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Societas Criticus et DI, Revues Internet en ligne

 

Societas Criticus

Revue de critique sociale et politique

On n'est pas vache…on est critique!

&

D.I. revue d’actualité et de culture

Où la culture nous émeut!

       

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

www.societascriticus.com 

 

Vol. 10 no. 5

(Du  5 août 2008 au 8 octobre 2008)

Cette revue est éditée à compte d'auteurs.

 

Pour nous rejoindre:

societascriticus@yahoo.ca

Societas Criticus

C.P. 182, Succ. St-Michel

Montréal (Québec) Canada H2A 3L9

 

Le Noyau!

Michel Handfield, M.Sc. sociologie (U de M), cofondateur et éditeur;

Gaétan Chênevert, M.Sc. (U de Sherbrooke), cofondateur et interrogatif de service;

Luc Chaput, diplômé de l'Institut d'Études Politiques de Paris, recherche et support documentaire.

 

Soumission de texte:

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Index de ce numéro :

 

La section Societas Criticus, revue de critique sociale et politique

 

Édito 

 

En quelques mots : De la différence entre gouvernement libéral et conservateur

« Assez de politique, c’est le temps de reprendre les affaires. »

Un deux pour un!  (L'art de ne pas se faire avoir de Mohamed Lotfi et Élections 2008 de moi-même!)

CHUM Le meilleur site risque d’être dilapidé pour un centre d’achat!

 

Essais

 

Le malaise québécois : confort et indifférence!

- « Jeff Fillion et le malaise québécois » Des pistes pour l’élection actuelle!

- Le confort et l’indifférence de Denys Arcand… Une mise en garde aux élections qui viennent!

 

La section D.I., Delinkan Intellectuel,  revue d’actualité et de culture

 

Commentaires livresques : Sous la jaquette!

 

Bourgault

ATLAS DU MONDE GLOBAL

L’Homme biotech : humain ou posthumain ?

 

Nouveaux livres reçus

 

Arts et Culture

 

L’Emporte-Pièces, programme annuel du tnm

 

Célébrer l'esprit humain d’’Ananda-Amrita Dance Creations

France, Nouvelle-France: Naissance d'un peuple français en Amérique

 

Cinéma et Théâtre (Ciné, Théâtre et quelques annonces d’événements) 

 

Le film Paris de Cédric Klapisch

Denys Arcand / L'œuvre documentaire intégrale 1962-1981

C’est pas moi je le jure

L’UN CONTRE L’AUTRE

TRUFFE

IMPORT EXPORT

LE CAS ROBERGE

 

Du 21 août au 1er septembre 2008. Le 32e FESTIVAL DES FILMS DU MONDE

 

Rapport : FFM 2008

LE BANQUET

À la recherche de l’extase!

- 9 TO 5 - DAYS IN PORN

- NO MIRES PARA ABAJO

- FOLLE DE DIEU

- À L'AVENTURE

NILOOFAR

TUMMIEN PERHOSTEN KOTI

SHULTES

JERUSALEMA

ABSURDISTAN

CE QU'IL FAUT POUR VIVRE  

FIGHTER

DAS WUNDER VON BERLIN

EN PLEIN COEUR

NOWHERE MAN

Las Mofas Mágicas

Le Noeud cravate

Drux Flux

TODOS ESTAMOS INVITADOS & I DEMONI DI SAN PIETROBURGO

FAUBOURG 36

 

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Index

 

Nos éditos!

 

En quelques mots :

De la différence entre gouvernement libéral et conservateur

Michel Handfield

 

7 octobre 2008

 

        Un gouvernement libéral est un gouvernement qui croit à la cohabitation du public et du privé et à un certain interventionnisme de l’État dans les sphères sociale, culturelle et économique pour ne nommer que celles-là. Naturellement, cela implique des choix et des décisions, parfois des mauvaises décisions que l’on peut toujours corriger après coup. Cela implique aussi des fonctionnaires et des hauts mandarins, certains parfois moins honnêtes que d’autres, ce qui fait qu’il y a toujours un certain risque de comportements malheureux et de glissements malhonnêtes. Mais, comme cela se passe dans un secteur public, donc scruté par tous et chacun, que ce soit des citoyens, des politiciens ou des journalistes, il y a de fortes chances que les comportements les moins opportuns soient dénoncés sur la place publique et sanctionnés. C’est comme si vous étiez dans la rue. Il est plus difficile de se cacher longtemps.

 

        Inversement, un gouvernement conservateur est un gouvernement qui croit au secteur privé davantage qu’au secteur public. Pour eux, le privé est la solution aux problèmes de l’État. Moins de risque de dérapage si le secteur public est faible. De toute façon, vu la rationalité inhérente aux systèmes, le privé se mettra moins dans le trouble. Il y a d’ailleurs beaucoup moins de scandales dans le privé que dans le public disent-ils. Mais, quand il y en a, ils sont beaucoup plus spectaculaires pourrait-on leur objecter! Pensons à Enron ou à la crise boursière actuelle. En fait, le privé, c’est comme si vous étiez dans votre maison ou votre chambre à coucher. On ne sait pas ce qui s’y passe jusqu’à ce qu’il ait un problème grave et que la police ou les pompiers soient appelés en rescousse. Ce n’est pas qu’il ne s’y passe rien, ni que c’est mieux; c’est que c’est caché de  la vue des autres.

 

        Moi, j’aime mieux un système public, avec ses risques de dérapage, mais que l’on peut voir et contrôler, qu’un système privé, qui agit en secret et en catimini, car il échappe à la vue! Je préfère donc un gouvernement libéral à n’importe quel gouvernement conservateur.      

 

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« Assez de politique, c’est le temps de reprendre les affaires. »

(Expression entendue dans un bulletin de nouvelle!)

Michel Handfield

 

4 octobre 2008

 

« Assez de politique, c’est le temps de reprendre les affaires. » C’est que Wall-Street demande l’intervention des gouvernements! Ils l’ont finalement eu le 3 octobre avec l’acceptation d’un plan de sauvetage de 700 milliards de dollars par la chambre des représentants. (1) Ce n’est pas rien. Mais, rappelez-vous, les marchés ne voulaient jamais voir les gouvernements dans leurs affaires et surtout pas les réglementer, car c’est du socialisme!

 

Désolé, mais le laissez-faire, crédo des conservateurs, c’était de l’anarchisme! De l’anarcho-capitalisme en fait! (2) Quant au socialisme, c’est quand l’État intervient dans tous les marchés pour les contrôler artificiellement. Moi, je préfère un certain libéralisme social, c’est-à-dire que si l’État intervient pour aider certaines entreprises et son économie parfois, l’État intervient surtout pour mettre des balises et faire savoir que tout n’est pas permis. Qu’il y a des lois et qu’il doit y avoir de l’ordre sur les marchés. Que vivre en société donne des privilèges, mais que viennent avec ceux-ci des responsabilités. (3)

 

On ne peut, comme le font les conservateurs, demander aux citoyens d’être un modèle d’ordre et de discipline, mais laisser les marchés tout faire au nom du libre marché. D’ailleurs, le libre marché est la plus belle des hypocrisies inventées à ce jour! En effet, le libre marché, c’est la liberté de commerce entre deux personnes, deux entreprises ou deux États consentants. Selon ces termes, deux personnes consentantes pourraient faire une transaction de drogue ou sexuelle. Pourtant, les lois l’interdisent et ne comptez surtout pas sur les conservateurs pour les abolir. Au nom de la morale, ils renforceraient plutôt ces lois. Alors, comment peuvent-ils prétendre que l’État ne doit pas entraver le libre marché? L’usage prouve hors de tout doute que les conservateurs placent des entravent au marché, cela au nom de la morale. C’est notamment le cas des drogues douces, question sur laquelle les libéraux étaient beaucoup plus ouverts. (4) Naturellement, on présente ce combat sous des airs de santé publique, sauf que combien de produits sont dangereux pour la santé et en vente libre malgré tout; les entreprises productrices parfois même subventionnées! Si on veut régler les problèmes de santé, aux drogues devraient s’ajouter toute une liste de produits et de comportements interdits. Mais, là, les conservateurs nous servent l’argument que l’État n’a pas à intervenir dans le privé! Double discours, simple hypocrisie! Voilà ce que j’en pense.             

 

Notes :

 

1. Deux textes parmi d’autres à ce sujet :

 

Claude Turcotte, Plan Bush: le Congrès se résigne, Le Devoir, Édition du samedi 04 et du dimanche 05 octobre 2008 : www.ledevoir.com/2008/10/04/209135.html

 

DAVID M. HERSZENHORN, Bailout Plan Wins Approval; Democrats Vow Tighter Rules, New-York Times on line, October 3, 2008:  www.nytimes.com/2008/10/04/business/economy/04bailout.html?_r=1&adxnnl=1&oref=slogin&adxnnlx=1223129675-ofJqUen6awlLEEXg2eibZA

 

2. En effet, dans un livre très intéressant sur l'anarcho-capitalisme, Pierre Lemieux (1988) nome David Friedman, Robert Nozik et Murray N. Rothbard comme des théoriciens anarcho-capitalistes et Friedrich Hayek comme un penseur apparenté!  Le même Hayek, prix Nobel d’économie en 1974, est d’ailleurs considéré comme un des penseurs du néolibéralisme! (Bernard, 1997) Ceci montre bien les relations assez intimes qu’il y a entre ce courant et le néolibéralisme. D’ailleurs, les anarcho-capitalistes ont mis de l’eau dans leur vin et acceptent maintenant un État minimal attaché à la « protection » des citoyens, avec une police et une armée forte pour protéger leurs biens et leurs droits individuels, mais sans filet social pour protéger l’intégrité humaine, car il ne faut pas entraver le marché ni l’individu! On appelle ce courant le libertarisme. (Voir Arnsperger et Van Parijs, 2000, pour plus de détails.)  Les républicains, aux Etats-Unis, et les nouveaux conservateurs canadiens, issus de la fusion entre l’ancien parti progressiste-conservateur, de centre droit, et de l’Alliance-Canadienne, beaucoup plus à droite, sont de ce courant. Si le nom semble le même, on a laissé tomber la particule progressiste ! Ce n’est donc  plus le bon vieux parti conservateur de centre droit que nous connaissions, mais bien un nouveau parti de droite! 

 

3. C’est un peu le sens qu’a pris l’accord du G4 :

 

 « Les quatre membres européens du G8, réunis samedi 4 octobre à Paris, ont pris l'engagement solennel de soutenir les établissements financiers européens en difficulté. (…) En contrepartie, les membres du G4 demandent des sanctions contre tout dirigeant qui aurait "failli" et dont l'établissement devrait être aidé. » (LEMONDE.FR avec AFP et Reuters, Le G4 s'engage à porter secours aux établissements financiers européens en difficulté, Le Monde, 04.10.08, 20h03, mis à jour à 21h09 : www.lemonde.fr/la-crise-financiere/article/2008/10/04/le-g4-s-engage-a-porter-secours-aux-etablissements-financiers-europeens-en-difficulte_1103179_1101386.html#ens_id=1102984

 

4. Attention, je prends cet exemple, mais je n’ai jamais fumé une cigarette ordinaire. Par contre, je crois que les campagnes de prévention contre la drogue seraient plus efficaces si leur usage était au moins décriminalisée, car il est difficile d’avouer un problème et de consulter pour le régler s’il nous place en situation d’hors la loi ou de criminel. Comme pour la dépendance à la cigarette, à l’alcool ou au jeu, on pourrait mieux intervenir si l’usage n’était pas criminalisé, ce qui ne veut pas dire d’en décriminaliser le commerce. Par contre, l’État pourrait prendre en charge cette vente pour la sortir de la rue. Une avenue possible pourrait être d’autoriser la vente de certaines drogues  dans certaines pharmacies ou des organismes attitrés, où un spécialiste pourrait contrôler l’âge du consommateur et l’informer, surtout s’il ne semble pas être un habitué. Ainsi, à un gars ou une fille en peine d’amour, d’autres solutions que de se « shooter pour oublier » pourraient leur être proposées, façon de prévenir qu’une dépendance ne se développe. Il y a d’autres façons de penser que la seule répression, ce qui ne veut pas dire qu’elle ne doit pas être utilisée en certaines circonstances bien précises et bien encadrées.

     

Bibliographie :

 

Arnsperger, Christian, et Van Parijs, Philippe, 2000, Éthique économique et sociale, France : La Découverte/repères

 

Bernard, Michel, 1997, L'utopie néolibérale, Québec: L'aut'Journal & Chaire d'études socio-économiques de l'UQAM.

 

Hayek, Friedrich :  http://fr.wikipedia.org/wiki/Friedrich_Hayek

 

Lemieux, Pierre, 1988, L'anarcho-capitalisme, Paris: PUF, «que sais-je?»

 

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Un deux pour un!

 

Au moment où nous préparions notre édito sur les élections 2008, nous avons reçu un texte de Mohamed Lotfi, journaliste et réalisateur radio, que nous considérions tout aussi éditorial. Nous en avons donc retardé la publication pour mettre ces deux textes en éditorial en même temps. C’est donc avec plaisir que nous vous présentons L'art de ne pas se faire avoir de Mohamed Lotfi et Élections 2008 de moi-même!

 

Michel Handfield, éditeur

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L'art de ne pas se faire avoir

Mohamed Lotfi, journaliste et réalisateur radio (1)

 

 17 septembre 2008 (reçu le 15 septembre)

 

        Si la politique, d'après Paul Valéry, c'est l'art de se servir des gens,  ça serait peut-être aux gens de servir de la politique pour faire de l'art.  L'art de ne pas se faire avoir. 

 

        Quand le 21 avril 2002, Jean-Marie Le Pen a été qualifié au second tour des élections présidentielles en France, 82% des électeurs français, de différents courants politiques, se sont mobilisés au second tour pour voter contre l'extrême droite.  Des manifestations de masse avaient eu lieu tous les jours exprimant l'opposition populaire à la politique d'extrême-droite de Le Pen.  Devant une telle mobilisation, les chefs des autres partis, les communistes, les socialistes et les verts, ont appelé à voter pour Chirac.  Dans le Journal Libération, Daniel Cohn-Bendit avait qualifié la nécessité de voter pour le candidat de droite de ''super mensonge ludique''. 

 

        Chez nous, malgré le danger réel que représente la réélection du parti conservateur en gouvernement majoritaire, apparemment rien ne laisse présager que les autres partis politiques vont constituer en pleine campagne électorale un front anti-Harper.   Le NPD ne se ralliera jamais au parti libéral et le Bloc ne cédera jamais la place au NPD.  Et pourtant, nous avons au Canada,  et particulièrement au Québec, une plus forte raison pour imiter les français, puisque notre extrême droite est déjà au pouvoir depuis deux ans et demi. Et nous savons maintenant concrètement de quoi elle est capable. 

 

        La division de la gauche a grandement contribué aux succès de la droite partout dans les démocraties occidentales.   La montée spectaculaire de l'ADQ en 2007 et l'élection du parti conservateur en 2006 sont révélateurs  de la faiblesse de la gauche et de son incapacité à former une coalition forte et solidaire.  La menace d'un gouvernement majoritaire formé par le parti conservateur va-t-elle mettre fin à cette division?

 

        À défaut de compter sur une coalition Bloc-NPD avec le parti libéral, le seul front capable d'empêcher Harper et son parti d'être réélus demeure celui des voix progressistes.  Les objecteurs de conscience devraient s'exprimer haut et fort à l'intérieur et en dehors des partis politiques, pour réhabiliter une certaine conscience canadienne, celle fondée sur la justice sociale, les droits de l'homme, la promotion de la paix, le soutien à la culture et la protection de l'environnement.  Des valeurs qui placent le Canada parmi les pays les plus modernes attirant chaque année des milliers d'immigrants.   Des valeurs pour lesquelles le parti conservateur a démontré clairement son total mépris. 

 

        Durant son premier mandat, Harper et son gouvernement conservateur ont coupé dans le financement aux organismes d'aide à la condition féminine.  Ils ont remis en question, avec leur projet de loi C-484, le droit à l'avortement.  Ils ont consacré 15 milliards à l'armement.   Ils ont voté contre l'adoption de la Déclaration des droits des peuples autochtones.   Ils ont enfoncé le Canada en Afghanistan dans une guerre coûteuse,  inutile et dont personne ne prédit la fin.    Ils ont écarté toute possibilité pour le Canada d'adhérer aux objectifs de Kyoto.  Ils ont coupé dans les programmes d'aide à la culture.  Ils ont essayé de museler les journalistes de la Chambre des communes.  Ils ont modifié la loi pour que les jeunes contrevenants de 14 ans reçoivent des peines pour adultes et ce malgré l'opposition de la cour suprême. Ils ont refusé de rapatrier un jeune canadien de l'enfer de Guantanamo lui enlevant toute possibilité d'être jugé au Canada dans un procès juste et équitable.   En quoi ces actions et ces mesures du gouvernement conservateur correspondent aux valeurs canadiennes? 

 

        Quand Stephen Harper  nous dit avec ironie qu'il se contenterait d'un autre gouvernement minoritaire, c'est parce qu'il sait lui-même à quel point les canadiens et particulièrement les québécois ne peuvent adhérer totalement aux valeurs de son parti.  Des valeurs propres à une idéologie d'extrême droite que Harper essayent de camoufler derrière l'image d'un père aimant et un homme touché par la mort de jeunes soldats.   ''J'ai pleuré'' a t-il dit aux journalistes pour parler des premiers soldats morts en Afghanistan. 

 

        Aucun  de ces journalistes n'a osé demander à Harper quel genre d'émotion avait-il ressenti face aux images d'un jeune canadien en détresse, détenu à Guantanamo depuis 2002.  Apparemment les journalistes, ainsi que les autres partis politiques, ne considèrent pas l'affaire Omar Khadr comme un enjeu électoral.   Quelle voix sera assez courageuse pour rappeler que l'affaire Omar Khadr, c'est notre affaire à tous. Une affaire de respect.   Le respect du droit,  le respect des droits de l'enfant et le respect des conventions internationales dont le Canada est signataire interdisant le recrutement et l’utilisation des enfants soldats. À nous de nous servir de la politique pour faire du respect de la dignité humaine un enjeu électoral. 

   

        Certains pensent que voter contre ou voter stratégique n'est pas la meilleure façon de servir la démocratie.  Mais l'histoire nous enseigne que la démocratie est souvent une affaire d'ironie.  Les présidentielles de 2002 en France est un parfait exemple.  Des millions de français ont marché sur leur orgueil en votant pour un candidat qui n'était nullement leur préféré.  Ils l'ont fait pour une bonne cause.  Pour combattre la résignation. 

 

        Résignation, une pilule au goût amer que des sondeurs, des analystes et beaucoup de journalistes essayent de nous faire avaler pour supporter, selon eux, l'inévitable réélection du parti conservateur.   Comme si l'histoire était écrite d'avance.  Comme si Harper était un ouragan contre lequel on ne pouvait rien. Comme si les citoyens n'avaient plus leur mot à dire.   Comme si aucune alternative aux conservateurs n'était possible.    Et comme si le vent de changement et d'optimisme qui règne aux États-Unis ne pouvait pas nous inspirer. 

 

        Quel que soit le parti pour lequel vous envisagez voter le 14 octobre prochain, il serait peut-être pertinent de vous demander simplement si votre vote, pour votre candidat ou votre parti préféré,  ne favorise pas indirectement l'élection d'un parti qui ne vous ressemble pas. 

 

        Une autre façon de mieux orienter votre vote, serait de faire partie d'un groupe d'électeurs échangistes anti-Harper.  D'après Radio-Canada, cette nouvelle façon de voter a été  initiée par un internaute de Hamilton en Ontario.  Dans le cadre d'un réseau d'amis sur facebook, de plus en plus de citoyens canadiens envisagent voter de la façon suivante: ''Si par exemple un électeur néo-démocrate vit dans une circonscription où il est possible pour le parti libéral de battre les conservateurs, il peut proposer de voter libéral et, en échange, un autre internaute votera NPD dans une autre circonscription''.

 

        Aussi stratégique, pour ne pas dire ludique, soit-il, votre vote doit tenir compte de la menace que représente la réélection d'un gouvernement conservateur, qu'il soit minoritaire ou majoritaire.   C'est votre droit d'exercez votre art de ne pas vous faire avoir.

 

Post-scriptum

 

Mon voisin me disait dernièrement qu'il allait voter pour Harper parce que selon lui ce dernier dit ce qu'il fait et fait ce qu'il dit, ''Il tient ses promesses''.  J'ai répliqué à mon voisin : ''Entre voter pour quelqu'un qui me promet l'or pour finalement me donner le bronze ou voter pour un autre qui me promet de la ''marde'' pour finalement me donner de la ''marde'', mon choix n'est pas difficile à faire..''.

 

Note :

 

1. Sous sa signature Mohamed a mis les sites suivants que nous vous invitons à consulter :  

 http://graines.hautetfort.com 

www.souverains.qc.ca/flash4.html 

www.myspace.com/souverains

 

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Élections 2008!

Michel Handfield

 

17 septembre 2008

 

La question du Québec doit être réglée au Québec. Le Bloc devrait donc se retirer du parlement fédéral. A défaut de comprendre, les électeurs devraient leur envoyer un message clair.  Si vous êtes de centre ou de centre gauche, il y a le parti Libéral. Plus à gauche, le NPD! Pour l’environnement il y a le parti vert, quoi que j’aie aussi  confiance à Stéphane Dion sur ce sujet. En plus, il pourrait former un gouvernement. Ce n’est pas négligeable. Le centre gauche devrait commencer à se poser des questions depuis l’union de la droite. Si, auparavant, le vote de droite était divisé entre les progressistes-conservateurs, de centre droit, et le Reform Party, d’une droite plus radicale, ils se sont mariés depuis pour former un bloc de droite : le Parti Conservateur. (1)   Ne leur en déplaise, mais cela prouve que le mot mariage n’est pas limité à l’union d’un homme et d’une femme, puisqu’il peut aussi s’applique aux partis politiques! Dans ce cas, cela les a bien servit, puisqu’ils ont pris le pouvoir en 2006 et risquent d’y être reconduit, même avec une minorité de votes, vu la division du vote de contestation. Les tenants du centre gauche et de la gauche devraient y penser avant de voter. On pourrait toujours voter utile, c’est-à-dire Libéral, pour ne pas diviser inutilement le vote progressiste à cette élection, car les libéraux peuvent former un gouvernement. C’est déjà beaucoup. Et si Stéphane Dion semble un leader faible, il n’a d’autre choix que de travailler en équipe, ce qui fait généralement un gouvernement plus équilibré que dans le cas d’un gouvernement où tous les membres ne sont que des pions sous la gouverne d’un chef autoritaire. Surtout des pions sans droit de parole sans l’autorisation du chef comme cela semble le cas actuellement au Parti conservateur. 

 

Après cette élection, les partis qui se réclament du centre gauche et de la gauche devraient se pencher sur la question d’une union des progressistes, car le centre gauche ne peut plus s’isoler aussi impunément du centre face à l’union de la droite. S’il demeurera des partis plus à gauche, comme les marxistes, ou des partis ciblés, comme les verts, une union des Libéraux et des Néo-démocrates serait-elle possible pour former un seul grand parti de centre gauche face au grand parti de droite que sont devenus les conservateurs? Pourrait-on former un Parti libéral-démocratique par exemple? Les verts pourraient aussi s’y joindre ou, à défaut, collaborer comme c’est actuellement le cas, le parti libéral ne présentant aucun député face à Mme May, la cheffe des verts!  Moi, je crois que oui, car on est dans un système qui ressemble davantage au système Britannique ou États-Uniens, ce qui favorise le bipartisme ou le tripartisme, que dans un système à l’européenne qui favorise le multipartisme et les gouvernements de coalition. Si on veut des coalitions, il faut donc les faire avant les élections, dans les partis politiques. 

 

Quant au Bloc, ce parti devrait se questionner sur son utilité, ne pouvant pas former un gouvernement. Si le Bloc veut la souveraineté, il doit aller gonfler les rangs péquistes pour réchauffer cette option, car son grand frère l’a mis au congélateur pour ne pas dire au rancart. Comme, en attendant le moment du nième référendum, on fait toujours parti du Canada, vaudrait mieux faire aussi parti du gouvernement. Les plus à gauche du Bloc Québécois qui voudraient œuvrer au Fédéral pourraient alors aller vers les libéraux-démocratiques ou les verts (s’ils ne font pas parti de cette union) et les plus à droite vers les conservateurs, cela à condition d’accepter le fait qu’en participant au gouvernement on peut aussi changer des choses et qu’un jour l’option souverainiste n’en soit peut être plus une.  S’ils ne peuvent accepter les règles du fédéral, vaut mieux qu’ils militent pour leur option au Québec, car la défense du Québec dans l’opposition n’est pas une position sérieuse à long terme si on ne peut former un gouvernement de remplacement, ce qui est le cas du Bloc. D’ailleurs, le Bloc a eu beau dénoncer de toutes ses forces certaines coupures des programmes fédéraux liés à la culture, ces contestations ne permettaient pas de renverser le gouvernement ni même de renverser la vapeur, car si l’opposition peut défaire des lois, elle ne peut défaire des règlements de régie interne comme une révision des programmes par exemple. Un gouvernement minoritaire a donc beaucoup de latitude s’il sait jouer du règlement plutôt que de la loi!  Le gouvernement conservateur a donc pu poursuivre sa marche sans être inquiété des protestations du Bloc et de l’opposition. Pour pousser plus loin l’injure, le gouvernement conservateur à lui-même appelé les citoyens aux urnes alors que c’est l’opposition qui aurait dû le défaire sur cette question de la culture, si cette question avait pu permettre de défaire le gouvernement, mais ce n’était pas le cas, car très peu de questions permettent de renverser un gouvernement finalement, si minoritaire soit-il! Cela devrait faire réfléchir les partis d’opposition sur la nécessité d’une union des progressistes pour faire face à une droite plus uni qu’auparavant. Au diviser pour régner, il faut opposer une union des progressistes!        

 

Note :

 

1. Il y eut d’abord  le Parti réformiste du Canada dans les années 90 (www.thecanadianencyclopedia.com/index.cfm?PgNm=TCE&Params=F1ARTF0006737), puis l’Alliance Canadienne (www.thecanadianencyclopedia.com/index.cfm?PgNm=TCE&Params=F1ARTF0009255) au début des années 2000, formé sur les restes des réformistes auxquels se sont ajoutés les conservateurs plus de droite, ce qui a conduit à l’union des alliancistes et des progressistes-conservateurs dans un nouveau Parti Conservateur le 8 décembre 2003.   

 

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CHUM 

Le meilleur site risque d’être dilapidé pour un centre d’achat!

 

 

Montréal, le lundi, 25 août 2008

 

A/S Dr. Gaétan Barrette, président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ)

 

CC : MONSIEUR GÉRALD TREMBLAY. MAIRE DE MONTRÉAL

Docteur Yves Bolduc, Ministre de la Santé et des Services sociaux

Office de consultation publique de Montréal, qui regarde justement cette carrière!

 

 

Quand j’ai lu que près de trois médecins spécialistes sur cinq sont en désaccord avec le choix du site pour le CHUM, j’ai cru bon vous faire parvenir cette proposition que j’avais faite en 2004…  Naturellement, n’étant pas connue des instances, elle avait probablement pris le bord de la poubelle. Pourtant, j’ai moi aussi fréquenté l’U de M! Je vous fais donc parvenir cette ancienne lettre, mais avec un Post-scriptum  à la fin, car elle est toujours aussi d’actualité et pertinente qu’à l’époque, ce dossier n’ayant pas évolué.

 

Remarquez que pour de tels projets, que ce soit le CHUM ou les fusions municipales, on devrait toujours faire une première consultation publique, car cela élargirait les cadres du débat et ouvrirait des possibles. Certains citoyens sont intéressés et ont des choses à dire qui mériteraient certainement d’être entendues. On a tort de ne pas faire ce premier appel au public. Il serait salutaire.

 

D’ailleurs, on assimile trop souvent le citoyen à un client de nos jours, ce qui ne peut que le déresponsabiliser et le placer en situation de demandeur comme s’il était toujours placé devant un étalage de grand magasin. Si on veut des citoyens responsables, on doit d’abord les considérer comme tels : des citoyens! L’État n’est pas Wal-Mart. Les politiciens devraient le savoir, eux qui livrent rarement la marchandise!

 

     

Bien à vous,

 

Michel Handfield, B.Sc., M.Sc. sociologie

Diplômé de l’Université de Montréal 1982, 1988.

www.societascriticus.com

 

Un site novateur pour le CHUM! (1)

Michel Handfield

 

Montréal, le 8 décembre, 2004 (Societas Criticus/Éditos, Vol. 6 no. 3)

 

A/S CA du CHUM

Philippe Couillard, Min. de la santé et des services sociaux

William Cusano, député de Viau

Gérald Tremblay, Maire de Montréal

 

 

Nous avions un projet novateur dans notre quartier – faire un centre de caravaning dans l’ex carrière Francon, où il n’y a JAMAIS eu de déchets contrairement à l’ex-carrière Miron plus à l’Ouest – mais il semble maintenant qu’il ne se réalisera pas. Cette carrière étant stratégiquement placée au cœur de Montréal, ce site serait peut être intéressant pour le futur CHUM à plus d’un titre :  

 

1) Il risque d’y avoir beaucoup moins de contamination que sur les terrains du CP d’Outremont, car il est totalement sur le roc et n’a jamais eu de déchet;

 

2) Ce site est stratégiquement bien placé à l’angle des rues Jarry et Pie-IX, soit dans le centre Nord de Montréal,  près des transports en commun, notamment de la future station IX/Jean-Talon de la ligne bleue qui conduit directement à l’Université de Montréal; de Pie IX, qui est une des grandes artères Nord/Sud de Montréal et une porte vers le Nord; et enfin près de Crémazie (l’autoroute Métropolitaine), 2 rue plus au sud;

 

3) Ce terrain appartient déjà à la ville de Montréal, ce qui faciliterait probablement les négociations d’acquisition;

 

4) De par sa configuration sous le niveau de la rue, ce site bénéficie aussi d’un micro climat et est à l’abri des bruits de l’extérieur, un plus pour un hôpital si l’on parle en terme de tranquillité pour les patients;

 

5) En terme d’espace pour les développements futurs, ce site bat facilement le centre ville et se compare avantageusement bien aux terrains du CP.

 

. De plus, on aurait là une continuité avec l’histoire de l’Université de Montréal, celle-ci étant construite dans une ancienne carrière à flanc de montagne! Ce serait là un projet de recyclage d’un ancien site industriel novateur et spectaculaire (on croit à un paysage de montagne); une vitrine pour l’U de M. Quant aux sceptiques, je vous signale que le palais de justice de Laval est construit sur le plateau d’une ancienne carrière de Laval.

 

Ce serait aussi un projet structurant pour un quartier comme le notre et il s’inscrirait bien  dans le développement de la Cité des arts du cirque, 1 ou 2 km plus à l’Ouest; du pôle récréo-touristique tant souhaité par le milieu, sur la rue Jarry; et, enfin, de la vitrine environnementale promise par la ville de Montréal pour notre autre carrière plus à l’Ouest (MIRON).

 

Je vous suggère d’examiner cette avenue avec celles que vous avez déjà, car ne la connaissant probablement pas, il vous était impossible de la considérer jusqu’à présent. Mais elle est à considérer sérieusement, car elle bénéficie de certaines forces naturelles, sa localisation et sa propriété déjà publique, et elle représente en plus l’occasion de montrer un savoir faire novateur en recyclage d’un ancien site industriel. Si vous voulez un CHUM qui fera vraiment parler de lui hors de nos frontières, car il sera un modèle novateur de recyclage d’un ancien site industriel fort spectaculaire en soi, c’est un site à considérer.  

 

 

Bien à vous,

 

Michel Handfield, M.Sc. sociologie

Diplômé de l’U de M

 

Note :

 

1. Centre Hospitalier de l’Université de Montréal : http://www.chumontreal.qc.ca/

 

Post-scriptum (25 août 2008):

 

Aucun site n’est parfait : le centre ville ou Outremont, c’est le bruit de l’autoroute ou des voies ferrées. L’ex-carrière Francon, ce sont les chutes à neiges, normalement utilisés quelquefois entre décembre et mars, exception faite de l’hiver 2007-2008 où ce fut exceptionnel. Mais il y a 9 mois de tranquillité exemplaire quand les fenêtres sont ouvertes. Des aménagements sont peut être aussi possibles.  

 

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Index
 
Essais
 

Le malaise québécois : confort et indifférence!

 

Pour les commentaires autour du livre de  Jean-François Cloutier sur « Jeff Fillion et le malaise québécois » et le film de Denys Arcand, « Le confort et l’indifférence », j’ai choisi, après maintes hésitations, de les placer dans la section Essais et non dans les sections livres ou cinéma où ils auraient pu être, car je les ai regardé et traité à la lumière de la période électorale et de turbulence dans laquelle nous sommes actuellement.

 

Michel Handfield, Montréal, le 7 octobre 2008

 

- « Jeff Fillion et le malaise québécois » Des pistes pour l’élection actuelle!

- Le confort et l’indifférence de Denys Arcand… Une mise en garde aux élections qui viennent!

 

***

 

« Jeff Fillion et le malaise québécois »

Des pistes pour l’élection actuelle!

Michel Handfield

 

Commentaires autour du livre de  Jean-François Cloutier paru chez Liber (www.editionsliber.org/).

 

7 octobre 2008

 

         Jeff Fillion et radio X. On a entendu parler de Jeff Fillion à Montréal quand ses dérapages, c’est-à-dire ses attaques contre l’intelligentsia et l’élite culturelle, médiatique  et politique Montréalaise, même si certains « sévissaient » ailleurs, que ce soit à Québec ou en région, sont sortis dans les nouvelles nationales.  Puis, vu les menaces de perte de licence (droit de radiodiffusion) de cette station, on a ensuite vu les manifestations que cela a suscité à Québec, mais aussi à Ottawa, où des autobus ont conduit les partisans de CHOI/radio X. Cependant, à part le point de vue condensé des bulletins de nouvelles et de quelques émissions qui regardaient ce phénomène, parfois parce qu’elles en étaient elles-mêmes des victimes, très peu de gens connaissaient cette radio hors d’où elle diffusait. L’impression que cela donnait, vu de Montréal, était qu’ils ont trop fait les cons, qu’ils paient pour maintenant! Cependant, la lecture de ce livre change la perspective.

 

        Oui, ils ont fait les cons, mais ils n’ont pas que fait les cons. Ils dénonçaient ce qui apparaissait inconcevable à certains, comme les jeunes hommes de la génération X. Et pas les moindres, car « les diplômés de cégeps et d’universités sont surreprésentés dans son auditoires » remarque Simon Langlois, cité dans ce livre. (p. 140) (1)  Cependant, la manière n’étaient peut être pas la bonne, prenant des têtes de turcs et les ridiculisant au-delà des limites du bon goût et du civisme. Leurs têtes de turc : souvent des montréalais, avec une fixation particulière sur le plateau Mont-Royal.

 

Une autre manifestation de la rivalité Québec/Montréal? Fort probablement, car Montréal, c’est la grande ville, plus libérale, plus multiethnique. Celle qui menace la culture homogène, le tricoté serré, des régions. Radio-X, c’était plutôt une vision de droite; libertaire et individualiste (p. 19), alors il n’était pas étonnant que Mario Dumont les appuie. C’était son électorat. D’ailleurs, les conservateurs d’Harper ont eu du succès dans ce même bassin à la dernière élection et espèrent renouveler ce fait d’arme à celle-ci. Il est vrai que Québec est une ville conservatrice et fédéraliste. Au référendum de 1995, Québec n’a dit oui qu’à 52%, soit un score inférieur aux autres régions francophones de l’Est de la province. Avec un taux de 55% comme d’autres régions, l’issue du vote aurait été différente. (p. 50) Ce sont là deux des cinq traits propres à Québec qui expliquent les succès de Jeff Fillion et de CHOI. Ces traits sont : une ville conservatrice (p. 35); l’anglomanie (p. 43); le fédéralisme de Québec (p. 48); la rivalité avec Montréal (p. 54); et le gros village (p. 56), soit « sa remarquable homogénéité. » (Ibid.) 

 

        Il y avait aussi tout un contexte, où les médias devenaient de plus en plus des relais de Montréal dans un processus de consolidation de l’industrie (acquisition/fusion) qui faisaient en sorte que les auditeurs ne se reconnaissaient plus dans ce qu’on leur proposait en onde. Dans ce contexte, s’affirmer face à Montréal et à la bourgeoisie bien pensante du plateau devenait comme un symbole voulant dire « je me tiens debout! » Il y avait donc tout un contexte et une position politique, malhabile certainement, dans ce que faisait CHOI, mais une position qui trouvait un certain écho dans la population.

 

        En opposition à Montréal, être de droite devient une prise de position qui va au-delà d’un simple vote. C’est s’opposer au modèle libéral d’une élite montréalisée selon Jeff Fillion et la gang de CHOI. (p. 84)  Le discours populiste devient discours politique! La filiation avec l’ADQ et Mario Dumont est donc évidente, même dans les banlieues montréalaises, le 450, qui veulent échapper aux coûts de vivre à côté d’une grande ville qui semble leur dicter quoi faire  et aux ponts, car Montréal est une île! (2) Si nos banlieues avaient une radio indépendante, elle ressemblerait peut être à cela. Remarquez que si Québec a sa mentalité de village, nous avons peut être notre mentalité d’insulaire. Pour nous, aller à Paris ou à Québec, c’est quitter notre île! C’est en dehors de la ville!

 

        Cette opposition à Montréal pourrait donc se traduire en opposition à Montréal la libérale par un vote massif des régions pour les conservateurs ou le Bloc Québécois à la prochaine élection fédérale, réduisant ainsi les chances des libéraux fédéraux de former un gouvernement à Ottawa pour plusieurs années. Les chances de gouvernements conservateurs successifs sont même accrues dans le cas où une majorité des régions du Québec et la ville de Québec elle-même choisissent les conservateurs face au Bloc, car il y a une autre division qui joue ici : celle entre fédéralistes et souverainistes.

 

Si les autres régions canadiennes ont la même position face aux grandes villes que Québec et les régions ont face à Montréal, on risque d’avoir droit à quelques gouvernements conservateurs majoritaires à moins que les libéraux ne sachent rallier la gauche. Reste aussi à voir si la peur d’un gouvernement conservateur majoritaire, parti de Montréal, saura être relayée par des élites locales et toucher les régions. Si c’est perçu comme étant purement élitiste et montréalais, cela ne passera cependant pas dans l’urne. (3)

 

Si les conservateurs n’attirent pas la majorité, ils attirent cependant davantage d’électeurs que chacun des partis qui s’opposent à eux, ce qui peut être suffisant pour avoir une majorité en chambre, la majorité des électeurs divisant leur vote face à un bloc monolithique! Si « diviser pour régner » fut la maxime des empires de tous temps  (4), le paradoxe ici est que les conservateurs n’ont pas à diviser l’opposition, car elle se divise très bien elle-même! Il est à espérer que les progressistes en tirent les leçons et ce livre, Jeff Fillion et le malaise québécois, en attirant l’attention sur les causes de cette remontée du conservatisme à Québec, devrait aider les progressistes à comprendre ce qui ne va pas, car le modèle de Québec doit certainement se trouver ailleurs, où les mêmes conditions sont maintenant réunies ou en voie de l’être. C’est donc plus qu’un livre sur Jeff Fillion, mais un livre sur une certaine insatisfaction politique qui fut canalisée et exploitée par Jeff Fillion et la gang de CHOI, incluant André Arthur, maintenant député indépendant de Portneuf, contre qui les conservateurs ne présenteront d’ailleurs pas de candidat pour favoriser son élection! (5)  C’est tout dire. Si Jeff et sa gang s’étaient trouvé un public, les auditeurs de Québec s’étaient trouvé des portes paroles médiatiques en attendant d’en avoir un politique, d’où la montée de cette station qui était dans la dèche avant 1996! (pp. 14 et suivantes) Ils ont ensuite eu l’ADQ de Mario Dumont. Et là, ils ont le Parti Conservateur de Stephen Harper comme relais. 

 

Pour s’opposer à ce front d’une droite maintenant unie sous un nouveau Parti Conservateur plus fort et pancanadien, cela nécessitera plus qu’une alliance temporaire des forces de centre gauche pour renverser ce mouvement. Il faudra probablement une fusion entre libéraux et NPD dans un nouveau parti démocrate-libéral pour moins diviser le vote progressiste, car la droite a su s’unir. Elle a aussi su prendre une certaine place sur les ondes, moins ici qu’aux États-Unis cependant, noyé par la question nationale même si certains nationalistes émettent des idées de droite. Radio X était un peu l’exception, clairement à droite, « pro-anglais et pro-américain », « antipéquiste et antinationaliste »! (pp. 60-1) Reste à savoir si les souverainistes continueront à sévir sur la scène fédérale ou se replieront sur la scène provinciale, car là est la différence entre des gouvernements minoritaires ou majoritaires de centre gauche. Mais, à  droite, une majorité est maintenant possible, que le Bloc y soit ou pas!   

 

***

 

        Cependant, il peut y avoir une peau de banane qui peut faire déraper Steven Harper : le libéralisme économique ou laissez-faire!

 

La génération X était tenante du libéralisme économique et radio X s’en faisait la voix.  Cela avait pour source leur insatisfaction face à « des organisations à l’abri de la concurrence, où l’ancienneté plus que le talent motive parfois la promotion et où le rôle d’employeur modèle force l’embauche de personnes selon d’autres critères que le simple mérite (sexe, origine ethnique, handicap…) » (p. 123) Mais, à cela s’ajoute aussi le libéralisme des marchés à l’États-unienne. Dans les années 90, « ce n’est pas l’État qui est venu à la rescousse des X en se mettant soudain à embaucher, ni des syndicats plus solidaires, mais le libéralisme économique. (…) L’accès au marché américain a été la bouffée d’oxygène qui a empêché l’économie canadienne de suffoquer(…). Le salut est [donc] venu d’un surcroît de concurrence, d’une libéralisation du commerce, plutôt que d’une meilleure répartition des richesses ou d’une gestion centralisée de la   production : cela n’a pas pu ne pas se graver dans les esprits.» (p. 125) Sauf que, ce libéralisme fut aussi l’occasion de montages financiers parfois plus créatif que solide, ce que l’on voit actuellement s’écrouler.

 

Les tenants de ce libéralisme à outrance, qui voyait l’État comme une nuisance plutôt qu’un régulateur, sont maintenant pris au dépourvu cependant. Ils n’ont pas grand-chose à offrir. Oui, « le libéralisme a permis une fabuleuse accumulation de richesse » (p. 127), mais elle était peut être construite sur une illusion. Alors, une fois que l’illusionniste a quitté le navire avec votre vrai billet de 10$, il ne vous reste que le billet de 100$ qu’il vous a laissé. Heureux, jusqu’à ce que vous découvriez que ce n’était qu’une illusion! Un billet de Monopoly qu’il vous avait fait prendre pour un vrai! Elle était forte cette économie créative, mais on ne peut la considérer comme une politique économique efficace. Alors, s’en remettre aux marchés seulement, ce n’est pas une politique. Les X doivent s’en rendre compte aujourd’hui comme tous les autres citoyens. Cette économie créative chute sans cesse et le mouvement s’est accentué depuis le 29 septembre dernier, premier lundi noir de cette crise. (6)

 

Hier, une semaine jour pour jour après ce lundi noir, Le Devoir titre « Panique sur les places boursières », car nous venons de connaître un second lundi noir de suite! (7) Le verdict conservateur de M. Harper : « Un premier ministre responsable ne peut pas prédire une récession quand l'économie n'est pas en récession », a affirmé Stephen Harper hier matin, lors d'une conférence de presse tenue dans une garderie, en banlieue d'Ottawa. » (8) Remarquez qu’il s’adressait à des enfants de garderie! Ils ne lui ont probablement pas posé de questions sur le sujet. Heureusement pour lui, car quand on est tenant du laissez-faire économique, comment peut-on offrir une politique économique pour discipliner des marchés qui en ont bien besoin? D’ailleurs, laisseriez-vous vos enfants dans une garderie sans balise ni  surveillance? Non, alors pourquoi feriez-vous confiance à un  marché économique sans balise ni surveillance? Ce n’est pourtant pas d’aujourd’hui que c’est la ligne de pensée conservatrice, car ce sont eux qui ont dérèglementé et libéralisé les marchés et laissé s’installer le laissez-faire. Et qu’a à dire M. Harper quand tous les gouvernements s’en inquiètent sur la planète : tout va bien! Le marché va probablement s’en occuper, M. Harper?! « C’est ça être un grand leader? » (9)     

   

***

 

        Ce livre est donc intéressant, car il va plus loin que le phénomène de Jeff Fillion. Il nous permet de comprendre sur quelle vague il surfait : une vague conservatrice! La génération X serait-elle plus conservatrice que leurs parents? C’est une réelle possibilité. A lire, donc, si vous aimez les médias ou la politique.

 

***

 

Jeff Fillion n’est plus à radio X, mais il est maintenant sur le net : www.radiopirate.com/ 

 

Notes :

 

1. Simon Langlois, « La colère des jeunes hommes de Québec », Le Soleil, 24 juillet 2004. Cette référence est en note 7 à la page précédente (p. 139).

 

2. Ce qui est le plus étonnant dans le cas des banlieues montréalaises qui s’en prennent à Montréal, c’est que ces banlieues oublient qu’elles  n’auraient pas existées sans Montréal! Elles sont nées du développement de la grande ville! Ce n’est par contre pas le cas de Québec, qui a plutôt vue des choses lui glisser des mains pour aboutir à Montréal, comme Montréal en a aussi vu partir vers Toronto! 

 

3. Je me demande si le même phénomène est aussi vrai dans d’autres grandes villes canadiennes. Toronto versus l’Ontario ou Vancouver versus la Colombie-Britannique par exemple. Je serais porté à croire que oui, car ce sont aussi des villes multiculturelles, mais il faudra vérifier le soir des élections. De mémoire, il me semble cependant que ce clivage existait à la dernière élection.

         

4. J’ai lu cette expression la première fois dans Stephen Marglin, « Origine et fonction de la parcellisation des tâches » in  GORZ, A., 1973, Critique de la division du travail, Paris, éd. Du Seuil, coll. Point. p. 53. Il écrit exactement  que c’est « …le principe sur lequel les puissances impériales ont de tout temps assis leur domination : diviser pour régner. »   

 

5.  André Arthur sur Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Andr%C3%A9_Arthur

 

Michel Hébert et Jean Laroche, Élections fédérales 2008. Stephen Harper espère la réélection d'Arthur, in le Journal de Québec, 08/09/2008 05h44 : www.canoe.com/infos/quebeccanada/federales2008/archives/2008/09/20080908-054400.html

 

 

6. « "Lundi noir" pour les Bourses mondiales », LEMONDE.FR avec AFP et Reuters / 29.09.08, 12h04 / Mis à jour le 30.09.08,  05h32 : www.lemonde.fr/economie/article/2008/09/29/les-bourses-europeennes-guettent-les-premiers-signes-de-contagion_1100713_3234.html

 

7. Gérard Bérubé, Panique sur les places boursières, Le Devoir, Édition du mardi 07 octobre 2008 : www.ledevoir.com/2008/10/07/209508.html

 

8. Alec Castonguay, Harper tente de rassurer les Canadiens, Le Devoir,

Édition du mardi 07 octobre 2008 : www.ledevoir.com/2008/10/07/209505.html

 

9. Cette question se trouvait dans une publicité libérale télévisée et je la reprends ici en toute conscience. Elle se retrouve sur You Tube à

http://www.youtube.com/watch?v=d8_m8fdMn28&feature=related

 

Arrière de couverture

 

Reçu le 3 septembre 2008 : Cloutier, Jean-François, 2008, Jeff Fillion et le malaise québécois, Montréal :   Liber: www.editionsliber.org/ (ISBN : 978-2-89578-157-8)

 

        CHOI-FM et son morning man Jeff Fillion ont animé la ville de Québec et défrayé la chronique pendant une dizaine d’années (1996-2006). Radio «poubelle» pour les uns, radio «liberté» pour les autres, cette radio qui a polarisé l’opinion de  toute la province a été au centre de vives polémiques qui l’ont menée à quelques reprises devant les tribunaux. «C’est un phénomène pour le moins exceptionnel qu’une station de radio suscite autant de passion.»

 

        Cet ouvrage entend justement rendre la chose plus claire. «Le succès de CHOI et la bruyante controverse que la radio a suscitée s’expliquent par le fait qu’elle a été au carrefour des grands courants du Québec actuel. Des plaques tectoniques se mouvant lentement et insensiblement se sont rencontrées au cœur de cette petite station.» Du «mystère» Québec au caractère propre de la génération X en passant par l’écart grandissant entre Montréal et les régions et l’essoufflement des idéaux de la Révolution tranquille, l’auteur dégage ainsi les «tendances lourdes» qui rendent compte du malaise collectif dont le «phénomène» témoigne.

 

        Jean-François Cloutier est journaliste. Il  a fait des études en littérature (université de Montréal) et en management (université McGill). Ce livre est son premier ouvrage.

 

***

 

Le confort et l’indifférence de Denys Arcand…

Une mise en garde aux élections qui viennent!

Michel Handfield

 

5 octobre 2008

 

« Un prince bien avisé ne doit point accomplir sa promesse lorsque cet accomplissement lui serait nuisible, et que les raisons qui l’ont déterminé à promettre n’existent plus : tel est le précepte à donner. (…) Et d’ailleurs, un prince peut-il manquer de raisons légitimes pour colorer l’inexécution de ce qu’il a promis? » (Machiavel, p. 128)

 

J’ai dernièrement reçu le coffret « Denys Arcand / L'œuvre documentaire intégrale 1962-1981 ». En cette période électorale, où les élections fédérales sont prévues dans quelques jours (14 octobre), les élections états-uniennes dans quelques semaines (4 novembre), qu’une rumeur d’élections québécoises flotte dans l’air et que les élections municipales montréalaises sont prévues dans un an à quelques jours près (novembre 2009), il m’apparaît intéressant de revoir « Le confort et l’indifférence ». 

 

D’abord, on remarquera le côté historique de ce film, avec l’avant et l’après référendum de 1980, car on voit des anciens politiciens, dont plusieurs disparus depuis; la mode; les idées du temps, dont certaines qui nous apparaissent à des lunes d’aujourd’hui; le visage de Montréal et du Québec, qui a beaucoup changé en près de 30 ans; la déception et l’espoir de se reprendre pour faire un pays. On voit le chemin parcouru et les changements survenus depuis. On est maintenant dans un autre monde : mondialisé et branché à l’échelle de la planète. Certains des objectifs derrières ce référendum, comme de décider de notre économie, n’auraient plus le même sens dans le monde globalisé où l’on est maintenant. Un pays peut probablement faire moins que le Québec du temps, même sous le « joug » du Fédéral, avec  tous les accords internationaux, la déréglementation des marchés et la mondialisation de la production et des échanges qui ont eu lieu depuis. Au risque de me répéter, on est réellement dans un autre monde et un autre siècle!  

     

Par contre, on voit aussi que l’Homme est demeuré l’Homme et que  la politique est toujours la politique! Chacun cherche l’astuce pour avoir le dessus sur l’autre. Mais, parfois, rien ne soutient l’astuce et tout l’échafaudage s’écroule, bâtit sur du vide. On l’a vu à Wall-Street ces dernières semaines.  Le peuple se réveille alors avec des économies qui fondent comme neige au soleil. Mais, le politicien de talent promettra de remettre les choses en ordre. D’ailleurs, les politiciens promettent ou l’ordre ou le désordre. Ainsi, face à la menace référendaire, le PQ demandait les pleins pouvoirs pour remettre les choses en ordre alors qu’Ottawa promettait le désordre en cas de victoire du oui…

 

Aujourd’hui, l’on nous promet les mêmes choses. Face à la crise financière états-unienne, qui risque de s’étendre au Canada selon les uns et qui n’inquiète pas du tout les autres, c’est encore ordre et désordre! La même constatation en justice : pour les uns, il faut des lois plus sévères pour maintenir l’ordre, alors que pour les autres il faut poursuivre dans la prévention et la réhabilitation, puisque les chiffres montrent une baisse de la criminalité. Mais, si la peur fonctionne, on parlera de désordre pour se faire élire malgré les faits! (1) Toujours ordre et désordre,  interchangeable selon les partis politiques, que ce soit en justice, en économie, en environnement, en éducation ou en culture par exemple, car ce qui est l’ordre pour l’un est nécessairement facteur de désordre pour l’autre! C’est ce que les anglophones appellent « a wedge issue » comme me l’a fait remarquer Luc Chaput quand je lui parlais de ce texte. (2)   

 

Magie aussi! Une fois la souveraineté acquise, on pourra régler tout ce qu’on n’a pas pu régler auparavant! C’est encore le discours en vigueur chez les souverainistes du Bloc Québécois par exemple. Pourtant, l’usage nous montre que le Parti Québécois n’a pas fait que des bons coups, même dans ses sphères de compétences exclusives, là où il ne peut accuser le Canada. Mais, on croit encore à cette formule. Pensée magique!

 

C’est la même chose avec l’élection fédérale du 14 octobre prochain. Le gouvernement conservateur, minoritaire, a déclenché des élections malgré sa loi qui fixe les scrutins à date fixe, disant qu’il lui était maintenant impossible de gouverner vu sa position (minoritaire), mais demande un nouveau mandat minoritaire! Comment pourra-t-il mieux gouverner qu’il ne pouvait faire s’il est encore minoritaire?  C’est un contresens, mais cela a de quoi apaiser l’électeur moyen qui ne veut pas d’un gouvernement conservateur majoritaire. Harper espère ainsi faire le plein de votes en se disant que les électeurs vont voter en confiance pour lui, puisqu’il leur a promis d’être minoritaire. Pas de danger alors de voter pour cet homme s’il est pour être minoritaire, mais, ce faisant, les électeurs peuvent élire un gouvernement conservateur majoritaire contre leur gré! Il est de ces astuces que les citoyens peuvent parfois gober. Être élu majoritaire en promettant un gouvernement minoritaire, ce serait assez machiavélique! Je vous le dis tout de suite, il ne peut pas compter sur moi, car j’ai lu Machiavel! D’ailleurs, comme l’a écrit Rousseau de Machiavel : « En feignant de donner des leçons aux rois il en a donné de grandes aux peuples. Le Prince de Machiavel est le livre des républicains. » (Rousseau, p. 101) Il vous faudrait au moins voir le film de Denys Arcand à défaut de lire le maître.

 

Si je parle de Machiavel, ce n’est pas un hasard. C’est que   Jean-Pierre Ronfard  est Machiavel dans ce film! Et son propos, s’il s’appliquait à l’époque, s’applique encore aujourd’hui, comme des axiomes scientifiques! Des lois invariables de la nature humaine et politique que Machiavel a su saisir mieux que tous les autres! Elles étaient vraies en son temps; elles le sont aujourd’hui; et le seront demain!  Prenons celle-ci en exemple :

 

« Sur quoi il y a lieu d’observer que la haine est autant le fruit des bonnes actions que des mauvaises; d’où il suit, comme je l’ai dit, qu’un prince qui veut se maintenir est souvent obligé de n’être pas bon; car lorsque la classe de sujets dont il croit avoir besoin, soit peuple, soit soldats, soit grands, est corrompue, il faut à tout prix la satisfaire pour ne l’avoir point contre soi; et alors les bonnes actions nuisent plutôt qu’elles ne servent. » (Machiavel, p. 140)

 

Les morceaux choisis de Machiavel sont excellents (3), mais il ne peut en être autrement vu la richesse du Prince. A défaut de le lire, il faut voir ce film. En fait, même si vous avez déjà fréquenté Machiavel par la lecture, vous aurez de l’intérêt à voir cet opus de Denys Arcand  pour des raisons historiques, mais aussi pour prendre conscience de cette interchangeabilité du discours politique dans le temps. Même si le sujet semble passé date (l’option référendaire étant présentement dans un congélateur barré à double tour dans un hangar quelque part dans le grand nord du Québec),  suffirait de changer quelques mots pour reprendre les mêmes textes et les appliquer à des questions tout à fait contemporaines, comme si la structure du discours politique était immuable. C’est un peu comme si le discours politique relevait de la même dynamique ou de la même psychologie que le conte pour enfant : on aime se faire raconter les mêmes histoires depuis toujours… même si on sait que ce sont des histoires!

 

L’Homme politique n’a pas évolué au même rythme que sa contrepartie technique! Peut être même que l’Homo technicus nuit à l’Homo politicus, écoutant de la musique sur son baladeur et s’isolant de la communauté des Hommes et de la rumeur publique. Déconnecté d’être trop branché! Le baladeur MP3, nouvel opium du peuple! (4) 

 

Notes :

 

1. Brian Myles, Étude internationale - La prévention a fait ses preuves contre la criminalité, Le Devoir, Édition du mercredi 10 septembre 2008 : www.ledevoir.com/2008/09/10/204806.html

 

2. Il m’a même fait parvenir ce lien pour le bénéfice des lecteurs: http://en.wikipedia.org/wiki/Wedge_issue

 

3. Mais, ce ne sont pas nécessairement les mêmes citations que moi j’ai choisis pour illustrer ce texte, car j’ai lu Le Prince de Machiavel et je considère que c’est un de trois livres essentiels pour comprendre le monde avec Jean-Jacques Rousseau, 1762, Du contrat social, et La Boétie, 1576, Discours de la servitude volontaire. Denis Arcand peut avoir choisi des coupes différentes ou une autre traduction. Je n’ai pas poussé jusqu’à les vérifier textuellement, mais, à l’oreille, je crois qu’elles étaient d’une autre tournure, davantage en vieux français.     

 

4. Clin d’œil à « La religion est l'opium du peuple » de Karl Marx. (Le Petit Robert sur CD-ROM) Le paragraphe exact se lit comme suit :

 

« La misère religieuse est, d'une part, l'expression de la misère réelle, et, d'autre part, la protestation contre la misère réelle. La religion est le soupir de la créature accablée par le malheur, l'âme d'un monde sans cœur, de même qu'elle est l'esprit d'une époque sans esprit. C'est l'opium du peuple. » (Karl Marx, 1843, Contribution à la critique de La philosophie du droit de Hegel, in wikisource.org : http://fr.wikisource.org/wiki/Contribution_%C3%A0_la_critique_de_La_philosophie_du_droit_de_Hegel)

 

Il faut par contre souligner qu’on peut aussi télécharger de l’information en format MP3, ce que je fais. Mais, à parler avec les gens, c’est un comportement minoritaire, la plupart écoutant de la musique sur leur baladeur. Plusieurs ont même des baladeurs sans radio, d’où une coupure encore plus nette avec l’information et la communauté au sens politique du terme. 

 

Références :

 

Machiavel, Nicolas, 1996 [1532], Le prince, Paris : Booking International, p. 128)

 

Rousseau, Jean-Jacques, 1992 [1762], Du contrat social, France: Grands écrivains.

 

Résumé officiel du coffret :

 

Reçu le 16 septembre 2008 : Denys Arcand / L'œuvre documentaire intégrale 1962-1981

 

Une œuvre documentaire d'avant-garde marquée par les thèmes de la politique, de la vie sociale et de l'imagination.

 

Pour la première fois, l'ONF réunit la totalité des documentaires historiques et politiques du réalisateur oscarisé des Invasions barbares, Denys Arcand. Réalisés entre 1962 et 1980, ces trois longs métrages et sept courts métrages établissent les assises thématiques et formelles de l'oeuvre cinématographique du réalisateur du Déclin de l'empire américain. Plus de vingt ans ont passé, mais les documentaires de Denys Arcand restent d'une criante actualité.

 

On prendra plaisir à découvrir, dans son œuvre documentaire, le cinéaste qu'il n'a jamais cessé d'être, inventeur de mondes imaginaires et puissants, comme ce Machiavel qui commente le référendum de 1980 sur la souveraineté du Québec, ou encore cette mystérieuse institutrice qui, dans Québec : Duplessis et après..., se promène en lisant Le catéchisme des électeurs de 1936, une invention du grand " cheuf "!

 

Avec la version originale censurée du film On est au coton après plus de trente ans de purgatoire.

 

CE COFFRET DE 4 DVD COMPREND :

 

Disque 1

On est au coton - version censurée

L'insurrection politique et la censure : une révolution pas si tranquille

 

 

Disque 2

On est au coton - version non censurée

Après trente ans de purgatoire, l'œuvre originale complète

 

Disque 3

Québec : Duplessis et après...

Élections 1970 : et si Duplessis était encore vivant?

 

Disque 4

Le confort et l'indifférence

L'échec du référendum de 1980. La fin de la Révolution tranquille.

 

Suppléments DVD :

- Sept courts métrages

- Présentation de chaque film par le réalisateur

- Un film inédit : Le documentaire selon Denys Arcand

- Filmographie complète

- Courte biographie

- Une galerie de photos

- Un livret illustré de 24 pages

 

Détails :

Numéro de produit :183B0204228

Durée :758 min 0 s

Année de production: 2004

 

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Index

 

Commentaires livresques : Sous la jaquette!

 

BourgaultNadeau, Jean-François, 2007, Bourgault, Québec : Lux / www.luxediteur.com/ 

 

        Parlez de Pierre Bourgault (1934–2003) et aussitôt les images fusent : l’orateur, le chroniqueur, le polémiste, le militant, l’original, le professeur, le batailleur, l’entêté. Ce personnage toujours haut en couleur incarne puissamment à lui seul toute une partie de l’histoire sociale et politique du Québec du XXe siècle.

 

        La collection “Histoire politique” dans laquelle s’inscrit cette bio – lui a permis d’avoir très tôt (il est né en 1969) un contact privilégié avec différents acteurs importants des scènes culturelle et politique,

dont est issu Bourgault.

 

        Le livre a pour colonne vertébrale non seulement une forte connaissance des développements politiques et sociaux qui jalonnent notre histoire, mais surtout, de nombreux témoignages que le biographe s’amuse à croiser. Aussi, certains des 18 chapitres comportent pas moins de 100 notes qui

prouvent le sérieux de la démarche. Si les récits des gens qui ont sillonné l’existence de Bourgault diffèrent parfois de l’un à l’autre, les faits et les paroles publiques, de même que les souvenirs colligés, permettent de dessiner une figure assez juste du cheminement du polémiste.

 

        La mémoire de ce dernier, d’ailleurs, semble souvent celle sur laquelle on doit le moins compter tant ses dires apparaissent difficiles à vérifier. Mais si le biographe est loin d’être complaisant envers son sujet, il sait démontrer l’apport de celui-ci à la société comme faire ressortir l’aspectcharismatique et magnétisant de l’homme que l’on considère habituellement comme l’un des plus grands orateurs du pays. Si les chapitres sur les différents types de nationalismes et sur la fondation et l’élaboration du RIN sont particulièrement intéressants, c’est qu’on sent et comprend mieux la mission de Bourgault, ainsi que sa contribution. Mais la biographie ne se limite pas aux aspects de la vie politique de l’homme, on le suit dans ses rapports familiaux, ses amours, comme on retrace son parcours journalistique, de comédien et de parolier.

 

        De son enfance en Estrie, en passant par son adolescence au collège Jean-de-Brébeuf, ses pérégrinations parisiennes, son militantisme ou l’enseignement, le livre cerne bien l’importance de l’homme dans la Révolution tranquille et dans son siècle. C’est qu’à l’instar de son Jean-François Nadeau a suivi le parcours de cet homme complexe et profondément sensible, marqué au fer rouge des blessures qu’inflige une vie menée sans compromis de bout en bout, jusque dans la démesure que favorise la passion. En historien, il a scruté la jeunesse, la formation intellectuelle et les actions politiques de cet être profondément original qui fut d’abord connu d’un large public à titre de président du Rassemblement pour l’indépendance nationale (RIN). Il a interrogé près de deux cents témoins et disséqué nombre de documents d’archives souvent inédits à ce jour. Il a traqué, en un mot, cet homme sur la piste de sa vie.

 

        Critique, l’auteur ne statufie pas Pierre Bourgault, pas plus qu’il ne l’instrumentalise. Il permet plutôt de mieux le comprendre, jusque dans ses contradictions, au coeur de l’époque tumultueuse qui fut la sienne.

 

        Historien et politologue, Jean-François Nadeau est directeur des pages culturelles du quotidien Le Devoir.

 

Commentaires de Michel Handfield (7 octobre 2008)

 

        Bourgault! J’aimais bien entendre son commentaire à la radio et à la télé. Je l’ai aussi vu en conférence à l’université de Montréal, une fois dans une grande salle, à l’occasion du référendum de 1980, et une autre où il est venu dans un cours que j’avais pris hors département. Sur l’opinion publique si je me rappelle bien. Dialecticien et communicateur par excellence, il était plus qu’intéressant à écouter. C’était plaisant. De quoi vouloir lire cette biographie.

 

        Je ne fus pas déçu, car en plus de Bourgault, on a droit à tout le contexte dans lequel il a évolué, c’est-à-dire l’histoire du Québec contemporain, car né en 1934, il a eu 20 ans en 54 : les années de la grande noirceur (Duplessis). Mais, c’était aussi la préparation de ce qui viendrait : la révolution tranquille, acte fondateur du Québec d’aujourd’hui. Et Bourgault étant éclectique, c’est-à-dire touche à tout, il s’intéressa autant au théâtre qu’à la politique; écrivait des discours qu’il devait tempérer pour ne pas conduire à la révolution, mais aussi des chansons, comme « entre deux joints » endisqué par Robert Charlebois en 1973 (pp. 366-8). On apprend aussi qu’il  s’intéressait autant aux vins qu’aux garçons, car tout y passe dans ce livre. Indépendantiste de longue date, à la tête du RIN, il amènera son parti au PQ naissant, mais sera toujours en porte-à-faux avec René Lévesque. Pourtant, il sera ami avec Robert Bourassa, qui a fréquenté le même collège que lui (Bréboeuf), mais est fédéraliste! Comme les québécois, il n’est pas à un paradoxe près. On ne s’ennuie donc pas à cette lecture.

 

        Malgré la pauvreté, car la politique ne nourrissait pas son homme, il y était à sa place, alliant l’art du théâtre à ses idées nationalistes. Et, il attirait un public qui le portait! D’avant-garde, il espérait une évolution de la société québécoise. Dans les années 60, il souhaitait des cafés-terrasses comme on en trouvait en Europe! (p. 152) Il aura fallu attendre quelques décennies avant de les voir à Montréal. Pas surprenant alors que pour lui l’indépendance ne soit pas une fin en soi, mais un instrument de développement, car nous avions (et avons encore) besoin de nous développer! Les problèmes seront encore là, « mais alors nous aurons les moyens de les attaquer de front et d’essayer de les solutionner » disait-il.  (p. 115)  Il reviendra d’ailleurs souvent sur cette idée au cours de sa vie.

 

        Mais, être un intellectuel, et surtout un politique, n’était pas facile. Il voudra travailler à plus d’une occasion, mais on lui refusera bien des emplois, car il n’a pas d’expériences. « En effet, qu’est-ce qu’un intellectuel pareil peut bien être capable de faire de ses deux mains? C’est ce que beaucoup de gens se demandent. » (p. 353) Victime de sa renommée en quelque sorte. Cela lui arrivera souvent.

 

        Sa personnalité et son charisme lui auront par contre permis de se faire des amis fidèles qui le soutiendront, notamment parmi ses étudiants dont certains deviendront célèbres. Toujours près des médias, cette biographie  parle aussi d’eux.

 

        Bref, faire le tour de la vie de Bourgault, c’est faire le tour du Québec politique et culturel au minimum. C’est donc une biographie plus qu’intéressante, car c’est aussi un condensé de l’histoire du Québec contemporain. Si Bourgault est foncièrement montréalais, il n’est pas né à Montréal et a fait le tour du Québec par et pour la politique. C’est donc un plaisir que de faire ce tour avec cette biographie que l’on doit à Jean-François  Nadeau du Devoir. À lire.

 

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Boniface, P., 2008, ATLAS DU MONDE GLOBAL, Paris: Armand Colin/fayard, 128 p. Format : 25,4X19, ISBN 9782200350543, Distr : www.somabec.com

couvertureLe monde global, si complexe, est fait de risques mais aussi d’opportunités. Pascal Boniface et Hubert Védrine le décryptent pour nous. Ils alertent sans alarmer, avec le souci constant d’informer, d’expliquer, d’éclairer. Sans surcharger, saturer ou embrouiller, ils montrent les multiples visions du monde des divers pays et peuples : ce sont autant de regards croisés sur l’histoire et sur notre monde riche de contradictions, d’antagonismes et d’espérances.

Commentaires de Michel Handfield (7 octobre 2008)

 

        Le monde change. On le voit tous les jours ces derniers temps pour qui suit les informations, que ce soit en bourse ou sur la scène géopolitique. Comment s’y retrouver entre la mondialisation, la baisse de vos épargnes ou la montée de l’URSS? Est-ce lié ou non?

 

        Cet « Atlas du monde global » est un bon outil pour se faire une idée et acquérir des concepts pour nous aider à comprendre ce monde dans lequel nous évoluons, mais qui nous semble parfois si étranger. C’est que cet Atlas fait un topo des principales théories du monde, passées et actuelles, avec cartes et explications claires. Ainsi, dans les grands repères du passé on regarde les théories « du chandelier », soit que « l’homme moderne serait issu de mutations et d’évolutions diverses à partir de descendant de Homo ergaster en Europe et de Homo erectus en Asie » (p. 7), et celle « de l’Arche de Noé », qui « soutient l’idée d’une origine africaine unique puis de migrations ayant peuplé la Terre. » (p. 9) On trouve cela dans la première section : « Les grands repères du monde ».

 

Puis, on en vient à aujourd’hui dans la seconde section, « Les diverses interprétations du monde global », où on explique des thèses comme le « clash des civilisations » (pp. 28-9); le « monde unipolaire » (pp. 30-1) et le « monde multipolaire » (pp. 32-4), qui est la théorie que je préfère personnellement. Nous en avons d’ailleurs  parlé à plus d’une occasion dans les pages de Societas Criticus.

 

        Le lecteur avisé se demandera où est passé le monde bipolaire? On en parle entre le monde unipolaire et multipolaire, car le monde bipolaire était relié à la période d’opposition entre les États-Unis et l’URSS. Mais, avec l’effondrement de cette dernière, les États-Unis ont semblé seul au monde jusqu’à ce que la géopolitique vienne rappeler que ce n’était pas le cas et que le géant était aux pieds d’argile. Tant l’Europe, la Chine que la Russie, qui reprend des forces, n’ont pas l’intention de les laisser seul au sommet, d’où cette notion de multipolarité de plus en plus présente sur la table des discussions mondiales! Et que dire de l’Inde et du Brésil?

 

        Naturellement, s’il y a la politique, il a aussi les ressources, comme le pétrole (pp. 46-7) et l’eau (pp. 60-1), qui peuvent être à la source de certains conflits. Et, que dire des religions? (pp. 62-3) C’est ce qui est examiné dans la troisième partie: « Les données globales ».

 

        Cependant, même si le monde peut être expliqué en moins de 130 pages, tous les acteurs mondiaux ne le comprennent pas de la même façon, question de politique et de culture. Ainsi, dans la quatrième et dernière partie on nous présente « Le monde vu par » les États-Unis, les Européens, la France, …, le Canada, le Brésil, … les islamistes, les Africains, les Méditerranéens, l’Iran, l’Inde, et l’Afrique du Sud.

 

        Bref, un excellent ouvrage de référence pour Monsieur et Madame tout le monde qui veut mieux comprendre ce qu’il entend aux nouvelles. C’est aussi un livre de référence intéressant pour l’étudiant du secondaire et du cégep. Pour l’universitaire, cela va si la géopolitique ou les affaires internationales ne sont pas sa spécialité, car on parle ici d’un ouvrage grand public, mais très bien fait.

 

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Jean-Pierre Béland (Sous la direction de), 2006, L’Homme biotech : humain ou posthumain ?, PUL : Sciences humaines, Éducation et IQRC, 144p. : www.pulaval.com

 

Les récentes percées en biotechnologie ont soulevé plusieurs questions en éthique: transgénèse des animaux et des plantes, thérapie génique, clonage, création de cellules souches, création des chimères humain-animal, etc.

 

On peut imaginer que, dans un avenir rapproché, on tente des modifications plus ambitieuses. Un homme doté de l’odorat du chien, d’une protection contre les radiations semblables à celle des bactéries, de la capacité d’hiberner comme l’ours. En supposant que les obstacles techniques soient un jour surmontés, l’homme disposerait alors de la maîtrise de son évolution et n’aurait de limite à son imagination que les garde-fous législatifs qu’il pourrait lui opposer. Il pourrait manipuler un embryon humain pour faire naître quelqu’un de beaucoup plus puissant. Ainsi, le futur sera-t-il peuplé de super-humains génétiquement modifiés? L’Homme biotech est-il l’avenir de l’homme? Il soulève dans l’esprit de certaines personnes un dilemme: humain ou posthumain ? Pour d’autres, l’enjeu éthique se formule ainsi: peut-on transformer cet humain (ouverture post-humaniste) tout en sauvegardant la dignité humaine ?

 

C’est pour susciter la réflexion sur la problématique éthique internationale «L’Homme biotech: humain ou posthumain?» qu’un colloque interdisciplinaire et ­inter­universitaire s’est tenu lors du 73e congrès annuel de l’Association francophone pour le savoir (Acfas), à l’Université du Québec à Chicoutimi en 2005. Le recueil reprend les textes des exposés et échanges par les conférenciers.

 

Commentaires de Michel Handfield (7 octobre 2008)

 

Ce livre pose la question de l’Homme puisqu’il a maintenant le contrôle de son évolution. (p. 2) Restera-t-il humain ou mutera-t-il vers le « transhumain »? (pp. 9, 14, 46) A-t-il la liberté de devenir ou lui accorder cette liberté est-il le début de la déshumanisation? On peut voir les biotechnologies comme une façon de se dépasser si l’humain est libre de faire ses choix. Mais, inversement, ce peut aussi être le moyen de créer des humains serviles sur commande. Tout est ouvert dans ce laboratoire : du pire au meilleur!

 

Ceci pose aussi la question de notre descendance et de ses droits, car si on peut créer nos descendants comme on les veut, est-ce leur donner un biais qui pourra aussi leur nuire? Pourrait-il nous poursuivre pour nos choix à leur égard puisqu’on aura pris la place du hasard de la nature? Mais, plus terre à terre, pouvant maintenant savoir les tares possibles de nos enfants dès les premières semaines de leur conception, ceux-ci gagneront-ils le droit de poursuivre leurs parents s’ils ont choisit de les avoir en sachant très bien qu’ils seront désavantagés dans la vie, par un handicap par exemple, parce qu’eux n’ont n’a pas demandé à naître, mais ont été choisi par leurs parents en dépit de cette tare identifiable? (pp. 27-8) Des débats éthiques et juridiques en perspective.

 

Bref un livre qui permet de se poser beaucoup de questions, même s’il pose des jalons de réponses. Un livre qui intéressera tant le scientifique, l’humaniste que le juriste, car ce sont des débats actuels, mais surtout à venir. A lire.

 

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Nouveaux livres reçus

 

 

Reçu le 2 septembre 2008 : Bizzoni, Lise et Prévost-Thomas, Cécile (sous la direction de), 2008, La chanson francophone engagée, Montréal : Éditions Triptyque: www.triptyque.qc.ca/ ISBN : 978-2-89031-632-4

 

Loin de constituer un sous-genre de la chanson francophone qui aurait comme seul trait d’engagement celui d’un texte à vocation sociale ou politique, la chanson engagée, telle qu’envisagée ici, ouvre les frontières de son appellation. Elle est à la fois un objet singulier (musique, texte, voix) et une pratique plurielle (artistes, producteurs, diffuseurs, médias, publics) qui s’expriment symboliquement (langue, identité) en fonction de différents supports et espaces privés ou publics. Issus de la réflexion commune d’un ensemble de jeunes chercheurs qui consacrent leurs travaux à la chanson québécoise et française, les textes proposés permettent, loin de toute idéologie, d’apprécier la pluralité de l’expression «chanson engagée» à travers des approches littéraire, musicologique ou sociologique. Le présent ouvrage témoigne de la pertinence de l’étude de cet art capable de révéler les enjeux culturels de la société contemporaine.

 

          Parmi les auteurs-compositeurs et les groupes étudiés: Anne Sylvestre, Bérurier Noir, Georges Brassens, Loco Locass, Mes Aïeux, Rachid Taha, Richard Desjardins, Les Vulgaires machins, Thomàs Jensen, Zebda, etc.

 

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Arts et Culture

 

L’Emporte-Pièces, programme annuel du tnm  (www.tnm.qc.ca) Commentaires de Michel Handfield

 

7 octobre 2008

 

        Habituellement, quand nous allons au théâtre, nous pouvons acheter un programme. Cette année, le TNM a innové. Ils ont fait un album annuel, l’emporte-pièce, comme un livre de références. Et, c’est ce que c’est, car que vous assistiez à toutes les pièces ou à une seule, vous les avez toutes, avec une foule de détails, entre les mains. Des détails qui peuvent aussi être des références, comme des photos et notes historiques! Par exemple, pour « La charge de l’orignal éponyme » de Claude Gauvreau, on ne passe pas sous silence le « Refus global »!

 

Que vous ayez vu une pièce ou non, vous y trouverez donc des informations intéressantes, car le théâtre a des racines! Ça se voit quand on feuillette cet « emporte-pièces ». Il y a de quoi s’y cultiver! D’ailleurs, la culture est là pour s’en servir, pas pour la bannir! Disons le haut et fort. 

 

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Célébrer l'esprit humain d’’Ananda-Amrita Dance Creations

Une offrande de la danse indienne

Commentaires de Michel Handfield

 

4 octobre 2008

 

J’ai vu ce spectacle il y a quelques temps au Théâtre DB Clarke de l’Université Concordia. Comme il n’y avait qu’une seule représentation, le dimanche 21 septembre 2008, je n’ai pas écrit mon texte sur le coup.

 

        Célébrer l’esprit humain, quel thème! Cela peut paraître  surprenant en ces temps de tourmente, surtout quand l’on voit les effets négatifs de cet esprit humain qui cherche le profit individuel au détriment des autres, ce qui illustre bien la crise financière actuelle. Mais, l’esprit humain, ce sont aussi tous ces gens qui s’entraident lorsqu’un cataclysme frappe un endroit du monde; un endroit où nous ne connaissons généralement personne, sauf que nous savons que ce sont des humains comme nous qui ont besoin d’aide et de réconfort. L’humanisme prend alors le dessus sur l’égoïsme individuel. La majorité se mobilise et donne ce qu’elle peut à des œuvres caritatives qui iront, à leur place, aider ces gens. Des anonymes qui, tous ensemble, aident une communauté à s’en sortir. Des humains de différentes cultures qui se rejoignent dans une forme de don qui les dépasse tout en les unissant. Tiens, un peu comme l’art ou la culture, qui est aussi un don.

 

La danse est justement un geste gratuit qui fait du bien à celui qui le donne comme à celui qui le reçoit. Ceux qui y sont indifférent passent leur chemin. Les autres, peu importe leurs allégeances politiques, leur langue, leur ethnicité, reçoivent quelque chose qui les rejoint personnellement. Quoi? Cela dépend de chacun, car ce n’est pas d’ordre rationnel, mais plutôt émotionnel.

 

Il y avait d’ailleurs une transcendance parce qu’émotions. Un langage non verbal; un langage du corps! On pourrait parler du Pouvoir de la danse et de la musique pour construire des ponts entre les gens. De là à se demander si on doit danser à l’assemblée générale de l’ONU il n’y a qu’un pas de danse que les leaders ne voudront probablement pas faire, mais qui serait peut être salutaire.

 

Naturellement, même si on se considère ignare en ce domaine, ce qui est mon cas, on s’aperçoit rapidement, à assister à un tel spectacle, qu’on ne l’est pas totalement. D’abord, le langage de l’émotion est universel. C’est même celui qu’on apprend avant de parler quand on est bébé. Ensuite, le cinéma et la télévision nous ont aussi donnés des codes au cours de notre vie. Alors, même si on n’a pas toute la codification de la danse en tête, on en a quand même suffisamment pour comprendre au-delà de la simple émotion. On comprend même davantage que ce qu’on croirait comprendre. C’est la même chose que pour la musique classique finalement. La première fois qu’on va au concert, on se dit qu’on ne connaît pas ça. Puis, on s’aperçoit qu’on n’est pas dans le brouillard non plus. On a accumulé des repères dans notre vie sans même le savoir, que ce soit par tel  film, programme télévisé, ou émission de radio. Bref, on est souvent bien plus renseigné qu’on ne le croit, notre cerveau ayant accumulé des informations à notre insu. Ce doit être ça, l’inconscient! 

 

Notes du programme :

 

Célébrer l'esprit humain est un spectacle de danse qui appelle à l’union des différentes cultures. Amrita Choudhury, grande virtuose de la danse classique indienne, riche de 27 ans d'expérience en danse, présente le 21 septembre prochain quatre pièces dans lesquelles se fusionnent les traditions classique et folklorique de la danse indienne, avec pour trame de fond une projection d’images et une narration qui célèbrent différents aspects de l'humanité. Deux danseuses, la musique de Ravi Shankar, du Toronto Tabla Ensemble, de Mariam Tollar et d’autres ainsi que le poème "The Bridges of Hope" de Jayata Guha poète et professeur de Chicoutimi, accompagnent Amrita pour Célébrer l'esprit humain!

 

« Chaque chorégraphie représente un aspect différent de notre vraie nature : notre désir d'union aux êtres humains, nos luttes pour triompher de l'adversité et pour relever les défis sociopolitiques, notre capacité à voir l'interdépendance de toutes formes de vies et notre joie de découvrir la beauté et la sagesse dans toutes les traditions culturelles et spirituelles. » Amrita Choudhury

 

Après les crises politiques aux États-Unis et la guerre en Iraq, Amrita a voulu créer un spectacle qui serait significatif pour unir les êtres humains de différentes traditions culturelles et spirituelles...ainsi elle a commencé à créer des pièces qui symbolisent différents aspects de notre vie: l'esprit d'amitié, l'esprit d'unité, le défi de vaincre la guerre et le racisme et le sens de la spiritualité dans la vie quotidienne.

 

Le spectacle a été acclamé par le public lors de sa première à Toronto le 14 juin 2008. Amrita est maintenant à Montréal pour présenter son spectacle à sa ville d’adoption avant d'entreprendre une tournée européenne en 2009.

 

Amrita Choudhury a étudié à Santiniketan, une école située en Inde, fondée par le poète et lauréat d'un prix Nobel de littérature, Rabindranath Tagore. Elle a commencé sa formation à l'âge de 4 ans, a étudié les formes de danse sacrée et classique indienne: Odissi, Bharatanatyam, Manipur et la danse folklorique. Son répertoire varié touche aussi à différentes traditions de danse: flamenco, irlandaise, moyen-orientale, africaine et latino-américaine. Elle a présenté des spectacles partout au Canada, aux États-Unis, en Amérique-Centrale, en Europe et en Inde. Son travail au Québec l'a amenée à Chicoutimi, Jonquière et Trois-Rivières pour présenter des spectacles et enseigner la danse. Elle a été consultante pour le Ministère de l’Éducation du Québec afin d’aider à intégrer les enseignements de l'hindouisme et de la culture indienne dans le cadre du nouveau programme d'éthique et de culture religieuse pour les élèves de niveaux primaire et secondaire.

 

Chorégraphies: Amrita Choudhury, Guru Kelucharam Mahapatra et Guru Chittaranjan Acharya

 

Danseuses: Amrita Choudhury, Jade Goldfarb et Anne-Sophie Therrien

 

Musique: Guru Kelucharam Mahapatra, Ragunath Panigrahi, Sanjukta Panigrahi, Toronto Tabla Ensemble & Maryem Tollar, Nirmalendu Choudhury et Ravi Shankar

 

Direction musicale et son: Prasun Lala

Présentation des diapositives: Lisa Foster

 

Hyperliens :

 

www.ananda-amrita.com

 

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France, Nouvelle-France: Naissance d'un peuple français en Amérique

Du 21 mai au 12 octobre 2008

www.pacmusee.qc.ca/pages/Expositions/temporaires/a_venir.aspx?lang=FR-CA

 

L'exposition

 

        Pour souligner l'importance des événements historiques de 1604-1605 (île Sainte-Croix et Port-Royal) et de 1608 (Québec) qui marquent les débuts de la colonisation en Nouvelle-France, Pointe-à-Callière présente une exposition sur l'implantation française en Amérique. Coproduite avec le Musée d’histoire de Nantes / Château des ducs de Bretagne, l'exposition couvre deux siècles de migrations et s'attache à quelques fortes personnalités, hommes et femmes, partis de leur ville ou leur village de France pour s'établir en Acadie, dans la vallée du Saint-Laurent et en Louisiane. Depuis 2004, et ce pendant quatre ans, l'exposition a été ou sera présentée dans différents musées et centres d'interprétation, tant en France qu'au Canada.

 

Mouvement migratoire

 

        En tant que migration initiale, l'implantation des Français constitue une aventure inédite et originale. Contrairement aux vagues successives qui viendront s'intégrer à une société en marche, les Français viennent habiter un pays qui n'existe pas encore, la Nouvelle-France, pourtant déjà peuplé de multiples nations amérindiennes. C'est une nation qu'ils devront construire de toutes pièces, voire inventer. L'exposition favorise une approche humaine et intimiste de l'histoire par le biais de destins individuels, plutôt qu'une approche événementielle.

 

Cadre et période couverte par l'exposition

 

        L'exposition couvre tout le Régime français, depuis les premières explorations, au 16e siècle, jusqu'à la Conquête et au traité de Paris en 1763. La période la plus décisive de l'implantation française en Amérique concerne au premier chef tout le 17e siècle. À titre d'exemple, les années 1653 et 1663 constituent des dates charnières pour Montréal et la Nouvelle-France. L'année 1653 correspond à l'arrivée d'une centaine de Français, La Grande Recrue, venus sauver Montréal. L'année 1663 est celle où la Métropole adopte une véritable politique coloniale et prend des mesures planifiées pour peupler les territoires explorés par ses ressortissants et sur lesquels elle entend exercer sa prédominance.

 

Itinéraire de l'exposition

 

- Halifax, à Pier 21, Site historique national, du 1er juillet 2004 au 2 janvier 2005

 

- Moncton, au Musée acadien de Moncton, du 31 mars au 5 juin 2005

 

- Musée du Château des ducs de Bretagne à Nantes du 9 mars au 10 juin 2007

 

- La maison Champlain à Brouage de 28 juin au 14 octobre 2007

 

- Le Château-musée de Dieppe, du 18 octobre au 27 octobre 2007

 

- La Maison de l’émigration française au Canada de Tourouve, du 18 février au 4 mai 2008

 

- Montréal, à Pointe-à-Callière, du 20 mai au 12 octobre 2008

 

        En marge de cette exposition, Pointe-à-Callière présente tout au long de l’année 2008 une importante programmation d’activités sous la thématique France, Nouvelle-France. Cette programmation comprend des expositions, des conférences, des activités culturelles, des animations, des circuits guidés et des visites virtuelles.

 

Le catalogue de l’exposition est disponible à la Boutique du Musée.

 

Commentaires de Luc Chaput

 

        L'exposition  qui termine à Montréal son périple en France et au Canada est bien montée dans un espace assez restreint même si le sens de la visite est peu indiqué. Parmi les trouvailles muséologiques, on peut signaler les lits-cages reproduits en petit de différentes couleurs sur des tiges qui représentent les divers types de mariages. À ce sujet, rien n'est dit pour signaler l'expression canadienne-française « Les bébés viennent des sauvages », non des choux ou des cigognes, ce qui pourrait s’expliquer par le fait que certains enfants issus d'unions libres entre des coureurs de bois et des Amérindiennes ont été introduits subrepticement dans des familles canadiennes-françaises et élevés comme les enfants de celles-ci. Cette exposition fait un survol instructif et assez complet de l'implantation des Francophones en Amérique et recoupe en partie l'exposition « Ils ont cartographié l'Amérique » qui a connu un grand succès à la Grande Bibliothèque.

 

        En plus, j'ai pu y admirer un plat en état ayant fait partie des possessions de mon ancêtre d'Ailleboust. Certaines images du catalogue de l'exposition auraient pu être reproduites  par exemple  les wampuns hurons donnés à la cathédrale de Chartres. Les erreurs de la gravure sur la mort de Montcalm ne sont pas corrigées dans le carton explicatif. Montcalm est mort dans un lit à Québec le lendemain de la bataille et non sur le champ de bataille comme Wolfe.

 

Hyperliens :

 

Les sites du 400 e anniversaire de Québec disparaissant avec le 400 e, la rédaction vous suggère plutôt de faire une recherche Google sur le sujet.

 

Par contre, voici deux sites permanents qui seront encore là après le 400e :

 

- le site de l’office du tourisme de Québec : www.quebecregion.com/

- le site de la ville de Québec : www.ville.quebec.qc.ca/

 

 

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Cinéma et Théâtre

(Ciné, Théâtre et quelques annonces d’événements)

 

 

Attention : Dans les commentaires cinés, de théâtres ou de spectacles, les citations sont rarement exactes, car même si l’on prend des notes il est rare de pouvoir tout noter. C’est généralement l’essence de ce qui est dit qui est retenue, pas le mot à mot.

 

Je ne fais pas non plus dans la critique, mais dans le commentaire, car de ma perspective, ma formation de sociologue, le film est un matériel et nourrit une réflexion qui peut le dépasser. Certains accrocheront sur les décors, les plans de caméra,  le jeu des acteurs ou la mise en scène, ce qui m’atteint moins. Moi, j’accroche sur les problématiques qu’il montre et les questions qu’il soulève. Le film est un matériel sociologique, un révélateur social : psychosocial, socioéconomique ou sociopolitique par exemple. C’est ainsi que sur de très bons films selon la critique, je n’ai fait que de courts textes alors que sur des films qui ont décriés en cœur, j’ai pu faire de très longues analyses, car je n’ai pas la même grille, le même angle, qu’eux dans la tête. Je prends d’ailleurs des notes durant les projections de presse que je ne peux renier par la suite, même si je discute avec des confrères qui ne l’ont pas apprécié de la même manière que moi, car je travaille d’un autre angle. J’encourage donc le lecteur à lire plusieurs points de vue pour se faire une idée. Ce n’est pas un hasard si nos pages offrent plusieurs hyperliens de références, car cette diversité de points de vue est nécessaire. Il faut la protéger.

 

Michel Handfield 

 

Le film Paris de Cédric Klapisch

 

A l’affiche dès le 3 octobre

 

Montréal le 11 septembre 2008.  Equinoxe Films annonce la sortie de Paris, le plus récent film de Cédric Klapisch.  Le film est interprété par Juliette Binoche, Romain Duris, Fabrice Luchini, Albert Dupontel, François Cluzeau, Karine Viard, Gilles Lellouche, Mélanie Laurent, Zinedine Soualem, Julie Ferrier et Olivia Benamou qui campent une série de personnages parisiens très authentiques.

 

Le film Paris « c’est l’histoire d’un parisien qui est malade et qui se demande si il va mourir. Son état lui donne un regard neuf et différent sur tous les gens qu’il croise. Le fait d’envisager la mort met en valeur la vie, la vie des autres et celle de la ville toute entière. Paris, à l’image d’un plan de métro, c’est tout un réseau de croisements... Pour pouvoir faire un portrait de Paris, il faut que ça aille dans tous les sens, il ne faut pas que ce soit linéaire. Il faut respecter la compléxité de la ville. C’est aussi cette forme éclatée qui met en valeur le foisonnement, le côté vivant de Paris. » Ainsi que Klapîsch décrit son film en se rappelant un vers de Baudelaire « Le vieux Paris n’est plus (la forme d’une ville change plus vite, hélas ! Que le coeur d’un mortel) ...» qui l’a inspiré pour l’écriture du scénario tout comme les photos de Willy Ronis, Robert Doisneau, Cartier-Bresson, Raymond Depardon ou Willaim Klein.

 

Le film sortira également en version française originale avec sous-titres anglais.

 

Commentaires de Michel Handfield (4 octobre 2008)

 

        Paris, un film de Cédric Klapisch (www.cedric-klapisch.com) qui ne ressemble pas aux « poupées russes », mais davantage au « Fabuleux destin d’Amélie Poulain » dans la facture. Comme Amélie, Pierre (Romain Duris), observe la vie des autres, limité qu’il est par une maladie cardiaque. Ceci nous permet de suivre la vie des gens qu’il voit du balcon de son appartement, mais aussi des gens qu’il a croisé, qu’il croise ou qu’il croisera dans son quartier. C’est donc l’occasion d’un regard sur des histoires de vie et des destins croisés. Ça a donc une part de Lelouch qui m’a fait penser  à « les uns, les autres ».

 

        Comme un des personnages principaux est un professeur d’histoire, spécialisé sur le cas de Paris, il met aussi en scène la ville lumière. Il dira une chose fort intéressante dans son cours d’histoire de Paris, genre de réponse à George Bush qui parlait de la vieille Europe: « Le privilège d’une ville ancienne, c’est qu’elle produit sa modernité! »  Mais, là ne s’arrêteront pas ses remarques. Il fait d’ailleurs une critique fort pertinente de l’enseignement et de l’académisme institutionnel! Par contre, dans sa vie personnelle, il est davantage dans la brume, entre le décès de son père de 95 ans, malgré qu’il croyait ne pas être affecté, et sa « fascination » pour une étudiante, fort jolie d’ailleurs. Malgré l’âge, il est toujours jeune avec elle, ce qui lui donne parfois un air pathétique.

 

        Ce film nous entraîne dans des histoires de vie à un temps « x », soit le temps entre le diagnostic de la maladie de Pierre et son départ pour recevoir un nouveau cœur. 

 

Un film à voir absolument pour qui voudra visiter Paris, car on découvre la personnalité de cette ville et de ses habitants, qui ne sont pas tous parisiens. En effet, comme toute les grandes villes, Paris a un effet d’attraction qui fait en sorte qu’elle est multiculturelle, attirant autant l’immigrant d’outre mer que des régions françaises. Paris, c’est davantage que les parisiens. Mais, il y en a, comme cette boulangère fort chiante s’il en est!

 

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Reçu le 16 septembre 2008 : Denys Arcand / L'œuvre documentaire intégrale 1962-1981

 

Voir la section Essais pour le texte Le confort et l’indifférence de Denys Arcand… Une mise en garde aux élections qui viennent!

 

Une œuvre documentaire d'avant-garde marquée par les thèmes de la politique, de la vie sociale et de l'imagination.

Pour la première fois, l'ONF réunit la totalité des documentaires historiques et politiques du réalisateur oscarisé des Invasions barbares, Denys Arcand. Réalisés entre 1962 et 1980, ces trois longs métrages et sept courts métrages établissent les assises thématiques et formelles de l'oeuvre cinématographique du réalisateur du Déclin de l'empire américain. Plus de vingt ans ont passé, mais les documentaires de Denys Arcand restent d'une criante actualité.

 

On prendra plaisir à découvrir, dans son œuvre documentaire, le cinéaste qu'il n'a jamais cessé d'être, inventeur de mondes imaginaires et puissants, comme ce Machiavel qui commente le référendum de 1980 sur la souveraineté du Québec, ou encore cette mystérieuse institutrice qui, dans Québec : Duplessis et après..., se promène en lisant Le catéchisme des électeurs de 1936, une invention du grand " cheuf "!

 

Avec la version originale censurée du film On est au coton après plus de trente ans de purgatoire.

 

CE COFFRET DE 4 DVD COMPREND :

 

Disque 1

 

On est au coton - version censurée

L'insurrection politique et la censure : une révolution pas si tranquille

 

Disque 2

 

On est au coton - version non censurée

Après trente ans de purgatoire, l'œuvre originale complète

 

Disque 3

 

Québec : Duplessis et après...

Élections 1970 : et si Duplessis était encore vivant?

 

Disque 4

 

Le confort et l'indifférence

L'échec du référendum de 1980. La fin de la Révolution tranquille.

 

Suppléments DVD :

 

- Sept courts métrages

- Présentation de chaque film par le réalisateur

- Un film inédit : Le documentaire selon Denys Arcand

- Filmographie complète

- Courte biographie

- Une galerie de photos

- Un livret illustré de 24 pages

 

Détails

Numéro de produit :183B0204228

Durée :758 min 0 s

Année de production: 2004

 

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C’est pas moi je le jure

Sortie : 26 septembre partout au Québec

 

Un film de: Philippe Falardeau 

Distribution : Suzanne Clément, Daniel Brière, Antoine L’Écuyer, Catherine Faucher, Gabriel Maillé

Durée : 110 minutes

 

Au début de l’été 68, Léon Doré (Antoine L’Écuyer), 10 ans, passe à un cheveu de se pendre accidentellement. Sa mère le sauve in extremis, comme l’été précédent dans la piscine, comme il y a deux ans dans le congélateur. Léon est une bombe à retardement à l’imagination fertile.  Bien sûr, il y a Papa (Daniel Brière) et Maman (Suzanne Clément) qui s'engueulent tout le temps. Il y a aussi les maudits voisins et leurs vacances à la mer.  Et évidemment, il y a Léa (Catherine Faucher), la voisine fatigante qui a toujours raison.

 

Quand Maman décide de quitter la famille pour aller refaire sa vie en Grèce, Léon va tout faire pour sublimer la douleur. Piller la maison du voisin, devenir menteur professionnel, trouver de l'argent pour acheter un billet d'avion pour la Grèce. Et même, pourquoi pas, tomber amoureux de Léa. Ensemble, ils réussiront le temps d'un été à surmonter la douleur de vieillir quand on se sent abandonné.

 

Commentaires de Michel Handfield (26 septembre 2008)

 

« C’est mieux de ne pas mentir, mais c’est pire de mal mentir. » (De la mère à Léon) 

 

        « Moi, un enfant normal? On est une famille de fou! » Voilà ce que dit Léon, 10 ans. Cela donne le ton du film, car Léon est un peu particulier, c’est le moins qu’on puisse dire. Sa famille aussi. Sa mère les quittera pour se faire une autre vie en Grèce. Dans les années 60 c’était chose rare, mais ça changera. Le choc pour Léon, qui avait besoin de toute l’attention de sa mère et était souvent de connivence avec elle.

 

Son père, lui, s’occupe de grandes choses, de politique et d’affaires internationales, alors il a peut être moins de temps pour les petites choses de la vie.  Léon observera même, en voix off, qu’il  n’avait pas le temps de s’occuper d’eux, car il s’occupait d’enfants qui avaient des problèmes dans le monde! Comme si eux n’en avaient pas. La famille dysfonctionnelle modèle, comme dans Maman est chez le coiffeur. Pas étonnant, car ce film est tiré de deux romans de Bruno Hébert, « C’est pas moi, je le jure » et « Alice court avec René », alors que l’autre film, Maman est chez le coiffeur, a été écrit par sa sœur,  Isabelle Hébert! Simple fiction ou y a t’il une large part de réalité dans ces deux films? Cette famille était-elle si dysfonctionnelle pour ainsi alimenter l’imaginaire de ces deux enfants? À moins que cette famille ne fût en avance d’un cran ou deux sur ce qui s’en venait au Québec, comme le désir d’émancipation de la femme et le divorce, ce qui en fit un sujet pour les enfants les plus créatifs du couple. Aller donc savoir.

 

Ces questions que l’on peut se poser, les deux enfants ayant mis une part de leur passé à l’écran, appellent une biographie de l’intérieur, car il y a trop d’éléments qui se recoupent entre ces deux films pour ne pas se poser des questions, sachant le rôle public et politique qu’a eu leur père, Jacques Hébert. Il était des grandes transformations du Québec et du Canada, notamment, en fondant, en 1963, avec son ami Pierre Elliottt Trudeau, la Ligue des droits de l'homme, aujourd'hui la Ligue des droits et libertés, qu'il présidera jusqu'en 1972. (1)  Une biographie à laquelle collaboreraient les enfants, surtout qu’ils étaient cinq (2) mais qu’on n’en connaît que trois par ces films,  serait certainement éclairante sur ce personnage public, car Jacques Hébert a été partie prenante des changements sociopolitiques qui ont marqué notre histoire contemporaine. Ce n’était pas un personnage marginal, ami de Trudeau et éditeur de plusieurs québécois, certains indépendantistes, malgré le fait qu’il était fédéraliste. (3) Cela dénote donc du flair, mais surtout une ouverture d’esprit. Un penseur libéral au vrai sens du terme. Mais, qu’en était-il des deux Jacques, le public et le privé? Dans sa vie privée était-il à la mesure de son personnage public?

 

Ces deux films soulèvent donc des questions et suscitent un intérêt pour une biographie de l’intérieur sur Jacques Hébert, car sa vision n’était certainement pas celle de tout le monde et il serait intéressant d’y revenir plus à fond pour comprendre l’homme, ses contradictions et son temps. Jacques Hébert, figure publique de l’édition et de la politique, appelait à un certain dépassement sur la place publique, mais qu’en était-il dans sa vie privée?  Question importante s’il en est une! Ce film appelle donc une biographie de l’homme qu’était leur père.  Je suis en attente. 

 

Pour les autres, qui veulent simplement se faire raconter une histoire, c’en est une bonne. Elle offre même l’intérêt d’avoir une contrepartie qui se recoupe avec un autre film. Un peu comme dans « Congorama », aussi de Philippe Falardeau,  où nous avions deux points de vue sur la même histoire, là nous avons deux films qui nous donnent des points de vue différents sur la même famille, celui-ci écrit à partir des romans de  Bruno Hébert et l’autre, Maman est chez le coiffeur, écrit par sa sœur Isabelle. Si vous avez vu l’un, vous devez voir l’autre. 

 

Notes :

 

1. Le passage exact, sur le site de Radio-Canada, se lit : « La même année où il a écrit J'accuse les assassins de Coffin, en 1963, il fonde avec son ami Pierre Elliottt Trudeau la Ligue des droits de l'homme, aujourd'hui la Ligue des droits et libertés, qu'il présidera jusqu'en 1972. » (www.radio-canada.ca/nouvelles/National/2007/07/17/002-Jacques-Hebert.shtml)

 

2. Il épouse Thérèse Desjardins en 1951, avec qui il a cinq enfants (Ibid)

 

3. Fondateur des Éditions de l’Homme en 1958 et des Éditions du Jour en 1961 (http://en.wikipedia.org/wiki/Jacques_H%C3%A9bert_(Canadian_politician), il publia notamment  Pourquoi je suis séparatiste de Marcel Chaput en 1961. (Nadeau, Jean-François, 2007, Bourgault, Québec : Lux, p. 102) Il « publiera [aussi] un nombre impressionnant de jeunes romanciers québécois. » nous apprend le site de Radio-Canada (op. cit.), dont  Claude Jasmin pour ne nommer que lui (Claude Jasmin, La mort de Jacques Hébert, Le Devoir, Édition du samedi 08 et du dimanche 09 décembre 2007 : www.ledevoir.com/2007/12/08/167768.html)

 

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L’UN CONTRE L’AUTRE, un film de Jan Bonny

 

À l’affiche à Montréal dès le vendredi 12 septembre au cinéma Parallèle (Ex-Centris)

 

2007 / Allemagne / 96 minutes

Avec Victoria Trauttmansdorf, Matthias Brandt, Wotan Wilke Möhring, Jochen Striebeck.

 

Montréal, le vendredi 29 août - FunFilm Distribution est fière d’annoncer la sortie en salle à Montréal du film L’un contre l’autre (Allemagne, 2007), réalisé par Jan Bonny et présenté à la Quinzaine des Réalisateurs en 2007. Le film prendra l’affiche au Cinéma Parallèle (Ex-Centris) le vendredi 12 septembre prochain. Variety a remarqué la performance extraordinaire de Victoria Trauttmansdorf alors que Les inrockuptibles a trouvé le film audacieux, mature et très maîtrisé. 

 

Georg est officier de police. Il sait rester calme et garder la tête froide, ce qui le rend populaire auprès de ses collègues de travail. Avec sa femme Anne, enseignante au primaire, ils semblent former un couple idéal qui dure depuis plus de vingt ans. Mais cette image parfaite comporte des fissures : Anne est souvent frustrée de l’attitude calme et passive de Georg, qu’elle voit comme un perdant, et elle se défoule violemment sur son mari. Quand Georg se voit offrir une promotion pour avoir sauvé un collègue qui reluquait ladite promotion, tout bascule et les façades tombent.

 

« Il y a deux ans, je suis tombé sur un article de journal. Il s’agissait d’un reportage de quelques lignes sur un sondage danois portant sur la violence domestique. Ce sondage disait que les agressions féminines sont chose beaucoup plus courante dans une relation que l’on pourrait croire. Ce qui m’a frappé, ce n’est pas tant cette surprenante information, mais l’importance qu’on lui donnait et la longueur de l’article. On avait pratiquement caché la nouvelle. De toute évidence, cette forme de violence est un problème auquel notre société n’est pas intéressée et ne veut rien savoir… L’un contre l’autre ne peut être réduit qu’au sujet de la violence. Le film s’abstient délibérément d’aborder le phénomène avec une critique sociale. C’est une histoire sur deux personnes qui veulent disparaître et en même temps ont envie de recevoir de l’attention. »

 

L’un contre l’autre est le premier long métrage de Jan Bonny. Il est diplômé de l’Académie des Arts Médiatiques de Cologne et vit aux États-Unis, en Hollande et en Allemagne.

 

À l’affiche dès le vendredi 12 septembre au Cinéma Parallèle (Ex-Centris, 3536 boul. Saint-Laurent)

 

Commentaires de Michel Handfield (24 septembre 2008)

 

Quand Georg est à la maison, sa femme crie après lui, le frappe et se désole ensuite. Elle est malheureuse et promet de ne plus recommencer. Mais, elle recommencera, parfois avec encore plus de violence. En plus de le battre, elle trouvera le moyen de l’humilier, notamment avec un de ses collègues.  Comme les hommes sont plus fort et qu’il est policier, s’il se défendait, il serait probablement accusé de violence conjugale. Il le sait, alors il se tait et endure. Calvaire, s’il en est un. Inversement, une femme peut facilement trouver à parler d’un problème de violence conjugale. Tout est même fait pour faciliter cela. Une foule de services  sont d’ailleurs à portée de main des femmes victimes de violence. Pour les hommes, tout est à faire. Question de culture et de préjugé, car un homme est plus fort qu’une femme, alors il ne peut être sa victime sans être consentant, voir sans aimer ça! On ne le prendrait pas au sérieux et il le sait. 

 

Les enfants savent que quelque chose ne va pas, témoins des sautes d’humeur de leur mère. Ils  évitent donc la maison. Alors, elle l’accuse de les éloigner et s’en prend encore à lui. Mais, comment peuvent-ils intervenir? Cela montre l’incapacité des proches dans certaines situations. Il n’est pas logique de fermer les yeux (pour les enfants) ou d’endurer (pour lui), mais on semble trouver difficilement d’autres issues si on ne veut pas répondre à la violence par la violence. Le support ne semble pas exister pour un homme dans cette situation. On se sent donc mal dans la salle.   

 

Un film dur, mais qui éclaire un phénomène que l’on ne veut pas voir : la femme bourreau, l’homme victime. Sa victime!  Que faire? Mettre sur pied des services d’aide ou des groupes de rencontre? Probablement, mais pour cela il faudra que les hommes victimes de leur femme acceptent de sortir de l’ombre. Sont-ils prêt de sortir au grand jour et à avouer qu’ils sont victimes de violence conjugale? De violence physique de la part de leur femme! C’est tout un changement qui devra s’opérer. Mais, il faudrait aussi que la société soit prête à accepter ce fait que la femme aussi peut être violente et que des hommes ont besoin d’aide. Qu’ils sont battus.  Ce n’est pas pour tout de suite et la tâche sera colossale pour atteindre cet objectif. Et on ne parle ici que de violence physique. Imaginez si on s’attardait à la violence psychologique. 

 

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TRUFFE

Sortie : 22  août 2008 à Montréal, Québec, Gatineau, Sherbrooke et Chicoutimi

 

Un film de: Kim Nguyen avec Roy Dupuis, Céline Bonnier, Pierre Lebeau, Danielle Proulx, Michèle Richard et Jean-Nicolas Verreault

 

Durée : 1h15

 

En 2010, partout dans les sols du quartier populaire d'Hochelaga-Maisonneuve et sans crier gare, des gisements de truffes noires prolifèrent. Alice et Charles, propriétaires d'une binerie du coin, tentent eux aussi d'arrondir leurs fins de mois en profitant de cette nouvelle ruée vers l'or. Pendant un certain temps, les habitants du secteur sont comblés par cette nouvelle opulence, mais ce qu'ils ne savent pas, c'est qu'une inquiétante compagnie aux origines mystérieuses vient d'installer son siège social dans le quartier. Leur objectif : contrôler la production mondiale de truffes noires...

 

Film de genre en noir et blanc, ce deuxième film de Kim Nguyen (Le Marais, La Cité des ombres (en post-production)) est une comédie d'humour noir qui creuse, fouille et explore l’une des facettes de notre société : la surconsommation. 

                                           

Commentaires de Michel Handfield (23 août 2008)

 

Les truffes poussent en abondance dans le sous-sol d’Hochelaga-Maisonneuve suite aux changements climatiques, ce qui amène la manne pour un temps. Mais comme les truffes sont en abondances, leur prix tombe drastiquement. On ferait même plus d’argents avec les tomates tellement le prix a baissé. Devenu commune, on en sert même au snack bar du coin.

 

Pour refaire de l’argent avec les truffes, il faudrait contrôler l’offre; instaurer un contrôle serré sur la cueillette et leur mise en marché. C’est ce qu’une entreprise s’évertue à faire. Mais, ce contrôle implique une mainmise de l’entreprise sur les cueilleurs et la ressource…   

 

On pénètre donc dans un Germinal moderne, avec une mine de truffes au lieu du charbon. Tous les rouages de l’exploitation y sont, que ce soit celle des mineurs, des transformateurs, des vendeurs ou des clients, qui reçoivent un « produit  manufacturé » dit de qualité! Illustration de ce nouveau capitalisme néolibéral (1) qui fait davantage de perdants que de gagnants, comme si c’était le propre de ce régime.

 

On peut en profiter pour se demander pourquoi il est si difficile de coopérer alors que cela semble si simple et, pourtant, plus logique? L’appât du gain, comme à la loterie. La croyance en soi, en sa bonne fortune : « Moi, je vais gagner! »  C’est pour cela que les coopératives sont si peu nombreuses quand on les compare aux entreprises capitalistes. Pourtant, on critique tous ce capitalisme néolibéral. Cela nous dit quelque chose d’important sur la nature humaine : on est tous contre le fait d’être  exploité par plus « gros » que nous, comme un marchand véreux par exemple, mais on rêve presque  tous  de faire de l’argent facilement, comme si cela était possible sans exploiter quelqu’un en bout de ligne! C’est ce qui explique qu’on a fait la révolution soviétique au nom de Marx, mais qu’on a construit une forme de capitalisme d’État à la place. Utopie! 

 

On a aussi droit à un regard critique et cynique sur la déshumanisation de l’entreprise et du travail, car on a fait des robots des employés, cela grâce aux moyens de contrôle modernes. Ils ne sont plus tout à fait humains une fois que l’entreprise les a mis à sa main. Il ne faut pas oublier qu’on est dans le futur, même si c’est un future proche! Et qui sont ces employeurs qui les exploitent ainsi? Des apôtres du néolibéralisme encore plus néolibéral que les penseurs du système ou des créatures froides et inhumaines qui ne cherchent que leur enrichissement? Des robots au service du néolibéralisme! 

 

On est dans une fable du capitaliste, où les lois du marché et les méthodes mafieuses s’unissent pour éliminer la résistance et la compétition! On cherche le contrôle global du marché et de la pensée. Le rêve : tout contrôler, comme si la terre était au service d’un patron-dieu tout puissant. C’est cependant oublier que l’humain est rationnel, mais aussi émotionnel… et que les émotions peuvent parfois faire dérailler les plans même les mieux conçus.  A moins qu’on ne reprogramme l’humain dans un avenir rapproché! (2)

 

Un film hors de l’ordinaire, qui peut être déroutant, mais que j’ai bien aimé.

 

Notes :

 

1. Déjà, dans « capitalisme contre capitalisme », en 1991, Michel Albert expliquait que le modèle de Rhénan, même si plus humain, perdait du terrain face au modèle Anglo-saxon, beaucoup plus dur, dans une lutte entre les deux modèles de capitalisme suite à la chute du communisme. S’il en est ainsi, c’est que le capitalisme est un système de combat qui a peur du vide. Il lui faut un adversaire pour être à son mieux. Face au modèle Anglo-saxon, le néolibéralisme en fait, naîtra probablement un nouvel opposant avec le temps, car le capitalisme récupère et intègre la contestation pour se régénérer. Ainsi, fut son histoire et rien ne laisse croire que cela changera.  

 

2. Science fiction, mais pas tant que cela. A ce sujet lire « l’Homme biotech : humain ou posthumain ? » sous la direction de Jean-Pierre Béland.

 

Références :

 

Albert, Michel, 1991, Capitalisme contre capitalisme, Paris: Seuil, l'histoire immédiate. 

 

Béland, Jean-Pierre (Sous la direction de), 2006, L’Homme biotech : humain ou posthumain ?, PUL : Sciences humaines, Éducation et IQRC, 144p. : www.pulaval.com

 

MARX, Karl, 1977, Le Capital, tome 1,2, et 3, [1 ère édition1867], Paris: éditions sociales.

 

MARX,  Karl, et Engels, Friedrich, 1978, Œuvres choisies, Moscou: éd. du Progrès.

 

Zola, Émile, 1993, (1885), Germinal, Paris : Bookking International

 

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IMPORT EXPORT

Un film d’Ulrich Seidl

 

À l’affiche à Montréal dès le vendredi 15 août au Cinéma Parallèle (Ex-Centris)

 

2007 / Autriche / 135 minutes

Avec Ekateryna Rak, Paul Hofmann, Michael Thomas, Maria Hofstätter

 

À la frontière du documentaire, tourné avec des acteurs qui n’en sont pas vraiment, Import Export raconte l’histoire de deux destins croisés : celui d’Olga, une infirmière qui quitte son Ukraine natale et son enfant pour aller travailler en Autriche et celui de Paul, jeune Autrichien désœuvré, peinant à se trouver du travail, qui part en Ukraine avec son beau-père pour y installer des machines à sous. Olga et Paul vont lutter, à l’Est et à l’Ouest, pour donner un sens à leur vie. Chacun va connaître un pays étranger – et ses abîmes. Import Export : un film sur la sexualité et la mort, le pouvoir et l’impuissance, les gagnants et les perdants, ceux qui vivent et ceux qui meurent… et sur l’art de brosser les dents d’un renard empaillé.

 

« Mon propos n’est pas uniquement de divertir le spectateur, mais aussi de le toucher, voire de le déranger, dit Ulrich Seidl. Mes films ne critiquent pas des personnes, mais la société dans laquelle ils vivent. Et j’ai une conception claire de la dignité. Un film atteint son objectif lorsqu’il dépasse le divertissement et pousse le spectateur à découvrir quelque chose en rapport avec sa propre vie. Mon intention est de renvoyer au spectateur une image de lui-même. »

 

Ulrich Seidl est né en 1952 et habite à Vienne. Il a réalisé un certain nombre de documentaires récompensés en festivals tels que Tierische Liebe (Animal Love), Models (Models) ou Jesus, du weisst (Jesus, You Know). Sa manière particulière d’atteindre l’authenticité en faisant des portraits de l’humanité dans ses moments les plus extrêmes, notamment de solitude, a provoqué des débats. Son premier long métrage, Dog Days, a remporté le Grand Prix du Jury à la Mostra de Venise 2001.

 

Commentaires de Michel Handfield (14 août 2008)

 

Au plan socioéconomique, la différence Est/Ouest nous saute aux yeux. En Ukraine, ce sont les conditions des années 40 ou 50 par rapport à l’Ouest. Mais, attention, le capitalisme s’est durcit et, même en Autriche, le travail n’est pas facile, ni garantit pour les autrichiens. Paul a d’ailleurs des difficultés d’employabilités comme on dit ici. Les travailleurs autrichiens sont aussi de plus en plus en compétitions avec les étrangers qui viennent pour améliorer leur sort. (1) C’est par exemple le cas d’Olga qui est parti d’Ukraine et que l’on suit aussi dans ce film. 

 

Cependant, Paul n’a pas que des difficultés d’emplois. Il est aussi dans une quête de sens, car il se cherche.  S’il donne une image de dur, il est, en fait, un peu mou à l’intérieur! Se trouvera-t-il mieux ailleurs? Probablement pas, car c’est d’abord un malaise intérieur qu’il a. D’aller en Ukraine avec son beau-père pour y installer des machines à sous, cela l’aidera à identifier ce malaise, mais pas nécessairement à être mieux. 

 

Avec Olga, on voit un pan de l’Ukraine qui est en manque. Infirmière, elle n’est pas juste sous payé, elle n’est parfois pas payée. Ainsi, elle reçoit 30% de sa paie, le reste devant venir le mois prochain! Mais, viendra-t-il? D’ailleurs, est-il  venu le mois passé ou celui d’avant? On ne le sait pas, mais on peu en douter. Certaines filles dans sa situation  se trémoussent donc devant internet, dans un genre de « prostitution propre » si l’on peut dire, car sans contact avec des clients, pour aller chercher ce qui leur manque pour vivre. Elle essaie, mais ce n’est pas elle. Elle décide donc de passer à l’Ouest et d’aller travailler en Autriche.

 

 Avec Paul, on verra une autre face du désœuvrement et de la dégradation ukrainienne. Les édifices sont délabrés, les gens ont peu. La prostitution devient une porte de sortie, soit  pour obtenir de l’argent, soit comme  monnaie d’échange pour obtenir quelque chose. Le capitalisme à l’état brut. La vente de sa force de travail ou de son corps pour survivre. Paradoxe pour une ex-république communiste quand on voit le  pouvoir de l’argent sur les plus faibles. On peut leur faire faire n’importe quoi  pour de l’argent. Quand le beau-père de Paul fait monter une jeune fille à leur chambre, il en fait la démonstration la plus crue, ce que Paul n’accepte pas. Il est mal à l’aise devant l’injustice et l’exploitation. Paul serait un communiste de cœur alors que dans l’ex république soviétique on avait bien plus souvent le contraire : des exploitants drapés dans le drapeau du peuple! Pour Paul, Est ou Ouest, ce ne sera pas facile. Il devra d’abord se trouver.  Peut être devrait-il retourner aux études et cesser de jouer les durs.  

 

***

 

Une fois émigrée, ce ne sont plus les mêmes règles, ni les mêmes repères. Olga ne peut plus être infirmière. Ce sont plutôt les boulots sans sécurité, où on peut être renvoyé sur un coup de tête. Par jalousie par exemple, comme lorsqu’elle a développé une bonne relation avec les enfants où elle était aide domestique. Elle fut donc renvoyée sans motif. Elle trouve ensuite un travail de femme de ménage dans un hospice. Comme elle était infirmière, elle s’occupe plus que de raison des vieux et elle se le fait dire. Ceci aurait pu le mettre dans le trouble, mais elle a su naviguer. Elle se fera probablement une vie à l’Ouest.

 

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Il est triste de voir les vieux, seuls et sans visite à l’hospice. Mais, c’est une réalité. (2) Quand mes parents étaient en centre d’accueil, j’étais un des rares à y aller tous les jours. A ce que le personnel me disait, certains n’avaient de la visite qu’une ou deux fois par année. Cette réalité semble le propre d’une société capitaliste qui ne consomme plus que des ressources, mais aussi le temps des citoyens. On n’a alors plus le temps pour la famille ou le social, ce qui explique la démobilisation politique.

 

En Chine, car il faut bien en parler en cette période olympique, on n’a pas la liberté politique, mais en occident, où on l’a encore,  le système nous ronge au point que la plupart n’ont plus la force de s’impliquer. Qui suit le moindrement la politique et s’implique dans le communautaire voit toujours les mêmes gens : des militants devenus professionnels de la militance! Ce sont eux qui tiennent ce qui reste de démocratie, mais avec le risque qu’elle ne devienne une nouvelle forme d’aristocratie militante, où les mêmes gens se retrouvent dans les organismes sociocommunautaires et politiques. Ce sont eux qui auront finalement le pouvoir par abandon des citoyens, ce qui est déjà commencé en fait.      

 

***

 

En conclusion, ce film n’est pas une comédie, mais deux histoires de vie en parallèle qui nous font découvrir les réalités de l’Est et de l’Ouest. Une réalité qui n’est pas idyllique à l’Est, ce qu’on savait déjà, mais qui ne l’est pas toujours à l’Ouest, malgré ce qu’en dit l’idéologie.  Deux destins qui se ressemblent finalement, les deux n’aimant pas l’injustice. Mais, Olga semble avoir davantage d’outils que Paul pour atteindre son but, car elle a une qualification professionnelle, ce que Paul n’a pas. Un film sur l’import-export des gens pour répondre aux besoins du marché et  où le petit y gagne peu, quoi qu’on veuille lui faire croire…

 

Notes :

 

1. La même chose est vraie ici aussi. On dit manquer de main-d’œuvre, mais en même temps des groupes sociaux ont des difficultés d’emplois, ce qui crée des tensions qui peuvent devenir explosive. On en a eu un exemple il y a quelques jours à peine dans un arrondissement de Montréal, soit Montréal-Nord, où il y eut une émeute dimanche soir dernier (10 août) suite à une bavure policière. Cet arrondissement « est au deuxième rang des arrondissements les plus pauvres de l’île de Montréal; les jeunes de 15 à 24 ans sont les plus touchés par le chômage. » (Arrondissement de Montréal-Nord, CHANTIER, PLAN D’ACTION FAMILLE 2008-2010, Année 2007, p. 5, http://ville.montreal.qc.ca/pls/portal/docs/page/arr_mon_fr/MEDIA/DOCUMENTS/plan_action_famille.pdf)  Pas surprenant alors que la délinquance et le flânage ne deviennent leur principale activité, car on ne semble avoir rien d’autres à leur offrir de toutes façons.

 

2. Ce fut d’ailleurs tourné dans un véritable hospice.  

 

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LE CAS ROBERGE

À l'affiche au Québec le 15 août prochain!

       

Film réalisé par RAPHAËL MALO et produit par NICOLE ROBERT mettant en vedette BENOIT ROBERGE, JEAN-MICHEL DUFAUX, STÉPHANE E. ROY et SÉBASTIEN BENOIT

 

        Le phénomène web « LE CAS ROBERGE » (www.lecasroberge.com) fait le saut au grand écran avec la sortie de ce long-métrage éponyme. Réalisé par Raphaël Malo et produit par Nicole Robert, le film nous plonge dans le monde de Benoit Roberge et ses copains Jean-Michel Dufaux, Stéphane E. Roy et Sébastien Benoit qui évoluent dans le merveilleux monde du showbusiness québécois. Le public peut aussi découvrir les populaires capsules qui connaissent un vif succès en ligne en visitant le www.lecasroberge.com

 

        Dans l'univers du CAS ROBERGE LE FILM les belles filles gravitent et l'amour s'enflamme tout autant que les discussions. Avec le showbusiness québécois en toile de fond, ce film aborde avec humour et sensibilité une des grandes questions universelles : quelle est ma place dans ce monde?

 

        Benoit, chroniqueur télé, entouré de ses amis Sébastien, une vedette du petit écran, et Jean-Michel, ex-animateur télé pseudo-bouddhiste, rêve de se tailler une place de choix dans le showbusiness. Influencé par Stéphane, un comédien qui aspire à la reconnaissance artistique, ils décident d'écrire un film, espérant ainsi atteindre la notoriété qu'ils méritent. Ils partiront sur les traces du cinéaste Jean-Luc Godard s'isoler à Rouyn-Noranda pour trouver l'inspiration. Et l'amour dans tout ça?

 

        Sans l'ombre d'un doute Roberge est un cas, mais c'est aussi un éternel angoissé qui nous touche par sa vision du monde unique. Irrévérencieux, impulsif et maladroit, avec lui tout peut arriver. Sa tendance à dire tout haut ce qu'il pense tout bas l'amène souvent à mettre les pieds dans les plats.

 

        Ce film réunit également une palette d'invités tels que Bianca Gervais, Claude Jasmin, Yves P. Pelletier, Marie-Hélène Pinto, Marie Plourde et Bruny Surin. « LE CAS ROBERGE LE FILM » est une production Go Films, distribué par Alliance Vivafilm, financé avec la participation de Super Écran, le FCT, les crédits d'impôt du Québec et du Canada et avec la collaboration de Ford.

 

www.lecasroberge.com  

www.vivafilm.com

 

Commentaires de Michel Handfield (15 août 2008)

 

Ce film, issue d’une « sitcom » internet, reprend un peu le même concept que les capsules, ce qui donne un long métrage où on sent parfois le « clip » dans les plans séquences. On critique ici la télé et le star système, dont les magazines de vedettes, mais sans être trop dur même si on aurait parfois aimé qu’ils aillent un peu plus loin envers ce système médiatico-artistique qui carbure au vedettariat et à la convergence, incluant le vedettariat instantané que procure les téléréalités! Mais, comme Benoit Roberge fait aussi partie de ce système (1), il y a probablement une frontière à ne pas franchir. La critique porte plutôt sur les émissions culturelles racoleuses. Remarquez que je suis peut être mauvais juge, car regardant peu la télé j’ai pu manquer quelques références… 

 

 Heureusement, on ne s’arrête pas qu’au « star système », même si c’est la pièce majeure du film. On critique aussi les concepts à la mode au passage, comme la pensée positive ou les gens qui voient des signes partout, même où il n’y en a pas. C’est d’ailleurs le cas de Stéphane, toujours entouré de signes! La société a aussi droit aux réflexions de Roberge, notamment sur  les enfants. Bref, plusieurs reçoivent leur part de critique, mais pas trop cinglante pour ne pas faire fuir le public, car c’est un film qui se veut grand public même s’il se donne un petit air intellectuel avec des citations qui ont leur effet comme celle là de Jean Luc Godard : « La télé fabrique de l’oubli alors que le cinéma créée du souvenir. »

 

***

 

Du côté psychologie des personnages on joue sur les antagonismes et une certaine forme d’envie entre eux. On a aussi droit à une forme d’autodérision  de leur image, surtout que les quatre personnages principaux sont éponymes : Benoit Roberge, Jean-Michel Dufaux, Stéphane E. Roy et Sébastien Benoît étant eux même, contrairement aux autres personnages qui sont des personnages, comme Alexandra interprétée par Maude Ethier Boutet par exemple.

 

Quant à Benoit Roberge, qui se moque du vedettariat, il est en constante dissonance, car il voudrait devenir une vedette d’automne! C’est donc prétexte à sourire. Du pur cas Roberge pour qui connaît les capsules internet.  Pour les autres, c’est à voir comme une  première comédie d’été. Peut être qu’un jour ils nous pondront un film d’automne.

 

Note :

 

1. Dans le CV de Benoît Roberge, fournit dans les notes de presse, on peut y lire qu’il fut, entre autres, concepteur-scripteur des galas du dimanche de Loft story (TQS) et chroniqueur à caféine (TQS).

 

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Index

 

Du 21 août au 1er septembre 2008

Le 32e FESTIVAL DES FILMS DU MONDE

Michel Handfield

 

7 août 2008

 

J’ai assisté à la conférence de presse du FFM il y a deux jours, soit mardi le 5. Comme l’ont dit Serge Losique et Danièle Cauchard, la particularité de Montréal est qu’on est au carrefour  des cinémas américain (1), français et québécois/canadien. Ceci nous donne déjà une ouverture par rapport à ceux qui n’ont accès qu’à un cinéma national et au cinéma commercial américain, ouverture qui se traduit par un désir de voir davantage de cinéma d’ailleurs, ce à quoi répond le FFM. 

 

Suite à une question d’Odile Tremblay (2) du Devoir (www.ledevoir.com), sur le contenu canadien qui sera de plus en plus exigé des festivals que l’on subventionne, le duo a répondu que ce type de politique existe déjà dans plusieurs pays. C’est un peu malheureux par contre, ont-ils dit en substance, car promouvoir le cinéma national au dépend d’une cinématographie internationale, pour tenter de bloquer quelque peu un cinéma hollywoodien qui a, de toute façon, les moyens de pénétrer les différents marchés nationaux sans avoir recours aux  festivals, n’amène pas une plus grande ouverture d’esprit face aux  cinéma. Si l’avenir d’un cinéma national passe par un soutient à l’industrie locale, il passe aussi par la diffusion internationale, mais  cela ne peut se faire si tous les pays deviennent protectionnistes. Il faut être réceptif envers les œuvres d’ailleurs si l’on on veut que nos œuvres y soient vues. En d’autres termes, si on veut être bien reçu, il faut bien recevoir! C’est cette vision plus internationaliste du cinéma, qu’a toujours défendu le FFM,  qui attire le cinéphile, car c’est l’occasion d’agréables découvertes.

 

J’ajouterais pour ma part que cette ouverture devrait aussi se retrouver dans le marché des DVD. Après une protection légale de quelques années, ces films devraient être dézonés. (3)  L’on aurait ainsi accès à une cinématographie beaucoup plus étendue que celle à laquelle on a actuellement droit. On pourrait ainsi  commander beaucoup plus facilement des films de l’étranger pour les visionner chez soi. Le libre échange et le commerce mondial ne doivent pas seulement servir les grandes corporations, mais aussi les citoyens qui en font actuellement les frais sans en obtenir les bénéfices!  

 

Enfin, comme toujours,  le FFM, c’est gros :  un total de 234 longs métrages, dont 105 en premières mondiales et internationales; 13 moyens métrages; et 208 courts métrages! Ces films se répartiront dans les catégories suivantes : 

 

- COMPÉTITION MONDIALE : 21 longs métrages et 12 courts métrages;

- COMPÉTITION MONDIALES DES PREMIÈRES ŒUVRES : 17 longs métrages;

- HORS CONCOURS ET SÉANCES SPÉCIALES : 30 longs métrages;

- REGARDS SUR LES CINÉMAS DU MONDE : 84 longs métrages et 108 courts;

- DOCUMENTAIRES DU MONDE : 35 longs métrages, 13 moyens et 15 courts;

- HOMMAGES : 15 longs métrages (Alan Ladd Jr., Tony Curtis, Kashiko Kawakita, comédies musicales de l’époque soviétique);

- CINÉMA SOUS LES ÉTOILES : 18 longs métrages;

- NOTRE CINÉMA À RADIO-CANADA : 15 longs métrages;

- FESTIVAL DU FILM ÉTUDIANT : 73 courts métrages.

 

Le jury sera présidé par le réalisateur Mark Rydell et sera composé de  l’actrice Evelyne Bouix ; la représentante du public Johanne Dugas; les réalisateurs Xie Fei et Vojtech Jasny; et l’écrivain et réalisateur Dany Laferrière.

 

En ouverture du festival, « Faubourg 36 » de Christopher Barratier. Aussi des hommages à Alan Ladd Jr. et Tony Curtis, et une « Master class » avec Brian de Palma. Voilà pour l’essentiel. Tous ces détails, et même plus, se retrouveront sur le site du FFM : www.ffm-montreal.org.

 

Notes :

 

1. Américain, ce que j’appelle le plus souvent possible États-uniens dans mes textes, car je revendique notre américanité. Je ne réduis pas non plus l’Amérique qu’aux seuls États-Unis, pas plus que l’Europe ne se réduit qu’à un seul pays. Je rêve d’ailleurs d’un parlement de l’Amérique comme il y a un parlement européen. Mais, ce n’est pas pour demain, surtout si on ne veut pas qu’il soit un bras des États-Unis sur toute l’Amérique. C’est pour cela qu’il faut renforcer nos liens économiques, politiques et culturels avec le sud de l’Amérique.  

 

2. En fait Odile Tremblay a posé deux questions. La première portait sur le financement gouvernemental du FFM, à laquelle on a répondu, comme à tous les ans, qu’on laisse les annonces politiques à la politique…

 

3.   http://en.wikipedia.org/wiki/DVD_region_code (plus complet, mais en anglais)

http://fr.wikipedia.org/wiki/Region_Code_Enhancement (en français)

 

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Rapport : FFM 2008

Michel Handfield

 

10 septembre 2008

 

Du  21 août au 1er septembre dernier, ce fut le 32e Festival des Films du Monde de Montréal (www.ffm-montreal.org/).  J’y ai vu un nombre raisonnable de films et j’ai pris beaucoup de notes. Après mûrissement, j’écris mes textes sur les films qui sont dans notre créneau. Si je n’ai pas d’angle, je n’écris rien, mais cela est rare, car j’ai certains critères de sélection.

 

C’est là un processus qui dure un certain temps. Cependant, à mesure que ces textes sont prêts, ils sont mis en ligne.

 

Menu du FFM :

 

LE BANQUET

À la recherche de l’extase!

- 9 TO 5 - DAYS IN PORN

- NO MIRES PARA ABAJO

- FOLLE DE DIEU

- À L'AVENTURE

NILOOFAR

TUMMIEN PERHOSTEN KOTI

SHULTES

JERUSALEMA

ABSURDISTAN

CE QU'IL FAUT POUR VIVRE  

FIGHTER

DAS WUNDER VON BERLIN

EN PLEIN COEUR

NOWHERE MAN

Las Mofas Mágicas

Le Noeud cravate

Drux Flux

TODOS ESTAMOS INVITADOS & I DEMONI DI SAN PIETROBURGO

FAUBOURG 36

 

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LE BANQUET

Canada / Hors Concours / 2008 / Couleur / 105 min

 

Note de la rédaction : Même si je fus invité au visionnement de presse du distributeur, comme ce film était présenté au FFM avant sa sortie  en salle, j’ai fait le choix éditorial de le présenter dans le cadre de mes textes sur le FFM. 

 

Réalisateur : Sébastien Rose

Scénariste : Hubert-Yves Rose, Sébastien Rose

Photographie : Nicolas Bolduc

Montage : Carina Baccanale, Dominique Fortin

Interprètes : Alexis Martin, Raymond Bouchard, Frédéric Pierre, Benoit McGinnis, Catherine de Léan

 

Dans une ville où les valeurs se perdent, que transmet un père à sa fille, un professeur à ses étudiants, un leader étudiant à ses troupes? L'école est-elle toujours ce lieu où se trouvent les amis, la connaissance et l'espoir? Professeur aussi passionné que désabusé, Bertrand est projeté dans une situation qui confronte toutes ses craintes. Le recteur de l'université n'a qu'une idée en tête: étouffer la contestation étudiante et développer toujours plus son université. Louis-Ferdinand, leader étudiant, est tiraillé entre son coeur et sa tête, les aspirations des étudiants et les siennes. Natacha veut refaire sa vie, son passé la rattrape, et sa seule bouée de sauvetage est de confronter son père. Gilbert, âme perdue, fréquente l'université sans vraiment savoir pourquoi. Lorsqu'il trouvera, ce sera trop tard.

 

Sébastien Rose

 

Né à Montréal (Canada) en 1969, Sébastien Rose a réalisé son premier long métrage, COMMENT MA MÈRE ACCOUCHA DE MOI DURANT SA MÉNOPAUSE, en 2002. Le film remporte le prestigieux prix Claude-Jutra. Son deuxième long métrage, LA VIE AVEC MON PÈRE (2005) a reçu le prix du public au Festival Karlovy Vary. Auparavant, il écrit, produit et réalise les courts métrages de fiction Petits Maîtres (1999) et Vous n'avez pas votre place ici (1997). Après une maîtrise en philosophie de l'Université des sciences humaines de Strasbourg et quelques années d'enseignement de cette discipline, il intègre le milieu du cinéma. Producteur de La Rage (1999), de Diane Gagnon, il a à son actif la production et la réalisation de vidéos corporatifs et de messages publicitaires.

 

Communiqué d’Alliance

 

Est-ce que chacun peut trouver sa place au soleil dans notre société? Dans une ville où les valeurs se perdent, que transmet un père à sa fille, un professeur à ses étudiants, un leader étudiant à ses troupes? L’école est-elle toujours ce lieu où se trouvent les amis, la connaissance et l’espoir? Professeur aussi passionné que désabusé, Bertrand est projeté dans une situation qui confronte toutes ses craintes. Jean-Marc, le recteur, n’a qu’une idée en tête : étouffer la contestation étudiante et développer toujours plus son université. Louis-Ferdinand, leader étudiant, est tiraillé entre son cœur et sa tête, les aspirations des étudiants et les siennes. Natacha veut refaire sa vie, mais très vite, son passé la rattrape, et sa seule bouée est de confronter son père. Gilbert, âme perdue, fréquente l’université sans vraiment savoir pourquoi. Quand il trouvera, ce sera trop tard.

 

 

Commentaires de Michel Handfield (10 septembre 2008)

 

Fiction basée sur une réalité récente : les grèves étudiantes de l’UQAM, cela dans la foulée des coupes de services et de l’augmentation des frais de scolarité suite au gouffre financier creusé par les malversations de quelques bonzes de l’institution! Remarquez, qu’avec le sous financement de l’éducation, les universités n’ont parfois pas d’autres choix que de faire des montages financiers. Mais, qui dit montage, dit aussi risque que ce soit chancelant et que le tout dérape. 

 

De l’autre côté, de celui du pouvoir, on sait bien ce que signifient ces coupes, car on a fait le test dans la santé : une baisse de service, sinon de qualité, et une grogne populaire croissante qui réclamera  davantage de privés. Une façon de faire plaisir aux entrepreneurs sans se mettre à dos les électeurs, car ce sont eux qui réclament cette brèche dans le système, ce qu’on espérait! L’électeur ne se souvient déjà plus qu’en même temps qu’on a coupé dans la santé, pour équilibrer le budget de la province, on donnait de généreuses subventions à nos entreprises au nom de la création d’emplois, comme si la santé ne créait pas aussi des emplois! Emplois qu’on a coupés même si le système n’avait plus de gras en première ligne.  C’est ce même modèle qu’on cherche maintenant à appliquer dans l’éducation collégiale et universitaire, cela même si on nous parle sans cesse de l’importance du savoir. Mais, savoir quoi?

 

On voit de plus en plus de programmes courts basés uniquement sur les besoins immédiats – et à court terme! - des entreprises. On forme ainsi des agents de télémarketing au cégep ou on enseigne  l’orientation client à l’université (1), mais cela sans avoir à faire tout le parcours d’un étudiant collégial ou universitaire. On veut des gens productifs; pas du monde qui perd son temps à penser et, surtout, à questionner, car on est pour le changement et l’amélioration continue dans la suite des choses et le respect de l’ordre établi! 

 

Puis, pour bien décourager les étudiants normaux, on accroît les groupes tout en réduisant les choix de programmes et de cours, façon de standardiser les parcours individualisés. On trouve même le moyen de faire des partenariats publics privés (PPP) là-dedans comme en santé ou en voirie, du moins dans certaines sphères des universités. C’est ainsi que :

 

« Dans son édition de samedi dernier, Le Devoir faisait état d'un autre projet hors [du] futur CHUM qui prévoit que les soins, l'enseignement et la recherche en ophtalmologie seront dispensés dans une clinique privée propriété du Groupe Sedna, présidé par un ancien ministre de la Santé, Michel Clair. Les 26 médecins spécialistes qui travaillent actuellement en ophtalmologie dans les trois pavillons du CHUM y seraient regroupés. Le projet, a déclaré M. Clair, est très avancé. »  (2a et b)

 

Signe des temps, une banderole « Université à vendre » était déployée sur le mur de l’UQAM dans ce film. Ce n’était pas cynique du tout, car,  dans le contexte actuel, ce pourrait être possible, surtout suite aux déboires financiers qu’a connus cette université dans les dernières années. Forcer l’UQAM à un partenariat public privé ne me surprendrait donc pas du tout.   

 

Que certains cours soient donnés en entreprise privée, comme chez SNC-Lavalin ou dans une firme de comptables par exemple, serait-ce bien ou mal? Je crois que cela dépend toujours de la manière dont c’est fait et, surtout, des objectifs derrière ces changements. Rendre les étudiants plus aptes aux besoins du travail ne serait pas mauvais en soit, mais les rendre plus apte dans un environnement qui empêche l’esprit critique de se développer serait certainement beaucoup plus discutable. Séparer savoir technique et culture générale est fortement discutable aussi. On prépare pourtant les futurs professeurs d’école primaire et secondaire en suivant ce modèle selon le film, car en science de l’éducation «  les étudiants apprennent la pédagogie, mais n’ont parfois pas davantage de culture générale que ceux qui sont assis devant eux » dit en substance Bertrand, qui donne le cours d’histoire et scénarisation 1, façon de faire quelques clins d’œil au cinéma québécois! On peut toujours dire que ce n’est qu’un film, sauf que les scénaristes, père et fils, connaissent bien ce milieu. En effet, les notes de presse nous apprennent que Sébastien Rose, réalisateur et scénariste, «  est venu au cinéma après une maîtrise en philosophie de l’Université des sciences humaines de Strasbourg et quelques années d’enseignement de cette discipline », et que son père, Hubert-Yves,  lui aussi scénariste sur ce film, « partage son temps entre l’écriture de scénarios et l’enseignement de la scénarisation à l’UQAM. » Pas autobiographique, mais certainement bien « groundé »!  Une critique sociale et  politique de l’éducation certainement bien sentie.

 

Tout y passe. Plus qu’on peut en saisir en fait. Ainsi, ce leader étudiant qui tente de se faire un avenir en contenant les étudiants se fera tasser par plus vindicatif que lui, car il y a quelque chose à tirer de l’affrontement : de la prestance et un avenir pour un leader étudiant (3); une force de négociation pour aller chercher davantage de fonds de l’État; et un prétexte à casser violement le mouvement pour le gouvernement, façon d’envoyer un signal clair que l’État n’a plus de marge de manœuvre et ne rira pas avec les prochaines  négociations du secteur public  si elles ne respectent pas le cadre fixé. Aux partenaires sociaux de comprendre le message et de le passer ou de défier l’autorité.

 

On est à l’arrière-scène de l’éducation, où le système crée ses propres dérapages parfois. Ainsi, l’étudiant qui ne comprend pas, mais qui se plaît à jouer le système trouvera davantage d’écoute que ceux qui veulent apprendre ou que le professeur qui veut enseigner, c’est-à-dire amener ces étudiants plus loin, car il n’y a rien contre les abus de procédure ici ou, encore, pour détecter les esprits dérangés. Au contraire même, car le système se plaît dans la procédure, dont une parfaite illustration est donnée ici (4),   et à satisfaire le client, nouveau mantra managérial obligé par le manque de support venant de l’État! En effet, on a besoin de clients pour vivre, alors on accepte des gens qui ne sont pas à leur place à l’université – ou dans certaines disciplines au moins – pour leur seul fric! L’université ne devrait pas être un Canadian Tire, mais c’est ce qu’on en fait! Et quand on veut des clients qui paient, il faut les satisfaire… parfois au dépend même de l’éducation, car la satisfaction passe par un papier! On le saura avec le temps, mais à quel prix? Et que vaudra ce papier si on diminue les normes pour que seuls les moyens de se payer les frais de scolarités permettent de se l’acheter? 

 

On ne peut garantir l’éducation ou la réussite comme on garantit un téléviseur ou un silencieux d’automobile, car ce n’est pas un produit manufacturé. Il y a le service donné, mais il y a aussi le travail mis par le récepteur. On est dans la complexité ici, sauf que certains refusent l’échec ou de ne pas être capable d’atteindre les objectifs. De ne pas être à leur place.  « C’est ainsi qu’on est en train de s’aliéner nos meilleurs étudiants en nivelant par le bas au nom de la démocratie » dira Bertrand.  Mais, aussi au nom d’une société de consommation où tout devient marchandise, même l’éducation.

 

La démocratie, est-ce de réussir les études choisies ou de réussir à trouver sa place? D’être supporté pour atteindre sa place? Ce film pose des questions intéressantes et l’éducation en prend pour son rhume. Qu’est-ce que les institutions (c'est-à-dire les cégeps, les universités et le ministère de l’Éducation) répondront à ce film? Voilà la question. Si certains verront un bon thriller, moi j’y ai vu un pamphlet qui questionne notre système d’éducation, mais aussi l’organisation sociale. Mais, dans tous les cas, c’est un bon film.

 

Notes :

 

1. L’orientation « client » est un cours donné par la   Faculté de l’éducation permanente de l’Université de Montréal par exemple : www.fep.umontreal.ca/formationcontinue/client.html

 

2 a. Tremblay, Jacinthe, Santé mentale : les services actuels seront amputés de moitié dans le futur CHUM, in Le Devoir, Édition du lundi 08 septembre 2008 : www.ledevoir.com/2008/09/08/204457.html.

 

2 b.   Pour la petite histoire cependant, Michel Clair ne fut pas ministre de la Santé. Si René Lévesque l'a pressenti pour ce poste, il l’a gardé au Conseil du trésor nous apprend le site de l’Université de Sherbrooke. (www.usherbrooke.ca/sommets/v15/n1/sommit.htm) Le tout est confirmé par le site de l’Assemblée nationale du Québec qui ne fait aucune mention de ce portefeuille pour Michel Clair, qui en a eu bien d’autres cependant! Il revint plus tard dans le domaine de la santé nous apprend aussi le site de l’Assemblée nationale, soit comme directeur de l'Association des centres d'accueil du Québec (ACAQ), de 1987 à 1994, et, surtout, comme président de la Commission sur le financement des services de santé, mieux connu sous le nom de la commission Clair (www.assnat.qc.ca/fra/Membres/notices/c/CLAIM.htm) avant ses autres fonctions dans le privé, notamment à la tête du Groupe Sedna.  

 

La Ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux de l’époque était madame Pauline Marois, maintenant chef du PQ et aspirante première-ministre, qui a occupé ces fonctions du 15 décembre 1998 au 8 mars 2001 nous apprend aussi le site de l’Assemblée nationale. (www.assnat.qc.ca/fra/Membres/notices/m-n/marp1.shtml) La Commission Clair s’est donc tenue sous le règne de Pauline Marois à la santé, soit entre juin 2000, date de l’annonce de la commission, et le 17 janvier 2001, date du dépôt du rapport. Dans ce rapport on recommandait d’ailleurs un recours plus grand au privé. Voici ce qu’on en dit dans un résumé trouvé sur le site du gouvernement du Canada / Programme des services de dépôt (le caractère gras est de nous):

 

« La Commission recommande d’officialiser une structure hiérarchique pour les services hospitaliers spécialisés, répartis entre les hôpitaux locaux, régionaux et d’enseignement, avec une plus grande spécialisation à chaque palier.   En vue de permettre la fourniture des services médicaux nécessaires dans une variété de milieux, la Commission propose en outre de permettre à des pratiques privées spécialisées de s’affilier à des hôpitaux.  Elle espère ainsi que la prestation de certains services à l’extérieur du milieu hospitalier améliorera l’accès tout en réduisant les listes d’attente.  Ces services seraient offerts sous la supervision du personnel hospitalier, et les patients n’auraient pas à acquitter de frais additionnels.  Étant donné le caractère novateur de cette recommandation, la Commission propose de la mettre en œuvre graduellement après la réalisation d’une série de projets pilotes. »  (Chodos, Howard, EXAMEN DU SYSTÈME DE SANTÉ AU QUÉBEC (LA COMMISSION CLAIR), Division des affaires politiques et sociales, 26 février 2001 :  http://dsp-psd.tpsgc.gc.ca/Collection-R/LoPBdP/BP/prb0037-f.htm)

 

On n’était alors pas si loin de ce qui se passe présentement dans le dossier du CHUM. De péquistes à libéraux, la même route se poursuit à quelques détails près probablement.  Bref, la roue tourne vers le privé et ce n’est pas nouveau.

 

3. Combien sont devenus des politiciens, des gestionnaires ou des mandarins de l’État par la suite? Plusieurs. Claude Charron, Louise Harel, Gilles Duceppe et Louise Vandelac, étaient des leaders étudiants en 1968 au Québec par exemple! C’est ce que nous apprenait l’émission « Tout le monde en parlait »  l’an dernier sur les ondes de Radio-Canada/télé.   (www.radio-canada.ca/actualite/v2/lemondeparlait/archive202_200707.shtml)

 

4. J’ai pensé ici à certains ouvrages de Michel Crozier, soit :

 

- 1963, Le phénomène bureaucratique, Paris: Seuil, coll. Point.

- 1970, La société bloquée, Paris: Seuil, coll. Point.

- 1977,  avec Erhard Friedberg, L'acteur et le système, France: Seuil, coll. point politique.

 

Hyperliens:

 

http://www.uqamengreve.org/

 

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À la recherche de l’extase!

Michel Handfield

 

10 septembre 2008

 

Voici 4 films particuliers tournant autour de la recherche de l’extase. Cela va du sexe à la mystique, car qui sait si le point G est physique ou du domaine de l’esprit, voir spirituel! Ces 4 films sont, dans l’ordre où nous en parlerons :

 

- « 9 to 5 – days in porn », un documentaire sur le sexe instrumental; le sexe comme produit!

 

- « No mires para abajo » (Ne regarde pas en bas), un traité de philosophie du sexe à la fois exultant et pédagogique. On est dans l’érotisme.

 

- « Folle de Dieu » avec lequel on arrive à une extase mystique, ce qui permet de poser la question suivante: y a-t-il un parallèle entre sexe et religion?

 

- « À l’aventure » tente finalement de  répondre à cette question. En effet, les protagonistes du film, qui sont tous en relation avec Sandrine, mais pas nécessairement entre eux, lui font comprendre l’unité : l’unité entre la matière et le vide qui forment le monde, mais aussi l’unité entre l’extase physique et mystique, comme si l’extase ne faisait qu’une!

 

Ainsi, la boucle est bouclée. Nous allons maintenant parler de chacun de ses films. Sujet important en cette période de conservatisme, où la religion et la politique tendent à se distancier de la sexualité comme si elle n’était pas humaine et ne faisait pas autant partie de notre histoire que de boire ou de manger. En fait, elle fait partie de nous, sinon nous ne serions pas là pour en parler. 

 

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9 TO 5 - DAYS IN PORN

Allemagne / Documentaires du monde / 2008 / Couleur / 114 min

 

Réalisateur / Photographie : Jens Hoffmann

Montage : Christopher Klotz, Kai Schröter

 

Portraits de quelques vedettes du cinéma porno, industrie qui récolte des revenus beaucoup plus imposants que ceux de l'industrie de la musique. Tourné sur une période d'un peu plus d'un an, 9 TO 5 - DAYS IN PORN propose dix portraits, dix récits, dix vies intimes et personnelles faites de rêves et d'espoirs. Mais le plus souvent, les exigences de ce genre de travail finissent par laisser des traces. Car une courte période passée dans ce milieu peut vouloir dire le début ou peut-être bien la fin d'une carrière ou d'une vie normale.

 

Jens Hoffmann

 

Producteur, scénariste, directeur photo et réalisateur, Jens Hoffmann commence sa carrière au début des années 1990. Après plusieurs années de projets au cinéma et à la télévision, il fonde sa propre compagnie de production, F24 Film, vouée à la mise en marché de films d'entreprise, de publicités et de documentaires. On lui doit: Fatima's Hand (2006) et 20 SECONDS OF JOY (2007).

 

Commentaires de Michel Handfield (10 septembre 2008)

 

Portrait de quelques  acteurs de l’industrie porno, incluant au moins un producteur, un agent, un réalisateur et un scripteur. Mais, nous avons surtout droit à quelques vedettes du genre, surtout féminines. Découverte d’un milieu inconnu : l’arrière scène de l’industrie du film porno! L’avant-scène est davantage connue quoiqu’on en dise, car, si à écouter les gens « personne n’en consomme », les chiffres disent l’inverse : une large part de la population en consomme, surtout avec internet! D’ailleurs, si le porno fonctionne, c’est certainement qu’on le consomme! 

 

 

Pour travailler dans ce milieu, il faut le courage de ne pas être aimé par une large part de la population. Mais, ça paie bien. Une fille, avec son seul « high school » et son corps comme bagage, peut gagner davantage qu’un médecin. Et la carrière peut parfois être longue, certaines se recyclant dans d’autres positions de l’industrie, comme productrice ou scriptrice par exemple. Par contre, il faut faire attention, car plusieurs peuvent n’avoir qu’une carrière rapide. Faut donc en profiter pour économiser et bien préparer sa sortie, mais pas nécessairement dans le cinéma classique. Faire du porno pour être découverte est d’ailleurs le scénario le moins plausible, car le cinéma porno est sur une voie parallèle au cinéma classique, voies qui ne se rejoignent jamais! Que quelques un(e)s aient réussi à passer de l’un à l’autre n’est qu’accidentel. Faire du porno pour le sexe et pour l’argent est beaucoup plus réaliste.  

 

Naturellement, comme on voit quelques tournages, il est facile de comprendre qu’il faut aimer le sexe pour faire ce job, mais il faut plus que cela, certaines poses étant dignes du Cirque du Soleil! Sauf que c’est un « job ». S’’il y a parfois du plaisir, ce n’est pas tout le temps dira une des actrices devant la caméra.

 

On apprend aussi dans ce documentaire que le Canada est un des plus gros clients de pornographie même si on semble parfois bien conservateur. Conservateur sur le perron d’église ou dans les lignes ouvertes, mais à la maison c’est autre chose. Hypocrite peut-être? Comme ces conservateurs et biblistes états-uniens pris dans des scandales sexuels et qui demandent pardon, ayant été trompés par Satan naturellement! Comme s’ils ne pouvaient s’assumer, la sexualité faisant partie de l’intégrité humaine. Sans sexe, point d’humanité! That’s it, that’s all!  

 

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J’avais pris quelques noms en note, notamment celui de deux actrices dont je trouvais le propos particulièrement intéressant. Cependant, comme leur site internet est davantage à leur image qu’à leur propos, car c’est leur image qui paie, je ne peux mettre ces liens en ligne. Par contre, je souligne le site du AIM Health Care Foundation, « a non-profit corporation created to care for the physical and emotional needs of sex workers and the people who work in the Adult Entertainment Industry », de la Dr Sharon Mitchell, ex-vedette du porno qui s’est recyclée dans la medicine: http://www.aim-med.org/.

 

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NO MIRES PARA ABAJO  (NE REGARDE PAS EN BAS)

Argentine - France / Hors Concours / 2008 / Couleur / 90 min

 

Réalisateur / Scénariste : Eliseo Subiela

Photographie : Sol Lopatin

Montage : Marcela Saenz

Interprètes : Antonella Costa, Leandro Stivelman, Hugo Arana, Mónica Galán

 

Eloy est un jeune homme de 19 ans qui travaille pour l'entreprise familiale: une maçonnerie funéraire. Il s'occupe de la livraison d'ornements de toutes sortes, notamment ceux devant être posés au cimetière non loin de là, le plus important de la ville. Lorsque son père meurt, Eloy s'aperçoit que le temps passe plus vite dans ce monde qui lui paraît subitement plus hostile. En vérité, Eloy est en train de passer de l'adolescence à l'âge adulte. Il fait la connaissance d'Elvira, une jeune femme espagnole qui lui apprend certaines pratiques sexuelles. Un nouveau monde s'ouvre à lui; un monde qui le conduit dans les zones jusque-là inconnues de son âme et de ses incertitudes.

 

«Véritable guide de pratiques sexuelles, NO ME MIRES PARA ABAJO nous présente pendant les trois quart du temps un couple en train de faire l'amour. Mais il n'y a rien de vraiment scandaleux ni d'impur dans ces scènes. Au contraire, le sous-texte philosophique de l'entreprise offre un alibi intellectuel qui poussera les cinémas d'art et d'essai à programmer le film» -- Dan Fainaru (Screen International)

 

Eliseo Subiela

 

Né à Buenos Aires (Argentine) en 1944, Eliseo Subiela se distingue de ses comtemporains par la pratique d'un cinéma de la sensualité qu'il agrémente de propositions poétiques. En 1963, il signe Un largo silencio, son premier court métrage, suivis de longs métrages dont une grande partie a été présentée au Festival des films du monde de Montréal. On retiendra: LA CONQUISTA DEL PARAÍSO (1981), MAN FACING SOUTHEAST (1986), LES DERNIÈRES IMAGES DU NAUFRAGE (1989, Prix du meilleur scénario, Prix oecuménique et Mention du jury-FIPRESCI au FFM), LE CÔTÉ OBSCUR DU COEUR (1992, Grand Prix des Amériques au FFM), NE MEURT PAS SANS ME DIRE OÙ TU VAS (1995, Prix du public au FFM), DESPABÍLATE AMOR (1996), PETITS MIRACLES (1997), LES AVENTURES DE DIEU (2000), LE CÔTÉ OBSCUR DU COEUR 2 (2001), quelques téléfilms, ainsi que EL Resultado del amor 2007) et Lifting de corazón (2005).

 

Commentaires de Michel Handfield (10 septembre 2008)

 

Eloy pense que son père décédé lui rend visite et lui écrit des mots la nuit, mais il découvrira plus tard qu’il est somnambule. Sauf qu’il le découvrira en tombant dans le lit d’Elvira, une jolie fille de quelques années de plus que lui. Une attirance naîtra. Plus expérimentée que lui,  elle l’initiera à l’amour. Lentement, avec attention, pour en faire un amant exceptionnel.

 

Film surréaliste où se mêlent des croyances « nouvel-âgeuses », sexualité et  aura! Par exemple, les seins et le pénis sont de polarité positive, mais les pecs et le con, de polarité négative! « On parles-tu d’électricité alors que je croyais qu’on baiserait » dira-t-il à la belle!

 

Ce film exulte de toutes les parts de la peau si je puis dire! Avec une caméra sensuelle, il est ravissant. Si certains diront que c’est un film de cul, il est déculpabilisant, car il mêle philosophie, ésotérisme,  érotisme et pédagogie. Un film de cul peut-être, mais intellectuel!

 

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FOLLE DE DIEU

Canada / Documentaires du monde / 2008 / Couleur / 75 min

 

Réalisateur : Jean-Daniel Lafond

Interprète : Marie Tifo

 

Jusqu'où peut mener un amour passionné entre une femme et Dieu, son divin époux? FOLLE DE DIEU dessine un portrait étonnant de Marie de l'Incarnation, qui quitte la France après avoir abandonné son fils pour devenir bâtisseuse et missionnaire au Canada, au milieu du 17e siècle. Véritable thriller spirituel, le film accompagne la comédienne Marie Tifo à la recherche de ce personnage hors du commun. À partir d'un texte théâtral, elle affronte l'écriture incandescente de la religieuse, des lettres où celle-ci se confie à son fils avec une troublante impudeur.

 

Jean-Daniel Lafond

 

Les films de Jean-Daniel Lafond composent des récits émouvants et provocants, véritables poèmes philosophiques qui sont autant d'invitations au voyage et à la réflexion sur le destin des êtres et des peuples. On lui doit, entre autres: LES TRACES DU RÊVE (1986), Tropique du Nord (1994), LA LIBERTÉ EN COLÈRE (1994), L'HEURE DE CUBA (1999), LE FUGITIF OU LES VÉRITÉS D'HASSAN (2006).

 

Commentaires de Michel Handfield (10 septembre 2008)

On pénètre ici le monde de Marie de l’Incarnation à travers Marie Tifo qui incarne cette femme de Dieu et de passion dans ce documentaire. Marie, qui jouera Marie au TNM en 2009 (1), y est à la recherche de l’esprit et de la lettre de Marie de l’incarnation. Elle nous lit quelques-unes des lettres de cette illustre femme du XVIIe siècle (1599-1672) et rencontre des spécialistes pour en saisir tout l’esprit et l’incarner. 

 

Ce qui est particulier, c’est qu’on pénètre dans une mystique où l’extase touche l’érotisme, car si l’histoire de  Marie de l’Incarnation (2) est une histoire missionnaire en Nouvelle-France (3), c’est d’abord une grande histoire d’amour avec Dieu, son Divin Époux! Un amour qui flirte même avec le masochisme si je puis dire : « Les souffrances me sont plus agréables que les délices de la terre » a-t-elle écrite!

 

Femme de tête et entêtée, car, en résumé, elle a décidé qu’elle viendrait en Amérique à la suite d’un appel de Dieu et que rien ne l’en empêcherait. À l’objection de son confesseur, elle lui a répondu de le dire à Dieu s’il n’était pas d’accord, car « c’est lui qui m’appelle! »  Elle abandonna tout pour lui, même son fils de 12 ans. C’est ici qu’elle se réalisa.

 

Marie veut être un apôtre, rendre compte et transmettre. Incarner Dieu! C’est d’ailleurs elle qui a choisi son nom, probablement pas innocemment. Et, comme les apôtres que tous comprenaient dans leur languie nous dit la Bible, Marie sera comprise dans leur langue par les autochtones qu’elle éduquera, car en plus d’apprendre leurs langues elle traduira la bible en langue indienne et en fera des chants pour la transmettre selon leurs coutumes. Atteindre une autre culture passe par la langue et les femmes. Marie de l’incarnation le savait très bien.

 

Mais, le plus fascinant, ce sont les périodes d’extases de Marie de l’incarnation qu’elle décrit dans sa correspondance à son fils, parfois si près de l’orgasme qu’on croirait qu’elle couche avec Jésus. Rien de moins. Pour bien nous les faire sentir, Marie Tifo a recours à une danseuse pour trouver comment les jouer, car elle prépare sa pièce du TNM. (1)

 

Documentaire intéressant, car les écrits de Marie de l’incarnation sont hors du temps et de l’espace.

 

Notes :

 

1. La Déraison d'amour, DU 2 AU 13 JUIN 2009 au TNM. Texte établi par Jean-Daniel Lafond en collaboration avec Marie Tifo. Une coproduction du Théâtre du Trident et du TNM en collaboration avec la Société du 400e et le Grand Théâtre de Québec. Voir www.tnm.qc.ca.

 

2. Marie de l’Incarnation sur Wikipédia :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Marie_de_l%27Incarnation

 

3. Premières missionnaires françaises non cloîtrées nous dit ce film. Si elle a pu le faire, c’est peut-être par entêtement, mais aussi parce qu’elle fait partie de la réforme, née après l’édit de Nantes : http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89dit_de_Nantes.

 

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À L'AVENTURE

France / Regards sur les cinémas du monde / 2008 / Couleur / 102 min

 

Réalisateur : Jean-Claude Brisseau

Scénariste : Jean-Claude Brisseau

Photographie : Wilfrid Sempé

Montage : Maria Louisa Garcia

Interprètes : Carole Brana, Arnaud Binard, Nadia Chibani, Lise Bellynck

 

Sandrine est sexuellement insatisfaite par son fiancé. Grâce à Greg, un jeune psychologue, elle va rencontrer Sophie. Celle-ci lui révèle des détails sur ses expériences sexuelles. Intriguée puis perplexe, Sandrine va la suivre dans des voies d'hypnose dangereuses où elle connaîtra l'extase orgasmique.

 

Jean-Claude Brisseau

 

Né à Paris en 1944, Jean-Claude Brisseau exerce pendant 20 ans le métier d'enseignant avant de devenir cinéaste. En 1975, il réalise en super 8 son premier long métrage, LA CROISÉE DES CHEMINS. Suivront: UN JEU BRUTAL (1983), DE BRUIT ET DE FUREUR (1988), NOCE BLANCHE (1989), CÉLINE (1992), L'ANGE NOIR (1994), LES SAVATES DU BON DIEU (2000), CHOSES SECRÈTES (2002), LES ANGES EXTERMINATEURS (2006), présenté au FFM.

 

Commentaires de Michel Handfield (10 septembre 2008)

 

Dans ce film, on suit d’abord Sandrine; puis Greg, un psy qui l’a séduite tout en lui parlant de Freud; puis Sophie, une amie de Greg; puis…

 

Tous sont à la recherche du plaisir, voire de l'extase orgasmique. Mystique, rationalité et inconscient se rejoignent ici et tout se tient. On y parle de plaisir, d’orgasme et d’extase. Au fait, l’extase physique et l’extase mystique sont-elles la même chose? Ce sont des réponses que le film traque. Pour y arriver, on suivra les différents personnages à travers leur quête qui partira du plaisir sexuel pour se complexifier.

 

C’est normal, car on est dans une démarche de recherche psychanalytique. Ils iront loin, très loin, car pour Greg l’amour de la vérité est plus fort que la morale. On en viendra à une sexualité qui balancera entre pur plaisir et plaisir mystique, car l’extase pure est au-delà du sexe même si elle peut arriver par là! Toucherions-nous Dieu dans l’extase, même sexuelle?

 

Si parfois on est près de basculer dans la perversion, on n’y tombe jamais, car il y a toujours du sens. Voilà pour la trame principale du film.

 

Mais, à côté de cette trame, il y en a une autre, car Sandrine rencontre régulièrement un monsieur  d’un certain âge sur un banc public pour discuter avec lui. On ne sait trop ce qu’il est au début, mais ce n’est pas un itinérant. Il est chauffeur de taxi et semble un mélange de physicien et de philosophe hindou . On en apprendra peu à peu davantage sur lui et on comprendra pourquoi il donne cette impression.

 

Il explique les choses, tantôt avec humour, tantôt avec philosophie, parfois avec une précision scientifique. Il constatera ainsi, dès le début du film, que l’esclavage est maintenant entré dans les mœurs, car  on fait tous les mêmes choses aux mêmes heures, que ce soit de regarder la télé ou de baiser. Nous sommes notre propre geôlier,  car on s’autocontrôle, conditionné depuis l’enfance à le faire. Puis, à une autre occasion, regardant  un arbre, il dira que ça semble une masse, mais que lorsqu’on  y entre on s’aperçoit qu’il y a beaucoup plus de vide que de matières,  tout comme l’univers qui est un peu de matières en expansion finalement!  

 

        Sa présence et son discours font pleinement partie du film, comme des notes en marge d’une lecture, car il nous fait aller plus loin dans le sens, mais le sens plus intellectuel, plutôt que les sens plus sensuels qu’expérimente Sandrine dans sa quête. 

 

Ce film nous amène donc dans une quête de savoir, que ce soit par les sens; l’inconscient, cet inconscient qui nous en dit beaucoup plus qu’on ne peut en décoder; le savoir scientifique; et le sens commun, parfois très terre-à-terre. Un film profond et un jeu d’acteurs - surtout d’actrices! - à souligner. Sous des apparences de film de mœurs légères, on a droit à un film philosophique, au sens d’une quête du savoir!

 

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NILOOFAR

France - Iran - Liban / Compétition mondiale des premières œuvres / 2008 / Couleur / 82 min

 

Réalisateur : Sabine El Gemayel

Scénariste : Sabine El Gemayel, Fereshteh Taerpour

Photographie : Bahram Badakhshani

Montage : Bahram Dehghani

Interprètes : Roya Nownahali, Shahab Hosseini, Hengameh Ghaziani, Mobina Aynehdar

 

Niloofar, une fillette d'une douzaine d'années, ne rêve que de savoir lire et écrire bien que dans son village l'éducation soit réservée aux garçons. Sa mère, une sage-femme renommée, l'oblige à devenir apprenti. C'est en la secondant à un accouchement que Niloofar rencontre une féministe qui s'engage à l'instruire en secret. Malheureusement, son père la promet en mariage en échange d'une plantation d'oliviers lorsqu'elle aura ses premières règles. Niloofar refuse de mûrir et imagine toutes sortes de stratagèmes pour empêcher la première apparition de ses règles. Mais un jour, l'inévitable survient. Déterminée à préserver sa liberté le plus longtemps possible, Niloofar cache sa féminité pendant deux ans jusqu'à ce que la vérité éclate. Plutôt que de vivre sous le joug d'un mariage sans amour, Niloofar s'enfuit avec son amie. Déshonorée, sa famille proclame le crime d'honneur et envoie son demi-frère à sa poursuite.

 

Sabine El Gemayel

 

Après avoir vécu en Iran et au Liban, Sabine El Gemayel s'installe au Canada. Elle fait des études au Collège Stanislas avant d'obtenir un B.A. en communications de l'Université Concordia. Elle scénarise et réalise quelques courts métrages en 16 mm avant de déménager à Los Angeles. Depuis, elle travaille comme chef monteuse de plusieurs téléséries et longs métrages, dont LOOKING FOR LOLA (1998), WOMEN OF THE NIGHT (2000) et THE OLIVE HARVEST (2003). Avec NILOOFAR, elle signe son premier long métrage de fiction.

 

Commentaires de Michel Handfield (10 septembre 2008)

 

La mère de Niloofar est une sage femme, ce qui nous donne droit, dès le début du film, à un accouchement dans l’eau de la rivière. Assez spectaculaire. Quant à Nilo, son destin sera tracé par ses parents. Elle devra aider sa mère et devenir sage-femme! Mais, son père change la donne, car, en échange d’un terrain,  il la promet en mariage après qu’elle aura eu ses premières règles, ce qu’elle cachera un certain temps.  Mais, elle ne pourra toujours le cacher. « Pourtant, même le prophète a consulté sa fille avant de la marier » dira son oncle. Mais, dans ce village, le pouvoir est aux hommes.

 

On pénètre ici dans une autre culture. Elle, qui voudrait s’instruire, comme dans la cité où les femmes peuvent aller à l’université, se fait répondre par sa mère « Heureusement, on n’est pas dans la cité! » On est au royaume des traditions, des croyances  et des dogmes qui « entravent et rendent triste la vie » (1), surtout celle des femmes. J’ai pensé ici à Incendies de Wajdi MOUAWAD (France : Actes Sud et Québec : Leméac, 96 pages).

 

Malgré qu’elle est conservatrice, sa mère semble quand même la comprendre parfois. On le voit par le regard. Cependant, ayant probablement elle-même passé par là, elle considère que sa fille doit aussi passer par là. C’est le chemin à suivre, celui dicté par la tradition. Quant à son petit frère, il pense comme les vieux, défenseurs de la tradition et, surtout, de l’honneur de la famille.

 

        Film intéressant, car il propose une certaine ouverture. Cependant, quand je lis que c’est une coproduction France - Iran – Liban, je me demande jusqu’à quel point l’Iran est prêt à cette ouverture. Ce film est-il annonciateur de changements ou simple opération de séduction de l’opinion publique internationale? L’avenir nous le dira, mais j’émets des réserves, non pas sur le film,  mais sur cette ouverture iranienne contre la tradition.

 

Note :

 

1. Cette expression me sonne quelque chose, d’où mon choix de la mettre entre « ». Je sais que je l’utilise parfois, mais je ne sais pas si elle vient de moi ou d’ailleurs. Si elle me vient d’un auteur connu, d’un film, de la radio ou d’ailleurs, j’en remercie son auteur même si je ne sais pas qui il est. 

 

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TUMMIEN PERHOSTEN KOTI (Home of dark butterflies)

Finlande / Hors Concours / 2008 / Couleur / 105 min

 

Réalisateur : Dome Karukoski

Scénariste :  Marko Leino

Photographie : Pini Hellstedt

Montage : Harri Ylönen

Interprètes : Tommi Korpela, Nilo Syväoja, Marjut Maristo, Eero Milonoff, Kristiina Halttu, Kati Outinen, Pertti Sveholm

 

Juhani, 14 ans, est hanté et opprimé par une expérience traumatisante qu'il a connue dans sa jeunesse. Trimballé d'une famille d'accueil à l'autre pendant six ans, il finit dans un centre d'accueil pour garçons, L'Île. L'établissement est tenu par un certain Olavi Harjula, impitoyable et rigide dans sa façon de gérer. En plus des sept garçons et Harjula, les seuls autres pensionnaires du centre sont Irene, sa femme, leurs deux filles et Tyyne, le surintendant. Cette petite communauté est un monde en soi.«Si en tant que réalisateur, je peux faire une différence, je n'hésiterai pas. Ce film est une étape importante pour accomplir cette mission. La vie est un trésor fabuleux et c'est ce que je tente d'exprimer dans ce film... Malgré les difficultés auxquelles nous devons faire face, notre devoir est de continuer à vivre et nous relever lorsqu'on essaie de nous abattre.» -- Dome Karukoski

 

Dome Karukoski

 

Né à Nicosie (Chypre) en 1976, Dome Karukoski suit ses parents en Finlande à l'âge de quatre ans. Il étudie à l'Université des arts et du design à Helsinki. En 2005, il réalise BEAUTY AND THE BASTARD, son film de fin d'études. Il a également signé des spots publicitaires et des téléséries. Bon sportif, il a gagné de nombreux championnats de football américain.

 

Commentaires de Michel Handfield (10 septembre 2008)

 

Juhani, 14 ans, arrive dans un centre pour des garçons qui ont des troubles de comportement. Particularité, ce centre est sur une île. Il est reçu par Olavi Harjula qui lui dit « Sur cette île, vous vivrez soit l’enfer, soit le paradis. » Tout est dit. C’est de la réinsertion. Pas toujours facile, mais il se crée des liens entre les garçons, l’éducateur et sa famille.  L’éducateur est rigide, mais pas violent. Il les aime, mais n’est pas mou. Il est juste et les oriente comme un tuteur.

 

Se crée aussi des liens particuliers entre Juhani et une des filles d’Olavi ainsi qu’entre sa femme et un des garçons. Cela donnera certaines intrigues révélatrices des désirs de chacun. Ce n’est pas un plaquage artificiel pour faire dans la sentimentalité accrocheuse et gratuite, c’est-à-dire pour élargir le public comme on le voit trop souvent dans le cinéma commercial. C’est plutôt bien senti, allant avec l’évolution des personnages et le contexte.

   

Quand les services sociaux décident d’arrêter le financement,  les jeunes restent, car c’est leur famille. Il y a des liens bien réels qui se sont tissés entre eux. Ils élèveront des vers à soie pour subvenir aux besoins du centre! Un projet collectif.

 

Dans le cas de Juhani, que l’on suit plus particulièrement, on découvre lentement son passé difficile, surtout à partir du moment où son père revient dans le portrait, car, médecin, il a eu accès à de l’information pour retrouver son fils, même si on peut supposer qu’il y avait un fort degré de violence familiale à la maison du temps que Juhani était jeune. Pas facile, mais très intéressant au plan psychosocial, surtout quand on joue entre la réalité et les perceptions de celle-ci. Un film profond, où on découvre les nuances de la vie avec le temps, comme lorsqu’on regarde une toile de maître et qu’on en découvre patiemment tous les détails qui nous échappaient au premier coup d’œil.  

 

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SHULTES

Russie / Regards sur les cinémas du monde / 2008 / Couleur / 100 min

 

Réalisateur/Scénariste: Bakur Bakuradze

Photographie : Nikolay Vavilov, Marina Gornostaeva

Montage : Serik Beysemov

Interprètes : Gela Chitava, Ruslan Grebenkin, Lyubov Firsova, Cecile Plaige

 

Lesha Shultes, 25 ans, ancien athlète gravement blessé dans un accident de voiture, devient pickpocket. C'est son seul moyen de communication avec le monde extérieur. Il vit seul avec sa mère malade, vole, et rend parfois visite à son jeune frère à l'armée. L'amour, l'amitié, l'affection n'ont aucune place dans la vie de Shultes. Sa seule rencontre avec des sentiments a lieu quand il reçoit une cassette d'une jeune femme qu'il a volée. Ce contact avec la vie et les sentiments de l'étrangère conduisent Shultes à prendre des décisions risquées.

 

Bakur Bakuradze

 

Né à Tbilissi (Géorgie) en 1969, Bakur Bakuradze reçoit son bac et intègre la MADI (The Moscow State Automobile and Road Technical University). Il sert dans l'armée soviétique de 1987 à 1989. Il entre ensuite au VIGK, la fameuse école de cinéma de Moscou. Il en sort diplômé en 1998. Sa filmographie comprend: Displaced (2001), Paying with Life (2001), Vyacheslav Pilipenko (2001), The Diamond Way (2005), Moscow (2006). SHULTES est son premier long métrage de fiction.

 

Commentaires de Michel Handfield (10 septembre 2008)

 

Lesha Shultes, 25 ans, après un accident de voiture n’a rien à faire. Rien devant lui. Le désœuvrement. Pas de réinsertion. Alors, il vole pour vivre et pour le coup d’adrénaline que cela lui donne, car il est en mode existence. Il ne vit plus, car il a perdu une part de sa mémoire. On s’en aperçoit avec le temps. D’ailleurs, il note tout pour se souvenir.

 

Ce film est aussi une occasion de voir les contrastes russes! La pauvreté qui côtoie la nouvelle richesse. L’absence de filet social d’un côté et le nouveau capitalisme sauvage de l’autre, avec abondement de laissés pour compte à exploiter! 

 

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JERUSALEMA

Afrique du Sud / Regards sur les cinémas du monde / 2008 / Couleur / 120 min

 

Réalisateur /Scénariste: Ralph Ziman

Photographie : Nicolas Hofmeyer

Montage : David Helfand

Interprètes : Rapulana Seiphemo, Ronnie Nyakale, Shelly Meskin, Jeffrey Sekele

 

Lucky Kunene sait ce dont il veut dans la vie: une BMW de la série 7, une maison avec vue sur mer et une femme intelligente et belle. Toutefois, comme Lucky vient d'une famille pauvre de Soweto et qu'une bourse d'études universitaires lui est refusée, l'avenir qui l'attend est au mieux celui d'un pompiste mal payé. Afin d'échapper à ce destin, il vole des voitures avec Zakes, son meilleur ami: son costume, c'est une Datsun, le nouveau réfrigérateur, une Toyota, l'armoire, une Mazda, et grâce à une Mercedes, il achète une chaîne hi-fi et un lecteur vidéo. Mais on lui propose d'autres coups, cette fois-ci plus dangereux.

 

Ralph Ziman

 

Né à Johannesburg (Afrique du Sud) en 1963, Ralph Ziman suit une formation de caméraman, travaille pour des émissions d'information et réalise des documentaires. Il s'installe en Grande-Bretagne et fait du montage, et réalise ensuite de nombreux vidéoclips en Angleterre et aux États-Unis. Sa filmographie comprend, entre autres: HEARTS AND MINDS (1996), présenté au Festival des films du monde de Montréal, et THE ZOOKEEPER (2001).

 

Commentaires de Michel Handfield  (10 septembre 2008)

 

Dans un film inspiré d’événements réels, on suit Lucky Kunene. Un petit garçon qui ira vers la criminalité, d’abord parce qu’il ne pourra pas réaliser son rêve d’étudier. Puis, de la petite criminalité, il graduera. Inspiré par  Marx, Capone et Donald Trump, il se fera un peu un Robin des bois, mais prenant sa part! Sa large part parfois. 

 

Si jouer à Robin des bois seul ne fait pas trop de dommages collatéraux, commencer à le faire dans un milieu criminel dérange, car si le crime paie, ce n’est pas pour être redistribué. Ça ne dérange pas que les criminels, ça dérange aussi le système légal, car s’il faut l’aide de criminels pour donner l’illusion d’une certaine justice sociale, c’est dire que le système politique ne fonctionne pas si bien qu’on le dit.

 

En suivant ce criminel hors de l’ordinaire on a droit à un regard sur une Afrique du Sud qui se démocratise politiquement, mais pas nécessairement économiquement. Mais, peut-on parler de démocratie si elle ne s’applique pas à toutes les facettes de la Nation : économique, politique et sociale. Cela pose la question de l’Afrique du Sud, mais aussi de la Chine et de toutes les nations, surtout que la plupart des nations ont laissé aller le contrôle de l’économie à un organisme indépendant : l’Organisation Mondiale du Commerce!  

 

Pour en revenir à Lucky Kunene, même s’il était conscient d’être un criminel, il était encore plus conscient que la ligne qui sépare la criminalité de la non-criminalité est bien mince : souvent une question de marché ou de loi! Un produit est légal, un autre ne l’est pas. D’ailleurs, il dira « Look to greater fortune, it was greater crime! » Et c’est vrai: combien de fortunes se sont d’abord faites dans un monde illégal avant qu’il ne soit légalisé? Ce fut notamment le cas de la boisson. « Call it opportunity! »  Et il a raison. D’ailleurs, le système a besoin de la criminalité pour vivre, car les deux plus grandes industries étant le crime et la sécurité, elles se renvoient l’une à l’autre!

 

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ABSURDISTAN

Allemagne - Azerbaïdjan / Regards sur les cinémas du monde / 2008 / Couleur / 87 min

 

Réalisateur : Veit Helmer

Scénariste : Veit Helmer, Zaza Buadze, Gordan Mihic, Ahmet Golbol

Photographie : George Beridze

Montage : Vicent Assmann

Interprètes : Kristýna Malérova, Maximilian Mauff

 

Quelque part entre l'Asie et l'Europe s'étend le village d'Absurdistan, un coin perdu ne comptant que quatorze familles. Au village, le plus grand problème, c'est le manque d'eau. Mais les femmes trouvent que ce sont les hommes, le vrai problème. Tout simplement parce qu'ils ne lèvent pas le petit doigt pour remédier à cette situation. Amis d'enfance, Aya et Temelko ont atteint l'âge où l'amitié s'est transformée en profonde affection. Sauf qu'il n'est pas question qu'ils consument leur amour avant quatre années et pour tout compliquer, il faudra qu'ils prennent un bain ensemble, selon la tradition. Comment faire dans un endroit où l'eau est presque inexistante?

 

Veit Helmer

 

Né en 1968, Veit Helmer réalise des films depuis l'âge de 14 ans. Il étudie la réalisation à l'Université du cinéma et de la télévision de Munich et coproduit A TRICK OF LIGHT, de Wim Wenders. Il se crée une réputation grâce à l'originalité de ses courts métrages pour lesquels il obtient de nombreux prix dans divers festivals internationaux. Parmi ses films, on retiendra: TUVALU (1999), GATE TO HEAVEN (2003).

 

Commentaires de Michel Handfield (10 septembre 2008)

 

Depuis la chute de l’URSS, ce village n’est plus attaché à aucun pays. Libre! Oui, mais entravé aussi, car c’est la paresse chez les hommes depuis qu’une tragédie a eu lieue alors qu’on voulait amener l’eau au village. Des hommes sont disparus et, depuis, ceux qui restent ne font rien pour remédier à la situation. L’eau arrive donc au goutte-à-goutte quand elle arrive! 

 

Les femmes tentent bien de les faire bouger, mais de vraies têtes de mules que ces hommes. Elles iront jusqu’à la grève du sexe. Heureusement qu’il y a Temelko, qui rêve d’Aya depuis si longtemps qu’il bougera,  car il n'est pas question qu'ils consument leur amour avant de prendre un bain ensemble comme le veut la tradition. Créatif et fantaisiste, on aura droit à quelques surprises de sa part, ce qui  donne un film à la fois joli et divertissant! J’ai eu du plaisir même si j’ai pris très peu de notes.  

 

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CE QU'IL FAUT POUR VIVRE 

Canada / Compétition mondiale / 2008 / Couleur / 102 min

 

Réalisateur : Benoît Pilon

Scénariste : Bernard Émond, Benoît Pilon

Photographie : Michel La Veaux

Montage : Richard Comeau

Interprètes : Natar Ungalaaq, Éveline Gélinas, Pau-André Brasseur, Vincent-Guillaume Otis, Antoine Bertrand, Guy Thauvette, Louise Marleau

 

Au début des années 1950, Tivii, un chasseur inuit atteint de tuberculose, est déraciné et transporté dans un sanatorium de Québec pour se faire soigner. Affaibli, il doit en plus faire face aux conséquences de son arrachement: séparé de ses proches, incapable de communiquer dans une langue inconnue, confronté à une culture dont il ne connaît rien, et surtout, qui ne connaît rien de la sienne. Démoralisé, Tivii décide de se laisser mourir et devient son pire ennemi. Un ennemi que l'infirmière Carole combattra avec la force de sa détermination. Carole comprend le mal profond qui afflige Tivii et elle insiste pour que le jeune inuit Kaki, malade lui aussi, soit transféré dans son sanatorium. Kaki connaît bien les Blancs et il pemettra à Tivii d'appréhender ce monde qui le rebute. De son côté, en transmettant ses connaissance à Kaki, en lui parlant des coutumes de son pays, Tivii retrouvera sa fierté et la volonté de guérir.

 

Benoît Pilon

 

Après des études de cinéma à l'Université Concordia, Benoît Pilon travaille comme assistant réalisateur, pour ensuite passer rapidement à la réalisation de fictions et de documentaires. On lui doit: ROSAIRE ET LA PETITE NATION (1997), Impressions (1998), la télésérie Réseaux (1998-99), 3 SOEURS EN 2 TEMPS (2002), NESTOR ET LES OUBLIÉS (2007). En 2003, ROGER TOUPIN, ÉPICIER VARIÉTÉ remporte de nombreux prix au Canada et à l'étranger, dont le prix Jutra du meilleur documentaire et le Bayard d'or du meilleur documentaire au Festival de Namur, en Belgique. Avec CE QU'IL FAUT POUR VIVRE, il signe son premier long métrage de fiction.

 

Commentaires de Michel Handfield (24 septembre 2008)

 

Étranger en son propre pays! Choc des cultures ou de civilisation, cet adage sied bien à ce film, où deux cultures d’un même pays, mais pas d’un même territoire, se rencontrent dans une chambre d’hôpital. Une culture « étrangère », mais pourtant d’ici!

 

Le tout débute à l’Île de Baffin en 1952, alors qu’après son examen sur le bateau hôpital du gouvernement, Tivii doit y rester pour être amené au sanatorium, l’hôpital Notre-Dame de la Charité à Québec. Il est tuberculeux. Coupé net de sa famille, car il n’a pas le droit de quitter le bateau, ne serait-ce que pour les reconduire à la maison, son voyage commence dans l’angoisse. Angoisse qui se poursuivra à l’hôpital, où il sera étranger pour ne pas dire étrange. 

 

Dépaysement total pour lui, qui parle une autre langue,  l’innu,   et vient d’un désert de glace. Juste de le voir face à un arbre, puis face  à son premier plat chez l’homme blanc, lorsqu’il reçoit du spaghetti à l’heure du repas, dit tout de la distance culturelle qui le sépare de l’Homme du sud! Mais, c’est aussi un révélateur du comportement des blancs face à l’étranger, celui qui ne parle pas la langue et ne mange pas comme lui. Ses « cochambreurs » se révèleront plus ou moins ouvert ou fermé au premier contact, mais évolueront, car ils passeront plusieurs mois ensemble.

 

On parle souvent des deux solitudes quand on parle des anglophones et des francophones, mais avec les autochtones on peut parler d’ignorance. C’est encore vrai aujourd’hui, malgré quelques tentatives d’éducation dans les médias, notamment à Radio-Canada, et par le cinéma. Imaginez que c’était pire à l’époque et cela vous donne le contexte.  Tivii décrit bien cela quand il parle à sa femme au téléphone, car on l’a amenée au poste de traite pour lui permettre cet appel surprise, et qu’il lui dit «  Je ne suis pas seul, mais je n’ai personne à qui parler! »

 

Ce qui l’aidera, c’est quand l’infirmière le mettra en contact avec un jeune innu qui était dans une autre aile de l’hôpital. Il pourra alors communiquer avec quelqu’un dans sa langue et, plus que cela, lui transmettre une part de son savoir, car ce jeune fut coupé de sa culture. Kaki, qui parle aussi le français, l’aidera donc à communiquer avec les autres.

 

Avec le temps, des liens se noueront au-delà de la  barrière linguistique, car derrière les cultures il y a une chose d’extraordinaire qui s’appelle l’humanité! Elle ressort justement dans les moments difficiles, où on a besoin de s’appuyer les uns les autres. Cela m’a fait penser à un courriel reçu récemment d’une de ces nombreuses chaînes de lettres qui polluent l’internet. Je les détruis généralement, mais celui là je l’ai conservé:

 

Un saint homme tenait un jour une conversation avec Dieu. Il lui dit : Seigneur, j’aimerais savoir comment est le paradis et comment est l’enfer ?

 

Dieu conduisit le saint homme vers deux portes. Il ouvrit l’une des portes et permit au saint homme de regarder à l’intérieur. Au milieu de la pièce, il y avait une immense table ronde. Au milieu de cette table, il y avait une grosse marmite contenant un ragoût à l’arôme délicieux. Le saint homme saliva d’envie.

 

Les personnes assises autour de cette table étaient maigres, livides et malades. Elles avaient toutes l’air affamées. Elles tenaient des cuillères aux très longs manches, attachées à leurs bras. Toutes pouvaient atteindre le plat de ragoût et cueillir une cuillérée. Mais, comme le manche de la cuillère était plus long que leurs bras, elles ne pouvaient ramener les cuillères dans leur bouche.

 

Le saint homme frissonna à la vue de leur misère et de leurs souffrances. Dieu dit : Tu viens de voir l’enfer.

 

Dieu et le saint homme se dirigèrent vers la seconde porte. Dieu l’ouvrit. La scène que vit le saint homme était identique à la précédente. Il y avait la grande table ronde, la marmite de délicieux ragoût qui fit encore saliver le saint homme. Les personnes autour de la table étaient également équipées des cuillères aux longs manches. Cette fois, cependant, les gens étaient bien nourris, replets, souriants et se parlaient les uns aux autres en riant.

  

Le saint homme dit à Dieu : Je ne comprends pas !

 

C’est simple, répondit Dieu, ça ne prend qu’une seule habilité. Ils ont appris à se nourrir les uns les autres tandis que les gloutons ne pensent qu’à eux-mêmes. (Reçu par courriel, de source inconnue)

 

Un film à voir, même s’il n’est pas toujours facile, pour le propos d’abord et pour le jeu des comédiens ensuite. Un film à la fois dur et tendre, dérangeant et intelligent. Un excellent film. C’est d’ailleurs ce film que le Canada a choisi pour nous représenter aux Oscars 2008 qui seront présentés le 22 février 2009. Un excellent choix.

 

Post-scriptum 

 

Un changement culturel qui m’a frappé : on est au sanatorium, on lutte contre la tuberculose, une maladie pulmonaire, et il y en a qui fument à l’hôpital! Inimaginable aujourd’hui. 

 

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FIGHTER

Danemark / Regards sur les cinémas du monde / 2007 / Couleur / 100 min

 

Réalisateur : Natasha Arthy

Scénariste : Natasha Arthy, Nikolaj Arcel

Photographie : Sebastian Winterø

Montage : Kasper Leick

Interprètes : Semran Turan, Nima Nabipour, Behruz Banissi, Cyron Bjørn Melville

 

Aicha, 17 ans, va passer son bac. Elle habite dans une banlieue de Copenhague avec ses parents d'origine turque et ses frères et sœurs. Alors que ses parents souhaitent qu'elle étudie la médecine et exigent d'elle, comme de son frère aîné qui est plus studieux, des résultats scolaires en conséquence, Aicha n'a qu'une chose en tête, le sport de combat. Après l'école, elle s'entraîne régulièrement avec une équipe féminine et son vœu le plus cher est d'être admise au cours du maître de kung-fu, Sifu. Il faudrait alors qu'elle s'entraîne avec des garçons, ce qui est tout à fait exclu pour ses parents. Emil se charge de la préparer à l'admission au cours du maître. Ils travaillent dur tous les deux... et tombent amoureux l'un de l'autre...

 

Natasha Arthy

 

Née au Danemark en 1969, Natasha Arthy travaille comme présentatrice à la radio. Elle fait des études universitaires à Bristol et à Roskilde et réalise de nombreux courts métrages télévisés pour enfants. Sa comédie OLD, NEW, BORROWED AND BLUE (2003) a connu un grand succès. On lui doit aussi Miracle (2000)

 

Commentaires de Michel Handfield (24 septembre 2008)

 

Aicha est une combattante! Elle aime le kung-fu et quand elle se bat, elle peut devenir aussi explosive qu’un gars si elle sent qu’on la pousse injustement ou qu’elle va perdre. L’éducatrice lui suggère donc d’aller à l’école de maître Sifu, une école mixte de kung-fu.

 

Naturellement, il y aura une histoire d’amour qu’elle repoussera, vu son contexte familial et sa culture : musulmane. Mais, l’attirance sera là. Il y a aussi des combats très bien chorégraphié et une certaine philosophie, comme dans tous ces  films pour adolescents. Mais, le plus intéressant pour moi, c’est le regard sur les différences culturelles et l’évolution possible.

 

Au niveau culturel, on nous parle souvent de la piètre qualité de notre système d’éducation. Pourtant, ici, nous avons des programmes sport-études, ce qui manque où est Aicha. Elle aurait certainement été heureuse de pouvoir faire du sport d’élite à l’école et son père aurait probablement mieux accepté de la voir faire du sport si cela avait été  combiné à des exigences académiques répondant à ses attentes.  Mais, attention, ce n’est pas parce que nous avons certains bons programmes que tout est bien dans notre système d’éducation et que nous devons nous autoproclamer les meilleurs. Loin s’en faut, mais je me devais de le souligner, ce film venant d’un pays scandinave et les pays scandinaves étant souvent cité comme modèle au Québec.    

 

On pénètre aussi la psychologie des nouveaux arrivants. Les parents émigrent souvent parce qu’ils veulent une autre vie que la leur pour leurs enfants, sauf qu’il y a un danger de vouloir leur imposer « nos » rêves plutôt que de les écouter. Discuter, oui; imposer, non, du moins pour les rêves! Si les parents ne peuvent tout laisser faire, ils se doivent d’être ouverts et de les soutenir dans leur développement, leurs apprentissages et leurs démarches vers l’avenir,  car ce sont les enfants qui auront à vivre avec les choix fait à cette époque ingrate qu’est l’adolescence. Vivre toute sa vie avec un choix qui n’était pas le sien ou qui n’était pas le bon, c’est long longtemps, surtout dans un environnement différent de celui qu’auront connus leurs parents! Mais, ne pas leur imposer nos choix, ça ne veut pas dire de ne pas les aider à choisir non plus. On peut leur suggérer des choses ou les amener à consulter d’autres personnes, des spécialistes ou de la littérature par exemple, car l’éventail des possibles est souvent plus grand que ce que l’on connaît. Il est donc plus facile de passer à côté de ce qui nous motiverait pour une vie que de tomber dessus du premier coup. Plusieurs le découvriront d’ailleurs plus tard. Trop tard!

 

 Même s’ils voudraient qu’elle soit médecin comme son frère, c’est le sport qui l’attire. Pour l’orienteur, le travail social pourrait être une alternative intéressante à la médecine pour elle.  Mais, ce qui me surprend, c’est qu’il ne lui parle d’éducation physique, ce qui fait aussi partie des professions de la santé. Moins noble et moins payante que la médecine, mais tout aussi importante en termes de prévention, de maintien et  d’amélioration de la santé globale d’une population! Une profession négligée. 

 

Dans ce film, on  est plongé au cœur même des problèmes du multiculturalisme, où s’entrechoquent les valeurs d’origine, familiales, et de la société d’accueil! S’il y a un refus de l’autre dans la société d’accueil, il existe aussi un blocage des immigrants face à certaines valeurs de la société d’accueil; valeurs qui sont nouvelles pour eux, même aux antipodes de leurs traditions parfois. C’est là un problème qu’on ne doit pas sous estimer.

 

L’ouverture doit donc se faire des deux côtés. On ne peut présupposer qu’elle est implicite chez l’immigrant qui a choisit de s’établir dans un nouveau pays, car il peut avoir fait ce choix uniquement pour des raisons économiques, sans avoir évalué les autres facteurs en causes, religieux et culturels par exemple. Le choc n’en sera que plus prononcé.  

 

Un film intéressant pour les ados, mais pédagogique aussi, ce qu’il ne faudrait pas leur dire. Oui, on a vu cette histoire une fois, dix fois ou cent fois déjà, mais il faut toujours la réactualiser.  C’est donc une bonne relecture de cette histoire éternelle  d’un désir, qu’il soit d’amour ou de réalisation de soi, réfréné par les parents pour le bien de leur enfant. Mais, ils auront tort et le film se terminera sur une certaine ouverture.  

 

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DAS WUNDER VON BERLIN Allemagne

LE MIRACLE DE BERLIN

Hors Concours

2008 / Couleur / 103 min

 

Réalisateur : Roland Suso Richter

Scénariste : Thomas Kirchner

Photographie : Stephan Rabold

Montage : Bernd Schlegel

Interprètes : Kostja Ullmann, Karoline Herfurth, Veronica Ferres, Heino Ferch, Michael Gwisdek

 

Berlin-Est. Été 1988. Faire de la moto dans un engin de luxe n'est pas le seul privilège accordé à Marco Kaiser, fils d'un officier de haut rang de la Staatssicherheit, le ministère de la Sécurité d'État en ex-RDA. À l'instar de nombreux punks de l'époque, Marco aime défier son père, Jürgen, qu'il accuse de se comporter comme un opportuniste borné. Sa mère Hanna, jadis grande partisane du régime établi, partage un sentiment de mécontement généralisé un peu partout dans la population, notamment en ce qui a trait aux promesses non tenues de la part du gouvernment. Marco a une nouvelle petite amie, Anja, infirmière dans un hôpital de la ville. Hanna approuve avec joie cette relation. Au cours d'une rafle lors d'un concert punk, Marco et Anja sont arrêtés et traduits en justice. Grâce à l'influence de Jürgen, ils sont libérés. En échange, Marco devra s'enrôler dans la Nationale Volksarmee. C'est à contrecoeur qu'il il fait ses adieux à Anja et à ses amis. Mais une fois sur place, Marco ne tarde pas à s'apercevoir que ce milieu éveille en lui des ambitions secrètes et confirme son talent inné pour le leadership. L'enthousiasme de Marco ne passe pas inaperçu, notamment aux yeux du major Wolf, qui est à la recherche de jeunes soldats pour former une patrouille d'élites. Tout laisse croire que Marco a trouvé le milieu où il se sent le mieux. Pendant ce temps, Anja et Hanna solidifient leur amitié et joignent les rangs de ceux et celles qui, inspirés par Mikhail Gorbatchev, demandent de plus en plus de droits civils et un changement politique radical en RDA.

 

Roland Suso Richter

 

Né à Marburg (Allemagne) en 1961, Roland Suso Richter travaille dans le domaine de l'audiovisuel dès 1980. KOLP, son premier long métrage de fiction, date de 1983. Il poursuit sa carrière de réalisateur en tournant des téléfilms et des téléséries. Parmi ses films: NUR FRAUEN KEIN LEBEN (1986), 14 JOURS À PERPÉTUITÉ (1997), SARA AMERIKA (1997), AFTER THE TRUTH (1998), EINE HAND VOLL GRASS (1999, présenté au Festival des films du monde de Montréal), LE TUNNEL (2001, également au FFM), THE I INSIDE (2003), suivis de nombreux films conçus pour la télévision.

 

Commentaires de Michel Handfield (24 septembre 2008)

 

On suit Marco Kaiser, jeune punk anar, contestataire face aux limitations du régime est-allemand en matière de musique et d’ouverture.  Il est organisateur d’événements illicites, ce qui dérange son père, officier de haut rang du ministère de la Sécurité d'État. Et il est bon dans l’organisation d’actes contestataires : des soirées punks dans la ville, au grand dam des autorités et de son père par exemple! Il a du leadership, mais il sera arrêté. Pour s’en sortir, il devra faire son service militaire.

 

Contrairement à ce qu’on pourrait s’attendre, il aimera ça et montrera même des aptitudes pour le leadership militaire. Il s’y fondra, ce qui le rapprochera de son père, mais le mettra en porte-à-faux avec ses amis et en opposition avec sa mère, qui se plaint qu’on a des tonnes de livres de Marx et de Lénine, mais pas de livres de Gorbatchez, qui adoucit le régime, car elle travaille soit dans une bibliothèque ou une librairie à ce qu’on voit dans le film. De plus, elle est impliquée dans un groupe qui revendique la démocratie : The New Forum. (1)  

 

On est toujours dans un mélange de confiance/suspicion, même chez les proches, ce que le film nous fait bien sentir. Une question de climat, de froideur. On peut être sous surveillance partout et tout le temps. Même les amis ou notre blonde peuvent être des agents du régime qui font rapport contre nous. Pour notre bien naturellement, car le slogan de l’armée est qu’elle « est au service des fermiers et des ouvriers! » Cependant, elle ne saisit pas le souffle du changement qui vient jusqu’au choc final : la chute du mur! Certains seront surpris, ne voudront pas. Leur monde s’écroulera avec le mur.

 

Ce ne sera cependant pas le cas de Marco. Au contraire, ce sera même un retour à l’équilibre pour lui; équilibre entre son passé de punk revendiquant davantage de liberté et son présent de militaire au service du peuple! Un très bon film. Mais, il y a toujours des agents dévoués à l’ancienne idéologie dans les pays de l’ex-URSS, prêt à reprendre du service. Poutine et ses acolytes voudraient même faire renaître l’ex-URSS, en partie du moins. (2)  

 

Note :

 

1. http://en.wikipedia.org/wiki/New_Forum

 

2. Le Système Poutine, vu au 10es RIDM (Rencontres internationales du documentaire de Montréal), dont nous avons parlé dans notre volume 9 numéro 8, section ciné et culture.  

 

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EN PLEIN COEUR Canada

Compétition mondiale / 2008 / Couleur / 105 min

 

Réalisateur : Stéphane Géhami

Scénariste : Stéphane Géhami, Héloïse Masse, avec la collaboration de Jacques Marcotte, Julian Ferrera

Photographie : Julian Ferrera

Montage : Claude Palardy

Interprètes : Pierre Rivard, Keven Noël, Bénédicte Décary, Julie Deslauriers, Patrice Godin, Marie-France Marcotte, Martin David-Peters, Dino Tavarone, Jacques Marcotte

 

        Benoît et Jimi, un grand gars et un petit homme, deux écorchés qui cherchent à être aimés, comme tout le monde. Sauf que ces deux-là volent des Jeeps pour un réseau et que Benoît a 32 ans, et Jimi... 14. Benoît, voleur de voiture émérite et amoureux compulsif, va de fille en fille sous le regard jaloux de Jimi qui le voudrait tout pour lui. Jimi veut aider sa mère, dépressive, à joindre les deux bouts. Jimi veut également l'amour d'un père. Jimi s'est choisi Benoît et s'évertue à ce que Benoît le choisisse, lui. Mais Benoît veut l'amour d'une fille et s'évertue à en oublier une avec une autre. De vol de Jeep en vol de Jeep, dans les rues de Montréal, dans des dépôts inquiétants, dans les délicatessens, leur amitié se développe et se transforme. À coups de poings, à coups de gueule et à coups de coeur. Un petit cul de 14 ans se trouve un père et un gars de 30 ans se trouve une raison d'être: un fils.

 

Stéphane Géhami

 

        Après des études de cinéma à l'Université de Montréal, Stéphane Géhami signe plusieurs courts métrages. L'un d'eux, L'Amante, a été sélectionné au Festival du court métrage de Montréal. En 2001, il signe Au hasard l'amour, son premier moyen métrage de fiction, présenté au Festival des films du monde de Montréal. EN PLEIN COEUR est son premier long métrage.

 

Commentaires de Michel Handfield (24 septembre 2008)

 

        Elle travaille dans une boutique de parfum, lui vole des chars. Elle le quitte parce qu’il n’est pas un homme, mais elle s’accrochera en même temps à lui pour la baise, ce qu’on s’apercevra assez rapidement. Et, lui, à la recherche de l’amour, s’accrochera à une autre fille sans nécessairement l’oublier, elle! Bref, on pénètre la réalité d’une part des  jeunes d’aujourd’hui, qui ont des ami(e)s pour sortir, de cœur et de baise comme si toutes ces sphères étaient étanches! Mais, si elles le sont pour certains, elles ne le sont pas nécessairement pour tous. Sa nouvelle blonde ne le prendra pas ainsi. Benoît vit donc une vie amoureuse instable.

 

        Si on suit les gars dans cette histoire, ceci soulève aussi cette question des filles straights qui aiment ce petit kick d’avoir un « bum » sous leurs draps! Il y aurait là un autre sujet de film, peut être un documentaire, car je trouve que cette question le mériterait.

     

        Sa stabilité, Benoît la trouve avec son colocataire et Jimi, un jeune de 14 ans qui s’accroche à lui. Mature, il observe les grands. Lorsque Benoît rompra avec sa blonde, au début du film, il lui dira : « Tu lui as payé une paire de boules en plus »  et il le regardera tout découragé de son comportement immature malgré son âge, car Benoît a deux fois l’âge de Jimi!

     

        Tout au long du film, on en apprend de plus en plus sur ce duo étrange et c’est là qu’est l’intérêt du film d’un plan sociologique. C’est ainsi que l’on apprend que Benoît vient de la bourgeoise et que l’on découvre comment il a plongé dans le vol de voitures comme mode de vie. Quant à Jimi, on découvre que sa mère est dépressive et, qu’à 14 ans, il est son soutient. Dans ses moments de conscience sa mère  lui dit qu’il serait mieux en famille d’accueil, mais elle ne sait pas ce qu’il fait. Ces deux comparses sont donc l’antithèse l’un de l’autre : le fils de bourgeois devenu voleur pour le « thrill » et en réaction à un passé qu’il rejette;   le  jeune, délinquant par nécessité pour subvenir à ses besoins et ceux de sa mère, dont payer le loyer. Bref, nous suivons des écorchés de la vie qui s’accrochent pour s’en sortir.

     

        Une fois qu’ils réaliseront qu’un et l’autre, Jimi et Benoît, peuvent faire autrement ensemble; recréer la relation père-fils qu’ils n’ont pas eu, ils s’en sortiront ensemble. L’histoire finit peut être drôlement pour certains, car ils quittent le vol pour faire totalement autre chose, mais c’est le processus qui est intéressant à suivre. La symbolique qu’ensemble ils peuvent se sortir mutuellement de ce passé qui les avait conduits là où ils étaient. Pas le comment.  Alors, ce qu’ils feront n’est pas si important, mais c’est le fait que c’est leur rêve de bonheur qui s’y réalise qui l’est.

 

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NOWHERE MAN

Belgique - Norvège - Pays-Bas - Luxembourg / Compétition mondiale /

2008 / Couleur / 96 min

 

Réalisateur : Patrice Toye

Scénariste : Bjørn Olaf Johannessen, Patrice Toye

Photographie : Richard van Oosterhout

Montage : Nico Leunen

Interprètes : Frank Vercruyssen, Sara de Roo, Muzaffer Özdemir, Nicholas Beveney

 

Tomas est un homme dans la quarantaine. Il a tout pour lui, une femme jeune et attirante et une carrière fort enviable. Néanmoins, il sent que son bonheur est menacé par un manque d'authenticité et de plénitude dans sa vie. Pour échapper à l'ennui, il imagine qu'il disparaît de sa vie et se retrouve dans une nouvelle réalité indéfinissable. Il décide de réaliser ce rêve tout à fait fou et se met à le mettre en gestation avec le plus grand soin. Un beau jour de printemps, il le met en action. Il fait croire au monde qu'il est déjà mort. Mais une fois disparu, il réalise que son rêve n'est pas allé plus loin. Il n'a donc plus aucune idée de ce qu'il va faire maintenant de sa vie.

 

Patrice Toye

 

Diplômée du St Lucas Institute de Bruxelles, Patrice Toye signe de nombreux courts métrages, des documentaires et des programmes pour la télévision. En 1998, elle réalise ROSIE, son premier long métrage de fiction qui connaît une distribution, entre autres, aux États-Unis, en France et au Japon. En 2005, elle signe Gezocht: Man, programmé au Festival de Rotterdam. On lui doit aussi: Vrouwen Willen Trouwen (1992), L'AMANT DE MAMAN (1997). Elle a également écrit les scénarios de TIN SOLDIER (2005) et deTHE SPRING RITUAL (2006)

 

Commentaires de Michel Handfield (4 octobre 2008)

 

A 40 ans, on pense à l’abri d’auto, moins au sexe, pour faire plaisir à sa femme. D’ailleurs, elle n’y pense peut être plus elle-même! (1) On est sur le pilote automatique. Notre vie devient plate. Alors pourquoi la conserver? Tomas veut donc quitter sa vie, mais pas se suicider. Il quitte donc tout lorsqu’il en a l’occasion et passe pour mort.  Il ira même vivre ailleurs.

 

Par contre, on est qui on est, où qu’on soit et quelle que soit notre identité. Changer de vie ne nous change pas nécessairement. Il s’en rendra compte et réapparaîtra, ce qui créera des problèmes. Un film particulier, où j’ai pris très peu de notes, mais que j’ai regardé comme on regarderait le déroulement d’une expérience psychosociale, car si ce n’est pas une expérience, c’est à tout le moins une question intéressante pour les sciences sociales, particulièrement la psychosociologie : peut-on changer de vie et quelles en seraient les conséquences?  

 

Note :

 

1. Selon un sondage CROP pour l’actualité l’élément essentiel d’une relation est :

 

- La tendresse : 35%

- Les activités communes : 27%

- Les conversations : 21%

- La qualité des relations sexuelles : 7%

- la quantité : 1%

 

Source : Mélanie Saint-Hilaire, Mollo, le sexe dans la cité, in l’actualité, 15 octobre 2008, p. 37.  Voir aussi www.lactualite.com/femme. Sur ce site on parle d’un sondage CROP-L’actualité-Bazzo.tv! Voir www.lactualite.com/femme/article.jsp?content=20080918_182250_18372

 

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Las Mofas Mágicas

Espagne / Les lunettes magiques / Compétition mondiale / 2008 / Couleur / 14 min

 

Réalisateur : Daniel Rebner

Scénariste : Daniel Rebner

Photographie : Juan Hernández

Montage : Víctor E. D. Somoza

Interprètes : Héctor García Rodriguez, Louise Merino, Fernando Gil

 

Pablito, une jeune garçon rêveur et très timide, s'évade de la réalité quand il met ses «mofas», une paire de lunettes qui l'aide à voir le  monde autour de lui sous une couleur plus joyeuse et amusante. Mais pourquoi Pablito cherche-t-il tant à fuir son quotidien? La violence domestique abordée sous un angle original et différent.

 

Daniel Rebner

 

Daniel Rebner est scénariste et réalisateur. Il a réalisé les films Recuerdos de mamá (2002) et Coolness (2004).

 

Commentaires de Michel Handfield (4 octobre 2008)

 

L’éducation, une question de vision, mais sous influence de la vie familiale. Comment la violence familiale peut elle avoir un impact sur l’enfant et sur l’école? Comment la détecter? Car on ne peut souvent pas la supposer au premier coup d’œil. Pas eux! Comment intervenir alors, si on ne peut la détecter? 

 

Film intelligent sur la violence familiale et ses effets qui peuvent hypothéquer toute une vie par la suite.

 

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Le Nœud cravate

Canada / Compétition mondiale / 2008 / Couleur / 12 min

 

Réalisateur : Jean-François Lévesque

Montage : Natacha Dufaux

 

Sur le thème de la déshumanisation, l'histoire de Valentin, qui découvre le jour de ses 40 ans que le travail qu'il exécute pour la compagnie La Vie Inc. est complètement inutile.

 

Jean-François Lévesque

 

Né en 1978, Jean-François Lévesque a fait des études en arts plastiques à Rivière-du-Loup et en animation au Capilano College de Vancouver. En octobre 2004, il est le grand lauréat de la 17e édition du concours Cinéaste recherché(e) de l'ONF. Le Noeud

Commentaires de Michel Handfield (4 octobre 2008)

 

Et si quelques notes pouvaient changer la vie…

 

Critique de la bureaucratie et questionnement face à un travail répétitif. Parfois, certains se demandent si ce qu’ils font est toujours utile, même s’ils sont payés pour le faire? Puis, l’inverse est aussi vrai : est-on toujours payé pour ce qui est utile? Comme de jouer de la musique sur la place publique!

 

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Drux Flux

Canada / Compétition mondiale / 2008 / Couleur / 5 min

 

Réalisateur : Théodore Ushev

 

Réflexion sur les liens entre l'artiste et la pensée politique moderne. Drux Flux met en scène l'homme unidimensionnel tel que le voyait Herbert Marcuse: l'homme des sociétés industrielles aliéné par le contrôle des consciences.

 

Théodore Ushev

 

Né en Bulgarie en 1968, Théodore Ushev travaille d'abord dans les domaine des arts graphiques. Il s'établit à Montréal en 1999 et se tourne vers l'animation. Il a réalisé BOF (Walking On By) en 2003, suivi de Tower Bawher, Tzaritza et L'homme qui attend. 

 

Commentaires de Michel Handfield (4 octobre 2008)

 

Un film explosif pour un siècle sous pression. Inspiré de l’Homme unidimensionnel de Marcuse (1), on peut se demander, à la lumière de Jean-François Khan  (2) : l’Homme fait quoi, dans son unidimensionnalité,  s’il s’aperçoit que le modèle unique ne fonctionne pas? Quelles sont les portes de sortie? Comment peut-il changer les choses? Est-il pris dans un rôle et des rouages qui le broient? Pourtant, ce système, ce sont des Hommes qui l’ont créé. Pourquoi des Hommes ne pourraient-ils plus le changer? Notre création serait-elle devenue notre maître comme un monstre que nous aurions créé et qui nous terroriserait par la suite? Alors, nous n’aurions d’autres choix d’attendre qu’il ne s’écrase pour s’en sortir ou de s’unir pour le renverser. On rejoindrait un certain Karl Marx qui a terminé son texte le plus connu par ces mots : « PROLÉTAIRES DE TOUS LES PAYS, UNISSEZ-VOUS ! »  (3)

 

Notes :

 

1. Marcuse, Herbert, 1968, L'homme unidimensionnel, Paris: Éditions de Minuit.

 

2. Kahn, Jean-François, 1995, La pensée unique, Fayard, col. Pluriel

 

3.  Karl Marx et Friedrich Engels, 1848, Manifeste du Parti communiste, p. 35. Ce document a été produit en version numérique par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie, dans Les classiques des sciences sociales (http://classiques.uqac.ca/), une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque Paul-Émile-Boulet de l'Université du Québec à Chicoutimi  (http://bibliotheque.uqac.ca/). Le lien vers le Manifeste est : http://classiques.uqac.ca/classiques/Engels_Marx/manifeste_communiste/Manifeste_communiste.pdf

 

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TODOS ESTAMOS INVITADOS & I DEMONI DI SAN PIETROBURGO

 

4 octobre 2008

 

Brassens chantait mourir pour les idées

 

Ce fut vrai; c’est encore vrai; et ce le sera encore dans un futur simple et décomposé!  Cette idée traverse les deux films qui suivent, même s’ils se passent en des lieux et des époques différentes, d’où l’idée de les regrouper ici.

 

Michel Handfield

 

TODOS ESTAMOS INVITADOS

Espagne / Compétition mondiale / 2008 / Couleur / 95 min

 

Réalisateur : Manuel Gutiérrez Aragón

Scénariste : Manuel Gutiérrez Aragón, Angeles González Sinde

Photographie : Gonzalo Berridi

Montage : Jose Salcedo

Interprètes : Óscar Jaenada, José Coronado, Vanessa Incontrada, Iñaki Miramón, Alberto Blasco, Mariana Cordero, Kike Diaz de Rada, Juanlu Escudero, Adolfo Fernández, Iñaki Font, Iñake Irastorza, Josu Ormaetxe

 

Jeune militant d'un clan terroriste, Josu Jon est blessé à la tête lors d'un attentat sanglant. Il perd la mémoire et ne se souvient plus des motivations idéologiques au nom desquelles il a commis des actes irréparables: poser des bombes et assassiner. À sa sortie de prison, des membres de son organisation lui confient une nouvelle mission. La cible: un professeur d'université de plus en plus isolé et sujet à des menaces de la part de ses collègues et complices aux opinions politiques divergentes. TODOS ESTAMOS INVITADOS est inspiré de faits réels.«Gutiérrez Aragón développe l'indifférence grandissante et fascinante de son personnage Josu Jon, en le mêlant à une autre figure imaginaire, mais non moins véridique et représentative de la dégénérescence morale, prépondérante dans la société basque. Celle du professeur universitaire Xabier Legazpi, qui, comme de nombreux écrivains, enseignants et journalistes se sont déclarés antinationalistes et opposés aux exigences de l'ETA, vivent sous des menaces de mort, plus d'une fois hélas mises à exécution.» -- Vicente Molina Foix sur Libération. (www.liberation.fr/) 

 

Manuel Gutiérrez Aragón

 

Né en 1942 à Torrelavega, en Cantabrique (Espagne), Manuel Gutiérrez-Aragon étudie la philosophie à l'Université de Madrid. Il termine ses études de cinéma en 1970, et devient scénariste. En 1977, il reçoit l'Ours d'argent à Berlin pour CAMADA NEGRA. Il est également auteur dramatique et metteur en scène de théâtre. Parmi ses films, dont plusieurs ont été montrés au Festival des films de Montréal, soulignons: EL CORAZÓN DEL BOSQUE (1978), MARAVILLAS (1980), DEMONIOS EN EL JARDÍN (1982), LA NOCHE MAS HERMOSA (1984), THINGS I LEFT IN HAVANA (1997), LA VIDA QUE TE ESPERA (2003), UNA ROSA DE FRANCIA (2006).

 

Commentaires de Michel Handfield (4 octobre 2008)

 

« Mourrons pour des idées, d'accord, mais de mort lente,

D'accord, mais de mort lente. » (Georges Brassens,   1972)

 

Avant la projection du film le réalisateur nous a dit qu’il a composé cette histoire à partir de celle de ses amis et d’un fait divers lu dans le journal : un terroriste avait perdu la mémoire suite à un attentat pour l’ETA!

 

***

 

On est au pays Basque. Les camions ayant une immatriculation française sont particulièrement ciblés par l’ETA à ce moment. Les citoyens qui s’opposent à l’organisation sont aussi ciblés, même s’ils sont basques, car L’ETA veut imposer sa voix. Par la peur surtout, car elle est diffuse dans la population. Un voisin, un ami, peuvent en être. 

 

Un prof d’université, Xabier Legazpi, qui dénonce ces morts inutiles est de plus en plus isolé dans son université et menacé à l’extérieur, même ouvertement. Un membre d’un même cercle d’amis va jusqu’à lui dire, d’un ton menaçant, que «  je peux utiliser la violence pour mes convictions! »

 

Il faut être de la même pensée que ceux qui ont la force, idéologues ou populistes, selon le milieu et le temps. L’intello est libre, mais au prix de sa sécurité! Ce n’est pas peu dire. La pression se fait persistante sur les dissidents de la pensée. On sent la menace; la peur; cette vie qui devient invivable. Le climat est lourd et ce film le traduit bien. La meilleure protection : se clouer le bec. La loi du silence. L’omerta! On est en plein dans la chanson de Brassens : mourir pour des idées.

 

A voir pour réaliser jusqu’où peuvent glisser les idéologies et les dérives nationalistes. Ça peut jouer dur. Très dur, surtout si on croit que la cause vaut plus que l’humain. Un film fort intéressant. 

 

Hyperliens :

 

ETA sur wikipédia: http://fr.wikipedia.org/wiki/Euskadi_ta_Askatasuna

Dans le latinreporters.com : http://www.latinreporters.com/paysbasque.html

 

Sur Trésor de la langue française au Québec (Université Laval) :

http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/Europe/espagnebasque.htm

 

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I DEMONI DI SAN PIETROBURGO (LES DÉMONS DE ST-PETERSBOURG)

Italie / Hors Concours / 2007 / Couleur / 118 min

 

Réalisateur : Giuliano Montaldo

Scénariste : Paolo Serbandini, Monica Zapelli, Giuliano Montaldo

Photographie : Arnaldo Catinari

Montage : Consuelo Catucci

Interprètes : Miki Manojlovic, Carolina Crescentini, Roberto Herlitzka, Anita Caprioli, Filippo Timi, Patrizia Sacchi

 

St-Petersbourg, 1860. On assassine un membre de la famille impériale. Quelques jours plus tard, le romancier Fedor Mikhailovitch Dostoïevski fait la rencontre de Gusiev, un jeune homme interné dans un hôpital psychiatrique. Il confie à l'écrivain sa responsabilité dans l'attentat, en mentionnant au passage que ses acolytes planifient un nouvel attentat, dirigé contre un autre membre de la famille royale. Dostoïevski obtient l'adresse d'Alexandra, une tête dirigeante du groupe terroriste. L'écrivain doit la retrouver et la dissuader de commettre un autre assassinat. L'auteur est déjà affecté par une terrible pression due au fait qu'il est criblé de dettes, qu'il doit bientôt terminer un livre et qu'il est sujet à de fréquentes crises d'épilepsie. Le jour, il dicte à Anna Grigoryevna, une jeune scénographe, son roman Le Joueur. La nuit il cherche éperduement les ennemis du Tsar. L'inspector Pavlovitch est formel sur le rôle de Dostoïeveski: "Vos livres provoquent les révolutionnaires, parce qu'en fait, ils sont plus révolutionnaires que leurs manifestes."

 

Giuliano Montaldo

 

Né en 1930 à Gênes (Italie), Giuliano Montaldo débute sa carrière en tant qu'acteur. Étudiant, il est recruté par le réalisateur Carlo Lizzani pour jouer dans Achtung ! Banditi ! (1950). Il devient ensuite assistant réalisateur pour Carlo Lizzani et Gillo Pontecorvo, puis réalisateur avec TIRO AL PICCIONE (1961). Suivra UNA BELLA GRINTA (1965), Prix spécial du jury au Festival de Berlin. Il enchaîne avec une production internationale, LE CARNAVAL DES TRUANDS (1967). Il travaillera ensuite avec les acteurs américains John Cassavetes et Peter Falk dans LES INTOUCHABLES (1968). Il s'intéresse ensuite aux anarchistes Sacco et Vanzetti et porte leur histoire à l'écran dans SACCO ET VANZETTI (1971). En 1982, Giuliano Montaldo réalise une importante fresque sur Marco Polo pour la télévision, déclinée en feuilleton.

 

Commentaires de Michel Handfield (4 octobre 2008)

 

Ce film a attiré bien du monde au FFM, au  point que je me suis assis dans les marches. Ça sentait le succès. Alors, il devrait sortir en salle. Cependant, comme je ne pouvais par lire tous les sous-titres d’où j’étais, j’en ai perdu quelques bouts, car le dialogue y est important. C’est donc un commentaire partiel vu les circonstances.

 

Dans la Russie tsariste du XIXe, il fallait parler en secret, car les murs avaient des oreilles. Cela n’a pas changé avec le communisme et ça semble encore le cas dans la Russie de Poutine! Le Czar était comme Dieu. Lénine et Staline remplacèrent Dieu. Puis, maintenant, Poutine tient du Tsar et de Staline à la fois! Bref, ce pays ne fut jamais totalement démocratique et les russes jamais totalement libre, même quand ils le croyaient!

 

Les russes sont durs. Ils l’étaient aussi en 1860, au temps de Dostoïevski. (1) Puis, à l’époque, comme aujourd’hui, penser représentait un danger. D’abord, pour le pouvoir; ensuite pour le penseur, car le pouvoir l’avait dans sa mire.  Dostoïevski était donc aux prises avec la police à cause de ses écrits, car ils enflammaient les révolutionnaires. Pour les dissuader de faire des actions qui conduiraient à de la violence inutile, il allait dans la nuit  à la rencontre des anarchistes et des comploteurs contre l’État pour les dissuader d’agir. Mais, eux, inspirés de ses livres, ne voulaient qu’agir. Tenant de l’ordre, Dostoïevski allait jusqu’à dénoncer certains actes dont il était au courant, ce qui en faisait un contre-révolutionnaire à leurs yeux. Pourtant, il était leur source d’inspiration! Paradoxal.

 

On pénètre donc le monde de la pensée et de la suggestivité ici. D’un côté, le romancier critique le monde dans ses romans, et, de l’autre,  ses lecteurs les plus militants agissent pour donner vie à ces écrits, allant jusqu’à assassiner des gens pour y arriver. On glisse donc de la création littéraire à la (tentative de) création d’un nouveau monde idéal, suivant une idée. On est en plein processus idéologico-utopique! Cela se produit encore aujourd’hui, que ce soit dans certains groupes religieux ou politique, n’en doutons pas. Pensons à l’ETA par exemple, ce dont nous venons de parler plus haut.

 

Quant au romancier, il est parfois loin de reconnaître la paternité de ce que l’on fait en son nom, car, pour lui, son œuvre est en partie fiction et doit le demeurer même si elle peut servir/alimenter la réflexion ou l’action de certains. C’est d’abord un travail intellectuel. 

 

Le romancier ne peut cependant pas être froid à ce que l’on fait de son œuvre, surtout s’il n’est pas d’accord.  Au contraire même, car  ce serait un geste de sabotage. C’est là un phénomène intéressant d’un plan psychosociologique, l’œuvre appartenant toujours à l’auteur, mais ses conséquences lui échappant une fois qu’elle a été « libérée » dans la société. Il n’en est plus le gardien, mais voudrait le demeurer. Il dénoncera alors l’usage qui en est fait ou ceux qui s’en réclament comme n’étant pas ce qu’il voulait. Dostoïevski ira même plus loin, essayant de les dissuader. 

 

Fait intéressant. Si la révolution Russe n’est pas arrivée sur la base des écrits de Dostoïevski (1821-1881), elle est arrivée par la pensée d’un de ses contemporains : Karl Marx (1818-1883)!  Mais, même lui fut en quelque sorte trahis, car pour Marx le socialisme se devait d’être démocratique! (2) On instaura plutôt la dictature  du prolétariat après la révolution de 1917! Mais, cela, pour en revenir au film, on le voyait déjà venir, car le chef de police  dit ces mots à Dostoïevski vers la fin du film :

 

« Je suis sûr que la révolution va arriver, mais je suis payé pour qu’elle arrive le plus tard possible. »

 

Ce qu’on ne savait pas, c’était qu’elle était pour être communiste.

 

Notes :

 

1. http://fr.wikipedia.org/wiki/Dosto%C3%AFevski

 

2. Attali, Jacques, 2005, Karl Marx ou l'esprit du monde, France : Fayard (Documents), pp. 400-1. Voir aussi http://fr.wikipedia.org/wiki/Karl_Marx

 

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FAUBOURG 36

France / Compétition mondiale / 2008 / Couleur / 120 min

 

Réalisateur / Scénariste : Christophe Barratier

Photographie : Tom Stern

Montage : Yves Deschamps

Interprètes : Gérard Jugnot, Clovis Cornillac, Kad Merad, Nora Arnezeder, Pierre Richard

 

Dans un faubourg populaire du nord de Paris en 1936, l'élection printanière du gouvernement du Front populaire fait naître les plus folles espérances et favorise la montée des extrêmes. C'est là que trois ouvriers du spectacle au chômage décident d'occuper de force le music-hall qui les employait il y a quelques mois encore, pour y monter un spectacle "à succès". Le lieu sera la théâtre de la plus éphémère des belles entreprises.

 

« C'est une époque qui me parle doublement, d'une part parce que les années 1935-1940 représentent un âge d'or du cinéma, avec Renoir, Duvivier ou Carné, d'autre part parce que l'atmosphère de l'époque est captivante. Il y a une certaine joie de vivre, assombrie par le chaos qui guette, les affrontements violents entre gauche et droite, riches et pauvres. On danse sur le volcan. Ce n'est pas un film sur le Front populaire. Les personnages sont pris par le tourbillon de l'époque, mais c'est leur vérité humaine qui m'intéresse. Par exemple, pour le personnage de Gérard Jugnot, j'avais en tête le Bernard Blier bonhomme d'HÔTEL DU NORD ou plus sombre de MANÈGES. Pour Clovis Cornillac, une figure de l'aristocratie ouvrière, comme le Jean Gabin du JOUR SE LÈVE. » -- Christophe Barratier

 

Christophe Barratier

 

Né en 1963, neveu du comédien, producteur, scénariste et réalisateur Jacques Perrin, Christophe Barratier étudie à l'École normale de musique de Paris. Il reçoit une formation classique. Cette expérience l'a fortement influencé dans la rédaction du scénario des CHORISTES (2004), son premier long métrage, film de clôture au Festival des films du monde 2004, et également inspiré de LA CAGE AUX ROSSIGNOLS (1945), de Jean Dréville. On lui doit aussi le court métrage Les Tombales (2001).

 

Distribué au Québec par Alliance Vivafilm, « FAUBOURG 36 » prendra l’affiche à l’automne.

 

Commentaires de Michel Handfield (4 octobre 2008)

 

Le 3 mai 1936 Léon Blum est élu avec le Front populaire. La gauche au pouvoir! Tous les espoirs sont donc permis pour les laissés pour compte. Fruit du hasard cinématographique, on est justement chez les laissés pour compte.  Ouvriers, artistes, syndicalistes se côtoient au café. On parle, on discute, puis on décide finalement de faire un coup d’éclat : faire revivre le vieux théâtre. Tout est possible, les ouvriers sont au pouvoir!  Le rouge Lebovitch, un syndicaliste  communiste fort sympathique finalement, aidera nos ouvriers du spectacle dans leur lutte. On fera revivre le Chansonia, c’est-à-dire qu’on reprendra nos outils de production. C’est un plaisir de les suivre dans cette aventure, car on plonge alors dans la comédie musicale sur fond historique. Un heureux mélange des genres.

 

Naturellement, on suivra aussi le contre mouvement de la droite, qui s’organise pour reprendre le pouvoir; ces profascistes regroupé sous la bannière «  Salubrité-Ordre-Combat » qui n’ont pas peurs de faire quelques entourloupettes pour leur bien personnels tout en se disant les défenseurs de l’individualisme. L’individualisme? Oui, le chacun pour soi! Cela me fait penser à nos conservateurs canadiens, aux républicains États-Uniens et à Nicolas Sarkozy en France, grand admirateur des États-Unis que le laisser faire financier risque pourtant de faire plonger dans le chaos, la planète avec eux! Paradoxe pour des défenseurs de l’ordre!

 

Après plusieurs péripéties, nos artistes réussiront, car c’est un film heureux dans l’ensemble. Mais, le chemin sera parsemé d’embuches. Ce film  est aussi parsemé de références historiques ici et là, comme le fait que le 8 juin les ouvriers obtinrent la semaine de 40 heures, 2 semaines de congé payé et le samedi chômé! Bref, un film qui a du contenu sous des airs de comédie légère, ce que j’ai trouvé plaisant.  A souligner aussi la photographie. De très belles images! À voir.

 

Hyperliens :

 

www.faubourg36-lefilm.com  

Léon Blum : http://fr.wikipedia.org/wiki/L%C3%A9on_Blum 

Front populaire : http://fr.wikipedia.org/wiki/Front_populaire_(France))

 

 

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