POLITIQUES, PROGRAMMES ET MESURES

Généralités

Depuis la tenue de la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement en 1972 à Stockholm, Conférence qui a donné naissance au Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), on observe une prise de conscience accrue de ce que la protection de l’environnement est un facteur important de la vie économique et sociale de notre planète.

Consciente qu’elle ne peut parvenir à un développement durable sans une politique de limitation effective des effets des changements climatiques, la Côte d’Ivoire a ratifié la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques. Quoique l’ensemble de la population n’ait pas encore une claire perception de ce phénomène, le Gouvernement a entrepris plusieurs actions aux plans institutionnel et juridique et au travers de programmes visant à mettre en œuvre des options d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre.

Activités antérieures à Rio 1992

Très préoccupé par les problèmes environnementaux, le gouvernement ivoirien a choisi dès 1986 la voie de la maîtrise de l’énergie par l’exploitation de gisements d’économies en consommation d’énergie dans tous les secteurs à travers le renforcement des programmes en cours, notamment par des opérations d’amélioration des performances de la carbonisation, de la cuisson avec des biomasses, de la recherche développement en matière de bio-combustibles et de bio - énergies comme en matière d’économie d’énergie dans les bâtiments et l’éclairage public, dans le secteur des transports, de l’agriculture, celui de la commercialisation, des services, des industries et au plan domestique.

Activités post Rio 92 et programme national induit

La Côte d’Ivoire a engagé une série d’opérations postérieures à Rio et a participé dans le cadre de la Convention sur les changements climatiques à toutes les réunions internationales, notamment les réunions préparatoires et les réunions des COP 4 et 5. L’établissement du PNAE en 1994 et la création de l’Agence Nationale de l’Environnement répondent respectivement à ces nécessités de programmation de l’Action Environnementale en Côte d’Ivoire.

Des initiatives privées comme la création d’ONG spécialisées (COTE D’IVOIRE ECOLOGIE-SOS FORET - LA CROIX VERTE-CARBONA-AEIE, etc.) sont vivement encouragées par le gouvernement ivoirien.

Les étapes relatives aux changements climatiques
Les études nationales sur les changements climatiques

Une étude sur le changement climatique a été menée en 1994 dans le cadre du programme US Country Studies. Cette étude visait essentiellement à améliorer les capacités de la Côte d'Ivoire à faire l'inventaire des gaz à effet de serre, à étudier l'état de vulnérabilité au changement climatique, à identifier les mesures correctives nécessaires et à proposer des actions pour atténuer les effets de ce changement Ceci s’est traduit par :

Le financement de cette étude a été obtenu auprès du Gouvernement Américain par l'intermédiaire de l'une de ses structures mises en place pour gérer les projets relatifs aux questions liées au changement climatique mondial, le "US Country Studies Management Team" au Département d'Etat.

Les études régionales

Les travaux financés par les Bailleurs de fonds internationaux conjointement ou non avec le FEM concernent :

Un projet intitulé « réduction des émissions de gaz à effet de serre grâce aux économies d’énergie dans les bâtiments en Afrique de l’Ouest » codé PNUD-FEM/RAF93-G32, a débuté en 1992 avec une série d’ateliers thématiques d’identification et de renforcement des capacités nationales tant au Sénégal qu’en Côte d’Ivoire, et s’achève en l’an 2000 par la réalisation en Côte d’Ivoire d’un projet pilote sur l’immeuble Postel 2001. Le choix se justifie par des économies mensuelles de 6 millions de Fcfa sur la facture d’électricité, accompagnées de réductions sensibles d’émissions de gaz à effet de serre et de gaz nuisibles à la couche d’ozone grâce à la technique de climatisation individualisée dite VRM.

Le PNUD a offert 70 millions de Fcfa de matériel le 31 août 2000 à la structure de gestion de l’immeuble POSTEL 2001 afin de réaliser l’opération pilote, à charge pour elle d’en acheminer tous les paramètres à la base de données sur les bâtiments créée à l’occasion du projet et logée dans des structures de l’administration et de la para-administration (LBTP-INSP/HB-BEE). Cette Banque de Données est riche de plus de 150 diagnostics énergétiques.

Les institutions
Le secteur public

En Côte d’Ivoire, les structures qui ont conjointement en charge les dossiers sur les changements climatiques sont les suivantes :

Le Ministère de l’Environnement, de l’Eau et de la Forêt dont fait partie l’Agence Nationale de l’Environnement (ANDE), supervise tous les projets relatifs aux changements climatiques dont :

Le Ministère des Mines et de l’Energie comprenant les Directions des Hydrocarbures et de l’Energie.

Le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique à travers le Département de Physique- Chimie apporte un soutien en matière de formation et de recherche dans les domaines de pollutions.

Le Ministère de l’Industrie dont la Direction de Développement Industriel (DDI) est chargée de la promotion et de la coordination du suivi des activités industrielles.

Le secteur privé

La Fédération Nationale des Industries de Côte d’Ivoire (FNICI) qui constituent un cadre de concertation entre les industriels et les autres secteurs non industriels.

L’association des PME- PMI a un rôle particulièrement important pour la réussite des actions de lutte contre la pollution puisque la quasi-totalité du secteur industriel est constituée par ces entreprises.

Législation

Le Code de l’environnement a été adopté par l’Assemblée Nationale depuis 1997. Le code de qualité énergétique des bâtiments est élaboré et en voie de finalisation pour soumission au Parlement.

Renforcement des capacités institutionnelles

Le manque criard d’expertise marque toute la difficulté de dresser, dans des délais corrects, des rapports de qualité répondant à toutes les urgences. De fait, les données scientifiques devraient être établies à travers l’appareil de recherche scientifique et fondamentale constitué des 4 universités nationales (Abidjan Cocody ; Abobo - Adjamé ; Daloa et Korhogo) et des 2 Grandes Ecoles (INPHB- ENSEA). Malheureusement, le défaut de coordination et de moyens scientifiques pertinents, y compris le manque de financements entraînent de sérieux retards.

S’agissant des données techniques, le tissu industriel embryonnaire fait peu cas des données d’exploitation qui n’ont pas d’incidence directe sur leur productivité, ceci étant encore plus marqué depuis les privatisations. On ne peut dès lors s’attendre au développement de Cellules de Recherche et Développement dignes de ce nom dans de telles structures. Les capacités techniques et scientifiques nationales se voient donc limitées. Elles devront être renforcées au travers Des structures nationales de formation, notamment de l’Université Nationale d’Abobo Adjamé et de ses instituts rattachés (IREN- CRE), ainsi que par l’Institut Polytechnique National Houphouët Boigny.

On dénombre un maximum de 300 cadres moyens et supérieurs susceptibles de contribuer aux analyses et travaux spécifiques Efficacité énergétique et gestion énergétique industrielle

En Côte d’Ivoire, la ressource d’énergie la plus utilisée demeure la biomasse dans ses différentes composantes. Représentant plus de 70% des besoins énergétiques nationaux, elle est la source d’émission de gaz à effet de serre la plus importante.

Les efforts des pouvoirs publics pour vulgariser le butane à grande échelle dans les dix prochaines années pourraient inverser cette tendance et par là même contribuer à une meilleure maîtrise de la réduction des gaz à effet de serre.

Le programme de maîtrise de l’énergie lancé dès 1986 comporte une série d’actions qui visent la réduction des consommations de combustibles fossiles par la recherche d’une efficacité énergétique accrue dans tous les secteurs d’activité :

Enfin, le programme de reboisement à grande échelle et les programmes de recours aux énergies renouvelables sur le moyen terme (hydro et solaire notamment) vont influencer de manière certaine les émissions futures en dopant le stockage de carbone sur l’ensemble du territoire national.

Projet pilote d’efficacité énergétique dans les bâtiments

Le projet PNUD-FEM/93G32 vient de s’achever dans sa phase d’études et de lancement avec la mise en route du projet pilote de réduction des émissions de GES grâce à l’amélioration de l’efficacité énergétique du POSTEL 2001 : une économie de 6 millions de FCFA/ mois est attendue d’un investissement de 100 millions environ. La dissémination des résultats de ce travail dans la sous région pourrait entraîner une réduction de 30 à 35 % des consommations d’électricité et entraîner corrélativement une réduction sensible des émissions de GES de l’ensemble de la sous région. En côte d’Ivoire seulement, 75 bâtiments devraient par application des résultats du projet entraîner une réduction annuelle des émissions des GES de 1480 Gg de CO2 équivalents (0,68 kgECO2/kWh).

Promotion des énergies nouvelles et renouvelables

Le portefeuille de projets du Plan prévoit la mise en service de 1.500 localités solarisées PV sur une période de 2 ans, et un renouvellement du programme en cas de satisfaction. Les énergies de biomasses devraient connaître un regain avec un renforcement de la Recherche et Développement sur les conversions, les transformations, l’introduction de nouveaux types de fourneaux économes pour la cuisson, de fours et procédés économiques de carbonisation, l’introduction à terme des piles à combustible utilisant des gaz pauvres ou de pouvoir calorifique moyen issus de biomasses, et le développement de la biodigestion dans les zones rurales.

Maîtrise de L’énergie et développement des énergies renouvelables

La maîtrise des consommations d’énergie est confiée au Bureau des Economies d’Energie, logé à la Direction de l’Electricité et des Energies Nouvelles. Actuellement, un programme d’économies d’énergie dans les bâtiments, centré sur un code de qualité énergétique du bâtiment, en cours de rédaction, a démarré des programmes de suivi des consommations publiques d’électricité, d’eau et de téléphone. Ces programmes sont mis en œuvre par le Laboratoire du Bâtiment et des Travaux Publics L.B.T.P sur contrat public. Les économies enregistrées sur près de 10 ans ont ramené de 19 à 15 milliards de francs CFA par an les factures d’électricité de l’Etat.

Des programmes de développement du recours aux énergies renouvelables telles que le solaire et la biomasse résiduelle ont été réalisés ou sont en cours : ils visent à pérenniser le recours à des sources d’énergie qui préservent l’environnement au bénéfice de la santé durable des citoyens.

Options possibles d’atténuations

Un certain nombre d’options d’atténuation ont été mis en évidence dans le cadre de cette étude dans les secteurs de l’industrie, de la forêt, de l’énergie et de l’agriculture.

Industrie

Les options d’atténuation dans ce secteur concernent essentiellement :

Foresterie

Les options d’atténuation analysées dans cette étude concernent principalement :

  1. la reforestation : Elle porte sur la création de nouvelles plantations, l’enrichissement de la forêt et la reconstitution des plantations anciennes. Ainsi à partir du modèle COMAP en conformité avec le plan directeur forestier il sera possible d’atteindre 20% de couverture forestière en 2015, la superficie à re-coloniser serait de 1 800 000 ha ;
  2. la protection des forêts résiduelles: Les données de bases utilisées pour cette option d’atténuation montre qu’avec des actions efficaces de protection on arrivera à protéger à l’horizon 2034, environ 2,5 millions d’ha de toutes dégradations anthropiques ;
  3. la régénération naturelle des forêts dégradées : Elle se fait par l’aménagement des massifs dégradés, sur cette base, environ 1 200 000 ha soit 30% des forêts classées seraient concernées. A ce rythme, on estime que les formations forestières visées seraient de 10 000 ha / an sur l’horizon 1994-2015.
  4. le développement des ceintures vertes autour d’Abidjan, de Bouaké et des principales villes de la Côte d’Ivoire.
Energie

Il faudrait procéder à la substitution du gaz naturel au fuel des centrales de puissance, au recours aux ressources hydroélectriques (barrage de Soubré par exemple et mini-centrales hydroélectriques), enfin il conviendra de recourir à la pré-électrification par énergie photo- voltaïque. Au niveau de la demande, on insistera sur l’introduction des techniques de maîtrise de l’énergie dans tous les domaines concernés, avec la création de l’Agence Ivoirienne de Maîtrise de l’Energie qui doit voir bientôt le jour. Les programmes seront harmonisés pour adhérer aux contraintes environnementales et à celles du Plan de Développement de l’économie ivoirienne.

Agriculture

La stratégie de réduction des émissions de GES dans le secteur de l’agriculture doit être soutenue par une politique d’innovation technique dans tous les sous-secteurs agricoles. Cette politique doit s’accompagner de mesures coercitives pour lutter contre la déforestation, le brûlis, au niveau des activités agricoles et surtout toutes formes de feu de brousse, générateurs de monoxyde de carbone.

Les innovations techniques doivent venir en alternative de l’actuel système de production basé sur l’agriculture itinérante sur brûlis. Les paysans qui en seront les bénéficiaires devront y adhérer et prendre une part très active dans leur mise en œuvre.

Les innovations à proposer devront par exemple viser au renforcement simultané de la fertilité des sols et de leur capacité à stocker le carbone. La conservation et la valorisation des produits agricoles seront également une priorité.

Au terme de l’application graduelle de ces différentes mesures, l’on pourra espérer une réduction annuelle de l’ordre de 10% du volume de gaz actuellement rejeté dans l’atmosphère.

Milieu rural

Des options de gestion des ressources énergétiques s’appliquant intégralement aux collectivités locales ont été élaborés. Traduites en termes de mesures, celles-ci ont pour objet la satisfaction de la demande en énergie compatible avec la préservation de l’environnement (réduction des émissions de GES, des pollutions et du déboisement) par :

Le confort lié au passage à des énergies modernes pour la cuisson et pour l’éclairage marque une très sensible amélioration par rapport aux usages traditionnels (feux trois pierres, fourneaux en terre, fourneaux métalliques type « malgache », etc.). En effet, la fumée est beaucoup moins importante dans le cas de l’utilisation du pétrole lampant et dérisoire pour l’usage butane. L’avènement de l’électricité réduit ces nuisances respiratoires et olfactives à néant.

Milieu urbain

Les principales villes comme Abidjan, Bouaké, Daloa, Korhogo, Yamoussoukro et Abengourou, comptent pour l’essentiel dans le bilan des consommations d’énergie moderne, à savoir les produits pétroliers (liquides et gazeux) et l’électricité. Ainsi, 45% des produits pétroliers et 70% de l’électricité sont consommés par la seule ville d’Abidjan. Cette ville consomme aussi 90% de charbon de bois produit de façon artisanale dans un rayon de 120 km.

Le Gouvernement ivoirien, dans le cadre des mesures de protection des ressources forestières a procédé à la vulgarisation du butane à grande échelle, d’où la diminution des émissions de GES. Il s’agit d’opérer la substitution au niveau des ménages, du butane au charbon de bois.

QUELQUES PROJETS RELATIFS AUX CHANGEMENTS CLIMATIQUES

Projet dans le cadre des activités de mitigation

Economies d’énergie dans les transports Le secteur des transports en Côte d'Ivoire absorbe 70 % de la consommation nationale de produits pétroliers, soit 620 000 tep sur un total de 880 000 tep (données de l'année 1986). Cette proportion reste encore valable aujourd'hui. L'objectif du projet est donc de réduire la consommation énergétique au niveau des flottes de transport.

Une expertise énergétique des flottes de transport s’avère nécessaire pour avoir une idée exacte des différentes flottes de transport en Côte d'Ivoire afin de préconiser des mesures d'économies d'énergie adéquates. Des experts exerçant dans ce domaine réaliseront ces audits.

Une campagne de sensibilisation des usagers en plus d’une formation des chauffeurs et la mise en place d'un plan d'économies d'énergie par flotte et suivi du parc de véhicules sont les mesures qui devront accompagner le déroulement de ce projet.

Le but visé est de réaliser des économies annuelles sur la consommation de l’énergie

La production semi-industrielle des foyers améliorés en aluminium

La contribution du charbon de bois à la déforestation constituera l'un des problèmes majeurs des prochaines décennies selon les conclusions de l’étude du Plan National de l'Energie.

Il s'agit donc de remplacer, à Abidjan et dans les villes de l'intérieur, les foyers traditionnels grâce à une large diffusion de 100 000 foyers de type "MOUSSO TELIA ALU" mis au point par le Bureau des Economies d'Energie.

La cible visée par le projet : 100 000 ménages des principales villes de Côte d'Ivoire.

Pour atteindre cet objectif, les deux problèmes suivants sont à résoudre :

Il faut donc arriver à moderniser le système de production en s'appuyant sur les centres techniques existants (INSET, Centres des métiers) et l'industrie locale. Ce projet permettra de lutter contre la déforestation et l’on pourra avoir 150 000 t de charbon économisé par an. Les opportunités d’investissements dans les domaines de la maîtrise de l’énergie et des énergies renouvelables se retrouvent au niveau des transports. Il en est ainsi également de la promotion des foyers améliorés, du solaire thermique (chauffe-eau), du solaire photovoltaïque et de la valorisation de la biomasse.

Dans le domaine des applications solaires : L’électrification par le réseau électrique de certaines petites localités rurales (entre 50 et 500 habitants) n’étant pas économiquement rentable (faibles revenus annuels, éloignement supérieur à 20 km des lignes de moyenne tension, absence de lotissements, etc.), l’énergie solaire photovoltaïque s’offre comme la meilleure solution, loin devant les groupes électrogènes.

De récents travaux sur l’identification des sites éligibles à un programme d’électrification par le solaire ont montré qu’il existe, en Côte d’Ivoire, 4844 localités dont la population est inférieure à 500 habitants.

Ce projet aura pour conséquence directe de réaliser une économie d’énergie et d’éviter l’installation fortuite des groupes électrogènes à fuel qui contribuent aux émissions de GES

En outre, l’énergie solaire sera utilisée pour l’adduction d’eau potable et pour l’utilisation des chauffes eau.

Valorisation de la Biomasse : Comme indiqué plus haut, il existe un important portefeuille d’études approfondies réalisées pour le BEE, entre 1989 et 1992 qui sont immédiatement utilisables dans le cadre de la recherche des voies et moyens pour une meilleure valorisation de la biomasse.

De même, la Banque Mondiale a initié un programme de valorisation de la biomasse à des fins de production d’électricité avec possibilité de cession au réseau national. Il y a également dans ce domaine, des projets de gazogène et de valorisation des déchets ménagers (en étude) qui pourraient enrichir sous peu le portefeuille.


VertigO vol 3, no 2