Skip to navigation – Site map
2009

Une expérience universitaire dans les parcs et lieux historiques nationaux canadiens : contribution à une meilleure gestion du milieu

Léo Provencher and Jean-Marie M. Dubois

Abstract

Un partenariat entre Parcs Canada et l’Université de Sherbrooke existe de façon officielle depuis 1986 même si la collaboration se faisait avant cette date. Ce partenariat permet de satisfaire les missions des deux organismes, soit : 1) la formation des étudiants à tous les niveaux pour l’université et 2) les besoins d’expertise pour l’élaboration de stratégies de gestion ainsi que la mise en place des programmes de suivi et du maintien de l’intégrité écologique pour les parcs et de l’intégrité commémorative pour les lieux historiques. Plus de 400 étudiants ont été impliqués. Plusieurs de ces étudiants se sont prévalus de la plupart des possibilités du système en fonction de besoins exprimés par les parcs ou les lieux historiques : 1) formation à la réalité du terrain par des camps de travail au baccalauréat, 2) initiation à la recherche par un rapport de baccalauréat, 3) initiation à la pratique par des stages en régime coopératif au baccalauréat et des stages professionnels en milieu de travail à la maîtrise, 4) formation à la recherche à la maîtrise ou au doctorat et 5) emplois temporaires ou réguliers dans les parcs et les lieux historiques. Les thématiques abordées au baccalauréat sont la caractérisation du milieu, les impacts et les suivis environnementaux, les propositions d’aménagement et les études socio-économiques. Les thématiques abordées aux études supérieures sont la planification stratégique et les risques environnementaux, la dynamique des milieux, les méthodes d’inventaire et de suivi biophysiques ainsi que la gestion des données. Outre les bureaux national à Gatineau et régional à Québec, onze parcs et trois lieux historiques dans sept provinces, dont le Québec, et un territoire ont bénéficié de ce partenariat. Cette formule est gagnante pour les trois parties : 1) expérience professionnelle à partir de cas concrets pour les étudiants, 2) développement d’une expertise en conservation des milieux pour les enseignants et 3) connaissance et gestion plus éclairée des ressources pour le personnel des parcs.

Top of page

Full text

Introduction

1L’objectif de cet article est de rendre compte d’une expérience de formation universitaire d’étudiants dans un milieu de pratique privilégié, les parcs et les lieux historiques nationaux canadiens. Cette expérience s’est déroulée sur plus de 20 ans dans de nombreux parcs et lieux historiques à travers tout le Canada et elle s’est faite autant avec des étudiants au baccalauréat qu’avec des étudiants aux études supérieures. Elle a aussi contribué au développement de l’expertise scientifique des enseignants impliqués dans cette démarche.

2Un bilan de la première décennie de cette expérience publié dans Téoros montrait son intérêt tant pour les parcs que pour les universités (Dubois et al., 1995). Un bilan plus exhautif, réalisé après deux décennies de collaboration, est à la base du présent article (Dubois et Provencher, 2003 ; Provencher et Dubois, 2004 ; Provencher et al., 2004 ; Dubois et Provencher, 2006a, b).

3Après un rappel sur la mission des universités ainsi que des parcs et des lieux historiques nationaux, nous évoquerons les modalités de partenariat et les types d’interventions qui en découlent, pour terminer avec un bilan général de la collaboration ainsi qu’un exemple particulier avec le Parc national du Canada Kouchibouguac.

Mission des universités ainsi que des parcs et des lieux historiques nationaux canadiens

4Le partenariat entre les universités ainsi que les parcs et les lieux historiques répond aux missions et aux besoins de chacun.

5La mission des universités est la formation et la recherche. La formation peut être autant théorique que pratique de la même façon que la recherche peut être aussi bien fondamentale qu’appliquée. L’approche des enseignants est donc autant centrée sur le développement scientifique de l’étudiant que sur sa formation pratique en recherche appliquée. Pour ce faire, les enseignants ont besoin de lieux et de sujets d’expertise et les parcs et les lieux historiques sont des endroits tout désignés à cause des besoins relevant de leur mission propre.

6La mission des parcs nationaux canadiens est de préserver des espaces représentatifs des différentes régions naturelles du pays (Gouvernement du Canada, 2001). Les mandats qui en découlent sont autant la conservation de l’intégrité écologique que l’accès au public et son éducation (Service canadien des parcs, 1992 ; Patrimoine canadien, 1994 ; Parcs Canada, 2001). La mission des lieux historiques gérés par Parcs Canada (Gouvernement du Canada, 2001), est de protéger et de développer les endroits importants pour la connaissance et l’appréciation de l’histoire du Canada ; en découle la conservation de leur intégrité commémorative (Patrimoine canadien, 1994). Ces parcs et lieux historiques subissent une pression humaine, des risques d’altération de l’intégrité écologique ou d’intégrité commémorative et, en conséquence, une nécessité de suivis (Kalff, 1995 ; Service canadien des parcs, 1992). Pour ce faire, les parcs et les lieux historiques ont besoin d’information et d’éclairage scientifique pour la gestion et la conservation des ressources et donc d’expertise scientifique et de coopération avec le milieu (Dubois et Provencher, 2003).

Partenariat parcs-lieux historiques/milieu

7La politique de recherche et de formation de Parcs Canada répond à bon nombre de besoins des parcs et des lieux historiques ainsi que des maisons d’enseignement par le programme d’ententes bénévoles et les protocoles d’entente de recherche.

8Le programme d’ententes bénévoles, institué en 1978, touche autant les personnes que les organismes (Service canadien des parcs, 1987) : l’Université de Sherbrooke s’en est prévalu depuis 1984. L’objectif du programme est de bénéficier de l’expertise de ces ressources bénévoles pour des tâches complémentaires ou pour des tâches que le personnel régulier des parcs et des lieux historiques ne peut faire. Les gestionnaires fournissent à cet effet une liste des activités qui leur seraient utiles et la personne bénévole choisit le travail qu’elle veut faire en fonction de ses goûts et de ses capacités, tout en acceptant d’être encadrée par le personnel régulier.

9Le programme d’ententes bénévoles est une des bases de réalisation du programme de protocoles d’entente de recherche avec les maisons d’enseignement, principalement les universités. Le programme de protocoles d’entente de recherche a été institué en 1983 et plusieurs dizaines d’universités ou de collèges s’en sont prévalu (Environnement Canada, 1990), dont l’Université de Sherbrooke depuis 1986. Le but poursuivi par les protocoles est de promouvoir la recherche sur les technologies utilisables pour la gestion des parcs et des lieux historiques, ainsi que la formation relative à la planification et à la gestion des ressources naturelles dans les parcs et des ressources commémoratives des lieux historiques. À cette fin, il est surtout prévu que Parcs Canada et la maison d’enseignement puissent entreprendre conjointement des projets de recherche permettant le transfert de technologies et de connaissances nouvelles entre les deux organismes.

Types d’interventions de l’Université de Sherbrooke

10Les types d’interventions de l’Université de Sherbrooke dans les parcs et lieux historiques peuvent être pris en exemple. Ils ont été effectués à trois niveaux : formation au baccalauréat, formation aux études supérieures et rôle-conseil.

Formation au baccalauréat

11La formation au baccalauréat se fait au plan académique au moyen des camps de travail et des rapports de baccalauréat (activités malheureusement abolies dans le nouveau programme de géométrique appliquée à l’environnement), et au plan pratique au moyen de stages en milieu de travail.

12Les camps de travail permettent aux étudiantes et étudiants de 2e et 3e années de baccalauréat de mettre en application les acquis théoriques de leur programme d’études dans un projet d’équipe sur le terrain dont le sujet leur est fourni par la Direction d’un parc ou d’un lieu historique et qui est approuvé par l’Université.

13Les rapports de baccalauréat constituent des mini-projets de recherche individuels réalisés en dernière année de baccalauréat. Les sujets sont établis de la même façon que les projets dans le cadre des camps de travail. L’Université assure l’encadrement académique et scientifique des étudiants alors que le Parc ou le Lieu historique fournit la majeure partie des informations de base nécessaires et assure l’encadrement logistique. Chaque projet fait l’objet d’un rapport qui est déposé tant au Parc ou au Lieu historique en cause qu’à l’Université. Les rapports des camps de travail, qui portent principalement sur des inventaires et sur le suivi des milieux et des infrastructures, servent à la gestion des ressources. Les rapports de baccalauréat constituent surtout une banque d’informations ou l’amorce de méthodologies pour les projets futurs.

14Une formation pratique est possible par des stages rémunérés s’inscrivant dans le programme d’étude. Les stages en régime coopératif, c’est-à-dire en milieu de travail, répondent à des besoins spécifiques de l’employeur. Généralement ces stages servent à des tâches d’inventaire et d’analyse de données ainsi qu’à la mise en place ou à l’exploitation de systèmes d’information géographique. L’encadrement est assuré par le Parc ou le Lieu historique conjointement avec l’Université.

Formation aux études supérieures

15La formation aux études supérieures se fait au niveau de la maîtrise, tant par la rédaction de mémoires que par des stages en milieu professionnel, et au niveau du doctorat par la rédaction de thèses.

16Les sujets de mémoires ou de thèses sont choisis en fonction des besoins du Parc ou du Lieu historique pour répondre à une problématique reliée à la planification stratégique en regard des plans de gestion des ressources, des plans de conservation des écosystèmes et à l’énoncé d’intégrité écologique ou d’intégrité commémorative. Le même type d’encadrement précédemment mentionné prévaut pour ces projets, mais le Parc ou le Lieu historique assure plus de services. Les résultats de ces projets font l’objet d’une diffusion à travers tout le réseau de Parcs Canada. Certains professionnels de Parcs Canada sont évaluateurs externes et même codirecteurs de mémoires.

17Tout comme c’est le cas au niveau du baccalauréat, une formation pratique au niveau de la maîtrise est possible par l’entremise de stages rémunérés en milieu professionnel et fait partie intégrante du programme d’étude. Les stages s’inscrivent dans le cadre du sujet de recherche de l’étudiant et servent généralement à la cueillette de l’information sur le terrain et à une confrontation de la problématique de recherche avec la personne qui encadre le stagiaire dans le parc ou le lieu historique.

Rôle-conseil

18L’équipe d’enseignants impliquée dans l’entente de recherche est en mesure de jouer un rôle-conseil auprès du Parc ou du Lieu historique compte tenu de sa connaissance des milieux et des problématiques spécifiques à chacun d’eux. Ce rôle se traduit par des activités contractuelles, du bénévolat individuel et la participation à un comité consultatif scientifique d’un parc.

19La réalisation de contrats répond à des besoins généraux de formation et de gestion, mais  également à des besoins ponctuels à court terme. Le bénévolat individuel se fait lorsqu’une personne s’investit de façon soutenue et sans rémunération auprès d’un Parc ou d’un Lieu historique comme aide professionnelle ou à titre d’expert. Enfin, certains parcs, comme le Parc national Kouchibouguac et le Parc national de la Pointe-Pelée, ont mis en place un comité consultatif formé de scientifiques universitaires et de gestionnaires pour conseiller la Direction.

Bilan de la collaboration

20L’Université de Sherbrooke est intervenue dans 13 parcs et 3 lieux historiques ainsi qu’au bureau national de Parcs Canada à Gatineau et au bureau régional du Québec, soit dans huit provinces et deux territoires (tableau 1, figure 1).

Figure 1. Régions naturelles de Parcs Canada et lieux d’intervention de l’Université de Sherbrooke

Figure 1. Régions naturelles de Parcs Canada et lieux d’intervention de l’Université de Sherbrooke

21L’Université de Sherbrooke est intervenue dans 11 des 39 régions naturelles canadiennes délimitées par Parcs Canada (Patrimoine canadien, 2005). D’ouest en est, ce sont les régions de la Chaîne Columbia (Parc des Glaciers), de la Chaîne côtière du Nord (Réserve de parc Kluane), des Plaines et plateaux boréaux du Sud (Parc Elk Island), des Prairies (Parc des Prairies), de Davis du Nord (Réserve de parc Auiguittuq), de la Région précambrienne du Saint-Laurent et des Grands Lacs (Parc des Îles-du-Saint-Laurent, Parc de la Mauricie, Parc marin du Saguenay—Saint-Laurent), des Basses-terres du Saint-Laurent (Réserve de parc de l’Archipel-de-Mingan), des Monts Notre-Dame et Mégantic (Parc de Forillon), des Hautes-terres acadiennes des Maritimes (Lieu historique de Fort-Beauséjour), de la Plaine maritime (Parcs Kouchibouguac et de l’Île-du-Prince-Édouard, Lieux historiques de l’Île-Beaubears et de Fort-Gaspereaux) et du Bas plateau de la côte atlantique (Parc Kejimkujik).

22Les résultats de la collaboration se traduisent principalement par 147 rapports de camp de travail impliquant 398 étudiants, 13 rapports de baccalauréat, 31 mémoires de maîtrise et 2 thèses de doctorat. Les résultats de certains de ces travaux sont publiés sous forme de 18 articles scientifiques et de 21 bulletins de recherche (versions en français et en anglais) dans la Collection Parcs Canada du Bulletin de recherche du Département de géographie et télédétection de l’Université de Sherbrooke ; ils ont aussi fait l’objet de 54 communications à des événements scientifiques et de 43 autres rapports scientifiques et techniques. On a également rédigé de nombreux rapports techniques pour les parcs, dont des rapports annuels détaillés des projets entrepris et des projets prévus.

23Au plan des stages, depuis l’implantation du programme en 1996, on dénombre 12 stages en milieu professionnel au niveau de la maîtrise. Au baccalauréat, depuis l’implantation du programme en 1988, il y a eu 52 stages en régime coopératif. Des 29 stages mentionnés au bureau régional du Québec, 16 ont eu lieu dans des parcs et 13 pour la mise en place et l’exploitation d’un système d’information géographique.

24Enfin, plus d’une dizaine d’étudiants se sont trouvés des emplois temporaires ou permanents dans les parcs nationaux canadiens ou dans des parcs provinciaux. Deux étudiants à la maîtrise ont même fondé leur propre entreprise à partir de l’expérience dans les parcs.

Tableau 1. Résultats de l’intervention de l’Université de Sherbrooke (1979-2006)

Tableau 1. Résultats de l’intervention de l’Université de Sherbrooke (1979-2006)

25Les résultats quantitatifs présentés résultent d’une grande diversité de thématiques abordées par les étudiants (tableau 2).

26Au niveau du baccalauréat, la thématique principale porte sur l’initiation aux techniques et méthodes d’inventaire à des fins de caractérisation du milieu. Les trois autres thématiques les plus fréquemment abordées sont l’identification de sites potentiels d’aménagement incluant des propositions d’aménagement, les études d’impacts environnementaux et le suivi environnemental. Ces dernières thématiques nécessitent un niveau de connaissances et d’analyse plus poussé. Quelques-unes se sont d’ailleurs poursuivies dans le cadre de rapports de baccalauréat.

27Au niveau des études supérieures, c’est la planification stratégique et les études de la dynamique du milieu qui sont les plus fréquentes. Ces recherches requièrent un niveau élevé de synthèse. Plusieurs recherches portent aussi sur le développement de méthodes d’inventaire surtout en relation avec le grand écosystème ou les écosystèmes extérieurs aux parcs. Également, la gestion des données et les systèmes d’information géographique, préoccupation récente pour les gestionnaires des parcs, prennent de plus en plus d’intérêt, même dans les lieux historiques.

Tableau 2. Thématiques abordées par les étudiants

Tableau 2. Thématiques abordées par les étudiants

28Les résultats de l’entente de recherche illustrés précédemment (tableau 1) ont nécessité un nombre impressionnant d’heures de bénévolat de la part des étudiants et des personnes ressources de l’Université de Sherbrooke (tableaux 3 et 4).

29À travers les rapports de camp de travail, les rapports de baccalauréat, les mémoires de maîtrise et les thèses de doctorat, les étudiants ont fourni plus de 18 000 jours de travail (tableau 3). De leur côté, les personnes ressources ont consacré au-delà de 3 000 jours à l’encadrement des étudiants et aux activités afférentes à l’entente (réunions, colloques, rapports techniques, articles, bulletins de recherche, etc.) (tableau 4). Dans leur bilan de 2003, Dubois et Provencher évaluaient cet effort à environ 9 % de l’effort canadien en se basant sur les données de Robertson (2002). Si on considère cet apport sur la base de rémunération considérée par Ross (1994), soit une moyenne d’environ 127 $ par jour, majorée de 2 % par année (157,56 $), cette contribution de l’Université de Sherbrooke vaudrait environ 3 370 000 $ et ce serait beaucoup plus avec un taux actualisé.

Tableau 3. Effort de travail fourni par les étudiants de l’Université de Sherbrooke (1986-2005)

Tableau 3. Effort de travail fourni par les étudiants de l’Université de Sherbrooke (1986-2005)

Tableau 4. Effort de travail fourni par les personnes ressources de l’Université de Sherbrooke (1986-2005)

Tableau 4. Effort de travail fourni par les personnes ressources de l’Université de Sherbrooke (1986-2005)

30Le financement annuel moyen fourni à l’Université par Parcs Canada s’établit à environ 21 700 $ (tableau 5). Il varie d’année en année en fonction des besoins ou des disponibilités financières de Parcs Canada. Aussi, ce montant n’inclut pas diverses dépenses de logistique et de fournitures assurées directement par les parcs et lieux historiques où s’effectue le travail. Ces dernières sont difficilement chiffrables, mais peuvent représenter plusieurs milliers de dollars annuellement pour chaque parc ou lieu historique. Si ce financement est intéressant pour l’Université, ses conséquences le sont d’autant plus pour Parcs Canada puisque, pour chaque dollar investi, les retombées du bénévolat sont de l’ordre d’au moins six dollars.

Tableau 5. Financement en argent de Parcs Canada (1986-2006)

Tableau 5. Financement en argent de Parcs Canada (1986-2006)

31N.B. : Contributions en temps et en matériel de la part des parcs non comprises.

Exemple de collaboration : Parc national du Canada Kouchibouguac

32La collaboration la plus soutenue de l’entente a été faite avec le Parc national du Canada Kouchibouguac puisqu’elle s’est maintenue chaque année depuis 1989. L’origine de cette collaboration vient de relations interpersonnelles entre un gestionnaire du Parc et les membres de l’équipe de l’Université. Cette collaboration a commencé par des camps de travail pour ensuite s’étendre à des études plus poussées, allant jusqu’au doctorat pour les étudiants et au rôle-conseil pour les enseignants ainsi qu’à l’embauche d’étudiants après leurs études.

33La collaboration répondait et répond toujours à des besoins non comblés par le personnel du Parc et par les institutions régionales d’enseignement.

34Les besoins du Parc sont :

  • une meilleure connaissance du milieu du Parc et de ses environs ;

  • l’évaluation de propositions d’aménagement ;

  • l’établissement de priorités de gestion des ressources ;

  • l’évaluation de l’impact de l’augmentation de la clientèle ;

  • l’information scientifique nécessaire pour pouvoir établir les plans quinquennaux de gestion et de conservation ;

  • l’information scientifique nécessaire pour identifier les indicateurs de suivi du milieu ;

  • la mise au point de protocoles de suivi ;

  • le développement d’un programme de surveillance pour le maintien de l’intégrité écologique ;

  • le développement d’un système d’information géographique.

35La contribution de l’Université de Sherbrooke peut être évaluée en fonction de la réponse aux besoins exprimés à travers les priorités de gestion du Parc puis du programme de surveillance de l’intégrité écologique.

36Lors de la première synthèse de la collaboration avec le Parc national du Canada Kouchibouguac (Dubois et al., 1995), il était évident que les sujets de recherche des étudiants découlaient principalement des priorités de gestion retenues par le Plan de gestion du Parc (Service canadien des parcs, 1992), c’est-à-dire en relation avec la gestion des écosystèmes ou la conservation des ressources culturelles (tableau 6). En effet, les étudiants avaient effectué des recherches sur 15 des 20 thèmes constituant les priorités de gestion du Parc. Il faut cependant mentionner que les thèmes qui n’ont pas été abordés relèvent spécifiquement de la biologie animale.

Tableau 6. Contribution de l’Université de Sherbrooke dans les priorités de gestion du Parc national du Canada Kouchibouguac (1995-2000)

Tableau 6. Contribution de l’Université de Sherbrooke dans les priorités de gestion du Parc national du Canada Kouchibouguac (1995-2000)

Légende : R = rapport de camp de travail, C = stage coopératif, M = mémoire de maîtrise

37En revanche, certaines études ne portaient pas sur les priorités de gestion. Ainsi, on avait étudié des activités ou des infrastructures de récréation pour fins d’aménagement et pour évaluation des impacts : pistes cyclables, pistes de ski de randonnée, campings ou agrandissements de campings classiques, sites de camping primitifs, aires de baignade, aires de pique-nique, etc. On avait aussi évalué divers autres impacts sur l’environnement, dont la sédimentation au voisinage de passerelles flottantes, la teneur en cadmium des sols, les effets du piétinement sur les dunes, etc.

38Enfin, quelques recherches avaient été faites pour des raisons d’ordre scientifique ou académique, soit la répartition des algues et des sédiments dans les lagunes, l’origine des sédiments lagunaires déterminée par les isotopes du carbone, la classification des berges des cours d’eau et des rives des lagunes, la cartographie géomorphologique, l’évolution du littoral, etc. Mais ces recherches s’avèrent maintenant utiles dans les nouvelles perspectives de gestion du Parc.

39L’écologiste en chef affirmait que la plupart des études servent à des prises de décision de la part des gestionnaires du Parc. De plus, des études se sont prolongées sous forme de suivis environnementaux. Enfin, des études, amorcées lors de camps de travail, se sont prolongées sous forme de mémoires de maîtrise et même d’une thèse de doctorat.

40Il était donc évident que chacun des partenaires de l’entente en tirait un avantage. On mentionnait alors que cette expérience soutenue de collaboration entre une université et un parc était enrichissante de part et d’autre tant aux plans théorique et pratique qu’aux plans économique et social. Elle méritait donc qu’on la prolonge en y consentant le temps et les ressources nécessaires.

41On soulignait aussi quelques aspects que l’on avait tendance à négliger au niveau universitaire, comme la découverte d’un milieu différent, le travail en équipe, le fonctionnement d’un parc national, la collaboration interuniversitaire entre les étudiants qui se manifeste par la discussion des sujets de recherche et l’entraide sur le terrain.

42Avec l’application du nouveau plan devant permettre d’atteindre les objectifs de conservation de l’intégrité écologique du Parc, on s’aperçoit que la plupart des travaux qui ont été faits par l’Université de Sherbrooke s’inscrivent dans 15 des 26 indicateurs de surveillance sélectionnés par le Parc (Poulin and Tremblay, 2004) (tableau 7). Ici aussi, les seuls thèmes qui n’ont pas été abordés portent spécifiquement sur des espèces fauniques, relevant des biologistes, mais en revanche plusieurs travaux ont été faits sur leur habitat.

Tableau 7. Contribution de l’Université de Sherbrooke au programme préliminaire de surveillance pour le maintien de l’intégrité écologique du Parc national du Canada Kouchibouguac (2000-2015)

Tableau 7. Contribution de l’Université de Sherbrooke au programme préliminaire de surveillance pour le maintien de l’intégrité écologique du Parc national du Canada Kouchibouguac (2000-2015)

Légende : R = rapport de camp de travail, B = rapport de baccalauréat, C = stage coopératif, S = stage à la maîtrise, M = mémoire de maîtrise, D = thèse de doctorat

43Plusieurs études entreprises depuis la première synthèse de Dubois et al. de 1995 ne sont pas en lien direct avec le nouveau programme de surveillance pour le maintien de l’intégrité écologique. Ces études ont surtout porté sur :

  • les caractéristiques géomorphologiques ;

  • le suivi de la neige ;

  • des propositions d’aménagement de terrains de camping, d’aires de pique-nique et de pistes cyclables ;

  • l’état et l’impact d’infrastructures (terrains de camping, pistes de VTT, pistes cyclables, routes, trottoirs flottants, etc.) ;

  • la satisfaction de la clientèle ;

  • l’évaluation de sites potentiels de parcelles de biodiversité ;

  • l’évaluation de l’intégrité écologique et des risques environnementaux ;

  • le développement d’un système d’information géographique pour gérer et représenter les données spatiales colligées.

44Depuis 1995, on note une augmentation marquée des recherches au niveau de la maîtrise. On note aussi le début de projets portant sur la caractérisation et l’influence du grand écosystème, ici défini comme la zone d’influence et de coopération (Ruel et al., 1999). De plus, outre les études sur la connaissance du milieu et les propositions d’aménagement, la plupart des autres études portent sur des suivis en lien avec la pression exercée par une clientèle de plus en plus nombreuse.

45Dans le cas des enseignants, le rôle-conseil s’est effectué de deux façons : la participation à un comité consultatif scientifique et des avis ponctuels sur des problèmes spécifiques.

46La mise sur pied, en 1993, d’un comité consultatif scientifique au Parc constitue une première au Canada. Le comité de ce projet-pilote, en fonction depuis 1994, est composé à part égale de géographes de l’Université de Sherbrooke et de biologistes de l’Université de Moncton, en plus de gestionnaires de Parcs Canada.

47Ce projet de comité découle de la politique de gestion des parcs (Patrimoine canadien, 1994), par laquelle Parcs Canada veut faire participer davantage le public, dont les milieux universitaires, à la préservation des aires protégées des patrimoines naturel ou culturel. Les milieux universitaires sont particulièrement concernés par la volonté de mieux développer les stratégies nationales de recherche dans les parcs et aussi de mieux gérer les ressources des parcs.

48L’objectif principal du Comité est de fournir au Directeur du parc, à sa demande, un avis sur les activités ou les études scientifiques qui se déroulent dans son parc ainsi que sur les plans de gestion du Parc, de conservation des écosystèmes, de gestion des ressources ainsi que de services. Le Comité peut aussi donner son avis sur le contenu scientifique des méthodes prévues lors de l’émission d’instructions de travail ou de devis de performance en relation avec des appels d’offres ou des propositions spontanées. Il peut également proposer des programmes ou des études dans des domaines d’intérêt commun au Parc et aux universités impliquées. Il peut enfin participer aux audiences publiques afin de présenter son avis sur des sujets de sa compétence.

49En plus des rencontres du Comité, les membres sont appelés à donner leur avis ou à fournir leur expertise sur divers problèmes de gestion, incluant la rédaction de rapports techniques et stratégiques. Par exemple, l’énoncé d’intégrité écologique 2000-2015 (Poulin and Tremblay, 2004) a été rédigé par un membre de l’équipe de l’Université de Sherbrooke en collaboration avec le Parc. Il est intéressant de noter que plus d’une dizaine de travaux des étudiants, tant au baccalauréat qu’à la maîtrise, ont été utilisés à cette fin.

Conclusion

50Avec un certain recul, quand on examine l’ensemble de la démarche vécue, on peut affirmer que le succès d’une telle entente de collaboration repose sur trois facteurs : le respect mutuel des objectifs de chacune des parties, l’intérêt des personnes impliquées, l’interaction entre ces personnes et l’engagement des étudiants.

51C’est une formule gagnante tant pour les étudiants qui peuvent acquérir de l’expérience à partir de cas concrets, que pour les enseignants qui peuvent développer une expertise sur la conservation du milieu, que pour les parcs qui peuvent gérer leurs ressources de façon plus éclairée.

52La formule est donc à privilégier pour les universités offrant des programmes appliqués de formation et pour les parcs, les lieux historiques ou toutes les autres aires protégées préoccupés par la conservation et la mise en valeur durable du milieu.

53Dans le cas des parcs, afin de pouvoir acquérir les connaissances nécessaires pour assurer le maintien de l’intégrité écologique des parcs, la Commission sur l’intégrité écologique des parcs nationaux du Canada (Agence Parcs Canada, 2000) recommande la formation de partenariats avec différents intervenants régionaux, dont les universités. Un projet, basé sur le modèle américain des Cooperative Ecosystem Studies Units Network (2005), est présentement à l’étude par Parcs Canada. Ce genre de partenariat régional est basé sur un regroupement d’universités, d’organismes gouvernementaux et d’organismes sans but lucratif pour assister les parcs dans la connaissance du milieu et la gestion des écosystèmes. Le pays est divisé en régions et, lors d’un appel à collaboration, une université régionale est choisie comme maître d’œuvre du groupe ainsi formé.

Remerciements

54Nous remercions les personnes qui nous ont aidé dans les parcs et lieux historiques dans lesquels nous avons travaillé ainsi que celles du bureau national à Gatineau (André Savoie et Jean Poitevin).

Top of page

Bibliography

Agence Parcs Canada, ,2000, Intacts pour les générations futures ? Protection de l’intégrité écologique par les parcs nationaux du Canada. Vol. 1 : Le temps d’agir. Rapport de la Commission sur l’intégrité écologique des parcs nationaux du Canada, Ottawa, 22 p.

Cooperative Ecosystem Studies Units Network, 2005, [En ligne]: http://www.cesu.org/, consulté en décembre 2008

Dubois, J.-M.M., A. Poulin et L. Provencher, 1995, Évaluation d'un modèle de coopération entre Parcs Canada et le milieu universitaire dans les parcs nationaux canadiens : cas de l'Université de Sherbrooke. Téoros, vol. 14, no 1, p. 46-49.

Dubois, J.-M.M. et L. Provencher, 2003, Résultats de plus de 20 ans de collaboration entre Parcs Canada et l’Université de Sherbrooke dans les parcs et lieux historiques nationaux canadiens. Département de géographie et télédétection, Université de Sherbrooke, Sherbrooke, 64 p.

Dubois, J.-M.M. et L. Provencher, 2006, Entente de recherche entre Parcs Canada et l’Université de Sherbrooke (1980-2006) : I - Publications. Département de géomatique appliquée, Université de Sherbrooke, Bulletin de recherche  no 178, 36 p. [En ligne] : http://www.usherbrooke.ca/geotel/publications/bulletin_178.pdf, Consulté décembre 2008.

Dubois, J.-M.M. et L. Provencher, 2006, Entente de recherche entre Parcs Canada et l’Université de Sherbrooke (1980-2006) : II – Bilan de la collaboration. Département de géomatique appliquée, Université de Sherbrooke, Bulletin de recherche no 179, 27 p. [En ligne] : http://www.usherbrooke.ca/geotel/publications/bulletin_179.pdf, Consulté décembre 2008.

Environnement Canada, 1990, L’état des parcs : rapport 1990. Service des parcs, Ottawa, 88 p.

Gouvernement du Canada (2001) Loi sur les parcs nationaux du Canada, chap. 32, art.42. Gazette du Canada, partie III, vol. 23 no 4, p. 27.

Kalff, S.A., 1995, A proposed framework to assess cumulative effects in Canadian National Parks. Parks Canada Technical Report in Ecosystem Science no 1, Halifax, 140 p.

Parcs Canada, 2001, Rapport d’étape sur la mise en œuvre des recommandations de la Commission sur l’intégrité écologique des parcs nationaux du Canada. Ottawa, 75 p.

Patrimoine canadien (s.d.) Plan de réseau des parcs nationaux. Parcs Canada, Hull, non paginé.

Patrimoine canadien, 1994, Principes directeurs et politiques de gestion de Parcs Canada. Approvisionnements et services Canada, Ottawa, 127 p.

Patrimoine canadien, 2005, Plan de réseau des parcs nationaux. Parcs Canada, Ottawa, [En ligne] : http://www.pc.gc.ca/docs/v-g/nation/nation1_f.asp, Consulté décembre 2008.

Poulin, A. and É. Tremblay, 2004, Ecological integrity statement for Kouchibouguac National Park : An anticipation scenario for 2015. Kouchibouguac National Park of Canada, Kouchibouguac, 46 p.

Provencher, L. et J.-M.M. Dubois, 2004, La collaboration universitaire dans les parcs nationaux canadiens : 1 – La formation et la recherche à l’Université de Sherbrooke. Session spéciale « Les parcs nationaux canadiens : évolution des milieux et intégration dans le milieu régional », Congrès annuel 2004 de l’Association canadienne des géographes, Université de Moncton, 25-29 mai 2004, in Dubois, J.-M.M. et Provencher, L. (réd.) Les parcs nationaux canadiens : évolution des milieux et intégration dans le milieu régional – Programme et résumés, Parcs Canada et Université de Sherbrooke, p. 12 (texte de 13 p.).

Provencher, L., J.-M.M. Dubois, É. Tremblay et A. Poulin, 2004, La collaboration universitaire dans les parcs nationaux canadiens : 2 – Le cas du Parc national du Canada Kouchibouguac, Nouveau-Brunswick. Session spéciale « Les parcs nationaux canadiens : évolution des milieux et intégration dans le milieu régional », Congrès annuel 2004 de l’Association canadienne des géographes, Université de Moncton, 25-29 mai 2004, in Dubois, J.-M.M. et Provencher, L. (réd.) Les parcs nationaux canadiens : évolution des milieux et intégration dans le milieu régional – Programme et résumés, Parcs Canada et Université de Sherbrooke, p. 14 (texte de 9 p.).

Robertson, A., 2002, Communication écrite. Parcs Canada, Programme national de bénévolat, Hull, 2 p.

Ross, D., 1994, Comment déterminer la valeur économique du travail bénévole. Ministère du Patrimoine canadien, Ottawa, 8 p.

Ruel, M., A. Poulin, É. Tremblay et L. Provencher, 1999, Une approche de gestion des risques environnementaux : le cas de la zone d’influence et de coopération du Parc national Kouchibouguac, Nouveau-Brunswick. Département de géographie et télédétection, Université de Sherbrooke, Sherbrooke, Bulletin de recherche no 145-146, 114 p.

Service canadien des parcs, 1987, Manuel technique du programme de bénévolat du Service des parcs. Environnement Canada, Ottawa, 94 p.

Service canadien des parcs, 1992, Cadre stratégique de référence pour le maintien de l’intégrité des écosystèmes. Environnement Canada, Ottawa, 18 p. et annexes.

Top of page

List of illustrations

Title Figure 1. Régions naturelles de Parcs Canada et lieux d’intervention de l’Université de Sherbrooke
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/8041/img-1.png
File image/png, 62k
Title Tableau 1. Résultats de l’intervention de l’Université de Sherbrooke (1979-2006)
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/8041/img-2.png
File image/png, 40k
Title Tableau 2. Thématiques abordées par les étudiants
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/8041/img-3.png
File image/png, 15k
Title Tableau 3. Effort de travail fourni par les étudiants de l’Université de Sherbrooke (1986-2005)
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/8041/img-4.png
File image/png, 11k
Title Tableau 4. Effort de travail fourni par les personnes ressources de l’Université de Sherbrooke (1986-2005)
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/8041/img-5.png
File image/png, 12k
Title Tableau 5. Financement en argent de Parcs Canada (1986-2006)
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/8041/img-6.png
File image/png, 18k
Title Tableau 6. Contribution de l’Université de Sherbrooke dans les priorités de gestion du Parc national du Canada Kouchibouguac (1995-2000)
Caption Légende : R = rapport de camp de travail, C = stage coopératif, M = mémoire de maîtrise
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/8041/img-7.png
File image/png, 24k
Title Tableau 7. Contribution de l’Université de Sherbrooke au programme préliminaire de surveillance pour le maintien de l’intégrité écologique du Parc national du Canada Kouchibouguac (2000-2015)
Caption Légende : R = rapport de camp de travail, B = rapport de baccalauréat, C = stage coopératif, S = stage à la maîtrise, M = mémoire de maîtrise, D = thèse de doctorat
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/8041/img-8.png
File image/png, 28k
Top of page

References

Electronic reference

Léo Provencher and Jean-Marie M. Dubois, « Une expérience universitaire dans les parcs et lieux historiques nationaux canadiens : contribution à une meilleure gestion du milieu Â», VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [Online], Regards / Terrain, Online since 27 February 2009, connection on 22 May 2013. URL : http://vertigo.revues.org/8041 ; DOI : 10.4000/vertigo.8041

Top of page

About the authors

Léo Provencher

Département de géomatique appliquée, Université de Sherbrooke, Sherbrooke, Québec J1K 2R1 ; téléphone : 819-821-7181 ou 819-821-8000, poste 62192 leo.provencher@USherbrooke.ca

Jean-Marie M. Dubois

Département de géomatique appliquée, Université de Sherbrooke, Sherbrooke, Québec J1K 2R1 ; téléphone : 819-821-7181 ou 819-821-8000, poste 62192 jean-marie.dubois@USherbrooke.ca

Top of page

Copyright

© Tous droits réservés

Top of page