1Santé et éducation sont intimement liées : en théorie, la santé peut notablement affecter l’éducation et l’éducation peut fortement affecter la santé, à en croire Jean Claude Sailly et Thérèse Lebrun (1997).
2En Côte d’Ivoire, le soin de donner aux populations agricoles une éducation sanitaire rudimentaire est laissé aux autorités sanitaires et agricoles locales. Cette éducation convenablement menée peut réduire l’action néfaste de l’utilisation abusive des eaux usées et des produits phytosanitaires et intrants sur les producteurs.
3A Abidjan, les bas-fonds et autres espaces verts ouverts sont occupés par une certaine frange de la population qui les exploite à des fins agricoles. Presque tous s’adonnent à la culture maraîchère. Les eaux usées, les pesticides utilisés, ainsi que l’intensité du travail fourni dans le maraîchage font potentiellement courir des risques sanitaires à ces exploitants qui ne disposent que de dabas, pioches, machettes et forte dose de courage comme essentiels équipements de travail. Au cas où ces exploitants n’adoptent pas d’attitudes conséquentes, ces risques sanitaires pourraient affecter négativement le capital humain des maraîchers urbains dont l’essentiel des ressources alimentaires et financières provient de cette activité. Il est donc d’une importance cruciale d’étudier les dispositions de préventions prises par ceux-ci.
4Comment la scolarisation et les connaissances acquises de l’expérience dans le maraîchage urbain déterminent-elles la prévention contre les risques sanitaires de l’environnement de travail des exploitants agricoles ? Autrement dire le capital humain des maraîchers d’Abidjan influence t-il leurs comportements de prévention des risques sanitaires de leur activité agricole ?
- 1 Â dont Mara et Cairncross (1992), NDuka Okafor (1985), Schneider et Gagneux (1997)
- 2  par Schneider et Gagneux au cours de la même période
5Plusieurs spécialistes des questions environnementales ont eu l’occasion de prouver la réalité des risques sanitaires dans le secteur émergent de l’agriculture urbaine. La raison d’un tel essor, est liée à la croissance démographique galopante des villes du tiers monde (6 % par an), qui entraîne l’augmentation de la demande de produits vivriers. La recrudescence des problèmes de santé est l’une des conséquences majeures de l’agriculture urbaine (Endamana et al., 2001). Ces problèmes sanitaires sont le fait des systèmes de production dans les bas-fonds comme en attestent des études effectuées par le Cabinet AGRISUD INTERNATIONAL (1999). En effet, l’un des éléments essentiels des systèmes de production en agriculture urbain est l’utilisation des eaux usées. Ces dernières comprennent aussi bien les eaux usées issues de l’activité productive humaine directe que les eaux polluées résultants d’un déversement des eaux usées dans les cours d’eaux et rivières, et les puits pollués. S’agissant de leur typologie, il ressort que les eaux utilisées pour l’agriculture sont soit des eaux usées domestiques brutes, soit des eaux usées industrielles brutes, soit un mélange des deux, soit des affluents hospitaliers, soit des eaux de ruissellement, soit des cours d’eaux polluées par l’une ou le mélange de plusieurs de ces sources ou encore par un déversement sauvage d’ordure ménagères et des boues de vidange (CTA, ETC-RUAF et CREPA, 2002). Par ailleurs, de nombreuses recherches expliquent la pollution des sites urbains de maraîchage par la réutilisation des eaux usées d’origines domestique et industrielle. Selon lui, la pollution de ces zones cultivées par les eaux usées, plus ou moins stagnantes, constitue le principal facteur de risque sanitaire (Cissé, 1997, 1999, 2002). Des études micro-biologiques et épidémiologiques effectuées par un certain nombre de chercheurs1 donnent la preuve de l’éminence des risques sanitaires en agriculture urbaine. Ces recherches attestent de la présence de micro-organismes pathogènes (virus, bactéries, parasites), métaux lourds (PCB, mercure, plomb, cuivre, zinc,…) et de résidus de pesticides qui, affectant l’environnement (sols, cultures, etc.), entraînent la recrudescence des diarrhées et autres maladies parasitaires. Par exemple, une enquête épidémiologique réalisée2 sur le site de Sebkha à Nouakchott, a donné en 1996 les résultats suivants : syndrome paludisme (96 %), maladies respiratoires (81,7 %), maladies digestives et maladies diarrhéiques (67,5 %). De telles recherches n’ont malheureusement pas été réalisées sur les sites urbains d’horticulture en Côte d’Ivoire alors que « les sites de Dougouba, Gonfreville, la zone industrielle à Bouaké n’ont aucune protection contre les eaux du ruisseau qui sert d’exutoire pour les eaux industrielles de la ville de Bouaké » selon AGRISUD International (1999). Certes, notre étude n’a pas pour objet d’effectuer des enquêtes microbiologiques et épidémiologiques mais la réalité des risques sanitaires en agriculture urbaine sera cernée à travers une approche socio-anthropologique de la question. Une approche qui se base sur les représentations des agriculteurs.
- 3 Ce sont Boureima Ouedraogo (sociologue), Léocadie Bouda (sociologue), Guéladio Cisse (environnement (...)
6La catégorisation complexe de l’hygiène, de la santé et de la salubrité correspond tout à fait à la représentation que les individus se font du risque sanitaire. C’est elle qui va orienter et guider leurs comportements sanitaires en terme de dispositions préventives. Qu’en est-il des agriculteurs urbains en général et de ceux de la Côte d’Ivoire particulièrement ? Une telle interrogation est légitime en ce sens que les chercheurs en sciences sociales présentent le « risque » comme un phénomène qui guète de façon permanente nos sociétés modernes. Mais cette présentation reste encore générale. A ce niveau, des études spécifiques réalisées par des spécialistes environnementalistes, géomètre urbaniste, biologistes, sociologues et bien d’autres3 – dont les activités de recherche ont porté sur la dimension socio-anthropologique des risques sanitaires en agriculture urbaine en Afrique –, ont précédé la nôtre. Dans les villes de l’Afrique de l’Ouest et du Centre, les perceptions des risques sanitaires desquelles dépendent les attitudes préventives des exploitants, sont divergentes d’un site de production agricole à l’autre :
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Si les producteurs ont conscience des dangers auxquels ils s’exposent dans l’exercice de leur activité agricole, ceux-ci prennent des précautions pour minimiser les risques sanitaires (ports de bottes et de gants, utilisation de beurre de karité, formation de barrages artisanaux, etc.) (CTA / ETC-RUAF / CREPA, 2002) ;
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Par contre, si les exploitants agricoles n’ont pas conscience des risques sanitaires, ils ne prennent aucune disposition face à l’agressivité des eaux polluées et des pesticides.
7Cette dernière position est soutenue par Cissé (1997) à travers les idées et croyances des exploitants maraîchers à Ouagadougou, en l’occurrence le refus d’un lien possible entre qualité de l’eau et maladies, la négation de la pollution de l’eau, de la possibilité de risques pour la famille, et d’une responsabilité dans la chaîne des risques sanitaires. Pour lui, « les exploitants ne considèrent pas la qualité de l’eau sur les sites comme le plus préoccupant des problèmes pour eux, même si certains la citent dans la liste » (Cissé, 1997). Par contre, le Cabinet AGRISUD INTERNATIONAL a illustré dans le cadre d’une étude sur le Programme d’appui aux activités agricoles et agro-alimentaires péri-urbaines sur l’axe Abidjan-Bouaké, les perceptions des consommateurs publics. Le cabinet affirme le refus de ces derniers d’acheter les produits agricoles urbains du fait des risques de leur consommation sur la santé humaine.
8La thèse de certains auteurs selon laquelle les agriculteurs urbains ne prennent aucune disposition face aux risques sanitaires auxquels ils s’exposent lors de l’exploitation des bas-fonds souillés par les eaux usées domestiques et industrielles, semble limiter. Car une telle position ignore les pratiques culturelles et les connaissances traditionnelles en matière de protection de la santé (Harris Memel-Fotê, 1998). Par contre, les études précédentes qui ont admises que les exploitants agricoles urbains adoptent des comportements préventifs, se sont bornées à l’inventaire de ceux-ci. C’est pourquoi, nous proposons d’analyser les aptitudes ou les acquis des maraîchers urbains qui déterminent leurs comportements de prévention en prenant en compte non seulement les risques sanitaires de leur environnement de travail mais aussi les exigences de leur activité professionnelle. Ce qui permet de mieux comprendre les relations complexes existant entre la prévention des risques sanitaires et le capital humain des maraîchers urbains d’Abidjan.
9La recherche vise à démontrer que le développement du capital humain des maraîchers urbains améliore leurs comportements de prévention face aux risques sanitaires liés aux activités agricoles dans la ville d’Abidjan. L’étude permet non seulement de mieux percevoir la dépendance de la prévention des risques sanitaires sur les sites de culture, au capital humain des maraîchers. Par ailleurs, elle permet d’attirer l’attention des autorités agricoles et sanitaires et la communauté maraîchère sur les stratégies d’amélioration des comportements de prévention des risques sanitaires à travers le renforcement de l’éducation et de l’expérience professionnelle des maraîchers de la ville d’Abidjan.
- 4  L’importance des zones est définie en terme du nombre d’exploitants agricoles que nous verrons plu (...)
- 5  Cette zone a donc été ciblée compte tenu de la problématique des risques sanitaires liés à l’utili (...)
10Le champ d'étude choisi comprend sept (7) zones maraîchères de la ville d'Abidjan (figure 1). Ces zones définies comme étant les plus importantes de la ville4, se trouvent dans les communes de Koumassi (zones 1 et 2), Marcory (zones 3, 4 et 5), Port-Bouët (zone 6) et Cocody (zone 7). La majorité des zones occupent des berges lagunaires – et donc, constituent des sites de drainage d’eaux usées de la ville et bien souvent, de dépôts sauvages d’ordures ménagères et de matières fécales ; à l'exception de la zone 6 (plus vaste en superficie), qui est une zone d’agriculture intensive5. Les terrains cultivables sont empruntés et sont des domaines publics ou privés. Les cultures produites sont des feuilles et légumes (p. ex. salade, épinard et menthe), légumes-fruits (p. ex. gombo, aubergine et poivron) et légumes-bulbes (p. ex. oignon et poireau).
11Le champ social abidjanais en agriculture urbaine est caractérisé par un système de relations concurrentielles et complémentaires entre acteurs et groupes pour exister et se faire reconnaître. Les modes d’interactions entre les acteurs sociaux dont la communauté maraîchère d’une part et l’Etat, les sociétés privées et les particuliers d’autre part, sont souvent d’ordre coopératif ou conflictuel. Leurs rapports restent influencés par les intérêts ou les priorités et préoccupations. Ceux-ci sont définis aussi bien par les avantages économiques, récréatifs et écologiques de l’agriculture urbaine que par ses obstacles et risques d'ordre politique ou réglementaire.
Figure 1. Identification de la zone d’étude
12Abidjan, capital économique de la Côte d’Ivoire, est un pôle d’attraction des populations rurales et étrangères. Elle présente une mosaïque de populations qui relève une stratification sociale allant des hauts cadres, des grands industriels et sociétaires aux travailleurs subalternes, ouvriers, débrouillards et chômeurs. Selon le dernier recensement de 1998, la population de la ville d'Abidjan est estimée à 2 877 948 habitants. La capitale administrative de la Côte d'Ivoire est la ville la plus peuplée de Côte d'Ivoire. Le taux de croissance estimé à 4,3 % par an prévoit que la population devrait doubler à l'aube de 2010 avec environ 6 millions d'habitants et atteindre les 9 millions à l'horizon 2020. Ces fortes poussées démographiques sont combinées à une forte urbanisation. Elle connaît un accroissement de son aire habitable et économique considérable. Les activités économiques des populations de la ville d’Abidjan sont diversifiées. Elles couvrent l’ensemble des secteurs d’activités et comprennent la diplomatie, les nouvelles technologies de l’information et de la communication, la banque, la bourse, le commerce, l’artisanat, l’industrie, le transport, l’agriculture. Parmi ces activités, celle qui nous intéresse pour les besoins de notre étude est l’agriculture telle que pratiquée en ville par une frange de la population d’une certaine classe sociale. La majorité des agriculteurs sont des citadins de longue date, appartenant à des catégories relativement défavorisées - et souvent, des femmes. Ces agriculteurs opèrent dans des conditions extrêmement précaires. Outre l’insécurité foncière et les difficultés d’approvisionnements et de commercialisation, il demeure difficile, pour ces exploitants pauvres, de trouver des terres de qualité qu'ils peuvent exploiter avec des garanties sanitaires minimales.
13Les critères de sélection ont été le lieu de travail, le statut familial, l'âge, le cadre et la durée d’exploitation. En ce qui concerne le lieu de travail, les individus qui ont composé notre échantillon sont ceux travaillent sur les sites des quartiers prédéfinis. Seules les chefs de ménage ne pouvaient faire partie de l’échantillon, quelque soit leur sexe. Les individus ayant composé notre échantillon ont un âge d’au moins de 15 ans.
14Pour le cadre et la durée, les personnes enquêtées ne doivent pas exercer le maraîchage de façon isolée, c’est-à -dire, dans un cadre domestique et doivent donc appartenir à une communauté maraîchère, tandis que seules les personnes exerçant l’activité agricole urbaine, c’est-à -dire, au moment où se déroule l’enquête, ont été choisies.
15Fonction des informations que dispose le chercheur sur la population mère, les techniques d’échantillonnage ont été élaboré suivant deux volets : d’abord le choix des quartiers où se déroulent l’enquête et la détermination de l’échantillon proprement dit. Le choix des lieux de l’enquête s’est basé sur la carte de localisation des activités maraîchères en zones urbaines et périurbaines d’Abidjan (Figure 1). A propos des personnes à enquêter, l’échantillon a été constitué à partir de la méthode des quotas. C’est une méthode d'échantillonnage qui consiste à s'assurer de la représentativité d'un échantillon en lui affectant une structure similaire à celle de la population de base. Nous avons opté pour cette méthode pour les raisons suivantes : il n’existe aucune base statistique sur la population de base des agriculteurs urbains de la ville d’Abidjan. Par contre, nous sommes certains de rencontrer un nombre important de personnes qui pratiquent cette activité à des endroits précis tels les espaces verts ou les terrains en construction inachevée appartenant à des structures publiques ou privées ou à des particuliers et des terrains non lotis (bas-fonds, les berges lagunaires, etc.). Ainsi pour obtenir notre échantillon, nous avons interrogé de façon intuitive les personnes rencontrées sur les sept (07) sites agricoles répertoriés dans cinq (5) quartiers de la ville d’Abidjan. Pour la détermination de notre échantillon, nous avons opté pour la méthodologie suivante :
16Nous avons considéré que 2 % des habitants des quartiers sont agriculteurs (de façon générale) et 1 % de ceux-ci est agriculteurs urbains :
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Nous avons déterminé le nombre d’agriculteurs,
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Nous avons cherché les 2 % du nombre des agriculteurs,
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Nous avons déterminé encore 1 % de l'effectif des agriculteurs urbains,
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Nous avons procédé maintenant à un tirage au hasard de x % de l’effectif d’agriculteurs urbains de chaque zone (ou quartier) sur la base de leur étendue.
17Sur cette base, voici ce qui se s’est dégagé au niveau de chaque zone, Zone 1 et 2 (Koumassi) : 70 % ; Zone 3, 4 et 5 (Marcory) : 95 % ; Zone 6 (Port-Bouët) : 60 % ; Zone 7 (Cocody) : 48 %.
18En récapitulatif nous avons, Zone 1 : Koumassi Camp Commando : 19 maraîchers ; Zone 2 : Koumassi Aklomiambla : 25 maraîchers ; Zone 3 : Marcory Sans-Fil : 19 maraîchers ; Zone 4 : Marcory ATCI 1 : 26 maraîchers ; Zone 5 : Marcory ATCI 2 : 29 maraîchers ; Zone 6 : Port-Bouët ASECNA : 25 maraîchers ; Zone 7 : Cocody M’Pouto : 24 maraîchers.
19Le total nous a donné un effectif de 167 agriculteurs urbains à enquêter. Le taux de sondage définitif correspond alors à 72 % de l’effectif des agriculteurs urbains ciblés.
20Les réponses des enquêtés ont été codifiées et ont fait l’objet d’une saisie et d’une exploitation informatique. Les données des questionnaires ont été saisies dans le logiciel Microsoft Office Excel (version 2003) et les analyses statistiques ont été effectuées dans le logiciel Stata (version 9). Le transfert dans ce dernier s’est fait à l’aide du logiciel StatTransfer.
21Nous avons analysé, à partir des caractéristiques démographiques et socio-économiques et des comportements ou dispositions de prévention, l’importance du capital humain dans la prévention des risques sanitaires chez les maraîchers urbains. A cette fin, nous avons opté pour la méthode de la statistique descriptive permettant, à partir de ces données recueillies, de calculer des fréquences et proportions.
- 6  Il est important de signaler que ces tris croisés ne peuvent pas permettre de conclure à des relat (...)
22L’étude de la relation entre le capital humain et la prévention des risques sanitaires des maraîchers urbains a été effectuée à partir des tris croisés6 entre ces deux modalités. Le capital humain des maraîchers a été calculé à partir des caractéristiques démographiques et socio-économiques. Quant aux modes de prévention des risques sanitaires, ils résultent des proportions des individus qui adoptent ces comportements. Dans cette étude, seules les variables les plus marquées ont été prises en compte pour des raisons analytiques. Les figures (2 et 3) montrent qu’il s’agit de la scolarisation et de l’expérience professionnelle dans le maraîchage urbain pour ce qui concerne le capital humain et de la consommation d’aliments, de l’achat de nourriture avec les vendeurs, de l’arrosage des cultures avec l’eau de puits et de l’achat d’eau de boisson avec les vendeurs pour les modes de prévention. Ainsi dans l'univers des modalités précédemment définies, on a croisé la modalité d’éducation scolaire avec toutes les modalités relatives au mode de prévention. De même que précédemment, on a effectué des tris croisés entre la modalité relative à l’expérience professionnelle dans le maraîchage urbain et les modalités relatives aux modes de prévention.
Figure 2. Profil socio-démographique des maraîchers urbains
Composantes du capital humain
Figure 3. Répartition des maraîchers urbains selon le mode de prévention sur les sites agricoles
23Le croisement des proportions de maraîchers adoptant des comportements de prévention avec celles des scolarisés, a donné les résultats ci-après.
24Seulement 9 maraîchers urbains sont scolarisés et ne consomment pas d’aliments sur le site. Ils représentent 10.7 % de l’ensemble des scolarisés de l’échantillon et 40.9 % des maraîchers qui ne consomment pas. Les maraîchers scolarisés et ayant acheté des aliments avec les vendeurs représentent 90 % des scolarisés de l’échantillon et 52,3 % de ceux qui consomment. Aucun des maraîchers scolarisés n’irrigue d’une source autre que les puits. Au sein des maraîchers achetant l’eau de boisson avec les vendeurs ambulants (79), on a 94,05 % des scolarisés de l’échantillon et 50,6 % de ceux qui ont achetés de l’eau.
25Les résultats des tests croisés entre les proportions de maraîchers adoptant des comportements de prévention avec celles de ceux ayant huit (8) ans d’expérience professionnelle dans le maraîchage urbaine, sont présentés comme suit.
26Les maraîchers ayant une expérience d’au moins de 8 ans dans le maraîchage urbain et ne consommant pas d’aliments sur le site, représentent seulement 9,4 % des expérimentés de l’ensemble de l’échantillon et 27,3 % de ceux qui prennent cette disposition préventive. On constate que 80 cultivateurs ont moins de 8 ans de présence sur les sites et achètent la nourriture avec les vendeurs. Ils représentent la majorité (77,7 %) des maraîchers non expérimentés et plus de la moitié (60,6 %) des maraîchers achetant avec les vendeurs. Si on considère la modalité ``expérimentés’’ et la modalité ``Arroser avec l’eau de puits’’, on constate que 99 maraîchers sont non expérimentés et arrosent avec l’eau de puits ; soient 96,1 % de ceux qui n’ont pas plus de 8 ans d’expérience dans l’échantillon considéré et 60,7 % des maraîchers qui utilisent ces eaux. Par contre, tous les expérimentés arrosent à partir des puits. Les maraîchers qui n’ont pas au moins 8 de présence sur les sites et achètent l’eau avec les vendeuses ambulantes sont majoritaires (99). Ceux-ci représentent 94,1 % des non expérimentés de l’échantillon et 62,2 % des maraîchers qui ne boivent pas l’eau vendue en sachet.
- 7  Il est important de signaler que ces tris croisés ne peuvent pas permettre de conclure à des relat (...)
27Les données de l’enquête permettent de connaître les logiques de comportements préventives des agriculteurs urbains face aux risques sanitaires de leur environnement de travail - ou tout simplement - liés à leurs activités. Les résultats des tests croisés7 entre les proportions des individus adoptant des dispositions préventives et celles de ces individus avec leur niveau de capital humain, montrent que :
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L’effet de la scolarisation sur l’abstinence de consommation d’aliments sur les sites peut être moindre ;
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La scolarisation peut influencer grandement l’achat d’aliments avec les vendeurs ;
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L’arrosage avec les eaux de puits n’est nullement influencé par la scolarisation ;
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Il peut y avoir un lien entre la scolarisation et l’achat d’eau de boisson avec les vendeurs ambulants ;
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L’expérience d’au moins 8 ans dans l’agriculture urbaine ne peut justifier l’abstinence de consommation d’aliments ;
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L’expérience pourrait expliquer l‘achat de nourriture avec les vendeurs ;
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L’expérience d’au moins 8 ans peut avoir un effet sur l’arrosage à partir des puits ;
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L’achat d’eau de boisson avec les vendeurs peut être influencé par l’expérience dans l’agriculture urbaine.
- 8 Les recommandations de cette partie s’appuie sur le Programme SAFEWORK de l’OIT qui a pour but de s (...)
- 9  Se définit comme étant la capacité de la société à assurer le bien-être de tous ses membres, à min (...)
28Le développement du capital humain améliore la prévention des risques sanitaires des maraîchers urbains. Effet, les actions en concordance avec l’éducation et la communication renforcent efficacement le développement du capital humain des agriculteurs urbains et améliorent par ricocher, les connaissances de ceux-ci en matière de risques sanitaires. La figure 4 montre comment les actions gouvernementales et communautaires agissent sur la prévention des risques sanitaires via les politiques et stratégies de développement du capital humain. Ces dernières devront être conformes au texte de la convention de l’OIT concernant le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail8et compatible avec l’accroissement de la cohésion sociale9.
29Au terme de notre étude, nous retenons que les dispositions ou comportements préventifs adoptés dépendent du capital humain des maraîchers urbains. Cet article a permis de cerner l’ensemble des connaissances en matière d’éducation (scolarisation, expérience professionnelle dans le maraîchage, etc.) qui déterminent leurs dispositions préventives des maraîchers de la ville d’Abidjan (mode de vie au champ : alimentation et approvisionnement en eau, habillement sur le site agricole, etc.). Ces connaissances encore livresques en matière d’éducation sanitaire, les compétences générales relatives à l'alphabétisation et les notions de calcul de base permet aux agriculteurs urbains d’adopter dans leur lieu de travail des attitudes positives d’hygiène et de santé, permettant aux maraîchers de la ville d’Abidjan de se définir une logique de prévention, mérite d’être renforcer dans un souci de développement de leur capital humain. L’action de développement revient en priorité à l’Etat qui mobilise par la suite, le reste de la société. Des recommandations devront donc être formulées au pouvoir public et à la communauté concernée afin que la santé et la sécurité sur les zones de production maraîchère soient un sujet d’intérêt national. Car c’est au Gouvernement qu’il incombe de formuler une stratégie de mise en œuvre de la convention de l’OIT et une politique de cohésion sociale conséquente ; Et aux agriculteurs urbains, de préparer leur réceptivité aux différents programmes de développement à travers la professionnalisation de leur secteur. En somme, les ministères en charge de l’éducation, de la protection sociale, de l’emploi et du travail, de la santé et de l’hygiène publique et des droits de l’homme doivent conjuguer leurs efforts pour qu’avec l’implication totale des maraîchers concernés des ressources soient mobilisées pour la réalisation de programmes de développement intégré dans le secteur de l’agriculture urbaine.
Figure 4. Modélisation du rôle du développement du capital humain dans la prévention des risques sanitaires