ARCHITECTURE; BEST-SELLER
À TOUT PRIX; L’ART DU NU et L'EXPRESSIONNISME ALLEMAND. Prometteurs, mais je ne
sais pas si je pourrais tous les voir question d’horaire et de choix, car en
tout ce festival nous offre 275 films de 25 pays! De quoi se faire tout un
programme de découvertes.
Le communiqué : Un quart de
siècle de pur bonheur!
Montréal, mardi 20 février 2007 - Le
Festival International du Film sur l'Art (FIFA) est heureux de célébrer avec
vous ses 25 ans en présentant les plus grandes réalisations artistiques d'hier
et d'aujourd'hui. Pour ce 25e FIFA, on saura vous en mettre plein la
vue et plein le cœur avec, notamment, l'œuvre provocatrice du photographe David
Lachapelle; la destruction des plus grands bouddhas au monde
en Afghanistan; les histoires sombres de James Ellroy; du Mali, la
musique de Habib Koité qui, appuyée par la narration de Yaya
Coulibaly, maître des marionnettes, prône l'harmonie entre les différentes
ethnies; des modèles nus qui ont enfin la chance de s'exprimer; la
poésie toujours aussi bouleversante de Léo Ferré; comment Marc Lévy,
P.D. James, Mary Higgins Clark, Douglas Kennedy et Ken
Follett conçoivent des histoires qui méritent d'être racontées avec
passion; et la fantastique adaptation libre de Carmen pour un groupe de
danseurs âgés de 40 ans et plus, réalisée par le grand chorégraphe d'origine
tchèque Jiri Kyliàn.
Existe-t-il
une personne mieux placée que Lorraine Pintal pour évaluer le travail
des artistes? Directrice du TNM, comédienne, scénariste, metteure en scène, Lorraine
Pintal assumera la présidence du 25e jury du Festival
International du Film sur l'Art. Elle sera entourée de l'écrivain Yann
Martel, du producteur de films documentaires Robert McNab, du
critique d'art et réalisateur indépendant Adriano Kestenholz et du réalisateur
et écrivain Alain Jaubert. Un jury fort pour une noce d'argent! Et
comment décrire notre première porte-parole en 25 ans? Marie Brassard,
dramaturge, comédienne et metteure en scène, semblait d'emblée la personne
toute désignée pour représenter les multiples facettes de l'expression
artistique.
Le
FIFA n'est pas seul à faire la fête cette année. Le Centre Pompidou, à
Paris, célèbre ses 30 ans d'existence et nous soulignons l'événement par une
sélection de ses plus prestigieuses productions : Man Ray,
Monsieur 6 secondes; David Hockney en perspective; Centre
Pompidou, l'espace d'une odyssée, etc. Du côté de la chaîne britannique BBC,
la série Arena (Chelsea Hotel, My Way, Saint Genet,
etc.), consacrée aux arts, compte aussi 30 bougies sur son gâteau. Nous lui
rendons hommage autant pour l'audace des sujets choisis que pour l'originalité
de leur traitement. Le FIFA n'est pas en reste pour son 25e
anniversaire et célèbre en grandes pompes les lauréats d'ici, grâce à l'appui
de Téléfilm Canada, en présentant 25 films canadiens primés en un quart
de siècle (Lodela, Ordinaire ou super, Splash, etc.).
Tout
comme le FIFA, le centre d'artistes Main Film célèbre cette année le 25e
anniversaire de sa fondation. Trois programmes d'œuvres récentes réunissant des
films de tous genres, animation, documentaire, fiction et expérimental (Chante
ma passion, Home, Magie blanche, etc.) viennent témoigner de
la vitalité du cinéma indépendant montréalais.
En
plus de présenter 275 films en provenance de 25 pays, le programme du festival
comprend un colloque international ainsi qu'une douzaine d'événements organisés
avec les artistes pour le public. Pour de plus amples informations, veuillez
consulter le www.artfifa.com
---
8-18 mars 2007
TOURNÉE NATIONALE
Centre culturel de Sherbrooke : Janvier 2008
Musée des Beaux-Arts du Canada (Ottawa) : Février 2008
Musée national des beaux-arts du Québec : Mars-avril 2007
TOURNÉE INTERNATIONALE
Maison européenne de la photographie, Paris (France) : Décembre 2007
Museum of Fine Arts, Boston (États-Unis) : Avril 2008
National Gallery of Washington (États-Unis) : Janvier 2008
Saint-Louis Art Museum (États-Unis) : Janvier 2008
Studio national des arts contemporains Le Fresnoy, Tourcoing
(France) : Décembre 2007
CITIZEN LAMBERT: JEANNE D'ARCHITECTURE
L'art, le nazisme et la
société de droit!
L’art du nu : Qu’est-ce qu’être modèle; La collaboration modèle/artiste; et
L’art homo érotique
PALMARÈS (Lauréats des films en
compétition)
---
ALT FLYTER
Musée d'art contemporain :
Vendredi 16 mars à 19h00
Samedi 17 mars à 14h00
Norvège/2006/Betacam/couleur/54 min/norvégien s.-t. anglais
Jan Wanggaard était champion
international de planche à voile dans les années 1980. Il a abandonné le sport
au sommet de sa carrière pour étudier le design industriel. Il s'est par la
suite établi dans les îles Lofoten, au nord de la Norvège, où il vit depuis 1989.
Pendant trois ans, l'équipe de tournage l'a suivi au cours de la conception et
de la réalisation de Planet Lofoten, une installation du système solaire aux
îles Lofoten à l'échelle de 1/200 millions.
Biographie
Né en 1958, Lars Nilssen a
réalisé plusieurs courts métrages maintes fois primés. Il a aussi réalisé un
long métrage documentaire, des émissions pour la télévision norvégienne dans la
série Bård og Lars på fisketur (Bård and Lars going Fishing) ainsi que des
vidéos musicaux.
Commentaires de Michel Handfield (15 mars 2007)
Cette idée de reproduire notre système solaire à l’échelle est
intéressante, car elle montre la place que nous y occupons : petite! Imaginez celle que
nous occupons dans l’univers. De quoi relativiser notre idée de puissance et de
maitre du monde.
On comprend pourquoi cette
idée a traversée l’esprit de Jan
Wanggaard. Sportif, centré sur les éléments, il y a un lien. On dit souvent des
sportifs qu’ils doivent être « groundés » (un anglicisme qui dit tout)
et Jan l’est. Ce projet est d’ailleurs dans cette optique : bien
comprendre où on se situe dans l’univers.
Ce n’est cependant pas un
projet facile. Il est même très physique. Il fallait être aussi sportif
qu’artiste pour le réaliser. Cela s’inscrit peut être dans l’esprit Luthérien –
John est norvégien – où, pour apprécier les choses, il faut souffrir un peu
avant de les obtenir.
Un projet intéressant à
suivre, tant physique que philosophique, que vous n’aurez pas l’occasion de
voir à moins d’aller aux îles Lofoten. Je vous recommande donc ce film pour
voir toute sa démarche ancré dans la philosophie, la tradition et une
conscience universelle.
Îles Lofoten: http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%8Eles_Lofoten
---
ONF : Dimanche 18 mars à 21h30
Estonie/2005/Betacam/couleur/52 min/estonien s.-t. Anglais
Tour à tour réalisateur de
films, caricaturiste, illustrateur de livre et artiste graphique, Priit Pärn
(né en 1946) est l'un des artistes les plus polyvalents d'Estonie. Il est
considéré comme l'un des plus grands caricaturistes de son pays. Dans ses
dessins comme dans ses films, il manie le paradoxe, et détourne les clichés et
les comportements stéréotypés. Pourtant, derrière cette ironie et cette
vivacité d'esprit transparaissent un propos grinçant et grave, une satire
sociale et politique teintée d'amertume. Professeur de cinéma, Pärn a formé une
nouvelle génération de cinéastes dans son pays. Bien qu'il soit sans contredit
le chef de file du cinéma d'animation estonien, un certain nombre d'autres noms
se détachent. Le film fait un survol de cette production en présentant les
cinéastes de la génération de Pärn, liés au groupe Esttranssürr, et enchaîne
avec la nouvelle génération, les étudiants de Pärn. Comment se fait-il que le
cinéma d'animation soit devenu un phénomène artistique si vigoureux en Estonie?
Membre de l'Union européenne depuis peu, l'Estonie saura-t-elle continuer sur
cette lancée?
Biographie
Né en Estonie en 1957, Hardi Volmer est réalisateur, scénographe et
musicien. Il a réalisé des films d'animation en 3D, des courts et longs
métrages, des séries pour la télévision et des spectacles télévisuels. Il a
également conçu environ 70 décors de productions théâtrales. Il réalise aussi
des films publicitaires et conçoit le graphisme de livres et d'affiches de
théâtre.
Filmographie
A Miraculous Christmas Night (1984); Enchanted Island
(1985); Spring Fly (1986); The War (1987); Works & Doings (1988); Animated
Self-Portraits (1989); Jackpot (1990); Incipit vita nova (1992); Twilight
Romane (1994); Firewater (1994); All My Lenins (1997); Somebody Else (1998);
Cannon of Love (1998), série; Primavera (1999); Paralysis (2000); Barbarians
(2003).
Commentaires de Michel Handfield (15 mars 2007)
Quand Priit Pärn a constaté
qu’il était plus facile de publier une caricature qu’un article scientifique et
un dessin ironique qu’un essai critique… sa voie fut tracée. C’est ce parcours
un peu particulier que nous fait découvrir ce film; pas toujours d’une façon
linéaire cependant, ce qui rend la chose moins facile d’accès mais plus
réaliste, car la vie est rarement linéaire.
Il est aussi intéressant de
voir la forme que peut prendre l’expression dans une société où la liberté
d’expression n’est justement pas la première des libertés. Elle devait prendre quelques détours elle
aussi.
Les dessins de Pärn ont ceci
de particulier : sous leurs allures caricaturales, ils posent un regard
ironique, critique et philosophique sur l’Europe de l’Est, ses citoyens et son
régime. Un regard qui était difficilement possible dans la littérature ou
l’essai à l’époque de l’URSS par exemple. Pensons à l’excellent film « LA VIE DES AUTRES » qui montre
comment le régime avait les intellectuels et les artistes à l’œil!
Ceci a certainement marqué
sont œuvre pour la suite des choses, c’est-à-dire après la chute de l’empire
soviétique, car son style ironique et satirique ne pouvait qu’aller plus loin
une fois ces contraintes tombées. La métaphore politique et sociale élevé en
art pictural. Un film intéressant si vous aimez le dessin, la caricature et la
politique. Si tout n’est pas bon à dire, on peut cependant en dévoiler beaucoup
plus par le dessin.
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CITIZEN LAMBERT:
JEANNE D'ARCHITECTURE
CITIZEN LAMBERT: JOAN OF
ARCHITECTURE
Canada, France/2006/HDCAM/couleur/52 min/anglais s.-t. français
Jeudi 8 mars à 19h00, Musée des beaux-arts
Dimanche 11 mars à 19h00, CCA
Jeudi 15 mars à 19h00, CCA
Extraits de la présentation
officielle
Incursion unique dans
l'univers de Phyllis Bronfman Lambert, architecte canadienne de renom,
militante urbaine, mécène (…). Citizen Lambert : Jeanne d'Architecture joue sur
les polarités — la biographie et l'autobiographie, l'image publique et l'image
privée, le regard extérieur et la sphère plus intime de l'introspection — pour
brosser un portrait vivant d'une personnalité si souvent présentée sous le même
jour dans la presse. L'histoire publique de Phyllis Lambert, qui célèbre son
80e anniversaire cette année, est racontée sous la forme d'un prologue
librement conçu comme une parodie de la séquence News on the March de Citizen
Kane. Ces « actualités » passent en revue les nombreuses réalisations de
Phyllis Lambert.
(…)
Cette femme publique
contraste avec la Phyllis privée, présentée par un abécédaire, un montage de
films tournés à la résidence personnelle de Lambert, qui révèle celle-ci au
naturel, « non censurée », selon ses propres mots.
De ce portrait composite se
dégage la figure d'une visionnaire pleine d'idées, d'une femme combative dotée
d'une saine ambition, d'un esprit libre.
Biographie de la
documentariste
Née à Paris, Teri Wehn-Damisch a été élevée à New York. Établie en
France depuis 1975, elle est productrice, réalisatrice et scénariste. Elle a
produit et réalisé plusieurs émissions des séries Zig Zag (1975-1981) et
Ping-Pong (1977-1981), à Antenne 2, ainsi que Domino (1984) et Tintam'arts
(1983-1985), produits par TF1.
Filmographie
Photographie et Société (1983); André dans les villes (1986), 5e FIFA;
Paris Mondial (1988); Art of the Western World: An Age of Reason, An Age of
Passion (1989); Hans Namuth, instants donnés (1989), 9e FIFA; Voyage surprise
d'Alexandre Trauner, 10e FIFA; Robert Morris: The Mind/Body Problem (1995),
primé au 14e FIFA; Luciano Fabro, Vade Mecum (1996), 16e FIFA; Sur la longueur
d'ondes de Michael Snow, zoom arrière (2001), primé au 20e FIFA.
Commentaires de Michel
Handfield (5 mars 2007)
Dès l’âge de 9 ou 10 ans
elle voulait être artiste, car elle n’aimait pas les discussions d’affaires
autour de la table familiale. Elle trouvait cette vie contraignante; la sentait comme une répression et voulait
partir. Elle s’est donc réfugiée dans les arts, notamment la sculpture qu’elle
a commencée dès l’âge de 9 ans. Plus tard, elle se marie à un homme d’affaire
français, Jean Lambert, pour sortir du giron familial. Elle l’a ensuite quitté
pour la rive gauche, allant vivre une vie d’artiste, mais conservera son nom.
Une façon de prendre sa distance face à sa célèbre famille!
Puis, dans les années 50, elle
est revenue diriger le projet du Seagram Building à New-York à la demande de
son père, Samuel Bronfman. Ce projet, qu'elle avait confié à Mies van der Rohe,
répondait à ses aspirations. Elle étudia donc l’architecture à la suite de celui-ci,
cette discipline rejoignant son goût de l’art et ses désirs de création et
d’utilité publique.
Pour elle, l’architecture
c’est créer dans le respect des gens (les usagers et les citoyens) et de
l’histoire. Un building c’est encré dans la vie, un lieu et l’histoire. Rien de
moins. Ce principe la conduira à faire de la recherche historique et
photographique sur l’architecture et à une nouvelle vocation de conservatrice
qui se traduira par des actions comme les
manifs pour sauver Milton Park,
la fondation d’Héritage Montréal et la création du Centre Canadien
d’Architecture! Une femme de passion et une histoire passionnante. A voir.
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L'art, le nazisme et
la société de droit!
Michel Handfield
Commentaires de autour de « l'expressionnisme allemand » et de « la légitimité de l'État et du
droit ».
5 mars 2007
Ce texte est un peu
particulier. Il se voulait d’abord autour d’un film, l’expressionisme allemand, et il se conclut finalement sur un
livre, La légitimité de l’État et du
droit autour de Max Weber, car j’étais plongé dans ce livre au moment où
j’ai vu ce film. Des questions ont alors surgit entre les deux que je ne
pouvais pas regarder ailleurs qu’ici; en ce temps. Le livre à la lumière du
film si je puis dire.
1. L'expressionnisme allemand
France/2006/Betacam/couleur, n. et b./62 min/français
FIFA, Samedi 10 mars à 21h30 et Mercredi 14 mars à 19h00,
Musée des beaux-arts
La bonne peinture pour
Hitler, c’était le figuratif très léché; l’art pictural presque photographique
par exemple. L’art moderne, l’expressionisme (c’est-à-dire l’expression des
sentiments du peintre, de sa vision du monde ou l’expression d’un
« désordre » selon le régime), était considéré comme
« dégénéré » par l’hitlérisme. Ce mot m’a accroché, car j’ai parfois
entendu ce terme de la bouche de certaines personnes que je qualifierais de
conservatrices; m’a agacé, car j’y vois une filiation entre conservatisme et
nazisme; et m’a surtout inquiété, car si c’était plus qu’une coïncidence, mais
une filiation avec le courant conservateur que nous connaissons.
Le régime avait beau dire
que c’était pour des critères esthétiques qu’il s’en prenait à cet art, il y
avait aussi des critères idéologiques. C’est du moins l’impression que m’ont
donné certains passages du film, où l’on associait cet art à la valorisation de
ce que le nazisme voulait justement effacer; comme les personnes différentes de
l’arien parfait, pur et bien formé de l’imagerie nazie! La rectitude naziste,
quoi! Le régime associait donc ces artistes, qui défiaient son ordre, à des
gens qui voient mal, des anarchistes ou des criminels. Des malades
pathologiques. Et pourtant, paradoxalement, certains de ces artistes étaient
membres du Parti National-socialiste de plein gré.
Mais l’art, en fait, c’est
une question de point de vue. Celui de l’artiste et celui qui regarde. Ils
peuvent se rejoindre ou être à des années lumières. On y a accès si on comprend
le code. Cela peut être intrinsèque, c’est-à-dire qu’il touche notre
sensibilité ou notre intellect, ou extrinsèque, c’est-à-dire qu’il est
appris : expliqué par l’artiste, une notice, un guide ou une formation en
art par exemple. Sinon, c’est l’indifférence. Inversement, s’il nous touche de
façon négative, c’est le rejet. Dans le cas du nazisme, ce rejet fut élevé en
système de valeurs négatives et tout art s’apparentant à certains de ces
critères était automatiquement considéré comme « reject »!
Mais attention, l’art n’est jamais totalement
maîtrisé non plus. C’est du moins mon point de vue, car s’il y a une part de
conscient, il y a aussi une part d’inconscient. L’artiste peut aimer ce qu’il a
fait sans savoir parfaitement pourquoi il l’a fait. C’est la part de l’art!
Un film qui donne des
réponses, mais qui soulève aussi des questions. Il est donc possible que
certains spectateurs veuillent aller plus loin et c’est tant mieux. Les outils
de recherche existent pour le faire, notamment l’internet. Il y a aussi des
bibliothèques spécialisées, comme la médiathèque du Musée d’Art Contemporain de
Montréal.
Enfin, une des questions
soulevée à la toute fin de ce film est importante je crois :
Est-ce qu’en créant le chaos l’expressionisme allemand aurait pavée la
voie au nazisme?
Pour ma part, je ne crois
pas à cette thèse, car le nazisme était tout le contraire du chaos. Mais pour
comprendre il faut un certain détour théorique.
En fait, l’ordre allemand
poussé à l’extrême a créé l’horreur dans un effet de contre productivité :
toute chose poussée à l’extrême a l’effet contraire à celui recherché nous a
déjà expliqué Illich dans un de ses essais. En cherchant la perfection à
l’extrême et, surtout, en l’appliquant aux Hommes, séparant ceux qui ne
répondaient pas aux critères de la race pure du régime, ils en sont venus à
souhaiter la destruction de tous ceux qui ne correspondaient pas au modèle
appliqué et qui pouvaient le menacer, par accouplement notamment. Les mariages
interraciaux étaient ainsi interdits. Une machination très rationnelle de
destruction des Hommes ne répondant pas à ces critères s’en est suivit. C’est
même le propre du nazisme : avoir appliqué les méthodes de l’organisation
scientifique du travail à son œuvre destructrice, avec transport des
prisonniers, entrepôts (les camps de la mort), laboratoire d’expérimentation
sur les humains, fours crématoires et probablement des usines de
transformations où certains restes humains ont probablement servi à la
fabrication de produits de consommation. Tout le contraire du chaos en fait.
Plutôt l’horreur de la rationalité poussée à l’extrême sur une fausse conception
idéologique.
Mais, l’expressionnisme
allemand n’était pas le chaos non plus. Il était par contre un rejet des règles
de droite, car la droiture n’empêche pas le mal, ni l’horreur. Elle n’empêche
pas davantage la corruption. Elle la couvre par contre de son voile moral. Il
n’y a pas nécessairement davantage d’abuseur chez les anarchistes que chez les
curés pourrait-on dire, mais ces derniers pourront plus facilement se cacher
sous la « droiture » de l’institution qu’ils représentent! Là est la
différence. C’est d’ailleurs ce qu’avait compris Don Juan, qui « ira jusqu’à porter un habit d’homme de Dieu,
car quoi de mieux pour protéger le fourbe que cet apparat. Ainsi vêtu, « je
pourrais même accuser mes détracteurs », car la vindicte populaire ne peut que
suivre l’homme de bien; l’homme qui a les apparats du bien! »
(Handfield) C’est la même fourberie que l’on retrouve dans le nazisme défenseur
du Bien et de la Morale.
Les expressionnistes ont probablement réagit
à l’avance à ce qui venait, en montrant que sous le parfait existait parfois
l’imparfait et sous l’imparfait le bien! Ils refusaient l’idée d’un modèle
universel et unique allemand. L’idée d’ordre, qui avait marqué l’histoire
allemande jusque là. C’était une révolution, mais pas le chaos.
L’expressionnisme était un acte révolutionnaire tranquille et antinazi avant le
temps. Il montrait qu’il n’y a pas qu’une façon d’être, de penser et d’agir
même s’il y a certains codes sociaux à suivre. Il montrait que l’individu peut
être libre et socialisé en même temps et malgré ses différences. En fait, les
expressionnistes montraient ce qu’étaient une véritable société libérale,
libéré des codes moraux qui étouffent la vie et la créativité. Ils offraient en
quelque sorte une vision républicaine française, ce qui était inacceptable vu
le conflit franco-allemand toujours en braise suite à la première guerre
mondiale.
Avec le temps,
l’expressionisme allemand aurait pu être salvateur, mais il n’a pas eu le temps
de changer la culture profonde et populaire, ce qui fait que dès que
l’Allemagne a craint le désordre, l’ordre nazi s’est imposé dans un mouvement
populaire et a fait taire la pensée libérale! Elle l’a même emprisonné, torturé
et tué par la suite.
***
Attention, vous n’aurez pas
tout ça dans le film, mais à la fois plus et moins, car il ouvre plusieurs
pistes, mais c’est au spectateur à faire la recherche qui l’intéresse par la
suite. J’ai choisi une piste, question de circonstances, mais il y en a
d’autres tout aussi intéressantes à explorer.
2. La légitimité de l'État et du
droit. Autour de Max Weber
On peut se poser la question
suivante : comment les Allemands en sont-ils arrivés là? Question pas
facile à répondre, mais légitime. J’oserai une réponse : par désir de
l’ordre et du droit. De légitimité de l’État. L’État étant le dépositaire du
pouvoir, il est par définition dépositaire
de la violence légitime! Les groupes qui ont droit d’user de ce moyen, ne
l’ont que parce que l’État le leur permet… à moins qu’ils n’en usent illégalement.
(Colliot-Thélène)
L’ordre, le film le montre,
faisait partie du paysage allemand bien avant Hitler; que ce soit sous le
régime de Bismarck ou de Guillaume II que Weber (1864-1920) a connu! La lecture
de « la légitimité de l’État et du
droit », un recueil de textes autour de Max Weber publié aux presses
de l’Université Laval me le confirme. Il y a quelque chose de culturel dans
cette notion d’ordre et probablement d’art légitime en Allemagne. Mais, il y a
aussi un goût de justice particulier, qui fait en sorte qu’une tension existe
entre dictature et démocratie :
« Une vision que l’on croyait voir condensée dans la phrase que Weber
aurait adressé au général Ludendorff lors d’un entretien en mai 1919, trouvant
l’assentiment enthousiaste du
militaire : « Dans une démocratie le peuple élit un chef auquel il
fait confiance. L’élu leur dit alors : maintenant, fermez là et
obéissez ». Le peuple et les partis ne peuvent plus se mêler des affaires
du chef (…) Après, le peuple jugera. » Ce qu’il avait présenté moins
brutalement dans les colonnes de la Berliner Börsezeing quelques mois
auparavant : « le « dicatateur », un homme de confiance des
masses, élu par lui-même, auquel celles-ci se subordonnent aussi longtemps
qu’il possède leur confiance. » (Herrera, pp. 213-4)
Pourtant, l’art expressionisme
a connu une période de fleuraison en Allemagne. Mais, ce fut avant Hitler,
notamment sous la république de Weimar (1919 à 1933), une période plus libérale
que les tenants de l’ordre ont pu qualifier de désordonnées, d’où un retour à
droite du balancier par la suite. Une réaction disproportionnée au
« paradis » perdu de l’ordre allemand? À la place du paradis
retrouvé, ils ont plutôt reçu l’enfer nazi en héritage! L’ordre poussé à
l’extrême au point d’éliminer physiquement ce qui n’était pas conforme à la
définition du bon citoyen et de l’ordre allemand : la dégénérescence.
Mais, attention, Weber ne
légitime pas le nazisme qui arrivera bien après lui, même si des membres et des
défenseurs de ce régime se sont référés à certains passages de ses écrits et se
sont même réclamés d’une forme de wébérisme.
D’ailleurs, et de l’autre
côté, les tenants de Weimar ont aussi pu s’en dire les héritiers, car Weber
était d’abord un théoricien qui travaillait avec le matériel qu’il
avait sous la main, l’Allemagne, et qui a beaucoup écrit! En quelque
sorte, ces régimes sont tous héritiers de certains traits historiques et
culturels Allemands que Weber a analysé et théorisé. Certains les ont cependant
montés en épingle au point de devenir psychotique, comme le nazisme qui a
poussé le goût de l’ordre et de la rationalité au point d’éliminer tout ce qui
ne correspondait pas à sa définition de ce qui est Allemand!
À la lecture de ce recueil
j’avais parfois l’impression de lire une psychanalyse du peuple et de la
culture Allemande desquels Weber aurait fait ressortir certaines lois, certains
théorèmes sociaux. Si ces lois, pour plusieurs, s’appliquent encore dans
certains milieux aujourd’hui; d’autres m’apparaissent culturellement et
historiquement ancrés. C’est ainsi que je me sens plus proche de la définition
du droit chez Durkheim, qui est un symbole de la vie sociale, que de celle de
Weber, qui est un ordre. (Schlutuchter, p. 88)
Mais, si le droit est un
ordre et le goût, comme la culture, une chose apprise, le régime peut décider
de ce qu’est le bon goût et de ce qui ne l’est pas en « éduquant » au
bon goût et en censurant le mauvais goût. On voit là le propos du film sur l'expressionnisme allemand! C’était la
légitimité du pouvoir de censurer, mais était-ce vraiment légitime au sens où
Durkheim et Rousseau (je pense ici au
Contrat social) entendent la légitimité de l’État et du Pouvoir par exemple?
Certainement pas. On voit là nos racines culturelles françaises, mais aussi une
source probable de conflits entre la France et l’Allemagne qui date de bien
avant la première guerre mondiale; et dont la seconde ne fut qu’une extension.
De mon point de vue c’était en partie un conflit de culture et de légitimité
doublé d’un différent politique et frontalier avec la France.
***
Ce recueil de texte est bien
davantage que ce que j’en dis, car il regarde les travaux de Max Weber sur
l’État, le droit et la légitimité sous « tous » ses angles, ce qui
pourra intéresser les spécialistes de ces questions, qu’ils soient sociologues,
juristes, politicologues, philosophes,
historiens ou conseillers en relations industrielles. Ce ne sont pas toujours
des textes faciles d’accès, mais ils sont intéressants. Ils peuvent être lus en
entier, en section ou consulté comme dans tous les ouvrages de références.
Ce livre se divise en 3
parties qui sont (I) la légitimité (de l’État, du droit et de
l’institution); (II) Weimar et au-delà; et, enfin, (III) « un regard sur
le contemporain : légitimité et sphère du travail ».
Conclusion!
Pour en finir avec les
coïncidences, j’ai vu ce visionnement de presse au Goethe-Institut de Montréal!
J’étais « immergé » dans la culture allemande, mon livre sur Weber
sous le bras, au point qu’il était clair que je ne pouvais faire autrement que
de parler du film et du livre dans le même texte. C’est donc ce que je
fis!
Références/Hyperliens :
Colliot-Thélène, Catherine, La fin
du monopole de la violence légitime?, in Michel Coutu et Guy Rocher (Sous
la direction de), 2006, La légitimité
de l'État et du droit. Autour de Max Weber, PUL : Sciences humaines, Éducation et IQRC, Collection
pensée allemande et européenne, pp. 23-46.
Goethe-Institut de Montréal: www.goethe.de/montreal
Handfield, Michel, DON JUAN AU TNM
: TOUTE UNE HISTOIRE!, D.I., Delinkan Intellectuel, revue
d'actualité et de culture, Vol. 9 no 1, Textes ciné et culture : www.societascriticus.com
Herrera, Carlos Miguel, Comment
assumer l’héritage wébérien sous Weimar? Légitimité, démocratie changement
social, in Michel Coutu et Guy Rocher, Op. Cit. pp. 213-236.
ILLICH, Ivan, 1975, Némésis médicale,
Paris: Seuil, coll. point.
Médiathèque du Musée d’Art Contemporain de Montréal :
Nazisme : http://fr.wikipedia.org/wiki/Nazisme
Rousseau, Jean-Jacques, 1992
[1762], Du contrat social, France: Grands
écrivains.
Schlutuchter, Wolfgang, La
sociologie du droit comme théorie empirique de la validité, in Michel Coutu
et Guy Rocher, Op. Cit. pp.63-89.
Weber, Max: http://fr.wikipedia.org/wiki/Max_Weber
Weimar (République de) : http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9publique_de_Weimar
Notes du film L'EXPRESSIONNISME ALLEMAND
France/2006/Betacam/couleur, n. et b./62 min/français
En 1937, le régime nazi organise une grande exposition pour stigmatiser
l'art moderne qu'il qualifie d'« art dégénéré ». Plus de la moitié des œuvres
proviennent d'artistes du mouvement expressionniste qui, de 1905 à 1924, a
incarné la modernité en Allemagne : Wassily Kandinsky, Emil Nolde, Max
Beckmann, George Grosz, Otto Dix, Oskar Kokoschka... Cet acharnement est
l'aboutissement d'une longue tradition. Dès le début, les expressionnistes
furent traités de fous et de criminels par les tenants de l'ordre moral et les
défenseurs des lois éternelles de la « beauté » et de « l'harmonie ». Leur
crime? Peindre autrement en rejetant la ressemblance et en affirmant la
singularité de leur vision. Dans ce documentaire, qui accorde une large place
aux œuvres, Stan Neumann retrace les courants de ce mouvement (Die Brücke, Der
Blaue Reiter), se penche sur les films d'époque (Le cabinet du docteur
Caligari, Le golem, Le docteur Mabuse), évoque les rêves des architectes. Il
montre comment l'expressionnisme, cri de révolte contre la guerre et la misère,
sera remis en cause par les communistes en tant qu'art bourgeois et comment lui
succédera un retour à la représentation « objective » de la réalité (Neue
Sachlichkeit).
Biographie
Né à Prague en 1949, Stan Neumann a étudié à l'IDHEC de 1969 à 1972.
Chef monteur jusqu'en 1984, il a réalisé de nombreux films. Il codirige avec
Richard Copans la collection Architectures, pour laquelle il a signé plusieurs
titres.
Arrière de couverture du
livre
Michel Coutu et Guy Rocher
(Sous la direction de), 2006, La
légitimité de l'État et du droit. Autour de Max Weber, PUL : Sciences humaines,
Éducation et IQRC, Collection pensée allemande et européenne, 400 pages : www.pulaval.com
Nous entendons défendre la validité et même la nécessité d’une réflexion
centrée sur l’idée de légitimité, pour qui veut comprendre les rapports
existant entre la sphère de la politique et celle du droit. Mais nous entendons
exiger du même souffl e que cette idée soit extraite de la brume confuse dans
laquelle elle baigne et que l’utilisation du concept de légitimité par la
science sociale ait comme précondition une détermination, aussi rigoureuse que
possible compte tenu du contexte, du sens et de la portée que revêt ce concept.
À cet égard, nous croyons que la sociologie politique et juridique de Max Weber
offre un point de départ tout à fait incontournable, vu l’immense impact
qu’elle a eu sur les théories subséquentes de la légitimité, chez les
théoriciens du droit et du politique sous Weimar par exemple, plus récemment
chez des auteurs comme Jürgen Habermas ou Niklas Luhmann. En même temps, la
position de Max Weber n’a rien perdu de son actualité, ne serait-ce qu’à
considérer les controverses qu’elle suscite toujours dans la communauté
scientifique.
Ont collaboré à cet ouvrage : Catherine Colliot-Thélène, Claude Didry, Caroline
Gendreau, Pierre Guibentif, Carlos Miguel Herrera, Oliver Jouanjan, Jean Marcel
Lapierre, Laurence McFalls, Romain Melot, Wolfgang Schluchter, Évelyne
Serverin, Augustin Simard, Barbara Thériault, Guylaine Vallée, Ulrich Zachert.
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France/2006/Betacam/couleur/52 min/français
Dimanche 11 mars à 16h30, Grande Bibliothèque
Samedi 17 mars à 19h00, Grande Bibliothèque
Dimanche 18 mars à 19h00, Musée des beaux-arts
Marc Lévy, Ken Follett, P. D. James, Douglas Kennedy ou Mary Higgins
Clark sont des auteurs lus à des millions d'exemplaires partout dans le monde.
Le phénomène n'est pas nouveau, mais il a été amplifié par le succès planétaire
du Da Vinci Code de Dan Brown. Pourquoi la planète se prend-elle soudain de
passion pour un livre et pas un autre? Quels sont les ingrédients d'un
best-seller? Y a-t-il une recette? Et comment l'industrie du livre travaille-t-elle
à présent à l'échelle mondiale? De Londres à New York, en passant par la Foire
internationale du livre de Francfort, Annick Cojean, journaliste au Monde, et
le réalisateur Vassili Silovic ont recueilli les réponses de nombreux
romanciers à très gros tirages, comme la reine du polar américain, Mary Higgins
Clark, ou son homologue britannique P. D. James. Ils ont aussi rencontré ces
éminences grises de la littérature que sont les agents et les éditeurs. Une
enquête ludique sur la galaxie des romanciers à succès.
Commentaires de Michel
Handfield (5 mars 2007)
Da Vinci Code, un de ces livres qui ont unifié la planète. Mais quel est le secret du
succès? Le texte? Le marketing? D’arriver au bon moment? En fait, c’est
difficile à dire, sinon on pourrait copier la recette. Il y en a qui ont essayé
de faire recettes; qui donnent des cours d’écriture de « best
sellers », mais ça fait rire les auteurs qui ont du succès, car rare sont
ceux pour qui ça a marché. La plupart des
écrivains à succès n’ont d’ailleurs jamais fréquenté ces écoles. C’est
instinctif; ça part de soi. Écrire, est un besoin viscéral. Je l’ai pour un
autre style que le roman, mais je comprends, car pour moi tout est prétexte à
un texte d’analyse. Un film, une pièce de théâtre ou un événement politique se
transforme rapidement en sujet de chronique, d’éditorial ou d’essai par
exemple.
Peut être, et c’est intuitif
de ma part, car ce documentaire ne l’affirme pas, que le best-seller est ancré
dans un temps, un besoin ponctuel. On se pose des questions sur les religions
depuis le 11 septembre 2001 et le roman de Dan Brown est arrivé avec ses
hypothèses pour répondre à ce besoin au bon moment. Il fut un best seller. 10
ans plus tôt, il serait peut être passé à vide. Je dis cela car il y a une
caractéristique qui est ressortie concernant le best-seller : il ramasse
beaucoup d’argent en peu de temps et disparaît. C’est donc, de mon point de
vue, qu’il répond à un besoin du temps, mais pas à une historicité, ni une
universalité au sens philosophique du terme. Par contre, Le contrat social de
Rousseau n’est pas un best seller, ni le Prince de Machiavel, mais ils sont
encore d’actualité et le seront probablement encore longtemps. Ils ont une
universalité à défaut d’une popularité.
Autre chose qui est
ressortie de ce film, c’est que le roman qui réussit le mieux, c’est celui qui
a une bonne histoire bien contée. Mais, il n’y a pas de recettes du style un
cadavre, une blonde, un chien puddle gris bleu… Par contre, une dose de
réalisme est nécessaire pour qu’il y ait identification du lecteur.
Plausibilité. Mais, encore là, le fantastique a aussi énormément de succès sans
être nécessairement plausible. Le seul point commun à tous ces livres me semble
être qu’il faut une bonne histoire.
Pour qui aime le genre, best seller ou roman, c’est un film
intéressant et vous y verrez des auteurs connus. Pour ma part, je dois
l’avouer, je pénétrais un monde qui m’était totalement inconnu, car je suis un
lecteur d’essai : un tout autre genre. J’ai lu à peine une dizaine de
romans dans ma vie (dont l’étranger de Camus dans mes vacances d’été en
secondaire II ou III) et plusieurs étaient obligatoires au cégep (dont ce Camus
que j’avais lu!). Par contre je me délectais de livres comme le corps humain et
le cerveau (de mémoire c’était Marabout Université et j’étais en sec. III ou
IV); le principe de Peter (sec V), et le choc du futur (cégep). Une fois à
l’université j’ai vraiment plongé dans l’essai social, politique et
philosophique! La liste serait longue à faire.
Foire du livre de Francfort, la plus grosse foire du livre au monde: www.buchmesse.de/en/portal.php
---
France/2006/Betacam/couleur/26 min/français
Samedi mars à 16h30, CCA
Vendredi 16 mars à 19h00, CCA
Retour
sur le mythe de la DS, sur sa conception audacieuse au sein de Citroën et sur
son design révolutionnaire qui inspire toujours les concepteurs et passionne
les collectionneurs. Lancée au Salon de l'automobile de Paris le 6 octobre
1955, la DS 19 de Citroën a 10 ans d'avance sur ses concurrentes. Elle connaît
d'emblée un énorme succès auprès du public, tant pour ses innovations
technologiques que pour son esthétique aérodynamique d'avant-garde. Ayant su
allier design et innovation, la DS entre de plain-pied dans la légende : le
soir de la première journée du Salon, Citroën enregistre près de 1 200 bons de
commande. Plus de 20 versions seront produites entre 1958 et 1974, et pendant
20 ans, la DS fera partie intégrante de la vie sociale et économique de la
France. Roland Barthes voit dans ses lignes fluides un changement de la
mythologie automobile : « Jusqu'à présent, la voiture superlative tenait plutôt
du bestiaire de la puissance, elle devient ici à la fois plus spirituelle et
plus objective. » (Mythologies.)
Biographie
Réalisatrice et scénariste, Danielle Schirman a étudié à l'École des
beaux-arts de Saint-Étienne et à l'École nationale supérieure d'arts
Paris-Cergy. Elle a réalisé plusieurs titres de la collection Design, diffusée
sur ARTE.
Commentaires de Michel Handfield (5 mars 2007)
Citroën a révolutionné l’automobile depuis longtemps. Déjà, dans les
années 30, il présentait la première automobile à traction digne de ce nom.
Dans les années 50, ce fut la DS, véritable déesse de la route et avancée
technologique : usage de l’aluminium; traction; plancher plat; toit de
plastique; Suspension hydropneumatique (air et liquide); et des phares
directionnels à l’avant dès 1967 pour n’en nommer que quelques unes. Une voiture
à l’avant-garde et une technologie, hors d’atteinte des autres pendant une
dizaine d’année!
La DS est l’auto et l’objet du XXe siècle, car elle a modelé ce siècle.
Quant on y pense bien, l’automobile a eu une importance symbolique tant dans la
définition de l’industrialisation que de notre représentation culturelle.
Ainsi, pour l’Amérique, c’est la
production de masse : le fordisme! On le trouve en industrie comme
dans la culture. On produit et on vend du best seller par exemple! (1) Pour
l’Italie, ce sera le design; l’Allemagne, la prouesse technique; la France un
mélange de technique et de design avec Citroën. Quant au Japon et à l’Asie ce
sera de reprendre ce qui existe déjà, mais de le raffiner et de le rendre plus
efficace!
Mais, avec les problèmes environnementaux, la raréfaction du pétrole, la
croissance de la population pourra-t-on continuer longtemps à nier l’évidence
et à poursuivre ce rêve de la voiture individuelle? L’auto, futur objet de
musée?
La déesse de la route l’est surement quant à elle, car Citroën allait
chercher les meilleurs; des artistes! Les créateurs de cette merveille sont
l'ingénieur André Lefèvre et Flaminio Bertoni, dessinateur et sculpteur.
(2) Ce dernier a d’ailleurs exposé différentes
œuvres artistique en plus de son travail chez Citroën. (3)
Notes :
1. Je pense ici à un autre film qui sera présenté au FIFA : BEST-SELLER À TOUT PRIX.
2. Comme je n’ai pu noter tous les noms, je me suis référé à la page de
la DS sur le site de Citroën : www.citroen.com/CWW/fr-FR/HISTORY/LegendaryAndClassical/DS/LEGENDE/DS_1.htm
3. Flaminio Bertoni : www.flaminiobertoni.it/bio-e.htm
Flaminio BERTONI, designer et sculpteur oublié :
www.quaidejavel.com/citroen-15/bertoni/designer
Hyperliens
Site officiel de la compagnie : www.citroen.com
Citroën : http://fr.wikipedia.org/wiki/Citro%C3%ABn
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L’art du nu (3 films)
Place des Arts
Qu’est-ce qu’être modèle, Vendredi 9 mars à 19h00
La collaboration modèle/artiste, Jeudi 15 mars à 19h00
L’art homo érotique, Samedi 17 mars à 19h00
Sur Artv (www.artv.ca/)
Qu’est-ce qu’être modèle, 22 mars
L’art homo érotique, 23 mars
La collaboration
modèle/artiste , 24 mars
Cette collection de trois
films complémentaires sur le nu donne, pour une rare fois en art, la parole aux
modèles vivants.
Qu’est-ce qu’être modèle tente de répondre à la question suivante :
qu'est-ce qu'un modèle? La caméra devient un témoin privilégié des séances de
pose, où hommes et femmes collaborent à un moyen d'expression séculaire.
L'évolution des poses et de la représentation du corps selon les canons de
beauté de chaque époque est retracée.
La collaboration modèle/artiste analyse la nature des relations entre artistes et
modèles. Célèbre modèle de Maillol et de Matisse, Dina Vierny évoque
l'expression du désir de l'artiste pour son modèle. Toujours du point de vue
des modèles, les relations particulières avec de grands artistes, comme
Cézanne, Toulouse-Lautrec et Manet sont également examinées. Comme Suzanne
Valadon, plusieurs posaient pour se rapprocher de ce cercle fermé aux femmes.
Quelques décennies plus tard, les femmes pourront exprimer une vision
différente du corps, marquant l'apparition de la muse androgyne.
L'épisode 3 explore l'art homo-érotique, le nu perçu par la culture gaie et
lesbienne. Charles Leslie, de la Fondation gaie Leslie-Lohman à New York,
aborde les enjeux parfois politiques suscités par le nu. Au-delà des préjugés,
plusieurs modèles soulignent que la réelle recherche d'une vision du corps est
porteuse du désir pour une personne du même sexe.
Biographie
Membre du Barreau du Québec, Renée Claude Riendeau travaille dans le domaine de
la production télévisuelle depuis 1996. En 2003, elle fonde avec Bernar Hébert
Ciné Qua Non Films International et Claire Obscura. Bernar Hébert est reconnu
pour ses films sur la danse et la musique primés dans différents festivals
internationaux. Cette collaboration est à l'origine de plusieurs documentaires
traitant de sujets liés de près ou de loin à la culture et aux arts.
Commentaires de Michel
Handfield sur les 3 films (5 mars 2007)
1. Qu’est-ce qu’être modèle
Il n’y a pas de corps
parfait en art! Un modèle, c’est un matériau. Pour le peintre, ce n’est pas nécessairement les critères de beauté de
la mode, de la télé et des magazines qui s’appliquent d’ailleurs. Ce l’est même
rarement. Ce peut être des critères de texture et de plis dans la peau; des bourrelets
qui, mêlé à des jeux de lumières et d’ombres, donnent vie au personnage; lui
donne sa force ou sa vulnérabilité. Ce que l’on appelle des imperfections
peuvent nous faire sentir le vécu qui a précédé la scène, le vécu et
l’expérience de la vie; comme pour une grand-mère qui regarderait une enfant
qui pleure par exemple et la rassurerait de son seul regard. Elle peut aussi
nous rassurer quand on regarde la toile. On aurait même le goût qu’elle nous
prenne dans ses bras. S’il en est ainsi, c’est que la peinture figurative n’est
pas une photo statique, mais une représentation picturale de la vie.
Peindre, c’est un art de la
communication d’idées et de concepts. Mais pour bien communiquer à celui qui
regardera la toile, il aura d’abord fallu qu’il y ait eu communication et
collaboration entre le modèle et l’artiste; une négociation parfois muette dans
la prise d’une position. De là sort la vérité selon certains modèles.
Pour Picasso, peindre ou
faire l’amour c’était la même chose. Mais une toile peut être pudique ou
érotique selon le regard et la touche de l’artiste… et la pose du modèle. La toile peut donc être plus ou moins
dérangeante selon les cas. Comme le dit Adeline Rognon :
« Le Moyen Age, c’était vraiment l’obscurantisme
dans le sens où toutes les recherches qui ont été faites chez les grecs
concernant la beauté idéale ont été oubliées. Les barbares sont passés par là.
Tout a été détruit. Et puis on s’est remis petit à petit à retrouver des
valeurs qui étaient des valeurs religieuses. Le nu il en avait très peu,
c’était des espèces de corps qui ressemblaient plus à des navets tout blanc
qu’à des vrais nus. Le nu c’est une certaine beauté déjà. Et puis la nudité
c’est vraiment quelqu’un qui est tout nu et puis qui est pas beau. Donc Adam et
Ève c’était ça, au fronton des églises, des personnages comme ça qui se
cachent… »
2. La collaboration
modèle/artiste
Matisse, à quelqu’un qui lui avait demandé s’il avait fait l’amour avec
son modèle, avait répondu « mon ami, ou on peint ou on va au
bordel. » Cette anecdote est rapportée par Dina Vierny qui a servi de modèle pour
Matisse et Mayol dans sa jeunesse. Elle a aussi fréquenté les grands et a
maintenant un musée consacré à Mayol et ses amis – dont Maurice Denis qui fait
actuellement l’objet d’une exposition au MBA de
Montréal. (1)
Quand le modèle est
intelligent, il donne la pose qui fait créer, car le modèle est un artiste en
quelque sorte. On est artiste malgré soit.
Au XIXe siècle, on a vu
cette possible sexualité entre modèle et artiste et, conséquemment, les
artistes ont eu des difficultés à trouver des modèles. Ils ont dû avoir recours
à des prostitués comme modèle. Au Canada, sous le clergé, plusieurs artistes
ont dû se cacher pour peindre leurs modèles. Cette situation a persisté ici
jusqu’à la première moitié du XXe siècle tout au moins. Notre laïcisme est très
récent même si on le défend maintenant avec plus d’ardeurs.
Maintenant, en tant
qu’artistes, les femmes se redéfinissent en utilisant leur propre corps, en
dessinant d’autres femmes ou en prenant des hommes comme modèle. Peut-on dire
que les femmes traitent différemment leurs modèles que les hommes? Avec une
sensibilité différente? Peut être bien que oui, peut être bien que non. En
fait, cela dépend, car chaque artiste, homme ou femme, est différent dans son
travail et son approche avec l’usage du modèle et face à celui-ci.
Note :
1. Maurice Denis : Le
paradis terrestre, au MBA de Montréal : www.mbam.qc.ca/fr/expositions/exposition_124.html
Musée Maillol : www.museemaillol.com/
3. L’art homo érotique
Le nu peut aussi constituer
une expression pour représenter l’orientation sexuelle de l’artiste. Pour
plusieurs il y a une différence entre l’art homo érotique et les autres nus,
car l’art gai est plus permissif, plus ludique. Il a un focus plus direct sur
le sexe. C’est davantage un objet de provocation et de désir. Un art plus
explicite. Un des modèles se masturbe même dans une séance.
Pour les femmes, c’est
davantage intérieur. C’est une autre sensualité. Plus lascive, plus tendre.
Chez l’homme, ça passe par le pénis ou
les fesses sur la toile, alors que chez la femme ça passe davantage par le
geste, la pose ou le regard. Certaines seront plus explicites, mais cela semble
plus rare d’après les modèles interviewés.
Qui a l’œil découvrira la
peinture homosexuelle même dans les
fresques religieuses des églises de l’antiquité. Tout est dans la subtilité du
langage homosexuel dans l’imagerie. La position du corps dit tout. Dans l’art
homosexuel, l’homme qui s’offre à un autre homme se montre de dos, montre ses
fesses, pour se laisser prendre et dominer. L’homme hétéro sera plutôt de face
et dominant. Les hommes étant plus dominant de nature, il y aura naturellement
un rapport et un jeu de pouvoir homme/homme
que l’on retrouvera plus rarement dans la peinture homme/femme.
Conclusion
Trois films intéressant où
on en apprend sur un milieu qui est moins connus, moins accessible au profane.
Trois films qui nous permettent aussi de comprendre certains codes quand on
regarde un nu sur une toile. C’est une série éducative que je recommande aux
amateurs d’arts.
Comme ma conjointe suit
actuellement un cours de dessin de modèle vivant, elle a écouté ces films avec
moi. Je lui laisse donc le mot de la fin en guise de conclusion :
La plupart des gens à qui j’en parle disent tous « Tu vas te rincer
l’œil ». Pourtant non. Quand tu dessines, ce n’est pas ça que tu vois.
C’est comme si tu dessinais un arbre. Tu vois des détails, tu joue sur des
ombres… Ce n’est pas un corps érotique,
du moins dans le cours que je suis ou dans ma vison. Pour moi, c’est un objet
d’art, de lumières, de courbes et d’ombres.
---
Lauréats des films en compétition, section Carrefour de la création
JURY :
Présidente : Lorraine Pintal (Québec)
Alain Jaubert (France), Adriano Kestenholz (Suisse)
Robert MacNab (Royaume-Uni), Yann Martel (Canada)
Grand Prix Pratt & Whitney Canada (5 000 $): CAR-MEN, Boris Paval Conen (Pays-Bas)
Prix du Jury de la Fondation Émile-Nelligan (3 000 $) : SIGRID
& ISAAC, Anders Wahlgren (Suède)
Prix du meilleur film éducatif du Ministère des Affaires municipales et
des Régions (5 000 $) : THE ART OF HENRY MOORE, John Wyver
(Royaume-Uni)
Prix de la création de l’Office national du film du Canada (3 000 $) :
PANTA
REI, Lars Nilssen (Norvège)
Prix de la meilleure œuvre canadienne de Power Corporation du Canada (5
000$): Citizen lambert : Jeanne d’architecture, Teri Wehn-Damisch
(Canada)
Prix Technicolor du meilleur essai : YANG BAN XI: THE EIGHT MODEL
WORKS, Yan Ting Yuen (Pays-Bas, Chine)
Prix Vidéo Service du meilleur portrait : YVES KLEIN, LA RÉVOLUTION BLEUE,
François Lévy-Kuentz (France)
Prix Hôtel du XIXe Siècle du meilleur reportage, Ex æquo : LE
BLUES DE L’ORIENT, Florence Strauss (France, Canada) et THE
GIANT BUDDHAS, Christian Frei (Suisse)
Prix Digital Cut du meilleur film pour la télévision : Andy
Warhol: A Documentary Film, Ric Burns (États-Unis)
Mentions spéciales : Margaret Garner, Mustapha Hasnaoui
(France) et ZAHARA & URGA, Rax Rinnekangas (Finlande)
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Attention : Dans les
commentaires cinés, de théâtres ou de spectacles, les citations sont rarement
exactes, car même si l’on prend des notes il est rare de pouvoir tout noter.
C’est généralement l’essence de ce qui est dit qui est retenue, pas le mot à
mot.
Je ne fais pas non plus dans
la critique, mais dans le commentaire, car de ma perspective, ma formation de
sociologue, le film est un matériel et nourrit une réflexion qui peut le
dépasser. Certains accrocheront sur les décors, les plans de caméra, le jeu des acteurs ou la mise en scène, ce
qui m’atteint moins. Moi, j’accroche sur les problématiques qu’il montre et les
questions qu’il soulève. Le film est un matériel sociologique, un révélateur
social : psychosocial, socioéconomique ou sociopolitique par exemple.
C’est ainsi que sur de très bons films selon la critique, je n’ai fait que de
courts textes alors que sur des films qui ont décriés en cœur, j’ai pu faire de
très longues analyses, car je n’ai pas la même grille, le même angle, qu’eux
dans la tête. Je prends d’ailleurs des notes durant les projections de presse
que je ne peux renier par la suite, même si je discute avec des confrères qui
ne l’ont pas apprécié de la même manière que moi, car je travaille d’un autre
angle. J’encourage donc le lecteur à lire plusieurs points de vue pour se faire
une idée. Ce n’est pas un hasard si nos pages offrent plusieurs hyperliens de
références, car cette diversité de points de vue est nécessaire. Il faut la
protéger.
Michel Handfield
Sortie: 23 mars 2007
Documentaire / Canada
/ durée: 91min
Réalisation: Rob
Stewart
Festival international des films de Toronto : TOP 10
Festival international de l'Atlantique : Prix du public
Festival international de Ft.Lauderdale :Prix du public, du
meilleur documentaire et Spirit of Independent Award
Festival international de Hawaii : Prix mention du Jury
Festival mondial de l'image sous-marine, Antibes : Meilleure
composition musicale et Prix Planète Thalassa
Documentaire sur l'importance de la
survie de nos océans et de nos requins. Rob Stewart, un passionné de requins et
un grand amateur de photographie sous-marine, entreprend une aventure aussi
dangereuse que fascinante pour dénoncer l'exploitation et la
corruption dans les réserves
marines entourant le Costa Rica et les îles Galápagos, en Équateur.
Commentaires de Michel Handfield (15 mars 2007, mis en ligne le 22 mars)
« Un requin! » Le monde pense
« Jaws », danger,
sauve-qui-peut! Un animal bête et méchant.
Rob Stewart, passionné de requins et amateur de photographie
sous-marine, nous dit que c’est plutôt l’animal parfait. Sur cette planète, le
roi c’est lui : 400 millions d’années d’évolution dans les océans. Il
était là bien avant nous, développé et bien adapté à son milieu.
Il faut changer nos mentalités parce que
la réalité est différente du mythe construit autour du requin et entretenu par
la télévision et le cinéma. Même les chiffres le disent : le requin n’est
pas le monstre que l’on décrit. Durant les années 90, une moyenne de 5,4
personnes sont mortes annuellement d’une attaque de requin. De l’autre côté,
les spécialistes estiment que l’Homme tue 100 millions de requins par année
pour son aileron! La pauvre bête se voit amputée vivante pour être ensuite
jetée à la mer où elle meurt d’asphyxie. Imaginez qu’on vous arrache un bras à
froid pour consommation et qu’on vous jette à la mer ainsi! C’est pourtant ce
qu’on fait aux requins et ce sont eux que l’on dit dangereux. Désolé, les plus
grands prédateurs de cette planète sont les homo
economicus, particulièrement ceux pour qui la seule loi s’appelle
profitabilité et qui sont pour une déréglementation mur à mur et sans condition
de la vie! Ce film nous montre d’ailleurs que dans certains pays la mafia et la politique vont de pair pour le
profit.
Entre le mythe et la réalité, il y a la
sociobiologie qui explique la société marine avec sa hiérarchie, ses codes, ses
règles et ses groupes sociaux. Cela devrait être mieux connu avant de dire des
conneries sur le requin. Mais, on ne le défend pas parce qu’on en a peur et
qu’on entretient cette peur. Je ne suis pas spécialiste, mais ce film offre de
bons arguments pour le requin.
Ce film nous fait aussi connaître les
défenseurs des océans : des écologistes, des biologistes, mais aussi
l’équipage de l’Ocean Warrior, qui livre littéralement bataille aux pêcheurs
illégaux devant nos yeux. Mais, des pays protègent ces pêcheurs parce que la
pêche illégale rapporte. Je crois que l’ONU devrait avoir des dents de requin pour faire respecter les
eaux internationales. Il est anormal que ce soit un tel buffet pour les
capitalistes de tout acabit!
On nous parle du respect de la culture
(alimentaire ou sexuelle) pour ne pas agir sur la pêche ou la chasse illégale,
mais qui oserait parler du respect de la culture pour justifier l’esclavage et
l’exploitation sexuelle de la femme? Personne j’espère, quoi que l’on justifie
parfois la domination de la femme au nom de la culture ou de la religion, ce
qui ne devrait pas être possible non plus. Il devrait en être de même pour les espèces animales : la culture ne
devrait pas justifier la surpêche et l’on devrait faire une distinction
entre consommer, gaspiller ou
littéralement massacrer une espèce animale, comme on le voit dans ce film,
nonobstant les traditions, les coutumes, les croyances religieuses ou le libre
marché.
Il y a longtemps que je crois que la
science devrait avoir préséance sur les croyances au niveau légal et que l’ONU
devrait avoir davantage de pouvoirs au niveau de la protection internationale.
Ce film ne fait que renforcer cette idée chez moi. Un film à voir.
Hyperliens :
Site du film : www.sharkwater.com
Captain Paul Watson: www.seashepherd.org/crew-watson.html
Sea
Shepherd Conservation Society: www.seashepherd.org
WildAid:
www.wildaid.org
Shark
Trust: www.sharktrust.org
Shark
Project: www.sharkproject.org
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LA MOUETTE, D’ANTON TCHEKHOV
DU 6 AU 31 MARS 2007 AU THÉÂTRE DU NOUVEAU MONDE
DU MARDI AU VENDREDI À 20H / LES SAMEDIS À 15H ET 20H
RÉSERVATIONS 514.866.8668/ WWW.TNM.QC.CA
Les grandes œuvres théâtrales sont souvent nées d’un esprit de groupe,
d’un esprit de troupe. Yves Desgagnés le sait. Plus de dix ans après Ivanov et
Les Trois Sœurs, Desgagnés revient à Tchekhov en compagnie de camarades et de
complices pour un doublé qui scelle une première collaboration entre le TNM et
la Compagnie Jean Duceppe. Une même équipe d’acteurs et de concepteurs, neuf
mois de gestation et voilà qu’après Oncle Vania, présenté avec l’immense succès
que l’on sait l’automne dernier chez Duceppe, le projet se poursuit, la troupe
traverse la rue et La Mouette prend l’affiche au TNM
Metteur en scène, comédien, auteur et
maintenant cinéaste, Yves Desgagnés fait feu de tout bois, de la création au
répertoire, des œuvres iconoclastes du Nouveau Théâtre Expérimental jusqu’au
récent Roméo et Juliette au cinéma. Et ce parcours effervescent s’accompagne de
grandes fidélités à ses traducteurs, à ses concepteurs, à certains acteurs avec
qui il entretient un dialogue vieux de vingt-cinq ans…
La Mouette : la ronde des amours
La Mouette réunit onze solitudes, onze
oiseaux en cage qui rêvent de s’envoler vers des cieux sans nuages. Ce sont des
gens qui s’aiment, mais à contretemps : Arkadina, l’actrice célèbre, vit avec
l’écrivain Trigorine, qui tombe amoureux de Nina, jeune fille rêvant de devenir
comédienne et aimée sans retour par Tréplev, le fils d’Arkadina, qui tente
d’exister face à une mère excessive. Tréplev est aimé de Macha, la fille du
régisseur de la propriété qui elle, est aimée de l’instituteur Medviédenko,
mais n’éprouve aucun sentiment pour lui. Seul Sorine, le frère d’Arkadina,
n’aime pas. Il est vieux. Il y a Nina, bien sûr, portée par son rêve d’être
actrice et qui, après deux ans d’errance, échouera au bord du même lac, les
ailes déchirées. Et à travers les aspirations, les rêves, les illusions et les
prétentions de ces personnages, ce sont nos propres sentiments que nous
retrouvons, nos propres élans d’oiseaux que la vie finit par blesser.
TEXTE FRANÇAIS ELIZABETH
BOURGET ET RENÉ GINGRAS. MISE
EN SCÈNE YVES DESGAGNÉS. Avec: JEAN-PIERRE CHARTRAND; HENRI CHASSÉ; MICHEL DUMONT; KATHLEEN FORTIN;
MAXIM GAUDETTE; MAUDE GUÉRIN; ROGER LA RUE; JEAN-SÉBASTIEN LAVOIE; PATRICIA
NOLIN; GÉRARD POIRIER; CATHERINE TRUDEAU Équipe
technique : Assistance à la mise en scène et régie CLAUDE LEMELIN;
Décor STÉPHANE ROY; Costumes JUDY JONKER; Éclairages ÉRIC CHAMPOUX; Musique
CATHERINE GADOUAS; Accessoires NORMAND BLAIS; Maquillages FRANÇOIS CYR.
Commentaires de Michel Handfield (12 mars 2007)
Il faut des formes
nouvelles, il les faut, et si elles n’existent pas, mieux vaut que rien
n’existe. (Tréplev, le jeune auteur dans La
Mouette)
Macha nous dit au début de la pièce
« Je suis en deuil de ma vie. Aimer
sans espoir d’être aimé en retour », car elle est amoureuse de
Tréplev, qui, lui, aime Nina, qui elle aimera… Cela donne le ton de la pièce.
Chacun ses désirs, ses espoirs, ses amours, ses préoccupations, ses monologues; mais si aucun ne coordonnent
ensemble, tous coordonnent dans la pièce et lui donnent sens.
Seul au milieu du groupe, la solitude
est encore plus lourde à porter. Un peu comme aujourd’hui, où l’on est des
individus dans une société éclatée. Tous les choix s’offrent à nous,
consommateurs, mais la notion de communauté n’est plus. L’assemblée politique a
été remplacée par le clip de 30 secondes qui rejoint des individualités unies
devant un écran de télé. McLuhan disait, le médium c’est le message. Je dis,
l’interaction c’est la zapette! On ne peut plus poser de question, on ne peut
que changer de canal!
C’est un peu comme ça que sont les
personnages de Chekov : chacun sur leur canal, centré sur leur moi et
leurs préoccupations. A chacun, son temps d’antenne. En ce sens cette pièce est
très moderne.
Mais, d’être centré sur soi n’empêche
pas certains chocs, car à ne pas voir autour on s’en va dans une direction sans
voir qui y est déjà et bang, bang, bang! Un peu comme dans ces autos
tamponneuses dans les parcs d’attractions, les personnages se rentrent dedans
en pensant que ça ne laissera pas de traces. Et pourtant, pourtant…
Que dire de la relation amour/haine
entre Arkadina et Tréplev? Est-ce une opposition mère/fils ou une opposition de
génération, car pour elle le théâtre doit suivre les règles classiques alors
que pour lui il faut en inventer de
nouvelles (il serait du genre nouveau théâtre expérimental), ce qui
donne des escarmouches!
Conséquence, il s’oppose à l’écrivain à succès Trigorine,
qui vit avec sa mère à son grand désespoir, parce qu’il juge son écriture
quelconque nous dit-il. Mais Trigorine est aussi celui sur qui Nina jette son
dévolu, Nina que Tréplev aime. C’est donc l’opposant parfait. Freud aurait
apprécié.
Si ce n’était de cette jalousie,
Trigorine serait peut être un allié pour Tréplev, car il ne cesse de dire
que chacun prenne sa place; qu’il y
a de la place pour d’autres formes d’écritures, d’autres théâtres, d’autres
créateurs. Le talent de l’un n’enlève rien à l’autre! C’est d’ailleurs
l’essence de la création. Les couleurs de Gauguin n’affectent pas celles de
Renoir. En ce sens, la création est une liberté.
Par contre, les fonctionnaires de l’art,
les bureaucrates du marché artistique et du produit culturel peuvent décider
que c’est de l’art ou que ce n’en est pas; que cela a sa place ou non sur le
marché; que cette pièce est digne de Moscou ou pas! Ce ne sont pas des critères
d’artistes, mais de fonctionnaires. Mais, qui dit que l’histoire aurait le même
jugement que ces technocrates? Personne,
sauf que pour vivre de son art il faut les satisfaire dirait Machiavel. Gauguin
crevait de faim pour peindre, ses toiles valent des millions aujourd’hui! C’est
très subjectif. Tout le contraire des lois et des règles que défend justement
la mère de Tréplev, une « fonctionnaire » de l’art en son genre! D’où
une autre raison de s’opposer à son fils!
Un plaidoyer pour la culture, car elle
est comme les sourires : plus on en donne, plus on en reçoit; plus on en
reçoit, plus on en veut. C’est tout le contraire des baffes, quoi!
Mais, pourquoi cet appel de la culture?
Pour la célébrité. Ce qu’on pense de la célébrité et ce qu’elle
est cependant, ce n’est pas pareil. C’est un frisson. Il faut continuer à
travailler et à s’oublier pour la conserver. J’ai a peine terminé un écrit dira Trigorine, qu’il faut en commencer un
autre et que déjà un nouveau sujet m’attire. C’est une maladie que d’être
écrivain. On écrire parce que c’est ce qui nous coule librement de l’âme dans
les veines.
« Rien, je me fais une note… Une idée qui m’est venue… Une idée
pour une nouvelle: une jeune fille vit au bord d’un lac depuis son enfance,
comme vous; elle aime le lac, comme une mouette, elle est heureuse, elle est
libre, comme une mouette. Mais, par hasard, un homme passe et, parce qu’il n’a
rien d’autre à faire, il la détruit, comme cette mouette. » Trigorine
Moi qui écris, je ressens la même chose que Trigorine
face à l’écriture. C’est comme une démangeaison. Il faut écrire quand ça pique!
J’ai toujours mon bloc-notes pour ne pas échapper la prochaine idée. Un texte
d’une semaine est déjà loin, car dans ma tête j’en suis au texte qui suit et à
l’autre qui viendra! Si Tchekhov décrit bien cela, pourquoi ne décrirait-il pas
aussi bien tout le reste? C’est probablement ce qui fait la force de la
pièce : toutes ces solitudes, tous ces rêves, tous ces désespoirs qu’il
décrit et qui peuvent nous rejoindre au plus profond de notre être. Sinon,
n’existeraient pas toutes ces téléréalités et tous ces vox-pop qui rejoignent
tous ces gens qui rêvent de leurs 5 minutes de gloire. On m’a vu, on m’a
entendu, donc je suis!
C’est le cas de Nina, qui est
attaché à son lac et qui rêve de le quitter pour être sur les planches à
Moscou. Mais ses ailes la porteront-elle? Demeurera-t-elle une mouette ou
deviendra-t-elle une actrice?
***
Cette pièce, au-delà du drame amoureux,
est d’abord sur la difficulté d’être. La difficulté d’être quand les autres
sont avant nous. La difficulté d’être quand on a du talent, mais pas d’espace
pour déployer ses ailes. La difficulté d’être quand on n’est pas pris au
sérieux. La difficulté d’être quand il n’y a pas de réponse à notre amour. On
se sent dévalorisé, désespéré. C’est ce qui explique toute l’actualité de cette
pièce. Réelle et surréelle en même temps, c’est ce qui fait sa modernité.
---
Le Diable en partage de
Fabrice Melquiot
Du 7 au 24 mars 2007 –
mercredi au samedi à 20h
Les mardis 13 et 20 mars à
19h
Représentation
spéciale le mercredi 14 mars.
Mercredi-Bavard, venez rencontrez les artistes après le spectacle.
Lorko aime Elma. Il est
serbe, elle est musulmane. La Bosnie s’embrase. Forcé de s’engager dans
l’armée, il s’écrie : Ne frappez plus. J’irai me battre. Je n’ai pas peur. Puis,
incapable de tirer sur quiconque, il désertera laissant derrière lui son pays,
sa famille et Elma son amour. Celle-ci reste aux côtés des parents, de son
petit frère Jovan et de son meilleur ami Alexandre, peu à peu gagnés par la
guerre, la haine, le ressentiment. Lorsque le jeune déserteur reviendra sur sa
terre natale, plus rien ne sera pareil. Désormais, Lorko sait que le diable se
cache au plus profond de chacun et que seul l’amour peut reconstruire.
«J’ai écrit Le
Diable en partage pour dire : il faut veiller et dépasser les chiffres,
dépasser les représentations, dépasser le théâtre lui-même pour aller sur les territoires de
l’intime interroger ses responsabilités d’homme.» (Fabrice
Melquiot)
Oscillant entre le monde
réel et celui du rêve, Le Diable en partage dépeint les marques laissées
sur ceux qui choisissent délibérément de prendre le parti de la guerre, comme
celles laissées sur ceux qui la fuient. Ce n’est pas une pièce de guerre, mais
une histoire d’amour.
DuBunker est fier d’être la
première compagnie théâtrale francophone d’Amérique du nord à porter à la scène
les mots de Melquiot afin de tenter, comme lui, de dire «l’indicible».
Véritable figure de proue de la nouvelle génération de dramaturges en France,
l’auteur a publié plus d’une vingtaine de pièces chez l’Arche Éditeur. Le
Diable en partage a obtenu le prix «Nouveau Talent Radio» de la SACD en
2003 ainsi que deux prix du Syndicat National de la Critique. Les textes de
Fabrice Melquiot sont joués et traduits dans plusieurs langues.
Commentaires de Michel Handfield (12 mars 2007)
Le lourd silence du début
place l’ambiance. Lorko, serbe, devrait haïr les bosniaques (musulmans), car
ils se battent pour le territoire suite à l’éclatement de la Yougoslavie. C’est
le contexte de la pièce, le matériel de départ. (1)
Mais Lorko est marié a Elma, une musulmane, donc il ne
peut haïr les bosniaques. C’est une guerre terrible entre voisins, amis et
familles. Nous y pénétrons par les rapports de la famille de Lorko. Une pièce
humaine, sur les relations qui se détruisent par idéologie ou qui résistent par
amour. Tous ne peuvent s’en tirer sans blessures morales ou physiques
cependant. C’est la guerre.
On pénètre dans les non choix; la construction idéologique de la
haine. Où tu te bats avec nous contre
ceux que tu aimes, ou on te tue et on tuera quand même ceux que tu aimes.
L’Allemagne Nazie, la Bosnie, le Rwanda, même folie meurtrière qui séparera
ceux qui la veille on trinqué ensemble. Cette folie maintes fois répétés
devient une vérité qui pénètre les gens comme des lames de rasoirs. Lentement
mais surement, l’idéologie de la haine devient une vérité.
Lorko ne peut rester vivant
qu’en se sauvant, mais se sauver veut dire abandonner son amour. Ne pas se
sauver veut dire être fusillé pour ne pas s’être battu. Il n’a pas le choix et
son esprit sera torturé, car Elma et sa famille seront toujours avec lui dans
son parcours. On pénètre la psychologie
du déserteur. Attention, ce n’est pas par lâcheté, mais par objection de
conscience. Par refus de tuer ceux qui étaient nos amis et nos voisins la
veille. Par refus de cette idéologie
guerrière qui a enflammé un pays qui était encore UN avant…
Pourquoi se bat-on? On ne sait
plus vraiment. Parce que c’est comme ça; c’est la guerre…
Derrière lui, Jovan et
Alexandre, son petit frère et son ami, prennent goût à cette guerre. Prennent
plaisirs à tuer. Commencent à haïr de plus en plus ces chiens de musulmans.
Mais, pourtant, dans la maison, Elma partage les repas avec eux et sa belle
famille. Vit avec eux.
Comment la guerre pénètre-t-elle dans
les maisons? Par un obus? Par les trous dans les murs? Non, elle entre par ceux
que nous aimons, qui sont à notre table, les intimes et les membres de la
famille, car la guerre, ce sont des idées toutes faites que l’on entre dans la
tête des gens. Boucher les fentes des murs ou se cacher au sous sol ne peut
rien pour empêcher la guerre d’y pénétrer.
Ce sont des vérités construites et simplistes (idéologie) qui expliquent
qu’il y a eux et nous et qu’on ne peut plus partager les mêmes choses, ni le
même territoire, qui font la guerre. Nettoyer la place devient la seule chose
objective à faire. C’est d’ailleurs la force de cette construction idéologique
qui fait qu’il est si difficile de reconstruire la paix après une guerre, car
on a mis toute la machine idéologique à construire une opposition et un ennemi
dans la tête des gens. Plus elle avancera, plus la guerre ne fera que renforcer
cette idée d’ennemi, car ils m’ont blessé, ils ont tué mon enfant, ils ont
brûlé la maison de mon frère. La guerre rendra évident le fait qu’on ne peut vivre
ensemble. Qu’on n’est pas de la même civilisation.
Quand il sera temps de se reparler, de
faire la paix, et de reconstruire ensemble, il n’y aura plus de construction
idéologique pour nous rappeler que nous étions « frères ». Ce chemin,
chacun devra le faire seul, en pansant ses plaies. La guerre est dure, mais la
paix n’est pas facile. C’est d’ailleurs pour cela qu’on parle de paix aux
Hommes de bonne volonté, car il en faut pour la faire et la rendre
durable.
Une chance pour notre humanité, certains
se lèvent pour refuser la guerre; avant et pendant. Pour dire, « ils ont toujours été des nôtres! »
C’est notre famille. C’est la femme de ton frère! S’ils s’en sortent, ce sont
eux qui aideront à reconstruire après, car ils auront conservé le sens commun,
le cap, malgré les dérives idéologiques.
***
De son côté, dans cette Europe à l’abri
du conflit, Lorko trouve que son pays
est oublié, que ce conflit est laissé pour compte. On ne le veut pas comme
réfugié. On serait même prêt à le retourner se faire fusiller dans son pays,
car on ne comprend pas. Pourtant, il est au pays de la liberté, fraternité,
égalité : la France!
Une pièce profonde, un texte signifiant,
avec des anges qui expliquent les choses, qui font la narration et allègent la
pièce par des chants qui donnent espoir en l’humain. La trouvaille, c’est qu’il
s’agit de chansons populaires et connues.
Une
excellente pièce bien portée par les acteurs, car le texte est costaud. Une
mise en scène simple et efficace. Un agréable moment de réflexion et
d’introspection humaine.
Note :
1. « Les guerres yougoslaves
font suite à l’éclatement de la deuxième Yougoslavie et aux indépendances de la
Slovénie (25 juin 1991), de la Croatie (25 juin 1991) et de la
Bosnie-Herzégovine (1er mars 1992). Elles ont pour enjeu principal la
constitution d’États-nations homogènes, dans un espace yougoslave jusqu’alors
caractérisé par l’imbrication de ses populations. La première de ces guerres
oppose brièvement l’armée populaire yougoslave à la défense territoriale
slovène (juin 1991, 49 morts). La deuxième oppose l’armée croate à l’armée
yougoslave et aux forces de la « république serbe de Krajina » (août
1991-janvier 1992, 10 000 à 11 000 morts). La troisième, enfin, qui est de loin
la plus longue (avril 1992-décembre 1995) et la plus meurtrière (150 000 à 250
000 morts), se déroule en Bosnie-Herzégovine et met aux prises une armée
bosniaque majoritairement musulmane, les forces de la « république serbe » de
Bosnie-Herzégovine soutenue par la Serbie, et les forces du Conseil de défense
croate (HVO) soutenu par la Croatie. Cette troisième guerre yougoslave
s’accompagne d’une brève mais brutale reprise des combats en Croatie (août
1995). » (GUERRES YOUGOSLAVES (1991-1995), in L’État du monde sur CD ROM.)
---
Je vais bien, ne t'en fais pas
Sortie : 9
mars
Un film de Philippe Lioret
Avec Mélanie Laurent et Kad Merad
Gagnant de 2 César
Meilleur acteur dans un second rôle
Meilleur espoir féminin
Et en nomination dans les catégories
Meilleur réalisateur
Meilleur film
Meilleure adaptation
Commentaires de
Michel Handfield (8 mars 2007)
On sent qu’il y a un malaise au retour de
voyage de Lili, 19 ans, quand ses parents viennent la chercher au terminus.
Lentement, l’on en découvrira des bribes, mais il sera là, persistant.
Elle ne comprend pas comment ses parents
peuvent prendre si bien la fugue de son frère. C’est comme si la sensibilité
des enfants dépassait la maturité parentale. Elle en tombera malade.
Ceci la conduira à un court épisode
psychiatrique, occasion d’une critique acerbe cependant. Quand la psychiatrie
prend quelqu’un en charge, elle l’élimine; élimine tout son entourage. Elle le
fout au cachot pour qu’il obéisse à ce que l’on dit être pour son bien. Si cela
fonctionne dans plusieurs cas, qu’en est-il dans celui d’un mauvais diagnostic
des causes de départ? Peut-on faire une application mécanique d’un traitement à
des humains comme on le ferait d’un traitement à la cire pour une voiture? La
psychiatrie peut elle connaître un blocage idéologico-scientifique? Ce sont les
réflexions que ce court épisode a suscité chez le critique social que je suis.
Après cet épisode elle continuera à chercher
son frère, mais aussi à comprendre lentement, tout en apprenant à faire sa vie.
On la suivra dans ce processus. On pourra aussi se faire une idée de la vie de
la famille. Le père qui n’était pas toujours là pour les enfants, mais qui
travaillait pour leur donner ce qu’ils avaient besoin par exemple.
La famille avec ses forces et ses faiblesses.
Pas parfaite, même un peu déjantée. La famille vue comme un thriller! Fort
intéressant, mais difficile d’en parler pour ne pas brûler votre plaisir.
Site du film : www.marsdistribution.com/xml/flash.html?cfilm=51829
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Un film de Claude Chabrol
EN SALLE DÈS LE 2 MARS
Montréal, le mercredi
14 février 2007 - Présenté en compétition au dernier Festival de Berlin,
L'Ivresse du pouvoir arrive au Québec auréolé du prestige de son mythique
réalisateur, Claude Chabrol, et de la légendaire actrice, Isabelle Huppert.
Dans ce film, Chabrol nous entraîne à la suite d'une magistrate inattaquable et
acharnée, qui mène une enquête sur un détournement de fonds publics. Chabrol
nous emmène avec un plaisir évident dans le monde marécageux des affaires et de
la justice. Présenté en version originale française.
Synopsis :
Jeanne Charmant
Killman, juge d'instruction, est chargée de démêler et d'instruire une complexe
affaire de concussion et détournements de fonds mettant en cause le président
d'un important groupe industriel. Au fur et à mesure de ses investigations et
de ses interrogatoires, elle comprend que son pouvoir s'accroît : plus elle
pénètre de secrets, plus ses moyens de pression augmentent. Mais dans le même
temps, et pour les mêmes raisons, sa vie privée se fragilise. Et bientôt vont
se poser à elle deux questions fondamentales : jusqu'où peut-elle augmenter ce
pouvoir sans qu'elle ne se heurte à un pouvoir plus grand que le sien ?
Jusqu'où la nature humaine peut-elle résister à l'ivresse de ce pouvoir ?
Peut-être en sortira-t-elle brisée ?
Au Québec, le film
est distribué par Métropole Films.
Commentaires de Michel Handfield (28 février 2007)
Machiavel revisité et modernisé!
D’abord, je vous le dis tout de go : la maladie de peau du
président de cet important groupe industriel en cause dans ce film, c’est le
psoriasis. Le stress ne fait rien pour aider, car il l’accentue. On n’identifie
pas la maladie, mais comme je fais moi-même du psoriasis, je l’ai identifié en
le voyant. Si l’acteur n’en fait pas, très bon maquillage. Très bon gestes
aussi, car ça peut démanger énormément selon la variété de psoriasis.
***
Ce film, où on ne nomme pas l’entreprise,
ressemblerait étrangement à l’affaire ELF en France selon une recherche
internet. (1) Une affaire que l’on connaît moins de ce côté-ci de l’Atlantique,
ce qui fait qu’on peut s’intéresser davantage à la thèse du film pour ce
qu’elle est que pour essayer d’identifier les acteurs de cette affaire.
Tout commence par la mise aux arrêts du
Président du groupe. Il rencontre donc le juge du tribunal économique qui ne
lâchera pas l’os. Elle en fait une affaire personnelle. Elle est l’incarnation
de l’institution de la justice et y prend goût, car cela lui donne un
Pouvoir qu’elle ne se connaissait peut-être pas avant. Lui, représente son
groupe industriel, mais aussi le pouvoir économique! Le pouvoir politique reste
en retrait, mais est un acteur très intéressé qui saura user de son influence
sur le juridique et l’économique. Ce
sont les règles du jeu.
Ici, même si c’est une femme, les Français disent madame le juge, car le
nom de la fonction est masculin comme le vagin l’est, ce qui n’empêche pas une
femme de le porter! Une question de point de vue. Au Québec, ça sonne drôle au
début, car on se dit qu’une fonction peut avoir un masculin et un
féminin : un policier et une policière par exemple! Pourquoi pas un juge
ou une juge alors? Mais, l’essentiel n’est-il pas l’égalité des sexes dans
l’occupation de la fonction? Les français risquent d’ailleurs d’avoir un madame
le Président avant que nous ayons une madame la première ministre si la
tendance se maintient!
Ce procès d’instruction est intéressant à suivre, car on pénètre
lentement les dédales de l’entreprise et les réseaux d’influences. Le
Président, surpris d’être sous arrêt, explique : « deux gouvernements
successifs m’ont accordé leur confiance » en voulant dire qu’il n’a rien à
se reprocher, ce à quoi madame le juge lui réponds « vous avez
abusé! » Dans le privé, il y a le boni; dans le public il y a la carte
d’entreprise pour compenser les petites dépenses, comme « habillez votre
maîtresse » en plus d’en avoir fait votre collaboratrice! Elle ne le lâche
pas.
Pour le Président du groupe, c’était business
as usual! Le Groupe finance les chefs d’États de pays étrangers,
l’opposition et sert les bonnes relations de l’État! « Cet argent que l’on
verse enrichit le groupe et la France après tout! » Cette juge ne comprend
rien aux affaires et à la politique. L’argent, c’est l’huile que l’on met dans
les rouages pour que ça tourne rond. 800 000$ dans une enveloppe, c’est
normal. Avant de récolter, il faut bien arroser les dirigeants!
Le film est plein de ces remarques et de
ces allusions à la pratique du pouvoir. On est dans la psycho politique. On
entre dans les coulisses du pouvoir. Machiavel revisité
et modernisé!
S’en prendre à un représentant du pouvoir économique ou politique, ça
peut aller. Mais, si ça monte plus haut, que l’élite politico-économique ou,
pire, la structure même du Pouvoir soit menacée, ce sera la mobilisation. La
justice sera alors menacée à son tour par le pouvoir politique qui la contrôle,
que ce soit par le jeu des assignations, des
nominations/promotions, des mutations, des vacances, ou de la
destitution d’un juge. Ce procès aura donc des répercussions sur madame la juge
et son entourage, ce qui fait qu’à l’affaire se greffe un thriller humain.
J’aurais pu vous en parler plus longuement, car je n’ai passé ici que la
moitié des notes que j’ai prises durant la projection, sauf que ce serait
peut-être « brûler » votre plaisir. Bon cinéma.
Note :
1. L'Ivresse du
pouvoir: http://fr.wikipedia.org/wiki/L'Ivresse_du_pouvoir
Affaire Elf: http://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_Elf
---
Les Rendez-vous du cinéma québécois 2007
Michel Handfield
35mm / nb_coul /
1h15m00s / 2006
Réal.: Rénald
Bellemare
Scénario: Rénald
Bellemare
Photo: Rénald
Bellemare
Montage: Jorge
Martinez
Son: Chantal Rhéaume
Musique: Vic Vogel
Prod.et Distr.: Adobe
Productions international
L'Homme de cuivre - Vic Vogel présente l'univers de l'un des musiciens
les plus tenaces de la scène montréalaise de jazz. Pianiste, tromboniste,
compositeur et chef d'orchestre, Vic Vogel a fondé le Jazz Big Band, dans les
années 1970. Aujourd'hui, le Jazz Big Band persiste et signe avec une nouvelle
génération de musiciens. Au fil de sa carrière, Vic Vogel a côtoyé les grands
noms du jazz qui n'ont cessé de l'influencer, tout particulièrement Oscar
Peterson. Pour fêter les 80 ans de son ami Oscar, Vogel a dirigé le big band de
Swinging Europe qui a interprété les œuvres de Peterson à travers l'Europe. Ce
film présente cette tournée retentissante tout en brossant le portrait du
jazzman tzigane de 70 ans.
Réalisateur et directeur photo, RÉNALD BELLEMARE a collaboré à plusieurs
films de cinéastes tels Yvan Patry, Magnus Isacsson et Patricio Henriquez. Il a
réalisé deux moyens métrages sur la direction artistique, soit Cirque du
Soleil: Saltimbanco's Diary et Alegria: The Truth of Illusion. Avec La Bottine
souriante : Comme des Démons !, il a remporté en 2002 le prix Gémeau du
meilleur documentaire des arts de la scène.
Commentaires de Michel Handfield (21 février 2007)
Montréal fut autrefois une grande place
du jazz, de Griffintown (1) aux grands cabarets de la rue Ste-Catherine, soit
des années 20 ou 30 au milieu des années 60 environs. Mais la mode à changé.
Les formes de divertissement aussi, avec les discos et les DJ.
Il ne reste maintenant que quelques
places pour initiés et le Festival international de Jazz de Montréal. Par
contre, Vic Vogel et son Jazz Big Band,
qu’il a fondé dans les années 1970, tiennent la route. On suit donc Vic dans ce
film où il se raconte généreusement. Où il montre aussi à des plus jeunes, car
le jazz ce n’est pas que de la technique ou de l’oreille même s’il en faut.
C’est surtout une âme : du Soul!
Cela se transmet par ceux qui l’ont.
On le suivra en Europe où il a été
invité à diriger le Big Band de Swinging Europe pour interpréter les œuvres
d’Oscar Peterson, orchestre fondé en quelques semaines des meilleurs jeunes
espoirs européens. Il en fera un groupe (une gang) avec ses manières. On verra
le changement s’opérer sur ces jeunes. Il est clair qu’il leur a apporté de
quoi qu’ils n’avaient pas.
Ses réflexions sur l’éducation et
l’enseignement valent la peine, car j’ai noté : on devrait montrer ce film
aux profs et aux futurs enseignants. Mais, malgré son sens de la transmission,
il n’a pas été appelé à enseigner, car il n’est pas un
« fonctionnaire » dans sa manière de penser, de faire et d’être.
On voit aussi son Jazz Big Band et plusieurs musiciens qu’il a accompagné. C’est peut
être là la clef de son succès : il fait du jazz, mais n’est pas fermé à la
coopération avec d’autres groupes et d’autres genre de musique dans un style
fusion! Il a ainsi accompagné des rockers qui ont flirté avec le Blues, comme
Offenbach ou Martin Deschamps, qui a repris Offenbach d’ailleurs! Le jazz le
sort, mais lui ne sort pas du jazz pour notre plus grand plaisir!
J’ai reconnu le créateur dans son
(dés)ordre sur sa table, car créer c’est aussi ordonner les choses d’une
manière différente des autres. Je m’y identifiais, dès là, car il y a des
parallèles entre écrire de la musique ou des textes. Et j’en ai vu plusieurs
dans ce film. J’ai ainsi noté dans mon PALM quelques mots clefs sur lesquels je
ne pouvais qu’opiner :
- Ton identité est dans ton crayon;
- La curiosité est le propre du
créateur;
- Du moment que ça coule all the way, tu peux passer des nuits
blanches (Je dis souvent à ma blonde quand faut que ça sorte, faut que ça
sorte!);
- On est un produit [une victime aussi
parfois] des circonstances et des environs.
Vous devez avoir compris à me lire que
c’est là un documentaire que je vous recommande.
Note
1. Le film Jack Paradise, avec Roy Dupuis, évoque d’ailleurs cette
époque de Griffintown. Nous en avons parlé dans notre volume 6 no 1.
Hyperliens :
http://www.vicvogel.com/ (Sa compagnie de disque)
Oscar Peterson: http://archives.radio-canada.ca/IDD-0-72-403/arts_culture/oscar_peterson/
---
35mm / coul /
1h22m00s / 2006
Réalisation et
Scénario: Pascal Bonitzer
Photo: Marie Spencer
Montage: Monica
Coleman
Son: Franck Cartaut,
Frédéric Ullmann
Musique: Alexei Aigui
Interprètes: Edouard
Baer, Géraldine Pailhas, Marina de Van, Charles Berling
Un matin, Diane découvre que l'homme qu'elle aime, Hermann, un éditeur
bien connu, va publier un livre de Worms, un écrivain célèbre dont elle a
autrefois partagé la vie. Elle découvre aussi que ce livre parle d'elle... De
son côté, Worms surprend Hermann en compagnie de son ancienne flamme, Annie. Il
les photographie à l'aide de son portable et envoie l'image à Diane. Ce qui
avait des allures de vaudeville se mue alors rapidement en drame, puis en
tragédie...
Commentaires de Michel Handfield (21 février 2007)
On est dans l’intimité, mais
ce n’est pas un film intimiste. C’est un film de cœur… ou de mœurs qui se passe
dans la ville, car l’intimité peut se passer en public. C’est une proximité de
relation qui se vit, même au grand jour!
En cette ère de la
communication, le cellulaire est un des personnages du film; avec prise de
photos et envoie de messages textes. (1) Cependant, ce n’est ni un plus ni un
moins, car cela dépend toujours du but recherché et de comment il est utilisé.
À bon escient ou non. Pour faire une farce? Mais, quelle en seront la réception
et surtout les conséquences? Une fois le message envoyé, on ne peut le ramener.
On ne peut alors qu’en observer les conséquences. Et elles peuvent être
rapides, car la technologie est un accélérateur. On le verra dans ce film.
Dans un triangle amoureux, cela peut
occasionner l’accrochage. Dans deux triangles, la collision. Et dans trois
l’explosion! Comme dans un billard, on ne sait pas où les boules iront une fois
le triangle brisé! Mais, comme dans le billard, le jeu est aussi circonscrit.
Ces couples sont des points de triangles qui se rejoignent. Assez tordu, mais
loin d’être inintéressant.
Les victimes sont toutes dans
l’entourage de Worms, soit directement ou indirectement. Mais qui est Worms? Un
écrivain célèbre qui se joue des gens comme si la vie était son scénario. Il
leur met des intrigues et des insinuations de son cru dans les pattes et les
regarde aller. Cela crée de la matière à
roman! Pour son prochain livre ou l’autre
peut être. Mais, cela a aussi des conséquences sur leurs relations et
leurs vies.
On est donc dans le
pathos-psychologique, ce qui n’est pas moche pour le spectateur même si ce
l’est pour les personnages. Bref, un court long métrage (82 min) que je
conseillerais à qui aime les intrigues psychologiques. Un peu cynique avec
ça.
Note
1. http://fr.wikipedia.org/wiki/Short_message_service
---
NOUVELLE COPIE 35MM
RESTAURÉE SOUS LA SUPERVISION DE PIERRE LHOMME.
35mm / coul /
2h25m00s / 1969
Réal.: Jean-Pierre
Melville
Scénario: Jean-Pierre
Melville, d'après le roman de Joseph Kessel
Photo: Pierre
Lhomme, Walter Wottitz
Montage: Françoise
Bonnot
Son: Jacques Carrère,
Jean Nény
Musique: Éric Demarsan
Interprètes: Lino
Ventura, Paul Meurisse, Jean-Pierre Castel, Simone Signoret, Claude Mann
France, 1942. Soupçonné de pensées gaullistes, Philippe Gerbier est
emprisonné par la police allemande, mais parvient à s'évader. Il se révèle l'un
des chefs de la Résistance, l'un des chefs de ces hommes et de ces femmes que
tout sépare, sauf la nécessité d'agir. Entre transmission de renseignements et
assassinats politiques, un long voyage au bout de la nuit commence pour ces
soldats de la clandestinité…
Commentaires de Michel Handfield (21 février 2007)
D'abord, le visionnement fut précédé
d’une rencontre avec Pierre L’Homme qui était le directeur photo lors du
tournage du film et qui l’a entièrement restauré.
Nous avons appris de cette présentation
que le film était terriblement dégradé, rendu magenta, ce qui semble le propre
des films couleur. Le noir et blanc, quant à lui, se dégraderait moins
rapidement. Il fut donc digitalisé et restauré le plus près possible de
l’original par le chef photo, car il avait conservé des documents de tournage,
dont les chartes de couleur. Au point de vue technique, il nous a appris que
Melville (le réalisateur) avait horreur des couleurs chaudes (rouge, jaune…) et
leur préférait les couleurs froides. De plus, ce film fut surtout d’ombres et
de pénombre, ce qui lui donna un caractère particulier. Au plan technique, il
fut aux trois quarts réalisé en studio.
Il a aussi souligné les silences du
film; une forme d’éloquence de personnages qui parlent peu. Ceci en dit long,
vu le côté secret de la résistance. Ce côté dramatique est d’ailleurs mis en
valeur du fait de la pénombre d’une grande partie du film. Par essence un
résistant peut difficilement agir en plein jour et à la vue de tous. Ce ne
serait plus un acte de résistance, mais de suicide s’il en était ainsi.
Ce film fut mal accueilli à l’époque
(1969), en pleine révolution contre De Gaulle, qui représentait alors un
certain conservatisme suite à Mai 68; lui qui représentait pourtant la
libération au temps de la guerre. C’est là que l’on voit que les idées
circulent entre la gauche et la droite et que ce qui était de gauche peut
parfois devenir de droite. C’est un autre signe que la simplification
gauche/droite est loin d’être toujours représentative de toute la complexité
des idées politiques, même si ce sont des catégories facilement compréhensives.
Ces catégories
cachent-elles l’essentiel?
Avec le temps et la distance par rapport
aux événements de la guerre, car les français étaient opposés les uns aux
autres entre pétainistes et gaullistes, ce film est lentement devenu un film
culte. Son retour est donc
bienvenu.
***
Le film débute le 20 octobre 1942. On
pouvait vous arrêter pour pensée gaulliste. C’est ce qui arrive à Philippe
Gerbier (Lino Ventura, qui est beaucoup plus intellectuel que physique dans ce
rôle) que l’on suivra tout au long du film. Mais, plus que gaulliste, il
s’avère un pilier de la résistance.
Être gaulliste, c’était être de gauche
dans cette France de la collaboration (avec le nazisme). En mai 68, par contre,
le gaullisme était « devenu » de droite; conservateur face à la
révolte des étudiants et des jeunes ouvriers! (Touraine, Cohn-Bendit)
Aujourd’hui, il revient de bon ton, car le gaullisme naviguait entre les
tendances au besoin du Pouvoir. C’est qu’il était homme de Pouvoir le
Général :
« Prenez De Gaulle. Au hit-parade
des personnalités les plus citées, les plus adulées de cette campagne, l'homme
du 18 Juin arrive largement en tête. Nicolas Sarkozy l'encense : « Le
gaullisme, dit-il, c'est une exigence morale, la conviction que la France n'est
forte que quand elle est rassemblée. » Mais Ségolène Royal le récupère aussi.
De Gaulle est l'homme qui « a relevé la France », et surtout celui qui, en
1969, a désigné les puissances « de l'argent » comme l'ennemi de toute une vie.
Mais voilà que François Bayrou s'y met aussi. Certes, concède l'héritier des
démocrates-chrétiens qui avaient spectaculairement rompu avec le gaullisme en
1962 à cause de l'Europe et des institutions, il y a à prendre et à laisser
dans l'héritage du Général. Mais, tout de même, quel homme ! « Il y a eu
quelque chose de grand dont la France a éminemment besoin », s'exclame le
président de l'UDF, qui se verrait bien comme le seul héritier de De Gaulle,
celui qui refonde la République en transcendant le clivage gauche-droite. Fin
des surprises ? Non, car Jean-Marie Le Pen y va lui aussi de son couplet
gaullien. Evidemment, concède-t-il, il y a encore des contentieux lourds :
l'Algérie, Pétain, mais « dans ses réflexes patriotiques, je suis assez
gaulliste », corrige-t-il. Et puis De Gaulle, c'est le rassemblement et, cette
valeur-là, le président du Front national version 2007 veut lui aussi la
récupérer en lançant, bravache : « Le peuple français, je le prends dans son
ensemble ! » (1). » (FRESSOZ)
Ces années ne furent pas
faciles, français contre français. Collabos contre résistants. Sacrifice et
solidarité pour la Patrie? Oui. Mais, pour la liberté, la leur et celle de
leurs descendants, ça oui, oui et encore oui! Liberté; Fraternité; Égalité sont
d’ailleurs les valeurs de la France. Le sang de leurs ancêtres a coulé pour
celles-ci lors de la Révolution
française et ils ne l’oublient pas. Noblesse du peuple oblige. C’est à tout cela
que m’a fait penser ce film.
Mais, ce n’était pas rose, ni
romantique. Les résistants avaient aussi des traites dans leurs rangs. Il
fallait les identifier et les éliminer. Littéralement. Parfois c’était aussi un
des leurs, un(e) camarade, qui demandait à être « soulagé », torturé
par les Allemands. Il fallait avoir le cœur et la tendresse de le faire. Cela
peut paraître antinomique, mais en temps de guerre tout est différent. L’ombre
et la pénombre sont mieux appréciées que la lumière franche, car il faut passer
inaperçu pour faire ce qui doit être fait! Il y a un sens du devoir différent.
Toujours sur la lame dans le recrutement
des recrues aussi, car cette personne qui nous paraît de confiance peut être un
collabo ou un agent à la recherche d’une cellule de la résistance. Il peut
jouer le jeu le temps qu’il faut pour prendre tout le groupe. Il y a toujours
un danger.
Un film fort, que je ne peux que vous
recommander s’il sort en salle ou en DVD dans votre secteur.
Il n’est cependant pas surprenant qu’en
69 ce film n’ait pas eu le succès escompté, car ce n’était que 24 ans après la
guerre. Les cicatrices n’étaient probablement pas complètement refermées entre
les collabos et les résistants. Ce n’est pas long 24 ans si vous en aviez entre
16 et 40 ans dans ce temps là. Pas assez pour pardonner l’autre, car pardonner
prend du temps, surtout dans ces circonstances ou un voisin, un ami, un cousin
ou même un frère aurait pu vous faire condamner parce qu’il aurait lui-même été
torturé ou condamné s’il ne l’avait pas fait. Ou ses proches, comme ses parents
ou ses enfants, l’auraient été. Bref, ils devaient tous avoir hâte qu’elle
finisse cette putain de guerre. Mais les cicatrices seront là longtemps, très
longtemps, car si ça se pardonne, ça ne s’oublie pas.
Ce film ne se rend pas à la fin de la
guerre. Il s’arrête autour du 23 février 43.
Note
(1) Interview à « Paris Match »le 4 janvier 2007.
Références/Hyperliens
Armée des ombres sur
Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/L'Arm%C3%A9e_des_ombres
Cohn-Bendit, Daniel, 1986, Nous l’avons tant aimée, la révolution,
France : Points Actuels
FRESSOZ, FRANÇOISE, 16/02/07, De
Gaulle, Mitterrand : l'autre match de 2007, in les échos.fr/ VIE POLITIQUE
- ELECTIONS 2007 : www.lesechos.fr/info/analyses/4538764.htm FRANÇOISE
FRESSOZ est éditorialiste aux « Échos ». Les échos.fr, le web de
l’économie : www.lesechos.fr/
TOURAINE, Alain, 1972 (1968), Le communisme utopique. Le mouvement de mai 68, Paris: Seuil,
coll. Point.
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BetacamNUM / coul / 1h04m00s / 2006
Réal. et Scénario: Marie-Julie Dallaire et Andrée Blais. Photo: Yves
Bélanger, René-Pierre Bélanger. Montage: Myriam Poirier. Son: François Grenon.
Musique: Luc Raymond, Daniel Toussaint. Prod.: Sogestalt Télévision Québec inc,
Aviva Productions
À l'aide d'un simple autobus et de beaucoup de compassion, le Père
Emmett Johns a fondé l'organisme Dans la
rue pour répondre aux besoins physiques et psychologiques des jeunes de la
rue. Notre Père trace un portrait intimiste de celui que les jeunes ont si
affectueusement surnommé Pops. Le documentaire de Marie-Julie Dallaire et
Andrée Blais nous fait découvrir un homme de foi et de cœur.
MARIE-JULIE DALLAIRE a participé à l'édition 1994 de La Course
destination monde. En 1996, elle réalise L'Individu, un des sketches du film
Cosmos. En 1997, elle se tourne vers la publicité. Elle garde cependant un
attachement profond pour le documentaire d'auteur. Aux côtés d'Andrée Blais,
qui a travaillé avec elle au développement, à la scénarisation et au tournage
de Notre Père, elle a scénarisé un long métrage intitulé (XY)...Z.
Commentaires de Michel Handfield (23 février 2007)
Pops, c’est le Père Emmett
Johns, qui a fondé le Bon Dieu dans la
rue et sur lequel porte ce film. Son église, c’est son camion; son
ministère, aider les jeunes de la rue. Cela place le bon homme!
Ce qu’il fait, c’est un don de
soi. Il est là, les écoutes, leur donne de l’amour, les aides, compatit, suscite de l’espoir par sa force tranquille,
et, surtout, ne juge pas. C’est le
père des jeunes de la rue.
Il en a perdu des jeunes, mais il y en a aussi
sortis plusieurs de leur situation précaire
en près de 20 ans de mission. Depuis les premiers temps, où il n’y avait
que la roulotte, une série de services se sont ajoutés, allant de cours à des
services de vétérinaires pour ceux qui ont un animal.
Le Père Emmett Johns dit aussi
la messe, mais c’est pour un autre public : surtout des personnes âgées.
Le contraste est frappant entre ces deux missionnât de Pops. Qu’est ce qui peut
expliquer une telle différence entre les aînés et les jeunes dans notre
société? La toxicomanie? Mais, c’est souvent symptôme d’autres problèmes. Le
manque de travail stable? La désintégration de la famille dans la génération
entre ces grands parents que l’on voit à la messe et ces jeunes de la rue? Les
coupures dans l’aide sociale? La violence familiale? La violence chez les
jeunes? L’influence de la télé? On pourrait certainement faire une longue liste
de possibilités, mais je ne crois pas qu’il y aurait une réponse unique pour
expliquer le phénomène, même s’il est clair qu’il y a un problème qui n’a pas
frappé toutes les générations de la même façon. Peut être que l’on devrait
s’attarder davantage à ce phénomène avant de proposer des politiques et des
solutions, de manière à ce qu’elles soient plus appropriées. Si ça ne
fonctionne pas, mettra-t-on la cause sur l’inadéquation des solutions ou sur la
clientèle, la taxant de ne pas vouloir s’en sortir? Encore une fois on
stigmatisera le bénéficiaire, mais aura-t-on fait assez sur les causes?
Le missionnât de Pops est une
leçon, car il ne porte pas de jugements et ne fait pas de religion. Il aime
Jésus, Dieu et les jeunes. Le reste, c’est secondaire, et on comprend bien que
c’est à la politique et à la hiérarchie ecclésiastes qu’il pense quand il dit
cela. Lui, il les écoutes et les aide. Il est là pour eux. Point, mais c’est beaucoup.
Âgé de près de 80 ans, qui le remplacera
quand la santé ne lui permettra plus de le faire? La mission va demeurer,
l’organisation aussi, mais un jour ce ne sera plus Pops. Il ne faudrait pas que
sa place soit prise par un « preacher »
ou un moralisateur, car cela dénaturerait son œuvre. Que l’esprit de Pops
veille sur le Bon Dieu dans la rue.
***
Comme nous trouvions cette œuvre importante, nous avions mis un lien
vers leur site dès les premières années de Societas Criticus. Cependant, à
l’occasion de ce texte, une nouvelle recherche nous a appris qu’ils ont
maintenant un nouveau site plus complet
(www.danslarue.com) même si l’ancien est toujours
fonctionnel (www.sunnymead.org). Nous
vous invitons à le regarder.
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Skull and Bones et The Good Shepherd
Luc Chaput
21 février 2007
Ayant vu le film de fiction de et avec
Robert De Niro The Good Shepherd
sur les débuts de l'OSS et sa transformation en CIA, j'ai lu avec intérêt
ce livre puisque le personnage d'Edward Wilson interprété par Matt Damon a été
éduqué à Yale et a fait partie des Skull & Bones. Cet Edward Wilson
est basé sur deux dirigeants de la CIA, James Jesus Angleton et Richard Bissell.
Ce dernier étudia à Yale.
Le film montre la culture du secret. Lors de son
acceptation, le candidat doit confesser un secret personnel fondamental. Cette
culture du secret et de l’entraide est à la base des réseaux d'espionnage. En
racontant, pp. 207-211, les débuts de la conception de la bombe atomique,
l'auteure souligne jusqu'où cette obsession pouvait aller parmi les membres de
l'administration états-unienne.
La traduction de l'anglais est quelquefois incertaine,
spécialement en ce qui a trait à la Cour suprême. Ainsi, p.203, Le Chief
Justice est le juge en chef de la Cour suprême et non le chef de
la justice comme il est écrit. De même, p.196, on devrait lire « Bush
fut assermenté comme directeur de la CIA puis comme vice-président des
États-Unis par le juge de la Cour suprême Potter Stewart (S&B1937) qui
assistait fréquemment aux barbecues de la famille Bush. » et non comme il
est traduit : « Bush fut assermenté comme directeur de la CIA et comme
vice-président de la Cour suprême de justice par Potter Stewart (S&B1937)
qui assistait fréquemment aux barbecues de la famille Bush. »
P.S. The Good Shepherd vient de gagner le prix
de la contribution artistique pour l'ensemble de ses acteurs au dernier
festival de Berlin.
Le livre : Robbins, Alexandra, 2005, Skull and Bones, Paris: Max
Milo/Essais-Documents : http://www.maxmilo.com
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BREAKING AND ENTERING / PAR EFFRACTION
Durée: 118 min
Réalisation:
Anthony Minghella
Distribution: Jude Law, Juliette Binoche, Robin Wright
Penn, Ray Winstone
Will, un architecte londonien, connaît une crise existentielle au
contact d’un jeune voleur immigré entré par effraction dans son bureau….
Commentaires de Michel
Handfield (16 février 2007)
Milieu modeste (HLM). Un adolescent qui
a une identité encore mal définie. Né
d’une mère bosniaque et d’un père musulman… disparu, il vit maintenant en
Angleterre avec celle-ci. Il fait des combines avec ses oncles au lieu d’aller
à l’école parce que ça rapporte.
Dans un vol dans une firme ultramoderne
d’architectes installés au milieu de ce quartier en régénérescence, il prend un
portable et son oncle le lui confie. Il entre alors dans la vie de Will.
Après quelques vols, Will et un confrère
décident de surveiller leur bureau. Mais, Will sera le plus enthousiaste pour le faire, car c’est pour
lui une façon de sortir de la maison et d’échapper aux problèmes familiaux. Il
découvrira donc ce milieu de nuit, ce qu’il ne connaissait pas, mais aussi son
cambrioleur : un adolescent. Il s’en rapprochera et entrera en contact
avec sa mère, seule et charmante. Tout est en place pour la suite.
Certains parallèles peuvent
être faits entre les deux milieux, comme l’impact de la liberté et de la
société de consommation sur les ados. L’absence de contraintes
formelles parfois. L’enfant, centre de la vie et de la famille, apprend
ainsi son pouvoir et à en user sur les autres en commençant par ses parents.
Des différences aussi peuvent
être tracées. Dans un milieu, l’enfant a les moyens de poursuivre ses rêves
alors que dans l’autre il sent le poids de la pauvreté et préfère « faire
de l’argent » que d’aller à l’école malgré son talent, car il en a. La
délinquance n’est pas faute de talents. Parfois, c’est l’inverse. Trop de
talents qui ne sont pas canalisés. Quand on dit que l’on veut combattre la
pauvreté chez les enfants, on ne peut pas le faire sans tenir compte de la
famille. Un enfant n’est pas tabula rasa!
On doit aussi intervenir sur son milieu pour l’aider.
Mais, les enfants, dans leur
désir d’intégration au monde, qu’ils soient d’une ethnie ou « de
souche », veulent d’abord être comme les autres, ce qui passe par la
consommation dans la société occidentale. Tu es le jean que tu portes, le MP3
que tu as, la musique que tu écoutes et l’ordinateur que tu utilises. La
publicité joue d’ailleurs sur cette personnalisation des marques comme symbole
identitaire. Comme un signe d’appartenance à un groupe et à la société. La
consommation comme mode de vie et affirmation de soi.
Il n’est donc pas surprenant que le vol,
la vente de drogue ou la prostitution soit vu comme un moyen d’accéder à
l’intégration par l’argent dans ces conditions. C’est une question de valeurs
qui en soulève une autre, fondamentale:
Notre mode de vie, nos modèles d’intégration
et notre relation à la consommation sont-ils des facteurs criminalisant par les
désirs qu’ils créent, surtout chez les jeunes dont les valeurs sont en
formation?
Malgré son côté populaire, ce
film pose néanmoins certaines questions d’intérêts.
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L’amour est un opéra muet (Théâtre)
Du mardi 13 février au
samedi 3 mars 2007 à 20 heures
Espace Libre
1945, rue Fullum à Montréal
(métro Frontenac)
D’après Così fan tutte de Mozart
Adaptation d’Ulf-Guido Schäfer.
Interprétation par le quintette à vent
Maîtrise d’œuvre Jean Asselin.
Direction musicale Normand Forget
… Un opéra muet? Des corps qui chantent. Così fan tutte sera désormais
une ode au lyrisme charnel d’Omnibus. Vingt-deux extraits inspirés d’une
histoire d’amours et de trahisons, servis par un quintette à vent et deux
couples. Tout en harmonie, corps et instruments se mêlent pour une relecture
étonnante, parfois légère et irrévérencieuse mais toujours sensuelle de l’œuvre
de Mozart. Laissons parler les corps pour mieux parler d’amour…
Avec : Sylvie Chartrand, Mariane Lamarre, Christian LeBlanc, Martin
Vaillancourt et Danièle Bourget (flûte), Martin Carpentier (clarinette),
Normand Forget (hautbois), Mathieu Lussier (basson), Louis-Philippe Marsolais
(cor).
Scénographie : Stéban Sanfaçon /
Accessoires et costumes : Sarah Balleux /Lumières : Régis Guyonnet
Tarif : régulier 30 $ – étudiant 20 $ - groupe (10 personnes et plus) :
16 $
Prévente : 2 billets pour 30 $ (valables du 13 au 18 février 2007)
Billetterie : 514 - 521- 4191
Commentaires de Michel
Handfield (16 février 2007)
D’abord, la musique. C’est Mozart!
L’interprétation, plus qu’excellente; surtout que le quintette à vent était
capable de jouer sérieusement même dans les moments les plus humoristiques. Les
musiciens font partie intégrantes de la pièce. Ils sont en scène,
mi-accessoire, mi participant, toujours jouant en se déplaçant ou en
s’asseyant!
La pièce, du mime, déstabilise au début.
Mais, on s’y fait, et on comprend après peu de temps. C’est un peu comme
lorsque qu’on arrive de l’extérieur et qu’on pénètre dans une pièce très
sombre. Nos sens doivent s’adapter.
Cette pièce vient chercher tous nos
sens. Parfois on n’a pas assez d’yeux, car il ne faut jamais oublier qu’outre
les 4 comédiens, il y a 5 musiciens et le maître de jeu qui se déplacent sur la
scène. Quant aux comédiens, leur prestation est aussi acrobatique! C’est une
pièce parfois physique.
Le maitre de jeu a son importance, car
il lit chaque thème, ce qui fait qu’on est tous connecté sur un même point comme
spectateur. Par exemple, avec le thème « Partir pour la gloire », on comprend assez vite de quoi il
s’agit. Cela aide à la compréhension et à l’unicité de la salle. Cependant, on
n’est pas obligé de tous aller de la même façon à la même place, car il y a toujours les acteurs principaux,
mais aussi les autres sur la scène. Alors selon notre focus et nos processus
mentaux, notre interprétation peut varier. C’est ce qui fait la beauté de la
chose; la place laissé à notre imaginaire du fait qu’il n’y a pas de textes.
Mais la musique…!
À
travers les différents tableaux, on saisit le jeu de l’amour; son essence. La
taquinerie et la séduction, par exemple, sont comme les deux côtés d’une pièce
de monnaie. L’absence, elle, pose la question de la vie. Doit-on continuer à
vivre ou se cloitrer? Mais, continuer à vivre implique d’avoir encore du
sentiment. Si cela arrive pour un autre, est-ce une trahison?
La psychologie amoureuse n’est pas
escamotée. L’homme est un conquérant, mais il se plie à la femme pour avoir ce
qu’il veut. Il roucoule et fait les yeux doux. Par contre la femelle peut
l’agacer… D’ailleurs, certaines sont passées maître dans cet art! C’est un des
24 fragments du célèbre opéra de Mozart Cosi
fan tute présenté à l’espace libre :
« L’agace pissette ». C’est
dire qu’il y a eu une certaine relecture de cet opéra… par les mimes d’Omnibus!
Bref, une pièce sur l’homme et sa
compagne qui mime ce qu’on ne dit pas! Ainsi, l’amour est une force, mais qui
peut se briser. Quant à l’amitié, elle n’est pas plus solide que l’amour comme
on aime le croire, mais plus flexible. Alors si on s’éloigne, après un certain
temps on peut revenir et les choses se replacent contrairement à l’amour qui
doit d’abord cicatriser.
Une pièce particulière si vous voulez
utiliser vos sens pour découvrir l’amour sans mots dits!
***
Certaines scénettes, certaines séquences, m’ont fait penser aux films
muets qu’on nous passait autrefois en intermède à la télévision. Plusieurs
dataient d’ailleurs de la grande époque du muet, les années 20 et 30.
« Mime » de rien ces films on certainement eu un effet pédagogique
sans douleurs sur moi et sur nombre d’autres : nous faire comprendre ce
qu’était le mime sans que nous nous en doutions. Cela m’a donc donné quelques
référents qui me sont revenus à l’occasion de cette pièce. C’est là l’effet
pédagogique de la culture. Effet
insoupçonné mais dans lequel nous pouvons puiser au besoin. Des référents. Tout
est tellement bien minuté aujourd’hui, que nous avons perdu l’intermède à la
télé! Je plaide donc pour son retour, car ce serait une case parfaite pour du
court et très court métrage. Une occasion d’apprentissages pour combien de
spectateurs jeunes et moins jeunes?
---
Réalisé par Alexis
Durand-Brault
Mettant en vedette Michel
Côté et Karine Vanasse
En ouverture de la 25e
édition des Rendez-vous du cinéma québécois
A l’affiche au Québec dès
le 16 février 2007
Montréal,
le 23 janvier 2006 – Remstar, Forum Films et Alliance Atlantis Vivafilm
marqueront le coup d’envoi de la 25e édition des Rendez-vous du cinéma
québécois en présentant le premier long métrage d’Alexis Durand-Braul, MA FILLE
MON ANGE, mettant en vedette Michel Côté et Karine Vanasse. Cette grande
première lancera de façon exceptionnelle les festivités du 25e anniversaire des
Rendez-vous du cinéma québécois, le 12 février 2007. Produit par Maxime
Rémillard et Richard Lalonde, MA FILLE MON ANGE prendra l’affiche partout au
Québec le vendredi 16 février 2007.
Le
film nous entraîne dans l’univers de la pornographie sur Internet en mettant en
scène un père qui fera tout pour empêcher sa fille de commettre à ses yeux
l’irréparable. Montréal, temps présent. La police découvre le cadavre d'un
jeune homme dans un appartement envahi d'équipement informatique dernier cri.
Surprise, il possédait aussi une impressionnante collection vidéo de ses ébats
érotiques mettant en vedette de jeunes femmes en action. À Québec, Germain
Dagenais (Michel Côté), ancien avocat et aujourd'hui conseiller politique
avisé, est marié à Jeanne depuis 30 ans. Leur fille unique, Nathalie (Karine
Vanasse), est partie à contrecœur étudier le droit à Montréal. Elle y découvre
rapidement les folies de la vie nocturne et se fait prendre lentement mais
sûrement dans la toile d'un entrepreneur du «divertissement adulte ». Un soir,
à l'insu de sa femme, Germain visite des sites pornographiques sur Internet et
découvre l'inimaginable! Nathalie, sa propre fille, annonce qu'elle sera la
vedette d'une prestation XXX dans quatre jours ! Cauchemar ! Dévoré par la
culpabilité, il part pour Montréal afin d'empêcher Nathalie, son ange, de
commettre ce qui est, à ses yeux, l'irréparable. Le jour du tournage, l'acteur
porno qui devait initier Nathalie au métier est retrouvé mort. Qui l'a tué?
Nathalie a-t-elle renoncé au dernier moment ? Germain est-il allé au bout de sa
mission? Mais les vérités sont souvent plus compliquées…
Directeur
de la photographie hors pair, Alexis-Durand Brault a notamment signé la lumière
du film ELLE ÉTAIENT CINQ de Ghyslaine Côté, qui lui a valu une nomination pour
le Prix Jutra 2004, Meilleure direction photo. Avec MA FILLE MON ANGE, Alexis
Durand-Brault réalise son premier long métrage.
Distribué
par Remstar et Alliance Atlantis Vivafilm, MA FILLE MON ANGE prendra l’affiche
le 16 février 2007 sur les écrans du Québec ; d’ici là, on peut découvrir le
site officiel du film rendu possible grâce à la collaboration de Sympatico-Msn
en visitant : www.mafillemonange.com
Alliance
Atlantis Vivafilm est la filiale québécoise de Motion Picture Distribution LP,
un des plus grands distributeurs de longs métrages au Canada et qui occupe une
place sans cesse grandissante dans le marché de la distribution de films au
Royaume-Uni et en Espagne. Alliance Atlantis Vivafilm distribue des longs
métrages à des salles de cinéma, sur vidéo et dvd, ainsi qu'auprès des
entreprises de télédiffusion. Les porteurs de parts de Movie Distribution
Income Fund (TSX: FLM.UN) détiennent une participation minoritaire dans Motion
Picture Distribution LP.
Commentaires de Michel Handfield (14 février 2007)
On est dans la bourgeoisie de Québec.
Germain Dagenais, avocat et chef de cabinet, est en vue pour les prochaines
élections. Un ministrable comme on dit dans le milieu.
Famille heureuse. Père travaillant et bien
placé dans la bourgeoisie locale et de la politique provinciale. Une mère qui
semble effacée, mais gardienne du bonheur de la famille. Une fille qui veut
faire plaisir à la famille et se plie au moule qu’on lui « propose »
pour son bien. Elle ira donc étudier le droit à Montréal. Mais à 300 km du nid
familial, elle aura la liberté de déployer ses ailes; de les brûler aussi, car
quand on n’a pas appris la liberté, celle-ci peut être comme un vertige. Ma
fille, mon ange, aurait pu s’appeler ma fille, dame oiselle, car un oiseau qui
sort à l’extérieur de la maison se perd facilement parce qu’il n’a plus de
paramètres, comme les murs de la maison. Il veut aller au bout et n’a pas la
notion de s’arrêter et de revenir. Rendu trop loin, il est perdu. L’espace crée
un effet de vertige.
La surprise de ce père quand il voit sa
fille dans une annonce de film porno à venir sur internet. Il vient donc à sa
recherche à Montréal, ce qui nous donne droit à un thriller psychosociologique
intéressant. Jusqu’où peut-on et doit-on aller pour défendre nos enfants?
Pour elle, ce moment ne devait jamais
arriver, car elle dit à une de ses amis : « Mon père sait même pas
que ça existe! » Comme un père peut idéaliser ses enfants, l’inverse est
aussi vrai. On peut idéaliser nos parents; être naïfs à leurs égards. Bref, ils
ne sauront jamais ce que l’on fait, car on est dans un autre monde. Sauf que ce
monde est à un clic de souris de l’autre. Sa distance n’est qu’illusion.
D’ailleurs, ce père qu’elle croit naïf, n’est-il pas avocat et dans la
politique depuis de nombreuses années. Il en a « certainement vu
d’autres » comme l’on dit couramment. Mais, même à cela, il aura des
surprises.
***
Cela nous donne droit à un tour guidé de
l’industrie du sexe, car c’est bien d’une industrie qu’il s’agit, allant de la
rue au bar de danseuses et au cinéma porno.
À la tête d’une de ces agences de
diffusion, il trouvera une femme qui lui dira que tant que c’est légal, le
diffuseur diffuse! C’est sa job! De toute façon, si votre fille est majeure,
alors c’est son choix! C’est du commerce, une entreprise d’Entertainment comme
une autre. Pas plus immorale qu’un casino d’État où le citoyen peut perdre sa
paye de la semaine en quelques heures tout au plus. Vous ne pouvez pas protéger
une adulte contre elle-même, même votre fille. C’est la loi!
Ces multinationales du sexe, qui peuvent
être contrôlées d’un sous-sol de banlieue comme d’un quartier huppé de Montréal
ou d’un bureau du centre-ville, jouent sur le désir de voir de l’homme – et de
plus en plus de la femme - derrière l’anonymat de son écran d’ordinateur comme
derrière une fenêtre, d’où on voit sans être vu. Et le client en demande de
plus en plus : plus de qualité, plus de réalisme et plus d’accessibilité.
Cela implique des investissements majeurs. La techno coûte cher et on doit être
en avance sinon le client va aller ailleurs. La porno sur cellulaire est
« in » en Europe. C’est la prochaine tendance qui s’en vient ici. Il
faut aussi faire du direct, mais avec une qualité cinéma pour le net. On doit
toujours offrir plus sinon le client ira ailleurs! (Faut voir gicler). La
concurrence est mondiale. Avec l’internet le client a accès à la production de
la planète, que ce soit d’Asie, d’Europe ou d’Amérique. Il est partout et peut
acheter partout. Il n’y a pas de frontières sur la planète web.
On pénètre donc dans une industrie
particulière, pleinement mondialisée et qui a des moyens. Ainsi, une nouvelle
récente affirmait que l’industrie du porno se tournerait vers le HD DVD au
détriment du Blu ray. Serait-ce la mort annoncée du Blu ray? Peut être, car
avec la pornographie on parle d’une industrie de 57 milliards de dollars et de
millions de clients! Des millions de clients qui peuvent se tourner vers un
standard numérique au dépends de l’autre. C’est le poids de l’industrie du
porno sur la planète. (Stéphane Argentin, Le
porno sur Blu-ray ou HD-DVD?, 19/01/2007, sur Écran large.com : www.ecranlarge.com/news-dvd-896.php).
Par contre, une nouvelle recherche internet quelques jours plus tard montre que
les dés ne sont pas encore jetés, car les promoteurs du Blu ray ont démenti
toutes les rumeurs voulant qu’ils refuseraient les films pornos sur leur
support. C’est donc à suivre. Une recherche avec « Porno: Blu-ray ou HD
DVD » sur Google est d’ailleurs fort enrichissantes si je puis dire!
Le sexe, de pratique et plaisirs qu’il
était, devient de plus en plus un produit fantasmatique, car avec la peur du
SIDA, pourquoi risquer quand on peut en voir d’autre réaliser les fantasme que
l’on n’oserait plus faire soi même. On s’offre donc le « feeling »
par personne interposée comme dans les sports de combats. On joue sur
l’identification psychologique en lieu et place de la pratique, qui elle devient
autosatisfaction (masturbation). Mais ce phénomène touche toujours davantage
les hommes. Par contre, on se doit de souligner que « les études sur la consommation pornographique parmi les femmes sont
rares » (www.pathol08.com/louportail/portail/NPD/article.php?sid=932),
ce qui fausse probablement les données. Et si l’homme cherche le sexe
explicite, la femme cherche-t-elle l’émotion? D’où la popularité des romans
sentimentaux chez elles; une littérature de l’imaginaire et du désir. Ainsi 98%
des lecteurs des romans Harlequin… sont des lectrices qui font rouler la
machine : DEUX CENTS millions d’exemplaires, dont douze millions en
France, sont dévorés chaque année par cinquante millions de femmes! (AISSAOUI,
2006) Le roman rose serait-il l’équivalent féminin des revues et des sites
internet de la porno masculine? Deux marchés auxquels tentent de répondre des
entrepreneurs différents, où l’un a meilleur presse que l’autre, mais où il
s’agit en fait de répondre à une demande, car il y a un marché. Business is business!
Comme il y a des multinationales du roman rose, il y a
des multinationales du sexe avec des investisseurs de tous les milieux. Qui
nous dit que par les dédales de l’économie mondialisée et des filiales de
filiales, qu’il n’y a pas des entreprises aussi nobles que les fonds de
pensions et les institutions religieuses dans ces investisseurs de l’industrie
du sexe. S’il y a un marché et du rendement, pourquoi pas? Et quand un
journaliste tombera là-dessus par hasard, cela fera la manchette quelques
jours; on se défendra de ne pas avoir su et on vendra nos parts… On en
rachètera plus tard quand ce sera tombé dans l’oubli, car la porno c’est comme les salons funéraires, il y aura toujours des
clients dit le businessman à Germain Dagenais. C’est donc une bonne
affaire. Ce n’est d’ailleurs pas un cave, diplômé en informatique et très avisé du marché.
On a beau croire que ce monde est séparé du monde
réel, mais il suit les mêmes modes de production, d’investissement et de
distribution que les autres industries. Il est mondialisé; ses administrateurs
informés et cultivés. On vent du rêve comme certaines marques vendent du
prestige davantage que de l’utilité. Une montre Timex donne la même heure
qu’une Rolex, mais elles n’ont pas la même valeur question d’image. Donc, la
porno est dans un monde parallèle, mais elle n’est pas séparée par un mur, ni
un écran de verre, mais par un courant d’air. Il est facile de passer de l’un à
l’autre, les deux systèmes communiquant, échangeant des gens des informations,
des images et de l’argent. La publicité des montres peut ainsi être beaucoup
plus sexuée qu’avant tout comme la vedette porno portera peut être la montre de
l’heure dansa sa prochaine prestation! Et qui sait ce qu’elle fera avec…
Business as usual si ça fait vendre!
Bref, ce film présente une fenêtre vers cet autre
monde que l’on connaît moins, mais qui est là, copie conforme des mêmes
méthodes d’affaires avec les mêmes objectifs de rendement. C’est ce côté
documentaire que j’y ai vu.
***
Pour en revenir à ce thriller, défendu par de bons
comédiens, la petite famille pourra-t-elle redevenir comme avant après être
ainsi sorti de l’innocence? À voir comme un divertissement… ou comme matériel
sociologique permettant de jeter un coup d’œil sur un autre monde, où le réel
et le virtuel se rejoignent.
Hyperliens et références
Doctissimo :
www.doctissimo.fr/
Pornographie sur
Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Pornographie
Daoust, Valérie, Dossier ados et porno - Les jeunes filles, éternelles victimes du
sexe?, , Auteure de De la sexualité en démocratie. L'individu libre et ses
espaces identitaires (Presses Universitaires de France, 2005) et chargée de
cours en philosophie à l'Université d'Ottawa, in Le Devoir, Édition du lundi 02
mai 2005 : www.ledevoir.com/2005/05/02/80774.html?357
AISSAOUI, Mohammed, 22
juin 2006, La machine Harlequin, in
Figaro Littéraire, www.lefigaro.fr/litteraire/20060622.WWW000000328_la_machine_harlequin.html
Roman d'amour in
wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Roman_d'amour
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