VertigO - La revue en sciences de l'environnement sur le WEB, Vol 1 No 1, Avril 2000

J'AI LU

Les sciences sociales de l'environnement

Collectif, Édition des Presses de l'Université de Montréal
Editeurs, 207 p., 1999

Ce livre fait suite à un premier volume sur les sciences sociales de l'environnement publié chez le même éditeur. Ce premier volume avait comme objectif principal la description des paradigmes rattachés aux sciences de l'environnement.

Ce second livre publié en 1999, sous la direction de B. Dumas, C. Raymond et J.-G. Vaillancourt, aux Presses de l'Université de Montréal, a pour but de démontrer la normativité dans les recherches en sciences naturelles. Une normativité imbriqué dans la rationalité des études dont nous devons prendre conscience pour "apercevoir de nouvelles déterminations de la connaissance" (p.9). Le collectif tente de réaliser cette démonstration à partir de différents cas de recherche. Une idée stimulante intellectuellement, puisqu'elle permet une vision élargie de la normativité, mais qui laisse le lecteur sur sa faim.

Le texte de Carmen Gendron et Brigitte Dumas portant sur "l'écologie, les ruses de la rationalité" est intéressant mais semble incomplet. Tout au long du texte elles nous entretiennent d'une analyse des écrits de René Dumont dont nous voyons qu'une infime partie. . En ce qui concerne le texte Laurent Lepage : "les contreverses environnementales sont plutôt culturelles que scientifiques", il nous montre simplement par une étude de cas l'importance de saisir les intérêts et la " culture " des intervenants. Cependant, on a l'impression que ces deux textes ont été amputés d'une bonne partie de leur contenu. Par ailleurs, certains textes sont carrément indigestes et sortent de l'objectif de la publication. Il faut noter que le texte sur les changements climatiques: sciences, normativité et société de B. Perron et J.-G. Vaillancourt est nettement le meilleur texte de cet ouvrage, il est aussi le plus long avec ces 25 pages. Doit-on trouver un lien entre la longueur et la qualité? Les autres n'ayant pas eu assez d'espace pour exprimer de façon claire leur vision, leur recherche.

De façon général cet ouvrage illustre la limite de la formule d'ouvrage sous forme de recueil. En effet, il ne permet pas efficacement aux chercheurs de s'exprimer. En espérant que les Presses de l'Université de Montréal, tireront les lecons de cette expérience pour revenir avec des collectifs structurés, permettant l'éclatement des barrières disciplinaires.

É. D.

La Nature

Yue Dai yun et Anne Sauvagargues
Presses littéraire et artistiques de Shanghai, 1999

Petit livre sans prétention et de lecture agréable montrant les visions que deux grandes civilisations ont de la nature. L'une, la civilisation chinoise, où traditionellement la nature précède la pensée et où l'harmonie de vie avec celle-ci permet l'atteinte de la sagesse, nous amène dans un conception fantastique et imaginaire de la nature. L'autre, la civilisation occidentale, décortique la nature. Elle cherche à la contrôler et à la domestiquer la nature. Pour ceux qui sont interressés à comprendre l'importance de la culture dans notre compréhension de ce qui nous entoure. Pour aller plus loin dans cette voie je conseillerais aussi le livre d'Eward T. Hall - "Au-dela de la culture", et celui de Dominique Bourg - "Les sentiments de la nature" dont vous lirez la critique dans un prochain numéro.

É. D.

Section spéciale : Amazonie

The central Amazon floodplain: ecology of a pulsing system,
W.J. Junk, Berlin, Springer, 1997, 526 p.

Toutes les personnes travaillant en écologie et en Amazonie connaissent W.J. Junk. Ce chercheur est un incontournable lorsque nous parlons de la dimension scientifique concernant les plaines d'inondation. En 1997, ce dernier nous a choyé en dirigeant une publication collective, et synthèse, des connaissances récoltées depuis ces milieux. Les plaines d'inondation, communément appelé varzéa en amazonie, représentent une richesse importante dans cette région où les sols sont généralement pauvres. En effet, les varzéas sont considérées par certains comme la solution pour un développement durable de cette région. En revanche, comme le démontre ce livre, la dynamique écologique des varzéa est complexe et inclut de nombreux paramètres. Selon W. Junk, la richesse de ces milieux provient de leur inondation annuelle par les eaux limoneuses de l'amazone, ce qu'il nomme le " pulse effect ". Un concept développé par ce dernier depuis plus d'une décennie. Ce livre, divisé en de nombreux chapitres courts et précis, est le livre de référence actuel pour tout ce qui touche les notions écologiques des varzéa. Une bibliographique exhaustive accompagne chacun des chapitres.

Je recommande fortement ce livre à toutes les personnes voulant appréhender ce système écologique complexe. Le seul point noir au tableau est le focus que fait le livre sur les plaines d'inondation de la région de Manaus (Amazonicas, Brésil). Bien que ces plaines d'inondation soient importantes et puissent être représentatives des plaines d'inondation de l'Amazone (eau blanche), ce focus écarte tout autre type de plaines d'inondation, telles que celles que l'on retrouve en eau claire dans le haut Tapajós (Pará, Brésil), ou encore dans les autres régions du monde.

É. D.

Amazonie brésilienne : les marchands de rêves. Occupation des terres, rapports sociaux et développement
Jacky Picard, Paris, Harmattan, 1998, 155p.

La collection Recherches Amériques latines, série Brésil, éditée chez l'Harmattan se voyait actualiser en 1998 par la publication de cette enquête menée de 1991 à 1994 dans la région de Maraba (État du Pará) en Amazonie brésilienne. L'auteur, Jacky Picard, est anthropologue et docteur en géographie.

Ce livre, que je recommande plus pour son fond que pour sa forme; la qualité des cartes et des graphiques laisse à désirer. Ce livre est en fait le fruit de la révision de la thèse de doctorat de l'auteur, intitulée : Les marchands de Rêves. Représentations sociales de l'échange et développement rural sur un front de colonisation en Amazonie brésilienne, soutenue à l'Université Michel de Montaigne (Bordeaux, France).

Ce livre nous convie à une aventure qui réussit à mettre en perspective les rapports de force qui prédominent lorsque l'on tente de conceptualiser le politique et l'économique dans un cadre agraire. Au travers d'un récit d'occupation de terre mené par chefs de bandes et syndicalistes, l'auteur examine les formes habituelles de domination en fonction des différents agents de développement. Il découvre que ces pratiques ne s'apparentent ni au capitalisme, ni même au clientélisme, mais bien au paternalisme qui fait référence à la nature patrimonialiste de l'État brésilien. L'isolement géographique, l'analphabétisme et la pauvreté des nouveaux arrivants, les sans terres, sont responsables, pour une bonne part, de la captivité du marché et de la tendance à la monopolisation.

Dans les derniers chapitres, l'auteur tente de mettre en lumière les stratégies paysannes, les formes possibles et les moyens d'un développement durable en Amazonie brésilienne. À ce sujet l'objectif est plus ou moins bien atteint. Cependant, il s'agit là d'un bon livre en ce sens qu'il démystifie le côté exotique de la question agropastorale riche d'un imaginaire prestigieux.

À tous ceux et celles qui sont de nature curieuse et qui s'intéressent de près ou de loin à l'Amazonie je souhaite bonne lecture.

Hugo Poirier

L'or de l'Amazonie

Oswaldo França Jùnior, traduit du portugais (Brésil) par Jacques Thiériot, Édition Acte-Sud, Arles, 1994.

Un aventurier au Brésil: au fond du Mato Grosso sur les traces du colonel Fawcett
P. Fleming, traduit de l'anglais par Isabelle Chapman, Paris, Phébus, 1990, 376p.

Pour faire suite à l'étude-de-cas de la revue, voici deux livres d'aventure sur la région Amazonienne. Le premier livre, L'or de l'amazonie, nous révèle la face cachée des chercheurs d'or (garimpeiros). Par le biais de l'histoire d'Adailton, nous abordons la dure réalité de leur conditions d'existence et de travail, ainsi que les raisons qui poussent des personnes à aller dans des régions inhospitalières pour en extraire ce minerai si crucial. Ce livre, au lieu de s'attaquer aux problèmes écologiques causés par le déversement de mercure relié à l'extraction de l'or, nous fait partager la vie quotidienne de personnes tentant de survivre dans des conditions précaires. J'ai personnellement trouvé la lecture agréable et instructive. Une certaine nostalgie - Sodade - de l'amazonie est venue me tenailler. À certains moments, nous avons l'impression d'être sur cette route faite de poussière rouge et attaquée par les pluies diluviennes. Les odeurs de la forêt viennent hanter nos narines. À la lecture de ce livre, ceux qui connaissent l'Amazonie vont retrouver des odeurs, des sensations, ceux qui ne connaissent pas vont surement rêver de cette terre mythique.

Le second livre est une aventure dans les entrailles de ce que nous appelions, voici quelques décennies, " l'Enfer Vert ". Le narrateur relate l'histoire de scientifiques- aventuriers du début du siècle et nous fait découvrir l'Amazonie d'avant la grande colonisation. Ce livre, lu après le livre d'Oswaldo França Jùnior, montre à quel point l'Amazonie s'est transformée durant le dernier siècle et combien de situations restent malgré tout inchangées. Une lecture captivante grâce à un auteur (et traducteur) de talent. Pour ma part ce fut un pur délice de lire ce livre.

É. D.

Découverte: · la revue "Futuribles". J'ai connu cette revue française par le biais d'un numéro spécial sur l'Énergie (vol 189, 1994). Mais il semble que l'éditeur ait certaines sensibilités pour les sciences de l'environnement, puisque d'années en années des articles sur des problématiques environnementales y sont publiés, majoritairement avec des approches politiques et/ou économiques.· Un article à noter : L'environnement au XXI siècle de J. Theys (Institut français de l'environnement), février-Mars,1999 - Sur ma table de chevet: Les sentiments de la nature - Dominique Bourg · Les leçons du jardin zen - Érik Borja, Sur mon bureau: The web of Life - Fritjof Capra · A critique for ecology - R.H. Peters.


VertigO no 1, vol 1