1La mise en place des politiques environnementales dans le monde fait l’objet d’un intérêt croissant en raison du rythme attesté de plus en plus rapide de la dégradation des écosystèmes (MEA, 2005) et de ses conséquences probables sur le développement économique et humain (Stern, 2006).
2Jusqu’à présent, les politiques de conservation de la biodiversité et plus généralement de gestion des ressources naturelles reposaient largement sur les principes d’une intervention réglementaire et coercitive des États en lien avec la mise en place progressive d’un droit international de l’environnement. Les dispositions prises à cet égard ont pourtant globalement échoué à enrayer la tendance observée depuis les années soixante-dix. En matière de conservation et en parallèle à la politique de protection consistant principalement à réglementer l’usage des terres au sein d’aires protégées et délimitées par l’État, les acteurs du développement (ONG notamment) et bailleurs internationaux se sont tournés vers la mise en place de projets intégrés de conservation et de développement (PICD).
3Aujourd’hui, les notions de service écosystémique et de paiement pour service rendu participent d’une nouvelle rhétorique visant à faire évoluer les pratiques de conservation vers des approches tenant davantage compte des « transferts de ressources » entre les bénéficiaires des services et les acteurs responsables de la protection de l’écosystème (dits fournisseurs). En d’autres termes, les transferts bénéficiaires-fournisseurs sont réalisés via des dispositifs de rémunération destinés à créer « les incitations économiques nécessaires à un alignement des décisions individuelles et collectives d’usage de la terre avec l’intérêt général de conservation des écosystèmes » (Muradian et al., 2009). Les dispositifs s’y référant tels ceux qualifiés de paiements pour services environnementaux (PSE) deviennent de plus en plus populaires comme outil de conservation de la forêt dans les pays en développement (Corbera et al., 2009; Ferraro, 2012; Ferraro et al., 2002; Pagiola, 2008; Wunder, 2005).
4À cet égard, les pays d’Asie du Sud-est attirent l’attention, d’une part, parce qu’ils hébergent de vastes zones naturelles et forestières aujourd’hui très menacées, d’autre part, parce que la mise en place des politiques publiques en la matière est encore balbutiante (ASEAN Economic Bulletin, 2008). Les instruments dits de marché incluant les dispositifs de rémunération, analysés dans le présent article, s’y diffusent rapidement comme le montrent les travaux de la Banque asiatique de développement (Adhikari, 2009). Le Cambodge s’inscrit dans une tendance similaire. On y observe, depuis 2007, une multiplication des initiatives de certains bailleurs internationaux et ONG destinées à mettre en place des projets pilotes de PSE (Clements et al., 2009).
5Notre contribution porte précisément sur l’émergence des notions de SE et de PSE dans le champ de la conservation de la biodiversité et de la gestion des ressources forestières au Cambodge. Cette perspective analytique est justifiée par le fait que ces notions ont été très étudiées au cours de la dernière décennie, mais que la recherche sur les processus d’émergence n’a, quant à elle, débuté que récemment (Jeanneaux et al., 2010). Le Cambodge est pris comme cas d’étude avec pour objectif plus général d’illustrer la manière dont la rhétorique relative aux SE/PSE conduit effectivement (ou non) à une évolution des politiques et pratiques de conservation.
6Le papier est organisé comme suit. Une première section traite du cadre théorique et méthodologique de la recherche. Les résultats sont ensuite exposés en trois temps : nous brossons d’abord un rapide tableau de la politique de conservation au Cambodge et des acteurs impliqués; puis nous analysons l’émergence des notions de SE/PSE en mettant l’accent sur les acteurs non étatiques internationaux (bailleurs et ONG); nous illustrons enfin le processus à l’œuvre à partir d’un cas d’étude. La dernière section résume le papier et tire quelques enseignements du cas étudié.
7S'intéresser à la manière dont les notions de SE et PSE émergent dans les politiques publiques de conservation nécessite de (i) définir et discuter la notion de politique publique, (ii) examiner la manière dont ces notions influencent le processus de construction du problème de la protection de l’environnement au Cambodge et la formulation des solutions à y apporter.
8Sur le plan théorique, notre conception de la notion de politique publique s’inspire d’auteurs des sciences politiques, à l’instar de Weil (1991), qui conçoivent la politique publique comme un ensemble d’actions et de programmes en vue de satisfaire aux objectifs politiques explicites (ou affichés) fixés par l’État (nous entendons ici les textes de loi ou accords internationaux signés par le gouvernement). En revanche, nous considérons que les moyens (financiers, techniques, humains) mis en œuvre pour remplir les objectifs fixés peuvent provenir d’une grande diversité d’acteurs pas uniquement publics ou nationaux. Nous suivons en cela les apports de l’économie politique internationale (Chavagneux, 2010; Kingdon, 1984; Steinberg, 2003; Strange, 1996). Elle offre un éclairage intéressant pour le cas du Cambodge où les grandes ONG et des bailleurs internationaux sont très présents et influencent la définition des politiques de l’État dont près de la moitié du budget provient, encore aujourd’hui, de l’aide internationale (CDC, 2010).
9Afin d’examiner la manière dont les notions de SE/PSE influencent le processus de construction du problème de la protection de l’environnement au Cambodge et la formulation des solutions à y apporter, nous nous référons au cycle de la politique publique défini par Gibert (1989). La politique publique y est décrite comme un processus en 4 étapes allant de la mise à l’agenda politique des problèmes à l’évaluation de la politique en passant par la conception et la mise en œuvre des plans et programmes destinés à atteindre les objectifs fixés. Dans cet article, nous nous focalisons sur les 2 premières étapes du cycle. La première est la mise à l’agenda politique des problèmes, étape qui débouche sur la fixation des objectifs à atteindre en matière de conservation (dans un texte de loi par exemple – loi-cadre, loi d’orientation, loi de programmation selon les cas). La seconde est celle de la conception/formulation des programmes et actions destinés à y répondre; cette étape inclut le choix des instruments pertinents.
10En somme, nous faisons l’hypothèse que cette rhétorique des services rendus par les écosystèmes
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influence d’une part la mise à l’agenda des problèmes environnementaux (étape 1 du cycle de la politique) et,
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d’autre part renouvelle la manière dont les acteurs publics cambodgiens appréhendent la question de l’environnement et les instruments choisis pour le gérer (étape 2 du cycle de la politique) : instruments de type command-and-control comprenant les dispositifs réglementaires des aires protégées versus instruments incitatifs dits de marché.
11De ce point de vue, les PSE pourraient apparaître comme un nouveau paradigme possible, une gamme d’instruments qui relève de l’application des principes définis par Wunder (2005) et censés garantir la conservation effective des services fournis par l’écosystème considéré en offrant une rémunération directe des fournisseurs financée exclusivement par ceux qui en bénéficient.
12Au plan méthodologique, notre protocole de recherche repose sur trois sources de nature différente.
13Nous avons d’abord collecté la littérature existante sur le sujet au Cambodge comme la littérature grise (rapport d’activités des institutions rencontrées), les documents de stratégie politique et les textes législatifs et réglementaires du gouvernement cambodgien.
14Nous avons également conduit 34 entretiens semi-directifs au cours des étés 2009 et 2010 auprès d’un large panel d’institutions nationales et internationales. L’échantillon comportait des bailleurs de fonds (bilatéraux et multilatéraux), des entreprises privées, des départements de l’administration du gouvernement central (ministères responsables de l’agriculture et de la forêt et ministère responsable de l’environnement), des ONG internationales de développement et de conservation et des universités publiques nationales (cf. tableau ci-dessous). Les entretiens se sont focalisés sur la description du niveau de connaissances des personnes interrogées concernant les notions de SE et PSE, l’origine de leur point de vue et la façon dont la notion est utilisée dans leur institution. Selon les cas, les personnes rencontrées étaient les directeurs d’établissement ou cadres responsables des programmes de conservation (dans les ONG, les entreprises, les institutions de recherche et chez les bailleurs) et les responsables de service pour les administrations gouvernementales. Les interviews se sont déroulées en face à face et nous avons réalisé une retranscription systématique des propos tenus.
15Enfin, nous avons bénéficié de données statistiques collectées par le Conseil du Développement du Cambodge (CDC), instance placée sous la haute autorité du premier ministre responsable de coordonner l’aide (bilatérale et multilatérale) au développement du pays en provenance des grandes institutions internationales, des pays donateurs et des ONG. Elle constitue l’instance « focale » entre le gouvernement royal, les ministères et les partenaires susmentionnés. Les données fournies dans cet article sur les projets de conservation actuellement en cours dans le pays proviennent d’une base rendue publique par le CDC et accessible sur internet http://www.cdc-crdb.gov.kh/
Tableau 1. Panel de l’enquête
16La politique de conservation au Cambodge est récente. Elle repose sur une approche réglementaire de type « command-and-control » avec la mise en place de zones protégées relevant de la compétence de deux ministères. Couvrant plus de 18 % du pays, les 26 zones protégées ont été créées par un décret royal de 1993 et sont gérées par le ministère de l’Environnement (ME) alors qu’un nombre croissant de sanctuaires de pêche et de zones de forêts protégées (3 actuellement) a été mis en place sous l'égide du ministère de l’Agriculture, de la Forêt et de la Pêche (MAFP). L’utilisation et l’extraction des produits forestiers et du gibier y sont strictement réglementées : délivrance de permis d'extraction de ces ressources, définition de principes de gestion associés à des interdictions et des sanctions. En matière de biodiversité et de protection de la forêt, les orientations stratégiques prises par le gouvernement figurent dans 2 documents principaux : le programme forestier national (2009 et toujours en cours de finalisation) et le plan de protection des ressources naturelles et de la biodiversité (2002).
- 1 La LPEGRN établit une distinction entre protection de l’environnement assimilée « aux pollutions et (...)
17En raison de la longue période de guerre civile qu’a connu le pays entre 1975 (date de début du régime Khmer rouge) et 1997 (date des premières élections libres), toutes les institutions et règles actuellement en vigueur en la matière datent d’une quinzaine d’années voire moins. C’est ainsi que les deux principaux textes de loi qui régissent la politique actuelle du gouvernement cambodgien ont été promulgués en 1996 pour la Loi sur la protection de l’environnement et la gestion des ressources naturelles (LPEGRN1) et en 2002 pour la loi forestière. Le ministère responsable de l’Environnement (ME) est également créé à la même époque (1996). Pourvu d’une administration centrale et déconcentrée à l’échelle des provinces, il est doté d’un fonds d’aide pour l’environnement destiné à financer les actions entreprises. Le fonds est alimenté par les contributions du gouvernement, des organisations internationales et non gouvernementales, les recettes légales (taxes écologiques).
18Ce mouvement de création (ou de re-création) des institutions a été accéléré par le fait que le pays a été rapidement intégré aux sphères internationales, rejoignant l’ASEAN (Association of Southeast Asian Nations) en 1999 et l’OMC en 2004. Le Cambodge a alors pris une série d’engagements internationaux en ratifiant la convention sur la diversité biologique dès 1995 ou encore le protocole de Kyoto en 1999.
- 2 La liste des projets financés par le FEM est consultable sur (http://www.gefonline.org/Country/Coun (...)
19De fait, l’intervention extérieure a joué un rôle important au Cambodge. Aujourd’hui encore, le financement de la conservation repose essentiellement sur les contributions (dons) des bailleurs internationaux. Les fonds nécessaires à la mise en place de ces programmes de conservation ont ainsi pour origine 16 bailleurs bilatéraux (83 % de l’aide) et multilatéraux (17 % de l’aide). Selon le Conseil de Développement du Cambodge, les sommes allouées aux 26 programmes de conservation conduits à l'heure actuelle dans le pays se montent à 195 millions de dollars. Ces programmes se déroulent généralement sur plusieurs années, entre 2 et 4 ans. Les principaux bailleurs bilatéraux sont par ordre d’importante, les USA, la Nouvelle-Zélande, le Japon, la France, l’Espagne, la Suède, le Danemark, le Royaume-Uni et la Corée. Les principaux bailleurs multilatéraux sont, toujours par ordre d’importance, la Banque asiatique de développement, les diverses organisations onusiennes (PNUD, UNESCO), l’Union européenne et la FAO. Notons à ce stade que le Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM) est le mécanisme de financement des conventions internationales et qu’en pratique plusieurs des projets mentionnés sont en fait financés par le FEM2. De ce point de vue, PNUD, BAD apparaissent comme des « agences du FEM ».
20En pratique, les bailleurs financent des programmes opérationnels mis en œuvre de manière conjointe avec les ONG et les agences gouvernementales. Ils aident également financièrement le gouvernement à définir des documents stratégiques de programmation pluriannuelle, couvrant les coûts de l’expertise et de l’assistance technique internationale nécessaires. Au Cambodge, ce processus a lieu soit via un assistant technique placé dans un département de l'administration centrale, soit dans des arènes spécifiques comme les groupes de travail techniques (TWG) qui rassemblent les partenaires clés, bailleurs et administrations ministérielles. Deux groupes de travail sont impliqués dans le suivi de ces projets de conservation : le groupe Agriculture et Eau coprésidé par l’AFD et le MAPF ainsi que le groupe Forêt et Environnement coprésidé par le projet de la coopération danoise, DANIDA, et le MAPF.
21La figure ci-dessous illustre l’origine des fonds actuels destinés à la mise en œuvre de la politique de conservation (cf. liste des projets de conservation en annexe).
Figure 1. Origine des fonds destinés à la mise en œuvre de la politique de conservation au Cambodge
Source : Conseil de Développement du Cambodge, 2011
22La mise en œuvre de ces plans et programmes repose sur des acteurs publics et non gouvernementaux comme les ONG, les bailleurs n’ayant la plupart du temps ni vocation ni les moyens techniques suffisants pour implémenter les programmes qu’ils financent.
23L’administration forestière (AF) du ministère de l’Agriculture, de la Forêt et de la Pêche (MAFP) a la responsabilité de la gestion des ressources forestières au Cambodge bien qu’il existe des superpositions de compétences avec le ministère de l’Environnement (ME) pour les forêts situées dans les aires protégées et réserves associées (sous tutelle du ME) et avec l’administration des pêches (AP) du même MAFP pour les forêts inondées.
24Les ONG constituent l’autre catégorie d’acteurs dont le rôle est de conduire des projets de conservation en lien avec les administrations gouvernementales. Elles sont des intermédiaires indispensables entre les bailleurs et le terrain en raison de leur expertise locale, connaissance du contexte, capacité à proposer des projets opérationnels. Plusieurs grandes ONG internationales sont d’ailleurs implantées et interviennent au Cambodge depuis la fin des conflits armés des années 90. Elles étaient les seules parfois à le faire à l’époque. C’est le cas de WWF, CI, WCS, FFI, Widlife International, PACT, GERES qui possèdent toutes une représentation locale à Phnom Penh voire un bureau ayant parfois une vocation régionale (comme le GERES). Jusqu’à présent le recours aux grandes ONG internationales de conservation était quasiment inévitable au Cambodge pour passer à l’étape de la mise en œuvre. C’est toujours le cas même si les ONG domestiques sont également de plus en plus présentes comme Angkor Centre for Conservation of Biodiversity.
- 3 En effet, il est intéressant de noter qu’un des objectifs assignés au ME à sa création était « la p (...)
25L'échec des premières politiques de gestion des ressources naturelles au Cambodge, qui correspondent à la mise en place d’aires protégées (types II, IV, V et VI de la classification IUCN), est souligné dès 2005 par les travaux de la FAO qui montrent des taux de déforestation élevés de l’ordre de 1,5 à 2 % par an et une dégradation de près de la moitié du couvert forestier. Les instruments de type « command-and-control » auxquels font référence la Loi de 1996 et la Loi forestière de 2002 ont été manifestement insuffisants pour enrayer la tendance. Ceci accroît l’intérêt pour une évolution des approches et instruments utilisés d’autant que les déclarations d’intention3 relatives à la promotion des outils incitatifs dans la politique environnementale au Cambodge n’ont jusqu’ici pas été suivies d’effet.
26Le cadre légal cambodgien fait peu référence aux notions de SE/PSE. Le terme de service écosystémique n’est pas, par exemple, explicitement mentionné bien que le rôle des forêts dans la protection des sols et de l’eau soit envisagé dans plusieurs textes de loi, dont la loi forestière. De même, dans la loi forestière et le sous-décret sur les communautés forestières, la reconnaissance légale des droits d’usage traditionnels des communautés locales et le titre foncier accordé pour 15 ans à la communauté forestière en échange d'une gestion durable de la ressource s'apparente à une reconnaissance du rôle que peuvent jouer les communautés locales en tant que fournisseurs de services. En revanche, dans les années récentes, les documents stratégiques de programmation du gouvernement tout comme les projets de conservation de la forêt ont fait référence de manière croissante à la notion de service écosystémique.
27La notion de service écosystémique a été explicitement utilisée à partir du début des années 2000. Plusieurs études d’évaluation monétaire des écosystèmes des zones forestières et côtières en particulier considèrent non seulement la valeur d’usage directe de ces écosystèmes, mais aussi leurs valeurs indirectes associées au stockage du carbone, à la protection des bassins versants, à la biodiversité, à la qualité de l’eau ou au tourisme (Bann, 2003; Strange et al., 2007). Ces travaux ont été conduits par plusieurs universités publiques cambodgiennes et instituts de recherche comme l’Université Royale de Phnom Penh (URPP), l’Université Royale d'Agriculture (URA), ou le CDRI avec le soutien technique et financier de programmes internationaux : le projet du PNUE (2007) intitulé “Reversing Environmental Degradation Trends in the South China Sea and Gulf of Thailand”, le programme du CIFOR intitulé « Poverty Environment Network » ou encore le projet de la coopération danoise (DANIDA) intitulé “Natural Resources and Environment Program”. De tels travaux contribuent indéniablement à l’augmentation des ressources scientifiques du gouvernement du Cambodge sans que l'on puisse toutefois encore aujourd’hui identifier un impact sur la définition des politiques publiques.
28À partir de 2009, la notion de SE apparaît dans certaines stratégies gouvernementales, mais pas encore dans les lois. Les SE sont alors systématiquement associées à la notion de paiement et apparaissent dans ces documents directement sous leur forme opérationnelle, les PSE. C’est le cas de : (i) la stratégie de croissance verte dite Green Growth Roadmap initiée par la Commission économique et sociale des Nations Unies pour la région Asie-Pacifique (UNESCAP) et élaborée par plusieurs ministères et agences gouvernementales (Kingdom of Cambodia, 2009); (ii) du programme forestier national (PFN) défini par le groupe de travail technique forêt et environnement (TWGFE, 2009) rassemblant l’AF, le ME et un groupe de bailleurs internationaux travaillant au Cambodge; (iii) de la stratégie REDD+ dite Cambodia REDD+ roadmap définie par un groupe de travail interministériel ayant reçu le soutien de bailleurs internationaux. PSE et REDD+ sont principalement vus comme des sources alternatives et innovantes de financement de la mise en place de politiques de gestion durable des forêts au Cambodge ou comme des mécanismes facilitant l'investissement dans la gestion durable des écosystèmes.
Figure 2. Évolution des politiques de conservation au Cambodge (1993 – 2010)
29Seules quelques expériences qualifiées de PSE sont actuellement en cours au Cambodge. Elles se focalisent toutes sur la conservation de la biodiversité et mobilisent des instruments de nature assez différente : les certifications de produits agricoles « biodiversity-friendly » mis en place par Wildlife Conservation Society (WCS), les accords de conservation mis en place par International (CI) ou encore les projets d’écotourisme mis en place par WildAid dans le massif des Cardamomes. Plus récemment, ce sont les mécanismes REDD+ qui ont suscité l’intérêt, mais un seul projet a, pour l'instant, vu le jour : le projet de l'ONG américaine PACT dans la province d'Oddar Meanchey cofinancé par la fondation Clinton (Clinton Climate Initiative).
30Dans ces expériences (REDD+ ou PSE), les incitations monétaires sont payées aux communautés ou aux individus soit sous la forme d'un paiement monétaire direct soit en nature. Ces paiements visent à entrainer un changement des pratiques d'usage des sols ou un arrêt des activités illégales (comme la coupe de bois ou le braconnage). Le paiement s'accompagne de conditions et de sanctions convenues ex ante collectivement et stipulées dans un contrat signé par les communautés villageoises. Les populations locales sont considérées comme les fournisseurs du service et, selon le mécanisme, les acheteurs sont des touristes, des consommateurs urbains, l’ONG elle-même ou, quand cela passe par la finance carbone, les firmes acheteuses des crédits carbone sur le marché volontaire. Les grandes ONG internationales de conservation initient et mettent en œuvre ces schémas de paiement et jouent le rôle d’intermédiaire dans la transaction de SE, faisant le lien entre la demande et l’offre. Bien que ces schémas soient toujours au stade de projets pilotes, le nombre limité d’expériences mises en place jusqu’ici impliquent systématiquement les agences gouvernementales, l’administration forestière et le ministère de l’Environnement en particulier. La question de la réplication de ces expériences à plus grande échelle reste un défi (comme le soulignent par ailleurs Pirard et al. (2010)) notamment assujettie à une définition d’un cadre légal pour la mise en œuvre de dispositifs PSE pour la gestion durable de la forêt ou la conservation de la biodiversité.
31Mais si le cadre légal n’a jusqu’ici pas implicitement intégré les notions de SE/PSE au Cambodge et que le développement des PSE est encore limité, c’est en partie parce que les ressources financières limitées dont disposent ces administrations les rendant dépendantes de sources de financement extérieures. Leur comportement pourrait être qualifié d’opportuniste puisqu’elles y voient avant tout des opportunités nouvelles de financement. Mais elles n’en intègrent pas moins les idées et les concepts, notamment au niveau individuel. En effet, un certain nombre d'individus (certes limité : quelques personnes du bureau REDD+ de l'AF, ou de la cellule changement climatique du ME qui participent aux négociations dans le cadre des Conférences des parties (COP) ont des connaissances avancées sur les notions de SE/PSE. Ces personnes jouent un rôle clé d'intermédiaires entre l'administration, le gouvernement et les bailleurs. Ils sont souvent présents dans des arènes de concertation et de décision rassemblant ces différents types d'acteurs : séminaires et ateliers de travail thématique, groupes de travail pour la définition de nouvelles stratégies gouvernementales (dont les TWG). À côté de leurs dotations académiques personnelles, le pouvoir politique de ces individus repose sur leur réseau étendu et leur accès facilité aux hautes sphères de l'administration et du gouvernement combiné à un degré élevé d’expertise du fonctionnement de l’administration cambodgienne. En outre, une importante source de pouvoir de ces administrations ministérielles repose sur le fait qu’elles sont les représentantes officielles de l’État cambodgien, ce qui en fait des partenaires incontournables pour tout acteur du développement travaillant au Cambodge et souhaitant mettre en œuvre des projets de coopération (en accord notamment avec le principe d'alignement de l'aide de la déclaration de Paris).
32D’autres institutions jouent un rôle croissant comme le ministère de l’Économie et des Finances et le Supreme National Economic Council (SNEC), sorte de laboratoire d’idées proche du 1er ministre et dont l’influence sur la définition du cadre légal est plus grande et plus directe que celle des ministères techniques. Les interactions entre ces institutions et les agences de développement étrangères sur les questions environnementales et les notions associées de SE/PSE sont récentes. Comme les ministères techniques, ces structures connaissent et conceptualisent la notion de SE sur la base de compétences individuelles et les PSE sont vus comme des sources alternatives de financement pour faire appliquer la politique du gouvernement. Plus globalement, les PSE sont vus comme des mécanismes susceptibles de rendre la protection des ressources naturelles attractive économiquement en comparaison des autres options d’usage du sol.
33Enfin, les acteurs les plus influents dans l’introduction effective et la diffusion de la notion de SE au Cambodge sont certainement les grandes ONG internationales de conservation comme WCS, CI et WWF, quelques-uns des bailleurs internationaux les plus impliqués comme USAID, AFD ou l’UE ou encore les agences des Nations Unies (PNUD et UNESCAP) ainsi que des fondations philanthropiques (MacArthur foundation, Clinton Climate Initiative). Leurs perceptions des problèmes de la protection de l’environnement et des solutions correspondantes intègrent cette notion de SE et d’incitations positives pour la conservation de la biodiversité. La notion de service écosystémique est connue, conceptualisée et sous-tend souvent les stratégies globales et régionales de ces organisations ainsi que leurs interventions locales. En témoigne, par exemple, le récent programme lancé en 2011 par l’UE avec l’appui de l’ONG FFI. Ce projet intitulé ”Sustainable provision of ecosystem services in the Cardamomes Mountains Landscape” propose de développer des schémas de PSE sur deux sites de production d’hydroélectricité situés au cœur d’une aire protégée.
34Tous ces acteurs peuvent être qualifiés de proactifs. Ils disposent d’importants réseaux politiques : contacts directs avec des personnes influentes du pouvoir, responsables des cabinets ministériels, etc. Ces liens multiples comprennent en particulier les interactions qui ont lieu lors de la définition et de la mise en place de projets multilatéraux comme les PSE pilotes qui impliquent systématiquement les ministères, une ONG internationale et souvent une ONG locale. Bien sûr, cette ressource politique est intimement liée à la capacité des institutions internationales à déployer des moyens financiers significatifs attirant l’attention du pouvoir. Mais leur influence ne s’arrête parfois pas là. En effet, ils ne se limitent pas à participer aux réflexions en amont de la fixation des objectifs à atteindre, mais suggèrent également comment le faire (les solutions politiques, type PSE). Pour cela, ils financent des formations ou de l'assistance spécifique pour la définition des orientations stratégiques prises par le gouvernement. Ils font aussi du lobbying auprès des décideurs politiques et dans certaines arènes de décision ou encore en proposant directement des dispositifs ad hoc dans les projets qu'ils financent (cas de l’UE susmentionné avec le projet PSE 2011).
35Dans cette section, nous avons montré que les ONG de conservation et quelques-uns des principaux bailleurs internationaux jouent un rôle clé dans l’émergence et la diffusion de la notion de SE au Cambodge en raison de leurs poids financiers et des ressources scientifiques et politiques dont ils disposent. Les administrations ministérielles et agences gouvernementales disposent également de ressources propres sur le plan politique et scientifique. Par ailleurs, elles voient dans la notion de SE/PSE un intérêt pour le financement de leur propre action. Mais au-delà des problèmes de capacités (humaines, techniques) communs à de nombreux pays, il existe des freins spécifiques à l’émergence des PSE au Cambodge : difficultés à identifier et faire reconnaître les droits de propriété sur le foncier (spécialement dans les régions forestières les plus reculées du pays), mouvement récent de création des communautés forestières avec attribution de prérogatives spécifiques, faible présence et légitimité de l’administration gouvernementale (AF, ME) à l’échelle locale. Cet ensemble de problèmes relève enfin d’une question plus générale de gouvernance déjà soulignée par l’équipe de recherche conduite par Clements et al., (2009) sur les expériences pilotes de PSE menées par WCS au Cambodge ou encore par l’Administration forestière elle-même lors de la conférence de Bangkok organisée par UNESCAP (Sam Ang, 2007).
36Le cas du massif des Cardamomes illustre bien la manière dont évoluent au Cambodge les pratiques de conservation notamment sous l’influence des acteurs internationaux ainsi que les instruments mobilisés pour cela. En effet, la conservation de cet écosystème est d’un intérêt régional majeur. Le massif des Cardamones est situé au sud-ouest du pays à proximité de la frontière thaïlandaise. De par son isolement et sa topographie accidentée, oublié pendant les années de conflit, le massif des Cardamomes est aujourd’hui la plus grande des forêts du Cambodge et l'un des derniers lieux sauvages subsistant dans le hotspot indo-birman. Le massif compte la plus grande population d'éléphants du Cambodge, des espèces d’oiseaux en voie de disparition et contiendrait la plus grande diversité de plantes de tous les écosystèmes forestiers du Cambodge. Environ 8 à 10 000 personnes parmi les plus pauvres du pays vivent dans ou en bordure de ce massif.
37La stratégie nationale de conservation de ce massif forestier a d’abord consisté à déployer un vaste ensemble d’aires protégées (4 des 26 aires protégées du Cambodge) dans la partie centrale des Cardamomes. La zone protégée des Cardamomes centrales ou « Central Cardamomes Protected Forest (CCPF) » décrétée en 2002, couvrent plus de 400 000 ha de forêt d’accès difficile et lieu des derniers combats militaires avec le régime Khmer rouge jusqu’en 2000. Une des failles de cette politique est qu’elle ne tient pas suffisamment compte des populations locales notamment migrantes et de leurs intérêts en matière d’exploitation de la forêt. Par ailleurs, en raison des capacités limitées de l’AF à faire appliquer la réglementation en vigueur, des problèmes de sécurité et de corruption, la forêt des Cardamomes est sujette à des pratiques illégales de coupes de bois, de commerce d’animaux sauvages et d’allocation des terres à des plantations de cultures commerciales comme de l’hévéa (Global Witness, 2007).
- 4 Le Fonds Français pour l’Environnement Mondial (FFEM) est un fonds public qui a été créé en 1994 pa (...)
38Plusieurs bailleurs et ONG se sont intéressés à la conservation de ce massif menacé. En 2001, le FEM a financé via le PNUD et FFI un projet qui a permis de délimiter des aires protégées et préparer et mettre en œuvre partiellement un programme de formation. L’AFD et CI ont ensuite été les premiers à élaborer un véritable programme intégré de conservation et de développement des Cardamomes pour 5 ans (2006-11) et doté d’un budget de 2,8 millions de dollars. Cofinancé par le FFEM4 et la Fondation CI, ce programme vise à préserver les fonctions de biodiversité et de protection du bassin versant du massif des Cardamones tout en associant les populations locales à ces actions. Le projet était conçu au départ dans une dynamique à long terme et visait à définir un mode de financement durable avec l’inscription du massif des Cardamones au patrimoine de l’humanité (UNESCO) et la création d’un fonds fiduciaire. Les intérêts perçus sur le Fonds fiduciaire abondé initialement par des bailleurs de fonds, devaient permettre de financer l’ensemble des activités de protection et de développement dans les zones limitrophes (agriculture et écotourisme). Mais l’AF et le gouvernement royal du Cambodge ont, depuis, retiré leur soutien à l’inscription du massif des Cardamomes sur la liste indicative des sites à inscrire au patrimoine mondial de l’UNESCO. La procédure s’avérait trop contraignante pour l’implantation d’activités économiques comme de futures concessions pour la construction de barrages hydroélectriques. L’ambition initiale du programme a donc été considérablement réduite. Il a cependant débouché sur la mise en place d’un plan de gestion de la zone centrale des Cardamomes élaboré de manière participative et signée par l’Administration forestière. Il a aidé à mettre en place un dispositif de surveillance de la zone centrale des Cardamomes basé sur l’implication d’équipes de l’AF et d’habitants des villages limitrophes. Les populations locales ont bénéficié de contrats incitatifs de conservation liés à la protection d’espaces et d’espèces protégées, d’appuis aux centres de santé, de compléments financiers versés aux enseignants pour pérenniser leur présence, d’appuis au développement de plans locaux d’aménagement des terres, d’appui au développement d’activités agricoles (Akhmedkhodjaeva, 2011).
Encadré 1. Fiche technique du projet intégré de conservation et développement (AFD/CI)
Maître d’ouvrage : Administration Forestière (MAFP)
Maitrise d’œuvre/Agence d’exécution : Conservation International (CI)
Durée du projet : Octobre 2006 – Décembre 2011
Montant total du projet : 2 080 000 €
Financements : 840 000 € (FFEM)
Cofinancements : 1 240 000 € (CI)
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- 5 Notons que depuis cette expérience des Cardamomes, le département de la recherche de l’Agence (au s (...)
39Attribuées depuis à des investisseurs chinois, les concessions relatives aux ouvrages hydroélectriques semblent conduire l’AF à une approche de conservation différente de celle initialement adoptée sous l’influence de l’AFD5, faisant des PSE l’instrument central de cette nouvelle stratégie. En effet, le récent programme lancé en 2011 et intitulé « Sustainable provision of ecosystem services in the Cardamomes Mountains Landscape » propose de développer des schémas de PSE sur deux sites de production d’hydroélectricité situés au cœur du massif. Ce programme a d’ailleurs reçu l’aval de l’AF et du gouvernement. Doté d’un budget de 3 millions de dollars sur trois ans, il est financé par la délégation de l’Union européenne au Cambodge. Il bénéficie, en outre, de l’appui technique de l’ONG FFI qui revendique une expérience internationale forte en matière de PSE (collaboration avec le gouvernement australien, expérimentations en Indonésie et au Libéria). L’objectif de ce programme expérimental est de garantir des modes d’usage des terres en amont des ouvrages conformes aux contraintes de la production hydroélectrique. Dans cette phase expérimentale, la rémunération provient des fonds européens consacrés au programme. L’objet du projet est de tester, à une échelle réduite, l’opérationnalité du mécanisme de rémunération mis en place. À terme, il s’agit d’aller vers un financement du dispositif par une contribution des bénéficiaires du service fourni, c’est-à-dire les concessionnaires des usines hydroélectriques. Ceci suppose de montrer que le système fonctionne, mais aussi convaincre le gouvernement à inciter ou obliger les concessionnaires à contribuer à la protection des écosystèmes au sein desquels ils développent leurs activités de production et dont ils tirent directement un bénéfice économique. À l’avenir, d’autres bénéficiaires des services fournis par cet écosystème pourraient être mis à contribution. Véritable réservoir national, la protection de ce massif est par exemple indispensable pour développer les projets actuellement à l’étude pour les systèmes d’irrigation prévus dans la Province de Poursat. Le développement de l’écotourisme laisse aussi espérer des retombées économiques possibles.
Encadré 2. Fiche technique du projet PSE (Union européenne/FFI)
Maître d’ouvrage : Administration forestière (MAFP)
Maitrise d’œuvre/Agence d’exécution : Fauna and Flora International (FFI)
Durée du projet : 2011 – 2013
Montant total du projet : 3 000 000 USD
Financement : Union européenne (délégation UE au Cambodge)
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40Au total, les Cardamomes apparaissent aujourd’hui comme un terrain d’expérimentation pour étudier la faisabilité, mais aussi l’efficacité de dispositifs de PSE en complément de la politique historique des aires protégées. En aucun cas, il ne s’agit de substituer un instrument par un autre, mais de chercher à mieux concilier intérêts individuels privés et objectif général de conservation de l’écosystème. Tout ceci se déroule dans un contexte où le gouvernement royal du Cambodge — ici par l’intermédiaire ici de l’AF, cherche à remettre les populations locales au cœur de la conservation (avec la création de communautés forestières) et à promouvoir de nouveaux outils incitatifs de conservation débouchant sur des sources nouvelles de financement.
41Le cas étudié ici souligne également les besoins encore importants d’apprentissage, d’une part, des bailleurs et ONG internationales et, d’autre part, des administrations gouvernementales. Si chaque organisation internationale dispose d’une stratégie, voire d'une idéologie propre en matière de conservation comme le montrent Gaudrefroy de Mombynes et al. (2003), les modèles de conservation établis par les sièges de ces associations se heurtent aux réalités de terrain : capacités différenciées des institutions à faire appliquer les règles, degré variable de corruption ou encore le statut du foncier (Houdet et al., 2012; Kemkes et al., 2010) qui mériterait d’être approfondi dans une recherche ultérieure. C’est le cas de CI basée à Washington dont le modèle de PSE, les fameux « Conservation incentives agreements », a été décliné dans différents contextes nationaux dans le monde (13 pays dont Madagascar, le Kenya, le Pérou et le Cambodge). Quant aux administrations gouvernementales, elles sont pragmatiques et voient dans les instruments PSE qu’elles encouragent, l’opportunité de nouvelles sources de financement, au prix d’entorses parfois importantes aux règlements en vigueur dans les aires protégées.
42En matière de conservation, l’intervention publique a, jusqu’ici, principalement reposé au Cambodge sur une approche coercitive top-down à l’exemple de la mise en place des aires protégées. Les années récentes marquent une évolution de la manière dont la question de la conservation est appréhendée et mise en débat dans le pays notamment sous l’influence des acteurs internationaux (bailleurs, ONG, instances internationales où sont négociées la politique internationale en matière de changement climatique ou de biodiversité). Cette évolution pourrait se caractériser par plusieurs principes : (1) mise à l’agenda politique des services écosystémiques (et de la protection des écosystèmes du pays pour les services qu’ils rendent); (2) décentralisation de la gestion des problèmes environnementaux (principe de la gestion par les communautés) et responsabilisation des acteurs locaux; (3) volonté de favoriser effectivement les mécanismes dits « de marché » au-delà des déclarations d’intention de la fin des années 2000 lors de la création du ME.
43Au terme de cette recherche, il apparaît donc indéniable que les notions de SE et de PSE contribuent aujourd’hui à la réflexion des acteurs en présence et une évolution du débat public sur la question de la conservation au Cambodge. Pour autant, la diffusion de ces notions demeure limitée et l’opérationnalisation cantonnée au stade de projets pilotes ou de stratégies de « niches » destinées à drainer de nouvelles sources de financement. Ceci s’explique par le fait que le processus est récent, moins de 10 années, et que ces approches émergentes doivent encore être rendues compatibles avec le cadre légal cambodgien (lequel reconnaît encore aujourd’hui quasi uniquement les instruments réglementaires de type « command-and-control »). Plutôt qu’un changement fondamental et radical d’approche en matière de protection des ressources naturelles, nous assistons davantage à un changement incrémental, par étapes progressives. La diffusion de la notion de SE et l’émergence de projets pilotes de type PSE constitueraient une première étape. La seconde consisterait en une évolution du cadre légal en matière de PSE. Il faudrait par exemple que la notion de compensation financière obligatoire ou encore que le principe bénéficiaire-payeur dispose d’une base légale – ce qui n’est pas le cas aujourd’hui dans le droit cambodgien de l’environnement.