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Dossier : Les littoraux et la gestion intégrée des zones côtières

La place des scientifiques dans un processus de gestion intégrée des zones côtières : évaluation des pressions polluantes d’origine terrestre sur la baie du Robert (Martinique)

Anne Rizand, P. Mariel and K. Pinte

Abstracts

Located in the French West Indies, Martinique is a small volcanic island characterized by numerous remarkable marine ecosystems. This island is also under various anthropogenic pressures which exert a continuous pressure on the environment. These pressures are increased along the coast which concentrates the whole stakes of sustainable development concept.

Third city of Martinique, Le Robert is a new urban center which has to be watchful towards its natural environment and mainly its bay.

Therefore, the city came into a process of Integrated Coastal Zone Management (ICZM), since 2006 with several scientific partners. Two main stakes are taken into account: eutrophication and chemical diffusion damage, and above all sedimentation. Indeed, the silting up of the bay is speeding up, and reduces spaces herbarium can colonize. The first step of this approach was the characterization of the Robert coastal “eco-socio-system” by actors, which one did not, at least at the beginning, involve themselves at the same rythm neither level.

The researchers tried to answer very specifically to the administrator expectations trying to be both actor and mediator in the ICZM. The environmental indicators allowed us to make an inventory of the diffuse pollutions affecting the watershed and provided first decision making-aid tools for the local executives.

The economic and social scientific team is focusing its work on the perception of the ICZM by a key group of local actors: the fishermen. On this issue, i.e. the appropriation of ICZM approach by the different local actors, we have to make specific efforts to integrate those results for the sustainable management of the bay and to co-build adapted planning tools.

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Introduction 

1La Martinique, île de 1080 km² pour une population de 400 000 habitants, fait partie de l’Arc insulaire des Antilles, et s’est édifiée à la suite d’une succession de phases volcaniques.

2Elle présente de ce fait un littoral très découpé, avec un plateau insulaire Atlantique baigné toute l’année par les eaux chaudes du courant nord-équatorial qui favorisent la croissance de récifs coralliens. Aussi les ressources côtières, riches mais fragiles, sont-elles dominées par des espèces inféodées à ces récifs (poissons, crustacés, mollusques) et aux écosystèmes associés (herbiers de Phanérogames, mangroves) (Bouchon et al, 1997).

3Sur cette façade Atlantique, l’irrégularité du trait de côte induit la formation de baies qui pénètrent fortement à l’intérieur des terres. Le havre du Robert, au centre-est de l’île, présente ces caractéristiques. Il est également fermé en sortie par de nombreux îlets, l’ensemble délimitant une aire littorale abritée de 21 km² (Cemagref, Com pers). Les échanges entre la baie et l’océan sont alors réduits à une passe de 900 m de large et de 20 m de profondeur (Impact Mer, 2005).

4L’existence de vents d’Est quasi permanents maintient de plus un courant unidirectionnel vers le fond de baie. Les apports en eau douce, moins denses et donc en surface, ont ainsi tendance à stagner au sein du havre. Ces caractéristiques physiques et climatiques impliquent en effet un renouvellement de l’eau estimé entre 2 et 8% par jour, en fonction des marées (Impact Mer, 2005).

  • 1  Enrichissement des eaux littorales en sels nutritifs, qui se traduit par une augmentation des algu (...)
  • 2  On parle aussi d’hypersédimentation.

5Les premières études ponctuelles ont montré en conséquence des signes de dégradation au niveau des écosystèmes de la baie (inventaires ZNIEFF marines par Bouchon et al, 1997, étude de l’assainissement des eaux domestiques par Impact Mer, 1999). Les phénomènes combinés d’eutrophisation1 et d’envasement2 sont apparus comme les deux symptômes les plus marquants et ont amené à s’interroger tant sur l’état des lieux que sur les causes de cette situation.

6Les interactions terre/mer entre la baie du Robert et son bassin versant sont conditionnées par l’existence de 22 cours d’eau tributaires dont trois rivières permanentes. Ce réseau dense draine un bassin étroit, occupé par diverses activités anthropiques (Figure 1) :

  • un secteur agricole qui représente un quart de la superficie du bassin : la surface agricole est essentiellement tournée vers l’élevage et les cultures de canne à sucre et de banane. Située sur les zones de piémont, de pentes fortes à modérées, l’agriculture du bassin se caractérise ainsi par des cultures à forte consommation d’intrants (en herbicide, fongicide et nématicide notamment), et par un morcellement des surfaces utilisées : la taille des parcelles est réduite, et les interactions habitat / agriculture fréquentes ;

  • une urbanisation importante (environ 11 000 habitants sur 23 km², soit une densité de population plus élevée que la moyenne martiniquaise, de 370 hab/km²), qui s’accélère, avec une répartition des habitations individuelles sur les hauteurs et de l’habitat concentré sur la bande côtière ;

  • une activité industrielle restreinte et localisée sur une zone d’activité.

7Au-delà des enjeux environnementaux suscités par les impacts du bassin versant sur la qualité des eaux littorales, la baie du Robert est le siège d’activités à fort potentiel de développement économique (Figure 1). Celles-ci requièrent des seuils de qualité de la ressource qui imposent une contrainte environnementale sur les activités polluantes. On note ainsi :

  • un site touristique intéressant, malgré l’absence de plages : les îlets qui la bordent sont mis en valeur et visités par les vacanciers, le transport étant assuré par de petits « bateaux-visite » ou les yoles des pêcheurs. La ville est également dotée d’infrastructures nautiques actives (club de voile, marina) ;

  • une activité halieutique et aquacole en constante évolution : une zone de cantonnement mise en place sur la moitié intérieure de la baie assure jusqu’en 2009 le renouvellement des ressources (le port de pêche compte une soixantaine de marins-pêcheurs), tandis que la production aquacole représente près de 50% de la production totale de l’île (Fischer, 2004).

8Face à ce constat, les principaux organismes de recherche impliqués dans la protection de l’environnement se sont associés à la collectivité pour mettre en place une démarche visant à comprendre le fonctionnement du système côtier avec pour objectif final une réduction des impacts sur la baie. Etant données la diversité des acteurs impliqués et des pollutions observées, et l’unicité administrative (tout le pourtour de la baie ne dépend que de la commune du Robert), le choix d’une gestion de type GIZC (Gestion Intégrée des Zones Côtières) est proposé. Hovik et al, 2007, dans leur étude comparative sur différents sites côtiers norvégiens, montrent en effet que la planification d’une GIZC se réalise d’autant plus facilement que les structures administratives sont petites et simplifiées.

9Cet article a pour objectif de dresser un bilan des actions menées après deux ans et demi de travaux. Après avoir présenté l’émergence de la démarche GIZC sur le site de la baie du Robert (Partie 1), nous insisterons davantage sur les conséquences d’une telle approche lors de la construction des méthodes et outils développés par l’unité AEMA du Cemagref (Agriculture et Espace insulaire de la Martinique), en charge du diagnostic des pollutions d’origine terrestre (Partie 2). Nous terminerons par une discussion et une mise en perspective des objectifs à court et moyen termes (Partie 3). Il s’agit donc d’un retour sur expérience dans un contexte pluridisciplinaire, original aux Antilles françaises.

Figure 1. Présentation du territoire concerné par le processus GIZC

Figure 1. Présentation du territoire concerné par le processus GIZC

baie du Robert et bassin versant associé

L’émergence de la « GIZC » sur le site d’étude

Les débuts du processus : le projet LITEAU II

10L’utilisation partagée d’une ressource commune se traduit par des phénomènes de concurrence et de conflits d’accès, liés aux acteurs et aux enjeux. Les choix que devront faire et assumer les décideurs et aménageurs ont alors intérêt à être éclairés par un diagnostic précis de l’occupation et des usages du territoire. Ce diagnostic est un préalable à l’élaboration d’outils d’aide à la décision, pour le développement durable de notre littoral, en zone tropicale densément peuplée.

11La baie du Robert est un site sur lequel se superposent plusieurs enjeux majeurs, sur les plans marin et terrestre. Chaque enjeu nécessite l’acquisition et l’interprétation de données, pour une compréhension des processus et in fine, l’orientation des décisions à prendre par la collectivité – en l’occurrence la commune.

12La variété et le relatif « équilibre » des enjeux identifiés ont également favorisé l’implication de partenaires de natures diverses, et permis de mobiliser ces acteurs autour d’un projet commun.

13Les enjeux marins concernent à la fois :

  • le maintien de la richesse et de la diversité biologique : la baie est une zone de nourricerie et de nurserie pour de nombreuses espèces halieutiques telles que la langouste royale (Panulirus argus), l’oursin (Tripneustes ventricosus), le lambi (Strombus gigas) et de nombreuses espèces de poissons de récifs (Milliet, 2005) ;

  • l’aménagement et le développement durable des activités halieutiques, du fait du cantonnement de pêche et d’une production locale qui se situe très en deçà de la consommation de produits de la mer par les Martiniquais ;

  • la préservation et la mise en valeur d’un paysage naturel et culturel riche et attractif, augurant d’un potentiel touristique réel (valorisation des îlets, possibilité d’activités nautiques, présence de récifs coralliens).

14Au niveau terrestre, les enjeux suivants sont identifiés :

  • l’exploitation durable des ressources naturelles, ou comment concilier des objectifs de préservation de l’environnement et des objectifs de production, notamment agricoles ;

  • la préservation de la qualité des produits élaborés sur cet espace, et l’impact de leur consommation sur la santé humaine ;

  • le maintien d’un tissu économique rural, nécessitant la préservation d’un espace agricole  et paysager fortement concurrencé par le développement de l’urbanisation ;

  • la pression sociale croissante exercée sur le foncier pour la construction de logements et d’infrastructures collectives.

15La pluralité des enjeux soulignés présente un dénominateur commun : la qualité des eaux de la baie. Les enjeux terrestres et l’intensité des pressions polluantes sont en effet corrélés, alors qu’au niveau marin, les enjeux cités sont conditionnés par l’état qualitatif de la ressource (on parle alors de co-évolution). Les enjeux prioritaires mis en avant dans notre démarche sont donc les suivants :

  1. Réduire le transfert des pollutions diffuses, en particulier celui des produits phytosanitaires et des sels nutritifs ;

  2. Réduire l’envasement accéléré de la baie, et donc le transfert des particules solides du bassin à l’exutoire marin.

16Les scientifiques ont ainsi abordé la question par le domaine environnemental, cherchant à mieux connaître le milieu et les mécanismes mis en jeu, par une association interdisciplinaire entre organismes de recherche. Cette convergence a été facilitée par des opportunités, comme l’appel d’offres du Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable « Liteau II », qui encourageait la prise en compte non seulement de la description du milieu, mais également celle de l’évolution socio-économique du territoire.

  • 3  au sens de Barusseau et coll, 1997, dans le premier Guide méthodologique d’aide à la gestion intég (...)

17Outre les connaissances du milieu bio-physique, il était donc indispensable d’identifier un partenaire capable d’étudier le socio-système3. La structure tripartite émergente a donc associé l’Ifremer et le Cemagref à l’Université des Antilles et de la Guyane, responsable des questions d’ordres humain et social.

18La mise en œuvre du projet n’aurait pu se faire sans une implication réelle de la collectivité en charge de l’espace et de son aménagement (grâce à l’existence d’un service environnement à part entière). Or cette dernière a manifesté une volonté forte de faire de la baie du Robert une zone qui allie restauration de la qualité écologique et valorisation éco-touristique, en sollicitant ces travaux de recherche. Outre l’accent mis sur la compréhension des échanges entre bassin versant et milieu récepteur, la ville s’est dotée d’un ambitieux projet d’aménagement du front de mer. En parallèle, la création d’un « Centre Caribéen de la Mer », grand projet touristique de culture scientifique et technique sur la mer, a vocation à faire de la baie du Robert un exemple du suivi de la qualité du milieu côtier au niveau de l’île, voire de l’archipel caribéen.

19C’est par conséquent dans un cadre de multifonctionnalité des zones côtières et de recherche d’une réponse durable aux multiples pressions et usages du littoral que s’est inscrit le projet « Baie du Robert » dès l’origine.

La mise en place d’un processus de GIZC

20L’écosystème de la baie du Robert présente une complémentarité entre fonctions biologiques et économiques. Dans ce contexte, Kalaora et al, 2000, montrent que les structures politiques et administratives actuelles sont inadaptées à la gestion de ces espaces, compte tenu de l’éclatement des compétences, « à la fois géographique et sectoriel ». Le terme de Gestion Intégrée est alors préféré au sein des milieux scientifiques pour aborder ces problématiques complexes.

21Dans le cas des espaces littoraux, la Gestion Intégrée des Zones Côtières est un concept apparu en juin 1992 lors de la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement (CNUED), à Rio. Le concept reste cependant flou et pose « plus de questions que de réponses » (Billé, 2004).

22Au niveau national toutefois, la DIACT propose sa propre définition de la GIZC, sur laquelle nous nous appuierons : « La GIZC est un processus de décision fondé sur la connaissance fine des territoires et une observation précise des écosystèmes, une analyse prospective des impacts potentiels des décisions, et une évaluation continue de leurs effets ».

23Ce concept a fait l’objet d’un appel à projets lancé conjointement par la DIACT et le Secrétariat Général de la Mer (SGmer), « pour un développement équilibré des littoraux », qui s’adressait aux collectivités en charge de ces territoires : la ville du Robert s’est mobilisée sur cet appel, ce qui témoigne de son engagement dans la démarche. La proposition élaborée en concertation avec les mêmes organismes scientifiques a été retenue, sécurisant ainsi la poursuite des travaux engagés.

24Ce projet a notamment permis de consolider en 2006 les premiers diagnostics réalisés afin de comprendre le fonctionnement des systèmes bio-physique et social. Ces états des lieux sont une étape indispensable à la progression de la démarche, comme l’indiquent  les différents guides méthodologiques publiés pour soutenir les structures collectives engagées, et notamment le guide de l’UNESCO (Denis, 2001). En effet, comme le suggère la définition nationale, la production de connaissances scientifiques intervient non pas comme objectif de la GIZC, mais comme fondement essentiel à sa réalisation.

25Il s’agit donc pour les scientifiques de définir, non seulement leurs hypothèses et objets d’étude, mais aussi la place qu’ils doivent tenir, selon trois particularités principales (Denis, 2001).

  1. Elle doit se démarquer de l’activité scientifique conventionnelle ;

  2. Elle place avant tout le scientifique comme un acteur et un médiateur ;

  3. Elle est destinée à produire des connaissances utiles à la prise de décision en permettant de répondre aux conséquences des changements des éco-socio-systèmes côtiers.

26Cette seconde partie détaille les travaux engagés par le Cemagref au sein des deux projets LITEAU II et DIACT. Le diagnostic réalisé comprend deux axes principaux, répondant aux enjeux prioritaires :

  1. l’analyse des pressions polluantes (en produits phytosanitaires et sels nutritifs) exercées par les activités anthropiques terrestres ;

  2. l’analyse des déterminants de l’érosion des sols, et l’influence des interactions entre ces activités (et donc de l’aménagement du territoire) sur l’intensité du phénomène.

27Nous aborderons en discussion les limites et perspectives des actions menées, et notamment les méthodes envisagées pour l’intégration dans la démarche de chaque groupe d’acteurs.

Production de connaissances

La baie du Robert : un éco-socio-système côtier qui change

28Comme énoncé dans le chapitre précédent, le développement du Robert induit de nombreux changements liés au contexte local. Elle est devenue la troisième commune de l’île par sa population, et les recensements successifs enregistrent une augmentation démographique régulière de 15 à 20%, soit une augmentation de +53% de 1973 à 2000 (Scherer, 2003). La pression exercée par l’urbanisation croissante du territoire sur le milieu se décline ainsi selon plusieurs composantes :

  • une accélération des constructions individuelles sur l’ensemble du bassin versant, qui réduit et morcelle le tissu agricole : -58% de surfaces agricoles utiles sur la même période, soit une perte de 1400 ha (Scherer, Com pers.) ;

    • 4  Plan Local d’Urbanisme, anciennement Plan d’Occupation des Sols.

    une gestion des eaux usées de plus en plus délicate : 70% des logements ne sont pas reliés aux systèmes d’assainissement collectif (P.L.U4, 2001) ;

  • une altération généralisée du paysage qui accélère l’érosion des sols et l’envasement du littoral.

29L’organisation spatiale des activités du bassin versant, en constante évolution, modifie donc la nature et l’intensité des pressions sur le milieu, ce qui rend complexe la compréhension des enjeux prioritaires. La production de connaissances, qui découle de ces enjeux, est ainsi axée sur l’étude des facteurs explicatifs.

Le scientifique comme acteur et médiateur : le recours aux indicateurs

30Les enjeux étant identifiés, la réalisation du diagnostic impose une première réflexion sur la méthodologie employée. C’est à ce stade que la science doit prendre en considération les spécificités d’un programme GIZC, multi-acteurs et pluri-disciplinaire. Pour permettre aux scientifiques d’assurer le rôle de médiation, la production de connaissances doit pouvoir être comprise, débattue et validée par tous les acteurs. La complexité des processus qui entrent en jeu doit donc faire place à une vision simplifiée mais cohérente des phénomènes. Le recours aux indicateurs est alors indispensable.

31Zahm, 2003, définit en contexte agricole les indicateurs comme étant « des valeurs calculées, mesurables, comparables entre elles, facilement compréhensibles, représentatives des impacts favorables et défavorables des pratiques agricoles sur l’environnement et utiles à la prise de décision ». Extrapolée aux autres secteurs d’activités, la création de ces indicateurs de pression sur l’environnement aborde la question de la diffusion des connaissances entre et par les acteurs, et, en corollaire, celle de son intégration, facteur clé de réussite de la démarche GIZC.

Trois indicateurs différents pour trois enjeux environnementaux

32Compte tenu des thématiques terrestres (produits phytosanitaires, sels nutritifs et érosion des sols), trois indicateurs ont été créés, en fonction des données disponibles et des objectifs des décideurs locaux. Pour chacun d’entre eux, la volonté générale est de représenter les pressions environnementales sur l’ensemble du bassin versant afin de faire ressortir les « points chauds » ou zones d’actions prioritaires.

La charge phytosanitaire : un indicateur qui intègre la diversité des pratiques agricoles

33L’agriculture ne représente que 24% de la superficie totale du bassin. La réalisation d’enquêtes chez les exploitants a permis de caractériser de manière exhaustive ce secteur. En terme de surface, les pâtures d’élevage dominent (57%), suivies par les parcelles de canne à sucre (14%) et de banane (12%). On retrouve ensuite une agriculture très morcelée, parfois non déclarée ou non commerciale (vergers, maraîchage, élevages intensifs porcin, cunicole et avicole), mais qui reste à prendre en compte vis-à-vis de l’enjeu phytosanitaire (Marie et Lucas, 2005).

34D’autre part, les enquêtes soulignent des variations importantes de la taille des exploitations : des parcelles de 9, 4,5 et 2,4 ha en moyenne pour les trois premières activités. Or, la diversité des structures d’exploitation influence les pratiques agricoles et notamment l’usage des intrants chimiques (Houdart, 2005).

  • 5  Comité d’orientation pour des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement

35Face à ce contexte agricole complexe, la conception d’un indicateur synthétique prend alors toute sa dimension. Nous avons utilisé et adapté un indicateur de charge polluante, qui se base sur la définition du CORPEN5, 2003 : la « charge phytosanitaire est la quantité totale de substances appliquées, rapportée à la surface géographique concernée par les applications de ces substances ». Cette valeur ne permet donc pas d’évaluation quantitative de la pollution réellement transportée par les cours d’eau à la baie. Elle autorise en revanche la comparaison des activités qui ne sont utilisatrices ni des mêmes produits, ni des mêmes techniques d’apport et surtout permet le ciblage des zones où le risque de pollution est le plus fort.

36La Figure 2 explicite la construction de cet indicateur et précise les données d’entrée ainsi que la formule de calcul.

Figure 2. Construction de l’indicateur de charge phytosanitaire agricole.

Figure 2. Construction de l’indicateur de charge phytosanitaire agricole.

La charge polluante liée à l’assainissement : comment valoriser peu d’informations ?

37L’eutrophisation de la baie du Robert est liée aux apports massifs de sels nutritifs (azotés et phosphorés) du bassin versant. L’état des lieux réalisé s’est donc intéressé aux activités terrestres susceptibles de diffuser dans l’environnement ces produits.

38Compte tenu des fertilisations fréquentes notées lors des enquêtes sur les productions végétales et certaines prairies du bassin, l’agriculture a fait l’objet d’une étude, avec la mise en place d’un indicateur de charge identique au premier mais adapté aux sels nutritifs. Nous ne le détaillerons pas dans cet article.

39En revanche, avec une densité d’environ 450 hab/km², la pression exercée par l’habitat domestique devait être prise en compte. En effet, les dysfonctionnements des chaînes de traitement des eaux usées induisent des rejets non négligeables de nutriments, qu’il s’avérait pertinent d’évaluer.

40L’approche par indicateur a été privilégiée en raison du manque d’informations disponibles sur le sujet. Sa conception diffère du premier, puisqu’il nous était impossible de chiffrer les quantités réellement apportées par chaque maison du bassin versant.

Méthodologie

41La méthode choisie est structurée en deux étapes (Figure 3), soit l’évaluation de la capacité auto-épuratoire des sols et la  spatialisation et superposition.

Figure 3. Construction de l’indicateur de charge liée à l’assainissement non collectif.

Figure 3. Construction de l’indicateur de charge liée à l’assainissement non collectif.

42Il s’agit d’abord de caractériser la capacité du milieu à épurer les eaux, et donc à éviter le transfert des sels nutritifs vers la baie. A défaut de pouvoir vérifier l’efficacité de chaque système d’assainissement non collectif, nous partons du postulat suivant : plus les conditions naturelles sont réunies pour permettre un bon fonctionnement du système, plus le risque de pollution est faible.

43L’approche qualitative est complétée par le calcul d’un ordre de grandeur de la charge, grâce aux ratios de rejet communément admis par habitant (azote et phosphore, respectivement de 12 et 5 g/j) (Marie et Lucas, 2005).  Cet indicateur est ensuite spatialisé sous Système d’Information Géographique (SIG) sur l’ensemble du bassin versant.

L’indicateur de vulnérabilité des sols à l’érosion : la synthèse d’un phénomène complexe

44L’envasement de la baie du Robert est lié au transport de matières solides par le réseau hydrographique du bassin versant, des zones érodées aux exutoires. Pour diagnostiquer les causes de cette pollution majeure, l’objectif des scientifiques était d’aborder le problème en amont, et d’identifier les facteurs influençant l’intensité de l’érosion des sols.

45Il s’agissait donc de représenter simplement un phénomène très complexe, car expliqué par de multiples variables. Inspiré de la cartographie de l’aléa érosion de Le Bissonnais et al,2002, l’indicateur est le fruit d’un croisement de plusieurs facteurs hiérarchisés et pondérés en fonction de la connaissance du terrain et de la bibliographie. L’indicateur proposé est ainsi composite (OCDE, 2001).

46Dans le cas de l’érosion, il s’agit de représenter par un indicateur un processus « naturel » mais amplifié par les activités humaines. L’ensemble de la démarche est explicité par la Figure 4.

Figure 4. Construction de l’indicateur de sensibilité des sols à l’érosion hydrique.

Figure 4. Construction de l’indicateur de sensibilité des sols à l’érosion hydrique.

Apports de ces indicateurs dans le cadre de la GIZC

47L’objectif des travaux de recherche engagés dans le cadre de la GIZC était de mieux cerner les impacts des activités humaines sur le milieu marin. La conception d’indicateurs devait donc permettre d’appréhender la charge en polluants sur le bassin afin de cibler les principales zones émettrices de produits phytosanitaires, d’éléments fertilisants ou de particules terrigènes.

48Sans présenter l’ensemble des résultats fournis par les indicateurs, trois apports particulièrement intéressants peuvent être soulignés.

L’indicateur de charge phytosanitaire affine les connaissances sur l’organisation du secteur agricole et son impact sur l’environnement

49Les apports de l’indicateur de charge phytosanitaire ont permis d’accroître notre connaissance du secteur et de préciser l’enjeu environnemental lié à la pollution chimique d’origine agricole :

  • grâce au travail d’enquêtes réalisé sur le terrain : identification des acteurs du secteur, actualisation de la sole agricole du bassin et caractérisation des pratiques culturales à risque ;

  • grâce à la cartographie : les rivières les plus à risque ont été repérées, afin d’être instrumentées et suivies.

50L’indicateur révèle une variation spatiale de la charge annuelle en produits phytosanitaires (Figure 5). Le premier facteur est le type de culture, avec une utilisation d’intrants plus importante pour la culture bananière (fongicides, herbicides et nématicides). Pour les parcelles de canne (situées au nord du bassin versant), la charge annuelle est certes moins élevée, mais localisée dans le temps (une application à la repousse). Sur les pâturages, la charge en produits phytosanitaires est liée à l’application d’herbicides pour lutter contre l’embroussaillement (Marie et Lucas, 2005).

Figure 5. Charge agricole annuelle (2005) en produits phytosanitaires sur le bassin versant de la baie du Robert.

Figure 5. Charge agricole annuelle (2005) en produits phytosanitaires sur le bassin versant de la baie du Robert.

51L’indicateur montre également des variations pour une même culture, ce qui traduit des différences d’itinéraires techniques chez les exploitants. Par exemple, le recours à des vitroplants de bananiers, exempts de nématodes, permet une diminution notable de la charge globale de la parcelle.

52Les applications domestiques en produits phytosanitaires (notamment les herbicides appliqués dans les jardins) ne sont pas prises en compte. Pour les sels nutritifs en revanche, l’objectif est différent : comparer l’agriculture au secteur domestique.

L’indicateur de charge liée à l’assainissement aborde une problématique encore méconnue et déconsidérée

53Grâce à la construction de l’indicateur de charge liée à l’assainissement, les résultats de la Figure 6 montrent que les contributions pour les sels nutritifs de l’assainissement non collectif et de l’agriculture sont inégalement réparties sur le bassin versant (Marie et Lucas, 2005). L’organisation spatiale des activités explique ces différences, avec des sous bassins spécialisés en agriculture, et d’autres, plus grands ou pentus, « colonisés » par les habitations individuelles. Néanmoins, à l’échelle du bassin versant de la baie, les charges annuelles en azote sont de même ordre de grandeur pour les deux activités, avec 60 t/an environ (Marie et Lucas, 2005).

54Figure 6. Evaluation de la charge polluante annuelle en azote total par secteur d’activités et par sous bassin versant (22 cours d’eau tributaires).

Figure 6. Evaluation de la charge polluante annuelle en azote total par secteur d’activités et par sous bassin versant (22 cours d’eau tributaires).

55La pression exercée par l’habitat est en effet liée à la conjugaison de facteurs naturels et techniques. La forte pente du bassin et l’imperméabilité des sols sont associées à une méconnaissance des installations et à une faible capacité d’investissement de la population, ce qui ne permet pas une gestion optimale des équipements. Les systèmes d’assainissement, inadaptés, sont ainsi peu efficaces.

56L’importance de la question de l’assainissement, révélée par ces évaluations et la spatialisation de l’indicateur, conduit à une prise de conscience qui justifie en conséquence le caractère « intégré » de la gestion de cette zone côtière.

L’indicateur de sensibilité des sols à l’érosion met en avant l’importance des interactions entre ces secteurs d’activités dans la genèse des pollutions

57La spatialisation de ce dernier indicateur montre que 7% du bassin versant est considéré comme très sensible voire fortement sensible à l’érosion (classes 5 et 6 de la figure 7). Elle identifie notamment comme fortement sensibles les zones de sol nu des terrassements lors des constructions, et les parcelles plantées en banane, sur lesquelles se forment des ravines qui décapent les inter-rangs non protégés (Pinte, 2006).

Figure 7. Représentation spatiale de l’indicateur de vulnérabilité des sols à l’érosion sur le bassin versant de la baie du Robert.

Figure 7. Représentation spatiale de l’indicateur de vulnérabilité des sols à l’érosion sur le bassin versant de la baie du Robert.

58Grâce à ce diagnostic, des études complémentaires ont été réalisées sur certains secteurs à risque (voir les encadrés de la figure 7). Elles établissent la responsabilité de l’interaction spatiale entre habitats et agriculture dans la formation de ces ravines. En effet, l’érosion des sols est accrue par la conjonction entre la forte vulnérabilité des parcelles et l’influence hydraulique des zones pavillonnaires qui concentrent les écoulements (et donc augmentent leur capacité d’érosion) en amont des parcelles.

59La réalisation de ces études à l’échelle du bassin versant répond ainsi aux attentes des gestionnaires locaux. Associées à l’évaluation in situ de la dégradation du milieu marin, elles représentent les principaux facteurs explicatifs des pollutions observées et les zones à risque, et soulignent l’intérêt d’une gestion participative à l’échelle du territoire. L’intégration de ces connaissances par l’ensemble des acteurs est donc fondamentale.

60La dernière partie de cet article a pour objectif d’illustrer cette thématique en termes d’actions et de perspectives envisagées.

Intégration des connaissances entre et par les acteurs

61Au sein même de la sphère scientifique, les différentes disciplines font appel à des méthodes et des outils qui ne sont pas forcément de nature identique, et chacune est donc amenée, au cours du processus, à prendre en compte les autres approches, que ce soit entre milieu terrestre et milieu marin, ou, surtout, entre sciences techniques et sciences sociales.

La question des sciences humaines et sociales

62Si l’on considère le territoire comme « un espace approprié, avec sentiment ou conscience de son appropriation » (Brunet et al, 1993), il est à la fois une construction sociale et une organisation spatiale d’un ensemble complexe d’acteurs et d’objets en interactions dynamiques.

63Les questionnements scientifiques et techniques « classiques » devraient donc pouvoir, dès lors qu’ils adoptent cette définition, intégrer les questionnements propres aux sciences sociales (politique, géographie, droit, sociologie, économie, etc). Or l’expérience vécue dans cette phase initiale d’une démarche de gestion intégrée démontre la difficulté d’une intégration qui ne va pas de soi, mais nécessite concertation et concessions.

64En effet, le domaine « socio-économique », c’est-à-dire celui des utilisateurs du milieu côtier considérés en tant qu’agents économiques, qu’ils soient producteurs de biens et services exploitant le littoral, ou usagers fréquentant cet espace à titre permanent (habitation) ou temporaire (loisirs), reste encore peu impliqué dans le processus, car il ne participe pas directement au « groupe projet » qui s’est mis en place. Il s’agit là d’une limite à prendre en compte, et il conviendra de veiller à l’intégration de ces acteurs dans les deux étapes ultérieures du processus :

  • préparation d’un plan de gestion (nécessitant la définition d’objectifs, de stratégies et de scénarios possibles) ;

  • mise en œuvre de ce plan de gestion (ce qui sous-entend montages financier et institutionnel, suivi par des indicateurs, évaluation).

65Par ailleurs, dans cette première phase de l’étude, les sciences sociales, après un état des lieux géographique et sociologique global de la commune du Robert, se sont intéressées à des pratiques d’acteurs spécifiques, les pêcheurs en l’occurrence. Ce choix s’explique par le fait que les enjeux prioritaires sont relatifs au milieu récepteur. Il semblait donc logique de privilégier les acteurs concernés au premier chef par la qualité écologique de la baie – celle-ci ayant des conséquences sur la ressource halieutique et aquacole. Pendant ce temps, les sciences techniques s’intéressaient aux activités génératrices des dégradations environnementales constatées, liées notamment à d’autres catégories d’acteurs, dont les agriculteurs et les résidents, qui n’ont, à ce jour, fait l’objet d’aucune approche sociologique spécifique.

66Ceci étant, grâce à la volonté manifestée par les uns et les autres pour comprendre la démarche et les résultats de l’autre partie, des enseignements « croisés » ont déjà pu être tirés et permettent actuellement la construction d’une approche concertée et complémentaire en vue des phases suivantes.

L’intégration des connaissances par les gestionnaires du territoire

67L’intégration des connaissances par les gestionnaires de l’espace littoral (la municipalité) s’est trouvée facilitée par le fait que ces derniers étaient effectivement demandeurs de connaissances et d’informations pour raisonner leur choix d’aménagement. Toutefois, tous ne sont pas nécessairement confrontés aux mêmes enjeux ni aux mêmes priorités, et le « pas de temps » dont la recherche a souvent besoin paraît bien long à l’aménageur amené à prendre des décisions non différables.

68Le territoire est en effet analysé par le scientifique comme un espace d’activités et un espace à enjeux, sur lequel il faut consacrer un temps suffisant à l’établissement d’un diagnostic fiable.

69Ces études ont nécessité deux ans de travail ; or, dans le même temps, le gestionnaire était confronté à une demande sociale et économique pressante, pour la construction de logements et d’infrastructures diverses. Le territoire est donc pour la collectivité davantage perçu comme un espace de gestion.

70Aussi toute la difficulté consiste-t-elle à trouver un compromis acceptable par les deux parties entre la priorité que donnent les scientifiques à la fiabilité du diagnostic, ce qui nécessite du temps, et la priorité donnée aux décisions d’aménagement par la collectivité, qui souhaite la mise en place rapide d’outils d’aide à la décision.

71Ceci étant, le « tandem » scientifiques/gestionnaires a dans cette première phase bien fonctionné, les deux parties ayant manifesté la volonté de poursuivre ensemble, afin que cette étape puisse déboucher sur la préparation d’un plan de gestion.

L’appropriation des résultats par les acteurs du territoire

72Comme le précisent dans leur ouvrage sur les littoraux antillais Desse et Saffache, 2005, « une mauvaise compréhension des mécanismes propres aux zones côtières se traduit souvent par des approches sectorielles de l’aménagement qui sont fréquemment à courte vue ». Le diagnostic réalisé met en effet en évidence le caractère transversal des pressions environnementales, et l’importance des interactions entre activités dans leur genèse.

73L’appropriation des enjeux locaux par les différentes catégories d’acteurs est donc essentielle. L’« association de toutes les parties intéressées au processus de gestion » est d’ailleurs un des huit principes de la GIZC exposés dans la Recommandation européenne du 31 mai 2002.

74Dans notre cas d’étude néanmoins, des efforts doivent être fournis dans cette voie. Si le rapprochement entre scientifiques et gestionnaires de l’espace est aujourd’hui consolidé, la participation de la population au processus de planification n’est pas encore assurée. La rédaction d’un projet en réponse à l’appel d’offre « LITEAU III » devrait aborder ses questions :

  • d’identifier les différents groupes d’acteurs et leurs modes de représentation : usagers du bassin versant (agriculteurs, résidents, industriels) et de la baie (pécheurs, aquaculteurs, touristes). Dans le contexte Martiniquais, les stratégies individuelles multiplient les activités et les types de rémunération. Il est ainsi possible de pratiquer la pêche et l’agriculture en ne déclarant qu’une seule de ces activités. La typologie proposée sera donc complexe, compte tenu du fait qu’il est difficile de superposer « acteurs » et « activités ».

  • de définir des scénarios d’évolution du territoire et leurs impacts sur les enjeux prioritaires : un premier temps suppose la discussion avec les acteurs des principaux éléments du système à considérer (activités, impacts, relations) et l’énoncé, sur cette base, de différents changements susceptibles d’intervenir. Le protocole de travail pourra être inspiré des méthodes de prospective par scénarios (Godet 2004), visant à identifier les principales variables du système et à envisager leurs différents états possibles. L’animation devra cependant être suffisamment souple pour que l’expression des acteurs reste libre (ne pas trop pré-formater les énoncés) et que ceux-ci ne soient pas rebutés par un protocole trop rigide et potentiellement obscur.

  • de restituer les travaux : la logique participative soutenue par la GIZC implique une restitution des résultats. Il s’agit de présenter aux acteurs et décideurs locaux les conséquences environnementales et économiques des scénarios d’évolution qu’ils auront eux-mêmes retenus, telles qu’elles ressortent de l’application des modèles ou de la mise à jour des indicateurs par les équipes scientifiques. Les méthodes d’animation seront définies au cours du projet, en fonction des éléments à discuter (nature des informations) et du contexte d’interaction (caractère plus ou moins sensible ou conflictuel des sujets) (Moquay, réponse à l’appel d’offre LITEAU III, 2007).

Conclusion 

Perspectives et conditions à réunir pour une mise en œuvre complète de la démarche de gestion intégrée des zones côtières

75Les études réalisées ont montré que les phénomènes d’envasement et d’eutrophisation, qui se traduisent par une dégradation de l’état écologique de la baie, concernaient toutes les catégories d’acteurs : agriculteurs, bâtisseurs et habitants de villas individuelles, aménageurs d’infrastructures routières et immobilières, etc.

76La mise en œuvre des phases suivantes de la démarche de GIZC nécessite par conséquent une sensibilisation de l’ensemble des protagonistes, afin de prendre conscience :

  • de l’importance de la dégradation, et de ce qu’elle est préjudiciable aux objectifs de développement local basés sur la valorisation de ce patrimoine naturel ;

  • d’une responsabilité partagée qui nécessite l’émergence d’une « conscience collective » du problème.

77Les efforts conjugués des équipes de recherche et des décideurs – élus des collectivités, services de l’Etat - doivent favoriser cette appropriation.

78En parallèle, les enjeux et les objectifs doivent être clairement affichés par la collectivité, et les différentes disciplines scientifiques doivent travailler en collaboration plus étroite et dans une approche plus systémique, de façon à démontrer la faisabilité de la poursuite du processus.

79Le facteur-clé que constitue la volonté de continuer ensemble dans cette voie a été confirmé par les scientifiques et la collectivité lors d’un atelier de travail récent, et repose par ailleurs sur une réelle prise de conscience des enjeux et des atouts liés à la baie.

80Le cadre politique est essentiel : il consiste à définir un objectif de développement bien identifié pour le territoire, basé sur une définition claire et hiérarchisée des enjeux à prendre en compte, qu’il conviendra de décliner dans un outil de planification adapté, à définir. Participation et concertation des acteurs sont à organiser et à intégrer dans cette phase.

81C’est à partir de ce cadre que pourra être défini un programme qui réponde à la demande exprimée, valorise la connaissance locale et se situe dans une approche dynamique, prospective, systémique et interdisciplinaire, impliquant les acteurs.

82La mise en place d’une structure de type « observatoire des territoires » permettrait de légitimer la démarche et de la faire reconnaître. Par l’organisation d’un dispositif de coordination et d’animation, la valorisation des connaissances et le renforcement des partenariats, le site atelier de la baie du Robert serait alors en mesure de transférer son expérience à l’échelle de la Martinique (dans le cadre de contrats de baie par exemple), voire de la Caraïbe.

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Notes

1  Enrichissement des eaux littorales en sels nutritifs, qui se traduit par une augmentation des algues épiphytes, des blooms phytoplanctoniques et la prolifération de macrophytes (Impact Mer, 2005).

2  On parle aussi d’hypersédimentation.

3  au sens de Barusseau et coll, 1997, dans le premier Guide méthodologique d’aide à la gestion intégrée de la zone côtière, édité par l’UNESCO.

4  Plan Local d’Urbanisme, anciennement Plan d’Occupation des Sols.

5  Comité d’orientation pour des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement

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List of illustrations

Title Figure 1. Présentation du territoire concerné par le processus GIZC
Caption baie du Robert et bassin versant associé
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/2596/img-1.jpg
File image/jpeg, 280k
Title Figure 2. Construction de l’indicateur de charge phytosanitaire agricole.
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/2596/img-2.jpg
File image/jpeg, 160k
Title Figure 3. Construction de l’indicateur de charge liée à l’assainissement non collectif.
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/2596/img-3.jpg
File image/jpeg, 152k
Title Figure 4. Construction de l’indicateur de sensibilité des sols à l’érosion hydrique.
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/2596/img-4.jpg
File image/jpeg, 220k
Title Figure 5. Charge agricole annuelle (2005) en produits phytosanitaires sur le bassin versant de la baie du Robert.
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/2596/img-5.jpg
File image/jpeg, 120k
Title Figure 6. Evaluation de la charge polluante annuelle en azote total par secteur d’activités et par sous bassin versant (22 cours d’eau tributaires).
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/2596/img-6.png
File image/png, 23k
Title Figure 7. Représentation spatiale de l’indicateur de vulnérabilité des sols à l’érosion sur le bassin versant de la baie du Robert.
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/2596/img-7.jpg
File image/jpeg, 100k
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References

Electronic reference

Anne Rizand, P. Mariel and K. Pinte, « La place des scientifiques dans un processus de gestion intégrée des zones côtières : évaluation des pressions polluantes d’origine terrestre sur la baie du Robert (Martinique) », VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [Online], Volume 7 Numéro 3 | décembre 2006, Online since 21 December 2006, connection on 22 May 2013. URL : http://vertigo.revues.org/2596 ; DOI : 10.4000/vertigo.2596

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About the authors

Anne Rizand

Cemagref, Institut de Recherche pour l’Ingénierie de l’Agriculture et de l’Environnement, Unité Agriculture et Espace insulaire, Martinique, Pôle de Recherche Agroenvironnementale de la Martinique, Quartier Petit Morne, BP 214, 97285 Le Lamentin, cedex 2, anne.rizand@cemagref.fr

P. Mariel

K. Pinte

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