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CHAMBRE DES COMMUNES

Le vendredi 11 avril 1997


La séance est ouverte à 10 heures.

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Prière

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[Français]

QUESTION DE PRIVILÈGE

LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION-DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le vice-président: Chers collègues, je suis maintenant prêt à rendre une décision sur la question de privilège soulevée par l'honorable députée de Surrey-White Rock-South Langley, le vendredi 21 mars, à propos des actes qu'auraient faits des fonctionnaires du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.

Je tiens à remercier le leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, ainsi que l'honorable député de St-Albert pour leurs commentaires sur cette question.

[Traduction]

La députée de Surrey-White Rock-South Langley prétend que le matin du 21 mars des fonctionnaires du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration lui ont refusé l'accès à une séance d'information sur les changements apportés au Programme d'immigration des investisseurs. La députée prétend qu'en fournissant cette information aux médias avant de la fournir aux députés, le ministère a commis un outrage au Parlement et a porté atteinte à ses privilèges de députée.

J'ai examiné les faits qui entourent cet incident, et suite à mes consultations, voici ce que je comprends de cette affaire. Le bureau du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a fait parvenir un avis aux médias annonçant que le ministre tiendrait une conférence de presse sur le Programme d'immigration des investisseurs à l'amphithéâtre national de la presse le vendredi 21 mars, à 10 h 15. Il était précisé dans l'avis que la conférence serait précédée d'une séance d'information, à 9 heures, donnée par des fonctionnaires du ministère.

On m'a par ailleurs confirmé qu'on n'admet qu'un nombre limité de personnes aux conférences de presse qui se tiennent à l'amphithéâtre de la presse. Mais on m'informe que ce n'est pas le cas pour les séances d'information que les ministères y tiennent fréquemment. Enfin, on m'a dit que la séance d'information en question n'était pas «officielle», de sorte qu'elle ne serait pas diffusée à la télévision en circuit fermé de la Chambre des communes et, par conséquent, que les députés ne la verraient pas.

[Français]

Dans la présente affaire, la Présidence doit examiner deux questions. Je traiterai d'abord de la question de savoir s'il y a eu atteinte aux privilèges de la députée du fait que les fonctionnaires ministériels lui ont refusé l'accès à de l'information. J'examinerai ensuite son allégation que les actes du ministère constituent un outrage au Parlement.

[Traduction]

Lorsqu'un député s'est plaint le 1er décembre 1992 que le gouvernement avait fourni aux médias de l'information sur l'aide financière aux compagnies aériennes canadiennes alors que cette information avait été refusée aux députés, le président Fraser a jugé qu'il ne s'agissait pas d'une question de privilège (p. 14360 des Débats). Il a également rappelé à la Chambre que:

[. . .] on ne peut à bon droit soulever la question de privilège que lorsqu'il s'est produit une chose qui rend impossible ou presque impossible de s'acquitter des obligations que l'on a à titre de député.
Le 15 décembre 1987, un député s'est élevé contre le fait que le gouvernement avait prévu une séance d'information à huis clos pour la presse sur un projet de programme agricole et que cette séance n'était pas ouverte aux députés. Dans sa décision, qu'on trouve à la page 11788 des Débats, le Président a jugé qu'il ne s'agissait pas, à première vue, d'une question de privilège, puisque cela n'avait pas empêché le député de s'acquitter de ses obligations de député.

Dans la question soulevée par la députée de Surrey-White Rock-South Langley, la présidence n'a pas constaté qu'elle a été empêchée de s'acquitter de ses fonctions de député. En l'occurence, il n'était pas question d'accès aux délibérations parlementaires, que ce soit à la Chambre ou à la salle de réunion d'un comité. Et comme la députée l'a signalé dans son exposé, les fonctionnaires ont fini par lui proposer de lui donner la même séance d'information après la période des questions.

Sur la question d'outrage, permettez-moi d'abord de me reporter de nouveau à une décision du président Fraser, rendue le 10 octobre


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1989, et qui stipulait ce qui suit: «En gros, les outrages sont des délits contre l'autorité ou la dignité de la Chambre des communes.»

(1010)

Le fait que les médias aient obtenu de l'information avant que celle-ci ne soit fournie aux députés constitue-t-il un outrage à la Chambre des communes? Voici ce qu'on peut lire à la page 125 du chapitre neuf de la 21e édition de l'ouvrage d'Erskine May au sujet de la question d'outrage:

La Chambre poursuivra quiconque empêche les députés de s'acquitter de leurs obligations envers la Chambre ou de participer à ses délibérations.
Il me semble que les députés ne se sont pas vu refuser de l'information ni empêchés de s'acquitter de leurs fonctions parlementaires. Après tout, il y avait une conférence de presse de prévue ce matin-là, qui a été diffusée à la télévision en circuit fermé de la Chambre, de sorte que tous les députés y avaient accès. La présidence a du mal à se persuader que les actes en question consitituaient un outrage à l'autorité ou à la dignité de la Chambre.

Pour les raisons que j'ai évoquées et à la lumière des précédents en la matière, je considère qu'il n'y a pas, à première vue, atteinte aux privilèges de la députée.

La présidence n'a aucun contrôle sur ces activités, et elle ne devrait pas en avoir, que ce soit sur leur mode d'organisation ou sur la façon dont on en réglemente l'accès.

La députée de Surrey-White Rock-South Langley a peut-être un grief légitime, auquel elle pourra vouloir donner suite ailleurs, mais, en termes de procédure, la question est réglée, en ce sens qu'il ne s'agit pas d'une atteinte au privilège parlementaire ni d'un outrage au Parlement.

Je tiens à remercier la députée d'avoir porté cette question à l'attention de la présidence.

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INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LA LOI SUR LA FAILLITE ET L'INSOLVABILITÉ

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 20 mars, de la motion relative aux amendements apportés par le Sénat au projet de loi C-5, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et la Loi de l'impôt sur le revenu.

Le vice-président: Conformément à l'ordre adopté le 10 avril dernier, la question est réputée avoir été mise aux voix, et le vote par appel nominal est réputé avoir été différé.

La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Le vote par appel nominal sur la motion est différé.

* * *

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 8 avril, du projet de loi C-17, Loi modifiant le Code criminel et certaines lois, dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement, ainsi que de la motion no 2.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans le débat sur un projet de loi en matière de justice. Il est édifiant de constater qu'on présente à la dernière minute une série de projets de loi de cette nature, après que la population les a réclamés si haut et si fort. Tout cela devrait sûrement avantager le ministre, qui s'efforce maintenant de combler certaines bévues de son ministère qui se sont soldées par de très mauvais résultats.

Le ministre sait de quoi je parle et il sait que la rédaction des lois est bâclée. Nous avons amendé des projets de loi la semaine dernière, même si leur étude était bien avancée. Un fonctionnaire du ministère n'avait pas fait son travail et nous avons essayé d'arranger les choses.

À mesure que les élections approchent, nous étudions des questions telles que les droits des victimes. Ce dossier est tout à coup devenu une priorité. Nous essayons maintenant de retaper les dispositions de certains projets de loi sur les condamnations avec sursis. Nous avons toujours su qu'une condamnation avec sursis ne devrait même pas être une option à envisager pour un juge qui traite une infraction grave avec violence, mais c'est malheureusement toujours une possibilité.

Or, si le ministre nous soumet son projet de loi C-17 aujourd'hui, et le projet de loi C-27 probablement lundi, si le projet de loi sur les droits des victimes est examiné au comité cette semaine et si tous les dossiers déposés depuis deux ou trois ans doivent soudain être réglés, c'est parce qu'il y a des élections dans l'air. La conversion doit avoir lieu, non pas sur la route de Damas, mais peut-être aux prochaines élections. Je devine qu'il sera beaucoup question du


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système judiciaire, des améliorations à y apporter et des effets qu'une modification peut entraîner.

Ce que nous avons voulu faire valoir, dans tous ces débats sur le système judiciaire, c'est la nécessité d'établir des principes directeurs. Que cela s'appelle ou non une charte des droits des victimes, il devrait s'agir d'un ensemble de principes directeurs à l'intention des juges, des commissions des libérations conditionnelles et des rédacteurs législatifs sur les facteurs à prendre en considération dans la rédaction des projets de loi et des directives destinées à leurs employés. Le système judiciaire devrait veiller à ce que les victimes reçoivent le respect qu'elles méritent et qu'elles ne soient pas oubliées.

(1015)

Lors d'une agression commise dans ma circonscription, une femme a été battue au point de perdre connaissance et son agresseur a continué de s'acharner sur elle des heures de temps. En fait, c'est le tumulte causé par l'agression qui a fait que la police est intervenue. Dieu merci, la femme a survécu. Évidemment, ses yeux ont été terriblement enflés pendant quelques semaines. La victime était noire et bleue. C'est vraiment un miracle qu'elle ait survécu.

L'agresseur a été accusé de tentative de meurtre, mais on a laissé tomber l'accusation, parce qu'elle était trop difficile à prouver. C'est vraiment une triste histoire. L'agresseur s'en est tiré avec une peine de neuf mois d'emprisonnement.

La femme estimait que ses droits n'avaient pas été respectés. J'ai fait parvenir une lettre au ministre pour faire valoir la nécessité de faire quelque chose au sujet des dispositions du Code criminel qui traitent des tentatives de meurtre. J'ai aussi écrit au procureur général de la Colombie-Britannique, qui s'est dit d'accord avec moi et qui a demandé que cette question soit inscrite à l'ordre du jour de la réunion conjointe des procureurs généraux et du ministre, afin de voir s'il y avait moyen de prouver une accusation de tentative de meurtre. Les causes de tentative de meurtre sont presque toujours perdues. Cette situation est très troublante.

La victime est venue me rencontrer à mon bureau et m'a dit qu'il fallait faire quelque chose. L'agresseur avait été condamné à neuf mois d'emprisonnement après s'être acharné sur elle, alors qu'elle était déjà inconsciente. Ce sont les taches de sang sur le plafond et les murs qui ont mis la puce à l'oreille des policiers quand ils sont arrivés sur les lieux. Cela en dit long sur l'acharnement de l'agresseur. La poursuite n'a pu prouver qu'il s'agissait d'une tentative de meurtre, même si l'agresseur s'est servi de tous les objets imaginables pour frapper la victime.

Je mentionne ce cas parce que c'est une histoire d'horeur. J'ai dû m'en occuper. L'agresseur a été envoyé en prison et une étiquette rouge a été apposée à son dossier pour préciser que la victime devait toujours savoir où se trouvait cet homme. J'imagine que l'étiquette s'est décollée, parce que l'homme a été transféré dans une prison à sécurité minimale, située à 20 milles de la résidence de la victime, dans la vallée de Chilliwack, qui se trouve dans ma circonscription. C'est une marche d'à peine trois ou quatre heures, de la prison à la résidence de cette femme. Celle-ci a appris ce qui en était seulement parce qu'un garde l'en a informée. La femme s'est immédiatement cachée. Il n'y a pas de clôtures. Je parle d'une institution à sécurité minimale, pas d'un établissement fédéral.

La femme se cache. Elle a changé de nom et fait tout ce qu'elle peut pour se protéger. Elle dit que chaque fois qu'elle demande au système judiciaire des garanties que cet homme ne pourra la retrouver, ou du moins qu'elle saura où il est incarcéré, on l'assure qu'il n'y a pas de problème, mais ce n'est pas vrai. Son agresseur, qui est en prison, lui téléphone.

Cette femme a besoin d'une certaine protection. Quand nous parlons du principe directeur touchant la protection des droits de la victime, c'est de cela que nous parlons. Elle a besoin de cette assurance. Elle ne devrait pas avoir à venir me voir. Elle devrait savoir que ses droits sont protégés de sorte qu'elle ne se sente pas en danger et ne vive pas dans la crainte.

Or, elle craint absolument et désespérément pour sa vie. J'ai besoin de l'assurer que nous y travaillons et que nous allons tâcher d'adopter une déclaration des droits de la victime qui leur fera comprendre que nous nous préoccupons d'eux avant tout et qu'ils n'ont pas à vivre dans la crainte. Quand elle s'adresse à moi pour obtenir cette assurance, je ne puis la lui donner. Elle est très découragée.

Une autre affaire que l'on a soulevée pendant la période des questions s'est produite elle aussi dans la région d'Abbotsford. L'affaire Ursel a été dénoncée à la Chambre: dans le cas d'une victime d'agression sexuelle, le système juridique ne semble pas comporter de disposition précise pour punir l'agresseur. Ce n'est pas la réinsertion sociale du délinquant qui nous préoccupe en l'occurrence. Il s'agit de châtier le coupable et de protéger la société. Mais ce n'est pas ce qui est arrivé.

Le ministre de la Justice devrait savoir que des pétitions ont recueilli environ 10 000 signatures de personnes qui sont non seulement révoltées à l'égard du violeur, mais qui font maintenant des pressions jour et nuit au moyen de pétitions, de lettres aux journaux et ainsi de suite pour faire renvoyer le juge de la magistrature. Elles s'attaquent maintenant au système judiciaire. Encore là, il s'agit d'une tendance très négative. Nous devons proposer des mesures qui permettront de protéger les juges. Nous devons leur donner les outils nécessaires ainsi que les principes directeurs qui les empêcheront d'user de la discrétion qu'on leur a donnée pour méjuger à ce point une affaire que tout le système judiciaire en est maintenant tombé dans le discrédit. J'aimerais pouvoir protéger nos juges et leur conserver leur autonomie, sans avoir à m'engager dans cette bagarre.

(1020)

Que puis-je dire? Cette femme s'est présentée elle aussi à mon bureau. Elle distribue une pétition. Elle a l'appui d'un groupe très actif de personnes. Des milliers et des milliers de personnes ont signé cette pétition réclamant la démission du juge. Ce n'est pas la bonne façon de procéder. Nous ne voulons pas nous mettre à pétitionner contre les juges et à nous attaquer à celui-là parce que son jugement nous a déplu. Le juge a besoin de son autonomie. Mais nous ne pouvons pas donner au juge la latitude que donnent les dispositions sur la condamnation avec sursis.

Voici un autre cas de la région de Peace River. Un type a menacé de tuer sa femme, dont il était séparé. Ils avaient vécu ensemble un certain temps sans être mariés, et ils avaient deux enfants. Ils se sont ensuite séparés. Il est parti, s'est mis en ménage avec une autre femme dont il a eu d'autres enfants. Il était bel et bien séparé de la première femme.


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Il ne versait pas la pension alimentaire des enfants, ce qui suscitait de la rancoeur. Il a fini par se fatiguer du problème, il a fait de 300 à 400 kilomètres de route pour aller chez elle. Il a enfoncé la porte, violé et battu cette femme, la laissant inconsciente sur le sol de sa cuisine. Bien sûr, on lui a mis la main au collet. Les policiers savaient qui était le coupable, parce qu'il y avait déjà eu des querelles entre cet homme et cette femme. Le juge a rendu sa décision en vertu des dispositions du projet de loi C-41 sur les condamnations avec sursis qui donnaient au juge le droit de ne pas envoyer ce type en prison, parce qu'il risquait de ne pas pouvoir faire un versement de pension alimentaire.

Comment sommes-nous censés réagir? Qu'est-ce que je peux dire à cette femme, d'après le secrétaire parlementaire? Cet homme-là a fait 300 milles et c'est avec préméditation qu'il est allé la violer et battre et qu'il l'a ensuite abandonnée sur le sol de la cuisine. Et le juge dit que si on l'envoyait en prison, il raterait un versement de pension alimentaire. Par conséquent, pas de prison. Condamnation avec sursis. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans un système qui ne donne pas la priorité aux droits de la victime sur ceux d'un type qui doit verser une pension alimentaire. Il y a quelque chose qui cloche dans notre système, parce qu'il ne prévoit aucune forme de protection, parce qu'il n'y a pas de déclaration des droits de la victime ni rien d'autre qui garantisse que, lorsqu'une agression sexuelle violente horrible se produit, le coupable écopera d'une peine minimum.

Au diable la protection de la société. Cette femme fait partie de la société. Ce type la bat, la viole et l'abandonne à son sort. Il se retrouve à 300 kilomètres de chez elle, exactement là où il se trouvait le soir où il s'est saoulé avant d'aller l'agresser.

Que pouvons-nous dire? Le système judiciaire doit établir une série de principes directeurs pour mettre de l'ordre dans tout cela, qu'il s'agisse du code, des lois, des règlements, des décisions de la Commission des libérations conditionnelles ou de quoi encore. Il faut que l'un de ces principes directeurs assure la protection des droits de la victime. Ils ne sont toujours pas protégés. On en a parlé, et je suis frappé par ce qui se dit juste avant les élections, alors que rien ne s'est fait en trois ans et demi, ou si peu. Nous serons bientôt en campagne, et nous allons certainement profiter des assemblées publiques pour soulever le problème.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Le vote porte sur la motion no 2. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

Une voix: Avec dissidence.

(La motion no 2 et adoptée.)

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) propose: Que le projet de loi, ainsi modifié, soit agréé.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(1025)

Le vice-président: Quand ce projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois? Maintenant, avec la permission de la Chambre?

Des voix: D'accord.

M. Rock propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, je viens de prononcer un discours à l'étape du rapport où j'ai décrit en détail certaines de mes grandes préoccupations en ce qui concerne notre système de justice et les facteurs sur lesquels nous insistons au Canada lorsque nous appliquons la justice.

Trop souvent, j'ai noté dans les conversations impromptues des gens une tendance très inquiétante. Les gens vont prendre eux-mêmes les choses en mains. Les parlementaires ici assemblés ont le devoir de veiller à ce qu'il n'en soit rien. Les tactiques de justicier ne régleront pas l'injustice qui règne au Canada. Il nous faut un bon système de justice.

Je suis membre d'un parti qui a poussé la protection des droits des victimes à un niveau supérieur au Parlement. Nous avons mentionné qu'il fallait désormais mettre l'accent non pas sur la réinsertion sociale des contrevenants, mais bien sur les droits des victimes.

Très souvent, je me vois dans l'obligation de calmer les gens. Je pourrais très facilement échauffer les esprits dans ma circonscription. Je pourrais verser dans l'extrême. C'est facile à faire. Je pourrais m'emporter facilement. Les causes ne manquent pas. Je me dois toutefois de calmer les gens en leur disant que la solution ne consiste pas à se faire justice soi-même. Ils se retrouveront dans le pétrin. Nous ne sommes pas au Far West. Il faut oublier cette solution. Les gens ont cependant raison d'être mécontents du système.

L'autre jour, Clifford Olson a demandé des améliorations à sa situation. Il voulait avoir plus facilement accès aux médias, ainsi de suite. Le juge qui a rejeté sa demande a déclaré qu'il agissait dans l'intérêt de M. Olson, car l'octroi de ce droit aurait nui à sa réadaptation. Voilà le motif de sa décision. Le juge a dit que, par souci pour la réadaptation de M. Olson, il était préférable que celui-ci n'ait pas accès aux médias, car cela le placerait dans une situation démagogique, ainsi de suite. Cela serait donc mieux pour sa réadaptation.


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Le système voulait mettre l'accent sur la réinsertion sociale des contrevenants et il est allé trop loin. Clifford Olson ne verra jamais la lumière du jour. Il croupira à tout jamais en prison. Il mourra en prison. Il ne sera jamais libéré. Ce n'est pas ce qui nous inquiète. Nous nous inquiétons du fait que le juge, en raison des lignes directrices émises par le système de justice depuis environ 20 ans, se préoccupe encore tout autant de la réinsertion de ce criminel. Voyons le genre de formation dont il a besoin, le genre de cours qu'il pourrait prendre et ainsi de suite.

M. Olson ne va pas s'en sortir. Il ne va pas pouvoir manoeuvrer au point de sortir de prison. Nous avons tous entendu parler de gens qui vont là et dont la première question pour l'agent chargé de leur cas est dans quels cerceaux ils doivent sauter pour sortir de tôle. Ils se moquent de la réadaptation. Tout ce qu'ils veulent, c'est arriver à sortir de là. Ils récitent la liste: les séances d'entraide par les pairs, les AA et même la religion. Je suis chrétien. Il y a en prison beaucoup de gens qui sont prêts à pratiquer une religion, peu importe laquelle, si cela peut leur mériter une étoile rouge ou une étoile verte. Ils manquent parfois complètement de sincérité, mais ils sont prêts à faire tout leur possible pour bien sauter dans les cerceaux.

C'est triste de voir cela lorsqu'on espère qu'un véritable changement va s'opérer en eux et qu'ils vont vraiment se réadapter non seulement dans leurs actions, mais encore dans leur coeur. Ils manipulent souvent le système pour voir s'ils vont réussir à plaire à suffisamment de surveillants de liberté conditionnelle et de comités pour prendre la clé des champs. Je le répète, il va falloir que cela change, car la société l'exige.

(1030)

J'ai vu récemment un documentaire sur les banlieues de classe moyenne d'un pays d'Amérique du Sud. Chaque maison avait des barreaux aux fenêtres et était entourée d'un mur surmontée de tessons de bouteilles, de barbelés ou d'autres choses du genre.

Dans ma localité, les gens ont des systèmes d'alarme, des vigiles, des verrous additionnels aux fenêtres et ainsi de suite. C'est incroyable de voir à quel point les gens cherchent à se protéger.

En Amérique du Nord, les agents de police et de sécurité privés sont maintenant plus nombreux que les agents de police payés par le gouvernement. Il y a des gens qui s'offrent plus de services privés de protection que nous ne saurions leur en assurer dans les systèmes fédéral et provincial. Ils disent ne plus avoir confiance dans le gouvernement pour accomplir le travail. En fait, on porte même des accusations contre eux parce qu'ils se protègent eux-mêmes.

Il y a trois ou quatre semaines, en Colombie-Britannique, un homme âgé de Kelowna était chez lui avec sa femme lorsqu'un jeune dans la vingtaine s'est présenté à sa porte et a tenté d'entrer de force. Ces deux aînés dans les soixante-dix ans ont failli être victimes d'un intrus à leur domicile. Faut-il dire à l'homme de composer le 911, de bien attacher son casque de vélo, d'attendre là et de tout encaisser? C'est ce que le système de justice lui dit de faire.

Cet homme est sorti et s'est dit ceci: «Je ne subirai pas cela. Ma femme est là et elle ne peut s'enfuir en courant. Quant à moi, j'ai 72 ans. » Qu'a-t-il fait? Il a pris un bâton de base-ball et a roué le jeune homme de coups. On dit toujours de laisser la police se charger de ces cas, d'essayer de ne pas paniquer et de s'asseoir dans son fauteuil en espérant de ne pas se faire assassiner au cours de sa retraite. Il faut jouir de cette dernière.

Ce n'est pas ce qu'a fait cet homme de plus de 70 ans. Il s'est dit qu'il ne laisserait pas ce gars venir chez lui en plein jour pour les tabasser, lui et sa femme. Il a refusé cela et s'est armé d'un bâton de base-ball. Je n'encourage pas les gens à se faire justice eux-mêmes, mais que doit-on dire à celui dont la vie est en danger?

Une voix: Il est ensuite accusé de voies de fait.

M. Strahl: Exactement. Il se bute alors à un système de justice qui se demande si cet homme fait partie de l'ivraie et s'il faut intenter contre lui des poursuites parce qu'il a tenté de protéger son foyer et sa femme contre un jeune dans la vingtaine qui voulait entrer de force chez lui.

J'ai aussi un autre exemple qui s'est produit dans ma circonscription. Comme cela arrive sûrement à tous les députés, une dame et son père sont venus me rencontrer. Elle a une trentaine d'années et voici sa situation. Après leur rupture, un ex-conjoint de fait a harcelé cette femme pendant deux ans. Il lui a envoyé des lettres de menaces pendant deux ans. Il lui a dit qu'elle ne lui échapperait pas, qu'il la tuerait et qu'elle ne verrait plus le soleil se lever. Il l'a kidnappée à une occasion, l'a menée au bord du fleuve Fraser, armé d'un fusil, et a voulu la frapper avec la crosse de celui-ci. Elle a réussi à lui enlever le fusil des mains et à le lancer dans le fleuve. Il l'a simplement tabassée. Je suis certain qu'il voulait la tuer avec son fusil et jeter son corps dans le fleuve. Il a été reconnu coupable, il purge maintenant une peine d'emprisonnement et pourrait être libéré le mois prochain.

Lorsqu'il harcelait cette femme, il lui téléphonait, il menaçait de la tuer et la suivait à sa sortie du travail. C'est terrifiant pour n'importe qui, notamment pour une femme seule. Le soir, il allait chez elle et frappait dans sa fenêtre avec un couteau à boucherie. Elle ouvrait les rideaux et voyait ce gars-là qui tape sur la vitre avec un couteau de boucherie tout en souriant.

(1035)

Ce manège s'est poursuivi pendant deux ans. Elle a rapporté chaque incident à la police. Celle-ci n'a rien fait. La police a dit qu'elle ne pouvait rien faire tant qu'il ne l'agresserait pas. La police a bien essayé, il faut le reconnaître, mais les lois sont si faibles qu'elle était impuissante dans les circonstances.

Après l'agression, l'individu est sorti de prison et il a agressé de nouveau cette femme au moment où elle se rendait à son travail. Heureusement, les enfants de celle-ci étaient chez leurs grands-parents. Il l'a pourchassée autour de la voiture devant cinquante témoins. Elle criait au meurtre. Il l'a attrapée et l'a poignardée à


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plusieurs reprises. Les témoins ne savaient pas ce qui se passait. Il l'a poignardée jusqu'à ce que son corps devienne inerte. Les témoins sont finalement intervenus et ont cloué l'individu au sol.

L'agresseur a été accusé de tentative de meurtre. Mais les accusations ont été retirées. En effet, il était impossible de prouver qu'il avait essayé de tuer sa victime parce qu'il ne l'avait poignardée qu'à sept reprises. La victime a survécu. Elle a eu bien de la chance. L'agresseur a sans doute raté tous les organes vitaux.

Imaginez cela. La victime et son père sont venus me voir. Elle avait un aplomb surprenant. Elle pouvait parler de son agression. Elle m'a tout raconté. Je ne savais que dire. J'étais sans voix. Le système de justice n'a pas protégé cette femme. Pis encore, je ne savais que dire à son père. C'était un homme ordinaire. Il avait 55 ans environ. C'était un bon gars. Il était assis en face de moi et il m'a dit: «M. Strahl, en juillet, ce gars-là va être remis en liberté. Dès qu'il sortira de prison, il va probablement agresser ma fille de nouveau. Quand il sortira et qu'il tapera à la fenêtre de ma fille avec un couteau de boucherie, je vais le tuer.» J'ai dit: «Monsieur, si vous faites cela, vous allez passer vingt-cinq ans en prison. Ce serait un geste prémédité. Vous avez menacé ce type. Vous avez dit que vous le tueriez. Vous irez en prison pour vingt-cinq ans.» Il a répondu: «D'accord. Que dois-je faire, M. Strahl? Cet individu va tuer ma fille.» J'ai dit: «Je ferais la même chose.»

Le système doit changer. Les droits des victimes doivent avoir préséance. Il faut que ça change. Il faut que je puisse dire à cette femme: «Nous allons modifier le système. Nous allons nous battre jusqu'à ce qu'il le soit.»

Les députés d'en face émettront peut-être des communiqués pour dire qu'il n'y a pas de problèmes, mais je ne vais pas changer d'idée. Je vais essayer d'aider cette femme et les nombreuses autres femmes qui connaissent le même sort.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui dans le débat sur le projet de loi C-17 pour la dernière fois. Il est malheureux que deux amendements qui n'ont absolument aucun rapport avec le projet de loi C-17 aient été présentés. Cela a été fait avec le consentement unanime des députés parce qu'ils appuyaient tous ces amendements. Ceux-ci ont été greffés au projet de loi C-17, mais ils y sont complètement étrangers. Je parlerai donc surtout du projet de loi initial.

Le projet de loi C-17 contient un nombre appréciable de mises à jour de lois attendues depuis longtemps et que nous appuyons. Grâce à certaines dispositions du projet de loi, nos agents de police et de nos tribunaux pourront accroître leur efficacité.

(1040)

Les paragraphes 4(6) et 4(7) proposés dans le projet de loi permettront aux agents de la paix de déclarer par écrit qu'ils ont signifié des documents sans devoir recourir aux services d'un juge de paix ou d'un notaire pour signifier ces documents.

Cela accroîtra l'efficacité des agents de police et réduira la charge de travail des juges de paix, ce qui leur permettra de se consacrer à des fonctions plus utiles.

De même, le paragraphe 145(5) proposé ainsi que d'autres dispositions connexes permettront à tout agent de la paix de remettre un accusé en liberté sur promesse de comparaître. Actuellement, seul l'officier responsable peut le faire.

Cette modification accroîtra l'efficacité des forces policières, car il ne sera plus nécessaire de convoquer un officier responsable pour accomplir une simple formalité.

Nous appuyons sans réserve les dispositions du projet de loi qui permettront aux policiers de faire plus efficacement leur travail. Nous appuyons également les dispositions qui renforcent la législation sur les produits de la criminalité en empêchant les criminels de conserver les profits tirés de leurs crimes.

Au départ, nous nous opposions au projet de loi C-17 parce que, comme la plupart des Canadiens le savent, le Parti réformiste est tout à fait contre l'idée d'alléger plutôt que de renforcer les peines imposées aux auteurs d'infractions graves.

Cependant, aujourd'hui, c'est à contre-coeur que nous appuyons le projet de loi, mais nous faisons confiance aux provinces qui appuient les mesures et nous croyons que, comme elles l'ont dit, dans les cas les plus graves, elles procéderont par voie de mise en accusation en suivant un processus établi de détermination de la peine.

Nous croyons que le ministre de la Justice n'a pas révélé avec toute la franchise voulue aux Canadiens toutes les répercussions du projet de loi C-17. Le ministre a vanté les mérites de cette mesure législative en ce sens qu'elle modernise la loi et simplifie les actions en justice, mais il n'a pas dit un mot au sujet de la réduction des peines pour certaines infractions très graves.

Bien que le Parti réformiste appuie les changements administratifs contenus dans le projet de loi C-17 que j'ai mentionnés plus tôt, je m'en voudrais de ne pas signaler qu'il s'agit d'une mesure législative nébuleuse sans conséquence qui sera tout à fait inefficace pour ce qui est d'accroître la sécurité des Canadiens, de leurs enfants et de leurs biens.

Les Canadiens sont très inquiets de leur sécurité personnelle et de celle de leur famille. Ces changements administratifs ne feront rien pour protéger les Canadiens contre les meurtriers, les violeurs et d'autres criminels sadiques qui rôdent dans nos rues et s'introduisent dans nos maisons.

Le projet de loi C-17 n'empêchera pas Clifford Olson, ce tueur d'enfants en série, de continuer son petit jeu. Il n'enlèvera pas aux tueurs le droit à la libération anticipée.

La seule façon d'empêcher Clifford Olson et d'autres de demander une libération anticipée serait de présenter un projet de loi abrogeant l'article 745 du Code criminel, mais ce n'est pas ce que le ministre a fait. Il a présenté le projet de loi C-45, qui donne encore à Clifford Olson et à d'autres auteurs de meurtre au premier degré la possibilité d'une libération anticipée.


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En faisant cela, le ministre de la Justice, avec l'appui de ses collègues libéraux, a forcé les familles des victimes de meurtre à revivre encore et encore la terreur engendrée par un tel crime.

Le projet de loi C-17 n'empêchera pas Robert Noyes d'agresser sexuellement un autre enfant. L'ancien enseignant de l'école Ashcroft a admis avoir agressé sexuellement plus de 60 enfants. En tant que délinquant dangereux, il a été condamné à une peine d'emprisonnement d'une durée indéterminée après avoir été reconnu coupable de 19 infractions à caractère sexuel.

Cet homme est maintenant en liberté. En juin, la Commission nationale des libérations conditionnelles a accordé à Noyes la permission de sortir sous surveillance et, si tout se passait bien, il devait être admissible aux sorties sans surveillance et à la libération conditionnelle de jour en février 1997. Je ne sais pas encore si ses démarches ont été fructueuses ou non.

Seul un projet de loi comme celui proposé par ma collègue de Surrey-White Rock-South Langley, qui exige que les délinquants sexuels soient examinés par deux psychiatres, fera en sorte que Noyes restera là où il doit être, c'est-à-dire derrière les barreaux.

Le projet de loi C-17 n'apaisera pas la crainte qu'ont les parents canadiens de voir leurs enfants se faire enlever, agresser sexuellement ou tuer dans nos villes et dans nos rues.

Dans le communiqué de presse qu'il a publié au moment de la présentation du projet de loi, le ministre de la Justice affirmait que ces modifications montraient bien les progrès réalisés par le gouvernement dans le cadre de son programme visant à rendre nos maisons et nos rues plus sûres. C'est absolument insensé. C'est tout simplement faux.

Comment peut-on rendre les lieux publics plus sûrs en réduisant les peines applicables à des crimes comme la séquestration ou l'entrée par effraction?

Les Canadiens veulent des changements substantiels dans le système judiciaire. Ils veulent des lois qui accroissent la sécurité du public et qui fassent comprendre clairement aux criminels qu'ils devront assumer la responsabilité de leurs actes. Les Canadiens veulent des lois qui dissuaderont les voleurs impitoyables de s'introduire dans leurs foyers et d'en violer l'intimité.

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Ils demandent l'abrogation de l'article 745 du Code criminel et veulent que le ministre de la Justice vote en faveur des victimes et de leurs droits. La population ne veut pas d'un ministre de la Justice qui protège les droits des criminels au détriment des citoyens honnêtes et respectueux de l'ordre.

En 1995, le ministre a voté contre le projet de loi C-226 d'initiative parlementaire qui visait à abolir le droit des auteurs de meurtre au premier degré de demander, après avoir purgé 15 ans d'une peine d'emprisonnement à vie, une audience de libération conditionnelle avant l'expiration de la période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle. Les Canadiens refusent de voir le ministre donner une lueur d'espoir aux tueurs. Ils veulent les voir rester derrière les barreaux pour au moins 25 ans et non pas 15 ou 20 ans. La grande majorité des Canadiens veulent que les meurtriers purgent la totalité de leur peine.

Quelle valeur le ministre de la Justice, le premier ministre et le gouvernement libéral accordent-ils à une vie humaine? Quinze ans seulement? C'est le message qu'ils envoient aux Canadiens, bien qu'ils leur disent que les lois qu'ils adoptent renforcent la sécurité publique. Rien n'est plus loin de la vérité.

Le 12 août, Clifford Olson est devenu admissible à une demande d'audience de libération conditionnelle avant l'expiration de la période d'inadmissibilité et en mars, grâce au gouvernement, cet homme qui a assassiné de nombreux enfants a obtenu son audience à la cour aux frais des contribuables. Le ministre a pu se rendre compte, le jour où Olson a une fois de plus fait les manchettes dans la presse nationale, ce que les Canadiens pensent vraiment de la position du ministre concernant les modifications à l'article 745 du Code criminel. Le ministre a tout récemment pu se rendre compte de toute l'horreur ressentie par les Canadiens le 11 mars lorsque Clifford Olson a eu une fois de plus, grâce aux libéraux, la possibilité de faire étalage de ses crimes sadiques.

Olson n'est pas le seul meurtrier admissible à une audience de libération conditionnelle. Le 10 juillet, Ralph Ernest Malcolm Power, auteur d'un meurtre au premier degré, a présenté une demande de libération conditionnelle. En 1981, Power, un ancien détenu de 28 ans qui bénéficiait alors d'un régime de liberté surveillée, a agressé Sheryl Gardner, âgée de 20 ans, et lui a réduit le visage en bouillie avec un marteau. Le meurtrier a avoué qu'il voulait simplement l'assommer pour pouvoir la violer. Power a été pris et arrêté pour le meurtre de Sheryl après avoir tenté de tuer une autre femme.

Le ministre de la Justice aurait dû présenter un projet de loi qui aurait permis de garder Clifford Olson, Ralph Ernest Malcolm Power et beaucoup d'autres sous les verrous. Pourquoi le ministre de la Justice n'écoute-t-il pas les victimes de la violence et l'Association canadienne des policiers? Pourquoi le ministre n'a-t-il pas abrogé l'article 745? Le ministre de la Justice devrait s'occuper de la criminalité avant de s'occuper des questions administratives, et non l'inverse.

À la suite des terribles crimes commis contre Leslie Mahaffy et Kristen French, la peine de mort est redevenue une question importante pour les Canadiens. De plus en plus de signes indiquent que si l'on tenait un référendum à caractère exécutoire sur la peine capitale, une initiative qu'appuie le Parti réformiste, les Canadiens se prononceraient en faveur de la condamnation à mort des criminels les plus impitoyables et les plus sadiques comme Paul Bernardo et Clifford Olson. Le gouvernement libéral refuse de donner aux Canadiens la possibilité de se prononcer à ce sujet.

Les Canadiens accueillent avec satisfaction le projet de loi C-55 sur les délinquants dangereux, mais ils veulent qu'il soit renforcé et que le ministre mette fin à la libération d'office. Ils veulent qu'il soit mis fin à la libération automatique des prisonniers qui ont purgé seulement deux tiers de leur peine, même quand la science indique qu'ils vont commettre d'autres crimes. Melanie Carpenter qui a été kidnappée, violée et tuée est une des dernières victimes de l'attitude des libéraux.

Le ministre a promis de présenter un projet de loi omnibus couvrant ces deux initiatives qui permettraient de renforcer substantiellement la sécurité du public. Au lieu de cela, il nous a présenté le projet de loi C-55 qui ne satisfait pas aux attentes des Canadiens. Tout ce que à quoi les Canadiens ont eu droit cette dernière année, c'est à des demi-mesures législatives comme le projet de loi C-2 ou le projet de loi C-42, modifiant la Loi sur les juges, le projet de loi C-9 qui rétablit la Commission du droit du Canada, et maintenant le projet de loi C-17. Le projet de loi C-27, que nous appuyons car il


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traite de la prostitution juvénile et du harcèlement des enfants, aurait dû rendre inutiles toutes ces mesures législatives. Tout ce que font les projets de loi C-2, C-42, C-9 et C-17, c'est faciliter les choses pour l'appareil judiciaire. Ils ne renforcent pas la sécurité pour les Canadiens.

En fait, le projet de loi C-17 donne aux Canadiens une raison de plus de s'inquiéter au sujet des violations de domicile étant donné que le gouvernement libéral a, dans cette mesure législative, réduit la peine pour ce type d'infraction criminelle. C'est pourquoi nous appuyons ce projet de loi avec réserve.

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Le projet de loi C-17 réduit les peines maximales et modifie certaines infractions strictement considérées comme des actes criminels pour en faire des infractions sujettes à option. Il encourage nos juges à considérer ces infractions comme moins graves. Il leur permet d'infliger une peine moins importante, pouvant même se limiter à de simples amendes.

La plupart de ces infractions sont des actes non violents, à l'exception de la séquestration, mais comprennent tout de même la violation de l'intimité de nos foyers et la contrefaçon, qui peut entraîner la perte d'avoirs précieux pour nos concitoyens les plus vulnérables, les personnes âgées.

Selon Statistique Canada, en 1994, les introductions par effraction représentaient 15 p. 100 de la totalité des infractions au code criminel, et 25 p. 100 de celles-ci avaient donné lieu à des dommages contre la propriété. Quatre-vingt-un pour cent des introductions par effraction se sont faites par la force. Dans 71 p. 100 des cas, des biens ont été endommagés et dans 81 p. 100 des cas, il y a eu vol de biens.

Au lieu de se montrer inquiet et outré par ces chiffres, le gouvernement libéral vient nous dire que ces infractions méritent des peines moins sévères. Le projet de loi C-17 fera en sorte que ces infractions, qui portent atteinte à la sécurité financière et à la tranquillité d'esprit des Canadiens, soient punies moins sévèrement.

À l'insu des Canadiens, le gouvernement libéral se déplace lentement dans cette direction depuis le début de son mandat. Nous sommes contre cette orientation, non seulement parce que les Canadiens n'ont pas pu signifier leur appui, mais aussi parce qu'elle peut créer une hausse de la criminalité plutôt qu'une réduction, un but que vise notre parti, comme la plupart des Canadiens.

Un changement de cette importance dans le type de châtiments ou-pour rester politiquement correct-dans les moyens que nous prenons pour faire assumer aux criminels la responsabilité de leurs actes mérite d'être examiné et sanctionné par le public.

Le projet de loi C-41, qui est maintenant en vigueur depuis quelques mois, a aussi marqué l'adoption de mesures de rechange pour éviter l'incarcération ou même un procès devant tribunal. Cette partie du projet de loi C-41 a toutefois été éclipsée par les dispositions qui portaient sur les crimes motivés par la haine qui accordent une protection accrue à un groupe de citoyens, notamment les personnes caractérisées par leur orientation sexuelle, expression non définie.

Si on leur posait la question, je crois que très peu de Canadiens savent que le gouvernement libéral a fait en sorte que de nombreux criminels, dont les délinquants sexuels et autres délinquants violents, peuvent faire du travail communautaire au lieu d'aller en prison.

Il est très malheureux que les Canadiens n'aient pas été conscients de la portée exacte du projet de loi C-41 que l'Association canadienne des policiers a décrit de la façon suivante: «À part quelques rares exceptions, le projet de loi C-41 est maladroit, compliqué, contradictoire, répétitif et, ce qui est pire, complètement inutile pour quiconque à la moindre connaissance de la common law au Canada».

Nous n'aurions pas protesté de façon si véhémente contre l'article du projet de loi C-41 portant sur les mesures de rechange si le gouvernement avait précisé à quels délits elles pouvaient s'appliquer. Nous pourrions accepter qu'elles s'appliquent à des délits non violents précis, pour réduire le taux d'incarcération et le coût des poursuites en justice. Toutefois, le projet de loi C-41 ne mentionnait rien de tout cela.

Le Parti réformiste avait présenté un amendement au projet de loi C-41 qui aurait exclu les criminels violents des mesures de rechange Mais les libéraux membres du Comité de la justice l'ont défait.

Depuis la proclamation du projet de loi C-41, qui encourageait les tribunaux à avoir recours aux condamnations avec sursis, plusieurs criminels, dont deux reconnus coupables de viols, ont été condamnés avec sursis et sont libres alors que leurs victimes ont peur de quitter leur maison. C'est inacceptable. J'espère que le ministre déposera une modification au Code criminel pour que les condamnations avec sursis soient réservées aux crimes non violents et que les violeurs ne se promènent pas en toute impunité comme les deux en Colombie-Britannique.

J'aimerais attirer l'attention de la Chambre sur les articles du projet de loi C-17 qui nous préoccupent. Selon la loi actuelle portant sur cette question, la séquestration d'un être humain est une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, et la peine maximale prévue est de 10 ans, ce qui en fait un délit très grave.

En vertu du projet de loi C-17, la gravité de cette infraction sera réduite considérablement. La peine maximale sera encore de dix ans, mais l'infraction sera admissible à une double procédure et pourra être traitée soit par mise en accusation, soit par procédure sommaire. Par conséquent, si l'infraction est traitée par procédure sommaire, la peine pourrait être réduite à seulement 18 mois d'emprisonnement ou une amende de 2 000 $ ou moins.

L'alinéa 348.1(e) du Code criminel, qui traite de l'introduction par effraction dans un dessein criminel dans un endroit autre qu'une maison d'habitation, est aussi modifié; l'infraction profite de la double procédure et la peine maximale est réduite de 14 à 10 ans d'emprisonnement, sur mise en accusation. Mais cette infraction peut aussi être traitée par procédure sommaire et la peine maximale est alors de 18 mois ou une amende. Quel message cette mesure transmet-elle à la société et aux criminels?


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L'infraction que constitue la présence illégale dans une maison d'habitation, traitée au paragraphe 349 (1) du Code criminel, a aussi été modifiée; elle peut être traitée de deux façons, soit par accusation avec une peine de jusqu'à 10 ans d'emprisonnement, soit par procédure sommaire. À l'heure actuelle, la présence illégale dans une maison d'habitation est un acte criminel passible d'une peine maximale de jusqu'à 10 ans d'emprisonnement.

De même, l'article 367 du Code criminel portant sur les faux et le paragraphe 368(1) concernant l'emploi d'un document contrefait seront modifiés; ces infractions pourront aussi être traitées de deux façons différentes et soit entraîner une peine de jusqu'à dix ans d'emprisonnement, soit être traitées par procédure sommaire. À l'heure actuelle, la seule procédure permise est la condamnation pour acte criminel passible de jusqu'à 14 ans d'emprisonnement.

Voilà les articles qui nous ont incité à nous opposer au projet de loi C-17 à l'origine. Comme nous l'avons dit plus tôt, nous craignons toujours que ces modifications au Code criminel ne laissent croire aux tribunaux que ces infractions doivent être traitées moins sévèrement qu'auparavant. Comme nous le savons, la décision de procéder par acte d'accusation ou par procédure sommaire appartient à l'État. C'est donc à la lumière de ce fait et des consultations auprès des provinces, qui nous ont assuré que l'État procéderait encore par acte d'accusation dans la plupart des cas, que nous appuyons aujourd'hui, bien à contrecoeur, le projet de loi C-17.

Le Canada est aux prises avec un taux de criminalité croissant, surtout en ce qui concerne les crimes violents, une augmentation de la peur chez les gens, une escalade des coûts pour l'administration de la justice et l'hébergement des prisonniers et une dette croissance qui limite grandement les dépenses.

La tâche du ministre fédéral de la Justice qui doit régler de front tous ces problèmes est ardue, mais pas insurmontable. Le projet de loi C-17 ne fait pas partie de la solution pour le moment. Il ne traite pas de la croissance de la criminalité au Canada et ne fait absolument rien pour lutter contre la cause de la criminalité.

Par conséquent, nous appuyons le projet de loi C-17 que nous considérons comme une mesure législative libérale sans grand impact, mais nous l'appuyons à regret, pour les raisons énoncées plus tôt.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour parler du projet de loi C-17. Je suis encouragé par les déclarations de mon collègue de Crowfoot au sujet des lacunes de ce projet de loi ainsi que par le fait que nous allons, sans enthousiasme, appuyer ce projet de loi. Moi aussi j'ai de sérieuses réserves au sujet de certaines dispositions du projet de loi.

J'ai un peu considéré les lacunes dans le domaine de la réduction des peines maximales. Cela m'inquiète beaucoup, car en tant qu'agent de police pendant une vingtaine d'années au service de police de la ville de Calgary, j'ai vu les conséquences des réductions de peine dans les tribunaux. Il semble y avoir une trivialisation des peines imposées lorsque les parlementaires commencent à bricoler les articles et à réduire les peines maximales pour certaines infractions.

Regardons en particulier le paragraphe 279(2) qui traite de la séquestration. Quand utilise-t-on fréquemment ce paragraphe? Quel genre de délinquant peut être inculpé de séquestration? C'est généralement une personne coupable de viol, d'agression sexuelle, une personne dont l'intention est d'enlever ou de détenir une autre personne contre son gré, généralement une femme ou un enfant, dans le but de l'agresser.

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Dans le projet de loi C-17, le gouvernement propose une peine réduite de 14 ans à 18 mois pour un acte criminel, ce qui en fait une procédure à option. Si les tribunaux procèdent par déclaration de culpabilité par procédure sommaire, la peine minimale est de 18 mois.

Le viol et l'agression sexuelle sont des infractions très graves. Pourtant, le gouvernement trivialise une bonne partie des inculpations pour séquestration portées dans les cas d'agression sexuelle.

Une autre disposition du projet de loi C-17 se trouve au paragraphe 348(1). Le procès pour introduction par effraction dans un endroit autre qu'une maison d'habitation devient lui aussi une procédure à option assortie d'une peine maximale de 10 ans. Là encore, c'est une baisse.

Le vice-président: Le député pourra reprendre la parole après la période des questions, lorsque nous reprendrons le débat sur ce projet de loi.

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