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Dossier : La modélisation en sciences de l'environnement : approches et questionnements

Les réservoirs de carbone en forêt boréale à l’est du Canada : acquis et incertitudes dans la modélisation face aux changements climatiques

Aurélie Terrier, Martin Girardin and Yves Bergeron

Abstracts

Climate change is of major concern for forest managers. The boreal forest is becoming increasingly central to discussions on carbon cycling because of its capacity to compensate for anthropogenic carbon emission. The boreal forest captures relatively small amounts of carbon in comparison to more temperate or tropical forests, due its cold climate and the short growing season. However, emission of carbon from dead matter decomposition is also slow, which can result in high levels of organic matter accumulation. Models suggest that the capacity of the boreal forest to capture carbon could increase in response to climate change but current models have too many uncertainties to be able to inform appropriate management decisions, including responses of boreal carbon sinks to climate change. Models are simplifications of complex natural systems and uncertainties arise from the lack of knowledge of all the processes in the system, many of which could be interacting. In this article, we first synthesize processes leading to carbon exchange between the forest and the atmosphere. Secondly, we present current knowledge of climate change impacts on carbon sinks in the boreal forest in eastern Canada. Finally, we discuss three types of uncertainties: the uncertainties in the data, structural uncertainties and unpredictable uncertainties, and we propose recommendations for reducing each type of uncertainties.

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Full text

Introduction

1On peut facilement imaginer les conséquences d’une diminution du débit d’une rivière de 35 % alors que les décisions en matière de gestion de l’eau ont été prises en prévision d’une diminution de 3 à 11 %. La ville de Melbourne, en Australie, compte parmi ces municipalités qui ont investi dans le développement de modèles prédictifs pour la planification de stratégies d’adaptation par rapport aux changements climatiques et qui se retrouvent observateurs d’événements non prévus . L’utilisation des résultats de modélisation en aménagement doit considérer non seulement que la modélisation représente une simplification des systèmes naturels complexes, mais de plus que les connaissances sont souvent incomplètes pour comprendre tous les processus qui peuvent interagir dans un système. L’incertitude et l’erreur sont omniprésentes en modélisation.

2De nombreux facteurs mènent à accroître l’incertitude et le risque d’erreur en modélisation. La possibilité pour un modèle prédictif de commettre une erreur est particulièrement accrue en présence d’événements et de facteurs nouveaux qui n’avaient pas été pris en compte lors de son élaboration. Aussi, l’approche utilisée dans le développement d’un modèle et la gamme d'étalonnage des paramètres contribuent à expliquer une part importante des écarts entre ce qui a été prédit et la réalité. Notons par exemple que des modèles élaborés sur la base unique de mesures statistiques des tendances générales ou de dispersion (par exemple la moyenne et l’écart-type des débits historiques de rivières) n’offrent pas la possibilité de comprendre tous les mécanismes mis en cause. Les paramètres des modèles sont fixés pour des régions et des conditions bien spécifiques. En dehors de leur gamme d'étalonnage, l’utilisation de modèles peut amener un accroissement important du risque d’erreurs.

3Les changements climatiques observés depuis les années 1950 et prévus pour ces prochaines décennies sont associés à une augmentation des concentrations atmosphériques de carbone liée à l’activité humaine . D’ores et déjà plusieurs institutions doivent faire face à des situations imprévues mettant en cause des infrastructures développées à des époques où les changements climatiques n’étaient pas abordés dans le développement de modèles prédictifs. Alors que d’un côté des institutions élaborent sur le développement de plans d’adaptation aux changements climatiques d’autres organisations élaborent sur les plans de mitigation. La compensation de nos émissions serait une stratégie efficace afin de permettre la continuation de nos activités tout en limitant les impacts . En ce sens, la forêt boréale est actuellement au cœur des discussions. En effet, elle constitue un réservoir de carbone qui stocke près des 50 % du carbone des écosystèmes forestiers de la planète, alors qu’elle capte une faible quantité de carbone (0,004 Pg C/m2an) en comparaison avec la forêt tropicale (0,008 Pg C/m2an) ou la forêt tempérée (0,009 Pg C/m2an) . Le climat froid et la saison de croissance courte limitent la croissance des arbres, mais la décomposition de la matière morte, processus qui émet le carbone, y est également faible. La matière organique s’accumule alors en grande quantité dans les sols forestiers. Les efforts de compensation viseraient à accroître la capacité d’assimilation et de stockage du carbone en forêt boréale.

4Serait-il réellement pertinent d’investir dans des aménagements en forêt boréale en vue de compenser les émissions de carbone anthropiques ? Au-delà des nombreux modèles portant sur les échanges de carbone terrestres ayant été développés dans les dernières années (voir  subsistent de nombreuses incertitudes quant à la réponse des réservoirs de carbone naturels face aux changements climatiques. Dans les faits, une récente méta-analyse suggère que les modèles actuels ont une capacité généralement faible à prédire les échanges nets de carbone des écosystèmes terrestres . Les modèles actuels comportent encore trop d’incertitudes pour dresser un portrait précis des changements futurs. Par contre, ces modèles s’avèrent des instruments efficaces dans l’acquisition d’information menant à la compréhension des mécanismes en causes et au développement de scénarios futurs, tant au niveau de l’analyse de risque que de développement de stratégies d’adaptation face aux changements climatiques.

5Cet article constitue une synthèse bibliographique qui met en lumière plusieurs sources d’incertitudes quant à la réponse aux changements climatiques des réservoirs de carbone de la forêt boréale à l’est du Canada. En premier lieu, les processus qui amènent la forêt boréale à l’est du Canada à stocker du carbone seront décrits. Ensuite, les incertitudes par rapport aux impacts des changements climatiques sur les réservoirs de carbone en forêt boréale de l’est du Canada sont catégorisées en fonction de la typologie proposée par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat  : (i) les incertitudes dans les valeurs, (ii) les incertitudes structurelles, et finalement (iii) les incertitudes imprévisibles. À travers cette synthèse nous sensibilisons le lecteur à l’importance des incertitudes en modélisation et nous proposons des recommandations pour les réduire.

La forêt boréale à l’est du Canada : un puits de carbone régi par les perturbations naturelles

6La forêt boréale de l’est du Canada traverse les provinces de l’Ontario, du Québec et de Terre Neuve-et-Labrador (Figure 1). Elle appartient à l’écorégion du bouclier boréal qui s’étend de l’Alberta jusqu’à Terre-Neuve-et-Labrador. Le bouclier boréal est influencé par un climat froid et aride, caractérisé par des hivers longs, sévères et secs et des étés courts chauds et humides . Les températures peuvent varier de -45 °C à +35 °C  et les précipitations annuelles sont en moyenne de 900 mm . Les régions plus à l’est sont influencées par un climat maritime, les températures y sont plus douces et les précipitations plus abondantes que dans les régions de l’ouest (Ontario) caractérisées par un climat continental plus froid et plus sec .

7Le Bouclier canadien est dominé par les conifères, comme l’épinette noire (Picea mariana (Miller) BSP.), l’épinette blanche (Picea glauca (Moench) Voss.) ou le sapin baumier (Abies balsamea(Linné) Miller). Les espèces de feuillus, comme le peuplier faux-tremble (Populus tremuloidesMichaux), le bouleau blanc (Betula papyrifera Marshall) et le bouleau jaune (Betula alleghaniensisBritton) constituent également une large partie de la forêt boréale. Au Québec, la répartition de la végétation suit un gradient latitudinal : la proportion de feuillus diminue avec l’augmentation des latitudes et la forêt boréale est alors dominée par les espèces de conifères, notamment par l’épinette noire, et au sol, par les mousses et les lichens . À la frontière entre l’Ontario et le Québec (au niveau du 49e parallèle Nord), un ancien lac proglaciaire a amené la formation d’une vaste zone argileuse, appelée la Ceinture d’argile (Figure 1). La topographie et le faible drainage des sols argileux favorisent l’accumulation de couches épaisses de matière organique au sol . Les paysages sont alors formés de forêts entourbées peu productives et dominées par l’épinette noire.

Figure 1 : La forêt boréale continue à l’est du Canada.

Figure 1 : La forêt boréale continue à l’est du Canada.

Une forêt constamment modifiée par les perturbations naturelles

8La forêt boréale est constamment influencée par les perturbations naturelles, dont les plus importantes sont les feux et les épidémies d’insectes . Les régimes de perturbations varient spatialement selon les différents réservoirs de carbone.

9Les sols humides des forêts entourbées impliquent une fréquence de feux plus faible, mais la taille et la sévérité des feux sont généralement élevées (Harper et al., 2003 ; Simard et al., 2008). La forêt boréale mixte plus au sud est caractérisée par des feux plus fréquents, mais couvrant des aires plus petites, alors qu’en forêt boréale de conifères, les feux sont plus rares, mais la superficie brûlée plus importante . Les régions de l’Est, influencées alors par le climat maritime humide, sont affectées moins fréquemment et par des plus petits feux que les régions de l’ouest (Ontario) .

10La faible occurrence des feux dans les régions à l’est laisse place à d’autres perturbations naturelles, comme les épidémies d’insectes. La tordeuse des bourgeons de l’épinette (TBE) (Choristoneura fumiferana Clem.) fait partie des espèces qui causent le plus de dégâts en Amérique du Nord  et est particulièrement présente dans la forêt boréale à l’est du Canada . Elle peut affecter des peuplements d’épinette noire ou d’épinette rouge (Picea rubens Sarg), mais l’épinette blanche et surtout le sapin baumier sont les espèces les plus vulnérables . L’épinette noire ou le sapin baumier sont favorisées par l’absence prolongée en comparaison aux espèces de feuillus ou au pin gris. L’épinette noire et le sapin baumier dominent alors petit à petit les paysages. La grande proportion de ces espèces hôtes favoriserait la croissance de la population de la TBE et engendrerait des dégâts importants (voir ). L’épinette noire étant plus faiblement affectée par les épidémies de la TBE, les pessières subissent moins de dommages comparativement aux sapinières situées plus au sud .

Une forêt adaptée aux perturbations

11Le bilan de carbone, c’est-à-dire les échanges de carbone entre la forêt et l’atmosphère, après un feu ou après une épidémie de la TBE suit des patrons similaires quel que soit le type de forêt (Figure 2a) . La différence entre les feux et les épidémies d’insectes réside dans le fait que les émissions de carbone par les feux sont relativement immédiates, alors que les émissions par les épidémies d’insectes peuvent se prolonger sur 4-15 ans . La croissance des arbres après une épidémie d’insectes peut être réduite jusqu’à 75 %  et la mortalité des arbres constitue une source de carbone. Le feu quant à lui peut détruire pratiquement toute la végétation présente. Les feux boréaux canadiens émettent jusqu’à 0,095 Pg C par année .Des estimations des émissions de carbone par une épidémie de la TBE estiment une perte annuelle de 0,0034 Pg pour une superficie de 106 000 km2 . Après la perturbation, la décomposition est alors favorisée par un changement des conditions d’humidité, une augmentation de matériel mort et une augmentation de températures du sol (augmentation de la radiation solaire au sol et, dans le cas des feux, par la chaleur) . Après un feu, les cendres engendrent un changement du pH qui pourrait également influencer les taux de décomposition. La forêt agit alors en tant que source de carbone jusqu’à ce qu’elle se régénère (Figure 2a). Les taux de croissance de la forêt atteignent leur maximum de 12 à 40 ans après la perturbation selon le type de peuplements et les conditions d’humidité au sol . Durant cette période, la forêt peut récupérer une importante quantité de carbone perdue. Avec le vieillissement des forêts, les taux de croissance diminuent, la forêt est proche de l’équilibre en terme d’échange de carbone : la quantité de carbone émise se rapproche de la quantité captée . Dans le cas des forêts entourbées, l’équilibre est rarement atteint. Le bilan est toujours positif, le carbone est toujours accumulé (Lecomte et al, 2006).

Figure 2 : Courbes théoriques de la dynamique du carbone avec le temps pour des forêts non entourbées. A) Schéma comparant les impacts attendus d’une épidémie de la tordeuse des bourgeons à épinette (TBE) et des feux sur les réservoirs de carbone des peuplements depuis le début de la perturbation jusqu’à la maturité des peuplements (Fleming et al. 2002). B) Dynamique du carbone depuis la dernière perturbation pour des peuplements qui régénèrent avec une structure fermée ou ouverte. 1. Les taux d’émission de carbone (décomposition) sont plus élevés que les taux de captages : la forêt est une source de carbone. 2. Les taux de captage sont beaucoup plus élevés que les taux de décomposition : la forêt boréale se régénère. 3. Les taux de captage sont plus ou moins égaux aux taux de décomposition : la forêt boréale est en équilibre .

Figure 2 : Courbes théoriques de la dynamique du carbone avec le temps pour des forêts non entourbées. A) Schéma comparant les impacts attendus d’une épidémie de la tordeuse des bourgeons à épinette (TBE) et des feux sur les réservoirs de carbone des peuplements depuis le début de la perturbation jusqu’à la maturité des peuplements (Fleming et al. 2002). B) Dynamique du carbone depuis la dernière perturbation pour des peuplements qui régénèrent avec une structure fermée ou ouverte. 1. Les taux d’émission de carbone (décomposition) sont plus élevés que les taux de captages : la forêt est une source de carbone. 2. Les taux de captage sont beaucoup plus élevés que les taux de décomposition : la forêt boréale se régénère. 3. Les taux de captage sont plus ou moins égaux aux taux de décomposition : la forêt boréale est en équilibre .

Une régénération qui récupère le carbone

12Comme abordé précédemment, les perturbations émettent de larges quantités de carbone. Toutefois, la forêt boréale est un réservoir, car la régénération de la forêt permet la récupération d’une grande partie du carbone perdu lors de la perturbation naturelle. La récupération du carbone lors de la régénération dépend alors de la fréquence et de la sévérité des perturbations.

13La fréquence des perturbations régit le temps disponible pour récupérer du carbone. Si une seconde perturbation agit avant que les taux de croissance atteignent leur maximum, la capacité de la forêt à récupérer le carbone perdu lors de la première perturbation sera limitée. La sévérité des feux, c’est-à-dire la quantité de matière organique consumée, agit plutôt sur la régénération des forêts et les chemins de succession (les changements de composition et de structure à travers le temps) . Les espèces de feuillus ou le pin gris montrent une tolérance moins grande que l’épinette noire ou blanche à une épaisse couche de matière organique résiduelle . Les feux sévères, en consumant beaucoup de matière organique au sol, permettent la régénération de forêts fermées composées d’espèces feuillues, de pin gris ou, dans les cas des tourbières, d’épinettes noires productives. Quant aux aires affectées par des feux peu sévères, qui ne brûlent que partiellement la matière organique, elles sont recolonisées par des peuplements peu productifs dominés par des épinettes noires . Les études montrent que les forêts de feuillus peuvent capter jusqu’à presque deux fois plus de carbone que les conifères . La régénération des forêts perturbées par des espèces de feuillus permettrait de capter donc plus rapidement de carbone que les conifères. Une étude théorique de l’amplitude de la balance de carbone, pour une forêt en Amérique du Nord de pins constituée d’une fine épaisseur de matière organique, révèle que les peuplements densescaptent plus et plus rapidement de carbone que les peuplements ouverts (Figure 2b) . Ces acquis permettent de supposer que les forêts régénérant après des feux sévères pourraient assimiler plus rapidement du carbone que des forêts issues de feux peu sévères.

14Suite à une épidémie d’insectes, les espèces non tolérantes à l’ombre peuvent se régénérer dans les trouées lorsque la défoliation induit une grande éclaircie. Si la sévérité, c’est-à-dire le pourcentage de défoliation et de mortalité, est faible les espèces tolérantes à l’ombre recoloniseront les sites perturbés. Hennigar et MacLean  ont simulé la dynamique de carbone durant 50 ans pour une forêt de 210 000 ha de superficie pour un scénario sévère et un autre modéré d’épidémie d’insectes. Les résultats pour un même chemin de régénération montrent que la récupération du carbone se fait relativement à la même vitesse.

Des conditions défavorables à la décomposition

15Une fois la forêt régénérée, les arbres croissent, meurent et génèrent de la matière à décomposer. La forêt boréale reste un puits de carbone, car les conditions environnementales ne permettent pas la décomposition de tout le matériel formé. Les processus de décomposition sont le résultat d’interactions complexes entre les taux d’humidité et les températures du sol, ainsi que de la qualité du substrat à décomposer . Des études en laboratoire révèlent que les effets de la température sur les taux de décomposition sont positifs entre 25 et 75 % de saturation en humidité des sols ; à l’extérieur de ces limites, les conditions d’humidité agissent de manière à réduire la décomposition . Lorsque les conditions de température et d’humidité des sols sont optimales, la décomposition de la matière organique dépend alors de la qualité du substrat . Selon Hobbie et al. , l’accumulation de carbone dans les sols boréaux est associée à son caractère particulièrement récalcitrant (carbone difficilement décomposable), notamment dû à la présence de couverts de mousses et de lichens. Les dernières études révèlent que la décomposition de la matière organique au sol ne dépend pas de sa qualité (c.-à-d. la capacité du matériel à être décomposé) , mais que d’autres facteurs agissent sur le caractère récalcitrant du carbone organique, comme une protection chimique et biologique intrinsèque au matériel, la sécheresse, les taux d’oxygène ou la présence pergélisol . Le climat froid, les précipitations et une mauvaise qualité du matériel en forêt boréale à l’est du Canada ralentissent les taux de décomposition et permettent l’accumulation du carbone dans les sols.

Du carbone stocké dans les sols

16Nous avons vu précédemment que les forêts de feuillus ou issues de feu sévères captaient plus rapidement du carbone que les forêts de conifères ou issues de feux peu sévères. Toutefois, la quantité de carbone à travers les différents réservoirs résulte de l’interaction complexe entre les perturbations, les taux de croissance et de décomposition. La forêt boréale stocke relativement la même quantité de carbone dans la biomasse vivante (végétation et système racinaire) (2- 4 kg/m2) (Ruesch et Gibbs, 2008), le carbone est concentré surtout dans les sols. Dans le cas des feuillus, le carbone est rapidement capté, toutefois la forêt boréale mixte constitue un moins grand réservoir (12-16 kg/m2 dans les sols) que la forêt de conifères (16-20 kg/m2 dans les sols) ou que les forêts entourbées (80-120 kg/m2 dans les sols) . En effet, les taux de décomposition sont plus élevés et les perturbations plus fréquentes. Moins de temps est disponible pour que le carbone s’accumule. Dans le cas des forêts entourbées, peu de carbone est capté par la végétation, toutefois les taux d’humidités réduisent considérablement les taux de décomposition et la fréquence des feux, le carbone est continuellement accumulé.

Une réponse incertaine des réservoirs de carbone de la forêt boréale à l’est du Canada aux changements climatiques

17Les changements prévus par les modèles climatiques régionaux pour l’est de l’Amérique du Nord prévoient des températures plus chaudes d’environ 4 °C d’ici la fin de ce siècle en comparaison avec la période de 1961 à 1999 avec des augmentations de température plus importantes durant l’hiver (Figure 3). Les changements des précipitations diffèrent selon les scénarios climatiques utilisés, toutefois la moyenne de tous les scénarios indique une augmentation d’environ 10-20 mm durant l’hiver (décembre-avril) et une diminution durant l’été (juillet-septembre) (Figure 3) (Bergeron et al. 2010). Les périodes de sécheresse durant la saison de croissance devraient donc augmenter (GIEC 2007), les hivers devraient être donc plus doux, , les étés plus longs suite à une fonte de la neige plus hâtive et un début de saison nivale plus tardif .

Figure 3. Écarts prédits dans les températures moyennes mensuelles et dans les précipitations totales mensuelles à l’est du Canada pour (a) 2046-65 et 1961-1999 et (b) 2081 à 2100 par rapport aux niveaux de 1961 à 1999. Ces simulations ont été obtenues en utilisant la moyenne d'un ensemble de sept modèles climatiques pilotés par quatre différents scénarios d'émissions des gaz à effet de serre, pour un total de 19 simulations . Les mois sont Janvier (J) à Décembre (D). Les limites des boîtes indiquent les 25e et 75e percentiles, les moustaches démarquent les 10e et 90e percentile, alors que les traits à l’intérieur des boîtes démarquent la médiane.

Figure 3. Écarts prédits dans les températures moyennes mensuelles et dans les précipitations totales mensuelles à l’est du Canada pour (a) 2046-65 et 1961-1999 et (b) 2081 à 2100 par rapport aux niveaux de 1961 à 1999. Ces simulations ont été obtenues en utilisant la moyenne d'un ensemble de sept modèles climatiques pilotés par quatre différents scénarios d'émissions des gaz à effet de serre, pour un total de 19 simulations . Les mois sont Janvier (J) à Décembre (D). Les limites des boîtes indiquent les 25e et 75e percentiles, les moustaches démarquent les 10e et 90e percentile, alors que les traits à l’intérieur des boîtes démarquent la médiane.

18Les réservoirs de carbone en forêt boréale semblent être actuellement en équilibre . Avec les connaissances actuelles, il est difficile de comprendre si les changements climatiques amèneront la forêt à émettre ou à capter plus de carbone. Sous un climat plus chaud et un été plus long, la forêt boréale pourrait capter plus de carbone. Cette captation pourrait d’autant plus être accentuée sous l’effet direct de l’accroissement de la concentration de CO2 atmosphérique, un fertilisant naturel pour les arbres qui favorise une plus grande productivité primaire nette (PPN). Cet effet fertilisant a à maintes reprises été démontré en laboratoire et milieux contrôlés (ex. Norby et al., 1999 ; Ainsworth et Long, 2005). Cependant, les études sur le sujet ne permettent pas de déceler unanimement l’accroissement de croissance en milieu naturel qui aurait pu accompagner l’augmentation des concentrations en CO2 ayant eu cours dans les dernières décennies, suggérant que cet effet est plus faible que prévu (Norby et al. 2010 ; Hickler et al. 2010 ; Gedalof and Berg 2010 ; Girardin et al. 2011). D’un autre côté, la décomposition devrait également augmenter. De plus, les perturbations naturelles qui émettent de grandes quantités de carbone pourraient être plus fréquentes et plus sévères. Plusieurs prédictions portant sur les régimes des feux pour les forêts boréales à l’est du Canadas’accordent sur les tendances d’une augmentation des superficies brûlées  et de l’occurrence des feux . Toutefois, peu d’études existent quant à la sévérité des feux . Enfin, une étude proposée par Gray  indique que la sévérité des épidémies de TBE pourrait augmenter de 0-25 % pour la limite sud de la forêt boréale, alors qu’elle pourrait augmenter de 26-50 % vers la limite nord. Face à l’accroissement des perturbations, la capacité de la forêt à agir en tant que puits pourrait donc diminuer et ceci pourrait avoir un effet cumulatif aux émissions anthropiques (p. ex. ).

19L’analyse des incertitudes et des erreurs est un élément essentiel en modélisation  : elle a pour but de donner des priorités aux mesures nécessaires pour améliorer l’exactitude des prédictions et de faciliter la prise de décisions en matière de choix méthodologique. L’analyse des incertitudes dans cette synthèse ne vise pas à contester la validité d’un modèle en particulier. Le GIEC  suggère une typologie des types d’incertitudes comme suit : (i) les incertitudes dans les valeurs, traduites par des données manquantes, imprécises ou non représentatives, (ii) les incertitudes structurelles, qui comprennent le manque de connaissances, et finalement (iii) les incertitudes imprévisibles. Dans cette section nous dressons un bilan de quelques principales sources d’incertitude qui subsistent dans notre capacité à prédire la réponse aux changements climatiques des réservoirs de carbone de l’est du Canada, avec une emphase particulière sur les effets directs et indirects provenant des changements dans les régimes de perturbations.

Les incertitudes de données

20Plusieurs méthodes empiriques sont utilisées pour estimer les quantités de carbone stockées dans les réservoirs de carbone. Les plus communes sont la modélisation atmosphérique par inversion, les inventaires forestiers ou les méthodes de covariance des turbulences (eddy covariance) (Fan et al. 1998 ; House et al. 2003 ; Hyvönen et al. 2007 ; Luyssaert et al. 2007 ; Malhi et al. 1999). La modélisation atmosphérique par inversion se base sur le fait que les flux de carbone des terres ou des océans sont reflétés de manière spatiale et temporelle sur les concentrations de carbone dans l’atmosphère . Des modèles dits par inversion estiment les échanges de carbone entre les milieux terrestres et océaniques à partir de concentrations de carbone atmosphérique. Les inventaires forestiers dressent un portrait de la forêt pour une superficie donnée. À partir de l’interpolation de ces données, il est possible d’estimer une quantité de carbone stockée en la forêt boréale au complet. La méthode de covariance des turbulences correspond à un système très complexe constitué d’un anémomètre (mesure du vent) et d’un analyseur à infrarouge de gaz qui mesure les flux de carbone atmosphériques. Chaque méthode donne des estimations de la quantité de carbone stockée et chacune contient un degré d’imprécision et d’incertitudes propre aux méthodes utilisées. Elles sont actuellement bien connues (House et al. 2003 ; Luyssaert et al. 2007). De plus, le manque de données constitue un frein quant à l’acquisition de nouvelles connaissances sur les réservoirs de carbone. Par exemple, il n’existe que peu d’études qui évaluent la quantité de carbone dans les sols.

21Des progrès technologiques et l’acquisition de données manquantes pourraient éventuellement réduire ces incertitudes et permettre de nouveaux axes de recherches. Concernant l’incertitude liée aux moyens technologiques et au manque de données, une quantification des erreurs et des analyses de rééchantillonnages avec remise (« bootstrap ») sont suggérées afin de considérer l’incertitude dans les décisions d’aménagement (Tableau 1).

Tableau 1 : Recommandations dans le but de réduire les incertitudes dans les projections de la réponse aux changements climatiques des réservoirs de carbone de la forêt boréale à l’est du Canada.

Tableau 1 : Recommandations dans le but de réduire les incertitudes dans les projections de la réponse aux changements climatiques des réservoirs de carbone de la forêt boréale à l’est du Canada.

Les incertitudes structurelles

22Le manque de données décrit plus haut génère des incertitudes dites « structurelles », induites par un manque de connaissance sur les processus actuels et sur la réponse future des réservoirs de carbone face aux changements climatiques. Les incertitudes structurelles peuvent être séparées en quatre parties : (i) les incertitudes concernant les changements des régimes de perturbations ; (ii) les incertitudes concernant les impacts directs des changements du climat sur les bilans de carbone ; (iii) les incertitudes des impacts des changements climatiques sur la dynamique de végétation ; et finalement (iv) les incertitudes sur la variabilité spatiale dans la réponse des réservoirs de carbone.

Les changements des régimes de perturbations

23Les prédictions de changements dans l’activité des feux pour l’est du Canada sont pour la majorité obtenues par une approche de modélisation empirique : un modèle mathématique qui s’appuie sur des variables décrivant les processus d’assèchement des différentes couches de matière organique des sols et de comportement des feux . Parce qu’ils reposent sur un modèle empirique développé à partir d’une gamme restreinte de valeurs, ces modèles pourraient s’avérer limités sous des conditions changeantes. Un manque de connaissance des différents processus impliqués exclut des modèles prédictifs certains facteurs importants. Ainsi, la majorité des modèles ne considèrent pas les rétroactions des changements dans la végétation sur les comportements des feux . En effet, la composition et la structure de la végétation influencent les feux par la disponibilité du carburant (type de couvert, feuillus versus conifères par exemple) et les régimes d’humidité . Des simulations numériques indiquent qu’une modification du territoire forestier peut avoir une incidence importante sur le comportement des feux . Aussi, aucun modèle ne fournit encore l’information sur la sévérité des feux . Les modèles présument que ces conditions sont constantes à travers le temps, alors que les nouvelles conditions climatiques pourraient mener à un accroissement de la sévérité des feux . D’autres études portant sur la caractérisation des feux apportent également leur lot d’incertitudes liées à l’aspect aléatoire du feu. En effet, même si les conditions sont favorables pour un feu, la source d’allumage (foudre, humain) est souvent absente de l’élaboration des modèles prédictifs . Une prédiction pourrait donc s’avérer erronée si un changement important avait lieu dans la fréquence des sources d’allumage, induit par exemple par l’accroissement de l’utilisation des territoires forestiers par l’humain. Notons que les connaissances portant sur les effets orographiques ainsi que sur les changements de la saisonnalité des feux, notamment en association avec une fonte précoce du couvert de neige, sont toujours méconnues .

24Il existe peu d’études qui traitent des impacts de la TBE sur les réservoirs de carbone. Les recherches actuelles n’intègrent pas les changements de la composition et de la structure forestière. Selon Morin et al. , seuls les changements dans la végétation induite par les régimes de feux pourraient causer un changement dans les régimes de la TBE. Les régions qui subiront une diminution de l’occurrence des feux pourraient être plus susceptibles aux épidémies et inversement pour les régions qui seront affectées par des feux plus fréquents. L’absence prolongée de feux dans les régions à l’Est favorise actuellement la dominance du sapin baumier, l’espèce hôte de la TBE la plus affectée. Une éventuelle augmentation des feux pourrait diminuer son importance et par conséquent réduire ses impacts. D’un autre côté, les taux de survies de la TBE sont pour l’instant réduits par le climat froid durant la saison de reproduction ; un réchauffement climatique pourrait permettre un taux de survie des individus plus élevé. Au contraire, une réduction de l’espèce hôte pourrait augmenter le taux de mortalité par un manque de nourriture. Un manque de nourriture pourrait également amener l’espèce à affecter plus l’épinette noire. Finalement, d’autres espèces d’insectes pourraient être favorisées par la diminution des impacts de la ou par les nouvelles conditions environnementales. Le réchauffement climatique pourrait amener, par exemple, le dendoctrone du pin (Dendroctonus ponderosae Hopkins), confiné dans l’ouest du Canada, à s’étendre sur de plus grandes aires de distribution, et à atteindre la forêt boréale à l’est .

Les impacts directs du changement de climat

25Une des questions majeures est de prévoir si les taux de décomposition dépasseront les taux de croissance et réduiront l’accumulation de la matière organique. Une augmentation des températures et un allongement de la saison de croissance pourraient favoriser la décomposition des sols entre 25 % et 75 % d’humidité dans leur sol et la croissance des arbres (Kurz et al., 2009 ; Girardin et al., 2008 ; Euskirchen et al., 2006 ; Peng and Apps, 1999). Toutefois, les sols pourraient être affectés par un manque d’eau suite à la diminution des précipitations durant la saison de croissance. Une augmentation des périodes de sécheresse limitera la décomposition des sols secs contenant moins de 25 % de taux d’humidité. D’un autre côté, un manque d’eau pourrait également ralentir la croissance, la productivité des forêts pourrait empêcher les forêts de compenser les pertes de carbone . Dans leur méta-analyse, Schwalm et al.  notent des lacunes importantes au niveau de la compréhension de la phénologie des espèces et dans la capacité à prédire l’impact des sécheresses sévères sur le flux de carbone. Les changements dans les extrêmes climatiques pourraient avoir plus d’impacts sur les réservoirs de carbone qu’un changement dans les tendances climatiques. Des études concernant les impacts des variations des taux d’humidité du sol sur les bilans de carbone devraient être entreprises. De plus, une réduction sur les incertitudes sur les impacts directs du changement du climat pourrait améliorer les connaissances sur les changements des perturbations puisque les taux de croissance et de décomposition affectent directement la quantité du combustible disponible pour les feux.

Les impacts de la dynamique de la végétation

26La végétation en forêt boréale répond plus rapidement aux effets indirects d’un changement de régime de feux qu’aux effets directs induits par des modifications de conditions climatiques . Ainsi les incertitudes sur les changements de perturbations génèrent des incertitudes sur les impacts de la dynamique de la végétation. En effet, les changements prévus dans les régimes de perturbations amèneront des changements dans la structure et la composition de la forêt boréale à l’est du Canada , et par conséquent sur la balance de carbone à long terme.

27Aucune projection n’existe sur les rétroactions qu’un changement de perturbations pourrait avoir sur la végétation de la forêt boréale à l’Est du Canada. Une augmentation de l’occurrence et de la sévérité des feux pourrait amener un enfeuillement et un rajeunissement des paysages forestiers . Un enfeuillement et un rajeunissement des paysages par le changement des régimes de perturbations permettront peut-être aux forêts de capter plus rapidement la quantité de carbone perdue si la sévérité de la perturbation augmente. Toutefois, comme nous avons vu précédemment, les forêts dominées par des feuillus étaient de moins grands réservoirs de carbone que les forêts de conifères, les stocks de carbone pourraient être moins élevés. S’ajoutent à ces modifications la migration des espèces suite à un réchauffement du climat. Plusieurs études annoncent une migration vers le nord de la forêt boréale et de la forêt tempérée . À la limite sud, les conditions climatiques favoriseront l’établissement des espèces moins tolérantes au froid au détriment des espèces boréales. L’érable à sucre (Acer saccharum) pourrait s’installer plus au nord, car il est capable de croître dans des conditions environnementales boréales . Toutefois, les régimes des perturbations et les conditions du sol devraient également jouer un rôle sur la migration des espèces. Des études révèlent que l’expansion du pin gris a été ralentie dans la forêt boréale à l’est du Canada à cause de la fréquence des feux trop faible . Une éventuelle augmentation de la fréquence des feux pourrait favoriser une expansion du pin gris vers le nord. La formation de nouvelles forêts devrait également être étudiée dans le but de comprendre la réponse future des réservoirs de carbone et des régimes de perturbations en forêt boréale à l’est du Canada.

28Deuxièmement, comme mentionnée précédemment dans le paragraphe sur les incertitudes des changements de perturbations, une modification de la végétation induite par les changements des régimes des perturbations pourrait changer les émissions de carbone générées par la TBE. De plus, aucune étude n’intègre la récupération du carbone après une épidémie d’insecte selon différentes voies de régénération. Précédemment, nous avons vu qu’après un feu sévère, bien qu’une grande quantité de matière organique est brûlée, les taux de croissance permettent une récupération de carbone rapide, puisque la forêt régénère par des forêts plus productives. Comment le bilan du carbone évolue-t-il avec le temps après une épidémie d’insecte sévère ? Une augmentation de la fréquence et de la sévérité des épidémies induira un rajeunissement des forêts. Comment les puits de carbone répondront-ils ? D’autre part, aucune étude ne traite des effets de la végétation du sous-bois et des espèces non hôte sur la récupération du carbone. Lors d’une épidémie de la TBE, une grande quantité de la forêt est alors laissée intacte ; la mortalité des espèces hôtes pourrait augmenter leur capacité à capter du carbone par une réduction de la compétition. Est-ce que les changements climatiques modifieront-ils les capacités de régénération des espèces hôtes ou des espèces non-hôtes ?

29Plusieurs études sont donc nécessaires afin de combler les lacunes dans les connaissances de la dynamique de la végétation et de sa réponse aux changements climatiques. La méthodologie proposée par Bond-Lamberty et al.  consiste à mesurer la balance de carbone selon une chronoséquence sur 150 ans. Cette méthode peut être adéquate pour l’étude de la dynamique de la balance de carbone, si les peuplements choisis pour représenter la chronoséquence reflètent bien la dynamique forestière. Le manque de donnée (incertitudes de données) est la principale source de cette incertitude. L’acquisition de nouvelles données étant relativement coûteuse, la modélisation serait un bon complément afin de comprendre la balance de carbone après une perturbation selon le type de peuplement (Chen et al. 2003). De plus, de nouvelles connaissances concernant l’impact des changements de végétation sur les taux de décomposition et de croissance à long terme sont nécessaires. Dans le but de réduire l’incertitude, il est essentiel de développer des modèles sur la dynamique des puits de carbone en fonction de la dynamique forestière et selon différents comportements de perturbations naturelles. De plus, l’amélioration de ces connaissances permettra de réduire les incertitudes des perturbations naturelles, par les effets rétroactifs que la végétation a sur les régimes de perturbations.

Une variabilité spatiale dans la réponse des réservoirs de carbone

30La réponse des réservoirs de carbone devrait différer spatialement en fonction des réservoirs de carbone.

31Selon Lavoie et al. , les forêts entourbées seront probablement moins affectées par la variabilité climatique que le reste de la forêt boréale. Elles pourraient continuer à stocker de grandes quantités de carbone. La réponse de ces forêts dépendra principalement de la réponse des niveaux de la nappe phréatique. Si les changements des températures et des précipitations ne sont pas suffisants pour contrecarrer la saturation en eau des sols, les niveaux de la nappe pourraient rester similaires. Les régimes de feux, les taux de croissance et de décomposition ne seraient alors pas modifiés, de plus les conditions du sol (pauvres en nutriments et saturées en eau) devraient empêcher l’établissement d’espèces plus méridionales. Les paysages entourbés devraient montrer alors peu de variations en termes de structure, de composition et de capacité à stocker du carbone. Toutefois, l’état actuel des connaissances en reste au niveau des suppositions. Par ailleurs, les milieux tourbeux, par leurs conditions anaérobiques, émettent de grandes quantités de méthane (CH4) , le gaz à effet de serre contribuant le plus fortement au réchauffement global . Une augmentation de la superficie couverte par les milieux tourbeux pourrait amener de plus grandes émissions de CH4. Quelle sera alors la contribution des milieux tourbeux sur l’effet de serre ? Des informations sur le rôle des émissions de CO2et de CH4des milieux tourbeux sur le climat, ainsi que leur réponse aux changements futurs attendus sont indispensables pour projeter la réponse future des réservoirs de carbone de la forêt boréale à l’est du Canada.

32La forêt boréale mixte au sud devrait répondre différemment que la forêt boréale de conifères située plus au nord. Comme abordés précédemment, les paysages au sud sont constitués d’un mélange de feuillus et de conifères, alors qu’au nord la proportion de feuillus diminue et les paysages sont dominés majoritairement par les conifères. Les études montrent que les réservoirs de carbone des forêts de conifères semblent moins affectés par la variabilité climatique et les conditions de sécheresse que dans les forêts feuillues . Toutefois, ces dernières captent moins et plus lentement le carbone . L’enfeuillement progressif des paysages, c'est-à-dire à la domination de plus en plus élevée des espèces de feuillues dans le paysage par rapport aux conifères, pourrait amener une augmentation de la sensibilité de la forêt boréale à la variabilité climatique et à la sécheresse, mais peut-être aussi à une diminution de carbone stockée. Toutefois, la forêt boréale pourrait être plus affectée par un stress hydrique (p. ex. .

33Certaines régions pourraient devenir des sources, d’autres des puits, d’autres seront plus sensibles aux changements de la variabilité climatique, d’autres moins. De telles lacunes augmentent par ailleurs les incertitudes reliées aux impacts directs du climat : si nous ne savons pas quelle sera la sensibilité des forêts futures à la sécheresse, il est encore plus difficile de savoir si les éventuelles augmentations des taux de croissance compenseront les taux de décomposition. Les analyses qui n’intègrent pas ces variations spatiales ne peuvent donc pas offrir de résultats définitifs quant à la future contribution de la forêt boréale aux changements climatiques. Des projections également sur le rôle futur des milieux tourbeux sur les stocks de carbone, notamment des changements des niveaux de la nappe phréatique, ainsi que leurs conséquences sur les régimes de perturbations et les taux de décomposition et de croissance, sont nécessaires pour connaître l’impact futur des forêts entourbées sur les stocks de carbone.

Les incertitudes imprévisibles

34Dans un contexte de changements climatiques et des impacts qu’ils pourraient engendrés, il est important de garder en tête que plusieurs aspects resteront imprévisibles et que les incertitudes persisteront.

35La première incertitude imprévisible réside dans la difficulté de projeter les changements futurs d’un système chaotique. Un système chaotique est un système dans lequel les relations entre les différentes composantes ne sont pas constantes dans le temps. Le climat est considéré comme un système chaotique . Les modèles climatiques généraux et régionaux utilisés pour les projections obtiennent des prédictions de température relativement satisfaisantes, tandis que les prédictions des régimes de précipitations par exemple comportent une incertitude notable, notamment à cause de leur caractère aléatoire . Les changements dans les patrons de précipitations vont jouer un rôle important sur les différents flux de carbone par leur effet sur l’humidité des sols. L’incertitude liée à la nature chaotique du climat est donc importante.

36Une autre incertitude qui devrait se maintenir est la difficulté de prédire le comportement humain futur. Le changement dans les paysages forestiers par la déforestation et la fragmentation du paysage pourrait être la principale cause des changements dans la capacité de la forêt à capter du carbone à long terme. Le manque de ressource forestière au sud a amené les compagnies forestières à exploiter la forêt boréale de plus en plus vers le nord. Quels pourraient être les impacts d’une augmentation des besoins en ressources naturelles provoquée par une augmentation de la population humaine sur les stocks de carbone ? La forêt pourrait éventuellement retrouver naturellement un nouvel équilibre avec nouvelles conditions climatiques, mais est-ce qu’une modification anthropique du territoire forestier pourrait empêcher un nouvel équilibre d’être atteint ?

37Finalement, une grande incertitude difficilement prévisible est l’établissement des espèces invasives dans la forêt. Les perturbations naturelles et les fortes variations climatiques retrouvées en forêt boréale créent actuellement un milieu inhospitalier pour les espèces exogènes. Les espèces retrouvées en forêt boréale sont le reflet d’une longue adaptation aux conditions extrêmes. Si les changements du climat amènent des conditions plus favorables pour des écosystèmes limités plus au sud, est-ce que certaines espèces envahissantes auront la capacité de s’établir en forêt boréale ?

38Comme proposée par le GIEC 2005, l’utilisation de plusieurs scénarios permet de proposer un rang de possibilité et semble être une approche adéquate face aux incertitudes imprévisibles. De plus en plus, les propositions d’aménagement afin de réduire ou de compenser les impacts des changements climatiques se basent sur une moyenne d’un ensemble de résultats projetés avec plusieurs scénarios.

Conclusion

39Cette synthèse s’intéressait aux incertitudes de la réponse des réservoirs de carbone de aux changements climatiques prévus pour la forêt boréale à l’est du Canada. La catégorisation des incertitudes a permis de pointer les lacunes dans les connaissances, de diriger de nouvelles recherches, et de proposer des solutions afin de les considérer. Nous mettons également en évidence la connexion qui existe dans chacune des incertitudes présentées ici, un apport des connaissances dans chacune d’entre elles aura des impacts sur toutes les incertitudes de manière globale. Bien que plusieurs solutions sont proposées pour réduire les incertitudes de données ou structurelles, les incertitudes imprévisibles ou liées aux technologies sont toutefois difficiles à résoudre : elles subsisteront toujours. Elles ne doivent toutefois pas être un frein à l’aménagement adaptatif et compensatif. Un aménagement qui tient compte de la variabilité spatiale et des extrêmes climatiques au lieu des tendances générales, ainsi que la conservation de zones non aménagées (aires protégées) pourrait être des stratégies efficaces pour faire face à ces incertitudes.

Remerciements

40Les auteurs remercient Bill de Groot, Changhui Peng et les deux réviseurs anonymes pour la relecture de la synthèse et leurs commentaires particulièrement pertinents pour l’amélioration du texte. Ils remercient également Mélanie Desrochers pour l’établissement de la figure 1, ses révisions et ses commentaires, ainsi que Jenna Jacobs pour les révisions anglophones. Ce travail a été effectué dans le cadre d’un cours au programme au doctorat des sciences de l’environnement à l’Institut des sciences de l’environnement de l’Université du Québec à Montréal. Les auteurs souhaitent remercier Dolores Planas et Francine Tremblay, les professeures de ce cours.

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Title Figure 1 : La forêt boréale continue à l’est du Canada.
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/11587/img-1.png
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Title Figure 2 : Courbes théoriques de la dynamique du carbone avec le temps pour des forêts non entourbées. A) Schéma comparant les impacts attendus d’une épidémie de la tordeuse des bourgeons à épinette (TBE) et des feux sur les réservoirs de carbone des peuplements depuis le début de la perturbation jusqu’à la maturité des peuplements (Fleming et al. 2002). B) Dynamique du carbone depuis la dernière perturbation pour des peuplements qui régénèrent avec une structure fermée ou ouverte. 1. Les taux d’émission de carbone (décomposition) sont plus élevés que les taux de captages : la forêt est une source de carbone. 2. Les taux de captage sont beaucoup plus élevés que les taux de décomposition : la forêt boréale se régénère. 3. Les taux de captage sont plus ou moins égaux aux taux de décomposition : la forêt boréale est en équilibre .
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/11587/img-2.jpg
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Title Figure 3. Écarts prédits dans les températures moyennes mensuelles et dans les précipitations totales mensuelles à l’est du Canada pour (a) 2046-65 et 1961-1999 et (b) 2081 à 2100 par rapport aux niveaux de 1961 à 1999. Ces simulations ont été obtenues en utilisant la moyenne d'un ensemble de sept modèles climatiques pilotés par quatre différents scénarios d'émissions des gaz à effet de serre, pour un total de 19 simulations . Les mois sont Janvier (J) à Décembre (D). Les limites des boîtes indiquent les 25e et 75e percentiles, les moustaches démarquent les 10e et 90e percentile, alors que les traits à l’intérieur des boîtes démarquent la médiane.
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/11587/img-3.png
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Title Tableau 1 : Recommandations dans le but de réduire les incertitudes dans les projections de la réponse aux changements climatiques des réservoirs de carbone de la forêt boréale à l’est du Canada.
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/11587/img-4.png
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References

Electronic reference

Aurélie Terrier, Martin Girardin and Yves Bergeron, « Les réservoirs de carbone en forêt boréale à l’est du Canada : acquis et incertitudes dans la modélisation face aux changements climatiques Â», VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [Online], Volume 11 Numéro 3 | décembre 2011, Online since 19 March 2012, connection on 22 May 2013. URL : http://vertigo.revues.org/11587 ; DOI : 10.4000/vertigo.11587

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About the authors

Aurélie Terrier

Étudiante au Doctorat, Institut des Sciences de l’environnement, Université du Québec à Montréal, C.P. 8888, Succ. Centre-Ville, Montréal, (Québec) Canada H3C 3P8, Courriel : terriea0@gmail.com

Martin Girardin

Chercheur scientifique, centre de foresterie des Laurentides 1055, rue du P.E.P.S, C.P. 10380 Québec (Québec) Canada G1V 4C7, Courriel : Martin.Girardin@RNCan-NRCan.gc.ca.

Yves Bergeron

Professeur, Université du Québec à Montréal, C.P. 8888m Succ. Centre-Ville, Montréal (Québec), H3C 3P8 et Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, 445, boul. de l'Université, Rouyn-Noranda (Québec), J9X 5E4, Courriel : Bergeron.yves@uqam.ca / yves.bergeron@uqat.ca

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