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2003

Kuujjuarapik – Whapmagoostui : une région pour établir une réserve de la biosphère UNESCO ?

Eric Duchemin

Full text

1S'établissant en un réseau mondial, les réserves de la Biosphère UNESCO ont vu le jour en 1976. Par ce réseau l'UNESCO désire reconnaître que la conservation de la diversité biologique fait partie intégrante de la sauvegarde des valeurs culturelles et que les régions bioculturelles constituent des unités de base viables pour les pratiques de conservation et l'utilisation durable des ressources. Ainsi Andrea Kaus (1993) définit que le concept de réserve de la Biosphère ne constitue pas un programme fixe pour une zone déterminée, mais une base sur laquelle développer un plan d'aménagement réalisable avec les coutumes locales, et les intérêts de conservation particuliers à la région. Comme nous allons l'aborder sommairement, dans un tel contexte, les milieux nordiques représentent un terroir propice pour établir ce type d'initiative. Pourtant à ce jour on retrouve uniquement 3 réserves de la biosphère dans la toundra, dont aucune au Canada. Le Canada est pourtant dépositaire d'un vaste territoire de cet écosystème.

2La région de Kuujjuarapik-Whapmagoostui pourrait tout à fait prétendre à devenir une réserve de la Biosphère au Canada. Car, en plus de constituer un lieu avec une empreinte écologique faible, cette région offre un important potentiel; pour la conservation de la biodiversité, pour mener des interventions axées sur le développement durable, pour mener des recherches et assurer une surveillance écologique. Ce sont les trois fonctions importantes des réserves de la Biosphère. Kuujjuarapik et Whapmagoostui sont situées au 55ième parallèle nord, à cheval sur le territoire du Nunavik et le territoire cri, sur le delta ancien de la Rivière Grande Baleine. Les communautés autochtones Cri et Inuit s'y côtoient. Les cris, localisés sur les berges de la rivière, sont résolument tournés vers la terre, tandis que les Inuits sont traditionnellement tournés vers la mer pour leur subsistance. Deux modes de vie distincts que l'on perçoit aisément en parcourant les deux villages. La valeur culturelle de cette région est indéniable, mais qu'en est-il des autres fonctions que doivent assumer les réserves de la Biosphère?

Photo: Céline Martin

3Sans lien routier, ces communautés sont encore épargnées par les impacts environnementaux associés aux grands projets de développements (hydroélectrique, miniers). Situés à un peu moins de 200 kilomètres au Nord du complexe hydroélectriques de la Baie-James, ces villages sont au-dessus de la limite de l'empreinte écologique de la population québécoise du sud. La situation a failli basculer au cours des années 1990, lorsqu'un projet hydroélectrique d'aménagement sur la rivière Grande-Baleine a été proposé. Afin de s'y opposer les cris on fait une campagne publicitaire d'envergue internationale. Le point culminant de cette campagne a été la descente en canot de la Hudson jusqu'au siège de l'ONU à New York. Lieu où le cris ont revendiqué l'arrêt du projet. Depuis le calme est revenu. Les populations sont revenues à leurs occupations traditionnelles. Le projet est resté sur les tablettes des promotteurs. Cependant confronter à une croissance démographique importante, particulièrement chez les jeunes, les deux communautés ont à relever le défi du développement pour assurer la survie de leurs communautés. C'est donc un moment opportun pour enclencher un développement durable, en conservant le maintien de l'équilibre du milieu - un milieu écologique excessivement fragile.

Photo: Céline Martin

4Arrivé à Kuujjuarapik, on se retrouve sur une piste d'atterrissage en terre battue. Le vent chargé de sable fouette le visage. Les embruns signalent la présence de la mer. Les collines dénudées n'offrent aucun obstacle au regard. La beauté sauvage de cette région n'est évidemment pas suffisante pour considérer celle-ci comme une réserve de la biosphère de l'UNESCO. Au niveau de la conservation de la nature, on retrouve dans cette région les îles Manitounuk - des cuestas de basalte - gîte pour de nombreuses espèces de plantes et d'oiseaux. On y trouve aussi de nombreuses terres humides aux caractéristiques nordiques dont des champs de palses - ainsi que la faune et la flore particulière de la toundra. En outre, le lac À-l'eau-claire situé au nord des communautés abrite le phoque commun du Lac à l'eau claire, une espèce menacée (http://www.fapaq.gouv.qc.ca/​fr/​etu_rec/​esp_mena_vuln/​fiche_esp.asp?noEsp=64). Ce lac fait partie des plans du gouvernement québécois en ce qui touche la création d'aires protégées en région nordiques.

5Au niveau de la recherche et de la surveillance écologique, la région n'est pas dépourvue d'intérêt et d'infrastructure. Un centre d'étude, dirigé par le CEN de l'Université Laval est déjà installé à Kuujjuarapik. Les activités de recherche pourraient s'inscrire dans celle du réseau scientifique septentrional du MAB. Les recherches de ce centre portent entre autre sur l'effet des changements climatiques sur les écosystèmes de la toundra et sur le pergélisol ainsi que sur l'origine et l'évolution du milieu de vie des Inuits.

6Kuujjuarapik - Whapmagoostui est-elle une candidate valable pour établir une réserve de la biosphère UNESCO? Certainement.

7L'auteur visite ces localités une fois par deux ans lors d'un cours dont il est le co-responsable. Ce cours, portant sur le lien entre développement et environnement dans les zones frontières, est offert par l'Institut des sciences l'environnement de l'UQÀM. (http://www.ise.uqam.ca).

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Eric Duchemin, « Kuujjuarapik – Whapmagoostui : une région pour établir une réserve de la biosphère UNESCO ? Â», VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [Online], Regards / Terrain, Online since 01 October 2003, connection on 22 May 2013. URL : http://vertigo.revues.org/4569 ; DOI : 10.4000/vertigo.4569

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Eric Duchemin

Ph.D Chargé de cours, Institut des sciences de l'environnement, Université du Québec à Montréal drexenv@sympatico.ca

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