VertigO - La revue en sciences de l'environnement sur le WEB, Vol 1 No 1, Avril 2000

J'AI LU

Une société à refaire,
vers une écologie de la liberté
M. Bookchin, Les éditions Écosociété, 300p., 1993

Murray Bookchin est connu pour son implication dans les causes environnementales. Il est notamment à l'origine de la création du mouvement écologiste américain. En outre, tel Noam Chomsky, il est un des porte-étendards du mouvement anarchiste mondial. Nous devons à cet auteur une œuvre majeure que toute les personnes s'interressant à l'environnement devraient lire; Pour une société écologique. Malheureusement la version française, publié par Bourgeois en 1976, fait partie des nombreux ouvrages discontinués. Nous sommes chanceux, les éditions écosociété ont eu la bonne idée de diffuser Une société à refaire. Cette version française de Remarking society est traduit par Catherine Barret.

Dès le début de son ouvrage une socité à refaire, Murray Bookchin nous fait partager sa compréhension des problématiques environnementales. Selon lui, la crise écologique et la séparation entre l'humanité et la nature dont elle témoigne naissent avant tout des divisions entre les humains. Ainsi la relation de l'humain moderne avec la nature est une facette de la problématique. Cette manière de voir remet en cause l'ensemble de nos modes de fonctionnement en société. Murray Bookchin élabore, tout au long de l'ouvrage, une argumentation pour soutenir cette position. En suivant l'évolution historique des sociétés, de la mise en place de la hiérarchies, des classes et des états, il fait aboutir son essai sur l'élaboration d'une autre société qui n'est nulle autre que l'intégration de la philosophie anarchiste dans la gestion quotidienne. Cette philosophie basée sur l'idée de la liberté suppose que la société permettre […] une éthique de l'égalité des inégaux. Fidèle à lui-même, M. Bookchin réalise, ici, une démonstration appuyée qui ressemble étrangement à un discours politique.
On pourrait reprocher à ce livre de s'attaquer à bâton-rompu au courant de la pensée "Deep Écologist" et aux autres mouvements cherchant à remettre le développement social dans le giron des processus naturels. Cette attaque se retrouve particulièrement dans la première partie de l'ouvrage et, par chance, disparaît tout au long des chapitres. À partir de ce moment l'argumentation devient plus articulée et nous permet de saisir la puissance de l'approche utilisée par cet auteur, soit l'écologie sociale. Cette approche est, entre autre, pratiquée à l'Insitut d'écologie sociale du Vermont (États-Unis) fondé par Murray Bookchin. Ce dernier définit le message de l'écologie sociale comme étant un appel à une société libérée de la hierarchie et des modes de pensée hiéarchiques, mais aussi à une éthique qui fasse une place àl'être humain dans le monde naturel en tant qu'acteur ayant pour rôle de rendre l'évolution – aussi bien sociale que naturelle – pleinement consciente et aussi libre que possible, grâce à sa faculté de rendre l'évolution aussi rationnelle que possible en vue de satisfaire les besoins humains et non humains.

Pour travailler adéquatement avec cette approche la spontanéité, l'imagination et la raison seraient des outils incontournables. On ressort de cette lecture convaincu de la justesse des propos de l'auteur, tout en ressentant, néamoins, la difficulté de développer une telle société à contre-courant des modes sociaux actuels - laissant ainsi place dans notre esprit au travail des utopistes de la Renaissance.

À défaut d'avoir dans votre bibliothèque "Pour une société écologique" je vous suggère ce livre. Il nous permet de sortir de certaines de nos certitudes et, en plus, remet en question notre action dans un cadre social que nous ne définissons pas mais que nous subissons.

É. Duchemin
The Implementation and Effectiveness of International environmental commitments;
theory and practice.

Ed. D. G. Victor, K. Raustiala et E. B. Skolnikoff, The MIT Press, 737p., 1998.

Les protocoles internationaux sur l'environnement

     
Le second livre de cette chronique est loin du cadre anarchiste, il est plutôt dans le contexte de la globalisation des marchés et des contrôles environnementaux sous-jacents et nécessaires. Cet ouvrage, édité par D.G. Victor, K. Raustiala et E. B. Skolnokoff au MIT press et soutenu finacièrement par l'International institute for applied system analysis de Vienne (Autriche), recense différents protocoles internationaux sur l'environnement tout en effectuant une analyse historique et comparative de ceux-ci. Les différents chercheurs de cet ouvrage, tentent de trouver les leçons à tirer de ces expériences pour l'implantation et le fonctionnement adéquat des protocoles internationaux sur l'environnement. Il ressort que la recette se trouverait en particulier dans le jeu des acteurs impliqués. Les protocoles nationaux et internationaux abordés dans ce livre touchent autant la faune et la flore, le protocole de Montréal sur les éléments causant la disparition de l'ozone, les pesticides, le contrôle de la pollution atmosphérique en Europe, ou encore les déversements de produits nuclaires dans les océans articques, pour ne nommer que ceux-ci. Par son ampleur et ses analyses rigoureuses, cet ouvrage est une référence en la matière. Qui plus est, il est écrit dans un anglais agréable à lire.

É. Duchemin

La participation du public à l’évaluation environnementale stratégique

M. Gauthier, L. Simard et J.-P. Waaub, Les cahiers de recherche de l’Institut des sciences de l’environnement, Volume 2, 116 p., 1999

Ceux et celles qui ont lu le premier numéro auront vite fait de constater que je suis loin de prétendre à la critique littéraire. Cependant, certains auront deviné mon penchant à discuter de sujets qui, de près ou de loin, ont su retenir mon attention ou susciter mon intérêt. Pour ce second numéro de la revue, je me suis intéressé aux cahiers de recherche en environnement édités et diffusés par l’Institut des sciences en environnement de l’UQAM.

L’environnement est devenu, depuis les années 60, un sujet des plus préoccupants. Que l’on soit un spécialiste œuvrant dans ce domaine ou non, nous savons tous que le développement de nos sociétés industrielles s’est fait sans que l’ensemble des questions environnementales n’ait été soulevé. Heureusement, nous nous sommes depuis dotés d’un certain nombre d’outils de prise de décision visant à la réduction des impacts négatifs sur les milieux de vie. L’évaluation des impacts environnementaux (EIE) compte parmi ces outils clés de la réalisation du développement durable. Cependant, d’autre outils, moins bien connus et plus récents, méritent notre attention. Je désire ici vous faire part de mon appréciation du numéro deux de ces cahiers ayant pour titre «Participation du public à l’évaluation environnementale stratégique» (EES) réalisé par Mario Gauthier, Louis Simard et Jean-Philippe Waaub.

En outre, cet ouvrage à une volonté pédagogique en permettant l'apprentissage des notions de base, des approches utilisées et en identifiant la littérature disponible sur ce sujet. Voici un autre incontournable pour ceux et celles qui s'interressent aux actions humaines, et surtout au pouvoir que ces actions peuvent avoir sur la gestion environnementale nationale et internationale.

L’objectif principal de cette recherche, confiée par le ministère de l’Environnement du Québec au groupe d’études interdisciplinaires en géographie et environnement régional (GEIGER), est de procéder, à partir d’une revue de littérature, à un examen critique des questions de fond relatives à la participation du public à une démarche d’EES, d’identifier les acteurs, les modalités et les méthodes de participation du public ainsi que d’identifier les types d’enjeux susceptibles d’émerger d’une telle démarche.

L’EES, si l’on se fie à la bibliographie et à la définition qui nous est proposée, est un concept relativement récent, datant de moins de dix ans, et qui se veut un processus systématique consistant à examiner les considérations écologiques et les conséquences des propositions de politique, de plan ou de programme. L’EES est «stratégique» du fait qu’elle s’insère au début même des processus décisionnels. Ses trois objectifs principaux sont de promouvoir, bien entendu, le développement durable, de repérer les effets cumulatifs, induits, synergiques et globaux et de rationaliser les évaluations environnementales des projets spécifiques.

Cette recherche, qui est par ailleurs très bien structurée, nous permet de suivre l’évolution au travers le cadre conceptuel par le biais d’exemples précis, qu’ils soient canadiens ou étrangers, pour enfin survoler l’état de la situation au Québec. L’analyse des auteurs est très concise; elle repose intégralement sur les procédures générales, les dispositions spécifiques de la participation du public et sur le bilan critique de cas: la Commission européenne, les Pays-Bas, la Nouvelle-Zélande, l’Australie occidentale les États-Unis et le Canada. Les auteurs font très bien ressortir la difficulté d’application d’un modèle standard d’EES et le fait que sa pratique est, règle générale, plus courante lorsqu’il s’agit de mettre en place des plans ou des programmes. L’établissement des politiques et des processus législatifs étant encore jusqu’à ce jour soumis à une tradition relativement hermétique, il apparaît évident que pour améliorer la participation, il y aurait lieu d’accroître la préparation et la formation des décideurs ainsi que des membres de l’administration publique.

En terminant, je recommande la lecture de la présente étude principalement à ceux et celles qui s’intéressent aux applications des sciences au politique. La prise en compte des concepts environnementaux dans les processus décisionnels s’avère plus qu’impérative. Les recommandations de l’étude sont relativement originales et stimulent la poursuite d’une démarche environnementale à grande échelle, celle du politique. Enfin, j’ai grandement apprécié la vision finale à long terme des auteurs voulant que dans l’avenir le concept d’EES pourrait graduellement être remplacé par celui d’évaluation stratégique qui montrerait que l’environnement fait désormais partie intégrante des critères de conception des politiques, de plan ou de programme.

H. Poirier

Découverte: la revue ECO sur les négociations du protocole de Kyoto. Lors de chacune des conférences les ONGs publient ce journal. Vous pouvez recevoir ce journal en vous inscrivant à la liste d'envoie en cliquant iciSur ma table de chevet: la note de recherche no 2 (juin 2000) du département de science politique de l'UQAM : Développement anthropique et conservation de l'environnement en Amazonie brésilienne: description, analyse critique et étude-de-cas (auteurs D. Giroux et N. Soumis), Sur mon bureau: plusieurs documents sur le principe de précaution dont Le principe de précaution dans la conduite des affaires humaines sous la direction de O. Godard .


VertigO no 1, vol 2