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Représentations sociales et significations des pratiques écologiques : Perspectives de recherche

Sabine Caillaud

Abstracts

The aim of this article is to propose some new research’s lines to understand the senses accorded to ecological practices by paying attention to social representations of pollution. First we present some studies about the link between attitudes and behavior toward ecology and some of their limits. Then, we propose to use another approach : the social representations one, in order to take into account common sense knowledge about ecology. This approach should allow us to understand the sense people give to ecological individual practices. Some elements about the social cultural context of this study give some responses to the question and lead to the bases of our methodology : the opposition between ecology and economy, modernity and the ecological shortage... Focus groups were conducted with French students. Dilemmas were presented in which the pollution varied between local and global. Our results bring some evidences for dichotomies (visible/invisible, rich/poor) which structure the social representations of pollution. These dichotomies enlighten different senses of ecological practices. Moreover our results show that the way nature and humans relations are perceived is based on an anthropocentric or an ecocentric view depending on pollution’s characteristics (local/global).

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Full text

Introduction

1La protection de la nature est devenue un des enjeux majeurs du 21ème siècle. Les risques annoncés par les scientifiques sont nombreux : changement climatique, hausse du niveau des mers et des océans, pollution atmosphérique, problème de gestion des déchets… En France, la question de la protection de la nature est également devenue une préoccupation importante. Elle est de plus en plus médiatisée, les campagnes de sensibilisation se multiplient. Nombreuses sont celles qui appellent aux changements des pratiques individuelles, avec l’idée que chaque petit geste compte face à l’ampleur des risques. Le principe appliqué est le suivant : si tous les individus d’un groupe agissent pour la protection de la nature, alors la somme de ces actions individuelles sera bénéfique pour la nature. Dans ce contexte, faire changer les pratiques écologiques individuelles semble être devenu un des objectifs principaux tant pour les associations que pour l’État. Mais l’écart entre ce que les gens disent, et ce que les gens font, interroge de nombreux acteurs et également de nombreux chercheurs.

2Après avoir présenté quelques limites des travaux actuels en psychologie sociale, nous expliquerons dans quelles mesures l’approche des représentations sociales nous a semblé pertinente pour comprendre le rapport de l’Homme à la protection de la nature. Puis nous évoquerons quelques éléments du contexte socioculturel qui nous semblent utiles pour saisir la problématique dans son contexte et qui sont à la base de notre méthodologie. Les résultats seront présentés en fonction de grandes dichotomies qui organisent les représentations. Enfin, il sera discuté de l’effet que ces dichotomies ont sur le sens accordé aux pratiques écologiques.

La protection de la nature comme domaine de questionnement en psychologie sociale

3Nombreuses sont désormais les recherches en sciences sociales qui s’intéressent aux différents aspects de la protection de la nature. En psychologie sociale, plus particulièrement, de nombreux chercheurs ont essayé de comprendre, dans un premier temps, comment se formaient les attitudes des individus vis-à-vis de la protection de la nature et, dans un second temps, comment ces attitudes pouvaient expliquer les comportements écologiques. Ces études cherchent ainsi à expliquer l’écart entre discours et pratiques.

4Ainsi, l’effet de différents facteurs sur les attitudes vis-à-vis de la protection de la nature a été mis en évidence. Citons quelques exemples. Plus une personne a passé du temps « dans la nature » et plus elle y associe de bons souvenirs, plus elle aura tendance à avoir des attitudes favorables envers sa protection (Kals et al., 1999). Dans un tout autre domaine, plus une personne adhère à des normes libérales, moins elle aura d’attitudes favorables envers la protection de la nature (Kilbourne et al., 2001) Enfin, dernier exemple, l’étude de Steg et Sievers (2000) montre une relation entre le type de modèle culturel (relatif au rapport Homme-nature) auquel adhère un individu et l’attitude envers la protection de la nature. Les attitudes seraient donc le résultat de relations complexes entre différents facteurs.

5D’autres variables ont été reconnues comme ayant directement une influence sur les comportements écologiques des individus. Un des modèles les plus fréquemment cités est celui de la Theory of Planned Behaviour qui définit un lien de causalité entre attitudes et comportements (Ajzen, 1991). Ce modèle montre l’existence d’une norme subjective qui influence l’intention de comportement (exemple : « je sais qu’il est bien vu de trier ses déchets »). Il montre également le rôle des attitudes concernant un comportement précis (exemple : « je pense que trier est efficace pour protéger la nature »), et le rôle du sentiment de maîtrise de ce comportement. Knussen et al. (2004) ont appliqué ce modèle au tri des déchets ménagers à Glasgow. Dans cette étude, les trois variables indépendantes du modèle de la TPB expliquent seulement 29 % de l’intention de recycler. La plupart des études utilisant la Theory of Planned Behaviour arrivent à des résultats similaires. Ainsi, l’ensemble de ces études aboutissent à une sorte d’impasse face à l’existence évidente d’un fossé, non seulement entre attitudes et comportements, mais également entre les attitudes et l’intention de comportement et entre l’intention de comportement et le comportement (Montada et al., 2007). Un des reproches le plus souvent formulé envers la TPB est l’absence de prise en compte des contextes sociaux, culturels ou même matériels (Krömker, 2004 ; Moser, 2009).

6Aussi, nous proposons d’adopter un cadre théorique différent afin d’approfondir la compréhension des pratiques écologiques en prenant en compte les aspects du contexte. Il ne s’agit pas ici de nier l’apport des travaux sur le lien entre attitude et comportement. Mais envisager la question du lien entre discours et pratiques sous une autre perspective théorique devrait apporter d’autres réponses.

  • 1  Selon Kaiser et Fuhrer (2003), il faut différencier les connaissances déclaratives (savoir par exe (...)

7Une des caractéristiques de la théorie des représentations sociales (RS) est de s’intéresser au savoir de sens commun, autrement dit au savoir des profanes, et de considérer que ces derniers pensent selon des logiques qui leur sont propres. De même, les pratiques quotidiennes sont considérées comme répondant à des logiques qui sont propres au sens commun. On s’éloigne donc ici de la vision d’un Homme agissant selon une cohérence et une rationalité scientifique pour lui accorder différents modes de pensées et de rationalités qui fonctionnent de façon simultanée. En effet, les RS se nourrissent de différents modes de connaissance : scientifique, idéologique, mythes… Cette question de la connaissance mérite donc qu’on lui attache de l’importance.1 On peut définir les représentations sociales comme “un ensemble de croyances, d’images, de métaphores et de symboles collectivement partagés par un groupe, une communauté, une société ou une culture” (Wagner, 1994a, p. 199). Les RS contiennent donc entre autres des attitudes, mais pas seulement. En effet, les attitudes sont statiques, alors que l’approche des RS envisage le changement (Billig, 2004). De même, les attitudes sont individuelles alors que les RS s’appuient sur un savoir social (Howarth, 2006).

8Cependant cette définition des RS met l’accent sur le contenu des RS. Or, elles renvoient aussi à des processus sociaux, puisque les RS se construisent et se transforment au sein des groupes sociaux, sont partagés par les membres d’un groupe, et construisent leur réalité sociale. Les RS sont donc tout à la fois des contenus et des processus, on peut les considérer comme des pensées en mouvement (Markova, 2007).

  • 2  Il va de soi que nous ne considérons pas ici qu’une analyse des RS à travers le discours remplace (...)

9Il nous reste à envisager le lien entre représentations sociales et pratiques. Une synthèse est proposée par Abric (2003) sur la base de recherches empiriques. Il considère le lien entre RS et pratiques de manière dialectique, autrement dit, les représentations déterminent les pratiques, et les pratiques déterminent les représentations. En effet, on peut considérer que les RS causent les pratiques, mais on peut aussi imaginer que des pratiques nouvelles, dues à des changements extérieurs, vont amener un changement des RS (Rouquette, 2000). Cependant, comme le notait Moscovici (1976, p. 47) dans son étude princeps : « si une RS est une préparation à l’action elle ne l’est pas seulement dans la mesure où elle guide le comportement, mais surtout dans la mesure où elle remodèle et reconstitue les éléments de l’environnement où le comportement doit avoir lieu. » Ainsi, les RS doivent être envisagées davantage comme des structures symboliques qui relient le comportement et le stimulus et non pas comme une structure cognitive qui intervient entre le stimulus et le comportement (Wagner, 1994b). Pour le dire plus simplement, on peut considérer que les pratiques font partie des RS tout comme c’est le cas du discours des individus. Donc, pour étudier les RS, on peut tout autant s’intéresser aux pratiques des individus, qu’à leur discours. Mais cela implique également que si l’on s’intéresse aux RS à travers le discours, on peut accéder, au moins en partie, aux significations des pratiques.2

Rapports de l’Homme à la nature : une dimension culturelle

10Les RS ne se construisent pas dans un vide social, elles viennent s’ancrer dans un déjà-là, autrement dit dans un contexte socioculturel et historique. Ainsi, le paradigme des RS considère l’Histoire - et plus précisément la reconstruction du passé, c’est-à-dire la mémoire collective - comme « un arrière-fond de savoirs partagés qui…/… permet à ses membres d’interpréter et de rendre familières les données nouvelles rencontrées dans le cours de la vie quotidienne comme dans l’environnement matériel, social et mental » (Haas et Jodelet, 1999, p. 112). De façon plus générale, le lien entre culture et représentations sociales est souvent évoqué. Le lien est plus qu’une simple causalité linéaire, la culture peut ainsi être utilisée comme cadre d’interprétation, comme cadre symbolique et matériel d’émission des conduites, comme éléments de structuration des rapports au monde (Jodelet, 2006). Par ailleurs, le rapport que nous entretenons à la nature est un rapport historiquement (Moscovici, 1968) et culturellement situé (Descola, 2005). Il ne saurait être question ici de présenter cette évolution de notre rapport à la nature. Néanmoins, certains éléments méritent d’être rappelés.

11Au sortir du Moyen-âge, la philosophie des Lumières a contribué à désacraliser la nature, en diffusant l’idée que ses principes répondaient à des lois mathématiques et physiques que l’Homme pouvait et devait découvrir. La Science devient alors la technique d’exploitation de cette machine nature (Lenoble, 1969). L’Homme revendique ainsi l’existence d’une âme pour lui seul. Et il se positionne en tant que « maître et possesseur de la nature » (texte de la Genèse, Bible). Pour simplifier, le rapport entre les Hommes et la nature était considéré de manière anthropocentrée : la nature est au service de l’Homme, il la domine et lui est extérieur. Avec la théorie de Darwin, et avec le développement de l’écologie en tant que discipline scientifique, ce rapport est remis en cause, l’Homme devient un des chaînons de l’évolution, il devient partie intégrante de la nature, participe de certains écosystèmes comme d’autres espèces. Le rapport à la nature devient écocentré. L’augmentation des traités internationaux pour l’environnement atteste de ce changement de représentation du rapport à la nature (Franck, 1997). En effet, la notion d’écosystème amène à envisager la planète comme un système qu’il faut protéger de manière globale. Toutefois, ces deux visions du rapport Homme-nature (anthropocentrée et écocentrée) coexistent encore aujourd’hui chez les profanes (Castro et Lima, 2001).

12De manière parallèle, la Science, dont on attendait qu’elle maitrise la nature, a déçu. Et on entretient aujourd’hui à son égard une relation ambigüe, car elle dénonce les risques qu’elle-même a créé, et dans le même temps elle reste la seule solution pour résoudre ces risques (Beck, 2003). Dans les années 70, la crise écologique a mis fin au rêve technocratique (Beck, 2003). La nature est devenue un équipement interne et sa destruction fait partie intégrante de la dynamique sociale, économique et politique. La pollution est le symptôme de cette crise écologique. Pour Beck, la notion de progrès apporte un certain éclairage à la crise écologique : elle devient un des défis techniques pour l’avenir et est inévitable.

13Ainsi, les problèmes écologiques sont souvent perçus « comme entrave ou comme trouble » dans le développement de nos sociétés (Baëta Neves Flores, 2000, p. 232). Cela fait d’eux une sorte d’handicap au progrès. Le lien entre écologie et économie est ainsi envisagé par différents auteurs et semble être en débat. Joussen (1995) considère ainsi qu’il existe un lien entre le développement de la société de consommation et la crise écologique. Ce qui caractérise cette société, selon lui, c’est son système de valeurs, le travail ne donne plus de sens à la vie, il donne de l’argent pour consommer ce qui fait de la consommation un habitus. Il existerait différents types de consommation, ayant des conséquences différentes sur l’environnement, mais tous ayant des effets négatifs. Quant à Boiral (2004), il envisage le lien entre écologie et économie dans le monde de l’entreprise. Les deux hypothèses, win-win (produire de façon plus écologique est plus économique) et win-loose (produire de façon plus écologique fait perdre de l’argent), qui caractérisent le lien entre écologie et économie ne sont en fait pas contradictoires. Elles permettent de prendre en compte les différents aspects d’une même réalité. Ainsi, si la mise en place de méthodes de production moins coûteuses en énergie a un impact positif à long terme pour l’entreprise, ce lien n’est pas toujours évident.

14Il nous semble intéressant d’utiliser ici une distinction proposée par Habermas (1987). Il différencie deux mondes :

  • le monde systémique qui est celui du pouvoir, de l’argent et qui ne passe pas par le langage mais par la contrainte muette ;

  • le monde vécu qui passe par le langage et qui concerne l’art, la science, le droit, la morale...

15Bien entendu ces deux mondes coexistent dans le discours et les pratiques des individus. Et l’un comme l’autre sont nécessaires à la vie de l’Homme. Prenons l’exemple de l’argent : il permet de dégager l’activité humaine d’une activité langagière permanente. Mais ces deux mondes essaient aussi de s’infiltrer l’un l’autre : par exemple l’argent se retrouve dans tous les rapports, même ceux de la famille ou de l’art par exemple. On assiste donc à une sorte de conflit entre ces deux mondes où chacun essaie de prendre le dessus.

16En quoi cela nous intéresse-t-il ? Cette tension entre monde vécu et monde systémique s’illustre, entre autres, par le conflit entre écologie (en tant que science, mais aussi en tant que politique) et la logique de marché, c’est-à-dire entre écologie et économie. Les individus reçoivent donc des messages paradoxaux : d’un côté ils doivent prendre soin de la nature, et d’un autre côté, ils sont poussés à consommer, manière d’assurer une bonne santé économique au pays. Ce conflit interne à la société se retrouve probablement dans la manière dont les individus vont se représenter l’écologie et l’économie, et dans leurs pratiques. Nous noterons aussi la différence de transmission : l’écologie se transmet par le langage alors que les normes économiques s’imposent par la contrainte muette.

17Ces quelques remarques nous permettent d’ancrer notre questionnement relatif au lien entre représentations sociales et pratiques écologiques dans son contexte et d’apporter déjà des hypothèses sur le sens de l’écart entre discours et pratiques à travers la mise en évidence de ces oppositions entre écologie et économie, mais aussi entre rapport anthropocentré et écocentré à la nature.

18Aussi, nous nous posons les questions suivantes : dans un contexte où l’écologie s’oppose à l’économie et à la technologie, comment se construisent et s’organisent les RS de la pollution ? Quel éclairage cela apporte-il sur les significations accordées aux pratiques écologiques ? Quel est le rôle des différents rapports présents et passés à la nature ?

Méthodologie

Profil de la population

19La population interrogée correspond à des étudiants de lettres et langues et de sciences humaines d’une université française. Notre intérêt portant sur le savoir du sens commun et non pas sur le savoir des experts, nous prenons soin ainsi d’exclure de notre population des écologues ou des économistes. Nous n’avons pas cherché à interroger des militants écologistes, et aucun de nos sujets ne fait partie d’une association écologiste.

  • 3 Les comportements évalués étaient : le tri, l’utilisation de la voiture, les comportements de conso (...)

20Ce choix corrobore l’étude de Schuster (2003). Il donne des résultats surprenants en ce qui concerne la variable âge des individus. Ainsi, si ce sont les jeunes qui ont les attitudes les plus favorables envers la protection de la nature, ce sont aussi les jeunes qui ont les comportements les plus néfastes3. La population jeune semble donc être celle pour laquelle le gap entre comportement et attitude est le plus important, et cela confirme le choix de la population interrogée. La moyenne d’âge est de 21,7 ans.

Usage des focus groups

21Comme le rappellent justement Wilbeck et al. (2004, p. 235), « les représentations sociales sont constituées dans et par le langage, le discours et l’action au sein de ce que Moscovici a appelé la société pensante ». Il nous semble donc important d’observer en quelque sorte cette « société pensante », ce d’autant plus que la protection de la nature est un objet social tant par son apparition, son extension, que par sa manière d’être traitée. Cela implique de créer une situation qui reproduise une sorte de microsociété pensante au sein de laquelle on puisse retrouver le même type de communication qui conduit à la construction d’une représentation sociale.

22Les focus groups constituent en cela une méthodologie intéressante. Il s’agit de discussions de groupe organisées dans le but de cerner un sujet et dans lesquelles le focus, point de focalisation, est maintenu par le chercheur (Kitzinger et al. 2004). Les participants y confrontent leurs idées, « construisent de nouveaux sens et transforment une réalité en une autre » (Markova, 2004) par le biais de la communication. Les focus groups permettent donc d’observer les représentations sociales dans leur dynamique de construction. Ainsi, pour Markova (2004) contrairement à un questionnaire, les focus groups permettent de révéler, entre autres, l’importance des questions évoquées, leur pertinence aux yeux des participants, les raisons de leurs réponses, les liens avec d’autres problèmes de pertinence et la compréhension de leur mode de pensée.

23Enfin, travailler à partir de production de groupes nous semble nécessaire dans la mesure où la protection de la nature est perçue comme une norme sociale (Barr, 2003). Le groupe devrait permettre d’activer cette norme de façon à ce que son rôle puisse être déterminé. Le contexte de groupe peut également favoriser un discours qui s’éloigne de cette norme, les participants ayant le sentiment d’être soutenu par les autres (Kitzinger et al. 2004).

Des dilemmes comme stimuli

24L’usage des focus groups doit donc répondre à deux objectifs principaux : reproduire une microsociété pensante proche de la réalité sociale et favoriser le discours des sujets. Aussi, nous proposons aux sujets des dilemmes. Comme ils ne contiennent pas de solutions vraies, le débat est possible et autorisé. Les sujets doivent alors argumenter, expliquer leur position, et donc effectuer des cadrages des situations (Salazar Orvig & Grossen, 2004). Pour maintenir cet espace de débat, les sujets seront invités à discuter des dilemmes sans nécessairement tomber d’accord sur une solution. Pour que tous les sujets puissent prendre la parole et participer au débat, nous fixons le nombre de participants par groupe entre 4 et 5 (Morgan, 1997). Six focus groups ont été conduits.

25Les dilemmes reprennent les oppositions que nous avons notées à travers l’analyse du contexte socioculturel : ils mettent en scène différentes pollutions, tout en opposant des enjeux écologiques à des enjeux économiques et tout en mettant l’accent plus ou moins fortement sur des aspects technologiques. De plus, ils sont issus de situations réelles, et reproduisent donc en quelque sorte la réalité sociale. Ci-dessous figure un exemple de dilemme.

Les meubles en bois exotiques sont considérés par les économistes comme un produit de grande consommation et ils tiennent une place importante au niveau de l’import-export. De plus, de nombreuses populations brésiliennes ont trouvé dans ce marché de quoi vivre.

Cependant, les écologues s’accordent sur le fait que ce marché est un danger pour la forêt amazonienne. En effet, les populations locales utilisent les terres déboisées pour développer l’agriculture et ne reboisent donc pas suffisamment. Le « poumon vert de la terre » est donc en danger.

Alors que faire ?

26Enfin, les dilemmes sont construits de manière à mettre en scène des pollutions « locales » ou des pollutions « globales ». L’objectif est ici de comprendre dans quelle mesure l’une ou l’autre de ces pollutions apparaît plus importante ou plus dangereuse, mais également de comprendre dans quelle mesure les sujets adoptent une vision écocentrée (perception de la Terre comme d’un écosystème dont l’Homme fait partie et dont tous les éléments sont interdépendants). La manipulation de cette variable renvoie également aux travaux sur l’effet de l’implication des sujets sur les représentations sociales des risques (Gruev-Vintilla et Rouquette, 2007). Une autre variable a été retenue dans la construction des dilemmes. Il s’agit du statut des personnes défendant les arguments dans les dilemmes. L’objectif est de saisir la crédibilité accordée aux experts (économistes et écologues) et aux associations dans un tel débat. L’effet de cette dernière variable ne sera pas analysé ici. Le tableau ci-dessous donne des exemples retenus pour chaque cas.

Tableau 1. Construction des dilemmes

Tableau 1. Construction des dilemmes

27La discussion autour des dilemmes devait permettre de comprendre comment est perçue la pollution et de situer la place des pratiques individuelles dans les solutions discutées. En effet, chaque dilemme invite de manière implicite à envisager les pratiques écologiques individuelles sous l’angle des solutions.

28Après les discussions autour des dilemmes, le modérateur a projeté un petit film : sorte de dessin animé mettant en scène un homme qui jette ses déchets dans une rivière et qui les reçoit en retour lorsqu’il prend sa douche. Ce film devait permettre au groupe d’aborder plus concrètement la question des pratiques écologiques individuelles.

29Pour finir, les personnes répondaient à un court questionnaire sur leurs pratiques écologiques telles que le tri, la consommation d’eau, la consommation de produits jetables…

30Enfin, les entretiens ont été entièrement retranscrits et ont fait l’objet d’une analyse dialogique de contenu (Markova, 2004). Ce type d’analyse permet de prendre en compte ce qui fait l’intérêt des focus groups : l’interaction, la co-construction de sens. Les différentes démarches de l’analyse sont les suivantes :

  • en premier lieu, nous avons dressé la liste des thèmes successifs abordés par les participants. C’est le point de départ d’une analyse de contenu, et cela fournit une bonne représentation des thématiques du corpus (Markova, 2003 ; Flick, 2006) ;

  • dans un second temps, nous avons pris en compte et le contenu et la dynamique du groupe. Pour cela, nous nous sommes appuyés sur les outils théoriques des dynamiques de groupes en psychologie sociale (Aebischer et Oberlé, 1998).

31Cela signifie que nous avons répondu à des questions concrètes comme : quel argument sert quelle idée ? Quel type de savoir est utilisé ? Qui cherche à influencer qui ? Les opinions changent-elles ? Un consensus s’établit-il ? Y’a-t-il formation d’une norme ? Une influence minoritaire ? Etc. Le niveau d’analyse était double : cheminement du groupe et cheminement de chaque participant.

32Ces différentes étapes nous ont amenés à considérer notre corpus sous deux angles d’analyse : en premier lieu, chaque discussion était considérée comme un tout. Puis, nous avons comparé les manières dont les différents groupes ont discuté des différents stimuli. Cela nous a permis de relever des similitudes et des différences que nous avons interprétées dans le cadre de l’approche des représentations sociales. Nous présentons ici les résultats issus de cette analyse. Cette présentation ne se veut pas exhaustive, la richesse des focus groups et de leur analyse ne nous y autorise pas. En revanche, nous mettons l’accent ici sur les processus et les modes de construction des RS que nous avons pu dégager, et qui apportent un éclairage nouveau par rapport aux recherches sur les attitudes et les comportements. Ces résultats nous amèneront ainsi à discuter les significations accordées par les groupes aux pratiques.

Résultats

33Pour commencer, observons quel rapport à la nature est présent dans le discours des différents groupes. Dans l’extrait suivant, on retrouve l’idée implicite d’une vision écocentrée de la nature. Cet extrait fait écho à l’étude de Franck (1997) qui montre que la notion d’écosystème amène les pays à envisager les solutions de manière internationale :

G4I4Sinui : Beh là c’est pareil il faudrait faire une loi mondiale qui interdit d’utiliser le mercure. Parce que si tu la fais qu’en France on va délocaliser et puis les piles après elles seront importées.

…/…

G4I3Sinui : Beh si il faut essayer d’empêcher la production de mercure, de faire des piles au mercure et des thermomètres au mercure. Au moins essayer le plus possible mais de toute façon c’est comme tout y’en a qui vont se frotter les mains en disant bon beh on en profite, du coup ceux qui vont se faire avoir ils vont être dégoûtés de se faire avoir donc

G4I4Sinui : Et puis ils verront que les Inuits y’en a plus.

G4I3Sinui : Que ça change rien pour les Inuits donc finalement pourquoi pas en profiter aussi.

34Nous pouvons donc observer que l’idée de faire des lois internationales se retrouve dans le sens commun. Mais, si la notion d’écosystème est ici implicite, les raisons avancées par le groupe pour légitimer des lois internationales repose sur des théories psychologiques dites naïves. Cet extrait illustre parfaitement pourquoi l’approche des RS nous invite à nous intéresser au savoir des profanes. Mais qu’en est-il alors de cette vision écocentrée ? La retrouve-t-on tout de même de manière explicite ?

35De manière générale, l’analyse des entretiens montre que les individus n’adhèrent pas à une vision stable du rapport Homme-nature comme semble le montrer certaines études (voir pour exemple Castro et Lima, 2001, ou Steg et Sievers, 2000). Cette vision semble plus dynamique et nous avons pu observer un effet de la variable type de pollution (locale ou globale). En effet, tous les groupes ont évoqué à un moment ou à un autre le fait qu’un risque local entraînerait des conséquences globales. Tous les groupes semblent donc adopter une vision écocentrée du rapport Homme-nature, l’Homme faisant alors parti d’un tout plus large. Cependant l’analyse des dilemmes présentant des risques globaux infirme ce résultat. En effet, face à une pollution globale les différents groupes ne montrent que rarement une préoccupation pour eux-mêmes. Ainsi, la déforestation de la forêt amazonienne ne semble pas les alerter sur le manque d’oxygène. La vision écocentrée n’est donc pas retenue dans les cas d’une pollution énoncée comme globale, les individus lui préférant une vision plus anthropocentrée qui leur permet de s’exclure des risques.

36Il y aurait donc deux mécanismes différents dans la représentation de la pollution :

  • un premier, centrifuge : « ce qui me touche moi être humain, touche aussi mon environnement » ;

  • un second, centripète : « ce qui touche mon environnement me touche aussi moi-même ».

  • 4  Bien-sûr les risques d’une pollution locale sont importants aussi : certains évoquent le fait d’av (...)

37Ce second mécanisme à l’œuvre dans la perception de la pollution semble plus difficile à suivre, probablement de part son coût émotionnel plus élevé. En effet, si le premier mécanisme aboutit souvent à une sorte de dilution de la pollution, le second au contraire aboutit souvent à la remise en cause de l’existence de l’être humain sur Terre.4

  • 5  La signification des codages pour les citations se trouve en annexe, tableau2.

G6I4Dmix5 : on va tous mourir dans des conditions atroces

38Ou encore

G6I4Dfilm : Parce que on le dit, enfin moi je sais même plus dire c’est quand la première fois on m’a dit si on fait pas attention on va plus vivre sur la terre. Ça m’a traumatisé quand on m’a dit ça parce que ... quand on est petit on s’imagine que la vie est belle et qu’on vivra toujours sur, qu’on aura des enfants qui auront des enfants neinnein et tout ça enfin que la vie s’arrêtera jamais sur terre. Et un jour on te dit mais... on est en train de massacrer la planète.

39Cette différence entre un mécanisme centripète et un mécanisme centrifuge montre comment le sens commun fait appel à la fois à des rapports plus anciens à la nature (anthropocentrisme) et à des nouvelles connaissances écologiques (écocentrisme) pour se représenter la pollution. Ces deux visions sont opératoires dans la perception des risques écologiques puisqu’elles permettent de réduire le risque perçu : soit en s’excluant de l’écosystème, soit en diluant la pollution dans l’écosystème. La proximité de la pollution a donc bien un effet sur la RS et ce résultat va dans le même sens que ceux de Baggio et Rouquette (2006) sur l’effet de l’implication.

  • 6  Le terme dichotomie est utilisé ici à la place de la notion de thêmata (Moscovici et Vignaux, 1994 (...)

40Cette représentation dynamique du rapport Homme-nature nous amène à considérer les mécanismes de construction des représentations de la pollution comme des processus qui varient non seulement entre les différents groupes mais même au sein d’un même groupe à des moments différents. On peut alors se demander comment évoluent les significations des pratiques écologiques. L’analyse des discussions de groupe a mis en évidence l’existence de deux grandes dichotomies6 qui organisent et structurent les RS de la pollution. Ces deux dichotomies sont utilisées dans tous les groupes, avec cependant quelques nuances qui colorent la représentation, et donnent des significations différentes aux pratiques écologiques.

Visible ou invisible : une première dichotomie

La pollution ça se voit

41La notion de pollution prend sens pour les sujets surtout à travers un des cinq sens : la vision. Ainsi les exemples cités spontanément par les sujets dans les différents groupes renvoient la plupart du temps à des pollutions visibles : le verre en plastique, les emballages multiples, le mégot de cigarette, le petit papier qu’on laisse traîner…

42Par ailleurs, les pollutions moins visibles acquièrent une certaine importance en le devenant : un groupe évoque ainsi le fait que, lors des inondations, les déchets (type sacs plastiques) qui étaient au fond du fleuve remontent et s’accrochent dans les branches d’arbre. Ce spectacle est saisissant parce qu’il ramène à la vue la pollution qui se trouve dans le fleuve :

G3I2Dfilm : C’était laid de partout y’avait tout qu’avait remonté et là t’hallucines tu te rends vraiment compte du truc quoi.

43D’autres pollutions sont évoquées qui ne se voient pas toujours : la pollution de l’air par exemple. Mais il s’agit là d’une pollution qui va également devenir visible à certains moments : par exemple le groupe 2 parle du nuage que l’on voit au-dessus de Grenoble quand on est à la montagne. La vision semble donc jouer un rôle primordial dans la manière de rendre concrète la pollution, et ce de manière transversale à tous les groupes.

44Dans notre corpus, la vision semble être le seul sens qui est mobilisé par la pollution. Même pour la pollution de l’air, une interviewée dit en comparant l’air de la montagne et l’air de la ville : Et tu vas à la montagne tu vois l’air frais, direct tu vois la différence franchement. (G3I2Dfilm).

Tout ce qui se voit peut devenir pollution

45On pourrait penser que l’effet révélateur de la vision en ce qui concerne la pollution restreint la pollution perçue. En effet, comment est-ce que la pollution de la couche d’ozone pourrait être visible ? Et pourtant c’est l’inverse qui se produit. Comme le montre l’exemple ci-dessous, l’apport de nouvelles connaissances sur la pollution (notamment à travers les média) va entraîner une réinterprétation de ce que l’on voit à travers la notion de pollution. C’est le cas de la fumée qui peut faire partie intégrante du paysage pour un enfant :

G3I2Dfilm : C’est comme les centrales nucléaires quoi enfin chez moi y’en a plein. Donc je connais bien ça et c’est vrai que sur le coup moi quand j’étais petite je voyais ces longues cheminées qui font la fumée et je croyais que c’était des nuages tu vois dans ma tête ça créait des nuages.

46Certes, cet exemple est extrême, mais il illustre bien l’idée que ce que l’on voit depuis toujours va être réinterprété en fonction de connaissances nouvelles. Pour reprendre l’exemple du nuage au-dessus de la ville de Grenoble, il devient la réalité visible de la pollution de l’air, alors qu’il n’était que brouillard auparavant.

47Aussi, la pollution est perçue comme omniprésente : elle est partout même là où on ne la voit pas. Elle peut surgir à n’importe quel instant : nous sommes dedans. Une interviewée dit à ce sujet :

G3I2Dfilm : C’est tellement à long terme et c’est, et nous on est né y’avait la pollution, quand on sera plus y’aura de la pollution et ça continue et du coup on sent pas les effets visibles tous les jours tu vois.

48Toutes les activités humaines deviennent polluantes : un des groupes après avoir évoqué la fumée qui sort des usines, dit que le feu que l’on fait chez soi pour brûler des herbes pollue également et qu’il faut lui préférer le compostage. Dans ce contexte où la pollution ça se voit, quelle signification accorde-t-on alors aux pratiques ?

Ce qu’il faut protéger : le beau

49De manière générale, si la vision est dans tous les groupes le seul sens mobilisé par la pollution, cela s’explique probablement bien par le fait qu’un des premiers objectifs de protection de la nature était la protection des paysages (Falter, 2001). Cette hypothèse se confirme notamment à travers le discours des deux groupes qui insistent le plus sur cette dichotomie.

50Dans ces deux groupes, la dichotomie visible/invisible organise peu à peu l’ensemble de leur discours et elle va aboutir à une structure hiérarchique du « tout pollue » : jeter son papier en ville par exemple est moins grave que de le jeter en campagne.

51Cette différence ville-campagne vient révéler que tous les endroits ne méritent pas la même attention en ce qui concerne la pollution et donne donc du sens à la dichotomie visible/invisible. La nature à protéger n’est donc pas l’ensemble de la terre : il s’agit d’endroits particuliers comme par exemple la campagne où l’on aime se promener. Ainsi, une interviewée explique qu’elle fait partie d’un groupe qui ramasse dans la montagne, à la fin de la période de ski, les déchets que les gens ont laissés sur les pistes. Il faut voir dans ce comportement la volonté de préserver un endroit qui lui est cher : le village de sa famille.

Pollution franche/pollution non franche

52Une typologie des pollutions va alors s’élaborer autour de cette dichotomie visible/invisible, dans deux groupes pour qui cette dichotomie est plus longuement débattue. Les sujets construisent une sorte d’échelle de ce qui est une pollution importante ou non, le critère étant la protection des paysages, la protection du beau. Ainsi, un des groupes va chercher à déterminer ce qu’est une « pollution franche », il s’en suit la discussion suivante

G4I4Dfilm : Tu balances des trucs par la fenêtre.

G4I3Dfilm : de jeter un truc par la fenêtre ou alors d’acheter un truc qui sera jeté par exemple d’avoir un sac plastique qui pollue.

G4I2Dfilm : Mais genre utiliser ta voiture c’est polluer franchement ?

G4I4Dfilm : ... Ben non parce que c’est pas entraîner des

G4I3Dfilm : Beh moi je trouve que si, mais après c’est vrai

G4I4Dfilm : Beh la voiture c’est pas polluer franchement, enfin c’est ta voiture

G4I3Dfilm : Beh c’est ce qui pollue le plus non.

G4I4Dfilm : Ben entre le fait de balancer ta cannette et la laisser dans ta voiture pour la balancer à la poubelle quand t’iras chez toi c’est pas très dur, ou le fait que tu prends ta voiture c’est vraiment, enfin t’as une excuse quoi.

G4I3Dfilm : Mais je pense que y’a même pas de comparaison à faire mais ... enfin ouais y’a pas de comparaison à faire

G4I4Dfilm : Mais franchement c’est plus sur le truc que tu ferais pas chez toi, enfin

G4I2Dfilm : Ouais le truc.

G4I4Dfilm : Tu le ferais pas chez toi enfin tu enfin t’aimerais pas qu’on te fasse ça qu’on te balance des cannettes dans ton jardin.

G4I2Dfilm : La voiture t’as pas vraiment le choix, enfin tu choisis pas de polluer tu choisis de prendre ta voiture alors que là.

53La pollution franche, ou directe, renvoie donc à la pollution de l’environnement au sens de notre environnement physique et concret : « tu le ferais pas chez toi ». Dans ce contexte, prendre la voiture n’est pas une pollution franche dans le sens où il s’agit d’une pollution abstraite : elle n’a pas d’effet visible immédiat sur la beauté des paysages. Notons toutefois que tous les sujets du groupe n’adhèrent pas avec le même enthousiasme à cette hiérarchie des pollutions. Notons également que cette dichotomie franche/non franche est possible dans deux groupes parce que les sujets ne se sentent pas vraiment touchés par la pollution « non franche » :

G3I4Dfilm : c’est difficile de montrer une image de quelqu’un tu vois d’un mec d’une société occidentale enfin d’un pays riche, vraiment qui souffre de la pollution.

54Quand la dichotomie visible/invisible fait débat, une autre dichotomie apparaît (franche/non franche) qui réduit les pratiques écologiques individuelles qui sont utiles et efficaces aux pratiques individuelles de protection de l’espace de vie, de son environnement physique et concret. Mais cette dichotomie amène également à considérer les acteurs comme ayant peu de contrôle sur leurs pratiques (« t’as pas vraiment le choix »).

55Résumons ces premiers résultats. Une première dichotomie qui structure les RS de la pollution renvoie au visible/invisible. Lorsque celle-ci est actualisée dans la discussion, les pratiques écologiques deviennent avant tout une manière de protéger ce qui est beau. Mais l’importance de la vision, au lieu de réduire ce qui est perçu comme pollution, aboutit rapidement à l’idée que tout pollue. Lorsque les groupes cherchent alors à hiérarchiser la pollution, une seconde dichotomie est mobilisée qui distingue les pollutions franches, qui touchent l’environnement immédiat, et dont on est responsable, et les pollutions non franches, pour lesquels on souligne l’absence de marge d’action des acteurs.

Riches/pauvres : une deuxième dichotomie

Inéquité et culpabilité

56Dans tous les groupes, on a observé une sorte de dilution de la pollution : elle est là depuis toujours et pour toujours, tout pollue ou contribue à la pollution… Néanmoins tout le monde n’en souffre pas pour autant de la même façon.

57En fait la pollution vient s’ancrer pour les sujets dans la représentation d’une société où les riches exploitent les pauvres et la nature, avec l’idée que ce sont les pauvres qui souffrent davantage de la pollution. Il n’y a pas de consensus intergroupes sur qui provoque quoi : est-ce la pollution qui provoque la misère sociale ? Ou bien la misère sociale qui provoque la pollution ? Néanmoins le lien entre les deux existe et il est très fort : ce ne sont jamais les personnes qui polluent qui vont en subir les conséquences. Ce sont toujours d’autres personnes : les générations futures, ou bien un autre peuple.

58La pollution est donc interprétée en fonction de certaines normes communément partagées : celles d’une justice universelle avec en arrière-plan le faisceau des croyances en les droits de l’Homme (Moscovici, 2005). En effet, pour Moscovici (2005), la notion de responsabilité collective qui découle de la Shoah et s’appuie sur la déclaration universelle des droits de l’Homme caractérise notre société. Ainsi, dans un des groupes, le fait de travailler dans une usine polluante est comparé au travail des conducteurs de train en partance pour les camps de concentration. Il s’agit là d’une métaphore très forte qui illustre parfaitement cette notion de responsabilité collective :

G2I3Dloc : Beh oui en tant qu’employé soit tu... sans être forcément militant dans l’âme sois tu te positionnes beh tu t’intéresses quand même parce que c’est sûrement l’eau que tu vas boire aussi, soit tu fais pour caricaturer un peu comme les conducteurs de train qui ont déporté les juifs dans les camps nazis qui se posaient pas de questions. Je critique pas parce que il doit aussi y avoir des risques.

59Ce sentiment d’inéquité favorise les pratiques écologiques individuelles comme le montrent Montada et Kals (2000). L’analyse des focus groups indique qu’au-delà du sentiment d’inéquité, c’est davantage le sentiment de culpabilité qui conduit à des pratiques écologiques : Mais moi je lave pas ma voiture (G6I4Dfilm) affirme une interviewée comme pour excuser son premier comportement nocif pour l’eau, il y a aussi une interviewée qui considère qu’envoyer ses anciens téléphones portables en Afrique réduit la pollution qu’ils causent. Ici, les pratiques deviennent donc une manière de réduire un sentiment de culpabilité et d’inéquité. Néanmoins, il existe d’autres moyens de gérer ce sentiment d’inéquité comme le montre nos résultats. Il semblerait que ces autres solutions soient majoritairement retenues lorsque le sentiment de culpabilité est faible ou nul. Certains groupes précisent ainsi qu’il arrivera un autre malheur aux responsables de la pollution, rétablissant ainsi une sorte de justice :

G3I1Dmix : D’ailleurs la preuve c’est que les Inuits c’est pas les plus gros consommateurs de piles et puis ils en subissent les conséquences.

G3I2Dmix : Voilà.

G3I3Dmix : Mais nous on subira bien autre chose plus tôt que enfin ouais on a des en France on a des poubelles d’uranium enfouies sous.

G3I2Dmix : Ah mais oui ça c’est clair hein.

G3I3Dmix : Et beh là on en subira bien les conséquences avant que le mercure

60Enfin, le principe pollueur-payeur contribue également à réduire ce sentiment d’injustice et ne doit pas être négligé. Parmi les stratégies de réduction d’une inéquité perçue, les pratiques écologiques semblent être favorisées lorsqu’un sentiment de culpabilité lui est attaché. D’autres études mettent également en évidence l’importance du sentiment de culpabilité pour expliquer les pratiques écologiques (Fergusson et Branscombe, 2010).

Riches/pauvres : une façon de hiérarchiser la pollution

61Pour deux des groupes, une hiérarchie des pollutions va s’ancrer dans cette dichotomie riches/pauvres pour trouver une traduction en termes d’enjeu : luxe ou survie. En effet, la pollution qui est condamnée c’est celle qui est due au luxe, et qui s’oppose à la pollution qu’émettent certains peuples qui cherchent à survivre. La différence entre les deux prend donc une signification particulière. La solution la plus écologique est retenue immédiatement s’il s’agit d’un « problème de riches » et il n’y a pas de débats. Mais l’introduction de la question de la pauvreté va provoquer un discours plus long. Ainsi, pour le dilemme sur la déforestation (cité en annexe), l’enjeu perçu est véritable : la survie d’un peuple ou la déforestation. Cet enjeu est très différent des enjeux occidentaux de confort, de consommation. C’est ce que nous montre la citation suivante :

G5I4Dglo : Les forêts sont pillées, la population locale trouve son compte parce que bon beh même si pour nous ils sont payés une misère une peau de banane pour du moins ça leur permet de faire vivre leur famille et puis ils sont dans ce profil de survie et donc ils contribuent à la dévastation des forêts quoi. Mais bon ils sont dans un instinct de survie c’est un autre instinct c’est une autre motivation que la nôtre qui est la consommation.

62Les notions de responsabilité et de culpabilité sont fortes, et ce d’autant plus que les habitants de la forêt d’Amazonie sont considérés comme vivant en harmonie parfaite avec la nature. Aussi, si la forêt amazonienne est en danger le responsable c’est la société occidentale de consommation.

63Ce n’est donc pas tant l’ensemble du fonctionnement économique de la société qui est remis en cause mais davantage la satisfaction des besoins individuels de luxe. La solution, c’est de vivre en harmonie avec la nature, de satisfaire des besoins de survie. Les deux groupes parlent de retrouver « sa véritable nature d’Homme » :

G5I4Dfilm : On est des consommateurs et puis à force de consommer on se détruit aussi soi. On se détruit déjà ne serait-ce que dans sa nature d’Homme et puis du coup beh ça se fait au détriment d’autre chose.

64Les solutions apportées aux différents dilemmes dépendent alors largement de la manière dont la pollution est perçue : s’il s’agit d’une pollution due au luxe, les pratiques écologiques individuelles seront privilégiées. Elles deviennent alors une manière de s’opposer à la société de consommation et de retrouver en quelque sorte sa « vraie nature d’Homme ». Cependant, quand des enjeux de survie sont présents, le groupe aura tendance à privilégier des solutions qui font intervenir la loi ou l’État, solutions que l’on retrouve dans tous les groupes.

65Résumons à présent ces résultats. La dichotomie riches/pauvres structure les RS de la pollution dans les discussions que nous avons menées. Elle renvoie à l’idée que les riches polluent tandis que les pauvres en souffrent et crée ainsi un sentiment d’inéquité. Ce sentiment d’inéquité trouve différentes solutions, et les pratiques écologiques individuelles sont favorisées si un sentiment de culpabilité lui est attaché. Mais cette dichotomie riches/pauvres permet à certains groupes d’envisager également les différences des styles de vie, accordant ainsi aux pays pauvres une plus grande proximité avec la nature. Les pratiques écologiques deviennent dans ce sens une manière de se détacher de notre société de consommation, afin de retrouver notre « vraie nature ».

Discussion

66L’objectif de cet article était de saisir les significations accordées aux pratiques écologiques en nous intéressant aux représentations sociales de la pollution. La prise en compte du contexte socioculturel nous a amené à mettre en place des dilemmes structurés par l’opposition entre écologie et économie. En observant la dynamique et le contenu des discussions de groupe, on a pu mettre en évidence un certain nombre de dichotomies qui structurent les RS de la pollution. De même, ces dichotomies amènent les participants à donner du sens à leurs pratiques. Enfin, certaines dichotomies ont été exploitées plus amplement par certains groupes, donnant ainsi des significations plus marquées aux pratiques.

67En revanche, deux autres groupes n’ont pas insisté sur l’une de ces dichotomies. En effet, ces deux groupes, dont les RS de la pollution sont structurées par les mêmes dichotomies, ont insisté davantage sur les aspects économiques de la société et leurs contraintes pour l’individu. Dans ce contexte, les groupes soulignent l’absence de liberté perçue pour leurs pratiques.

68Les pratiques écologiques individuelles ont donc des significations communes pour tous les groupes, néanmoins les groupes en mettant l’accent ou non sur une des dichotomies vont accentuer certaines significations. La figure 1 résume ces résultats

Figure 1. Synthèse des résultats

Figure 1. Synthèse des résultats

69Ces différences entre les groupes sont à mettre en lien avec des représentations économiques que nous n’avons pas abordées ici. Ainsi, les représentations écologiques et les représentations économiques forment un tout cohérent, un système de pensées et d’actions qui donne du sens aux pratiques. Une même pratique peut ainsi avoir des sens différents, en fonction du contexte. Nos résultats ne visent pas une portée prédictive générale, mais seulement locale, comme nous y invite la théorie des RS (Moscovici, 2001). Ainsi, ils soulignent que les pratiques écologiques, tel que le tri, les économies d’eau ou d’énergie, sont portées également par d’autres motifs que la protection de la nature ou de l’environnement, comme la préservation d’un espace, l’opposition à une société de consommation, la réduction d’un sentiment d’inéquité et de culpabilité. Ces motifs peuvent être pluriels pour une même pratique et dépendent du contexte. Ainsi, ces résultats soulignent qu’une des limites de l’approche attitudes/comportement est de restreindre les motifs des comportements écologiques à celui de protection de la nature.

70Par conséquent, en montrant les dynamiques par lesquelles certaines dichotomies sont mobilisées, on peut apporter des pistes de réflexion pour des campagnes de sensibilisation qui prennent en compte le savoir et les représentations des profanes, les motifs de leurs pratiques. Bien sûr, ces résultats que nous avons présentés ne se veulent pas exhaustifs, le nombre de focus groups menés mériterait d’être plus important, d’autres méthodes pourraient compléter ces résultats. Néanmoins, ils sont une invitation à s’intéresser au savoir des profanes, non pas comme un savoir irrationnel, mais comme un système de représentations organisé et structuré selon des lois qui lui sont propres.

71Si nos résultats rappellent que la manière de percevoir les rapports Homme-nature change pour un même groupe (et pour un même individu) en fonction du contexte, ils avancent néanmoins l’idée selon laquelle la vision écocentrée permet de dissoudre les risques dus à une pollution locale, et la vision anthropocentrée permet de s’exclure d’une pollution globale. Ce dynamisme est efficace puisqu’il permet au sens commun de minimiser un risque perçu comme trop important. Il nous semble que ce résultat constitue également une piste de recherche intéressante sur la manière de faire face aux risques.

Remerciements

72Je tiens à remercier en premier lieu l’ensemble des étudiants qui ont consacré un peu de leur temps à cette recherche en acceptant de participer aux entretiens. Je remercie également Nikos Kalampalikis pour ses conseils et sa relecture de cet article mais également de manière plus générale pour la direction de ce travail de recherche.

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Notes

1  Selon Kaiser et Fuhrer (2003), il faut différencier les connaissances déclaratives (savoir par exemple comment fonctionne un écosystème), procédurales (savoir comment on trie), effectives (savoir ce qu’il advient des déchets triés) et la connaissance des normes sociales (savoir que trier est socialement valorisé). Ils estiment que la plupart des recherches ne prennent en compte qu’une partie des connaissances.

2  Il va de soi que nous ne considérons pas ici qu’une analyse des RS à travers le discours remplace une analyse des pratiques (observation, etc.). C’est une méthode parmi d’autres.

3 Les comportements évalués étaient : le tri, l’utilisation de la voiture, les comportements de consommation et l’économie d’eau. Schuster (2003) émet l’hypothèse que les personnes dites âgées dans cette étude n’utilisent pas la voiture pour la simple raison qu’elles n’en possèdent pas, qu’elles consomment moins non pas dans le souci de respecter l’environnement mais pour des raisons financières ou par habitude... mais cela n’a pas été vérifié.

4  Bien-sûr les risques d’une pollution locale sont importants aussi : certains évoquent le fait d’avoir des enfants à un bras par exemple. Mais ils ne vont jamais jusqu’à remettre en cause toute existence humaine, or c’est cette éventualité là qui semble la plus préoccupante.

5  La signification des codages pour les citations se trouve en annexe, tableau2.

6  Le terme dichotomie est utilisé ici à la place de la notion de thêmata (Moscovici et Vignaux, 1994 ; Markova, 2007), et ce afin de rendre lisible ce texte à des lecteurs pour qui la théorie des RS, voire la psychologie sociale, n’est pas familière.

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Title Tableau 1. Construction des dilemmes
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Title Figure 1. Synthèse des résultats
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References

Electronic reference

Sabine Caillaud, « Représentations sociales et significations des pratiques écologiques : Perspectives de recherche », VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [Online], Volume 10 numéro 2 | septembre 2010, Online since 29 September 2010, connection on 22 May 2013. URL : http://vertigo.revues.org/9881 ; DOI : 10.4000/vertigo.9881

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About the author

Sabine Caillaud

Doctorante en psychologie sociale Groupe de Recherche en Psychologie Sociale, ATER à l'Université Paris Descartes. EA 4163 Université Lumière Lyon II 5 av Pierre Mendès France 69676 BRON cedex Sabine.Caillaud@univ-lyon2.fr

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