Navigation – Plan du site

Dossier : Le désert et la désertification : impacts, adaptation et politiques

Le pouvoir des savoirs : enjeux et impacts des concepts sur le développement rural pour le Sahel nigérien

Mehdi Saqalli

Résumés

L’article présente dans le cas du Niger un état des lieux des conceptions des acteurs de développement. Face à un monde rural en plein bouleversement, les opérateurs intègrent difficilement les évolutions des paradigmes sur le développement rural : un raisonnement malthusien, combiné à une conception des villages comme des systèmes fermés et des stéréotypes sur les modes d’organisation des familles favorisent une représentation des communautés qui limite de fait la palette, l’ampleur et l’impact réel des actions. Pourtant, les modes d’enquête, comme les protocoles de négociation et de répartition des pouvoirs existent et sont proposés. La famine de 2004-2005 a illustré l'écart entre objectifs affichés et pratiques par la difficulté d’élaborer des outils d’action au-delà du volet diagnostic. L'article s'achève par un plaidoyer pour assumer le volet politique inhérent à toute action de développement local.

The article presents for the Niger case a review of the conceptions used by development operators. Facing a rapidly evolving rural society, operators have difficulties to conceal their own conceptions, their obligations regarding their fundraisers and diagnosis methods and results. A neo-Malthusian vision, associated with a conception of villages as closed systems and stereotypes on family organizations are altogether elements that actually limit the palette, the size and the real impact of development actions. Yet, investigation methods already exist and are proposed as well as protocols of negotiation and distribution of powers. The famine of 2004-2005 illustrated this gap by the difficulty to elaborate tools of action beyond the diagnosis stage. The article ends with an advocacy for assuming the inherent political implications of any local development action.

Texte intégral

Introduction

1Depuis les catastrophes humanitaires des années 70, la chute des revenus de nombre d’Etats dans les années 80 et les ajustements structurels des années 90, l’Afrique sub-saharienne reste le terrain d’essais de toutes les approches de développement. L’impact de ces actions est en général considéré comme très faible. Le revenu de l’Afrique sub-saharienne aurait diminué au cours des deux dernières décennies (Shapouri et Rosen, 1999; Solagral, 2000), ce qui a favorisé l'extension d'un certain afropessimisme, apparu dans les années 70, en particulier au sein d’instances internationales d’appui au développement1.

  • 1  Pour René Dumont, en 1962 « L'Afrique noire est mal partie » et elle est en 1980 (...)
  • 2  Cette situation de mise en retrait brutale est bien sûr variable : ainsi, un conflit armé qui (...)

2Ce constat d'apparent échec n'a pas entraîné un abandon de la région par les opérateurs de développement mais a au contraire permis la multiplication d’instances chacune testant son idéologie de développement. Quatre carences en terme de contrôle des actions de ces opérateurs ont permis cette multiplication. Premièrement, depuis les années 80, à la différence de ce qui se passe en Asie et à dans une moindre mesure en Amérique latine, les États ont été de fait longtemps absent ou alors présents à titre de témoin2 (Courade, 1989). Cette absence est renforcée par la lenteur du développement d'une société civile.  La deuxième carence est la coordination entre les agences de développement et les bailleurs de fonds. La multiplicité des procédures de mise en place d’un projet, propres à chaque institution et particulièrement complexes induit une inégalité des propositions de développement entre elles face aux possibilités de financement. Des efforts sont cependant réalisés pour coordonner les procédures entre les grandes agences nationales (USAID, DED-GTZ, AFD, SNV, etc.) et celles des Nations Unies, en particulier dans les politiques de recherche et d'alerte précoce pour faire face aux crises alimentaires. Troisièmement, on peut identifier le recul historique de la participation et de l'intégration des populations dans leur propre développement, par un oublie  que depuis date de la première Guerre mondiale ces concepts ont été utilisés et envisagés sous des vocables variés (Chauveau,1994). Finalement, la dernière carence concerne le contrôle par l'efficacité, hors le respect des procédures des bailleurs de fond. Les suivis-évaluations sont de fait rarement suivis de sanctions, vu l'obligation de poursuivre les engagements sur les objectifs initiaux d'un projet et la nécessité d'en faire vivre ses salariés.

  • 3  Méthodes de diagnostics et méthodes d’action ne sont pas directement reliées. Elles (...)

3De fait, le système du développement fonctionne actuellement comme un marché où la multiplicité des demandes de financement d’actions, résumées sous le vocable générique de "projet" se heurte à la surdétermination des conditions de l’offre de financements. Adéquation des objectifs aux souhaits du bailleur, nature des partenaires, origine du pays financeur ou de l’instance internationale, origine du pays de la demande et volume du financement sont des paramètres de décision autrement plus importants que la pertinence de l’action projetée dont l’évaluation ne peut souvent ne s’envisager qu’ex post. Ces expériences sont souvent décrites dans nombre de documents comme une évolution progressive, où les paradigmes et les manières de faire les plus brutales ont évolué selon un schéma de sélection naturelle vers des approches de plus en plus "proches du terrain", de plus en plus "collées à la réalité" et de plus en plus "participatives". Il est ainsi récurrent de voir écrit ou présenté des approches qui se prévalent de ce que les approches précédentes avaient omis, à savoir une meilleure compréhension de la réalité et/ou une meilleure approche de l’action de développement3.

4Force est cependant de constater que si évolution il y a eu, elle n’a pas été accompagnée de l’élimination des anciennes formes et qu’au contraire, toutes les approches coexistent : on peut retrouver au sein de réunions de "développeurs" des représentants d’agences de développement aux conceptions les plus diverses et agissant parallèlement dans la course aux bailleurs de fonds. Tant qu’il se trouvera des bailleurs pour financer une action la plus incongrue soit-elle, celle-ci persistera. On pourra ainsi décrire l’histoire des actions de développement comme un processus biologique où la sélection naturelle n’a que peu d’effets, car l’organisation générale du financement de l’aide au développement, par la multiplicité des effets de niche, permet la survie de toutes les approches. Plutôt qu’un marché où différent produits se concurrenceraient pour la réalisation d'un objectif, il s’agirait dès lors plutôt d’une foire-exposition, au sens où chaque opérateur se doit de développer sa "vitrine" à la recherche de bailleurs plus ou moins impliqués.

  • 4  Organisations Non Gouvernementales

5Les conceptions de ces agences de développement se définissent par des présupposés ; ceux-ci apparaissent la plupart du temps dans les termes de référence de leurs programmes d’action comme justification conceptuelle. Il n’est pas pertinent de procéder à une attaque en règle de tout positionnement au nom d’une éthique et d’un idéal inaccessible dans la pratique. De toute façon, les propositions de développement, les termes de référence présentés sont pour la plupart destinés à des bailleurs de fond et à ce titre n’échappent pas souvent à la "langue de bois". C’est dans la pratique de tous les jours, dans la complexité des relations entre les acteurs/participants d’un projet que les véritables nuances et positionnements apparaissent. Il est cependant intéressant de procéder à un inventaire de ces positionnements et d’en relever les évolutions. Cependant, vu la très grande variabilité des actions de développement et le fait qu’il n’existe pas à notre connaissance de recensement des ONGs4 et de leurs pratiques au niveau local, nous nous limiterons aux postulats et pratiques associées tels qu’ils sont décrits au sein de la communauté de recherche liée au Niger, source majeure de légitimité dont se prévalent les propositions de développement.

6Ainsi, l’objet de cette communication ne sera pas de décrire l’évolution progressive vers la manière la meilleure de "faire du développement" en lien avec l’expérience du Niger, ce qui serait prétentieux, mais comme une présentation de différents paradigmes de recherche et des pratiques associées. Nous présenterons en premier lieu une description certes rapide du Sahel nigérien. Nous poursuivrons par l’exposé de positionnements fondamentaux : le premier sur les conceptions de l’origine du changement structurel qui affecte le pays, le deuxième sur l’inadéquation des postulats sur l’unité familiale. Enfin, nous discuterons des positionnements pris dans les réponses à la crise alimentaire récente de 2005, puis des positionnements quant aux méthodes de recherche d’informations et de mise en place des actions de développement.

Le Sahel nigérien : vivre en situation de limites

7Le Niger est un vaste pays (1 227 000 km²) sahélien et désertique d’Afrique de l’Ouest, sans accès à la mer. Il est bordé à l’ouest par le Burkina Faso et le Mali, au nord par la Libye et l’Algérie, à l’est par le Tchad et enfin au sud par le Bénin et le Nigeria. Le pays peut se décrire selon différentes bandes latitudinales, de plus en plus désertiques vers le nord et le Sahara. Hors le massif de l’Aïr où se maintient une agriculture oasienne combinée à un élevage extensif, un commerce et un tourisme en expansion, le nord du pays est désertique. La bande méridionale large de 300 km se répartit en une partie nord, de climat saharo-sahélien, où l’agriculture pluviale est très aléatoire et où l’élevage transhumant et/ou nomade est dominant, et une partie sud, de climat soudano-sahélien, où l’agriculture pluviale, aux productions moins erratiques, est pratiquée (figure 1). Ici se concentre 90% de la population. 85 % de cette population vit en milieu rural et est considéré comme vivant essentiellement des activités agricoles (agriculture, horticulture, arboriculture, élevage, prélèvements de bois et de produits forestiers non ligneux), sur un territoire qui ne représente que 15% du territoire total, soit environ 200 000 km². La pluviométrie est sud de 200 mm au nord de la zone cultivable eet 700 mm au sud du pays.

Figure 1. Systèmes agraires du Sahel nigérien

source: FMA

Image1Agrandir
  • 5  Soulignons le fait que le Niger présente le caractère singulier d’un multiple passé très (...)

8Cette zone "pluviale" est occupée par les trois plus importants groupes ethniques du pays : les Zarma-Songhay dans l’ouest (3 millions) le long du fleuve Niger, les Hausa au centre (6 millions) et les Kanuri (1 million) à l’est jusqu’au lac Tchad (Tandia, 1991). Il faut compter aussi environ un million de peuls, originellement éleveurs semi-nomades transhumants ou nomades et se sédentarisant progressivement, répartis schématiquement sur cette zone et la zone pastorale. Enfin, environ un demi-million de Touaregs vivent surtout dans la zone montagneuse de l’Aïr5. On n’oubliera personne en citant les Gourmantché près du Burkina Faso et les Tedda/Toubou près de la frontière tchado-libyenne. Les 12 millions d’habitants ont le malheureux privilège de combiner le taux de fertilité le plus élevé du monde (7,46 enfants par femme), le rang le plus bas dans le classement des Indices de développement Humain (IDH) du PNUD, et un des plus bas niveaux de revenu par habitant en parité de pouvoir d’achat ($900).

9L'agriculture dans la zone dite "pluviale" est l'activité principale en terme d'occupation de l'espace et de force de travail et ce, uniquement pendant la courte saison des pluies, de juin à octobre (Abdoulaye et Lowenberg-DeBoer, 2000). La céréale principale est le mil (Pennisetum glaucum L. Br.) souvent associé avec le niébé comme légumineuse (Vigna ungiculata L. Walp) (Ada et Rockström, 1993). Cette agriculture est extensive et anti-risques (Erenstein, 2006): Avec une pluviométrie contraignante et aléatoire et des sols très peu pourvus à la base en éléments minéraux (Sangaré et al., 2001; Gérard et Buerkert, 2001) mais aussi du fait que jusqu'à récemment, la ressource rare était plus la main d'œuvre que la terre, les agriculteurs défrichent puis sèment beaucoup plus de surface qu'ils n'en récolteront (Loireau-Delabre, 1998; Graef et Haigis, 2001) et cherchent aussi à disperser leurs parcelles dans l’espace notamment selon la distance au village et la qualité des sols (Seybou, 1993), mais aussi pour diminuer les effets de la variabilité spatiale des pluies.

10Plusieurs cultures destinées à la vente sont pratiquées dans le sud du pays (surtout en zone haoussa, le long de la frontière avec le Nigeria et de la route transnationale ouest-est) (Pini et Tarchiani, 2007). Si l'arachide est en perte de vitesse, il a progressivement été remplacé par le Niébé, surtout dans les zones sableuses mais aussi par le souchet destiné à l'industrie pâtissière au Nigeria (Fauquet, 2005).. L'oignon est la culture irriguée qui connaît le plus grand succès, grâce en particulier à sa variété "violet de Galmi" qui se conserve longtemps et résiste bien au transport (Raynaut, 1989; English et al., 2007).

11Les hommes migrent saisonnièrement pendant la saison sèche, d’octobre à mai pour trouver à travailler dans les grands bassins commerçants et d'emploi du Golfe de Guinée (Timera, 2001). On peut estimer que de 30 à 80% des hommes en âge de travailler partent en migration, selon les régions (Reardon, 1994). Dans toute la zone Zarma-Songhay, cette migration est orientée vers le Ghana et la Côte d’Ivoire. Dans la zone Hausa, le flux saisonnier est quasi totalement orienté vers le Nigeria, pays voisin et également hausaphone (Rain, 1999). Les transferts financiers de ces "exodants" représentent des apports importants pour les familles restées sur place, de l'ordre de 8 à 30 €/hab./an selon les études (Luxereau et Roussel, 1997; Loireau-Delabre, 1998; Tahirou, 2002; Mounkaïla, 2003; Saqalli, 2006; Harragin, 2006). Ces transferts auraient pour fonction essentielle de couvrir les besoins alimentaires que l'agriculture ne couvre plus de manière chronique (OSS-ROSELT-Niger, 2001a), d’assurer les dépenses pour les cérémonies (mariages et fêtes religieuses) et de représentation.

  • 6  Le terme Sahel désigne en arabe un rivage, au sens de limite d'habitation par rapport à un (...)

12Le pays connaît depuis les années 70 des crises alimentaires à répétition. Il est dans une situation de "limite"6 : Limites structurelles ethno-historiques : le Niger, certes musulman de manière homogène, est culturellement à la frontière entre les mondes soudanais et arabo-berbère. Limites structurelles d'usages de l’espace : au croisement des zones à vocation pastorale et agricole. Limites structurelles de potentialités d'utilisation des ressources : la recherche de la satisfaction des besoins agricoles se heurte au caractère limité et très aléatoire, dans le temps et dans l'espace des pluies et au caractère fragile des sols. Limites structurelles économiques : l’économie est basée essentiellement sur le commerce de frontière avec son voisin et l’exportation de l’uranium. Enfin, limites conjoncturelles: Les systèmes agraires du Niger sont actuellement perturbés par des facteurs exogènes (croissance démographique sans précédent, sécheresses à répétition).

13Doit-on dès lors penser que les agrosystèmes villageois sahéliens, aux limites d’un système agraire ancien alors équilibré, sont en voie d’effondrement généralisé (Jouve, 2003; de Rouw et Rajot, 2004)?

Démographie et transitions agraires

Sans intervention, une dégradation irréversible ?

14Cette approche par crise se retrouve certes beaucoup plus souvent dans la littérature portant sur de la recherche agronomique (quelques exemples: Quin'ones et al. (1997), Buresh et al. (1997), Ahmed et al. (2000), Breman et al. (2001) ou Gérard et al. (2007)7) ou des documents de projets. Ce raisonnement est appuyé par un paradigme extrêmement puissant et ancien, réactualisé grâce au développement de l’écologie mais aussi par les apports de la micro-économie, à savoir l’approche néo-malthusienne de l’interaction des hommes et de la Nature (Ehrlich et Luib, 1997; Seidl et Tisdell, 1999; Becker et al, 2005): L'accroissement démographique au Niger est très rapide et de plus ne faiblit pas, contrairement à de nombreux pays en transition démographique : selon Guenguant et al. (2002), la population du pays devrait atteindre près de 50 millions d’habitants en 2050. La réponse à cette explosion qui date surtout d’après la deuxième guerre mondiale serait l’extension des surfaces cultivées8. L’explication en est simple : la ressource rare était alors le travail, et la terre abondante. Etendre les surfaces cultivées augmentait très fortement la productivité par heure de travail aux dépens du facteur terre. De plus, avec les nouveaux villages apparus, il était bon pour chaque paysan de s’approprier le plus de terrain possible en prévision du moment où il n’y aurait plus de place. D’autre part, les groupes d’usagers rentrent en conflit pour le partage de ces mêmes ressources, entre agriculteurs et éleveurs (Lycklama, 2000; Turner et al., 2005) et entre agro-éleveurs (Luxereau et Roussel, 1997; Yamba, 2005). Certains peuvent craindre une multiplication de ces conflits9, appuyés en cela par la théorie réactualisée de la "tragédie des communs" (Hardin, 1968) : face à une limitation des ressources, tout acteur tend à s’emparer et utiliser les ressources avant les autres. Il en serait résulté alors une diminution générale du couvert arboré pendant cette expansion et une diminution de la fertilité moyenne des champs et ce, en particulier dans les zones de forte densité démographique (Thébaud, 1996; Mainguet et Da Silva, 1998; Schlect et Buerkert, 2004). Les grandes sécheresses de 1973 et de 1984 ont lancé l’alarme : Les paysans détruisent leurs ressources naturelles en étendant leurs champs, en coupant du bois de chauffe et en faisant pâturer leurs bêtes, car ils n’ont pas le choix pour survivre (Reenberg et Paarup-Larsen, 1997; Loireau-Delabre, 1998). Ils ne connaissent pas ou n’ont pas accès pour des raisons sociales et/ou économiques à d’autres techniques plus intensives ou moins destructives qui ne détruiraient pas l’environnement (Baidu-Forson, 1999).

  • 7  Le préambule de cet article et de son résumé est illustratif: "Low soil fertility is (...)
  • 8  De 11,5 millions d’ha en 1999, les surface cultivées sont estimées à 12,6 millions d’ha (...)
  • 9  Très récemment en octobre 2006, environ 4 000 pasteurs « mahamides » sont annoncés comme (...)

15Face à ce risque de répétition de crises de sous-production, éventuellement aggravé par les effets d’un changement climatique, et de crises sociopolitiques entre groupes pour les mêmes ressources qui se réduisent, quelles sont les alternatives ? Le raisonnement à la suite du précédent incite à proposer l’introduction de nouvelles techniques qu’il s’agit certes de tester et de valider au préalable; elles seraient propres à modifier le système de production des agriculteurs et des éleveurs en vue d’augmenter la productivité de l’agriculture. Un appui en terme de crédit et de formation doit permettre cette intensification du système (Tahirou et Sanders, 2006)

16Ce raisonnement est à la base de la "révolution verte" des années 60 en Inde. Au Niger, les techniques pourraient avoir deux origines, soit exogènes, soit locales, pour quatre objectifs :

    • 10  Le "zaï", venu plutôt du Burkina Faso, est une technique de re-semis par défonçage (...)
    • 11  Les demi-lunes sont des creux de cette forme, perpendiculaires à la plus grande pente, et qui (...)
    • 12  Appelée aussi "mulching", c’est une couverture de paille protégeant les sols de (...)
    • 13  Cela consiste à défricher une jachère par exemple, mais en en protégeant les rejets des (...)
    • 14  Il s’agit de semer et de sarcler les champs mais sans retourner la terre pour éviter (...)

    Préserver les ressources naturelles : Localement, certaines techniques sont connues et pratiquées comme le "zaï"10 les semis en "demi-lune"11, le paillage12, le défrichement amélioré13, le sans-labour14, etc. Elles permettent de remettre en culture ou de réenforester des sols indurés et incultes. Cela peut être associé à d’autres pratiques extérieures, comme des haies brise-vent, la reforestation, etc. Toutes ces techniques ont cependant un coût en travail.

  • Augmenter la productivité de la terre : l’utilisation maximale des déchets de culture ou de maison, la gestion du parcage et donc d’un élevage plus intensif (développement des moutons "de case"), le maintien d’une jachère, voire le développement de cultures herbeuses régénératrices des sols et l’introduction d’intrants (engrais, traitements phytosanitaires) sont des méthodes connues. Elles sont encore plus gourmandes en main d’œuvre, car l’effort doit être continu.

  • Augmenter la productivité du travail : hors l’extensification qu’ont déjà pratiqué et pratiquent toujours en certains endroits les paysans aux dépens de la terre, seul le passage par le capital est envisageable, par l’utilisation de matériels agricoles et l’usage d’intrants (engrais, inputs destinés à la protection des cultures) ou de variétés "améliorées" coûteux et risqués.

  • Augmenter la productivité de l'élevage: Lorsqu'on regarde le bilan des activités de recherche/ développement lancé au Niger (Bernus, 1994), l'effort a porté sur l'amélioration sanitaire, qui est actuellement en réduction du fait de la diminution des soutiens financiers (arrêt de la subvention des médicaments faisant augmenter leur prix et les rendant inaccessible), sur la suppression des maladies parasitaires (grâce à la réduction de l'onchocercose mais aussi des grandes crises de 1973 et 1984, les grandes transhumances diminuent en volume (Fernández-Rivera et al., 2005) et changent progressivement de sens, passant d'une transhumance de saison humide vers le Nord vers une transhumance de saison sèche vers le Sud (Boutrais, 2007), sur "l'amélioration" du bétail selon des critères discutables (volume sur pied, poids carcasse) et enfin sur du "range managing" basé sur des mises en défens de "camps" dont l'échec a été patent (Achard et Chanono, 2006).

17Ces propositions ont rencontré peu de succès, sauf en certains endroits et sur certains points. Dès lors, il s’agit de savoir pourquoi ce relatif échec, et où certains idées ont fonctionné ou ont échoué.

Réactivité, pluriactivité, multi décision

Une capacité d’adaptation à reconnaître

18Quelques failles dans le raisonnement précédent laissent apparaître des hypothèses. Premièrement, le bien commun que souhaite améliorer ces propositions de développement n’est pas la somme des biens individuels, comme justement le montrait Hardin. Il est difficile de motiver quelqu’un à faire des efforts pour une collectivité quand il a déjà des difficultés à assurer le quotidien. La participation apparente des populations à des actions de reboisement par exemple peut dès lors se doubler d’une poursuite cachée du défrichement. Cependant, Hardin confondait bien collectif et bien en accès libre. Dès lors qu’il y a possession par un groupe, il y a gestion. Une privatisation complète du foncier est inenvisageable vue l’immensité des inégalités quelle engendrerait. Toute tentative de protection ou de régénération de ressources naturelles signifie dès lors nécessairement un renforcement des institutions légitimes en charge de leurs gestions15 ou "empowerment", avant la mise en place de ces mesures de gestion. D'autre part, le foncier nigérien fonctionne plutôt à titre privé, depuis la disparition du pouvoir des chefs de terre pendant les périodes pré-coloniales et coloniales. Les chefs n'ont plus vraiment d'autorité sur les terres de culture pluviale; les terres d'irrigation (terres de goulbi et des vallées (Niger, Tarka, Komadougou, etc.), jardins maraîchers des dallols, périmètres irrigués autour des mares interdunaires de Gouré, etc.) fonctionnent selon un schéma de propriété foncière: il existe d'ailleurs un marché de la terre d'autant plus vivace que les productions et l'accès aux marchés sont intéressants. Seuls les parcours et les zones cultivées pendant la saison sèche en vaine pâture correspondrait au schéma des communs de Hardin. Vu l'expansion des zones cultivées, ils représentent un espace limité.

  • 15  Dès lors, la mise en place de structures nouvelles, certes éventuellement plus équitables (...)

19Deuxièmement, avant l’explosion des villages qui a précédé l’explosion démographique, les systèmes de production des villages du Sahel Nigérien étaient fort intensifs sur la terre : les gens ne pouvaient se permettre de s’éloigner des villages de peur des enlèvements par razzia et des guerres (Olivier de Sardan, 2003). Dès lors, ils devaient gérer leur survie avec le peu de terre réellement accessible. On en déduit que, même si les générations ont passé, les populations ont pu gérer un système intensif.

20Troisièmement, l’argumentation précédente revient à nier les avantages de cette extensification sur un siècle, certes relatifs mais qui ont été la voie la plus aisée pour nourrir (plus ou moins bien) dix millions de personnes supplémentaires au Niger en moins d’un siècle (Raynaut et al., 1997) et ce sans apports extérieurs. D’autre part, la diminution de la fertilité moyenne des champs ne signifie pas la diminution en moyenne de la fertilité de tous les champs : comme les paysans s’étaient d’abord tout logiquement installés sur les meilleures terres, leur extension a de fait inclus des terres marginales, à la base plus mauvaises, faisant baisser cette moyenne, sans que cela ne signifie quoi que ce soit en terme de gestion de la fertilité. Par conséquent, les systèmes agraires ont bien réagi à l’explosion démographique et ce, en optimisant bien les facteurs les plus contraignants et en particulier le travail (Saqalli, 2002). Les populations sont bien capables de modifier et d’adapter leurs systèmes agraires.

21Enfin, pour reprendre ce que Bradley écrit dans sa préface de "Sahels, diversité et dynamiques des relations sociétés/nature" (Raynaut et al., 1997), il n’y a pas "une agriculture sahélienne mais un grand nombre d’agricultures situées dans la région sahélienne", chacune étant une combinaison circonstanciée de l’organisation sociale (degré de centralisation du pouvoir, nature de la stratification sociale, mode de circulation et distribution des richesses, bien avant l’origine ethnique), du mode d’utilisation des ressources (rôles respectifs de la terre et du travail) et de l’état/dynamique des ressources elles-mêmes. La carte des densités humaines présentée dans ce livre ne coïncide que fort peu avec les potentialités estimées des sols, mais beaucoup plus aux contingences historiques : les lieux les plus denses du Sahel sont en gros les lieux qui ont eu le moins à souffrir de guerres et de razzias. On ne peut envisager un déterminisme simple entre milieux naturels et état de la société.

Agriculteurs et paysans

22Au cœur du développement se trouve le postulat de rationalité du paysan. On considère habituellement que cette rationalité se manifeste par la cohérence de l’ensemble des prises de décisions de l’agriculteur, qui aboutit à la mise en place d’un système de production spécifique. Ce dernier est issu de la confrontation des objectifs de la famille d’une part, et de l’appareil de production dont elle dispose d’autre part, étant donné la perception qu’a l’agriculteur de l’environnement socioéconomique et du milieu physique au sein desquels il est plongé. Le système de production apparaît ainsi comme étant le domaine de cohérence de la rationalité de l’agriculteur. Des contradictions peuvent cependant se faire jour entre les possibilités de mise en place d’un système de production et les objectifs de la famille.

23L’assimilation système de production – domaine de cohérence des prises de décisions renvoie à la situation particulière, fréquente dans les systèmes de production motorisés, d’agriculteurs mono actifs se trouvant à la tête de ce qu’il est convenu d’appeler une exploitation agricole. Le concept de système de production agricole s’applique ainsi alors à l’échelle de l’exploitation. Mais cette conception perd de sa valeur en particulier au Niger. Milleville (1989) remarquait pour le Sahel dans son ensemble: "Dans bien des cas, les systèmes de production agricole ne constituent que des composantes de stratégies paysannes ou rurales élargies, qui débordent non seulement de l’activité agricole mais également de la sphère locale".

24Or, la pluriactivité est une constante structurelle des sociétés sahéliennes. Son existence n’a pas pour origine des stratégies de contournement d’une crise globale (mondialisation, bouleversements sociaux, fléaux écologiques). C’est une caractéristique originelle des sociétés rurales au Niger (Paul et al., 2003). En d’autres termes, on ne peut comprendre le fonctionnement du système de production, et notamment l’allocation des ressources familiales à l’activité agricole (travail, capital financier et capital technique, foncier), sans référence aux autres activités. Ce système d’activité constitue le véritable domaine de cohérence des pratiques et des choix de l’agriculteur, y compris pour ceux qui se traduisent par la mise en place du système de production. Le travail agricole n’y est qu’une des formes de valorisation du facteur travail pour lesquelles la famille opte à partir d’une palette d’activités possibles.

25D’autre part, les stratégies familiales ne se comprennent qu’à la lumière de stratégies plus larges. Le domaine de cohérence des prises de décisions n’est pas forcément fondé uniquement sur un raisonnement agro-économique de répartition des ressources entres les différentes activités. Ainsi, Harragin (2006) citaient les valeurs suivantes d’une série d’enquêtes réalisées en zone hausa au Niger central lors de son évaluation de la famine de 2005 (Tableau 1).

Table 1. Nature des sources et des sorties des revenus familiaux (Harragin, 2006)

  • 16  Chaque mariage, selon nos propres enquêtes, revient à environ 1 150 hors le douaire à (...)
  • 17  La Tabaski ou Aïd-el-kébir est l’occasion d’achats de moutons à des prix 5 à 6 fois plus (...)

Sources de la nourriture

Dépenses %

Agriculture

67 %

Nourriture

48 %

Cadeaux, dons

21 %

Mariages16 et fêtes religieuses17

41 %

Emprunts

10 %

Intrants agricoles

 5 %

Artisanat

 2 %

Habillements

 3 %

Taxes

 2 %

Santé

 1 %

26Avec une part si importante accordée aux échanges sociaux, on comprend qu’il n’est pas envisageable de restreindre l’analyse des stratégies familiales sur la base de ses activités, mais plutôt sur la base de ses besoins primaires et sociaux. Or, de très nombreux opérateurs de développement au Niger, malgré des changements employés dans le vocabulaire des propositions d’action envoyées aux bailleurs, s’ancrent dans une conception d’un système de production agricole cohérent en soi. Cet écart comme le dit bien Lavigne-Delville et al. (2001) "n’est pas un artéfact lié aux problèmes de modernisation d’agricultures "traditionnelles", mais un problème structurel lié aux rapports entre "praticiens" (ceux qui ont une pratique technique liée à leur profession, qui leur impose de prendre en compte, au moins empiriquement, une large somme de paramètres, et disposent d’une expérience empirique des processus - même si leur interprétation n’est pas toujours validée par la science) et les techniciens, qui se fondent sur un savoir technoscientifique construit en fonction des modèles interprétatifs orientés par leur discipline". L’appui aux différentes activités extra-agricoles, en particulier via les approches genre, est cependant une réponse à cette pluriactivité.

La famille souple

27La recherche et le développement prennent très souvent pour base l’unité familiale (CARE, 2002; Marou, 2005; Fraslin et al., 2005; Badamassi, 2006). Cela signifie une hypothèse tacite : la famille possède aussi sa cohérence propre. La notion de dynamique et de conflits est actuellement bien acceptée dans l’analyse des enjeux sur le partage des ressources, comme lors des conflits sporadiques mais récurrents entre agriculteurs et éleveurs lors des transhumances (Lycklama, 2000) ou sur le foncier (Luxereau et Roussel, 1997). Cependant, cette notion de dynamiques divergentes et d’un ensemble de logiques individuelles au sein de la famille, pas obligatoirement cohérentes mais pas forcément non plus antagonistes, doit aussi être envisagée pour la famille. Elle l’est certes pleinement dans les disciplines anthropologiques et psychologiques, mais, pour des raisons de simplification, elle est abordée plus difficilement dans des approches concernant des objets d’étude d’échelle plus grande comme un terroir ou un système de production. Cette échelle est pourtant celle adoptée par le développement au travers des projets. Turner (1999) souligne l’omission de facteurs abordés dans les études sur les villages dès lors que l’approche devient régionale : la stratégie individuelle des femmes accumulant du petit bétail aurait selon lui un impact croissant sur les ressources naturelles et la régénération de la fertilité à l’échelle régionale, dépassant celui des transhumances en déclin.

28Dès lors, il s’agit de choisir l’unité la plus pertinente pour la recherche ou l’opérationnalité, une unité qui, en tout cas, constitue une structure englobante ad hoc permettant d’expliquer le phénomène ou l’organisation observés. Ces unités peuvent alors être considérées comme des structures explicatives, construites dans le but unique de constituer un cadre de lecture propre au système de pensée des chercheurs et des opérateurs du développement et à destination du même public. En aucun cas, et de même qu’une carte, ils ne constituent la réalité. Plusieurs concepts ont coexisté dans l’approche d’une unité capable de correspondre aux termes de l’unité d’exploitation, de l’unité de décision ou de l’unité de gestion. Selon les endroits et les systèmes d’activité par rencontrés, l’accent va être placé sur une de ces échelles. Ces unités se heurtent à la pluralité des échelles de décision (chef de famille et membre de la famille dans la gestion de parcelles individuelles), de gestion (un membre de la famille gère le troupeau familial, mais c’est la famille qui bénéficie des différents types de revenus) mais aussi de la pluralité des activités (ateliers différents agriculture, élevage, mais aussi activités agricoles et extra agricoles) et de la pluralité des objectifs des différents membres de la famille. Vu la diversité existante des systèmes d’activité, quelle que soit l’unité prise, elle se heurtera à des exceptions quant à la répartition des activités, des décisions et des tâches à réaliser pour ces activités entre les membres de la famille. Gastellu (1980) souligne cet aspect dans son article justement intitulé "Mais où sont donc ces unités économiques que nos amis cherchent tant en Afrique?". D’autre part, c’est présupposer des règles sociales de contrôle interne qui ne sont pas forcément effectives. La conception méditerranéenne de la famille repose sur l’omnipotence du Pater familias, compensée quelque peu par l’existence de règles d’héritage. Cette conception s’étend au Niger avec l’imprégnation dans les mœurs et le recours croissant comme référence des valeurs musulmanes en particulier en zone urbaine. Cependant en zone rurale dans ce pays, le chef de famille a plus souvent un rôle de représentation vis-à-vis de l’extérieur très important, un rôle d’équilibrage entre les membres de la famille et une fonction de garant de la pérennité du groupe. Mais son autorité "absolue" ne s’exercerait que lors de conditions "limites" (soudure, famine…), et serait réduite en période sans urgence. Même dans ce cas, la famine de 2005 a souligné l’écart entre la situation nutritionnelle des hommes et des enfants des mêmes familles (Médecins Sans Frontières, 2005; Harragin, 2006). D’autre part et pour certaines zones (les zones zarma en particulier) certaines fonctions plus à risque ne sont pas simplement "laissées de côté" par les aînés mais reprises de manière quasi officielle par les femmes et les cadets, chacun avec ses objectifs (pour les unes, une fonction monétaire, pour les cadets, un rôle d’affirmation sociale, par le mariage en particulier) et ses stratégies (commerce et maraîchage, migration et commerce).

29Certes, cette balance des pouvoirs est actuellement remise en cause pour diverses raisons religieuses et sociales. Cependant, en plus de sa meilleure correspondance aux faits en milieu rural, l’idée de séparer les sphères de décision des membres d’une famille en sphères juxtaposées et en interconnexion, peut être envisagée pour une meilleure opérationnalité du travail : elle permet de mettre en lumière des diversités de stratégies non visibles si on s’en tient à l’idée du chef de famille seul décideur.

Une remise en cause locale du raisonnement néo-malthusien

30Le Sahel nigérien est l’objet de changements sociaux et de pratiques qui accentuent cette nécessité de repositionnement : Ces changements sont apparus plus tôt au nord Nigeria voisin, dans les années 50. Ils ont été décrits et expliqués par Ester Boserup (1965) : elle y a constaté à l’époque que, face à l’espace fini, la plupart des paysans se sont orientés vers l’utilisation de plus en plus intense de tous les résidus, de culture, d’élevage, de brousse ou de ménage, pour maintenir les sols. Le nombre d’arbres a augmenté. Le petit élevage, plus efficace dans l’usage des végétaux, au cycle beaucoup plus rapide et nécessitant un moindre investissement, est devenu dominant dans le cheptel des familles face aux bovins, pourtant source de prestige. Les activités agricoles et non agricoles se diversifiaient. L’origine en est la meilleure disponibilité en main d’œuvre, du fait de la croissance démographique pourtant si décriée. Cela a créé des possibilités d’intensification et de diversification, et l’augmentation du marché local pour la même raison a permis une plus grande facilité d’écoulement pour les productions locales. Dès lors cela signifiait que cette transition agraire pouvait être une chance. Plus encore, certaines modalités de ce même développement ne pouvaient être réalisées que par la présence d’une forte densité de population. Depuis, la population du plateau Hausa au Nigeria a atteint 300 hab./km² (Tiffen, 2001). Le phénomène s’est maintenu et les niveaux de fertilité des sols, le nombre d’arbres et le cheptel a augmenté (Harris, 1998).

31Au Niger, certains indicateurs montreraient la capacité des sols, à la fertilité initiale basse, de se maintenir et de se régénérer plus vite que prévu. Globalement, les rendements agricoles moyens ont certes stagné sur les vingt dernières années (Mathieu, 1998; La Rovere, 2001) mais cela signifie aussi qu’ils n’ont pas diminué malgré tout. Le phénomène constaté au Nord Nigeria est maintenant observé depuis les années 80 dans les zones de forte densité du pays, c’est-à-dire une grande partie de la zone frontalière du Nigeria : la population y atteint en certains points 200 hab./km² et les pratiques plus intensives s’y généralisent (Mortimore et Harris, 2005). Selon le raisonnement boserupien, l’étape de dégradation de l’environnement devrait évoluer vers des comportements orientés vers une meilleure protection et une meilleure intégration des ressources naturelles.

  • 18  Au Niger, selon les régions on pourra différencier les cultures vendues en cultures de rapport (...)
  • 19  Mode de gestion de la fertilité ancien, qui consistait pour un agriculteur à payer, en (...)
  • 20  Couloirs larges destinés au passage des troupeaux, pour éviter les destructions des champs.

32Au-delà de ces changements au niveau spécifiquement agraire, c’est toute la société qui bascule progressivement selon un autre régime et un autre mode d’organisation, ce qui n’est pas sans conséquences: En terme de règles agraires, l’apparition de la pression foncière due à l’extension du marché des cultures de rente solvables18 et des besoins familiaux a poussé certains propriétaires à reprendre certaines terres aux familles qui les leur avaient emprunté. Si l’emprunt de terres était courant, il est en forte diminution et on prête de moins en moins une terre devenue rare. Un véritable marché foncier s’est mis en place et de vrais paysans sans terre, travaillant comme journaliers, apparaissent (Mortimore et Adams, 2001). Les modes de coopération entre producteurs se réduisent également : entre agriculteurs et éleveurs, les contrats de fumure traditionnels19 n’existent quasiment plus dans cette région, la pratique du confiage d’animaux par les sédentaires aux transhumants se réduit fortement avec l’évolution vers les petits ruminants, les piétinements des champs par les troupeaux et ; certaines ONGs sur place travaillent à la concertation, en particulier par la redéfinition de couloirs de passage20.

  • 21  Cette forme de notabilisation fait partie du monde Hausa depuis plusieurs siècles, où commerce (...)
  • 22  Aumône d’origine religieuse : un des cinq piliers de l’islam et qui représente 10% du (...)

33Les valeurs sont de fait également bouleversées : Les familles élargies, avec un patriarche à leur tête, disparaissent dans les zones de forte densité démographique au profit des familles mononucléaires, qui favorisent la diversification des revenus et des modes de décision (Saqalli, 2006). Les migrations et les trajectoires individuelles se multiplient (Timera, 2001). Le mode d’héritage des terres n’est pas le même partout : le mode “traditionnel”, où l’aîné reprenait l’ensemble des possessions, reste encore dominant dans une grande partie du Sahel Nigérien, où la pression foncière reste encore faible (Vanderlinden, 1998). Comme ce système force les cadets à émigrer vers de nouvelles terres, ce système a évolué dans les zones peuplées _ et en particulier dans le sud de Maradi _ vers la version locale du régime d’héritage musulman, où la terre est partagée entre les fils et les frères (Yamba, 2005). Plus globalement, c’est à un changement de la légitimité qu’il faut s’attendre : la référence ancienne au "Bien" était la tradition, le respect des anciens, l’hospitalité, la solidarité et la générosité comme valeurs suprêmes. On peut constater l’apparition, au-delà des très grands commerçants ayant basé leurs fortunes sur la base de leurs réseaux de clientèle (Grégoire, 1986)21, apparaît une classe de commerçants moyens, les "izalah", plutôt jeunes, en famille mononucléaire, et très rigoristes sur le plan religieux : c’est d’ailleurs sur cette base de légitimité qu’ils limitent leurs solidarités à la zakat22 et de ce fait peuvent prévoir leurs gestions et l’affranchir des contingences sociales et familiales. En cela, leur éthique rappelle "L’éthique protestante à l’origine du capitalisme" de Weber (1905), base d’un capitalisme à la nigérienne ?

34Enfin, certaines régions, plus difficiles au niveau biophysique mais aussi où certaines valeurs aristocratiques et/ou lignagères réprouvaient l’accumulation individuelle, peuvent être écartées de fait de ce mouvement et y perdre : Le nord de la zone Zarma à l’ouest du pays, verrait au contraire un désintérêt progressif pour les champs. On peut dès lors se poser la question si le phénomène décrit plus haut n’aurait pas une limite géographique, où les conditions difficiles et plus variables du milieu, comme le mode d’organisation sociale, peuvent rendre ces transformations inopérantes. De nombreux scenarii selon les choix de politique d’action et selon les régions peuvent se présenter. Dès lors, le choix à long terme des politiques de développement devrait conditionner la part du territoire et de la population qui suivra l’une ou l’autre courbe.

Pour un accompagnement des changements socio-économiques

35En caricaturant les positions, le choix du développement se pose-t-il donc entre un interventionnisme, voué à l’échec car non adapté aux multiples dimensions des logiques des populations, et un laisser-faire de cette évolution sociale et économique, illustration locale de la mondialisation, où une grande partie de la population et même des régions entières seraient laissées de côté ?

  • 23  Son synonyme dans le français « africaniste » est « exode » qui renvoie à (...)
  • 24  Les exploitations agricoles en France, de 3 millions en 1950, sont effectivement 600 000 en 2005.

36La conception malthusienne a ceci de dangereux qu’elle prend pour modèle idéal le système ancien et qu’elle a une vision locale de problèmes et des solutions. Ainsi, la migration qui s’est généralisée est considérée comme un simple indicateur de la misère locale23 et non pas comme une opportunité : elle est cependant avec au moins un million de personnes qui ramènent chacune chaque année environ 100 €, soit 100 millions € / an la plus grande source de financements extérieurs du pays ! De plus, elle souffre de son surdéterminisme du poids des conditions naturelles sur la capacité des populations à créer de la richesse et du bien-être, quand on pourrait supposer au contraire que c’est la manière d’utiliser ces ressources, reflet d’un certain type d’organisation sociale et économique, qui détermine l’état des ressources naturelles. La fameuse "capacité de charge" des milieux, établie par les écologues, est donc tout autant dépendante des ressources naturelles que de la manière de les utiliser. Cette conception a cependant l’avantage de vouloir préserver le patrimoine des ressources naturelles pour les générations suivantes. Pour autant, la conception de Boserup, pour afro-optimiste qu’elle soit, implique le renforcement des inégalités au sein des régions et entre les régions et la disparition d’une grande partie des paysans, par les crises mais surtout par les départs, vers les villes, les pays voisins ou les pays développés. Sans un travail d’accompagnement de ces changements, elle pourrait revenir à un laisser-faire, considérant que le développement provoqué n’aura que peu de poids face à ces transformations inéluctables. La révolution verte dans le sous-continent indien des années 60 et 70, mais aussi l’Europe du 19ème et du 20ème siècle24 peuvent effectivement nous faire suggérer cette inéluctabilité. Enfin, la transition agraire est basée sur un changement général de la société forcé et en situation de limite permanente. Même dans le meilleur des cas, une longue période où les crises vont se succéder est à envisager.

Approches méthodologiques du terrain

Rechercher l’information…

37Comme préambule, il nous semble important de signaler la différence entre recherche fondamentale et l’ensemble recherche / développement/action ; Dès lors qu’une part des fonds nécessaires à cette activité provient de l’aide au développement ou de dons privés dont l’objectif est d’apporter un soutien aux populations du Sud, le critère de légitimité première ne doit-il pas rester fixé sur cette idée de soutien aux populations? Sans vouloir faire de populisme idéologique, ce critère une fois adopté a l’avantage de redéfinir la légitimité du but d’une recherche dans ce contexte. Le but n’est pas de faire des découvertes fondamentales sur différentes disciplines scientifiques même si cela est envisageable. Dans un contexte de rareté des fonds, axer ces travaux sur une approche plus "marketing", comme une réponse à des besoins à identifier, nous semble plus légitime. Ainsi, la sélection céréalière pour une plus grande productivité à l’hectare est une recherche plus fondamentale. On peut souhaiter, face à la faible dissémination de ses résultats, une réorientation vers la sélection de variétés selon des directions à définir plus clairement, par exemple sur la base de sondages dans la population d’usagers de ces variétés.

38Le deuxième point méthodologique est la différence entre recherche des facteurs et recherche du poids de ceux-ci : Un des problèmes majeurs de la recherche-développement au Niger est qu’il n’y a guère de statistiques fiables portant sur de grandes zones géographiques et compilant de longues séries temporelles. Ce manque est particulièrement limitant lorsqu’il concerne l’activité agricole, (évolution des surfaces, des cheptels, des productions) et les facteurs attenants que sont les dynamiques de la force de travail et la gestion foncière. L’essentiel de l’analyse doit donc se fonder sur des données d’enquête, à faire soi-même (CARE, 2002).

39Les agences de recherche se retrouvent dès lors limitées : la mise en place d’enquêtes statistiques permettant une analyse de variables, quelles qu’elles soient, suppose au préalable la définition des variables à enquêter (Olson et al., 1999). Mais quelles variables ? Celles-ci peuvent être prédéfinies par les postulats des chercheurs, sur la base de leurs expériences ou du consensus d’une communauté particulière mais aussi en réponse à un financement portant sur un problème ou un enjeu particulier. Elles peuvent également être définies par des enquêtes qualitatives préalables qui vont permettre de relever et éventuellement de hiérarchiser les paramètres à envisager dans ces approches quantitatives.

40Le choix dépend entièrement des objectifs poursuivis : Le suivi de variables reconnus entre professionnels comme pertinents quant à l’analyse d’un phénomène, par exemple le poids pesé régulièrement des enfants dans les écoles comme indicateur de malnutrition infantile (UNICEF et Gouvernement du Niger, 2000) ou la collecte régulière sur les marchés de prix d’une série de produits jugés représentatifs des besoins de la population (SIM Céréales, 2002) ne nécessitent plus de nouvelles campagnes qualitatives de récolte d’information sur lesquelles construire des indicateurs. Par contre, la construction d’indicateurs nouveaux, sur les évolutions à long terme, comme ceux de la désertification (OSS-ROSELT-Niger, 2006) ou de la pauvreté (AQUADEV, 2004) a nécessité au préalable de "partir à la pêche" de ces indicateurs. Plus globalement, dès lors que la légitimité est basée sur une approche recherche-développement, la recherche sur le poids de facteurs connus induit une approche quantitative de la collecte d’informations, alors qu’une recherche sur la nature de ces facteurs nécessite leur "inventaire" et ce, via des approches plus qualitatives.

41Les méthodes associées sont connues des développeurs et des chercheurs en sciences sociales : L’enquête socio-anthropologique classique peut être envisagée, associant "observation participante", imprégnation locale et entretiens très ouverts sur les récits de vie, etc. Les défauts majeurs de ces approches sont le temps nécessaire à leurs réalisations, à relier au coût salarial éventuel, mais aussi le fait que les résultats soient souvent inutilisables en l’état par les développeurs et les autres membres d’une communauté scientifique qui se voudrait interdisciplinaire. Bonnal et al. (1997) souligne ce point : "La grande faiblesse de l'anthropologie […] réside en effet dans le fait qu'elle produit de la connaissance, et pas de l'action; comment organiser l'action à partir du tableau souvent très subtil et multiforme que l'anthropologue a brossé de la réalité?". Cependant, un courant de cette discipline, plus orienté vers l’action, l'anthropologie des sociétés "à développement provoqué" a émergé, en particulier en zone sahélienne et particulièrement au Niger (Olivier de Sardan, 2003a): les outils utilisés, bien que discutés pour leur pertinence dans l’absolu, ont permis le développement de méthodes plus opérantes, plus accessibles aux acteurs du développement et leur permettant d’intégrer un enrichissement de leurs "manières de voir et d’agir" (Lavigne-Delville, 1999) :

  • 25  Méthode Accélérée de Recherche Participative (PRA en Anglais)
  • 26  Enquête Collective Rapide d'Identification des conflits et des groupes Stratégiques
  • 27  Planification des Interventions Par Objectifs
  • 28  Zonage A Dires d’Acteurs

42Ces outils méthodologiques vont de l’entretien individuel semi-ouvert, sur la base d’un guide d’entretien (Olivier de Sardan, 2003b), des méthodes collectives d’acquisition de connaissances au niveau villageois sur les structures et les contraintes appelées MARP25 (Chambers 1994; Dunn 1994; Lavigne-Delville et al,. 2001; Loader et Amartiya, 1999; Sontheimer et al., 1999), sur les dynamiques et les conflits à la même échelle, dites ECRIS26 (Olivier de Sardan, 2003), voire sur la planification locale d’action de développement, appelées PIPO27 (Lamballe et Gauthier, 2001). Enfin, à l’échelle régionale, nous avons abordé l’usage de zonages basés sur les perceptions locales pour définir les structures et les contraintes à cette échelle par la méthode ZADA28 (Bonin et al., 2001; Caron, 2001; Saqalli, 2006).

43L’établissement au préalable d’un recensement des variables locales permet d’envisager dès lors plus rigoureusement l’approche et la hiérarchisation des contraintes de tout ordre affectant de manière différenciée les populations au Niger. Il faudrait cependant que tout projet d’actions soit clairement conçu uniquement sur base de ces analyses.

… Pour quel mode d’action ?

44Nous n’avons pas voulu aborder les différents types d’offres existantes sur le "marché du développement car elles sont diverses dans leur nature et les disciplines associées (crédits, formation et éducation, infrastructures, renforcement des capacités institutionnelles, soutien à l’intensification, etc.) et diverses dans la manière de les pratiquer. Deux points nous semblent intéressants de discuter.

  • 29  La question du partage de ces recettes entre budget des communes et fonds alloués aux (...)

45Comment s’organise la structure localement ? : L’approche projets est peut-être le mode d’organisation du développement le plus représentatif au Niger depuis 20 ans (Hambally, 1999). Elle consiste à la définition d’une zone géographique regroupant plusieurs villages, dont l’étendue est fonction des financements obtenus, selon des critères objectifs biophysiques ou économiques, eux-mêmes reflets des actions à entreprendre. Elle a remplacé l’approche "services techniques" mis en place par l’Etat, qui est rendue inopérante par le manque de moyens (Maman, 1992). Cette approche avait pour principe d’approcher une zone dans son ensemble. Elle était également une solution aux modes de financement à court terme des bailleurs de fond, mais aussi une manière, en travaillant à petite échelle, de s’affranchir quelque peu des négociations à l’échelle nationale. Elle se base sur un postulat : les contraintes à lever sont locales et peuvent être résolues localement (Batterbury, 1998; Lazarev et Arab, 2000). Cependant cette limitation temporelle et spatiale laisse échapper les dynamiques humaines externes qui affectent les stratégies locales. Les approches "programme" qui apparaissent (Gérard, 2002) peuvent être une réponse au sens où elles sont plus pérennes grâce à des financements plus conséquents et plus dynamiques spatialement car uniquement répondant aux sollicitations d’organisations locales. Cependant, au-delà du titre, un programme redevient un projet dès lors qu’il se limite de fait pour toutes sortes de raisons. Cette approche n’est-elle pas un succédané de l’approche "services" des Etats, tant décriée par sa lourdeur, et qu’elle dédouble en mieux dotée ? Enfin, notons que la communalisation très récente des cantons au Niger (2004), première étape d’une décentralisation qui a pour objectif de confier une part des recettes fiscales au niveau local29, pourrait permettre une meilleure programmation des actions, en créant un acteur local pérenne avec lequel toute institution devra négocier.

  • 30  Le warrantage est un "inventory credit" basé sur la vente d'une partie de la récolte (...)
  • 31  Agriculteurs pratiquant du maraîchage (légumes surtout oignons, tabac, etc.)

46Un exemple pertinent de ce mode d'action correspondrait au projet Intrants de la FAO: l'objectif de ce programme est de soutenir l'utilisation d'engrais minéraux et d'appuyer la sécurité alimentaire par des crédits de campagne ou indexés sur la récolte (warrantage30). Si l'appui à l'importation d'engrais minéral venant du Nigeria est une option qui pourrait se discuter, en particulier pour des questions de coût, l'opération s'avère en fait issue en premier lieu des discussions avec les partenaires principaux que sont les organisations paysannes (OP), en particulier dans la région de Maradi. L'OP agissant dans cette région, regroupant nombre de "jardiniers"31, est particulièrement intéressée par l'importation de ces engrais, la FAO jouant le rôle de partenaire institutionnel permettant l'achat d'engrais "en gros". Avec plus de huit ans de coopération entre les partenaires et la garantie de pérennisation de ce partenariat, ce programme est loin de la logique "projet".

  • 32  On pourra ainsi noter que le même terme générique « porzé » (en Zarma, du mot français (...)

47Comment détermine-t-elle ses fonctions localement ?: Il faut effectivement regretter que le ou les champs disciplinaires mobilisés et les modes opératoires associés soient souvent indépendants des investigations préalables, souvent pourtant réalisées. Il ne nous paraît pas pertinent de pratiquer une distinction à ce niveau entre les différents types d’opérateurs. Il existe certes des différences entre les différents types d’opérateurs (organisations paysannes, ONGs de développement, institutions des Nations Unies, Programmes de l’Etat financé par l’aide financière au développement). Cependant, dans la pratique, les approches utilisées nous semblent relativement indépendantes de la nature institutionnelle32 mais beaucoup plus sûrement de la relation au bailleur en terme d’indépendance et de moyens et de l’origine en terme de formation et d'idéologie des agents de ces institutions : Les différents outils, qualitatifs puis quantitatifs, permettent de circonscrire quelque peu ce positionnement. Cependant, la manière de les mettre en œuvre reste du ressort des choix. Que se passe-t-il quand le résultat d’un diagnostic est en opposition avec les objectifs initiaux d’un projet ?

  • 33  La limite en question est essentiellement dépendante du coût horaire des fonctionnaires de ces (...)
  • 34  La plus surprenante de ces conséquences est la nécessité de dépenser de l’argent avant la (...)
  • 35  Logo sur le véhicule, accoutrement et matériel, langages, etc.

48Au-delà du diagnostic, la mise en œuvre est difficile. Les modes de fonctionnement du bailleur peuvent avoir des répercussions fondamentales sur l’action.  Ainsi, le mode d’évaluation peut déformer la politique de l’opérateur. Ainsi, nous avons pu observer une organisation paysanne multiplier les groupements villageois, le bailleur ayant choisi de comptabiliser les groupements plutôt que les villageois, car il considérait que c’était plus facilement vérifiable. Les groupements existaient certes mais ils ne consistaient pour beaucoup, en fait, les plus récents, qu’en une liste écrite de villageois attendant que le "porzé" et ses bienfaits viennent.  Les procédures de demande de fonds des grands bailleurs (Nations Unies, Union européenne et autres pays développés) sont lourdes. Elles présentent un montant minimum d’intervention, signifiant qu’elle refuse de financer une action dès lors que celle-ci est trop petite33. La déformation conséquente est la nécessité d’élargir l’étendue du projet et de le rendre plus visible, au détriment d’un travail plus progressif34 (Jepson, 2005). Des efforts sont cependant réalisés pour appuyer les petits projets,: au niveau de l'Union Européenne, des systèmes de financement sont mis en place par des procédures rapides et leur coût sont souvent inférieurs à 5000 $. L'Etat a créé un cadre législatif qui permet de créer des entreprises sans gager le million de FCFA initialement requis, mais les fonctionnaires de l'Etat "omettent" souvent d'en parler aux entrepreneurs locaux.  De même, plusieurs facteurs liés aux compétences et axes privilégiés par l’opérateur surdéterminent l’action : une ONG issue d’un regroupement de spécialistes en gestion de l’eau tend à s’axer sur ses métiers, l’eau et les problèmes liés. Même lors d’un processus participatif conséquent de négociation des actions, un panel restreint d’actions sera proposé. Par un effet retour, les villageois ayant un peu de pratique des projets savent reconnaître aisément les objectifs d’opérateurs par certains signes distinctifs35 et orientent leurs réponses dans le but de garantir la venue du projet (Olivier de Sardan et al., 1995; Biershenk et al., 2000).

49Certaines modes s’imposent dès lors de fait dans les termes de référence de projets. Au-delà de la validité en soi de ces thèmes porteurs (genre, participation, transdisciplinarité, développement durable, etc.), on peut se demander si la forme (le mot doit apparaître plusieurs fois dans toute présentation de l’opérateur) ne supplante pas le fond (Bonnal et al. 1997). Ainsi, le vocable "participatif" utilisé souvent de manière incantatoire n’a de force que dans son acceptation complète: participation implique négociation, réinterprétation, multiplicité des acteurs, prise en compte des mécontents, des conflits et donc remise en cause et/ou affirmation des objectifs. En gros, il s’agit d’abandonner du pouvoir. Il s’agit aussi d’assumer qu’il n’existe pas d’actions qui s’accordent avec tous les pouvoirs. Toute action implique des conflits et des oppositions (Olivier de Sardan et Dagobi, 2000). Nous adhérons à cet égard pleinement à l’approche du "pessimisme méthodologique" utilisé par Bonnal et al. 1997) : "Il s'agit de rendre explicites les critiques qui restent le plus souvent diffuses et implicites mais qui prévalent souvent dans les milieux chargés de promouvoir la participation. Elles concernent les difficultés pratiques résultant des conflits d'intérêts, d'informations insuffisantes sur des contextes spécifiques, du manque de temps et des procédures administratives". Faire ressortir les choses, assumer le caractère politique et assumer les choix élaborés dans la mise en place participative d’une action vise "à expliciter les critiques ou les insatisfactions qu'inspirent la mise en oeuvre de l'approche participative; à les dédramatiser en montrant qu'elles correspondent à des situations somme toute "sociologiquement normales", eu égard aux conditions locales et à l'environnement socio-économique; à les rendre constructives en assumant pleinement les limites et les difficultés de la participation". C’est dans le caractère caché, implicite et la manière de le traiter que se situe la véritable action du participatif (Turner, 1999). La responsabilité d’un conflit n’incombe pas forcément à l’institution et certaines situations sont tellement tendues (Laurent, 2000) ou biaisées (Laurent et al. 1994) que peu de choses peuvent être tentées : En soulevant certaines questions, l’opérateur peut avoir cristallisé des conflits larvés. Il peut cependant ainsi faire apparaître des solutions négociées et circonstanciées. Mais comme tout processus politique, il nécessite du temps et de la confiance, critères humains difficilement mesurables mais essentiels à toute entreprise collective.

Famine et coordination de la réponse humanitaire

50Des tentatives de coordination sont régulièrement lancées tant du point de vue de la recherche36, des approches de développement37 que des moyens humanitaires (Dembélé, 2001; Gouvernement du Burkina Faso et World Bank, 2003). Si une harmonisation des approches faites par les partenaires s'opère sur la recherche et par conséquent le partage et la production d'informations38, la crise de 2004-2005 a montré les limites de cette forme de coordination.

  • 36  Création d'instituts conjoints et/ ou internationaux (AGRHYMET, ACMAD, CILSS et OSS, centres du (...)
  • 37  Les agences pouvant alors être accusées de fonctionner par "fiefs" géographiques ou (...)
  • 38  Systèmes d'alerte précoce FEWS, Système mondial d’information et d’alerte rapide SMIAR, (...)
  • 39  Famine Early Warning Systems Network (FEWS), sur lequel se base la “Commission Mixte de (...)
  • 40  L'auteur en a lui-même fait l'expérience.

51La famine qui a frappé le Niger pendant la période de la campagne agricole d’octobre 2004 à octobre 2005 a mis en lumière la difficulté de définir ce qu’est une crise alimentaire dans ce contexte, face aux conditions limites structurelles dans lesquelles vivent la plupart des nigériens. Les systèmes d’alerte précoces39, mis en place depuis juillet 2000, ont pleinement joué leur rôle en annonçant la faiblesse des récoltes (AGRHYMET Publication Group 2004) et en alertant les agences de développement quant à l’attaque des criquets migrateurs dès octobre 2004 (Samson 2005). Ainsi, l'annonce de la crise et la transmission de l'information aux acteurs de ma réponse humanitaire, par la coordination dont elle fait l'objet, a bien fonctionné. Mais la nature de la crise, hors le déficit pluviométrique certes conséquent, et les formes de réponse ont posé problème.  En effet, la réponse à cette alerte n’a véritablement été déclenchée qu’à partir de février 2005 et l’aide ne s’est véritablement mis en place qu’à partir d’avril de la même année. Cette confusion a trois origines selon Harragin (2006). La crise structurelle noyait la catastrophe conjoncturelle et la mauvaise situation alimentaire chronique qui prédomine dans les zones rurales du Niger rendait malaisée le constat de l’effectivité d’une crise plus grave que d’habitude : Harragin notait que plus les acteurs du développement étaient impliqués localement, moins ils observaient cette crise40.  Il n'y avait pas assez ou trop de données et pas assez d’information traitée. Face à la difficulté d’énoncer en vue d’infirmer ou d’affirmer l’existence de la crise alimentaire, des opérateurs (en particulier ceux du système des nations unies) ont lancé de vastes enquêtes. Outre le temps pris par leur réalisation et le traitement des informations recueillies, l’arrivée en masse d’informations chiffrées contradictoires ne pouvait permettre l’établissement d’un consensus (Boureima et al. 2003). De plus, la faible disponibilité en information transformait la nature des données; Ainsi l’ouverture successive de centres de renutritition de l’ONG Médecins sans frontières dans la région de Maradi entraînait une augmentation spectaculaire du nombre d’enfants malnutris, qui pouvait être comptabilisé soit comme une extension du champ géographique d’application de l’ONG soit comme un indicateur de l’étendu de la crise (Médecins Sans Frontières 2005). Comment dès lors discriminer la part de l’ouverture des centres et la part du phénomène de malnutrition aiguë, de la création de l’information et l’information elle-même ?

52Enfin, les positions institutionnelles des opérateurs entraînaient des biais dans la réponse. Gouvernement, institutions des Nations Unies et ONGs humanitaires se sont empoignés sur nombre de facteurs concernant la crise (Tableau 2). Les deux premiers acteurs souhaitaient ne pas détruire les réseaux commerciaux et les pratiques existantes de régulation (Gouvernement du Niger, 2002) quand les humanitaires souhaitaient surtout répondre en terme nutritionnel aux besoins immédiats.

53A partir de là, les tentatives de coordination n'ont véritablement concerné que les "grands" acteurs (PAM et autres institutions des Nations Unies, Gouvernement, rares grosses ONGs comme MSF). Pour le reste, d'innombrables micro-ONGs sont parties quasiment au hasard secourir sans concertation ni même référence aux autorités administratives (Olivier de Sardan, 2007; observations de l'auteur). Le résultat reste extrêmement mitigé quant à l'impact en terme d'aide à la population: l'accent a été mis sur la malnutrition infantile, sujet certes émouvant mais en fait détaché de la crise alimentaire, et la migration /débrouille a bien plus contribué à la réduction de la crise (Olivier de Sardan, 2007).

54Enfin, nous soulignons l'importance du partage de l’information entre opérateurs et population mais aussi la nécessité de réponses définies uniquement sur la base des besoins : Les distributions massives d’aide alimentaire deviennent une constante dans les facteurs de variation du prix des produits alimentaires de base  et leur anticipation par les commerçants peut entraîner de graves distorsions de prix (Tahirou et Sanders 2006). En particulier si l’information n’est pas partagée et annoncée à tous en temps et en heure ou si la distribution est dépendante de facteurs externes (effet d’annonce, souci d’écouler des stocks alimentaires : Watkins et Von Braun 2004), ce biais, par le fait que l’information sur la date, le lieu et l’ampleur des distributions est de fait restreinte, permet dès lors à certains de spéculer, ce qui entraînerait une amplification des crises existantes, en particulier dans les années incertaines (Marinho 2006).

55Les politiques d’urgence pendant les crises alimentaires sont en quelque sorte le reflet extrême des politiques de développement : elles accentuent les manques et les difficultés quant à la réalisation d’une action. Les problèmes de logistique, d’incompréhension et d’idéologie sont avivés et leurs impacts sont plus forts. La crise de 2005 a de fait montré de quel pouvoir immense peuvent disposer les opérateurs du développement et de l’aide d’urgence.

Tableau 2. Positions et évolutions des positions sur les caractéristiques de la crise et des réponses à apporter (d’après Harragin 2006)

Gouvernement

Institutions des

Nations Unies

ONGs humanitaires

Origine de la crise

Pluies faibles et criquets

Pluies faibles et criquets, surexploitation des ressources naturelles

Pluies faibles et logiques de marché des autres opérateurs

Étendue géographique

Maradi puis toute la zone pluviale

Plusieurs points sur toute la zone pluviale

Toute la zone pluviale sauf quelques points

Intensité

Disette puis famine

Famine

Famine

Mode d’action

Vente de céréales à prix modéré

Vente de céréales à prix modéré et distribution

Distribution gratuite de nourriture

Conclusion

56Nous avons présenté les enjeux autour d’un certain nombre de paradigmes qui nous ont paru les plus déterminants quant à l’attitude des opérateurs de la recherche et du développement dans ce pays. Face à une large part de la population en situation de crise ou en transition, quel que soit le terme accolé à ces bouleversements, ces opérateurs réagissent par des actions, elles-mêmes justifiées par des positionnements scientifiques, politiques et idéologiques. La manière d’analyser, de comprendre les changements à l’échelle de la région, du système agraire, des familles et des individus a un impact pouvant être majeur localement. Dès lors, nous proposons deux formes de légitimité à ces actions: la première serait la légitimation par l’explication : les objectifs et les méthodologies devraient être clairement affirmés en tant que choix de politique locale. La deuxième serait la légitimation locale : Cela signifie que la justification d’une action doit être régulièrement évaluée et pas seulement par des opérateurs extérieurs. Des programmes collectifs n’ont de légitime que provenant d’une demande locale. Cette légitimité s’élabore par le jeu de relations progressives et construites entre opérateurs, intermédiaires et populations (Olivier de Sardan 1991) et s’estime par des indicateurs que peuvent être de véritables votes, referendums ou sondages.

57Deux facteurs nous semblent dès lors nécessaires à ces deux légitimations de l’action, soit :

  • La non-intervention de l’offre par l’indépendance est le premier point : Le rôle de Services nous paraît essentiel à renforcer, proposant ou accompagnant des opérateurs aux changements socio-économiques. Il s’agit d’accompagner des actions qui apparaissent ou de proposer des actions connues ailleurs, comme un portefeuille de services "à la carte"; les provoquer peuvent cristalliser d’une part des blocages sociaux ("pourquoi l’initiative n’est-elle pas déjà apparue ?") et en cas d’échec, ralentir son lancement. Ce peut être un service public national, des programmes pérennes des nations unies ou d’autres bailleurs ou des services privés subventionnés. Cependant, ce genre de propositions nécessiterait de vastes chantiers de discussion avec les différents bailleurs de fonds.

    • 41  G. Duby, dans son ouvrage « Histoire de la France rurale tome 3 », précise qu’il a fallu (...)

    La pérennité de l'action : Des projets à court terme (souvent de l’ordre de trois ans) entraînent une logique de prédation des moyens mis en œuvre à tous les niveaux, et leurs actions, éventuellement valables à l’échelle de la collectivité, s’effondrent. Des projets permanents ne sont pas viables, mais l’idée d’un service d’appui permanent comme opérateur répondant à des demandes ponctuelles nous paraît intéressante. Il faut un temps certain avant qu’une opération de développement puisse prendre effet41. Etre "pressé" signifie l’échec.

Biographie

58Agronome, titulaire de 2 M.Sc. en développement rural et agroforesterie et auteur de 6 articles de conférence et publications électroniques à comité de lecture, M. Saqalli achève sa thèse sur la modélisation multi-agents de villages au Niger.

Bibliographie

Achard, F. et Chanono M., 2006, Exemple d'une gestion pastorale réussie au Sahel : la station d'élevage de Toukounous (Niger). Science et changements planétaires / Sécheresse 17,1, 76-82.

AGRHYMET Publication Group, 2004, Mensuel Agrhymet. M05, 21pp. CILSS.

Ahmed, M.M., Sanders John H. et Nell W.T., 2000, New sorghum and millet cultivar introduction in Sub-Saharan Africa: impacts and research agenda. Agricultural Systems 64, 55-65.

Alpha Gado, B., 1993, Une histoire des famines au Sahel : étude des grandes crises alimentaires (19ème-20ème siècle). L'Harmattan: Paris.

Alpha Gado, B., Chérif C. et Maïkoréma Z., 2003, Plan National d'urgence du Niger : analyse rétrospective des crises alimentaires et des réponses apportées. Gouvernement du Niger. Niamey.

AQUADEV, 2006, Rapport d’enquête sur la campagne de MARPs.

Augusseau, X., Cheylan J.-P. et Liehoun E., 2006, Dynamiques territoriales de l'agropastoralisme en zone de migration : niveaux d'organisation et interactions. Cahiers d'études et de recherches francophones / Agricultures 13, 488-494.

Badamassi, F., 2006, Le warrantage au Niger : Une technique de crédit pour lutter contre la pauvreté rurale? Cas des femmes de l'Union Tonougakay Ni Bonga de Saboudey Carre. 61pp. Ecole Supérieure de Commerce de Dakar.

Baidu-Forson, J., 1999, Factors influencing adoption of land-enhancing technology in the Sahel: lessons from a case study in Niger. Agricultural Economics 20, 231-239.

Banoin, M. et Guenguant J.-P., 1999, Les systèmes agraires traditionnels nigériens dans l'impasse face à la démographie. In 'Jachères et systèmes agraires'. Floret Christian et Pontanier Roger (Eds.) 14pp. CORAF/Union Européenne: Dakar.

Batterbury, S., 1998, Local environmental management, land degradation et the 'gestion des terroirs' approach in west Africa : policies et pitfalls. Journal of International Development 10, 871-898.

Becker, C. T., Faber M., Hertel K. et Manstetten R., 2005, Malthus vs. Wordsworth: Perspectives on humankind, nature et economy. A contribution to the history et the foundations of ecological economics. Ecological Economics 53, 299-310.

Bernus, E., 1994, Politiques pastorales au Sahel nigérien : bilan et perspectives. 175-180. Séminaire international Parcours Demain. Ifrane, Morocco.

Biershenk, T., Chauveau J.-P. et Olivier de Sardan J.-P., 2000, Courtiers en développement. Les villages africains en quête de projet. APAD-Karthala: Paris.

Bonin, M., Caron P., Cheylan J.-P., Clouet Y. et Thinon P., 2001, Territoire, zonage et modélisation graphique: recherche action et apprentissage. Geocarrefour 73, 241-252.

Bonnal, J., Chauveau J,-P., Lebas Pierre, Lavigne-Delville Philippe, 1997, La Dynamique des Sociétés Rurales Face aux Projets Participatifs de Développement Rural: Réflexions et Propositions d'Action à Partir d'Expériences d'Afrique de l'Ouest. FAO. 11. Rome.

Boserup, E., 1965, The conditions of agricultural growth; the economics of agrarian change under population pressure. London.

Boutrais, J., 2007, Crises écologiques et mobilités pastorales au Sahel : les Peuls du Dallol Bosso (Niger). Sécheresse 18:1, 5-12.

Breman, H., Groot Rob J.J. et Van Keulen H., 2001, Resource limitations in Sahelian agriculture. Global Environmental Change 11: 1, 59-68.

Buresh, R. J., Smithson P, C. et Heliums D. T., 1997, Building Soil Phosphorus Capital in Africa. Conference on "Replenishing Soil Fertility in Africa. Indianapolis, Indiana, USA. 111-150.

CARE, 2002, Household Lifestyle inquiries result for Niger, CARE Project. 135pp. Niamey.

Caron P., 2001, Modélisation graphique et chorèmes : la gestion des parcours collectifs à Massaroca (Brésil). Mappemonde 62, 21pp.

Chambers, R., 1994, Participatory rural appraisal (PRA): Analysis of experience. World Development 22, 1253-1268.

Chauveau, J.-P., 1994, Participation paysanne et populisme démocratique: Essai d'histoire et de sociologie de la culture du développement. In: Jacob J.-P. and Lavigne-Delville Philippe Eds. Karthala, Paris, France.

Courade, G., 1989, Le risque d'insécurité alimentaire : de l'imprudence écologique au démantèlement de l'Etat-providence. In 'Le risque en agriculture'. Eldin Michel et Milleville Pierre (Eds.) pp. 575-597. (INRA-SAD: Paris.)

Dembélé, N. N., 2001, Sécurité alimentaire en Afrique Sub-saharienne: Quelle Stratégie de Réalisation? Rapport d'évaluation Michigan State University / PASIDMA / Chambre d'Agriculture du Mali, Bamako.

de Rouw, A. et Rajot J.-L., 2004, Nutrient availability et pearl millet production in Sahelian farming systems based on manuring or fallowing. Agriculture, Ecosystems et Environment 104, 249-262.

Derriennic, H., 1977, Famines et dominations en Afrique Noire : paysans et éleveurs du Sahel sous le joug. Paris.

Dunn T., 1994, Rapid Rural Appraisal: A description of the methodology et its application in teaching et research at Charles Sturt University. Rural Society, 4.

English, P., Gagnon G., Wilcock D., Kamuanga M., Ouedraogo J., Traoré P. A., Diehl J.-P. et Van Leeuwen J.-H., 2007, Etude diagnostique sur l'Intégration Commerciale du Niger. World Bank.

Ehrlich, I. et Luib F., 1997, The problem of population et growth: A review of the literature from Malthus to contemporary models of endogenous population et endogenous growth. Journal of Economic Dynamics et Control 21, 205-242.

Fauquet, F., 2005, Dynamiques des ressources environnementales et mutations des systèmes agro-sylvo pastoraux en milieu tropical semi-aride : le cas de la vallée d'Arewa , Niger Central). Université Joseph-Fourier, Grenoble.

Fraslin, J.-H., Doucet G. et Binet J., 2005, Mission de capitalisation des expériences de crédits garantis par le warrantage de produits agricoles. ICAR.

Gastellu, J.-M., 1980, Mais où sont donc ces unités économiques que nos amis cherchent tant en Afrique? Note Méthodologique. Cahiers de l'ORSTOM 17, 9pp.

Gérard, B., 2002, Projet Aide à la décision full proposal.

Gérard, B. et Buerkert A., 2001, Estimation of spatial variability in pearl millet growth with non-destructive methods . Explanatory in Agriculture 37, 373-389.

Gérard, B., Dougbedji F., Dandois C., Manyame C. et Bielders C. L., 2007, Toward farm specific recommendations for the use of mineral fertilizers in Sahelian crop-livestock systems. International Symposium of the International Scientific Centre of Fertilizers ,CIEC). 16. Ghent, Belgium.

Gouvernement du Burkina Faso et Banque Mondiale, 2003, Forum on Harmonization. Rapport d'évaluation HLF-H. Rome.

Gouvernement du Niger, 1998, Plan National de l'environnement pour un développement durable : volet des actions à court terme. Ministère du plan.

Graef, F. et Haigis J., 2001, Spatial et temporal rainfall variability in the Sahel et its effects on farmers' management strategies . Journal of Arid Environments 48, 221-231.

Grégoire, E., 1986, Les Alhazai de Maradi, Niger: Histoire d'un groupe de riches marchands sahéliens. Paris.

Guenguant, J.-P., Banoin M. et Quesnel A., 2002, Dynamique des populations, disponibilités en terres et adaptation des régimes fonciers : le cas du Niger. Gendreau Francis, Lututala Mumpasi. 155pp. FAO, Rome.

Hambally, Y., 1999, Mode d'intervention et pratiques paysannes au Niger. EDHESS.

Hamidou, N., 2005, Analyse des activités des ménages agricoles du Fakara au Niger: cas de trois villages. 110 pp. CNEARC.

Hardin, G., 1968, The Tragedy of the Commons. Science 162, 1243-1248.

Harragin, S., 2006, The Cost of being Poor: Markets, mistrust et malnutrition in southern Niger 2005-2006, Save the Children. 80 pp. London.

Harris Frances, M.A., 1998, Farm-level assessment of the nutrient balance in northern Nigeria . Agriculture, Ecosystems et Environment 71, 201-214.

Jepson, P., 2005, Governance et accountability of environmental NGOs. Environmental Science et Policy 8, 515-524.

Jouve, P., 2003, Typologie des agrosystèmes villageois du département de Maradi, Niger) propositions pour un programme de recherche-développement. 3, 80pp. CIRAD. Documents Systèmes Agraires.

Jouve, P., 2004, Transition agraire et résilience des sociétés rurales; La croissance démographique, frein ou opportunité pour une intensification agricole durable en Afrique subsaharienne ? Courrier de l'environnement de l'INRA 52, 101-106.

Kelley, T.G., Ryan J.G., et Patel B. K., 1995, Applied Participatory Priority Setting in International Agricultural Research: Making Trade-offs Transparent et Explicit. Agricultural Systems 49, 177-210.

La Rovere, R., 2001, Livestock roles et agro-environmental sustainability of Sahelian Niger mixed crop-livestock systems under intensification. 2-180. ILRI, Niamey, Niger.

Lamballe, P. et Gauthier N., 2001, La planification des interventions par objectifs, un parcours semé d'embûches : observations à partir d'une application de la méthode Pipo au Viêt-nam. Coopérer Aujourd’hui [24], GRET. Etude/Document de travail, 22pp.

Laurent, P.-J., 2000, Le big man local ou la «gestion coup d'État» de l'espace public. Politique Africaine 80, 169-181.

Laurent, P.-J., Mathieu P. et Totté M., 1994, Migration et accès à la terre au Burkina Faso. Cahiers du CIDEP 20, 15-131.

Lavigne-Delville, P., 1999, Impasses cognitives et expertise en sciences sociales : réflexions à propos du développement rural en Afrique. GRET. 9, 1-26. Les documents de travail de la Direction scientifique/Coopérer aujourd'hui : Document de travail.

Lavigne-Delville, P., Broutin C., Castellanet C., 2001a, Jachères, fertilité, dynamiques agraires, innovations paysannes et collaborations chercheurs/paysans : Fondements pour des recherches actions en milieu paysan sur la fertilité des terres. Coopérer Aujourd’hui [36], -62. GRET. Etude/Document de travail.

Lavigne-Delville, P., Mathieu M., Sellamna N.-E., 2001b, Living up to ambitions : for a more rigorous practice of participatory appraisals et enquiries. Coopérer Aujourd’hui [28], GRET, Etude/Document de travail, 24pp.

Lazarev, G. et Arab M., 2000, Développement local et communautés rurales : approches et instruments pour une dynamique de concertation. 228pp. Réseau Interdisciplinaire de Soutien au Développement Participatif.

Loader, R. et Amartiya L., 1999, Participatory Rural Appraisal: extending the research methods base, Agricultural Systems 62, 73-85.

Loireau-Delabre, M., 1998, Espaces Ressources Usages: Spatialisation des interactions dynamiques entre les systèmes sociaux et écologiques au Sahel nigérien, site de Banizoumbou, Niger, Université Paul Valery Montpellier III, 245pp.

Luxereau, A. et Roussel B., 1997, Changements écologiques et sociaux au Niger. L'Harmattan: Paris.

Lycklama, R., 2000, Des champs qui ont des pieds et des vaches qui veulent marcher, conflits liés aux ressources naturelles au Niger. AFVP. 49 pp.

Mainguet, M. et Da Silva G., 1998, Desertification et drylands development : what can be done? Land Degradation et Development 9, 375-382.

Maman Abdo H., 1992, Bilan, conséquences et perspectives des politiques d'ajustement au Niger. 9-24. Niamey, Université Abdou Moumouni/IRD. Séminaire d'économie et de sociologie nigérienne.

Marinho, E., 2006, Humanitarian Aid et Famines, a Bi-directional Relationship. Journal of Development Economics 24pp. , sous Presse

Marou, D. M., 2005, Etude des effets et impacts des initiatives et innovations paysannes améliorant le revenu des ménages dans la zone d'Aguié. 7-129. Université Catholique de Louvain.

Mathieu P., 1998, Population pauvreté et dégradation de l'environnement en Afrique : fatale attraction ou liaisons hasardeuses ? Nature Sciences et Sociétés 6, 27-34.

Médecins Sans Frontières., 2005, Urgence Niger : Payer ou Mourir. Chiffres remis à jour le 28/07/2005. 19pp.

Milleville, P., 1989, Risques et pratiques paysannes : diversité des réponses, disparité des effets. In Le risque en agriculture. (Eldin Michel et Milleville Pierre ,Eds.), pp. 179-186. INRA-SAD: Paris.

Mortimore, Michael et Adams W. M. ,2001. Farmer adaptation, change and crisis in the Sahel. Global Environmental Change 11, 49-57.

Mortimore, M. et Harris F. M.A. ,2005, Do small farmers' achievements contradict the nutrient depletion scenarios for Africa? Land Use Policy 22, 43-56.

Mortimore, M., Tiffen M., Boubacar Y., Nelson J., 2001, Synthèse sur les évolutions à long terme dans le département de Maradi, Niger 1960-2000. 62pp. Drylands Research/CNEARC.

Mounkaïla, H., 2003,  De la migration circulaire à l'abandon du territoire local dans le Zarmaganda, Niger. Revue Européenne des Migrations Internationales 18, 161-187.

Olivier de Sardan, J.-P., 1991, D'un savoir à l'autre. Les agents de développement comme médiateurs. Marseille Paris.

Olivier de Sardan, J.-P., 2003a, Les sociétés Songhay - Zarma ,Niger - Mali) Chefs, guerriers, esclaves, paysans ... KARTHALA: Paris.

Olivier de Sardan, J.-P., 2003b, Anthopologie et développement, essai en socio-anthropologie du changement social. APAD KARTHALA: Marseille Paris.

Olivier de Sardan, J.-P., 2003c, L'enquête socio-anthropologique de terrain : synthèse méthodologique et recommandations à usage des étudiants. Etudes et travaux du LASDEL[13], 58pp. Niamey.

Olivier de Sardan, J.-P., 2007, Analyse rétrospective de la crise alimentaire au Niger en 2005. Etudes et travaux du LASDEL [59], 58pp. Niamey.

Olivier de Sardan, Jean-Pierre, Boiral P. et Lanteri J.-F., 1995, Paysans, experts et chercheurs en Afrique noire, sciences sociales et développement rural. ,CIFACE KARTHALA: Paris.)

Olivier de Sardan, J.-P. et Dagobi A. E., 2000, La gestion communautaire sert-elle l'intérêt public ? Le cas de l'hydraulique villageoise au Niger. Politique Africaine 80, 153-168.

Olson, R.J., Briggs J.M., Porter J.H., Mah G.R., et Stafford S.G., 1999, Managing Data from Multiple Disciplines, Scales, et Sites To Support Synthesis et Modelling. Remote Sensing for Environment 70, 99-107.

OSS-ROSELT-Niger, Loireau-Delabre M., 2006, Guide pour l'évaluation et le suivi des pratiques d'exploitation des ressources naturelles. 2, 97pp.

Paul, J.-L., Bory A., Bellande A., Fabri A. et Garganta E. 2003, Quel système de référence pour la prise en compte de la rationalité de l'agriculteur : du système de production agricole au système d'activité. 46-52. Montpellier, France, INRA/ CIRAD. Recherches système en agriculture et développement rural, Symposium international.

Pini, G. et Tarchiani V., 2007, Les systèmes de production agro-sylvo-pastoraux du Niger. Centro Città del Terzo Mondo 21.

Quin'ones, M. A., Borlaug Norman E. et Dowswell Christopher R. ,1997). A Fertilizer-Based Green Revolution for Africa. Conference on "Replenishing Soil Fertility in Africa". 81-96. Indianapolis, Indiana, USA,

Rain, D., 1999, Eaters of the dry season: Circular labor migration in the west african Sahel. West View Press: Oxford.

Raynaut, C., 1989, La culture irriguée en pays haoussa nigérien : Aspects historiques, sociaux et techniques. Etudes rurales 115-116.

Raynaut, C., Grégoire E., Janin P., Koechlin J., Lavigne-Delville P. et Bradley P., 1997, Sahels, diversité et dynamiques des relations sociétés nature. ,RID SEI: Paris.)

Reardon, T., 1994, La diversification des revenus au Sahel et ses liens éventuels avec la gestion des ressources naturelles par les agriculteurs. In 'Promotion de systèmes agricoles durables dans les pays d'Afrique soudano sahélienne'. ,Ed. Benoit-Cattin M.) 15pp. FAO CTA CIRAD

Reenberg et Paarup-Larsen B., 1997, Determinants for land use strategies in a sahelian agro ecosystem; anthropological et ecological geographical aspects of natural resource management, Agricultural Systems 53, 209-229.

Samson, D., 2005, Polémique sur la crise alimentaire au Niger. Radio France Internationale.

Sangaré, M., Fernández-Rivera S., Bationo A., Hiernaux P. et Pandey V. S., 2001, effets de différents types d'amendements sur le rendement du mil et la fertilité du sol au Sahel. Cahiers d'études et de recherches francophones / Agricultures 10, 319-325.

Saqalli, M., 2002, Diagnostic comparatif sur 2 sites circum-sahariens de suivi de la désertification. 1, 90pp. Montpellier.

Saqalli, M., 2006a, Multi acteurs, multi activités: simulations multi agents pour la détection des changements dans l'Organisation sociale dans les villages de l'Ouest nigérien. 2[1], 253-263. Casablanca. MOSIM 2006.

Saqalli, M., 2006b, A low-cost indigenous perception based regional mapping methodology for rural support in Niger: analysis of an experience. Journal of Rural Studies , sous presse.

Schlect, E. et Buerkert A., 2004, Organic inputs et farmers' management strategies in millet fields of western Niger. Geoderma 121, 271-289.

Seidl, I. et Tisdell C. A., 1999, Carrying capacity reconsidered: from Malthus' population theory to cultural carrying capacity. Ecological Economics 31, 395-408.

Seybou, H., 1993, Enquête sur les systèmes de culture, cas du terroir de Banizoumbou. Université Abdou Moumouni.

Shapouri et Rosen S., 1999, Food Security Assessment: Why Countries Are At Risk? Agriculture Information Bulletin 754. Market et Trade Economics Division, U.S. Department of Agriculture. Washington, USA.

SIM Céréales, 2002, Evolution des prix des céréales et leurs impacts sur les revenus des populations issus de la vente de bétail. 11pp. Union européenne auprès des SIM céréales et bétail au Niger, Systèmes d'Information sur les Marchés des céréales, du Niébé et du Bétail.

Solagral, 2000, L'évolution de la situation alimentaire mondiale en 1998/99. Rapport Annuel, Paris.

Sontheimer, S., Callens K. et Seiffert B., 1999, Conducting a PRA Training et Modifying PRA Tools to Your Needs. An Example from a Participatory Household Food Security et Nutrition Project in Ethiopia. FAO. GCP/ETH/056/BEL, 57pp. Rome, FAO.

Tahirou, A. et Lowenberg-DeBoer J., 2000, Intensification of Sahelian farming systems: evidence from Niger. Agricultural Systems 64, 67-81.

Tahirou, A., 2002, Farm level analysis of agricultural technological change: inorganic fertilizer use on dryland in Western Niger. 154pp. Purdue University.

Tahirou, A., Sanders John H., 2006, New technologies, marketing strategies et public policy for traditional food crops: Millet in Niger. Agricultural Systems ,in Press).

Tandia, M., 1991, Utilisation de l'espace et des ressources pastorales dans quelques terroirs villageois Banizoumbou ,Niger). Université Paris 12.

Thébaud, B., 1996, Gestion de l'espace et crise pastorale au sahel, Etudes comparatives du Niger Oriental et du Yagba Burkinabé. EDHESS.

Tiffen, M., 2001, Profile of Demographic Change in the Kano-Maradi region, 1960-2000. Drylands Research. 1[1], 44pp.

Timera, M., 2001, Les migrations des jeunes Sahéliens : affirmation de soi et émancipation. In Les jeunes : hantise de l'espace public dans les sociétés du Sud ? )Collignon R. et Diouf M. Eds.) pp. 37-49.

Turner, M, E., 1999a, Merging local et regional analyses of land use change : the case of livestock in the Sahel. Annals of the Association of American geographers 89, 191-219.

Turner, M, E., 1999b, No space for participation : pastoralist narratives et the ethiology of park-herder conflict in south-eastern Niger. Land Degradation et Development 10, 345-363.

Turner, M. E., Patterson D. et Patterson K. P., 2005, Conflict management for improved livestock productivity et sustainable natural resource use in Niger, west Africa. Final report. 60pp. Niamey, ILRI.

UNICEF, Gouvernement du Niger. ,2000). Enquête de base du programme service de base intégrés. 142pp. Niamey.

Vanderlinden, J.-P.,1998, The Niger case study. pp. 350-370.

Watkins, K., von Braun J., 2004, Time to stop dumping on the world's poor. OXFAM-IFPRI.

Yamba, B., 2005, Observatoire de Maradi-Mayahi-Dakoro, Rapport de caractérisation. Drylands Research. 1-171. Niamey, Min. de l'Hydraulique, de l'Environnement et de la Lutte contre la Désertification, Rép. Du Niger.

Notes

1  Pour René Dumont, en 1962 « L'Afrique noire est mal partie » et elle est en 1980 « L'Afrique étranglée ».

2  Cette situation de mise en retrait brutale est bien sûr variable : ainsi, un conflit armé qui persiste au sein d’un pays permet de fait à l’Etat et à ses agents, quelle que soit sa nature, de rester incontournable dans l’action. Nous n’aborderons pas ces cas, n’ayant aucune expérience en ce domaine.

3  Méthodes de diagnostics et méthodes d’action ne sont pas directement reliées. Elles participent cependant de corpus idéologiques communs : ainsi, des actions propres à soutenir « les populations marginales » tendent à l’utilisation généralisée des enquêtes qualitatives locales (MARP, PIPO, ECRIS). Des projets souhaitant appuyer le crédit ont plutôt tendance à recourir à des questionnaires fermés sur les niveaux de revenus, etc.

4  Organisations Non Gouvernementales

5  Soulignons le fait que le Niger présente le caractère singulier d’un multiple passé très prestigieux : chacun de ces grands groupes a comme référence historique des Etats ou des organisations puissants, prospères et porteurs de fierté et de légitimité (empire Songhay, cités états Hausa, empire du Kanem Bornou, empire peul de Sokoto, grands clans guerriers et caravaniers touaregs). La croyance en une nation collective est dès lors en concurrence avec ces pouvoirs.

6  Le terme Sahel désigne en arabe un rivage, au sens de limite d'habitation par rapport à un environnement étranger à l'homme, comme l'océan ou le désert.

7  Le préambule de cet article et de son résumé est illustratif: "Low soil fertility is recognized as the major constraint to rainfed cereal production in the Sahel".

8  De 11,5 millions d’ha en 1999, les surface cultivées sont estimées à 12,6 millions d’ha en 2003

9  Très récemment en octobre 2006, environ 4 000 pasteurs « mahamides » sont annoncés comme en voie d’expulsion par le gouvernement vers le Tchad car ils détiennent « des armes à feu » et « trop de bétail ».

10  Le "zaï", venu plutôt du Burkina Faso, est une technique de re-semis par défonçage et enfouissement de matière organique des sols très indurés et décapés (Dougbedji, 2002).

11  Les demi-lunes sont des creux de cette forme, perpendiculaires à la plus grande pente, et qui permettent de recueillir l’eau et les nutriment issus du lessivage d’en haut et d’éviter leur perte par en bas. Elles permettent de remettre en culture certaines zones légèrement pentues et décapées par le lessivage.

12  Appelée aussi "mulching", c’est une couverture de paille protégeant les sols de l’érosion éolienne.

13  Cela consiste à défricher une jachère par exemple, mais en en protégeant les rejets des arbres y poussant.

14  Il s’agit de semer et de sarcler les champs mais sans retourner la terre pour éviter qu’elle se déstructure.

15  Dès lors, la mise en place de structures nouvelles, certes éventuellement plus équitables mais aisément illégitimes, est à prendre avec circonspection (Laurent, et al. 1994; Olivier de Sardan et Dagobi, 2000).

16  Chaque mariage, selon nos propres enquêtes, revient à environ 1 150 hors le douaire à remettre à la famille de la mariée. Plusieurs villages étudiés ont vu de graves réunions à ce propos pour tenter de trouver des accords collectifs de lutte contre l’inflation des dépenses de mariage.

17  La Tabaski ou Aïd-el-kébir est l’occasion d’achats de moutons à des prix 5 à 6 fois plus élevés (jusqu’à 135 € au lieu de 30 € « hors saison »)

18  Au Niger, selon les régions on pourra différencier les cultures vendues en cultures de rapport (le Niébé, l’Arachide, les légumes et finalement le Mil) c’est-à-dire des cultures consommées et vendues, et en cultures de rente (le souchet, le sésame), c’est-à-dire quasi entièrement destinées à la vente ; elles sont produites le long de la frontière du Nigeria, grand marché de ces produits.

19  Mode de gestion de la fertilité ancien, qui consistait pour un agriculteur à payer, en nourriture, en mil ou en argent, le stationnement du troupeau d’un éleveur sur ces champs pour les fumer ; l’éleveur disposait des chaumes et de la « brousse » pour nourrir son bétail.

20  Couloirs larges destinés au passage des troupeaux, pour éviter les destructions des champs.

21  Cette forme de notabilisation fait partie du monde Hausa depuis plusieurs siècles, où commerce et statut social n’étaient pas incompatibles dès lors qu’il y avait libéralité : « qui donne comme un prince obtient louanges de prince » (Nicolas, 1975, cité par Raynaut et al. (1997) : cela n’est pas vrai partout et en particulier dans la société Zarma-Songhay, initialement basée sur des valeurs aristocratiques méprisant le travail chez les nobles (Olivier de Sardan, 2003).

22  Aumône d’origine religieuse : un des cinq piliers de l’islam et qui représente 10% du revenu.

23  Son synonyme dans le français « africaniste » est « exode » qui renvoie à « l’exode rural » migration définitive des ruraux européens vers les villes, aveu d’échec à se maintenir dans les conditions de développement de leur région mais aussi aveu d’échec des opérateurs de développement.

24  Les exploitations agricoles en France, de 3 millions en 1950, sont effectivement 600 000 en 2005.

25  Méthode Accélérée de Recherche Participative (PRA en Anglais)

26  Enquête Collective Rapide d'Identification des conflits et des groupes Stratégiques

27  Planification des Interventions Par Objectifs

28  Zonage A Dires d’Acteurs

29  La question du partage de ces recettes entre budget des communes et fonds alloués aux autorités coutumières reste à l’ordre du jour en termes pratiques.

30  Le warrantage est un "inventory credit" basé sur la vente d'une partie de la récolte d'un membre d'une association à cette association à la récolte au prix du marché. Placé dans le grenier de l'association, cette récolte est stockée jusqu'à ce que le membre exprime le besoin de la racheter, en général pendant la période de soudure. Cependant, il ne la rachète pas au prix du marché, alors bien plus haut mais au prix à la récolte + 10% (frais de gardiennage et de stockage). Cette opération permet ainsi au membre d'avoir accès à du cash à la récolte, de sauvegarder une parte de sa récolte  mais aussi de réaliser une plus-value intéressante à la soudure s'il vend ce stock.

31  Agriculteurs pratiquant du maraîchage (légumes surtout oignons, tabac, etc.)

32  On pourra ainsi noter que le même terme générique « porzé » (en Zarma, du mot français « projet ») désigne localement ces actions prises comme un tout.

33  La limite en question est essentiellement dépendante du coût horaire des fonctionnaires de ces pays lors de la mise en place des procédures.

34  La plus surprenante de ces conséquences est la nécessité de dépenser de l’argent avant la fin de certains plans pluriannuels, pour justifier de la demande de refinancements équivalents dans les plans suivants !

35  Logo sur le véhicule, accoutrement et matériel, langages, etc.

36  Création d'instituts conjoints et/ ou internationaux (AGRHYMET, ACMAD, CILSS et OSS, centres du CGIAR) coordination d'équipes locales (exemple de OSS-ROSELT)

37  Les agences pouvant alors être accusées de fonctionner par "fiefs" géographiques ou thématiques. Au niveau des bailleurs, Initiative 20/20 en 1995, Stratégie de développement durable (SDD) et Cadre intégré de développement (CID), Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) en 1996, Comité d’aide au développement (CAD),Objectifs du Millénaire, etc.

38  Systèmes d'alerte précoce FEWS, Système mondial d’information et d’alerte rapide SMIAR, coffret de suivi des récoltes ("CM Box"), etc.

39  Famine Early Warning Systems Network (FEWS), sur lequel se base la “Commission Mixte de Concertation” (CMC), instance gouvernementale de gestion des stocks de redistribution alimentaire. Il est le produit d'un système de coordination entre l'état nigérien, les agences des Nations Unies et et instituts de recherche associés (CILSS, AGRHYMET, ACMAD), les agences de développement des pays bailleurs dont au premier chef, les Etats-Unis et son agence principale, l'USAID.

40  L'auteur en a lui-même fait l'expérience.

41  G. Duby, dans son ouvrage « Histoire de la France rurale tome 3 », précise qu’il a fallu près d’un demi-siècle avant que des paysans français acceptent de confier leurs économies dans un Crédit Agricole pourtant présent dans leurs bourgs durant toute cette période !

Pour citer cet article

Référence électronique

Mehdi Saqalli, « Le pouvoir des savoirs : enjeux et impacts des concepts sur le développement rural pour le Sahel nigérien », VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement, Volume 8 Numéro 1 | avril 2008, [En ligne], mis en ligne le 12 avril 2008. URL : http://vertigo.revues.org/index5348.html. Consulté le 10 novembre 2009.

Auteur

Mehdi Saqalli

Université Catholique de Louvain Place Croix du Sud, 2 boîte 16, B-1348 Louvain-la-Neuve, Belgique saqalli@enge.ucl.ac.be

Droits d'auteur

© Tous droits réservés