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Dossier : Les grands fleuves : entre conflits et concertation

Changements environnementaux, dérives biologiques et perspectives de restauration du Rhône français après 200 ans d’influences anthropiques.

Jean-François Fruget and Jeanne Dessaix

Abstracts

Three main periods described the history of fluvial ecosystems of the French Rhône River during the last centuries. Direct and indirect human impacts increased during this evolution. In approximatively one century, the river passed from a braided state to a series of impounded reaches. A bibliographic review concerning the current composition, the changes, and the possible restoration of the fauna and flora communities of the floodplain of the French Rhône River was recently presented. About 300 references allowed to record nearly 3820 animal and plant species: 1052 invertebrates, 322 vertebrates, 395 algae, 2050 higher plants. The biological descriptors showed a decrease in biological diversity with the decrease of the morphological diversity and of the connectivity of the regulated hydrosystem generated by continuous anthropic interference for more than one century. The future of natural areas of the Lower Rhône is quite uncertain despite the increasing place of the nature in the socio-economical functionning of the valley. However, some recent legal tools, mainly initiated by the State and associations, let us expect a positive physical and ecological evolution of the river. A decennial programme of hydraulic and ecological restoration of the Rhône has just been launched.

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Introduction

1La vallée du Rhône, en particulier en aval de Lyon, constitue l'un des axes majeur du développement économique de la France. Il en résulte une très forte accumulation d'agglomérations, de voies de communication, d'industries. Le fleuve lui-même représente un symbole de l'utilisation extrême d'un cours d'eau. Jusqu'ici entièrement tournés vers le développement économique, les acteurs de l'aménagement ont longtemps considéré les milieux naturels comme des espaces à conquérir. Ainsi, au cours des 200 dernières années, les activités humaines ont profondément changé le Rhône entre Lyon et la Camargue, mais aussi entre le lac Léman et Lyon. Des digues ont été construites au début des années 1800 afin de protéger les riverains contre les crues. Une seconde série d'endiguements fut ensuite érigée à partir de la seconde moitié du 19ème siècle afin d'améliorer les conditions de navigation. Enfin, ce fut la construction d'aménagements avec dérivations et la canalisation contemporaine du fleuve par la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), destinée à la production hydroélectrique, au développement de la navigation et de l'agriculture irriguée (Figure 1). L'eau du Rhône est également utilisée comme source de refroidissement de plusieurs centrales thermiques et nucléaires. Parallèlement, l'extension de villes telles que Lyon, Valence, Avignon et la présence d'importants complexes pétrochimiques, en particulier à l'aval de Lyon, ont fortement altéré la qualité de l'eau (Fruget, 1992).

2Depuis quelques années, un certain renversement de tendance semble s'amorcer. Dans un premier temps, quelques sites ont été préservés pour leur intérêt écologique ou paysager ; la prise en compte du patrimoine naturel, de sectorielle, tend à devenir l'un des éléments d’une politique plus globale de gestion de l'espace alluvial.

Historique : Une vallee progressivement coupee de son fleuve

3Le Rhône Français (Figure 1B) est un cours d’eau d’ordre neuf, d’approximativement 520 km de long (le fleuve prend sa source dans les Alpes Suisses où il parcourt 290 km). La partie française du bassin versant représente environ 93% de l’ensemble de celui-ci (95000 km2). En France, le Rhône peut être divisé en quatre grands ensembles géographiques en relation avec l’évolution des conditions hydrologiques et la violence des crues (Pardé, 1925) : le Haut-Rhône en amont de Lyon et de la confluence avec la Saône, son principal affluent ; le Rhône Moyen entre Lyon et la confluence de l’Eyrieux, ce dernier cours d’eau marquant également la limite nord de l’influence méditerranéenne pour les botanistes et les ornithologues ; le Bas-Rhône en aval de cette confluence jusqu’à Arles, ville située en amont du delta ; le delta, couvrant 1700 km2 de zones humides (environ 1:6 du delta du Danube), avec la  "Camargue"  (750 km2) en son centre entre les deux bras du fleuve.

4Comme de nombreux autres grands cours d’eau aménagés à travers le monde, le Rhône a été depuis très longtemps intensément exploité et régulé. Le fleuve a connu au cours des derniers siècles une histoire relativement uniforme que l'on peut résumer en trois phases principales (Béthemont, 1972 ; Bravard, 1987) : le fleuve naturel, le fleuve corrigé et enfin le fleuve aménagé (Figure 2). Dans les conditions naturelles, le Rhône était un cours d’eau tressé avec une tendance au méandrage. La plaine alluviale formait une mosaïque de chenaux (chenaux secondaires ou "lônes", en langage local) avec une multitude de milieux aquatiques, semi-aquatiques et terrestres (Figure 2A). Par la violence de ses crues, entrainant érosions et inondations, le fleuve représentait une contrainte considérable, limitant la mise en valeur du lit majeur. Cette dynamique a légué à la vallée actuelle des forêts, des milieux humides et autres espaces naturels de grand intérêt écologique, malheureusement forts dégradés aujourd'hui. La seconde moitié du 19ème siècle a été marquée par un changement fondamental du milieu, causé par une succession d'aménagements destinés à améliorer les conditions de navigation (Figure 2B). Plusieurs types d'aménagements se sont succédés en fonction de l'amélioration des techniques : après des digues longitudinales insubmersibles, des digues submersibles ont été réalisées, portant le nom du fameux ingénieur Girardon et créant un système de compartiments ("casiers" ou "carrés" en langage rhodanien) caractéristiques des paysages fluviaux de la vallée du Rhône. Il en a résulté une concentration des eaux dans un chenal unique aux berges stabilisées. Si le fleuve est resté en apparence libre par l'absence de barrage, il a été profondément modifié par l'enfoncement de son lit mineur et l'alluvionnement des zones protégées par les digues. Les iles et les berges couvertes de graviers et de buissons de saules se sont transformées en forêts ; la plupart des bras du fleuve se sont asséchés.

5Ainsi, à Pierre-Bénite, Salvador (1983) considère que ces divers aménagements ont aboutit entre 1850 et 1960 (avant les travaux CNR) à une diminution de 84 à 99% de la surface en eau des différentes lônes du secteur et de 80% pour les casiers Girardon. Avec les travaux de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), principalement entre 1950 et le milieu des années 1980, le Rhône a connu une seconde phase d'aménagement, destinée à plusieurs besoins : production hydroélectrique, développement de la navigation à grand gabarit, irrigation des terres agricoles. Le fleuve fut ainsi canalisé (Figure 2C). Douze unités d'aménagement, dites "au fil de l’eau" ou de basse chute, furent construites, avec dérivation de la plus grande partie du débit dans des canaux, court-circuitant ainsi l'ancien cours du fleuve barré par un barrage de dérivation (Figure 1C). Ces parties court-circuitées ne reçoivent plus qu'un très faible débit réservé (de 10 à 50 m3/s, à comparer au débit moyen de 1000 à 1700 m3/s) en dehors des périodes de crues où la capacité du canal est dépassée (Figure 1D). La longueur totale des parties court-circuitées atteint environ 150 km et celle des retenues 225 km, ce qui signifie que près de 50% du Rhône Français est régulé.

Figure 1. Le Rhône Français. A – Situation générale. B- Localisation et chronologie des aménagements. C – Aménagement type CNR. D – Fonctionnement hydrologique d’un aménagement.

6Si l'aménagement du 19ème siècle produisait un paysage relativement uniforme dans la vallée, où la végétation naturelle occupait une place importante, les travaux de la CNR ont constitué un profond bouleversement. L'espace a été structuré en tronçons dont les caractères résultent des travaux. La vallée a ainsi été "coupée" de son fleuve par le cloisonnement de l'écosystème alluvial qui a perdu une bonne partie de ses mécanismes fonctionnels : (i) la dynamique latérale (érosions/dépôts), largement mise à mal par les enrochements du siècle dernier, a totalement disparu ; (ii) les nappes phréatiques, abaissées par enfoncement du lit et dérivation, ne sont souvent plus disponibles pour la végétation ; (iii) les inondations ont diminué en fréquence et en durée ; (iv) la continuité de l'espace fluvial a été rompue par la construction de barrages (Fruget & Michelot, 1997).

Figure 2. Changement du profil transversal du Rhône à la suite des différents travaux de rectification de son cours depuis 1850. A – 1870 : profil avant les endiguements Girardon ; B – 1970 : profil un siècle après les premiers endiguements Girardon ; C – profil après l’aménagement CNR (in Persat et al., 1995).

Biodiversité : etat actuel

Préambule

7En raison de leur aspect dynamique et de leur forte hétérogénéité spatio-temporelle, les plaines alluviales des grands cours d’eau sont parmi les milieux les plus riches en nombre d’espèces (Amoros & Roux, 1988; Bayley, 1995; Sparks, 1995). Les grands cours d’eau des régions tempérées sont ainsi largement exploités et régulés depuis le 19ème siècle (Petts, 1984). Cette régulation (barrages, dragages, endiguements, etc.) entraine une discontinuité de la dynamique des débits, des processus de successions écologiques et de la connectivité entre les unités écologiques constituant la plaine alluviale à l’échelle des plus grands fleuves mondiaux (Petts et al., 1989; Dynesius & Nilsson, 1994). Ceci est à l’origine d’une fragmentation des hydrosystèmes et d’une perte d’hétérogénéité et de diversité des habitats. Par exemple, la superficie de la forêt alluviale du Rhin, estimée à 100000 ha à l’origine, ne représentait plus que 20000 ha en 1840 et seulement 7000 ha actuellement, dont plus de la moitié sont des plantations (Carbiener & Schnitzler, 1990). Sur le Rhône, deux exemples montrent bien cette perte de diversité des milieux et des habitats : (i) sur le Haut-Rhône en Chautagne, la construction d’une digue à la fin du 18ème siècle a réduit de 68% la bande active de ce secteur, qui n’est plus actuellement, après construction d’un aménagement hydroélectrique, que 5% de ce qu’elle était à l’origine (Coulet et al., 1997) ; (ii) le nombre d’iles entre Brégnier-Cordon et Arles, c’est-à-dire sur environ 370 km de linéaire de fleuve, a diminué de plus de 80% à la suite des aménagements contemporains (Coulet et al., op. cit.).

8La conservation des écosystèmes alluviaux médio-européens et leur restauration représentent un enjeu majeur pour l’Europe. Ils constituent en effet un type d’écosystèmes parmi les plus complexes et les plus organisés dans cette zone climatique. Ils sont également parmi les plus dynamiques, leurs fluctuations et leurs changements régissant le fonctionnement et la biodiversité de nombreux et différents milieux. Par exemple, près de 14500 espèces sont décrites pour les eaux douces européennes dans la Limnofauna Europaea (Illies, 1978),  dont environ 400 espèces de vertébrés.

9Si de nombreuses études existent sur les grands cours d’eau mondiaux, peu d’entre elles s’intéressent à l’ensemble des descripteurs biologiques et permettent un calcul suffisamment réaliste de la biodiversité. Toutefois, différentes synthèses sont disponibles sur le Danube, la Volga, la plaine alluviale des bas cours du Rhin et de la Meuse ou encore sur le bassin versant de la rivière Besos, un cours d’eau méditerranéen (Liepolt, 1967 ; Mordukhai-Boltovskoi, 1979, Van den Brink et al., 1996 ; Prat et al., 2000). Une synthèse similaire a récemment été établie concernant le Rhône Francais (Fruget & Michelot, 2001). Près de 285 références bibliographiques, où étaient publiées des indications et des listes faunistiques et floristiques, ont été consultées, couvrant les travaux de recherche menés sur la  faune et la flore aquatiques du Rhône Français au cours des 20 dernières années.

Biodiversité actuelle

10Près de 3820 espèces d’animaux et de plantes ont été recensées sur le chenal principal et la plaine alluviale du Rhône Français : 1052 invertébrés, 322 vertébrés, 395 algues, 2050 plantes supérieures (Tableau I).

11Quelques remarques peuvent toutefois être faites sur ces chiffres : (i) en raison de différents biais, les nombres de plantes supérieures ont été arrondis. (ii) Concernant les oiseaux, seules ont été prises en compte les espèces s’étant reproduites au moins une fois dans la zone étudiée. En effet, le Rhône constitue une zone de repos pour les oiseaux durant leurs migrations et le nombre d’espèces concernées peut être considérable : ainsi, sur le site de Miribel-Jonage, en amont de Lyon, seulement 90 espèces nicheuses sont prises en compte pour un total de 230 espèces observées. (iii) Parmi les mammifères, les chiroptères (chauves-souris) ne sont pas comptés car ce groupe est mal connu, et les rares observations effectuées sur la plaine alluviale du Rhône concernent des espèces se nourrissant dans la vallée, mais ne s’y reproduisant pas.

Tableau I. Nombre d’espèces d’animaux et de plantes rencontrées dans les cinq secteurs distingués sur le Rhône Français.

Tableau I. Nombre d’espèces d’animaux et de plantes rencontrées dans les cinq secteurs distingués sur le Rhône Français.

Répartition longitudinale de la biodiversité

12Le Haut-Rhône est très souvent le secteur abritant le plus d’espèces (invertébrés, oiseaux, plantes supérieures). Cette situation peut s’expliquer par différents facteurs : un meilleur état de conservation, une dynamique fluviale plus importante durant le 19ème siècle, un mélange d’influences biogéographiques médio-européennes et montagnardes (Bravard, 1987). Le Rhône Moyen et le Bas Rhône sont moins diversifiés, en raison de leur resserrement du point de vue physique (succession de larges plaines alluviales et de défilés étroits) et de leur plus grande artificialisation (nombreuses villes, aménagements hydroélectriques, sites industriels, etc.) (Michelot, 1989a).

13Si, pour de nombreux groupes, le lac du Bourget apparaît aussi riche (oiseaux nicheurs, amphibiens, mammifères) que la plaine alluviale du fleuve, les invertébrés aquatiques semblent y être moins diversifiés, probablement en raison d’un échantillonnage nettement moindre.

14La Camargue présente une très importante diversité biologique, due à la taille, à la bonne diversité et au bon état de conservation de ses milieux naturels, mais aussi à la pénétration de nombreuses espèces marines (poissons et invertébrés, en particulier) dans le milieu limnique jusqu’à la limite du coin salé.

DERIVES ECOLOGIQUES

Evolution historique récente des peuplements de poissons

15Persat et al. (1995) ont étudié les conséquences de la gestion du cours principal et des rives du Haut-Rhône Français depuis le 19ème siècle. Les individus juvéniles sont rares sur le Haut-Rhône à courant libre : en accroissant la profondeur et en accentuant la pente de la berge, les endiguements de cette époque ont rendu le système moins favorable pour les poissons et en particulier pour les jeunes stades. Au milieu du 20ème siècle, la construction des premiers barrages sur le cours supérieur (Verbois, Génissiat) et leur vidange périodique ont abouti à un net déclin des salmonidés, à la diminution d’autres espèces telles que le barbeau fluviatile, le vairon, le blageon, le goujon et la loche franche, à la disparition de l’apron. Le faible nombre d’alevins et de juvéniles observé à la fin des années 1970 peut être relié à une combinaison des effets des endiguements, des vidanges et du marnage. Après l’aménagement par la CNR de la partie tressée du cours supérieur du fleuve dans les années 1980, un grand nombre d’alevins et de juvéniles est alors noté, aussi bien dans les parties court-circuitées que dans les milieux artificialisés (canaux de dérivation et retenues). Toutefois, ces jeunes stades appartiennent essentiellement à trois espèces, le gardon, le goujon et le chevaine. Dans les milieux aménagés, la faune piscicole est pauvre en diversité et en abondance en poissons de grande taille. Les espèces rhéophiles telles que les salmonidés, la vandoise, le spirlin et le barbeau sont absentes. A l’opposé, une augmentation des espèces rhéophiles et sensibles, qui avaient précédemment diminué avec l’aménagement du cours supérieur, est notée dans les sections court-circuitées.

16Olivier & Carrel (données non publiées) ont réalisé une comparaison avec les changements ayant affecté la faune piscicole du Rhône Moyen (Figure 3) : avant leur régulation par la CNR, le Haut-Rhône et le Rhône Moyen présentaient des peuplements divergents, caractérisés pour le premier par les salmonidés (ombre commun, truite fario) et des cyprinidés rhéophiles (vandoise, barbeau, hotu, blageon), par des espèces migratrices (lamproie marine et alose) et par des cyprinidés plus limnophiles (chevaine et brème) pour le second. Actuellement, ces peuplements sont devenus convergents à la suite du déclin des salmonidés et de l’accroissement du gardon et du chevaine sur le Haut-Rhône, de la disparition des espèces migratrices et l’augmentation des cyprinidés limnophiles (gardon, ablette, perche-soleil) et de la réduction des espèces rhéophiles (hotu, barbeau, goujon) sur le Rhône Moyen. D’un point de vue typologique, le fleuve en aval de Lyon est ainsi passé du type épipotamon (cours d’eau à substrat grossier et vitesse rapide dans les secteurs de radier encore présents) à un type métapotamon (rivière de plaine à granulométrie fine dominante, abritant des espèces eurythermes et rhéotolérantes, à cyprinidés dominants). La limite de transition typologique a ainsi reculé d’environ 210 km au cours des 20 à 30 dernières années, remontant de Donzère sur le Bas-Rhône à l’amont de Lyon, voire plus haut (Fruget, 1992).

Figure 3. Différenciation des peuplements piscicoles du Haut-Rhône (secteurs de Chautagne-Belley) et du Rhône-Moyen (secteurs de Péage-de-Roussillon et de Cruas-Tricastin) avant l’aménagement CNR et dérive de ces peuplements après l’aménagement.

Les codes des espèces sont ceux utilisés dans le cadre de l’Inventaire National Faune-Flore. La figure correspond au plan factoriel F1xF2 d’une Analyse Factorielle des Correspondances. D’après Olivier & Carrel, données non publiées.

17Les peuplements piscicoles du chenal principal du Rhône Moyen montrent toutefois de grandes similarités avec ceux d’autres cours d’eau européens fortement anthropisés tels que le Rhin (Lelek, 1989; Lelek & Köhler, 1990), le Danube (Jankovic et al., 1987; Bacalbasa-Dobrovici, 1989; Schiemer &Spindler, 1989; Schiemer & Waidbacher, 1989) ou la Vistule (Backiel & Penczak, 1989). Les cyprinidés dominants sont les mêmes, tandis que les espèces d’accompagnement dépendent du contexte biogéographique, de la localisation des sites étudiés le long du continuum fluvial régulé ou encore de la présence de milieux annexes au sein de la plaine alluviale (bras secondaires, affluents, parties court-circuitées, etc.).

Les poissons migrateurs : exemple de l'alose

18Une des conséquences les plus importantes de l'aménagement hydroélectrique du Bas-Rhône concerne les poissons migrateurs, en particulier l'alose (Gallois, 1946, 1950 ; Rameye et al., 1976 ; Quignard, 1977 ; Kiener, 1985 ; Pattee, 1988). Avant 1950, l'alose remontait sur l'ensemble du bassin du Rhône jusqu'au Doubs par la Saône et au lac du Bourget par le Haut-Rhône. Le premier aménagement hydroélectrique, Donzère-Mondragon, mis en service en 1952, a coupé d'entrée l'accès à 75% du bassin pour les poissons migrateurs (Figure 4). Malgré tout, de nombreux autres sites de fraie existaient entre le secteur Beaucaire-Avignon et la confluence de l'Ardèche. Ils ont été fortement compromis par la mise en service de l'aménagement de Vallabrègues en 1970 et définitivement supprimés par ceux d'Avignon et de Caderousse au milieu des années 1970. A la fin des années 1980, l'alose n'était présente de façon significative qu'à l'aval de l'aménagement de Vallabrègues, les dispositifs de franchissement des seuils et des barrages étant peu ou pas efficaces (Délégation de Bassin RMC, 1990). Ainsi, au début des années 1990, seulement 15% environ de la route migratoire originelle était encore accessible à l'alose sur le cours principal (480 km avant la construction de Donzère-Mondragon, environ 70 km il y a quelques années), et moins d'un tiers sur le dernier affluent accessible, le Gard.

19L'évolution des prises depuis 1950 reflète bien la baisse des stocks induite par les modifications de la structure physique du Rhône (aménagement hydroélectrique, extraction de matériaux) et de son fonctionnement hydrologique (faiblesse des débits réservés) : 53 tonnes d'aloses étaient pêchées en 1927 entre Pont-St-Esprit et Arles, 10 tonnes en 1950 (Gallois, 1950), 8 tonnes au début des années 70 (Rameye et al., 1976) et seulement 3 à 4 tonnes en 1988 (Délégation de Bassin RMC, 1991). Au milieu des années 1940, avant la construction du barrage de Donzère, environ 15 tonnes étaient récoltées à l'aval immédiat de Lyon (Pattee, 1988).

20Les études engagées depuis la mise en place du Schéma de Vocation Piscicole du fleuve Rhône et le lancement du Plan d'Action Rhône ont montré la faisabilité du projet de réhabilitation de la circulation de l'alose sur le Rhône jusqu'au confluent de l'Ardèche, en vue de son accès aux frayères constituées par ses affluents. La réalisation de cet objectif permettrait de retrouver la situation historique de 1952 et l'accessibilité à un linéaire de plus de 300 km de cours d'eau, afin de préserver l'espèce, son habitat, et d'induire une valeur ajoutée à l'économie touristique et halieutique, par reconstitution du stock dans la partie basse du bassin du Rhône (Commission de Bassin RMC, 1993).

Protection des espèces patrimoniales : l’exemple de l’Apron

21Outre les poissons migrateurs, d'autres espèces sont également menacées dans le bassin rhodanien par l'impact des activités humaines. Généralement ces dernières sont localisées dans les parties basses des cours d'eau. Or, ces secteurs représentent des zones importantes de reproduction, d'abri, de nourriture. La mise en place de mesures de protection sur les affluents ainsi que le rétablissement de la libre circulation des espèces permettant l'accès aux différentes zones bénéficieront également aux espèces menacées telles que la lamproie marine, présente dans le Rhône en aval de Beaucaire et dont la migration (de manière similaire à l'alose) est bloquée par l'aménagement hydroélectrique de Vallabrègues, le toxostome et le blageon, dont les populations sont très réduites dans le Rhône, mais plus abondantes dans ses affluents (Commission de Bassin RMC, 1993). Toutefois, le cas le plus spectaculaire est celui de l'apron, Zingel asper, endémique du bassin du Rhône et dont le genre est originaire du bassin du Danube où deux espèces sont présentes. Il n’occupe actuellement plus que 17% du linéaire de cours d’eau qu’il occupait originellement, principalement dans certains affluents tels que l'Ardèche, le Gard ou la Cèze, sa présence dans le cours principal du Rhône étant résiduelle (Perrin, 1988 ; Boutitie, 1984). Les barrages et la régulation, à l’origine d’un comblement progressif du substrat par les sédiments fins, ainsi que la faiblesse des débits réservés sont les causes principales de sa disparition. L’espèce bénéficie de mesures de protection : elle est inscrite à l’Annexe II de la Convention de Berne sur la conservation de la faune sauvage et des milieux naturels en Europe, en Annexes II et IV de la directive europénne sur les habitats et la faune et la flore, sur la liste rouge des espèces menacées en France (Keith et al, 1992, Maurin & Keith, 1994).

 (d’après Rameye et al., 1976).

Figure 4. Migrations passées et actuelles de l’alose dans le bassin du Rhône

Les invertébrés aquatiques

22Usseglio-Polatera (1985) ont étudié les peuplements de trichoptères et d’éphémères du Rhône à Lyon avant et après la mise en service du barrage de Pierre-Bénite en 1966. Ils notent une réduction de 47% du nombre d’espèces de trichoptères et de 42% de celui d’éphémères (Figure 5). Sur le Haut-Rhône régulé par l’aménagement CNR, Dessaix et al. (1995) montrent une diminution, voire une disparition, des certaines larves d’insectes potamiques et rhéophiles tels sue les plécoptères s.l., plusieurs espèces d’éphémères Heptageniidae, les trichoptères Neureclipsis bimaculata, Rhyacophila sp., Hydropsyche spp. et, parallèlement, l’apparition ou l’augmentation de taxons potamo-lénitiques tels que l’éphémère Potamanthus luteus, the Trichoptère Polycentropus flavomaculatus, le crustacé Asellus aquaticus, et plusieurs espèces de planaires et de mollusques gastéropodes.

Figure 5. Changements du nombre de taxons de Trichoptères et d’Ephémères dans le Rhône à Lyon avant (1959) et après (1982) la mise en service du barrage de Pierre-Bénite en 1966. Adultes capturés par piégeage lumineux.

D’après Usseglio-Polatera (1985).

L’avifaune aquatique

23Avant les aménagements du 19ème siècle, la vallée du Rhône en aval de Lyon jusqu’à la Camargue correspondait probablement à la zone à sterne (vastes bancs de graviers, forte dynamique fluviale). Cette zone est équivalente à l'épipotamon décrit précédemment par la faune piscicole. Outre les sternes, la bibliographie montre la présence d'espèces avicoles typiquement fluviales sur le Bas-Rhône tressé "originel" telles que l'oedicnème criard et le petit gravelot. Cette faune était proche de celle que l'on peut rencontrer sur des rivières telles que la Loire, l'Allier ou la Durance (Michelot, 1990). Avec la régulation du fleuve par la CNR et la diminution de la vitesse du courant, une dérive des peuplements s’est produite de façon identique au constat effectué pour les poissons, en direction d’une zone typologique située plus en aval, la zone à foulque, équivalente au métapotamon. L’avifaune aquatique du Rhône Moyen est maintenant caractérisée par son instabilité et l’absence d’espèces fluviales typiques (Pont, 1985). Actuellement, la diversité et l'abondance ornithologiques sont liées à l'existence de milieux relictuels tels que quelques bras morts et forêts alluviales ou, au contraire, à l'existence de milieux totalement créés par l'homme tels que les retenues et les canaux. Les Anatidés (canards au sens large) et les Rallidés (foulque en particulier) sont particulièrement favorisés par les vastes plans d'eau des retenues ou bien les gravières issues de l'aménagement CNR.

24Les digues et les plateformes de graviers, paysages nouveaux de l'ancien lit majeur apparus à la suite de l'aménagement CNR, présentent certaines potentialités liées à leur situation à l'interface milieu aquatique - milieu terrestre et à leurs contraintes de gestion. En particulier, ces surfaces graveleuses fonctionnent dans une certaine mesure comme un milieu de remplacement des iles et des grèves (Michelot, 1990). Situées en bordure du lit majeur, sur les berges du fleuve, constitués d'alluvions et colonisés par les peupliers, ces sites permettent la présence d'espèces caractéristiques des milieux tressés à forte dynamique fluviale de la zone à sterne : petit gravelot, bergeronnette grise, pipit rousseline, bruant proyer, alouette calandrelle, cochevis huppé, oedicnème criard (Michelot, 1989b).

Les mammifères aquatiques

25Le castor, espèce emblématique de l'écosystème rhodanien, peut également donner quelques éléments sur les changements qu'a connu le fleuve. Très rare au début du 19ème siècle, sans doute à cause de la pression de piégeage, il a considérablement gagné du terrain depuis sa protection au début 20ème siècle (Erome, 1982). Cette espèce s'est apparemment bien adaptée à l'aménagement CNR, en particulier grâce aux centaines de kilomètres de contre-canaux, milieux très favorables par leur végétation de saules et peupliers, et par l'absence de crue. Mais la situation à long terme n'est certainement pas aussi favorable qu'on pourrait le penser. Les contre-canaux présentent une tendance naturelle au tarrissement ; leur végétation verra probablement une diminution des espèces appétentes par rapport au frêne, qui n'est pas consommé. Le long des vieux Rhône, les casiers Girardon et les lônes sont l'objet d'une intense sédimentation, qui fait disparaitre des gîtes potentiels ; ainsi le site de Baix-Logis Neuf a vu diviser sa population par deux au cours des 20 dernières années (Penel, 1994). Enfin, le castor paie un lourd tribut au développement des axes routiers en bordure du fleuve (mortalité par collision). Au total, l'espèce n'est certainement pas menacée, mais sa densité connait et connaitra probablement une diminution. Par contre, elle étend sa présence sur de nombreux affluents.

26La loutre, autre mammifère emblématique, a probablement disparu du Bas-Rhône avant les aménagements CNR, en raison du piégeage et surtout de la pollution des eaux (Michelot, 1992). Les transformations de la vallée et le maintien de taux de pollution excessifs empêchent désormais d'envisager le retour de cette espèce (Michelot et al., 1995).

Une conséquence parmi d’autres : le développement d’espèces exotiques invasives

27Si pour les poissons les espèces allochtones sont essentiellement liées à des introductions volontaires (Persat, 1988), la vingtaine d’espèces d’invertébrés exotiques actuellement recensées (Tableau II), appartenant à différents groupes faunistiques et d’origines diverses, sont apparues à la faveur de l’aménagement contemporain du fleuve. Parallèlement à la modification d’habitat engendrée par les aménagements CNR qui ont créé des conditions favorables en diminuant la vitesse du courant et en permettant un accroissement de la température, la navigation a favorisé ces processus de migration et d’invasion (c’est le cas par exemple pour les crustacés Crangonyx pseudogracilis, Gammarus roeseli et Gammarus tigrinus et les mollusques Lithoglyphus naticoïdes et Corbicula fluminea). L’arrivée et/ou la redistribution de ces différents organismes se fait principalement en fonction de l’hydroclimatologie qui constitue le principal facteur de contrôle des peuplements d’invertébrés (Fruget et al., 2001). Dans ce contexte, la Saône, affluent numéro un du Rhône, connectée par les canaux du réseau Freycinet aux cours d’eau d’Europe du Nord, en particulier avec le Rhin, est la principale voie de dissémination, spécialement lors des épisodes de hautes eaux (cf par exemple l’apparition de différents crustacés sur le Rhône aval au cours des années 1990, à l’exception des écrevisses Pacifastacus leniusculus et Procambarus clarkii, "échappées" d’élevages). Pour sa part, le mollusque bivalve Corbicula est arrivé simultanément par la Saône et par les canaux du sud de la France reliant le bassin du Rhône à celui de la Garonne et à la façade atlantique.

 (* = espèce absente du Haut-Rhône ; ** = espèce seulement présente sur le Haut-Rhône ; *** = espèce seulement présente sur le Rhône Moyen et le Bas-Rhône).

Restauration : vers une mise en valeur globale de l’espace

28La vision sectorielle de l'aménagement semble s'atténuer au profit d'une conception plus intégrée. Dans la plupart des cas, la gestion de l'espace conserve une finalité principale, mais son responsable se rend compte que cet objectif est compatible avec d'autres, et en particulier la conservation de la nature.

29Les aménagements de la CNR ont entrainé des impacts négatifs majeurs sur l'hydrosystème rhodanien. Aujourd'hui, cet organisme est responsable de la gestion des ouvrages et de l'ensemble du Domaine Public Fluvial, qui conserve des reliques de paysages fluviaux anciens et qui a vu se développer quelques milieux parfois intéressants (roselières, contre-canaux, ...). Il s'est récemment approprié cette dimension, avec l'élaboration en 1992 d'une charte d'environnement, validée par son ministère de tutelle. La CNR a donc en quelque sorte un nouveau mandat, qui se traduit par différents travaux d'inventaires et de génie écologique, en particulier l'inventaire du patrimoine naturel existant sur les terrains dont elle a la charge et qui doit déboucher sur de véritables plans de gestion de l'espace. D'ores et déjà, des opérations de génie écologique sont mises en oeuvre, telles que la remise en eau d'anciens bras du fleuve ou la gestion pastorale des digues.

30Dans ce cadre, la conservation, et a fortiori l’accroissement, de la biodiversité des hydrosystèmes demande une restauration physique et écologique de ces milieux tel que cela a été expérimenté sur différents secteurs du Danube ou du Rhône (Henry & Amoros, 1995 ; Heiler et al., 1995 ; Tockner et al., 1998 ; Ward et al., 1999). La gestion de cette restauration doit être axée sur le rétablissement des connections morphologiques, sources des connections biologiques et par conséquent de la diversité biologique (Amoros, 1991). Une approche holistique de cette gestion doit être menée, considérant le corridor fluvial dans son ensemble, des biotopes et biocénoses aquatiques à ceux et celles semi-aquatiques, connectés de façon permanente ou intermittente avec le milieu lotique du chenal principal (Amoros et al., 1987).

Mesures de protection et outils réglementaires

31Depuis une vingtaine d’années différentes mesures de restauration des milieux et des biocénoses ont été prises, principalement à l’initiative de l’Etat et des associations. Différents types d’actions ont été mis en œuvre, souvent de façon concomitante sur une même site, telles que :

  • Une protection des espèces. Cette mesure nationale ou régionale est efficace pour les espèces sensibles à une destruction directe (castor, héron), mais ne l’est pas quand les causes de régression sont différentes (loutre).

  • Une protection des habitats. La création de réserves naturelles permet d’éviter la disparition de certains sites par la régulation de certaines activités humaines. La biodiversité de ces sites se trouve ainsi souvent significativement augmentée (ile de la Platière à Péage-de-Roussillon).

  • La restauration du système fluvial. L’augmentation du niveau de la nappe alluviale ou du débit réservé permet d’améliorer la qualité des milieux aquatiques concernés.

  • La restauration des connections biologiques. Cette mesure vise principalement les poissons, mais d’autres mesures comme l’enlèvement des embâcles ont une action positive sur le castor ou les mammifères ongulés.

  • La restauration physique des milieux. Elle vise plus particulièrement à favoriser la dynamique végétale avec la création de berges en pente douce, d’iles, etc. L’avifaune s’en trouve également favorisée (site de Miribel-Jonage).

  • La gestion des successions végétales. Certains milieux sont maintenus naturellement ouverts par l’érosion ou la pratique du pastoralisme. Dans un futur proche, la disparition de ces mécanismes mettraient en danger les espèces vivant dans ces milieux. Une gestion pastorale des prairies où poussent des orchidées ou la déforestation des marais permettent d’éviter cela.

  • Le contrôle des activités humaines. La fermeture de l’accès à certains sites ou l’interdiction de la chasse ont eu des effets spectaculaires sur l’occurrence de certaines espèces (hérons, canards, …).

  • Les réintroductions. Elles concernent  en particulier le castor en amont de Lyon, ou encore la tortue cistude dans le lac du Bourget.

  • Ces actions sont rendues possibles par la mise en place depuis quelques années de différents outils réglementaires que sont :

  • Le programme décennal de restauration hydraulique et écologique du Rhône pour lequel plus de 6 milliards d’euros, financés par la CNR, l’Agence de l’Eau Rhône-Méditerranée-Corse et les collectivités locales, seront investit dans la restauration de la connectivité longitudinale et transversale du fleuve et de son fonctionnement écologique (rôle fonctionnel des bras secondaires, remise en eau des bras asséchés, réapparition des poissons migrateurs tels que l’alose ou l’anguille par installation de passes à poissons, etc.).

  • L’institutionalisation d'un Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) par la loi sur l'eau de 1992.

  • La directive européenne sur les habitats de la flore et de la faune sauvage visant à protéger de nombreux habitats (forêts alluviales, biotopes de certaines espèces, etc.) et conduisant à la mise en place du "réseau Natura 2000" qui réunit des sites protégés et gérés au titre de cette directive.

  • Le programme européen LIFE visant à dresser le bilan du patrimoine de la vallée et à imaginer des mesures de gestion globale, tenant pleinement compte des activités économiques.

L’exemple d’une gestion hydraulique globale

32Une certaine convergence d'intérêts se dessine peu à peu en faveur de la restauration du système hydraulique du fleuve Rhône. Les axes majeurs de cette évolution sont :

  • Bloquer l'enfoncement des cours d'eau et des nappes provoqué par une importante incision engendrée par une extraction abusive en lit mineur et une limitation des érosions latérales. Ce phénomène touche toutefois plus les affluents que le fleuve lui-même.

  • Conserver les champs d'expansion des crues afin de favoriser des inondations plus générales et moins violentes pour restaurer la fonction d'écrêtement et limiter les érosions.

  • Augmenter le débit réservé des parties court-circuitées. Des approches diverses au départ conduisent aujourd'hui à revendiquer un relévement de ces débits réservés à des fins de restauration du paysage à Pierre-Bénite ou de protection des milieux naturels à Péage-de-Roussillon.

  • Restaurer le rôle des anciens bras du fleuve. Les lônes, longtemps oubliées, font l'objet d'une attention marquée depuis quelques années. En particulier, les opérations de remise en eau des bras asséchés se multiplient pour la pêche, l'écrêtement des crues, la recharge des nappes, ....

33Le choix d’un débit minimal implique de trouver un compromis entre la production énergétique et la qualité des habitats aquatiques (Lamouroux et al, 1999). En effet, après l’augmentation de ce débit les habitats doivent retrouver leur niveau d’avant régulation en termes de vitesse de courant et de profondeur d’eau. Des simulations montrent que le paysage fluvial sera modifié par l’accroissement du lit mouillé et de la vitesse de courant. De l’autre côté, l’influence sur la remise en eau des bras secondaires ou sur la remontée du niveau de la nappe sera limitée et elle sera nulle sur le transport solide (Lamouroux et al, op. cit.). Ainsi, il est nécessaire de définir des objectifs de gestion.

Tableau III. Valeurs de débit réservé (m3/s) nécessaires dans différentes parties court-circuitées du Rhône afin d’atteindre la valeur biologique maximum prédite en fonction des situations hydrauliques et biologiques actuelles. D’après Lamouroux et al. (1999).

Tableau III. Valeurs de débit réservé (m3/s) nécessaires dans différentes parties court-circuitées du Rhône afin d’atteindre la valeur biologique maximum prédite en fonction des situations hydrauliques et biologiques actuelles. D’après Lamouroux et al. (1999).

34Concernant l’ichtyofaune, trois objectifs ont été retenus : (1) uniformiser de la qualité des sections court-circuitées en se rapprochant des valeurs des deux sections qui présentent le débit réservé le plus élevé (Brégnier-Cordon sur le Haut-Rhône et Donzère-Mondragon sur le Bas-Rhône) ; (2) favoriser certaines parties court-circuitées en liaison avec l’originalité de leurs peuplements liée aux caractéristiques géomorphologiques ou leurs longueur non influencée par des seuils ou retenues ; (3) viser une rentabilité socio-économique en augmentant le débit où la demande sociale est forte et/ou le coût lié à cette augmentation est moindre.

35Le tableau III montre que les différents objectifs ne sont pas incompatibles : les parties court-circuitées qui présentent la meilleure adéquation entre la richesse des peuplements piscicoles et l’importance du débit minimum pour l’objectif 1, et probablement pour un faible coût, sont généralement les plus originaux (Chautagne sur le Haut-Rhône, Baix, Montélimar et Donzère sur le Bas-Rhône).

36Différentes études montrent que le débit optimum pour certaines espèces est généralement plus bas que le débit moyen naturel du fleuve (Lamouroux et al., op. cit.). La variabilité temporelle du débit est ainsi un facteur de contrôle de la diversité, et une modulation temporelle du débit réservé est nécessaire afin de se rapprocher de la situation naturelle. Par exemple, à Péage-de-Roussillon où le débit réservé actuel est de 10 à 20 m3/s, l’objectif est un réarrangement de la structure du peuplement piscicole avec une meilleure distribution de la densité au profit d’espèces rhéophiles tel que le barbeau fluviatile (CEMAGREF, 1997). En faciès lotique, l’habitat semble être optimum entre 25 et 50 m3/s, le débit pouvant atteindre 100 m3/s sans mettre en danger les espèces présentes. En faciès lénitique, du point de vue physique, la gestion optimale se situe entre 50 et 100 m3/s, l’amélioration espérée étant une meilleure distribution de la densité des espèces.

Conclusions et Perspectives

37Les descripteurs biologiques montrent une baisse de la diversité biologique avec la diminution de la diversité morphologique et de la connectivité de l'hydrosystème aménagé, engendrée par les interventions anthropiques qui se sont succédées depuis près de deux siècles. L'aménagement du fleuve a diminué l'hétérogénéité spatio-temporelle naturelle de l'hydrosystème et réduit les échanges entre ses différentes composantes, entamant ainsi grandement son intégrité tant structurelle que fonctionnelle. Toutefois, certains milieux spécifiques (radiers des parties court-circuitées, digues et plateformes de graviers au niveau des retenues et des canaux) permettent le maintien (poissons, invertébrés) ou la réapparition (oiseaux) d'espèces fluviales caractéristiques.

38Bien que la nature semble progressivement s’intégrer au fonctionnement socio-économique de la vallée du Rhône, le futur des milieux naturels liés au fleuve semble encore incertain (Fruget & Michelot, 1997). Une volonté social, politique et économique, similaire à celle ayant prévalu au moment de l’aménagement contemporain du fleuve il y a près d’un siècle, s’avère aujourd’hui nécessaire pour le sauvegarder et le restaurer. Des décisions et des actions récentes (plan décennal de restauration, en particulier) laissent toutefois entrevoir une lente mais positive évolution.

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Title Tableau I. Nombre d’espèces d’animaux et de plantes rencontrées dans les cinq secteurs distingués sur le Rhône Français.
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Credits  (d’après Rameye et al., 1976).
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Title Tableau III. Valeurs de débit réservé (m3/s) nécessaires dans différentes parties court-circuitées du Rhône afin d’atteindre la valeur biologique maximum prédite en fonction des situations hydrauliques et biologiques actuelles. D’après Lamouroux et al. (1999).
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References

Bibliographical reference

Docteurs ès-sciences de l’Université Lyon 1, les auteurs travaillent depuis près de 20 ans sur l’écologie des grands cours aménagés. Ils dirigent le bureau d’études ARALEP (Application de la Recherche A L’Expertise des Pollutions), spécialisé dans l’expertise et la recherche appliquée en écologie des eaux douces. Leurs travaux concernent en particulier les impacts des barrages et des rejets thermiques des centrales nucléaires sur la faune et la flore aquatiques, et ils collaborent au plan décennal de restauration hydraulique et écologique du fleuve Rhône. Ils sont les auteurs de nombreuses publications sur l’impact des aménagements ou projets d’aménagements sur les hydrosystèmes fluviaux (projet de canal à grand gabarit Saône-Rhin, aménagement du Rhône, etc.). JFF travaille plus particulièrement sur les problèmes de variabilité spatio-temporelle des espèces et des milieux aquatiques face aux perturbations naturelles et anthropiques, tandis que JD est spécialiste de l’écologie et de la systématique des invertébrés aquatiques.

Electronic reference

Jean-François Fruget and Jeanne Dessaix, « Changements environnementaux, dérives biologiques et perspectives de restauration du Rhône français après 200 ans d’influences anthropiques. Â», VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [Online], Volume 4 Numéro 3 | décembre 2003, Online since 01 December 2003, connection on 22 May 2013. URL : http://vertigo.revues.org/3832 ; DOI : 10.4000/vertigo.3832

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Jean-François Fruget

ARALEP – Ecologie des Eaux Douces, Domaine Scientifique de la Doua, Bât. CEI, BP 2132, 69603 Villeurbanne cedex, France.Tél. : + 33 (0)4 78 93 96 33fruget@aralep.com

Jeanne Dessaix

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