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2003

L'atmosphère de Brazzaville pollué par les voitures importées

Alcède Moumbou and Jean-Valère Ngoubangoyi

Full text

1Brazzaville, capitale du Congo, est devenue l'une des villes d'Afrique centrale la plus polluée. La principale source de cette pollution sont les fumées rejetées par les voitures d'occasion massivement importées d'Europe et d'Asie qui roulent avec de l'essence frelatée. Les spécialistes craignent la multiplication des cancers des voies respiratoires. Déjà on déplore la recrudescence de nombreuses maladies respiratoires.

2Suffoquer sous d'épaisse fumée noire qui entoure voitures, motos et piétons, rendant ainsi la visibilité quasiment nulle et la respiration difficile, sont des scènes courantes tant à Brazzaville que dans les centres urbains du Congo. Un petit pays d'Afrique centrale avec 342 000 km2 pour une population de 3 millions d'habitants.

3Pourtant, dans la ville, l'air est devenu irrespirable à cause du gaz carbonique rejeté par les voitures mais aussi du fait de l'incinération des ordures ménagères et des déchets plastiques. Dans certains endroits de Brazzaville, où s'entassent de tas d'immondices, des poubelles on doit y passer avec des mouchoirs pour se protéger le nez et la bouche. " Si des mesures draconiennes ne sont pas prises pour essayer d'assainir la ville, nous courrons le risque de voir apparaître la recrudescence de nouveaux types de maladies dues à la pollution de mauvais de gaz que nous respirons maintenant ", avertissait un enseignant de biologie lors d'un séminaire sur le recyclage de sachets plastiques à Brazzaville.

4La même crainte est exprimée par de nombreux spécialistes congolais de la santé. Ils estiment que " nous courrons a une catastrophe sur la plan sanitaire ". Dans les années à venir " nous assisterons à la multiplication des cas de cancer des voies respiratoires. Pour l'instant on constate l'augmentation des bronchites, les rhumes, la pneumopathie… Avant cette dernière maladie, très mortelle chez nous, était assimilée au Sida. Mais de plus de plus on se rend bien compte que c'est une maladie comme tout autre qui fait rage mais que l'on peut soigner ", alerte le Docteur Banzouzi, spécialiste des maladies respiratoires au centre hospitalier de Talangaï, un quartier nord de Brazzaville.

5Les véhicules d'occasions massivement importées d'Europe seraient essentiellement à l'origine de la pollution atmosphérique à Brazzaville. A la Direction générale de l'administration du territoire aucune statistique officielle sur le nombre de vieilles voitures importées n'est pas disponible. On estime à plus de 10 000 entre 1990 et 2000. Le nombre de véhicules immatriculées ne fait qu'augmenté au jour le jour.

6Pour Robert Ngoma, journaliste congolais, qui venait de réaliser une enquête sur la situation du carburant au Congo, " le drame, se plaint t-il, c'est que la majorité des propriétaires de ces véhicules et engins font usages de l'essence frelatée en provenance du Nigeria. On y met dans le carburant une forte dose d'huile à moteur. C'est pour cela que des voitures sont fumantes comme un pneu qui brûle ". Malonga Benoît, chercheur, lui est plus incisif. Il indexe également la mauvaise qualité de l'essence utilisée au Congo. " C'est de l'essence à plomb, dit-il, cette essence est très nuisibles à la santé surtout à celle des enfants ".

  • 1  Agence congolaise d'information (ACI) Janvier 2003

7Le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), a annoncé en janvier dernier que la plupart des pays africains renonceraient d'ici cinq ans à l'essence à plomb. Une enquête publiée par le PNUE à Nairobi, au Kenya démontre que quatre pays africains seulement dont l'Egypte, la Lybie, l'Ile Maurice et le Soudan sont déjà passés aux carburant " sans plomb " cette année quatre autres pays ou territoires (le Maroc, la Réunion, la Tunisie et le Sahara occidental) rejoindront cette initiative. D'autres pays plus d'une vingtaine, sont en train d'élaborer leur plan pour l'abandon de l'essence à plomb en 2006. L'essence sans plomb représente, en effet, 90% de la consommation mondiale de carburant. Et les 10% que représente l'essence à plomb se concentrent dans les pays du sud. Surtout sur le continent africain dont le Congo-Brazzaville. Le Directeur exécutif du PNUE M.Klaus Toepfer, a attribué ce phénomène à des questions technologiques, au manque de sensibilisation du public aux danger de l'essence au plomb sur la santé.1

8Au Congo-Brazzaville, pour le moment tout cela n'est pas encore à l'ordre du jour. Parmi les pratiques dangereuses on peut encore citer celle qui consiste à mélanger du pétrole " lampant " à de l'essence. Cette pratique est assez courante chez les petits revendeurs de l'essence de la contrebande qu'on appelle les " Khadaffi ". Tout cela contribue à embaumer l'atmosphère et à mettre en danger les moteurs des voitures et des motos qui ne sont pas soumis à des contrôles techniques rigoureuses.

9Devant l'aggravation continue de la pollution, le chercheur Benoît Malonga, pense qu'il faut essayer de limiter l'importation des véhicules d'occasion. Mais Jean-Claude, chauffeur de taxi ne l'entend de cette oreille. " Ces véhicules rendent énormément service. Puisque l'Etat y fait des rentrées fiscales. Et nous autres jeunes on exerce un petit boulot. Les populations, elles permettent de se déplacer ".

10Ne pouvant réclamer la suppression des importations des véhicules et les matières qui favorisent la pollution, les observateurs congolais proposent que le gouvernement détermine l'âge maximal des véhicules d'occasion que le Congo peur accueillir sur son territoire. Ils ne devraient pas dépasser 20 ans. Car le pays est devenu un dépotoir de carcasses des pays occidentaux. On sait aussi que le problème pour de nombreux pays africains est qu'ils ne disposent pas de moyens, des cadres et des structures nécessaires pour pouvoir appliquer les quelques législations contre la pollution atmosphérique. Ce qui favoriserait la protection efficace de l'environnement.

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Notes

1  Agence congolaise d'information (ACI) Janvier 2003

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References

Electronic reference

Alcède Moumbou and Jean-Valère Ngoubangoyi, « L'atmosphère de Brazzaville pollué par les voitures importées Â», VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [Online], Regards / Terrain, Online since 01 May 2003, connection on 22 May 2013. URL : http://vertigo.revues.org/4853 ; DOI : 10.4000/vertigo.4853

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About the authors

Alcède Moumbou

Journaliste et informaticienne, stagiaire au Centre de ressources pour la presse à Brazzaville Journaliste correspondant au Congo des agences de presses Syfia International et Infosud

Jean-Valère Ngoubangoyi

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