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Gestion communautaire ou préservation des ressources renouvelables : Histoire inachevée d'une évolution majeure de la politique environnementale à Madagascar

Alain Bertrand, Nadia Rabesahala Horning and Pierre Montagne

Abstract

A Madagascar, la gestion locale des ressources renouvelables plonge ses racines au plus profond de l'histoire. La politique coloniale exclusive de gestion répressive administrative de ces ressources est un intermède séculaire clos par la loi 96-025 instituant la gestion locale des ressources renouvelables. Une continuité existe entre la gestion locale au temps de la royauté et celle instituée à la suite de l'atelier international d'Antsirabe en mai 1995. La référence commune aux valeurs coutumières de la société malgache favorise le développement du transfert de gestion et concrétise la réappropriation par les communautés de la légitimité de leur gestion des ressources.

La Loi 96-025 résulte de travaux convergents combinés avec une demande sociale vigoureuse des communautés qui ont trouvé l'occasion de s'exprimer lors de l'atelier international d'Antsirabe. Ses concepteurs pensaient qu’il existe des capacités locales de gestion durable des ressources renouvelables sur la majorité du territoire de Madagascar. Elle fut conçue comme une loi cadre d'application souple à l'ensemble des ressources renouvelables, des forêts aux ressources marines, sur tout le territoire de Madagascar avec la mise en œuvre d'une politique nationale sur plusieurs décennies.

Le transfert de gestion s’est heurté à une obstruction efficace de certaines ONG de conservation de l’environnement concurrentes des populations rurales pour l’accès aux ressources de ce hot spot mondial de la biodiversité. Le développement des transferts de gestion a été obscurci, retardé, parfois dévoyé, mais néanmoins se poursuit de façon inexorable jusqu’à présent.

L’inefficacité de la préservation par des aires protégées est révélée de façon particulièrement impitoyable lors des crises politiques où l’autorité de l’Etat chancelle. L’alternative de transferts de gestion de conservation tentée par les ONG de conservation ne supprime pas les exploitations illicites. Le recours aux paiements pour services environnementaux ne résout pas ce problème. La pérennité de ces paiements reste encore aléatoire et chaque interruption se traduit par des dégradations volontaires de la biodiversité.

La création de nouvelles aires protégées issues du congrès de Durban pose encore la question de la place accordée aux populations locales et celle d’une encore improbable synthèse entre gestion communautaire, gestion durable, lutte contre la pauvreté et conservation de la biodiversité.

Madagascar ne pourra pas indéfiniment repousser un choix politique clair entre préservation et gestion communautaire durable, entre préservation et développement local durable. Une part trop importante de sa population rurale vit en situation d’extrême pauvreté et dépend directement pour sa survie des ressources renouvelables de sa biodiversité. Retarder ce choix c’est assurer de nouvelles dégradations plus ou moins irréversibles d’un patrimoine naturel inestimable.

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1A Madagascar, la gestion locale des ressources renouvelables plonge ses racines au plus profond de l'histoire. La politique coloniale répressive et exclusive de gestion autoritaire de ces ressources par l'administration au bénéfice exclusif de l'Etat apparaît donc comme un intermède, certes séculaire, mais finalement temporaire depuis la loi 96-025 instituant la gestion locale des ressources renouvelables. Mais la gestion communautaire locale par le transfert de gestion s’est heurtée, malgré une forte demande sociale à une obstruction efficace de certaines ONG de conservation de l’environnement en concurrence avec les populations rurales pour l’accès aux ressources de ce hot spot mondial de la biodiversité. Le processus de développement de la mise en place des transferts de gestion a été obscurci, retardé, parfois dévoyé, mais néanmoins il se développe de façon semble-t-il inexorable jusqu’à présent. La création de nouvelles aires protégées issues du congrès de Durban pose de façon renouvelée la question de la place accordée aux populations locales et celle d’une encore improbable synthèse entre gestion communautaire, gestion durable, lutte contre la pauvreté et conservation de la biodiversité.

2Madagascar ne pourra pas indéfiniment repousser un choix politique clair entre préservation et gestion communautaire durable, entre préservation et développement local durable. Une part trop importante de sa population rurale vit en situation d’extrême pauvreté et dépend directement pour sa survie des ressources renouvelables de sa biodiversité. Retarder ce choix c’est assurer de nouvelles dégradations plus ou moins irréversibles d’un patrimoine naturel inestimable.

Contradictions, clichés et paradigmes malgaches

3Madagascar porte au niveau mondial une image publique contrastée caractérisée par une nature exotique et une biodiversité exceptionnelle avec un taux d’endémisme parmi les plus élevés au Monde. Mais aussi, une déforestation très forte et une dégradation très rapide et catastrophique de cet environnement si riche et varié. Avec, en outre, un embrasement annuel de la majeure partie des espaces naturels causant directement ou indirectement la perte de superficies considérables de forêts et des paysages désolés de landes dénudées sur une large proportion du territoire, une érosion inquiétante conséquence de pratiques agraires ou pastorales non appropriées et dégradantes. Ajoutons, une démographie « galopante » induisant des dynamiques de défrichement et donc entretenant la déforestation et renforçant la dégradation de l’environnement et l’érosion des sols et pour finir une pauvreté rurale inquiétante.

  • 1  Tanety : collines.

4Comme tous les lieux communs, ces clichés comportent une part de vérité et une autre large part de vision déformée voire erronée de la réalité qu’il convient de corriger par une évaluation plus sérieuse. L’évaluation d’une déforestation (qui est une réalité dans certaines zones) à un rythme annuel supérieur à 200 000 voire même à 250 000 ha par an, communément admise à Madagascar depuis un siècle apparaît manifestement fausse et exagérée. La Grande Ile n’a pas perdu plus de 20 millions d’hectares de forêts en un siècle (Bertrand et al., 2004). Avec un taux de couverture boisée de 22,6 % (JRC, 1999), Madagascar n’apparaît pas comme un pays exceptionnellement déboisé (le débat scientifique, lancé il y a déjà un siècle, sur l’origine anthropique ou naturelle ou climatique des très vastes savanes de l’Ouest et du Centre-Ouest n’est toujours pas tranché de façon irréfutable). Contrairement à ce qu’a affirmé, un peu trop rapidement la Banque Mondiale, Madagascar n’est pas « champion du monde de l’érosion ». Les rivières malgaches comme la Betsiboka ne présentent pas des taux de transport de sédiments exceptionnels, par rapport à la superficie de leur bassin versant, en comparaison avec ceux des fleuves d’autres régions du monde (Kull, 2000) Les feux de végétation ne sont pas le résultat de l’activité des « pyromanes malgaches », mais le feu est un outil local efficace de gestion des ressources naturelles par les communautés rurales de base. Les pratiques locales d’usages des feux sont multiples et les effets des feux sont variés voire opposés d’un lieu à un autre (Bertrand, 1998 ; Rajaonson al., 1995 ; Bertrand et Ratsimbarison, 2004). La densité moyenne de population de Madagascar est de l’ordre d’une quinzaine d’habitants par km2. Les zones les plus densément peuplées ont des densités de l’ordre de 100 à 150 habitants par km2, bien loin des densités des zones les plus denses de la planète (>1000 habitants par km2 à Java par exemple). Certes le taux de croissance annuel moyen de la population est élevé de l’ordre de 3,6 %, mais alors que la terre est un facteur de production globalement surabondant, le capital et la force de travail sont les deux facteurs de production rares de la production agricole. La multiplication des bras pour cultiver apparaît comme un facteur essentiel de sécurité alimentaire. Des possibilités limitées d’extension de la riziculture irriguée ne conduisent pas à une forte intensification de cette culture, les cultures se développant de plus en plus sur les tanety1 par extensification.

La dégradation de l’environnement à Madagascar

5Le rapport de 1995 sur l’environnement à Madagascar indique que « selon les estimations basées sur les anciennes photographies aériennes de 1950, les forêts et les bois couvraient de 14 à 16 millions d’hectares représentant 24 à 28 % du territoire national (…) La couverture forestière est actuellement estimée à 12 millions d’hectares et la forêt naturelle n’occuperait aujourd’hui que 9 à 10 millions d’hectares soit 16 à 17 % de l’île » ONE et al., 1995). Il est cependant difficile de quantifier sérieusement et avec précision la diminution des espaces de forêt à Madagascar (Aubert et Razafiarison, 2003). Les méthodes et en particulier la définition des unités cartographiques et les unités de mesure sont rarement précisées et les chiffres divergent considérablement d’une source à l’autre (Guichon, 1960).

Figure 1. Evolution des surfaces boisées à Madagascar, de 1895 à 1988

Figure 1. Evolution des surfaces boisées à Madagascar, de 1895 à 1988

Source : d’après Pierre, 1993

6C’est aussi le constat plus détaillé encore de M. Petit qui analyse une grande quantité de sources anciennes (Petit, en cours d’édition).

7Au début du XXème siècle, sous la colonisation française, Alfred Grandidier (Grandidier, 1928), marcheur infatigable, à la suite d’une grande randonnée pédestre dans l’est et le nord de Madagascar estimait que 200 000 hectares de la Grande Ile étaient déboisés chaque année du fait des feux et des défrichements (Bertrand et Randrianaivo, 2003). Les discours parallèles de Perrier de la Bathie et de Humbert (Kull, 2000), allaient ensuite donner la force d’un dogme à ce qui n’était au départ qu’une estimation. Un siècle plus tard, l’incertitude demeure quant à l’impact réel des feux et des défrichements. Mais ce chiffre, est repris chaque année au début de la saison des feux (Kull, 2004) sous des formes variées (plutôt en le majorant qu’en le minorant), tant par les politiques que par des techniciens ou même des scientifiques sur fond de discours catastrophistes. Cette évaluation ne résiste pas à un examen sommaire : 200 000 hectares défrichés chaque année, cela correspond au bout d’un siècle à 20 millions d’hectares, c'est-à-dire autant, voire plus que la superficie totale qui devait être couverte par les forêts au début du XIXème siècle. Si le chiffre était exact, il ne devrait plus rester de forêts à Madagascar, ce que démentent l’observation directe et les résultats du récent inventaire écologique (environ 10 millions d’ha.) réalisé avec l’appui de la Coopération allemande et de la Banque Mondiale (IEFN, 1996). L’estimation du Joint Research Center (JRC) – Space Application Institute , Ispra, Italie évalue en 1999 la superficie des forêts malgaches à 17 303 200 ha dont 7,2 millions d’ha de forêts secondaires complexes. (Dufils ; 2008). Mais des études récentes apportent des précisions intéressantes et à nouveau contradictoires. Le taux annuel de déforestation est évalué pour la période 1990-2000 à 0,83 %. Il a baissé de 0,53 % par an pendant les années 2000-2005 (MEFT, USAID et CI, 2009). Ce rapport estime qu’il restait en 2005 9,4 millions d’hectares de forêts naturelles et que plus de 1,2 million d’hectares avaient été perdues entre 1990 et 2005 (quinze ans).

8Depuis plus d’un siècle, ces « estimations » de Grandidier sont généralement reprises dans les documents officiels (Rabevohitra Ravaoharisoa et al., 2000). Certains organismes ou auteurs reprennent chaque année ces évaluations ou d’autres encore plus catastrophistes pour justifier aux yeux des politiques et des décideurs une politique excluant davantage les populations de l’accès aux ressources forestières. D’autres (Green et Sussman, 1990) s’appuient sur des démonstrations contestables qui aboutissent à surévaluer l’ampleur de la déforestation (Bertrand et al, 2004) alimentant le système du « prêt à penser » sur la déforestation malgache.

9L’enjeu de ces clichés et de ces discours simplistes et catastrophistes est clair : légitimer l’accusation récurrente de dégradation environnementale, de pyromanie et de déforestation portée contre les populations rurales (Kull, 2002), justifier leur répression et leur exclusion des espaces naturels. Il y a cinquante ans ce discours fonctionnait au profit des forestiers (Lavauden, 1934), depuis deux décades, il est utilisé au profit des environnementalistes. A travers ces discours, c’est un conflit récurrent pour la maitrise et l’accès aux ressources de la biodiversité qu’il faut décrypter.

  • 2  Ce programme (PE1 + PE2 + PE3) aura permis aux différents bailleurs de fonds d’apporter à Madagasc (...)

10Est-ce pour laisser libre cours à ces discours catastrophistes que près de vingt ans après le lancement du Programme Environnemental malgache et au terme de la troisième phase de ce programme2 il n’existe toujours pas de système pérenne, fiable et généralisé de suivi environnemental ? Faut-il donc se résigner à croire comme un dogme que les aires protégées subissent moins de dégradations que le reste du territoire malgache ?

Les origines de la conservation à Madagascar

  • 3  Dans cet article nous désignerons comme ONG conservationistes, ou ONG de Conservation, deux des tr (...)

11Madagascar est un des pays du monde qui a parmi les plus anciennes références en matière de politique de conservation. Déjà la politique forestière coloniale était clairement fondée sur l’exclusion et la répression des populations sur la base de considérations que certaines ONG conservationistes3 pourraient reprendre à leur compte, il n’est qu’à comparer les citations de Lavauden et de Coudreau avec celle toute récente de Brandon, Redford et Sanderson :

« En matière forestière où seul le spécialiste peut distinguer nettement où cesse l'usage et où commence l'abus, cela est particulièrement inévitable. C'est même au nombre et à la violence des protestations que soulève la réglementation forestière que l'on peut le mieux juger de sa pertinence et de son efficacité. » (Lavauden, 1934).

« La méthode employée depuis l'occupation française, ... est une méthode répressive les moyens en sont : 1/ une réglementation ; 2/ l'emploi d'un personnel spécial, chargé de constater les infractions à cette réglementation, et de verbaliser à l'encontre des coupables ; 3/ l'application d'une peine, par voie de justice, aux coupables d'infractions. » (Coudreau, 1937).

“The trend to promote sustainable use of resources as means to protect these resources, while politically expedient and intellectually appealing, is not well grounded in biological and ecological knowledge. Not all places should be open to use. Without an understanding of broader ecosystem dynamics at specific sites, strategies promoting sustainable use will lead to substantial losses of biodiversity” (Brandon, Redford, Sanderson, 1998) 

12C’est dans cette trajectoire historique continue que se comprennent et se complètent les divers éléments du tableau 1.

Tableau 1. Trajectoire historique des politiques de conservation à Madagascar

Date

Politiques forestières ou de conservation à Madagascar

Avant 1900

Sous la Royauté malgache, interdiction par Andriampoinimerina de résider en forêt, d’y exploiter le bois d’œuvre et d’y fabriquer du charbon (Callet,1978)

1913

Décret réorganisant le régime forestier et interdisant les feux.

1930

Décret créant la première réserve forestière à but écologique au monde.

Entre 1930 et 1960

Plus d’un million d’hectares de forêts ont été classées

1960

Ordonnance définissant le domaine forestier national en sept catégories (forêts classées, réserves naturelles, zones de protection, parcs nationaux, réserves spéciales, périmètres de reboisement ou de restauration, stations forestières ou piscicoles, terres affectées à l’administration des Eaux et Forêts.

1970

Madagascar ratifie la Convention africaine pour la conservation de la nature et de ses ressources

1975

Madagascar ratifie la Convention de Washington (CITES)

1983

Madagascar ratifie la Convention sur la protection du patrimoine mondial (UNESCO)

1985

Madagascar ratifie la convention de Nairobi pour la gestion du milieu marin et des zones côtières

1987

Madagascar prépare un Plan National d’Action Environnementale (PNAE)

1990

Madagascar adopte la loi portant Charte de l’Environnement

1991

Lancement du PNAE et appui des bailleurs de fonds (Banque Mondiale, etc.)

1991

Création de l’ANGAP, association nationale pour la gestion des aires protégées.

1992

Mise en place du Programme Environnemental 1 (PE 1)

1992

Madagascar ratifie la Convention sur la Diversité Biologique

1997

Fin du PE1 et préparation du PE2

1998

Madagascar ratifie la convention RAMSAR relative aux zones humides.

Les années 1992 – 1997 : les aires protégées et la montée de la conservation

13La première phase du PNAE, le PE1 fut plutôt orientée vers la préservation de l’Environnement, la création d’agences d’exécution du PNAE : ONE, Office National de l’Environnement, ANGAP, et la création parfois précipitée de multiples aires protégées. L’ANGAP étant alors incapable d’assurer leur gestion déléguait celle-ci aux grandes ONG environnementales, principalement WWF ou CI.

  • 4  Le tavy et le hatsaka sont deux modes de culture sur défriche – brûlis coutumiers, respectivement (...)

14Le discours justificatif de ces créations d’aires protégées mettait en avant les dangers qui menacent les formations forestières malagasy : pêle-mêle l’exploitation forestière de bois d’œuvre ou de bois-énergie, le tavy4 de la côte est et le hatsaka de l’ouest, la croissance démographique, etc. La réponse du PE1 à Madagascar fut dans ce domaine semblable à celle apportée dans d’autres pays, comme en Amérique Latine par exemple :

« In the late 1980s and early 1990, the conservation groups began designing programs to work with communities. Donors, too – both private foundations and multi- and bilateral donors agencies – strongly supported this approach to what was then in vogue : the concept of sustainable development. It soon became a bandwagon onto which many organizations jumped. The initiatives that appeared were variously called “community-based natural resource management”, community-based conservation”, “sustainable development and use”, “grassroots conservation” “devolution of resource rights to local communities” and – perhaps more commonly “integrated conservation and development programs”(ICPDs). » (Chapin, 2004).

15A Madagascar, systématiquement, les PDCI (Programmes de développement et de conservation intégrée, ICPD en anglais) restèrent cantonnés à la périphérie immédiate des aires protégées nouvelles. Dans un contexte de grande pauvreté rurale généralisée, ils fonctionnèrent à l’inverse de l’effet escompté comme des pôles d’attraction pour les populations avides de développement se condamnant ainsi à l’échec.

16Si le Programme Environnemental I avait mis l’accent sur la conservation des forêts avec notamment la création du réseau actuel d’aires protégées, il apparaissait à la fin de cette première phase, en 1994, que plus de 10 millions d’hectares restaient en dehors de ce réseau et étaient soumis à de nombreuses pressions alors que ces massifs recelaient une part très importante des réserves de biodiversité. Il fallait aussi les gérer.

L’enracinement historique de la politique de transfert de gestion à Madagascar

  • 5  Par exemple au tour du Lac Alaotra où les structures coutumières ont de facto disparu dès le règne (...)
  • 6  Un exemple particulièrement caractéristique concerne la commune de Didy, mais on aurait pu citer b (...)
  • 7  Depuis l’époque coloniale tous les pouvoirs politiques ont voulu manipuler les structures sociales (...)

17A Madagascar, la gestion locale des ressources renouvelables plonge ses racines au plus profond de l'histoire. La politique coloniale répressive et exclusive de gestion autoritaire de ces ressources par l'administration au bénéfice exclusif de l'Etat apparaît donc comme un intermède, certes séculaire, mais finalement temporaire depuis la loi 96-025 instituant la gestion locale des ressources renouvelables. L'impact de la politique coloniale ne peut être négligé ; néanmoins, l'Etat colonial n'avait pas (déjà) les moyens d'une politique effectivement répressive partout sur le terrain. Malgré l’instauration coloniale de la domanialité publique sur les espaces naturels l’espace support des ressources renouvelables a toujours relevé de la territorialité d’un groupe, quelle qu’en soit la forme. Depuis l’époque de la Royauté, puis sous la colonisation, la gestion locale a largement perduré pendant un siècle de façon cachée et discrète perdant dans certaines zones limitées5 une large part de sa légitimité locale et de son efficacité, mais les conservant à des degrés divers dans d'autres zones, finalement de beaucoup les plus nombreuses6. Le présent texte insiste la continuité profonde qui existe, par delà les différences sociales7 et les mutations de la coutume, entre les deux périodes, entre la gestion locale depuis le temps de la royauté et celle instituée à la suite de l'atelier international d'Antsirabe en mai 1995. Cette référence commune à des valeurs coutumières remontant aux origines de la société malgache devrait favoriser le développement rapide du transfert de gestion à Madagascar concrétisant la réappropriation par les communautés locales de base de la légitimité de leur gestion locale des ressources et en particulier de la principale d'entre elles la forêt.

La gestion locale des ressources sous la royauté malgache

18Plusieurs auteurs soulignent que la royauté malgache avait fait de la forêt son domaine inaliénable mais avait, dans le même temps, laissé une grande latitude aux populations locales pour gérer directement ce domaine, les interdits étant peu nombreux.

« Bien avant nous, des sages de ce pays ont pris à coeur la conservation de la forêt. Il en était ainsi du sage roi Andrianampoinimerina (1710-1790) ... (dont) l'un des soucis était la conservation de la forêt. » (Fanony, 1988).

«  Voici la forêt dit le Roi, j'en fais le grand héritage indivis, le moyen de subsistance des orphelins, des femmes seules et de tous les malheureux ... je décide que nul ne pourra les empêcher de venir dans la forêt dont je fais le moyen de subsistance de tous les pauvres et de toutes les femmes. ... Je vous charge de veiller sur la forêt » La politique d'Andrianampoinimerina était donc fondée sur : 1/ la dissuasion par la menace ; 2/ la gestion participative ; 3/ la sensibilisation des uns et des autres, en montrant que la forêt est finalement le dernier recours des pauvres» . (Sourdat, 1998)

 «A l'exception de quelques concessions à long terme accordées suivant contrat à des européens ou à des créoles installés dans la région de la baie d'Antongil, il semble que la monarchie Hova n'ait tiré aucun revenu du vaste domaine boisé dont elle se reconnaissait l'entière propriété et qu'elle en ait abandonné la jouissance aux indigènes. (Thiry, 1903)

19Dès avant la colonisation directe et avant même le protectorat, le règne de Ranavalona II fut marqué par une inflexion plus autoritaire de la politique forestière avec le code des 305 articles de 1881 qui réaffirmait la propriété du souverain sur les forêts.

La politique coloniale de répression et d'exclusion des populations de la gestion locale des ressources

20La politique coloniale de répression et d'exclusion des populations de la gestion locale des ressources trouve son origine au début de la colonisation, dans la création du service forestier en 1896 et dès 1897 une circulaire du Gouvernorat Général interdisait les feux de pâturages et un décret réglementait l'exploitation des produits de la forêt. Les tavy furent interdits par décret dès 1900. Après 1904 commenca jusqu'en 1907 une courte période de retour à moins de répression. De 1907 à 1917, les textes renforçant l'arsenal répressif se succèdèrent et le service forestier s'étoffa jusqu'en 1930 où le décret de 1930 élaboré par Lavauden introduisit des primes de rendement aux agents forestiers sur les procès-verbaux. La politique coloniale était justifiée par le souci de préserver les forêts des destructions irrémédiables qui les menaçaient (Lavauden, 1931) mais dans le même temps les surfaces concédées en exploitation forestière de bois d'œuvre passaient entre 1897 et 1901 de 700 à 101 630 ha dont 43 % concernaient la seule forêt de Manjakandriana (Bertrand, 2004). Cette politique était clairement assumée comme répressive. Mais dès 1937, il était clair que cette politique répressive conduisait à une impasse (Coudreau, 1937).

Les propositions d'une politique forestière alternative de gestion locale : Abel Parrot, 1925

21Pourtant dès 1925, le fond du problème de la politique forestière avait été posé par deux articles courts d'Abel Parrot, missionnaire à Antsirabe. Ces deux textes restent comme l'image du carrefour vers une autre voie que l'administration forestière (qui venait avec tant de difficultés de faire reprendre le virage vers plus de répression) a délibérément négligée (Bertrand, 1998). Parrot écrivait :

« Pour qui connaît la manière évasive et elliptique de s'exprimer des malgaches, cela voulait dire : les forêts étant devenues propriété du fanjakana, nous n'avons pas à nous occuper de ce qui n'est plus à nous. ... Je pense donc que, dans certains cas, il aurait été bon de tenir compte des droits réels ou supposés des Malgaches sur les rares forêts du centre de l'île. Dans les deux cas que je viens de citer, les villageois tenaient à  »leur forêt« , ils en tiraient des ressources appréciables, ils les protégeaient contre les feux de brousse ». (Parrot, 1925a).

22Mais surtout Abel Parrot introduit dès 1925 la question nouvelle (et impensable à l'époque) de la gestion décentralisée des forêts par les collectivités locales :

 « Je voudrais en un mot que l'on introduisit à Madagascar le régime des forêts communales de France. ... que l'administration donne gratuitement et en toute propriété aux fokon'olona la plus mauvaise partie du domaine public des hauts plateaux ; la nature fera le reste. ... le paysan malgache, chez qui le sens et le sentiment de la collectivité sont très aiguisés, finira, comme le paysan français par se prendre d'amour pour sa forêt ; car hélas, l'homme est ainsi fait qu'il ne montre de soin et de sollicitude que pour les choses qui lui appartiennent. » (Parrot, 1925b).

Le programme d'action environnementale malgache et l'émergence de la politique de transfert de gestion des ressources aux communautés de base

23Il faudra, malgré l'indépendance, attendre la fin des années quatre-vingt pour que les orientations de la politique forestière répressive et exclusive soient remises en cause par les propositions du projet GPF (Gestion et protection des forêts, financé par la Banque Mondiale), et par les orientations initiales du Plan d'Action Environnemental (PAE) dont la préparation, initiée en 1986, a initié une réorientation majeure de sa politique environnementale. Ainsi, dans le cadre du projet GPF, il fut dès 1989 proposé de :

« faire de la forêt un moyen d'accumulation économique et de développement des activités forestières. ... faire de l'arbre et de la forêt des investissements rentables. ... c'est au niveau des 11 393 Fokontany que se gagnera ou se perdra la bataille de l'intégration de l'arbre dans l'économie rurale et de la gestion et de la préservation des ressources naturelles en particulier forestières. » (Bertrand, 1989).

24Dès 1989 il était donc proposé de rompre avec la politique d'exclusion et d'engager le processus de réorientation de la politique forestière et de réforme de la réglementation et de la fiscalité forestière qui devait aboutir en 1997. La loi 90-033 du 21 décembre 1990 complétée par la loi 97-012 du 6 juin 1997 portant Charte de l’Environnement indique à son dernier alinéa (aider à la résolution des problèmes fonciers) de l’article 6 «  l’objectif essentiel est de réconcilier la population avec son environnement en vue d’un développement durable  ».

Les années 1994 – 2002 : le virage vers le transfert de gestion et la valorisation des ressources renouvelables ?

25Le Programme Environnemental 2 (PE2) conçu dans la foulée de l’adhésion de Madagascar, en 1995 à la Convention sur la Diversité Biologique (UNEP-CBD, 2002), allait être préparé sur une orientation fondée sur les acquis de la conférence de Rio puis de celle de Copenhague (c'est-à-dire sur une orientation de plus en plus accentuée vers des préoccupations de décentralisation de la gestion durable des ressources naturelles dans le prolongement des approches environnementales antérieures au niveau international, d’une vision essentiellement naturaliste, à une prise en compte de l’économie et des sociétés ; d’une vision étatique et centralisatrice, vers la reconnaissance du rôle des populations et de la réhabilitation du niveau de décision local ; d’une approche « conservationiste » voire « préservationiste », vers une vision « aménagiste », plus dynamique privilégiant l’implication de tous les acteurs concernés.

  • 8  Le rapport de CI « Etude sur la politique de conservation des ressources forestières à Madagascar  (...)
  • 9  Le rapport Evaluation externe du PNAE/PE2 volet 1 Gestion Conservation et valorisation de la biodi (...)

26Cette particularité du PE2, en déphasage partiel avec les évolutions de la pensée dominante au niveau international et avec les propositions à Madagascar des grandes ONG de conservation (Conservation International, 2000)8, allait constituer une contradiction interne majeure et durable de l’administration forestière (Rabelisoa et al., 2000)9 qui expliquera ensuite avec la concurrence entre les bailleurs de fonds, les résultats mitigés du PE2 (Rabesahala et Horning, 2008).

27Le Programme environnemental 2 fixa aussi comme objectif à l’administration des Eaux et Forêts, responsable de l’AGEX ESFUM (AGence d’EXécution EcoSystèmes Forestiers à Usages Multiples) d’élaborer les schémas d’aménagement de plus de 180 000 hectares de forêts (Rabevohitra Ravoharisoa et al., 2000).

28Malgré des efforts étalés sur plus de cinq ans, aucun schéma d’aménagement clairement approuvé, ni a fortiori mis en pratique sur le terrain, n’a abouti et même si un des textes d’application de la loi forestière de 1997 (décret n° 98-782) exige que toute exploitation forestière doit se conformer à un plan d’aménagement, on pouvait constater en 2001 (Hagen et al., 2000) qu’aucune exploitation forestière en cours à Madagascar ne respectait vraiment un plan d’aménagement digne de ce nom (Raharison, 2006).

29Même si de nombreuses initiatives pour une amélioration des conditions de conservation des ressources forestières ont été prises, notamment par des ONG nationales ou internationales, les solutions proposées relèvent de parti pris qui trouvent leur source dans l’image passionnée que la forêt malgache évoque pour tous les acteurs qui s’y intéressent. L’Homme y apparaît comme source de tous les maux. Elles traduisent surtout le désarroi de beaucoup en face de cette dégradation présentée comme accélérée des forêts.

30Les orientations du PE2, axées sur la responsabilisation accrue des populations dans la gestion de leurs ressources naturelles et concrétisées par les textes législatifs reconnaissant au transfert de gestion un rôle majeur, n’ont pas, à la fin 2002, donné les résultats attendus ou, tout au moins, pas dans le laps de temps accordé, et l’on s’est retrouvé donc face à la tentation de faire machine arrière et de se replier sur les aires protégées. En effet, des pressions multiples des grandes ONG de défense de l’environnement, peu soucieuses de devoir partager la gestion de l’environnement malgache avec les populations, ont trouvé des relais auprès de certains bailleurs de fonds et des décideurs.

Les ateliers de Mantasoa, puis de Mahajanga et l'identification des capacités locales de gestion

31La loi 96-025 du 26 septembre 1996, dite loi Gelose s’inscrit dans le contexte général de la décentralisation, concept qui vit le jour (politiquement) lors de la proclamation de la Troisième République en 1992. Trois ateliers nationaux et internationaux ont contribué à changer la mentalité des décideurs politiques jusque là très méfiants des intentions et des capacités des communautés rurales en matière de gestion des ressources :

32Un premier atelier national s’est tenu du 7 au 9 septembre 1994 à Mantasoa. Cet atelier portait sur les capacités locales (ou communautaires) de gestion et sur les modes et droits d’accès aux ressources, (Rabesahala et al. 1994 ; Leisz et al. 1995). L’atelier a mis en exergue l’existence généralisée de communautés locales et la nécessité de reconnaître légalement les structures locales de gestion des ressources naturelles et de les renforcer.

33Deux mois plus tard, à l’issu du colloque international sur l’occupation humaine des aires protégées qui s’est tenu à Mahajanga du 21 au 25 novembre, le même concept (Weber, 1994) a été mieux reçu par les mêmes décideurs, lesquels se trouvèrent en présence, cette fois-ci, de quelques représentants de communautés rurales. Parmi les dix points de la Déclaration de Mahajanga (ONE - ANGAP - DEF, 1994), le plus important fut celui de la démarche contractuelle faisant de l’Etat et des communautés rurales des partenaires potentiels de la gestion durable des aires protégées.

Les prémisses de la loi Gelose10 : L'atelier d'Antsirabe, et l'expression d'une demande sociale forte

  • 10  Gelose : pour acronyme de Gestion locale sécurisée.
  • 11  Ceci obligea les organisateurs de l'atelier de conduire la totalité de l'atelier en langue malgach (...)

34En 1995, du 8 au 12 mai à Antsirabe, un deuxième colloque international, celui-ci plus médiatisé que les deux précédents et cofinancé par la Banque Mondiale, par l'USAID et par la Coopération française, vit la participation de décideurs administratifs et politiques, d'une majorité de représentants des communautés rurales11 et des bailleurs de fonds. Ce colloque avait pour objet de discuter et valider un document publié par l’Office National de l’Environnement (ONE) dont le titre était : Vers la Gestion Locale Communautaire des Ressources Renouvelables : Propositions d’une Politique de Décentralisation de la Gestion des Ressources Renouvelables.

  • 12  La pression de la demande sociale : Lors de l'atelier d'Antsirabe qui compte tenu du nombre des re (...)

35A l’issue de ce colloque, une déclaration comprenant quatorze points reprit les concepts présentés à Mantasoa et à Mahajanga, inscrivant notamment la gestion communautaire des ressources naturelles dans le cadre légal. En moins de deux ans, l’existence d’une capacité communautaire (c'est-à-dire hors du domaine étatique) et la nécessité de permettre aux communautés locales existantes de co-gérer les ressources devinrent un impératif, auparavant difficile à simplement envisager. Les ateliers sus mentionnés ont en fait constitué les bases successives d’élaboration et de discussion des modalités de décentralisation de la gestion des ressources naturelles à Madagascar. Comment et pourquoi cette notion de gestion locale des ressources a été acceptée aussi rapidement par les décideurs politiques et tous ceux concernés par l’utilisation durable des ressources ? Parce que ces trois ateliers avaient progressivement révélé à la fois les blocages de la situation, l'ampleur des attentes des populations et la force de leur demande sociale au moment où se mettait en place la décentralisation12

La préparation de la loi Gelose et l'élaboration des textes d'application : Une loi cadre et une politique à long terme

36Dans la foulée de l'Atelier d'Antsirabe, la préparation du texte de la loi Gelose fut confiée à une équipe restreinte appuyée par une commission interministérielle. Le rythme soutenu (de une à deux réunions de la commission par semaine) et la richesse des débats témoignent de la conscience des instances politiques de l'ampleur de la demande sociale du monde rural. Un an et demi après Antsirabe, la loi était votée et promulguée. Dans le même temps d'autres travaux importants avaient été engagés dès avant la promulgation de la loi :

37Une étude de faisabilité de la politique de transfert de gestion (Madon, 1996) fut confiée à un bureau d'études international sur financement de la Coopération française, et permit d'esquisser puis de définir les modalités procédurales d'inscription du transfert de gestion aux communautés de base dans le cadre de la décentralisation en donnant un rôle central aux communes. A la suite des débats tenus à Antsirabe, la loi Gelose définissait l'obligation de recourir pour le contrat initial de transfert de gestion à une communauté locale de base, aux services d'un médiateur environnemental. Une autre étude encore financée par la Coopération française permit de définir le cadre possible et les modalités de la médiation environnementale (Montgolfier et al. 1996). Les débats préparatoires à la loi Gelose furent intenses et même parfois passionnés. Un des thèmes en débat fut celui de la place des dina et autres règles locales en particulier pour la gestion locale des feux. Pour fournir aux rédacteurs des futurs textes d'application de la loi Gelose non encore publiée des éléments de réflexion, une étude juridique permit de clarifier un certain nombre de points essentiels (Imbike, 1996) préalables à la préparation des décrets d'application de la loi.

38La préparation des décrets d'application de la loi Gelose fut lancée par la Composante GELOSE du PE II, Programme environnemental II mise en place au sein de l'ONE, Office national de l'Environnement et chargée d'organiser la mise en application de la loi Gelose et le déploiement des activités identifiées lors de l'étude de faisabilité de la politique de gestion locale des ressources renouvelables. La Composante GELOSE confia la préparation des projets de textes d'application à une équipe de consultants nationaux pilotée par la juriste, qui avait participé à la rédaction du projet de la loi 96-025. Ce ne fut qu'en 1998 que ces textes furent examinés et validés lors d'un atelier tenu à Antananarivo.

  • 13  Ce qui cadrait assez mal avec la logique interne du PE II.

39Les principales conceptions de base qui ont prévalu pour l'élaboration de ces propositions ont été fondamentalement les suivantes. Concevoir une loi cadre d'application souple à l'ensemble des ressources renouvelables, des forêts aux ressources marines, sur tout le territoire de Madagascar (1100 communes et 13000 communautés de base environ). Donc organiser et préparer la mise en œuvre de longue haleine d'une politique nationale à long terme sur plusieurs décennies. De ce fait, il fut choisi de ne pas engager d'actions pilotes et de ne pas s'inscrire dans un cadre de projet13. Inscrire le transfert de gestion aux communautés locales de base dans une contractualisation basée sur une négociation patrimoniale. S'inscrire d'emblée en cohérence et en complémentarité avec la décentralisation et avec la mise en place des communes. Répartir la réalisation des actions à réaliser de façon cohérente entre différents acteurs complémentaires publics et privés : administrations, médiateurs environnementaux, bureaux d'études, etc. (Re)Mettre en cohérence les pratiques coutumières et les textes réglementaires pour réduire la séparation et l'opposition du « légal et du légitime » (CERG2R - Cirad, 1997).

40Les deux processus de la définition et de la promulgation de la loi Gelose et d'élaboration concertée des orientations de la Nouvelle Politique Forestière (NPF) furent largement parallèles et interactifs. La NPF fut validée par un atelier national quelques mois après la promulgation de la loi Gelose. Cette loi fut donc prise en compte par la loi forestière N° 97-017 et par un certain nombre de ses textes d'application en particulier le décret n° 98-782 réglementant l'exploitation forestière.

41Fin 1996, un peu plus d'un an après la promulgation de la loi Gelose, un nouvel atelier international sur « La gestion locale sécurisée des ressources naturelles renouvelables » organisé dans le cadre du Programme Environnemental et financé par la Banque Mondiale organisait la mise en cohérence entre la politique de gestion locale des ressources renouvelables et la sécurisation foncière qui apparaissait nécessaire à une gestion durable des ressources renouvelables. C'est en application de ces orientations que fut promulgué le décret 98-610 relatif à la Sécurisation Foncière Relative qui prévoit la réalisation systématique d'une action de sécurisation foncière relative lors de tout transfert de gestion à une communauté locale de base.

Les échecs récurrents de la préservation

  • 14  La crise politique de 2009 à Madagascar a relancé l’exploitation illicite ou clandestine des produ (...)
  • 15  Les grossistes collecteurs d’écorce de Prunus pour l’unité d’extraction de Fianarantsoa ont quitté (...)
  • 16  L’exclusion des populations entraîne la disparition de toute surveillance permanente par les popul (...)

42Les exemples de la filière bois de rose depuis plus de huit ans dans le Parc National de Masoala, Patrimoine mondial (Rakotondramanga, 2002 ; Stasse, 2002 ; Montagne et al. 2006)14, et de celle de l’écorce du Prunus africana dont les sujets adultes ont été « éradiqués »15 de toute la zone du Corridor Ankenieny - Zahamena (y compris de l’aire protégée déjà existante de Zahamena ou de la forêt classée d’Ankeniheny) montrent que la préservation par exclusion n’apporte pas une garantie réelle, durable et sérieuse de conservation effective de la biodiversité. Au contraire puisque le caractère désert16 protège d’autant plus les contrevenants et favorise la mise en place de filières clandestines (Bertrand, 2006). Ce constat n’est pas nouveau et se répète de période en période (Buttoud, 1995), cela n’empêche pas le dogme d’exister et de continuer à être propagé (Randrianandianina et al. 2003) malgré des discours contraires y compris dans le camp de la préservation (Robbins et al., 2006). Le dogme de l’efficacité des barrières perdure d’année en année tout comme le cliché des pyromanes malgaches (Kull, 2000). Le même discours récurrent qualifie les procédures des transferts de gestion selon la loi Gelose de trop complexes et trop longues (Hagen et al., 2000 ; Blanc-Pamard et Rakoto Ramiarantsoa, 2007). Ces auteurs oublient simplement que le transfert de gestion ne se décrète pas (Bertrand, 1985), que lever la méfiance des populations rurales tant de fois trompées par l’Etat et/ou les projets de développement et de conservation prend du temps et que la mise en place effective de contrats de transferts de gestion qui ne soient pas léonins et plus encore que la conversion des pratiques quotidiennes locales vers la gestion durable ne peuvent pas se faire sans une implication réelle et longue auprès des populations (Razafindralambo, 2007).

43Les périodes d’instabilité politique sont des révélateurs impitoyables et exacerbés de pratiques plus contenues mais persistantes et souterraines lorsque l’autorité de l’Etat semble plus forte. Ainsi un message sur www.sobika.com le 14/03/2009 indique :

« Je prends la peine de vous écrire pour vous faire part de mon témoignage concernant le désastre écologique qui se passe actuellement dans la région SAVA. En effet la forêt malgache est en train de partir en Chine à coups de centaines de containers ! Ils ont même fait des coupes dans la zone des parcs nationaux de Marojejy et de Masoala ! Je ne vous dis pas les magouilles : Des exportateurs de bois de la région arrosent à coups de cinquantaine de millions d’Ariary les autorités locales de la région, les forces de sécurité et les douaniers. Ils sont tous corrompus et ferment les yeux sur ces exportations illicites Etant donné que toute l'attention est tournée vers les évènements politiques, ils en profitent au maximum. A la radio des personnes incitent même les gens à se rendre en brousse pour couper les arbres et les revendre en vitesse tant que les évènements politiques continuent. Environ 175 containers ont déjà été exportés et une centaine d'autres vont partir au prochain passage du cargo sur le port de Vohémar. » (sobika.com, 2009).

  • 17  Dont il ne faut pas oublier qu’elle est elle-même soumise à évolution et qu’une simple préservatio (...)
  • 18  M. Ravelona précise que les liens de parenté entre les membres de CLB limitent l’autocontrôle vill (...)

44Ceci montre bien que la création d’aires protégées ne garantit pas seule la durabilité de la biodiversité17 qu’elles contiennent. Deux éléments conditionnent in fine la conservation de la biodiversité dans les aires protégées : d’une part, la réalité de l’Etat et sa capacité à faire respecter les règles qu’il édicte (Bertrand, 2006) ; d’autre part, la réaction des populations résidentes qui de longue date occupent ces espaces et vivent de ces ressources et de cette biodiversité. Maafaka Ravelona montre ainsi que les transferts de gestion de conservation mis en place par CI dans la forêt d’Ambihilero à Didy n’ont jamais supprimé l’exploitation clandestine sur les zones ainsi mise sous conservation intégrale18 (Ravelona, 2009).

45Les défaillances de l’Etat (Karsenty, Fournier, 2008) sont souvent catastrophiques pour la biodiversité des aires protégées. En témoigne la crise politique du Togo au cours des années 90. Le Président Eyadema s’enorgueillissait que le Togo avait dès les années 1980 classé plus de 10 % de la superficie de son territoire en aires protégées. Leur création avait été opérée « à la hussarde » par « déguerpissement » des populations sans compensation et avec destruction des villages au lance-flammes par l’armée togolaise. Lorsqu’à la suite du Discours de la Baule du Président Mitterrand, la contestation démocratique se développa au Togo au cours de la décennie 90, l’armée et l’Etat togolais délaissèrent la surveillance des aires protégées. Les populations déguerpies retournèrent alors dans leurs terroirs d’origine et se « vengèrent » sur ceux qui occupaient leur anciens territoires : la faune sauvage !

  • 19  Où la faune disparue depuis longtemps avait fait sa réapparition : buffles, antiloppes, etc.

46Dans le même temps, toujours au Togo, une association des riverains de la forêt classée d’Eto où le projet AFRI financé par l’AFD avait réalisé un important travail de restauration et de plantation forestières en associant les populations riveraines et celles qui s’étaient installées dans la forêt (cultures « taungya » intercalaires et élevage en sous-bois) remettait en cause la procédure de classement forestier réalisée par l’administration coloniale française dans les années 1920 ! Face au refus de l’administration forestière togolaise, les plantations d’eucalyptus19 en pleine exploitation (avec emploi des riverains) pour l’approvisionnement en bois énergie de Lomé étaient brûlées réduisant ainsi brutalement à néant les revenus des populations riveraines. Ceci montre clairement que le pas de temps des revendications contre des dépossessions foncières autoritaires ne se compte pas en années mais persiste sur plusieurs décennies !

Gestion locale ou préservation : quelle place pour les populations locales à Madagascar ?

La contradiction majeure de la politique environnementale malgache

  • 20  1925 : année de publication du texte d’Abel Parrot ; 1930 : année de promulgation des principaux t (...)

47Depuis 1925 et 193020, la question est donc posée à Madagascar de la place laissée aux populations rurales pour l’accès et la gestion des ressources renouvelables (Montagne, 2006) . Une longue période de près d’un siècle de politique forestière répressive et exclusive a pris fin au cours des années quatre-vingt dix, mais la mutation n’est pas encore durablement acquise et semble menacée de l’intérieur et surtout de l’extérieur de Madagascar. Le dilemme persiste et se renouvelle de période en période comme parallèle à la crise chronique qui par delà les soubresauts politiques périodiques est l’état normal de Madagascar (Frémigaci, 2009).

  • 21 « Conservation » est en anglais un « faux – ami » qu’il convient de traduire en français par « prés (...)
  • 22  Les débuts de la période coloniale à Madagascar ont été marqués par une exploitation forestière in (...)

48Préservation21, exploitation et valorisation ont, de longue date, constituées les contradictions principales de l’administration forestière à Madagascar. Le service forestier (l’administration forestière coloniale) s’est construit sur un discours catastrophiste de dégradations accélérées (Kull, 2000 ; Bertrand et Ratsimbarison, 2004 ; Bertrand et al., 2004). Dans le même temps cette construction s’est opérée sur la base d’un discours maximaliste de préservation des ressources, d’interdiction totale des feux et des défrichements et sur une pratique d’exploitation forestière intense ouverte22 sous la colonisation ou plus discrète depuis l’indépendance (Bertrand, 2006).

49En ce sens, Madagascar ne fait que reproduire un schéma que l’on retrouve dans nombres de pays du tiers monde.

« Au-delà des déclarations de principe des États, des grandes Organisations non gouvernementales (ONG) ou de la communauté scientifique, la réalité de terrain est toute autre. Les politiques de conservation font encore largement abstraction de la présence et des droits des communautés locales. Le concept même de conservation, de bien public mondial à protéger, est imposé par la communauté internationale au détriment de toute prise en compte des populations qui sont pourtant les premières touchées par ces décisions. » (Boissière et Doumenge, 2008).

50Nombre d’auteurs ont pointé l’insuffisance des politiques de conservation par exclusion, fût-elle gérée localement, pour leur impact économique local négatif et leur légitimité contestable (Ferraro, 2002 ; Blanc-Pamard et Rakoto, 2008, Freudenberger et al., 2007).

L’obstruction au transfert de gestion et le risque du retour aux barrières 

  • 23  On a même vu des ONG de Conservation pourtant connues pour leur discours récurrent en faveur de l’ (...)
  • 24  « …l’exploitation des forêts de l’Etat …peut être faite soit en régie, soit par délégation à des e (...)
  • 25  GCF, Gestion contractualisée des forêts

51Une fois la loi 96-025 promulguée par l’Etat malagasy, de multiples obstacles voire des oppositions23 (Bertrand, 2006) ont retardé son application sur le terrain. Le corps des forestiers, s’identifiant comme principal gestionnaire des ressources naturelles renouvelables, préféra l’adoption d’un texte d’application à la loi 97-017 spécifique au secteur forestier. Le décret 2001-122 dit décret Gestion Contractualisé des Forêts fut promulgué en complément à la loi Gelose mais apparut de facto comme substitutif (malgré les questions de légalité strictement juridiques soulevées ; Karpe, 2007)24. La principale critique faite, au début des années 2000, à l’encontre de la loi Gelose fut que les procédures de développement (élaborées par le PE2 et son service Gelose) étaient lourdes et donc couteuses ou encore que la Sécurisation Foncière Relative (un autre pendant de la loi 96-025) n’était pas nécessaire. Cependant, après l’adoption du décret GCF25 et son début d’application par la signature de contrats GCF, les constats faits dès 2004 (Resolve) ne montraient pas de bien meilleurs résultats pour ces contrats que pour ceux (Gelose) signés sous la loi 96-025.

  • 26  Le lieu principal du commerce du bois d’œuvre à Antananarivo
  • 27  La majeure partie de la population urbaine malgache (Antananarivo, Toamasina, Antsirabe, Fianarant (...)

52En fait, on assistait à un rejet inavoué d’une des ouvertures de la loi Gelose (art. 54) : la possibilité d’une valorisation économique des ressources. Une classification en contrats GCF dits « de conservation », « de valorisation », « de protection (de bassin – versant par exemple) » etc… fut diffusée par interprétation libre des textes qui ne prévoient nullement cette distinction entrainant plus de confusion dans les esprits notamment des agents forestiers. Pour les tenants d’une préservation « pure et dure », le résultat, au moins sur le papier, était bon même si, tout au long de ces années et malgré une interdiction formelle d’exploitation du MinEnvEF (2004), le marché de bois d’œuvre d’Andravoangy26 dans la capitale n’a jamais cessé d’être approvisionné, démontrant par là-même l’inefficacité d’une politique d’interdiction sans moyens, sans volonté et sans capacité d’application entraînant pour les acteurs de la filière une logique de prohibition. Malgré des actions d’exclusion ou de gel des activités (à l’exception des droits d’usages), les principales filières bois d’œuvre ont fonctionné principalement par des exploitations clandestines (Rasamoelina, 2001; Guillerme, 2001). Il en fut de même pour certaines27 des filières d’approvisionnement en charbon de bois des villes (PEDM, 1999), comme à Toliara par exemple.

  • 28  A noter que le décret sur la GCF ne comporte pas ce type de garde-fou.

53Le transfert de gestion fondé sur la valorisation n’est, certes, pas à l’abri de tentatives de récupérations par des notables comme celles que décrivent Karsenty et Fournier (Karsenty, Fournier, 2008) pour les forêts communautaires du Cameroun. Un exemple similaire existe à Madagascar, à Fierenana au sud de la commune de Didy où un contrat Gelose « sur mesure » a été mis en place par l’administration forestière avec une COBA constituée ad hoc par un exploitant forestier influent. Notons toutefois que la procédure Gelose impose à la mairie de contrôler et de garantir l’existence réelle de la COBA qui présente la demande de transfert de gestion28.

Durban : de nouvelles barrières ou une possible synthèse ?

  • 29  De l’ordre de 5,4 millions de US $.
  • 30  Renvoi explicite à l’approche développée par le WWF.

54Le PE2 consacra moins de 4 % (Rajaonera et al., 2000)29 des quelques 140 millions de US$ de financement finalement utilisés pour le développement des contrats de transferts de gestion. Ceci, combiné à l’ampleur de la tâche, au refus d’engager une campagne nationale d’information des populations et aux réticences exposées précédemment explique largement la lenteur de montée en puissance des transferts de gestion et la tentative de retour vers les cadres anciens de préservation que sont les aires protégées (World Bank, 2003). Le congrès mondial des aires protégées ouvert le 8 septembre 2003 à Durban (Afrique du Sud) fut l’occasion pour le Président de la République Malagasy d’engager son pays dans une extension très importante des surfaces des aires protégées pour les porter « de 1,7 millions d’hectares à 6 millions d’hectares en cinq ans ». La déclaration du Président Marc Ravalomanana fait référence explicitement à la Convention sur la diversité biologique, aux actions passées de conservation par le réseau existant des aires protégées, à l’approche écorégionale de conservation30, à la régionalisation des actions de préservation, mais aussi, au transfert de gestion et à la gestion communautaire des ressources renouvelables. Au-delà de cette annonce, les populations riveraines restaient résidentes en forêt et les marchés n’avaient pas pour autant cessé d’écouler produits forestiers ligneux et non ligneux. La question des relations entre préservation (à travers l’extension du réseau des aires protégées), et valorisation-exploitation (à travers la gestion communautaire ou à travers l’exploitation d’opérateurs) restait ouverte.

Transferts de gestion de valorisation, transferts de gestion « de conservation » et paiements pour services environnementaux

55Les transferts de gestion ne concernent pas, loin s’en faut, que les zones destinées à la conservation à Madagascar. Au contraire encore la majorité des transferts de gestion est établie sur la base d’une gestion-exploitation et valorisation locale de la biodiversité. D’ailleurs le texte et l’esprit initial des promoteurs de la loi 96-025 était de favoriser une exploitation durable des ressources naturelles par des communautés sécurisées par le transfert de gestion et une reconnaissance de droits fonciers exclusifs (la « sécurisation foncière relative »). Mais CI souhaite que les transferts de gestion s’identifient aux contrats de conservation.

Transferts de gestion « de conservation » et paiements pour services environnementaux

56Pour atteindre les objectifs de Durban, il est donc prévu de créer un nouveau type d’aire protégée (AP), plus flexible et moins couteux que les types actuels (parcs nationaux, réserves privées, sites de transfert de gestion), appelé « site de conservation » composé de zonages à divers degrés de protection, et agencé par rapport aux anciennes AP de façon à constituer un réseau continu formant un « système d’aires protégées ». Les formes juridiques de ces Nouvelles Aires Protégées (NAP) sont actuellement encore en cours d’élaboration. Ce processus ne semble en 2009 pas vraiment près d’aboutir. A la différence des AP existantes, ces sites pourront être planifiés, mis en œuvre et gérés par divers types d’acteurs, y compris les comités de base (COBA ou VOI) les services décentralisés, les ONG, les communes et le secteur privé, ce qui devrait permettre plus de souplesse dans la gestion de l’espace avec la recherche de compromis entre les intérêts de chacun et une démultiplication des capacités de gestion (Bertrand et al., 2008).

57Dans ces conditions, le risque d’un « passage en force » vers la préservation ne peut être exclu là où le rapport de force entre les populations et les tenants de la conservation « excluante » sera trop déséquilibré en faveur de ce dernier.

58Néanmoins, le processus de création de nouvelles aires protégées dans deux sites comparables (Bertrand et al, 2008), les « corridors forestiers » de « Fandriana – Vondrozo » et d’« Ankeniheny – Zahamena », accorde une place importante à la gestion communautaire. La question « préservation et/ou gestion communautaire et valorisation forestière durable ? » rebondit. Les expériences des transferts de gestion depuis 2000 dans ces massifs forestiers apportent d’utiles jalons pour choisir des combinaisons entre préservation et valorisation durable d’une part, et entre gestion communautaire, et gestion administrative en régie des exploitations forestières par des opérateurs, d’autre part. La comparaison de ces deux corridors, d’écologie et de sociologie similaires, mais gérés différemment par ailleurs, fournit les matériaux de ce bilan.

59La force de la demande sociale rurale conduit même les ONG de préservation, à passer par le transfert de gestion aux communautés locales. Sans valorisation, ceux-ci ne fonctionnent que le temps des interventions de leur mise en place et de leur encadrement rapproché. A Madagascar, l’objectif de C.I. est de développer des contrats de conservation (traduction de Conservation Agreements) dans la zone tampon des Aires Protégées et de parvenir ainsi à une centaine de contrats avec des communautés. Les coûts à l'hectare de la conservation ne dépendent ni du coût d'opportunité de la zone ni des actifs de la population locale mais de la disponibilité en financement (Karsenty, 2009). La démarche suivie par CI vise explicitement à utiliser le transfert de gestion et à le transformer en instrument de conservation : des contrats de conservation complétés par des paiements pour services environnementaux :

“(…) conservation agreements in Madagascar have been promoted within the framework of the Transfert de Gestion process, a government-led program granting management rights over lands protected area buffer zones to poor communities living in and around these protected areas. The strategy holds that effective conservation agreements will persuade the Government of Madagascar that this tool offers an effective mechanism for realizing Transfert de Gestion program “(Conservation International, 2008).

  • 31  Au moins de façon officielle c'est-à-dire dans le cadre d’un projet et de l’administration vue de (...)

60C.I. souhaite que plus généralement à l’avenir les transferts de gestion s’identifient totalement aux contrats de conservation. Un autre versant de la stratégie est sans doute de « forcer » la nature de l’aire protégée en cours de constitution : son classement en catégorie VI autorise normalement de mener des activités d’exploitation durable, mais la multiplication des contrats de conservation dans la zone – tampon (autour du « noyau dur » projeté) conduirait à rendre très difficile le développement d’activités d’exploitation durable31.

61Un bilan commandité par l’USAID a été réalisé en 2007 sur 7 des quelques 200 à 300 contrats de transferts de gestion mis en place autour des deux corridors forestiers de « Fandriana – Vondrozo » et d’« Ankeniheny – Zahamena » (Hockley et Andriamarovololona, 2007). Les conclusions sont claires :

“There is a large gap between the communities’ perceptions of Transfert de Gestion and those of external stakeholders, with the community’s vision more closely matching that required to produce a sustainable solution. … This oral contract had stressed development assistance in return for abandoning forest clearance. There is a large gap between this oral contract, and the official contract signed by COBAs. The problems with contract stability therefore result in part from asynchronies of power and information during contract negotiation, which led external agencies to drive too hard a bargain, while promising assistance that did not arrive.”

  • 32  FCPF : Forest Carbon Partnership Facilit
  • 33  Les patrouilles constituent l’activité rémunératrice par excellence. Rapportant deux fois plus que (...)

62Pour tenter d’assurer la durabilité des transferts de gestion de conservation CI a donc engagé la mise en place systématique dans le cadre de ces contrats de modalités de paiements pour services environnementaux. Au démarrage de ces contrats CI s’est trouvée dans l’obligation de financer plus ou moins directement (parfois par l’intermédiaire d’une fondation ou d’un fonds ad hoc) ces paiements pour services environnementaux. Ainsi, les contrats de conservation conclus dans le cadre du programme CSP n’ont qu’un horizon de financement limité, lié à la durée des engagements de la Fondation Mulago (programme de 5 ans commencé en 2005). L’objectif de CI est que des dispositifs REDD (ou pré-REDD, comme les financements du FCPF32) puissent prendre le relais des financements actuels. Ceci reste encore un pari sur l’avenir susceptible de se réaliser à une échéance indéterminée. Dans ces conditions, il arrive que sur le terrain les paiements pour services environnementaux soient interrompus ou retardés plus ou moins durablement. Cela se traduit généralement par l’arrêt des « salaires » des patrouilleurs33. Or ce salaire constitue pour les populations contractantes des transferts de gestion de conservation la principale et la plus attractive source de revenu au titre des paiements pour service environnementaux. De telles interruptions sont très mal perçues par les populations et peuvent entraîner des « représailles » : accroissement de l’exploitation illicite, dégradations environnementales volontaires voire dénonciation du contrat de transfert de gestion de conservation ;

63Tout ceci illustre bien ce que Serpantié et al. identifient comme les problèmes de financement global des nouveaux sites de conservation de forêts où les opérateurs butent sur des problèmes de financement que ce soit pour leur création, leur gestion et leur pérennisation ou pour la compensation des populations locales riveraines de ces forêts. L’émergence de nouveaux marchés environnementaux au Nord ouvre de nouvelles approches qui s’organisent autour de filières globales de valorisation de ces sites de conservation : biodiversité, écotourisme, services écosystémiques. Cependant, l’hétérogénéité et la diversité des situations au niveau local ne peuvent se satisfaire de nouveaux dispositifs de gestion normatifs, sans cohérence avec les particularités sociales et géographiques et en occultant les anciens compromis existants au sein des systèmes agraires entre protection et valorisation des ressources forestières (Serpantié et al., 2009). On rejoint ainsi une des conclusions de l’Atelier d’Antsirabé qui disait que les solutions des problèmes de gestion des ressources renouvelables devaient être adaptées aux conditions locales (sociales, environnementales, etc.).

« Pendant les années 1990, Madagascar aidé par l’APD de la communauté internationale a relancé la constitution d’un réseau d’aires protégées pour un coût de 75M$ (Carret et Loyer, 2003). En l’absence d’octroi de licences de bio-prospection dans les AP, les frais de gestion de ces aires protégées (5US$/ha/an) sont partiellement couverts par les paiements directs des ONG internationales et divers subventions de fonds pour l’environnement (Usaid, BM) à l’Angap, l’association gestionnaire (3MUS$/an). Il faut y ajouter les dépenses des ONG sur les AP directement gérées par elles (1,5USM$/an), soit un « bénéfice national de la conservation de la biodiversité » de 3 $/ha/an (Carret et Loyer, 2003). »

« En 2007, selon Freudenberger et Razanajatovo (2007), chaque TdG a coûté, pour la préparation des plans d’aménagement et du cahier des charges, environ 2,2 US$/ha payés aux ONG et administrations chargées de la mise en place, en vue d’un fonctionnement sur trois ans. Comme le fonctionnement de ces TdG n’est pas subventionné, ces frais de mise en place sont amortis sur la durée du contrat de gestion prévu en deux phases (3 ans au départ, 10 ans ensuite). On en déduit donc un coût moyen annuel de 0,73 US$ par ha/an sur la première phase, 0,17 US$/ha/an sur l’ensemble du contrat s’il n’y a pas d’autres frais. Dans ces conditions, les efforts de paiements pour conservation apparaissent extrêmement faibles, en comparaison des aires protégées classiques (coûts 5$/ha, subventions 3$/ha). »

« L’exagération des discours sur la dégradation environnementale, en vue de justifier des politiques d’exclusion, a été dénoncée par plusieurs auteurs (Rossi, 1999 ; Forsyth, 2003). Le corollaire est donc possible, à savoir exagérer des services environnementaux locaux en vue de minimiser les pertes subies par les populations locales du fait de ces mêmes politiques. Le concept de « service écosystémique », construction intellectuelle faisant intervenir les sciences (pour décrire les fonctions en jeu) et l’économie (pour attribuer une valeur aux services rendus), a un grand potentiel mais pourrait se prêter à ce type d’instrumentalisation si la qualité d’identification entre fonctions et valeurs est volontairement déséquilibrée. » (Serpantié et al., 2009).

64Les transferts de gestion semblent donc utilisés par les ONG de conservation pour minimiser les coûts de la conservation. Dans le Menabe à l’Ouest de Madagascar, des programmes de PSE (payements pour les services environnementaux) proposant des revenus en nature seraient adaptés à protéger la biodiversité et à réduire la pauvreté au Menabe Central sous certaines conditions. Ces conditions sont 1) d'établir des contrats de PSE avec des villages sensibilisés à la conservation de la biodiversité et aux potentialités économiques de la forêt, et 2) de focaliser les PSE sur la diminution et non sur l'arrêt total de la déforestation (Ramohavelo, 2009).

Transferts de gestion de valorisation et gestion durable

  • 34  Mais depuis cette date ces mêmes VOI titulaires des contrats de conservation ont demandé, soutenus (...)

65Les contrats visant la valorisation forestière durable demandent plus de temps mais surtout nécessitent un appui apparemment plus long et plus continu lié à l’instauration de plans d’aménagement, à la prise en compte de trames foncières, au montage d’accords inter-lignagers pour les zones de foncier flou ou litigieux. Il faut cet accompagnement jusqu’à ce que chaque catégorie d’acteur ait pu effectivement constater directement les bénéfices qui lui reviennent du nouveau mode de gestion des ressources. L’exemple des transferts de gestion de conservation et de valorisation (plus de seize contrats) mis en place de 2002 à 2007 par le projet FFEM, Gestion et valorisation de la biodiversité apparaît particulièrement significatif et positif en particulier dans la commune de Didy. Dans cette commune les populations ont pu comparer transfert de gestion de valorisation et transferts de gestion de conservation. En octobre 2007, l’ensemble des communautés de base des contrats de conservation demandaient solennellement la conversion des contrats de conservation en contrats de valorisation34. On a déjà souligné que les contrats de conservation n’ont jamais pu supprimer l’exploitation clandestine dans les espaces ainsi conservés.

66La question des revenus tirés de la biodiversité conditionne donc bien la durabilité de celle-ci. C’est ce que concluent Boissière et ses co-auteurs à propos du Vietnam. :

“Communities can and should be actively involved in building a shared understanding of what the forest provides, how it can be conserved and the benefits to be obtained.” (Boissière et al., 2009).

Les logiques paysannes s’imposent

67Pour des populations qui vivent dans une pauvreté pesante dont ils n’arrivent pas à sortir, il n’est pas étonnant que la logique dominante des comportements soit celle du “donnant-donnant” comme le montre, au Mali, M.-L. Matthieu (Matthieu, 2009). Les pratiques des communautés réalisent chaque fois un ajustement temporaire entre les contraintes du moment perçues en provenance des acteurs extérieurs (institutions de développement ou ONG de Conservation) , les possibilités qui leur sont ouvertes et les stratégies à long terme qui structurent les pratiques des acteurs locaux (Idelman, 2009).

Une incertitude qui handicape la conservation et qui dégrade la biodiversité

68La situation actuelle maintient une incertitude propice aux manœuvres d’influence aux niveaux de l’appareil d’Etat bien loin des populations rurales et favorise le sentiment de dépossession des populations sur la gestion de leurs ressources.

69Les bouleversements politiques périodiques que subit Madagascar relancent les craintes de dépossession des populations et induisent une course en avant de tous pour s’accaparer les produits ou les espaces au détriment de la biodiversité et hors de tout cadre de gestion durable. Ainsi, le PlaCAZ a diffusé le 16/3/2009 le mail suivant :

« Il nous est revenu d’entendre de la part des responsables des Vondron’Olona Ifotony (VOI) que des détracteurs de la biodiversité de l’écosystème du Corridor Ankeniheny Zahamena (CAZ) en général et de la Nouvelle Aire Protégée (NAP) en particulier s’acharnent sans scrupule sur ce site profitant la crise qui prévaut actuellement dans notre pays. Le teviala, l’exploitation illicite des bois et minière s’accentuent, surtout dans la Commune Rurale de Fito. Aussi, nous permettons nous de faire appel à tous les sensibles aux conséquences de cette dégradation de prendre tout à chacun leur responsabilité respectif pour couper court à cette mauvaise habitude. Quant à la Plateforme de gestion du Corridor forestier Ankeniheny Zahamena (PlaCAZ), la mobilisation de nos membres est limitée par le manque de moyens. Comptant à votre sincère compréhension.

70Gervais RANDRIANALISON Président de la PlaCAZ »

  • 35  On peut même rajouter que ce choix est déjà clairement notifié par cette population qui ne peut pa (...)

71Si Madagascar veut aller vers la gestion durable de sa biodiversité, le pouvoir politique qui la gouverne ne pourra éviter de faire un choix politique clair et accepté par la majeure partie de la population rurale. C’est elle qui in fine décidera de la durabilité de la gestion de cette biodiversité35.

Conclusion : Gestion durable et développement ou préservation ? Il faut choisir

72Le transfert de gestion et la gestion communautaire ne sont pas une fin mais des moyens. Ce sont des instruments pour atteindre le développement durable c'est-à-dire à la fois le développement, la réduction de la pauvreté et la gestion locale durable des ressources naturelles et de la biodiversité. Le renforcement des communautés rurales a des effets positifs (à travers des relations complexes) avec l’amélioration des forêts et de la biodiversité (Chatree et Agrawal, 2008). La préservation n’ouvre pas cette dynamique mais conduit à l’exploitation clandestine et à la dégradation dans et hors des aires protégées.

73Depuis de nombreuses années, la conservation de la biodiversité est au centre de vastes débats, autant politiques que scientifiques. Concernant plus particulièrement les forêts tropicales, le rôle des populations locales vivant dans ou à proximité des aires protégées a été décliné selon divers modes à mesure qu’évoluaient les discours environnementalistes, préservationistes ou en faveur du transfert de gestion. L’opposition entre ces deux visions de la conservation, du développement durable et de la gestion de la biodiversité, alimente toujours les discussions. Les grandes ONG telles que Conservation International (CI), le Fonds Mondial pour la Nature (WWF), The Nature Conservancy (TNC), The Wildlife Conservation Society (WCS), l’Union Mondiale pour la Nature (UICN) oscillent, elles aussi, entre ces deux positions. En effet, elles prônent d’un côté une protection forte des derniers lieux d’importante biodiversité de la planète, impliquant généralement l’arrêt de toute activité humaine consommatrice excessive de ressources naturelles, et de l’autre une reconnaissance accrue du rôle des populations locales et de l’importance de leur prise en compte dans les décisions. Les chantres de l’une ou l’autre de ces positions ne sont pas forcément les mêmes individus, mais les deux types de discours peuvent s’affronter au sein d’une même organisation (Mac Chapin 2004).

  • 36  Par la promulgation des lois 96-025 et 07-017
  • 37  Et on a vu que ce réseau d’aires protégées est très loin d’être hermétique et efficace.

74Mais les contradictions entre conservation et réduction de la pauvreté demeurent un élément en débat au niveau international (Adams et al., 2004) et le cas malgache apparaît à ce sujet exemplaire. A Madagascar, une longue période de près d’un siècle de politique forestière répressive et exclusive a pris fin au cours des années quatre-vingt-dix36, mais la mutation n’est pas encore durablement acquise. Rien ne dit aujourd’hui que Madagascar poursuivra son lent cheminement dans la voie du développement durable. La clarification des choix publics constituera la clef du renforcement souhaité du rôle de l’Etat (Ramamonjisoa, 2004) qui constitue la condition nécessaire du développement durable (Bertrand, 2006 ; Bertrand et Montagne, 2008). Les évolutions politiques récentes qui affaiblissent le pouvoir central de l’Etat ouvrent des espaces de liberté pour la gestion communautaire si des efforts sont faits pour éviter un scénario « à la togolaise » et son cortège de dégradations environnementales et pour développer de façon plus volontaire les contrats Gelose. Si la place de la gestion communautaire n’est donc pas encore assurée dans la constitution des nouvelles aires protégées, elle est hautement souhaitable avec des aménagements dans sa planification qui prenne en compte à la fois, les enjeux de conservation, les difficultés de celle-ci et les opportunités locales examinées dans chaque cas de figure. La contradiction entre préservation et gestion communautaire (c'est-à-dire conservation, gestion durable et développement) obscurcit le débat de la gestion durable. L’essentiel est que la sauvegarde de la biodiversité malgache ne saurait se résoudre et se limiter à un réseau d’aires protégées aussi vaste et hermétique37 soit-il. C’est la gestion durable de l’ensemble des espaces naturels qui seule garantira la conservation effective d’une biodiversité exceptionnelle. Cette gestion durable sur l'ensemble de Madagascar ne pourra éviter d'y impliquer les communautés rurales et les communes, à travers des contrats selon les modèles initiés par la loi « Gelose ».

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Notes

1  Tanety : collines.

2  Ce programme (PE1 + PE2 + PE3) aura permis aux différents bailleurs de fonds d’apporter à Madagascar de l’ordre de 400 millions de US$.

3  Dans cet article nous désignerons comme ONG conservationistes, ou ONG de Conservation, deux des trois grandes (The Big Three) : WWF (World Wildlife Fund), CI (Conservation International) et TNC (The Nature Conservancy) dont seules les deux premières sont présentes à Madagascar.

4  Le tavy et le hatsaka sont deux modes de culture sur défriche – brûlis coutumiers, respectivement de la côte est et de la côte ouest de Madagascar.

5  Par exemple au tour du Lac Alaotra où les structures coutumières ont de facto disparu dès le règne de Radama. De même dans les périmètres de colonisation agricole comme la Sakay.

6  Un exemple particulièrement caractéristique concerne la commune de Didy, mais on aurait pu citer beaucoup d'autres lieux dans la plupart des provinces.

7  Depuis l’époque coloniale tous les pouvoirs politiques ont voulu manipuler les structures sociales de base, les fokon’olona, pour mieux les contrôler et les administrer. Cela n’a pas empêché leur persistance et leur adaptation à des contextes nouveaux.

8  Le rapport de CI « Etude sur la politique de conservation des ressources forestières à Madagascar » est fondé sur : « Ainsi la principale menace qui pèse sur les forêts malagasy vient plutôt d’une population grandissante qui dépend largement des produits forestiers pour satisfaire plusieurs de ses besoins fondamentaux. Tant que ces produits pourront être prélevés dans les forêts naturelles avec des coûts ou des conséquences négligeables à court terme, les communautés négligeront de recourir à d’autres ressources plus coûteuses. » (C’est nous qui soulignons).

9  Le rapport Evaluation externe du PNAE/PE2 volet 1 Gestion Conservation et valorisation de la biodiversité expose : « L’avenir de la biodiversité forestière se trouve dans la valorisation durable des espaces forestiers qui sont en dehors des aires protégées, dans l’organisation d’une synergie avec tous les acteurs du développement. »

10  Gelose : pour acronyme de Gestion locale sécurisée.

11  Ceci obligea les organisateurs de l'atelier de conduire la totalité de l'atelier en langue malgache. Ceci eut pour effet de libérer les possibilités d'expression des représentants des communautés locales en les replaçant dans leurs fonctions coutumières de "maîtres de la parole".

12  La pression de la demande sociale : Lors de l'atelier d'Antsirabe qui compte tenu du nombre des représentants de communautés locales se tenait en malgache, un animateur, feu Maminiaina Razafindrabe rappela qu'en 1925 Abel Parrot avait déjà émis des propositions en faveur de la gestion locale. Il n'avait pas terminé de parler qu'un vieux Rayamandreny se leva et dit "Efa tamin'ny taona 1925 izany ny fanjakana no nahita an'io vaha-olana io ; fa na izany na tsy izany dia tsy nanao na inona na ianareo ! : Mais alors le Fanjakana connaissait la solution depuis 1925 et vous n'avez rien fait !" Cet épisode traduit bien la pression de la demande des communautés. Un responsable forestier déclara à la fin de l'atelier "On a le couteau dans le dos et on n'a pas droit à l'erreur". Dès juillet 1995, se tenait la Conférence nationale sur la politique forestière et moins de huit mois plus tard, précédant la promulgation de la loi 96-025 dite loi Gelose, un nouvel atelier national définissait, en décembre 1995, au terme d'un débat décentralisé les orientations de la Nouvelle Politique Forestière malgache (Kwang-Kai-Hong, 1996).

13  Ce qui cadrait assez mal avec la logique interne du PE II.

14  La crise politique de 2009 à Madagascar a relancé l’exploitation illicite ou clandestine des produits forestiers dans les aires protégées.

15  Les grossistes collecteurs d’écorce de Prunus pour l’unité d’extraction de Fianarantsoa ont quitté cette zone épuisée pour se tourner vers d’autres zones de collecte. L’ensemble des Prunus adultes de l’espace forestier du corridor Zahamena – Ankeniheny ont été exploités entre 1995 et 1999 sans aucun contrôle et sans qu’il ait été tenu compte dans la réalité du statut des zones exploitées par les pauvres habitants de la zone à la recherche d’un revenu immédiat de survie.

16  L’exclusion des populations entraîne la disparition de toute surveillance permanente par les populations et débouche même sur leur complaisance par rapport aux contrevenants (phénomène déjà décrit en 1925 par Abel Parrot).

17  Dont il ne faut pas oublier qu’elle est elle-même soumise à évolution et qu’une simple préservation ne garantit pas qu’elle sera stabilisée et conservée.

18  M. Ravelona précise que les liens de parenté entre les membres de CLB limitent l’autocontrôle villageois sur l’exploitation illégale et clandestine et distingue :

Exploitation forestière légale signifie une coupe en respectant le PAGS

Exploitation forestière illégale signifie une coupe au-delà du quota et des lots

Exploitation forestière clandestine ou « drodraka » signifie une coupe en dehors de toutes les lois en vigueur.

19  Où la faune disparue depuis longtemps avait fait sa réapparition : buffles, antiloppes, etc.

20  1925 : année de publication du texte d’Abel Parrot ; 1930 : année de promulgation des principaux textes de la réglementation forestière coloniale à Madagascar.

21 « Conservation » est en anglais un « faux – ami » qu’il convient de traduire en français par « préservation ». En français, la préservation comporte explicitement un élément d’exclusion de l’homme (donc les populations locales) considéré comme facteur principal de dégradation environnementale. Au contraire, en français la « conservation » se fonde sur une gestion durable avec des modalités diverses et n’exclut ni les populations, ni l’usage mesuré des ressources. Il n’y a pas, en français, d’antagonisme entre conservation et valorisation, c'est-à-dire une exploitation commerciale des ressources si l’on reste dans les limites d’une gestion durable.

22  Les débuts de la période coloniale à Madagascar ont été marqués par une exploitation forestière intensive des forêts malgaches. La superficie totale concédée passa de 700 ha en 1897 à 17 378 ha en 1899, puis à 55 515 ha en 1900, enfin à 101 630 ha en 1901. Elle resta supérieure à 100 000 ha sur plus de deux décennies.

23  On a même vu des ONG de Conservation pourtant connues pour leur discours récurrent en faveur de l’Etat de droit refuser d’appliquer une loi et lui substituer un dispositif sui generis sans aucune base légale.

24  « …l’exploitation des forêts de l’Etat …peut être faite soit en régie, soit par délégation à des exploitants agréés dans le cadre de conventions d’exploitation, soit dans le cadre des contrats de gestion aux communautés rurales en application de la loi no. 96-025. »

 GCF, Gestion contractualisée des forêts

25  GCF, Gestion contractualisée des forêts

26  Le lieu principal du commerce du bois d’œuvre à Antananarivo

27  La majeure partie de la population urbaine malgache (Antananarivo, Toamasina, Antsirabe, Fianarantsoa, etc., de 80 % à 90 % globalement) est approvisionnée durablement en bois énergie provenant de plantations forestières paysannes d’eucalyptus.

28  A noter que le décret sur la GCF ne comporte pas ce type de garde-fou.

29  De l’ordre de 5,4 millions de US $.

30  Renvoi explicite à l’approche développée par le WWF.

31  Au moins de façon officielle c'est-à-dire dans le cadre d’un projet et de l’administration vue de son côté le plus soft mais sans que cela ne gène l’exploitation illicite pour laquelle CI ne propose aucune solution

32  FCPF : Forest Carbon Partnership Facilit

33  Les patrouilles constituent l’activité rémunératrice par excellence. Rapportant deux fois plus que le salariat agricole, moins pénible, les enjeux sont réels autour de la distribution des places de patrouille.

34  Mais depuis cette date ces mêmes VOI titulaires des contrats de conservation ont demandé, soutenus en cela par CI, de rester dans ce mode conservation. Les VOI déjà sous des contrats de TG autorisant une valorisation souhaitent poursuivre. Ceci traduit les influences contradictoires que subissent les acteurs à qui ont fait miroiter des appuis financiers.

35  On peut même rajouter que ce choix est déjà clairement notifié par cette population qui ne peut pas ou ne veut pas s’opposer à l’exploitation illicite. Donc l’Etat et ses soutiens extérieurs notamment les ONG de Conservation n’ont que le choix de mettre en place des moyens financiers très importants (qui vont bien au delà des promesses actuelles) pour les dissuader ou les encourager. Avec 6 millions d’ha d’AP, et un agent de contrôle pour 100 ha, ce ne sont pas moins de 60 000 agents qu’il faudrait embaucher et rémunérer ! Qui a les moyens financiers de cette politique ?

36  Par la promulgation des lois 96-025 et 07-017

37  Et on a vu que ce réseau d’aires protégées est très loin d’être hermétique et efficace.

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List of illustrations

Title Figure 1. Evolution des surfaces boisées à Madagascar, de 1895 à 1988
Credits Source : d’après Pierre, 1993
URL http://vertigo.revues.org/docannexe/image/9231/img-1.png
File image/png, 18k
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References

Electronic reference

Alain Bertrand, Nadia Rabesahala Horning and Pierre Montagne, « Gestion communautaire ou préservation des ressources renouvelables : Histoire inachevée d'une évolution majeure de la politique environnementale à Madagascar », VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [Online], Volume 9 Numéro 3 | décembre 2009, Online since 14 December 2009, connection on 22 May 2013. URL : http://vertigo.revues.org/9231 ; DOI : 10.4000/vertigo.9231

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About the authors

Alain Bertrand

Retraité du Cirad, Consultant, Edenia Consult Tanja, 28 rue Assad Ibn Al Forat, Marshan, 90000, Tanger, Maroc, Courriel : alain.bertrand@cirad.fr

Nadia Rabesahala Horning

Department of Political Science, Middlebury College, Vermont, USA, Courriel : nhorning@middlebury.edu    

Pierre Montagne

Cirad, URP Forêt et biodiversité, BP 853, Antananarivo 101, Madagascar, Courriel : pierre.montagne@cirad.fr

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