VertigO - La revue en sciences de l'environnement sur le WEB, Vol 3 No 1 , Avril 2002

PLANIFICATION DU RÉSEAU D’AIRES PROTÉGÉES DU QUÉBEC :
Principes et méthodes de l’analyse écologique du territoire

Par GERARDIN V.,DUCRUC J.-P.et BEAUCHESNE P.
Ministère de l’Environnement, Direction du patrimoine écologique et du développement durable,
675, boulevard René-Lévesque Est,
Québec (Québec),G1R 5V7
Tél. : 418.521.3907 Fax : 418.646.6169
Courriels : vincent.gerardin@menv.gouv.qc.ca ,jean-pierre.ducruc@menv.gouv.qc.ca, patrick.beauchesne@menv.gouv.qc.ca



 

Introduction

    Une compréhension récente des relations de l’Homme avec sa planète et des pressions sans cesse plus grandes qu’il exerce sur les ressources et le territoire, commandent une perception nouvelle de la conservation , de la protection et de la gestion de l’environnement.

Depuis la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement − dit « Sommet de la Terre » − tenue à Rio en 1992, le développement durable et la diversité biologique ou biodiversité sont devenus deux thèmes indissociables et incontournables en politique et en aménagement du territoire. À un point tel que les ministères associés à l’utilisation des ressources y réfèrent explicitement en dans leurs législations (voir : Loi sur les forêts du ministère des Ressources naturelles, Politique ministérielle de développement durable du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation). Le maintien de la biodiversité est aujourd’hui considéré comme une condition sine qua non du développement durable, c’est-à-dire que sans son maintien l’avenir humain est menacé.

La grande question est de savoir comment protéger la biodiversité pour le bien-être des générations futures tout en assurant aux générations contemporaines, et particulièrement à celles vivant dans des conditions indécentes de pauvreté, une qualité de vie acceptable. Le maintien de la biodiversité prendra avec le temps, l’expérience et un souci de partage et de solidarité, diverses formes qui ne pourront cependant exclure l’utilisation durable des ressources et du territoire. La gestion intégrée des ressources, dans le respect de la capacité de support de l’environnement et des besoins humains essentiels, est certainement la première voie à suivre. Mais, même avec la meilleure volonté du monde, la conservation de la biodiversité sous des conditions d’utilisation de tous les espaces et de toutes les ressources ne peut répondre à tous les objectifs exprimés dans ce domaine. Les besoins de paysages de qualité, de récréation et d’observation en nature, de suivi scientifique des écosystèmes et de protection des espèces menacées ou vulnérables seraient difficilement pris en compte dans un tel contexte d’aménagement. Un moyen très efficace − mais aussi très radical, il faut en convenir − de conserver la biodiversité d’un territoire terrestre ou aquatique est de le doter d’un réseau d’aires protégées soustraites aux interventions humaines les plus perturbatrices. La plupart des pays ont abordé cette question en intensifiant leurs efforts dans ce sens − les dernières données soulignent que près de 10 % de la planète est protégée. C’est dans cet esprit que le Québec s’est engagé à protéger d’ici 2005, 8 % de son territoire répartis selon la variabilité de sa biodiversité (Ministère de l’Environnement, 1999a; Beauchesne et Gaudreau, 2002).

1. Principes de l’approche scientifique à la proposition d’aires protégées

La création des aires protégées au Québec s’est faite à l’image de ce qui se faisait le plus fréquemment à travers le monde jusqu’à tout récemment (Margules et Usher, 1981; Pressey, 1994). Ainsi, on peut affirmer que le réseau actuel des réserves écologiques découle d’une volonté de protéger des éléments particulier et remarquable combinée à la présence de conditions d’implantation opportunes, alors que celui des parcs reflète plutôt la recherche d’éléments remarquables du territoire (qualité visuelle; paysages particuliers ou exceptionnels). La biodiversité est une valeur très récente, de telle sorte qu’il n’y a pas eu réellement souci d’évaluer la contribution des aires protégées à la protection de cette biodiversité, souci qui est aujourd’hui devenu un des moteurs du projet de la Stratégie québécoise sur les aires protégées (SQAP) (ministère de l’Environnement, 1999b). Cette nouvelle préoccupation amène la nécessité de s’appuyer sur une démarche scientifique rigoureuse pour être capable d’évaluer l’importance de toute portion du territoire à l’égard de la biodiversité et d’en retenir, au travers de contraintes de toutes sortes, les plus intéressantes pour la conservation. Cette démarche repose sur la connaissance écosystémique des territoires à étudier et la contribution de toute portion de ces territoires à des objectifs de conservation proposés.

1.1 Connaissance des écosystèmes

Il faut non seulement décrire les écosystèmes mais aussi connaître leur répartition spatiale. La démarche scientifique que nous avons adoptée repose sur trois concepts complémentaires : une approche holistique du territoire, l’écosystème est considéré comme une entité spatiale et la notion de filtre brut. Dans le concept holistique, l’univers est vu comme une organisation ordonnée selon une « hiérarchie de systèmes stratifiés à niveaux multiples » (Naveh et Lieberman, 1994; Naveh, 2000; O’Neill et al., 1987; Matéo, 1984). S’il est considéré comme une entité spatiale, l’écosystème devient cartographiable. Ceci n’est que l’application de la définition initiale proposée par Tansley en 1935 et, depuis, reprise par toute l’école de pensée de l’écologie du paysage (Troll, 1971; Bertrand, 1972; Klijn et Udo de Haes, 1994; Zonneveld, 1995; Bailey, 1995).

La reconnaissance et la cartographie des écosystèmes reposent alors sur leur dimension physique, base stable de leurs constituants et de leur dynamisme. Ils sont appréhendés selon « un système hiérarchique de niveaux de perception emboîtés les uns dans les autres partant de l’écosystème global jusqu’à la plus petite portion de territoire » (Rowe, 1993). La connaissance de la dimension physique des écosystèmes (composition et répartition spatiale) est aussi à la base de l’application de la notion du filtre brut (ou filtre grossier). Devant la tâche insurmontable d’aborder la biodiversité par la connaissance des espèces, nous l’abordons par la diversité des habitats, fournie par la dimension physique des écosystèmes (Hunter et al., 1988; Iacobelli et al., 1993). À l’échelle ou au niveau de perception retenu, plus grande est la diversité des habitats, plus grandes sont les chances de capter un maximum de biodiversité.

En bout de ligne, l’information tirée de l’application du filtre brut est complétée par des connaissances ponctuelles comme les espèces rares, menacées ou vulnérables, les vieilles forêts, les écosystèmes exceptionnels, etc. (notion du filtre fin).

1.2 Contribution aux objectifs de conservation

Il faut être capable d’attribuer une valeur à toute portion du territoire (à tout écosystème) pour évaluer sa contribution à des objectifs de conservation préalablement fixés (Pressey et al., 1994; Pressey, 1998). Dans le contexte actuel du développement d’un réseau d’aires protégées, nous travaillons avec l’objectif de conserver au moins 8 % de la superficie de tous les écosystèmes. L’évaluation de la contribution repose sur trois critères (la superficie, la fréquence et la répartition spatiale de chaque écosystème) et un concept , «l’irremplaçabilité» : plus un écosystème est rare (fréquence et superficie faibles) plus sa contribution à l'atteinte des objectifs de conservation est élevée (Pressey 1999; Ferrier et al., 2000).

Ainsi, des écosystèmes (ou toute portion de territoire) qui sont hautement irremplaçables contribuent fortement à l’atteinte des objectifs de conservation car il n’existe pas d’alternative, il n’y a pas de solution de rechange dans le territoire de référence. Il est impératif de pouvoir les inclure dans un réseau d’aires protégées. À l’opposé, les écosystèmes de faible «irremplaçabilité» ont une contribution plus faible à l’atteinte des objectifs de conservation car ce sont des écosystèmes communs et il existe plusieurs solutions de rechange pour aller les chercher dans le territoire de référence.

1.3 Connaissances et outils d’analyse

Le cadre écologique de référence (CER)

La connaissance écologique nécessaire à la démarche scientifique adoptée par le projet de SQAP s’articule autour du CER (www.menv.gouv.qc.ca/biodiversité/cadre-écologique/index.htm). Il découpe le Québec en unités cartograhiques selon un système hiérarchique de niveaux de perception gigognes dont les niveaux supérieurs s’inscrivent dans une perspective nord-américaine (Commission de coopération environnementale, 1997; Li et Ducruc, 1999; figures 1 à 3 dans: http://www.menv.gouv.qc.ca/biodiversite/aires_protegees/provinces/index.htm).

Le niveau de connaissance des écosystèmes terrestres sur lequel porte l’essentiel des analyses pour la recherche de territoires d’intérêt pour la conservation est fourni par la description des constituants physiques du niveau 3 (figure 1).

Dans chaque province naturelle, une série d’informations vient se greffer autour de cette description. Elles complètent la description écologique de la province naturelle; elles portent principalement sur le climat (Gerardin et McKenney, 2001), le réseau hydrographique, les lacs (Blais, 2001), le couvert végétal, la faune et l’utilisation du sol.

Figure 1. Les trois niveaux supérieurs du CER : Province naturelle (E); Régions naturelles (E01 à E08); Ensembles physiographiques (E0101 à E0804).

Tableau 1. Les données du système d’information sur le territoire

Le système d’information territorial (SIT)

L’information nécessaire à la réalisation du CER, l’information descriptive tirée du CER et une série d’informations cartographiques complémentaires stockées, structurées et traitées à l’aide du logiciel d’information géographique ArcviewMD constituent l’amorce d’un SIT pour chaque province naturelle (tableau 1). Ce SIT est la base de données à référence spatiale avec laquelle s’effectuent les opérations nécessaires à la réalisation du projet de SQAP. Il incorpore aussi, au fur et à mesure qu’elles sont produites, les nouvelles informations à référence spatiale, étant ainsi en constante évolution.

Le logiciel C-Plan

Ce logiciel a été conçu et développé par une équipe australienne (New-South-Wales-National Parks and Wildlife Service) dans les années 90 (Pressey et al., 1993; 1994). Il a ensuite été mis en application dans un territoire forestier de 24 000 km2 dans lequel 9 parcs et réserves couvrant 8 160 km2 ont été créés tout en attribuant un volume de bois suffisant aux compagnies forestières œuvrant sur le territoire pour les cinq années à venir (Pressey, 1998; Ferrier et al., 2000).

Le logiciel permet de calculer la contribution de chaque écosystème terrestre (ou classe de lac, de cours d’eau ou de couvert végétal) à l’atteinte des objectifs de conservation fixés. Associé à Arcview, il identifie, par province naturelle, les territoires d’intérêt pour la conservation, permettant d’atteindre, de façon optimale, l’objectif proposé.

L’information tirée de cette association est produite sous forme de tableaux, cartes et diagrammes (figure 2) qu fournissent les données d’entrée de la dernière étape de la démarche de proposition d’aires candidates à la conservation.

Figure 2. Ensembles physiographiques d’intérêt et l’histogramme de contribution pour la province naturelle du Plateau de la Basse-Côte-Nord

2. Analyse raisonnée pour la proposition d’un réseau d’aires protégées.

Une grande rigueur méthodologique n’est pas suffisante pour assurer que le réseau d’aires candidates à la protection remplisse toutes les exigences. Pensons aux aspects suivants : Quelle forme donner et quelle taille minimale pour assurer l’intégrité de chaque espace protégé? Comment limiter les conflits d’usage? Comment respecter l’intégrité des hydrosystèmes sans prendre en compte tout leur bassin hydrographique? Quelle répartition spatiale dans les territoires de référence? Il y a donc lieu, à l’étape finale de la procédure de proposition, d’avoir une réflexion élargie, tant au niveau de l’aire candidate que du réseau. Nous avons défini quelques lignes directrices, cohérentes avec la lettre et l’esprit des objectifs fixés par le gouvernement en juin 2000 (min. de l’Environnement, 1999a) :

C’est pourquoi, guidée par les résultats apportés par C-Plan, la proposition du réseau idéal se fait d’abord par des lectures cartographiques de l’organisation spatiale des écosystèmes, puis par une recherche de conditions optimales d’insertion de l’aire candidate dans le tissu des usages et des droits environnants. Cette analyse s’appuie donc fortement sur une consultation continue du système d’information sur le territoire (tableau 1).

Au fur et à mesure de la délimitation des aires candidates on enregistre leurs caractéristiques écologiques et on ajuste en conséquence les données sur les carences à combler par rapport aux objectifs de pourcentage et de représentativité. Après une première ébauche, on produit une analyse statistique globale de cette première ébauche de réseau. À partir de cette analyse, on améliore les éléments sous-représentés tout en minimisant encore mieux, si possible, les impacts socio-économiques appréhendés. En fin de compte, on aboutit à une proposition finale pour laquelle un tableau statistique est dressé pour chaque aire candidate et pour l’ensemble du réseau de la province naturelle. Ces tableaux de fréquence portent sur l’ensemble des éléments ayant servis à la planification du réseau, soit les éléments écologiques, de contrainte et de conjoncture favorable.

3. Résultats : Un filtre brut qui joue bien son rôle

Le principe du filtre brut est à la base du processus de proposition d’espaces à protéger mis de l’avant par le ministère de l’Environnement. L’hypothèse scientifique qui soutient notre démarche, est que la sélection de territoires basée sur les caractéristiques écologiques stables des écosystèmes tels que le climat, relief, géologie, sol et drainage, permet de capter l’essentiel de la diversité écologique et biologique du territoire de référence, en l’occurrence, de chaque province naturelle.

Pour les quatre provinces naturelles déjà traitées les résultats sont remarquables et confirment la validité de notre hypothèse. Quelques exemples pris dans la province naturelle des Laurentides centrales qui couvre 204 000 km2, allant du Saguenay au sud-ouest aux Monts Groulx au nord-est, en font la démonstration (figure 3). Pour les raisons expliquées plus haut de marge de latitude pour la négociation, le réseau proposé atteint 15 % de la superficie totale de la province naturelle. Il faut donc vérifier, 1) que toutes les classes des thèmes sont représentées dans le réseau et, 2) que le niveau de représentation se situe autour de 15 %.

Regardons rapidement comment, dans un premier temps, les paramètres physiques des écosystèmes sont pris en compte par l’application du principe du filtre brut.

Figure 3.
Pourcentage de protection proposée par : 1. Région naturelle, 2. Classe climatique, 3. Classe géologique, 4. Type de lac, 5. Ordre de Strahler des rivières, 6. Type de couvert végétal; 7. Qualité d’habitat du lièvre; 8. Type de perturbation
.

Si l’association entre les paramètres physiques, tel le relief et la géologie envers la typologie lacustre, peut expliquer en partie les bons résultats du filtre brut, il est a priori moins évident que les paramètres biologiques des écosystèmes, comme le couvert végétal ou les indices de qualité d’habitat pour la faune, puissent être pris en compte aussi efficacement, sans avoir été explicitement introduits dans l’analyse. Pourtant :

Discussion

La planification d’un réseau d’aires protégées représentatif de la biodiversité passe par une étape obligée d’analyse écologique du territoire avant d’aboutir à des propositions d’aires candidates à la protection. La démarche mise au point par le MENV repose 1) sur les principes de l’analyse écosystémique, 2) sur une information écologique pluri-factorielle, 3) sur les données de l’occupation du territoire et de l’utilisation des ressources et, finalement 4) sur un processus raisonné de sélection des territoires intégrant les 3 premiers points dans une recherche de conciliation entre les meilleures valeurs de représentativité de la biodiversité et le moindre impact que pourrait causer leur mise sous protection. Le cadre écologique de référence donnant prépondérance aux composantes physiques des écosystèmes – climat, géologie, topographie, hydrologie et sols –, l’objectif n’est donc plus de protéger la biodiversité telle que mesurée au temps T0 de la prise de données, mais de protéger des ensembles – paysages – écologiques dont la biodiversité évoluera librement selon les déterminismes écologiques prévalant. Cette démarche va donc beaucoup plus loin que la recherche d’espaces vierges de toute intervention humaine.

Les supports logistiques de ce programme d’identification de territoires propices à la protection de la biodiversité sont un atout majeur. Les bases de données informatiques, traitées dans un logiciel d’information géographique couplé au logiciel C-Plan d’aide à la sélection, forment un tout sans précédent en planification territoriale dont cette dernière pourrait d’ailleurs bénéficier largement dans maints autres domaines d’application. Ce système d’information écologique sur le territoire est un outil de négociation très efficace, puisqu’il permet en très peu de temps d’évaluer les avantages et les inconvénients des alternatives qui s’offrent aux décideurs.

Du côté des hydrosystèmes, il faut noter la nouveauté du cadre écologique des systèmes lacustres. Selon nos connaissances, c’est la première fois qu’un tel cadre, développé sur un aussi vaste territoire, permet d’étendre le concept de filtre brut d’analyse de la biodiversité à ces milieux aquatiques. L’exploitation de cette typologie lacustre aux fins d’aménagement et de gestion demeure cependant vierge. Conceptuellement et méthodologiquement, la caractérisation écologique des hydrosystèmes d’eau courante est déjà développée (Gerardin et Lachance, 1997; Beauchesne et al., LATINO, etc.) mais, faute de temps et de moyens, nous nous sommes limités au seul ordre hiérarchique de Strahler dans la recherche de rivières représentatives à protéger.

Ce qui nous amène à souligner que la qualité et la précision de l’analyse sont malgré tout fortement dépendantes de la disponibilité et de la qualité des données. De ce côté, c’est certainement les données floristiques et fauniques qui présentent les plus grandes lacunes. Les données sur les couverts végétaux forestiers du deuxième inventaire décennal donnent accès, pour le territoire couvert au sud du 52e parallèle, à une information de premier plan, qui ne pourra qu’être améliorée avec les résultats du dernier inventaire. Cependant, aucune information n’est disponible pour les espaces non forestiers – terrains forestiers improductifs, milieux humides, flore subarctique et alpine. Quant au domaine des connaissances fauniques, nous ne disposons que des indices de qualité d’habitats forestiers puisque ceux-ci dépendent de l’information disponible sur le couvert végétal, en l’occurrence le couvert forestier. Ces remarques, à elles seules, justifient donc pleinement la démarche écosystémique – s’appuyer sur le déterminisme écologique – retenue et le principe de filtre brut.

Certaines données portant sur l’utilisation du territoire peuvent faire défaut par leur indisponibilité ou leur manque de précision. C’est le cas notamment des projets hydroélectriques et des droits d’exploration minière. Ainsi, ces derniers évoluant si rapidement et de manière difficilement prévisible – fonction du principe du « free mining » qui permet d’octroyer à tout citoyen, partout et en tout temps (clic and claim) des droits d’exploration minière −,que le niveau d’incertitude quant à la faisabilité des propositions est généralement élevé. Ce qui rend d’ailleurs toute information sur la localisation des aires candidates, extrêmement sensible à la spéculation.

Nous avons présenté ici, les résultats de l’application de la méthodologie pour l’identification de sites candidats à la protection à l’échelle du Québec. La démarche est aussi applicable à des niveaux régionaux et même locaux. Ainsi, le ministère de l’Environnement a travaillé sur l’ensemble de la région administrative de l’Outaouais (33 000 km2), sur la MRC de Papineau (6 000km2) et celle de Rouyn-Noranda (5 000km2) et sur le bassin versant du Lac Dasserat en Abitibi (200 km2). Cependant, il faut remarquer que le référentiel territorial joue un rôle important sur la valeur et l’exactitude des résultats obtenus. Dans des limites territoriales administratives, certains écosystèmes rares et irremplaçables peuvent s’avérer communs et représentatifs dans leur « région écologique ».

Conclusion

La sélection des sites candidats à la protection de la biodiversité s’appuie sur une démarche scientifique qui se veut rigoureuse, efficace et souple. La démarche en vue de la création d’un réseau québécois d’aires protégées ne se termine pas là pour autant. D’autres étapes, toutes aussi importantes, telle celle de l’intégration de critères socio-économiques pour minimiser les impacts sur les communautés locales et régionales, les bénéficiaires de droits sur le territoire et les ressources (forêts, mines, énergie, villégiature) devront suivre. Le système d’information sur le territoire jouera alors pleinement son rôle d’outil d’aide à la décision fournissant une base commune d’information aux divers acteurs et intervenants concernés par ce défi.

 


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