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INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI SUR LA PROTECTION DES ESPÈCES EN PÉRIL AU CANADA

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-65, Loi concernant la protection des espèces en péril au Canada, ainsi que des motions du groupe no 1.

Le vice-président: Il reste encore sept minutes au député de Lac-Saint-Jean.

M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, c'est probablement mon dernier discours lors de cette 35e législature. Ce fut un mandat très court, une courte année, comparativement à tous mes autres collègues.

J'aimerais en profiter pour remercier mes électeurs du comté fédéral de Lac-Saint-Jean. Je les remercie, comme lors de mon premier discours, de m'avoir fait confiance. Ce n'était pas évident, cela a donné lieu à certains débats. Les gens se demandaient s'ils devaient faire confiance à quelqu'un qui n'avait aucune expérience en politique. Est-ce que ce serait dramatique, pour le comté de Lac-Saint-Jean, d'être représenté par une personne sans expérience?

Après un an, je suis heureux de leur dire qu'on peut faire confiance à la jeunesse, on peut faire confiance à la non-expérience. Je pense que ça s'est très bien passé, et que le chemin n'a pas été trop difficile, cette année.

(1510)

J'ai eu le temps de développer des projets dans mon comté, dont l'opération Maillage qui a pour but d'unir des gens de diverses compétences. Ce ne sera probablement pas annoncé pendant les élections, mais ce le sera après, à ma grande joie, car nous aurons réussi à développer un nouveau concept à Alma. Les gens qui ont une idée d'affaire, un potentiel entrepreneurial, ou qui voudraient avoir un partenaire d'affaires pourront se réunir et faire des maillages de compétences. On pense que cela pourra faire émerger les petites entreprises qui créeront de l'emploi.

Deuxièmement, on se souviendra de la soirée du 29 décembre où, comme élu, et face à un problème, j'ai convoqué toute la population en leur disant: «Vous devez être présents, pas seulement pour payer vos taxes et pour voter une fois tous les quatre ans, mais également pour apporter vos solutions.»

On dit souvent qu'il y a plus d'idées dans deux têtes que dans une. J'ai fait confiance à la population. Elle a apporté des solutions, une dizaine d'orientations sur lesquelles on travaille depuis le mois de janvier dernier. On a présenté des choses concrètes. Donc, je suis très heureux de ce qui a pu se passer dans mon comté.

Finalement, il m'a fait grand plaisir de travailler avec mes collègues du Bloc québécois. J'espère que je pourrai continuer à travailler avec eux lors d'un prochain mandat. Nous l'espérons bien et c'est fort probable, car nous mettrons, dans cette campagne, énormément de détermination.

Parfois les gens me demandent: «Est-ce que ça te tente de retourner en élection après seulement un an?» Je pense que c'est la plus belle chose qui puisse arriver à un élu que de retourner en campagne, un an seulement après avoir été élu. Lorsqu'on fait une première campagne, on n'est pas trop au courant de la façon dont cela fonctionne, de la machine, de tout le fonctionnement de cette structure. Après un an, je retourne auprès de la population et je serai en mesure de parler vraiment de ce qui se passe à la Chambre des communes.

Pour mon dernier discours de cette 35e législature, je tenais à ouvrir cette petite parenthèse. En fin de compte, c'est une très belle expérience que j'ai pu vivre et j'espère que je pourrai continuer à le faire dans les prochaines années.

Revenons à nos moutons et parlons du projet de loi C-65. J'avais entamé mon débat avant la période des questions orales et j'ai dû m'arrêter par manque de temps. J'en étais rendu aux commentaires généraux, les raisons pour lesquelles nous étions plus ou moins d'accord, ou pas du tout d'accord avec le projet de loi.

Le projet de loi C-65 menace directement des compétences de juridiction provinciale. En effet, sous prétexte de vouloir rencontrer les exigences de la Convention internationale sur la biodiversité, le gouvernement libéral tente de s'ingérer dans les champs de compétence des provinces.

Il n'y a pas de surprise, c'est la même redondance habituelle. Il y a des expertises qui sont développées dans les provinces, notamment au Québec, où on a déjà une loi pour la protection de la biodiversité, qui a été adoptée en 1989 d'ailleurs. On avait une expertise dans la province, on connaît le domaine, ça va très bien. Mais là, le fédéral vient s'ingérer dans ces juridictions. Je vous ferai remarquer que c'est d'ailleurs inscrit dans la Constitution, mais que voulez-vous, il faut qu'il se donne un certain prestige. Il faut donner un certain prestige à cette institution fédérale.

Enfin, je ne peux pas l'expliquer, peut-être que nos collègues d'en face pourront expliquer quel est le but de cette ingérence, mais je ne le comprends pas.

En outre, le projet de loi C-65 ne respecte pas le partage des pouvoirs prévus dans la Constitution et l'interprétation qui en a toujours été faite, notamment parce qu'il repose sur une lecture beaucoup plus large de la définition de son territoire et parce qu'il ne respecte pas la responsabilité constitutionnelle conjointe qu'il


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partage avec les provinces sur certaines espèces. Cela rejoint donc ce que j'ai dit précédemment.

(1515)

Troisièmement, le projet de loi C-65 octroie au ministre de l'Environnement un large pouvoir discrétionnaire, notamment de décider de la nomination des membres du COSEPAC, de décider de l'inscription d'espèces par ailleurs désignées menacées ou en voie de disparition par le COSEPAC, de mettre en oeuvre ou non les plans de rétablissement.

Encore là, c'est le même problème quand on parle d'ingérence dans les juridictions, on dit que le ministre aura un large pouvoir discrétionnaire, notamment de décider les nominations du COSEPAC. Cela me fait penser à bien des projets de loi. Lorsqu'on a à former un comité ou quoi que ce soit, c'est toujours le ministre qui a le droit de nommer ses petits amis. J'écoutais mon collègue, le député de Frontenac, qui a parlé sur ce sujet tout à l'heure. Cette situation est dommage parce que la petite famille libérale restera très cloîtrée, ce n'est pas vraiment ouvert au public, on nomme nos copains, nos amis, ceux envers qui on a des dettes.

Je pourrais parler longtemps parce que j'en ai gros sur le coeur. On n'a qu'à penser à tous les candidats libéraux qui se sont fait battre aux dernières élections de 1993, je pense que 40 d'entre eux travaillent aujourd'hui dans la fonction publique canadienne, tout simplement parce qu'avec de bons contacts, ils ont rendu service au parti et on les récompense. Belle démocratie!

C'est tout le temps que j'ai alors je vous souhaite une très bonne élection, monsieur le Président. J'espère qu'on se reverra au mois de septembre prochain.

Le vice-président: C'est trop aimable à mon collègue. La parole est maintenant au député de Mégantic-Compton-Stanstead pour un recours au Règlement.

M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ): Monsieur le Président, je voudrais que vous vérifiez s'il y a le quorum.

Le vice-président: Il n'y a pas de quorum. Convoquez les députés.

(1520)

[Traduction]

Après le compte:

Le Président: Il y a quorum. Débat.

M. Francis G. LeBlanc (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Vous constaterez, je crois, qu'il y a consentement pour que:

Après le débat sur chacun des groupes, toutes les motions à l'étape du rapport du projet de loi C-65 soient considérées comme ayant été mises aux voix, le vote inscrit ayant été demandé et différé d'office.
Le Président: Aidez-moi à comprendre. Ce matin, il y a eu consentement unanime pour que toutes les motions soient considérées comme ayant été proposées et appuyées. Est-ce que le député propose bien d'ajouter autre chose? Est-ce que quelque chose m'a échappé? Elles ont été proposées et appuyées.

M. LeBlanc (Cap-Breton Highlands-Canso): Monsieur le Président, vous allez devoir être patient. Je suis les instructions qui m'ont été données. Il est proposé que, après le débat sur chacun des groupes, toutes les motions à l'étape du rapport du projet de loi C-65 soient considérées comme ayant été mises aux voies, le vote inscrit ayant été demandé et différé d'office.

Le Président: Je comprends. La Chambre consent-elle à ce que la motion soit présentée?

[Français]

M. Laurin: Monsieur le Président, je voudrais poser une question. On sera peut-être d'accord avec le dépôt de la motion, dépendemment du contenu. Mais dans le contenu, il me semble que mon honorable collègue a demandé que les motions soient réputées avoir été présentées et la mise aux voix reportée.

Si ce vote est reporté, à quand le sera-t-il? Si c'est reporté à plus tard aujourd'hui, c'est une chose, mais si c'est reporté à lundi prochain, c'est une tout autre chose. Je voudrais qu'on précise à quand le vote sera reporté et nous verrons si nous pouvons donner notre consentement.

Le Président: En réponse à votre question, mon collègue, d'habitude, toutes les mises aux voix sont reportées à la fin du débat. Si cela a lieu aujourd'hui, ça va, et si cela a lieu une autre fois, c'est correct aussi. Mais d'habitude, c'est à la fin du débat. Est-ce que cela répond à votre question?

(1525)

M. Laurin: Monsieur le Président, si c'est ça, il me semble que la motion de mon collègue est inutile. Il propose que le vote soit reporté. À la fin du débat, nous allons demander qu'il soit reporté. Alors, est-ce que cette motion a encore une utilité?

Le Président: Mon cher collègue, ce n'est au Président de dire quand le débat va se terminer, c'est à la Chambre de décider.

M. Laurin: On pourrait poser la question à mon collègue.

Le Président: Nous allons donc soumettre la question à notre collègue et nous verrons s'il a une réponse.

[Traduction]

M. Keyes: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Je voudrais tout juste préciser à la Chambre et notamment aux députés bloquistes que nous essayons de procéder exactement de la même manière que pour d'autres projets de loi, comme le C-44, afin d'accélérer le débat, mais en regroupant les amendements pour que nous puissions nous prononcer à la fin seulement au lieu de le faire au fur et à mesure sur chacun d'eux. Nous accélérons ainsi le débat pour que tous aient l'occasion d'intervenir. Les amendements sont regroupés pour que nous puissions nous prononcer sur l'ensemble à la fin du débat.


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Le Président: J'ai une question à poser au député de Cap-Breton Highlands-Canso. Est-ce que vous voulez préciser le moment? Je crois que c'est là le problème. Si vous pouviez donner cette précision, nous pourrions élucider la question.

M. LeBlanc (Cap-Breton Highlands-Canso): Monsieur le Président, je crois que le vote sera reporté à la prochaine séance. Est-ce que cela semble logique?

[Français]

Le Président: À la prochaine séance de la Chambre.

M. Laurin: Si la motion de mon collègue signifie qu'il veut reporter les mises aux voix à la prochaine séance, nous donnons notre consentement.

[Traduction]

Le Président: Le député est-il autorisé à proposer la motion?

[Français]

M. Bernier (Gaspé): Pour que ce soit encore plus clair, je comprends qu'il faut voter, et le vote final, c'est correct, on peut le différer, mais je veux bien comprendre la motion du député de Cap-Breton Highlands-Canso.

Il y a cinq groupes de motion. Est-ce que cela veut dire que les votes qui doivent être pris à la fin du groupe 1, du groupe 2, du groupe 3, du groupe 4 et du groupe 5 n'auront lieu qu'à la fin? Donc, il ne sera pas nécessaire que cinq députés se lèvent pour demander ce vote.

M. Laurin: C'est ça. Ils vont tous être reportés à lundi.

[Traduction]

M. Keyes: Oui, monsieur le Président, le député a tout à fait raison. Nous allons reporter tous les votes à la fin de la journée. La présidence fera alors sonner le timbre et le vote sera différé à lundi.

Le Président: Le député est-il autorisé à proposer la motion?

Des voix: D'accord.

Le Président: Vous saisissez les termes de la motion. Acceptez-vous les termes de la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Le Président: Avant la reprise du débat, je dois donner la parole au député de Thunder Bay-Atikokan, qui soulève la question de privilège.

* * *

QUESTION DE PRIVILÈGE

LE DIX-POUR-CENT DE THUNDER BAY-ATIKOKAN

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan, Lib.): Monsieur le Président, hier, le 23 avril, le député de Vancouver-Nord a fait une déclaration à la Chambre, pendant la période de questions, et a mentionné un bulletin parlementaire que j'avais publié.

(1530)

Première rectification: il ne s'agissait pas d'un bulletin parlementaire, mais d'un dix-pour-cent. Cependant, il y a un mystère qui plane. J'exige qu'on tente de l'élucider.

Ces dix-pour-cent se trouvaient uniquement à deux endroits, hier, sur la colline. L'un d'eux était dans mon bureau et l'autre, dans des boîtes au bureau de poste situé au premier étage de l'édifice de l'Ouest.

Ce n'est peut-être qu'une coïncidence que le député de Vancouver-Nord ait un bureau situé juste à côté du bureau de poste et qu'il ait, d'une façon ou d'une autre, obtenu un exemplaire de cette publication.

Le Président: Je ne voudrais pas ralentir les travaux de la Chambre pour des questions de forme, mais le député m'a-t-il avisé au préalable qu'il soulèverait la question de privilège?

M. Dromisky: Oui, je vous ai transmis une note, monsieur le Président.

Le Président: Il semble y avoir ici un mystère. Voici ce que je propose: je vais faire de mon mieux pour l'élucider. Je tâcherai d'obtenir les renseignements et de les communiquer à la Chambre. Cela convient-il au député?

M. Dromisky: Cela me convient, monsieur le Président.

* * *

[Traduction]

LOI SUR LA PROTECTION DES ESPÈCES EN PÉRIL AU CANADA

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-65, Loi concernant la protection des espèces en péril au Canada, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement, ainsi que des motions nos 1, 3, 4, 6, 7, 11, 19, 25, 27, 50, 54, 56 à 60, 62, 63, 65, 66 et 82 à 109.

(Les votes sont réputés demandés et reportés.)

[Français]

Le Président: Il faut toujours prendre une question de privilège avant toute autre chose. C'est pour cela que je l'ai fait.

Nous reprenons le débat.

[Traduction]

Conformément à un accord conclu plus tôt, toutes les motions du groupe no 2 sont réputées avoir été proposées et appuyées.

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ) propose:


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Motion no 2
Que le projet de loi C-65, à l'article Préambule, soit modifié par substitution, aux lignes 32 et 33, page 1, de ce qui suit:
«les divers ordres de gouvernement et qu'en vertu de l'Accord national pour la protection des espèces en péril, la concertation est essentielle en vue d'établir»
Motion no 16
Que le projet de loi C-65, à l'article 3.1, soit modifié par substitution, aux lignes 1 à 14, page 6, de ce qui suit:
«3.1 Si le ministre provincial signifie au ministre que le gouvernement de la province ne veut pas qu'une disposition de la loi ou des règlements pris sous son empire s'applique dans la province à l'égard des espèces sauvages et de leur habitat pour autant que les individus de ces espèces se trouvent dans cette province sur un territoire ne faisant pas partie du territoire domanial, cette disposition ou les règlements, selon le cas, ne s'applique pas à ces espèces et à leur habitat jusqu'à ce que le ministre provincial consente à leur application à ces espèces et à leur habitat.»
Motion no 21
Que le projet de loi C-65, à l'article 5, soit modifié par substitution, dans la version française, aux lignes 28 et 29, page 7, de ce qui suit:
«disparition des espèces sauvages et à per-»
Motion no 24
Que le projet de loi C-65, à l'article 7, soit modifié par adjonction, après la ligne 31, page 8, de ce qui suit:
«(3) Par dérogation au paragraphe (2), le ministre compétent ne peut conclure d'accord en vertu de ce paragraphe avec une organisation ou une personne dans une province à moins que le ministre n'avise le ministre provincial de cette province de l'intention du ministre compétent de conclure un accord avec cette organisation ou cette personne et que le ministre provincial de cette province n'informe le ministre compétent que le gouvernement de la province ne s'oppose pas à ce que le ministre compétent conclue un tel accord avec cette organisation ou cette personne.»
Motion no 26
Que le projet de loi C-65, à l'article 8, soit modifié par adjonction, après la ligne 11, page 9, de ce qui suit:
«(1.1) Par dérogation au paragraphe (1), le ministre compétent ne peut conclure d'accord en vertu de ce paragraphe avec une organisation ou une personne dans une province à moins que le ministre n'avise le ministre provincial de cette province de l'intention du ministre compétent de conclure un accord avec cette organisation ou cette personne et que le ministre provincial de cette province n'informe le ministre compétent que le gouvernement de la province ne s'oppose pas à ce que le ministre compétent conclue un tel accord avec cette organisation ou cette personne.»
Motion no 34
Que le projet de loi C-65, à l'article 20, soit modifié par substitution, à la ligne 16, page 13, de ce qui suit:
«(2) Sur recommandation du COSEPAC et avec l'agrément du Conseil, le»
Motion no 35
Que le projet de loi C-65, à l'article 26, soit modifié par substitution, à la ligne 1, page 15, de ce qui suit:
«26.1 Sur l'avis du COSEPAC et avec l'agrément du Conseil, le ministre»
Motion no 44
Que le projet de loi C-65, à l'article 33, soit modifié par adjonction, après la ligne 29, page 16, de ce qui suit:
«(1.1) Si le ministre provincial signifie au ministre que le gouvernement de la province ne veut pas que le paragraphe (1) s'applique dans la province à l'égard d'une espèce faunique pour autant que les individus de l'espèce se trouvent dans cette province sur un territoire ne faisant pas partie du territoire domanial, ce paragraphe ne s'applique pas à cette espèce jusqu'à ce que le ministre provincial consente à l'application de ce paragraphe à cette espèce.»
Motion no 49
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié (a) par substitution, à la ligne 1, page 21, de ce qui suit:
«38.(1) Avec l'aide du Conseil, le ministre compétent élabore un»
(b) par substitution, à la ligne 10, page 21, de ce qui suit:
«par eux avec l'aide du Conseil.»
Motion no 55
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, à la ligne 38, page 21, de ce qui suit:
«(4) Sur l'avis du COSEPAC et avec l'aide du Conseil, le ministre»
Motion no 64
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, à la ligne 1, page 23, de ce qui suit:
«(6) Avec l'aide du Conseil, le ministre compétent fixe la teneur du»
M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD) propose:

Motion no 15
Que le projet de loi C-65, à l'article 3, soit modifié par substitution, aux lignes 40 à 43, page 5, de ce qui suit:
«leur habitat.»
L'hon. Sergio Marchi (ministre de l'Environnement, Lib.) propose:

Motion no 17
Que le projet de loi C-65, à l'article 3.1, soit modifié:
a) par substitution, à la ligne 3, page 6, de ce qui suit:
«règlements pris au titre des articles 42 ou 45.1 ne sont»
b) par substitution, aux lignes 6 et 7, page 6, de ce qui suit:
«cette espèce et l'habitat de celle-ci se retrouvent sur le territoire domanial. Cette restriction au territoire domanial ne s'appli-»
c) par substitution, à la ligne 10, page 6, de ce qui suit:
«visés aux alinéas 3a) ou b) ou à l'article 33;»
Motion no 45
Que le projet de loi C-65, à l'article 33, soit modifié:
a) par substitution, à la ligne 38, page 16, de ce qui suit:
«équivalentes à l'égard de l'espèce en cause. Le décret n'affecte en rien l'application du paragraphe (1) dans le territoire domanial.»
b) par substitution, à la ligne 1, page 17, de ce qui suit:
«(4) Dès lors, toute personne peut, dans les»

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Motion no 74
Que le projet de loi C-65, à l'article 46, soit modifié par substitution, aux lignes 19 à 23, page 25, de ce qui suit:
«touchant une espèce inscrite, ses résidences ou toute autre partie de son habitat essentiel.»
Motion no 81
Que le projet de loi C-65, à l'article 49, soit modifié par substitution, à la ligne 14, page 27, de ce qui suit:
«projet mis en oeuvre à l'extérieur du Canada, de son plateau continental et de sa zone économique exclusive,»
M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur la deuxième série d'amendements.

La plupart des Canadiens approuvent l'objet du projet de loi dont nous sommes saisis, c'est-à-dire la protection des espèces en péril. Cependant, dans sa forme actuelle, le projet de loi cause de nombreux problèmes aux propriétaires fonciers, aux usagers et à ceux qui s'intéressent vraiment aux espèces en péril, parce qu'il s'en prend non seulement aux propriétaires fonciers, aux usagers et à ceux qui s'intéressent à la nature, mais aussi aux espèces qui sont déjà menacées.

De toute évidence, ce projet de loi n'a pas été pensé avec beaucoup d'attention. Permettez-moi d'abord de lire une brève déclaration de M. Jack Munro, président de la Forest Alliance of British Columbia. Il a déclaré: «Tout d'abord, le projet de loi n'accorde pas du tout assez d'attention aux effets sociaux et économiques. Je ne dis pas que la protection des espèces en péril ne mérite pas qu'on paie un certain prix, mais je dis que nous devrions évaluer ce prix et être certains de trouver un moyen juste de décider qui doit le payer. Tout ce qui est prévu à cet égard dans le projet de loi est l'article 38, qui fait état de la nécessité d'évaluer les coûts et les avantages des activités de recherche et de gestion. L'on peut supposer que cela englobe les coûts sociaux et économiques, tels les emplois perdus si la récolte du bois n'est plus autorisée dans une région donnée. Mais lorsqu'il s'agit de quelque chose d'aussi critique que les emplois et le genre de vie des gens, nous ne devrions pas avoir à présumer quoi que ce soit. Le gouvernement devrait être tenu de faire beaucoup plus qu'une simple évaluation générale des coûts et des avantages.»

(1535)

À mon avis, le grand reproche qu'on peut faire à propos du projet de loi, c'est le manque de réflexion qu'on y a consacrée. Le ministre de l'Environnement n'a malheureusement pas réfléchi à ce que le projet de loi C-65 coûtera à l'ensemble des propriétaires fonciers et des contribuables. Quand on lui a demandé, lors d'une séance du comité en février, quel coût il serait prêt à imposer à un particulier ou à une société, le ministre de l'Environnement a répondu qu'il n'avait pas réfléchi à ce seuil.

Il n'est pas étonnant que les Canadiens s'inquiètent des répercussions que cette mesure aura sur leur vie. Le ministre responsable du projet de loi C-65 n'a même pas pris leurs besoins en considération. Il n'a même pas pris le temps d'examiner en détail la possibilité que cette mesure puisse avoir des répercussions négatives sur la vie des Canadiens de même que sur l'économie du pays. Ce genre de vision étroite est caractéristique du gouvernement actuel qui tend à légiférer pour le bien d'un groupe d'intérêts après l'autre, sans tenir compte de l'ensemble des Canadiens et de leurs besoins, des bienfaits qu'ils méritent et de la jouissance à laquelle ils ont droit.

Les projets de loi que le gouvernement présente pour répondre aux souhaits de tant de groupes d'intérêts ont une caractéristique qui m'inquiète beaucoup. Je m'inquiète en effet de cette attitude générale que l'on voit inscrite dans les projets de loi, consistant à dépouiller la Chambre et le Parlement de la responsabilité à l'égard de beaucoup de questions pour la confier au Cabinet en laissant de plus en plus de discrétion aux ministres et en les soustrayant à l'obligation de rendre des comptes au Parlement, aux représentants élus du peuple.

Je viens d'exposer plusieurs lacunes que je constate dans le projet de loi C-65, sur les espèces sauvages en péril. Voilà pourquoi les députés réformistes ne peuvent appuyer le projet de loi, même s'ils sont favorables à la protection de ces espèces en voie de disparition. Le projet de loi a besoin d'être amendé. Il faut qu'il le soit pour obtenir l'appui des Canadiens. Il faut le réécrire entièrement. Il doit dépasser les intérêts des groupes d'intérêts et leurs programmes d'action.

Voilà pourquoi le Parti réformiste a proposé à la Chambre 42 propositions d'amendement au projet de loi C-65. Ces amendements exigeraient du ministre qu'il prenne en considération les répercussions sociales et économiques que pourrait avoir une mesure pour la protection des espèces en voie de disparition avant de la prendre. Le gouvernement devrait assurer une juste indemnisation aux propriétaires fonciers et aux utilisateurs. Il devrait s'assurer la coopération de tous les intéressés, et il devrait surtout s'engager à protéger les espèces en péril. Cela n'a certainement pas été inscrit dans le projet de loi.

(1540)

Les propriétaires fonciers et les utilisateurs, qui gagnent leur vie en exploitant ces terres, se sentent menacés. S'ils devaient apprendre que leur propriété pourrait être amputée de certains secteurs où l'on voudrait protéger des espèces en péril et que leur revenu s'en trouverait réduit, comment réagiraient-ils? Les éleveurs et les propriétaires fonciers ont déjà déclaré qu'ils laboureraient alors leurs terres, qu'ils détruiraient tout, ce qui aurait pour effet de dissiper toute menace.

Ce n'est pas le but que nous visons. Nous cherchons une façon légitime et juste de protéger les espèces en péril au Canada.

J'encourage la Chambre à apporter au projet de loi C-65 les amendements constructifs, justes et objectifs que propose le Parti réformiste.

Je rappelle brièvement que nous visons trois objectifs. Nous pourrions les appeler les trois engagements à prendre pour les espèces en péril. Premièrement, il faudrait obtenir l'engagement de tout le monde de protéger les espèces menacées. Deuxièmement, il faudrait s'engager à indemniser de façon juste ceux qui subiront une


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perte ou un préjudice quelconque en raison de la protection des espèces en péril. Troisièmement, il faudrait qu'il y ait collaboration.

Il faudrait donc prendre un engagement, accepter de collaborer et indemniser les gens touchés. Si ces trois engagements étaient pris, si ces objectifs étaient inscrits dans le projet de loi, le Parti réformiste n'aurait aucun mal à appuyer la mesure législative.

Je rappelle à la Chambre que le Parti réformiste appuie la protection responsable des espèces en péril, mais n'appuie pas le projet de loi C-65 sous sa forme actuelle. Le projet de loi doit être complètement révisé. Par conséquent, si le gouvernement refuse d'adopter les 42 amendements proposés par les réformistes, je voterai contre le projet de loi C-65.

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, j'ai suivi attentivement les observations des partis d'opposition et je tiens à dire quelques mots au sujet du premier groupe d'amendements.

Les députés réformistes ont fait valoir deux points fondamentaux. D'abord, ils estiment que cette mesure législative est similaire à celle qui a été adoptée aux États-Unis et que nous risquons d'avoir des émeutes aussi graves que celles qu'il y a eues dans les localités forestières des États-Unis à cause du hibou. Je tiens à signaler que cette mesure législative n'a absolument rien à voir avec celle qui a été adoptée aux États-Unis. Elle ressemble davantage en fait à celle qui est en vigueur en Ontario et dans d'autres provinces, où il n'y a pas eu de perturbations importantes. On n'a pas vraiment empiété sur les droits des propriétaires terriens.

Les députés réformistes devraient cesser de répandre toute cette désinformation au sujet du projet de loi. Ils devraient le lire tel qu'il est, faire leurs recherches et comprendre que nous ne sommes pas ici aux États-Unis où les lois s'appliquent très différemment.

Ensuite, ils parlent d'indemnisation. S'ils connaissaient le moindrement la loi canadienne, ils sauraient que le droit d'être indemnisé lorsqu'un pouvoir public supprime un droit privé est bien fondé en loi et qu'on aurait droit à une indemnisation, que ce projet de loi le prévoie ou pas. C'est un principe bien établi en common law.

De façon générale, la protection des espèces ne peut être assurée que grâce à la collaboration et au partenariat étant donné qu'aucun gouvernement ne peut s'occuper à lui seul de toutes les espèces en voie de disparition. Le béluga, la grue blanche d'Amérique et le grand-duc d'Amérique ne connaissent pas de frontière politique.

Nous ne réussirons à protéger les espèces en péril que grâce à un partenariat avec les provinces, les territoires, les municipalités, les propriétaires terriens, les agriculteurs, les écologistes et les scientifiques, les autochtones et les Canadiens en général. L'approche coopérative a été maintes fois couronnée de succès. Le faucon pèlerin, par exemple, a niché l'an dernier à Toronto pour la première fois en plus de 40 ans. Il revient grâce au travail acharné de centaines, voire de milliers de personnes de tous les ordres de gouvernement et de localités de tout le Canada.

(1545)

Des biologistes de Timber West Forests et de MacMillan Bloedel collaborent avec des gouvernements provinciaux pour déménager la marmotte de l'île de Vancouver vers la toundra alpine nitinate. La poignée de marmottes qui vivent dans le bassin hydrographique de la Nanaïmo constitue toute la population mondiale de cette espèce. On s'efforce donc de réimplanter l'espèce dans une région qu'elle a peut-être déjà occupée. Ce ne sont là que quelques-uns des nombreux exemples de ce qu'on fait et de ce qu'on peut faire en collaboration.

Dans le contexte canadien, il faut commencer par comprendre que la protection des espèces relève de diverses compétences. Il ne s'agit pas d'un secteur de compétence exclusivement provinciale ou fédérale. Tous les paliers de gouvernement savent qu'il est nécessaire et avantageux de travailler ensemble, dans l'intérêt de la nature. Les provinces et les territoires coopèrent depuis longtemps pour protéger les espèces en péril. Pour que les efforts de rétablissement des espèces soient couronnés de succès, il faudra que tous les paliers de gouvernement poursuivent leur coopération.

À Charlottetown, l'an dernier, il y a eu une entente de principe au sujet de l'Accord national sur la protection des espèces en péril. Cet accord reconnaît l'importance capitale de la coopération et de la collaboration pour la conservation et la protection des espèces en péril. La conservation des espèces est essentielle si l'on veut préserver la biodiversité du Canada.

Les gouvernements doivent agir comme des chefs de file en fournissant de l'information valable et en adoptant des mesures de conservation et de protection judicieuses. Il est essentiel que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux adoptent des mesures législatives et des programmes complémentaires pour régler efficacement les problèmes de conservation des espèces. Le dernier aspect, mais non le moindre, c'est la participation indispensable des Canadiens.

En vertu de cet accord, les gouvernements ont convenu d'élaborer des mesures législatives et des programmes complémentaires pour protéger efficacement les espèces en péril partout au Canada. Cet accord reconnaît le Comité sur le statut des espèces menacées de disparition au Canada comme conseiller indépendant, relativement aux espèces en péril à l'échelle nationale.

Enfin, l'accord établit, au niveau ministériel, un conseil pour la conservation des espèces en péril au Canada. Ce conseil établira les orientations nécessaires et déploiera les efforts voulus pour que l'accord soit couronné de succès.

Quatre provinces, le Manitoba, le Québec, le Nouveau-Brunswick et l'Ontario, ont adopté une loi sur la protection des espèces en péril. La Nouvelle-Écosse vient de déposer un projet de loi à cet égard, et le ciel ne nous est pas tombé sur la tête. D'autres provinces et territoires ont des programmes qui visent spécifiquement la protection des espèces en péril.


10195

En présentant le projet de loi C-65, le gouvernement remplit son obligation dans le cadre de l'accord national sur la protection des espèces en péril. Ce projet de loi répond à nos obligations internationales aux termes de la convention sur la diversité biologique.

Dans la même veine, le ministre de l'Environnement vient de signer, au nom du gouvernement, une entente cadre de coopération et de protection des espèces en péril tant au Canada qu'aux États-Unis.

L'entente cadre de coopération favorisera la formation de partenariats avec tous les ordres de gouvernement des deux pays ainsi que le secteur privé en matière de protection des espèces en péril. Les deux organismes élaboreront un plan de travail et une liste initiale d'espèces prioritaires communs d'ici décembre 1997. Je félicite tant le gouvernement du Canada que celui des États-Unis d'avoir conclu une telle entente historique.

Reconnaissant la nature continentale des espèces menacées de disparition et de leur habitat, le Canada et les États-Unis ont également l'intention d'inviter le Mexique à adhérer à l'entente. Cette collaboration transfrontalière est très importante. Par exemple, le papillon monarque, qui a été ajouté à notre liste d'espèces en péril la semaine dernière seulement, est toujours menacé dans son habitat d'hiver au Mexique. Le monarque amorce sa migration à partir de deux points en Ontario: l'un d'eux est Long Point, dans ma circonscription, d'où il amorce sa migration vers le Mexique, où il est menacé par des insecticides et d'autres dangers. Ce n'est qu'en collaborant étroitement que l'Ontario et le Mexique réussiront à bien protéger le papillon monarque.

Le projet de loi C-65 reflète l'importance du rôle de chef de file que joue le gouvernement fédéral dans la protection et le rétablissement de nos espèces transfrontalières internationales en péril. Le gouvernement fédéral s'assurera que ces espèces reçoivent une protection immédiate après leur inscription sur la liste et dirigera les efforts visant leur rétablissement, au Canada et dans les pays partenaires.

Ce projet de loi est vraiment un exemple de coopération. Il ne remplace pas les mesures provinciales, il les complète. Il ne remplace pas les cadres de travail provinciaux, il les complète.

Le projet de loi respecte le rôle que chacun des gouvernements a toujours assumé, par tradition et selon la Constitution, dans la protection et la conservation des espèces sauvages. Les nouvelles dispositions proposées reconnaissent officiellement les compétences des provinces et des territoires en ce qui a trait à la gestion des espèces en voie de disparition.

En fait, dans une lettre aux gouvernements provinciaux, le gouvernement fédéral a fait part de sa volonté de négocier un accord d'équivalence pour la protection des espèces transfrontières internationales et de l'intérêt qu'il porte à ce dossier. Le projet de loi reconnaît que la protection de l'habitat est un élément fondamental de la protection des espèces.

(1550)

Nous avons de gros défis qui nous attendent. La superficie de nos habitats marécageux a été réduite de 70 p. 100 à 80 p. 100 dans certaines régions du Canada. Ailleurs, ce sont 85 p. 100 à 90 p. 100 des arbres des vieilles forêts qui ont été abattus. La superficie des prairies à hautes herbes a été réduite de 99 p. 100 depuis le début de la colonisation. Moins nous avons d'habitats naturels, plus il importe de protéger ce qu'il en reste.

En vertu de ce projet de loi, quand une espèce est inscrite sur la liste, tout ce qui peut nuire à son lieu de résidence, que ce soit une tanière, un nid ou un terrier sera interdit. Le projet de loi va au-delà de la protection du lieu même occupé par une espèce. Les plans de rétablissement doivent prévoir toutes les formes de menace à la survie des espèces, y compris ce qui peut nuire à des habitats critiques.

Nous comptons sur les scientifiques pour nous dire qu'est-ce qui constitue un habitat critique et quelles sont les mesures à prendre pour le protéger. Nous avons le devoir, envers les générations futures, de faire en sorte que les espèces sauvages qui existent au Canada au XXe siècle soient toujours là au XXIe siècle et pour les siècles des siècles.

Nous avons là un projet de loi important. Je crois que c'est un objectif honorable que d'empêcher l'extinction des espèces. C'est un objectif qui garantit que nos enfants et nos petits-enfants hériteront d'un pays à la flore et à la faune aussi riches que maintenant. Je demande à tous les députés d'appuyer ce projet de loi.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole sur le groupe de motions no 2 du projet de loi C-65.

Le Bloc québécois a déposé des motions dans ce groupe no 2. J'aimerais tout d'abord attirer l'attention des députés et de la population qui nous écoute. Je vois des députés d'en face qui me font des gestes alors je réponds de la main moi aussi.

Le Bloc a déposé plusieurs motions faisant partie de ce groupe no 2, soit la motion no 2, la motion no 16 qui concerne l'article 3, la motion no 21 qui concerne l'article 5, les motions nos 24 et 26 qui concernent les articles 7 et 8, la motion no 44 qui concerne l'article 33, ainsi que les motions nos 49, 55, 64 et 68.

Principalement, ces motions ont pour but de répéter au gouvernement et d'inscrire dans la loi le principe voulant qu'il devait y avoir concertation entre les provinces et le fédéral plutôt qu'une suprématie de pouvoir, telle que celle que semble se donner le ministre de l'Environnement dans l'actuel projet de loi C-65.

Je rappellerai d'emblée que lorsque l'actuel ministre de l'Environnement a voulu donner naissance au projet de loi C-65, il avait d'abord-«donner naissance» sont peut-être de bien grands mots. Je vois certains de mes confrères qui se retournent, mais on ne sait jamais de quelle façon le ministre de l'Environnement, lui, voit la chose. Je continuerai dans la même veine. Lorsque le ministre a voulu former l'embryon du projet de loi C-65, ce fut d'abord par une


10196

rencontre des ministres provinciaux et du ministre fédéral qui a eu lieu au mois de septembre 1996.

Ladite rencontre a débouché sur une entente de principe, un accord dit national.

M. Bellehumeur: Il a accouché.

M. Bernier (Gaspé): On me signale que le ministre, accompagné de ses confrères a accouché, effectivement, si on veut parler toujours dans la même veine.

Je reprends donc le fil de mes idées en laissant aller celles de mes collègues. Cela a donné naissance au projet de loi C-65. On parlait d'un accord national dans lequel on s'entendait sur un mécanisme pour établir la liste des espèces dites menacées au Canada.

Les ministres de l'Environnement des autres provinces sont un peu tombés sur le derrière-excusez l'expression-lorsqu'ils ont vu le ministre, à la fin d'octobre 1996, donc à peine 30 jours après l'accord dit national avec ses homologues provinciaux, accoucher d'un projet de loi.

(1555)

Trente jours plus tard, il accouche d'un projet de loi qui lui permet, à lui, d'encadrer et d'indiquer la façon dont on dressera la liste des espèces, et quelles mesures on mettra de l'avant pour s'assurer que les espèces soient protégées.

Dans ce contexte de l'environnement, soit la protection des espèces menacées, tout le monde est pour la vertu. Le Bloc québécois est d'accord pour protéger les espèces menacées et le ministre québécois de l'Environnement est d'accord là-dessus, lui aussi. Cependant, c'est la façon dont le ministre s'y prend.

Au Québec, nous avons déjà une loi qui permet de protéger les espèces menacées et des règlements qui nous donnent les moyens de les protéger. Comment se fait-il qu'à Ottawa, l'actuel ministre de l'Environnement arrive et se donne une suprématie de pouvoirs afin d'intervenir sur nos territoires? On était prêts à travailler en concertation avec lui. Comment se fait-il qu'il veuille passer par-dessus la tête des provinces? C'est là que le bât blesse.

Permettez-moi de rapporter quelques petites citations. Le projet de loi C-65 a pris naissance parce que le Canada souhaite-et je pense que le Québec, comme futur pays, va le souhaiter lui aussi-être en conformité avec la Convention internationale sur la biodiversité de l'ONU, signée en 1992. Cette Convention prévoit que «le signataire formule ou maintient en vigueur les dispositions législatives et autres dispositions réglementaires nécessaires pour protéger les espèces et les populations menacées». Il s'agit de l'article 8k) de la Convention.

Est-ce que le Canada avait besoin du projet de loi C-65 à la grandeur du territoire, alors que quatre provinces ont déjà des dispositions et une loi protégeant leur environnement et les espèces menacées? Elles ont déjà des règlements pour prévoir et voir à la protection de ces espèces. Je pense que c'est, encore une fois, pour Ottawa, chercher la confrontation avec les provinces, qui, elles, ne désirent pas voir quelqu'un venir jouer dans leur jardin.

Les libéraux, dans leur livre rouge, avaient dit: «Nous souhaitons une société qui protège à long terme la santé et la diversité de toutes les espèces qui peuplent notre planète.» Jusque-là, ça peut aller encore, parce que, déjà au Québec et dans d'autres provinces, tels l'Ontario, le Manitoba et le Nouveau-Brunswick, des législations existaient. Ils n'avaient qu'à encourager leurs homologues des provinces qui n'avaient pas encore de telles législations à le faire, ou, à tout le moins, soustraire les provinces qui avaient déjà prévu une disposition. Mais là, ce n'est pas le cas. Vous comprendrez que le Bloc québécois ne peut accepter que le ministre actuel de l'Environnement veuille se donner de tels pouvoirs.

J'aimerais citer, pour être bien sûr qu'on se comprenne lorsque je dis qu'on représente les intérêts des Québécois, le ministre de l'Environnement du Québec, M. Cliche. Il avait signé lui-même ledit accord prévoyant la façon d'établir la liste des espèces menacées, mais c'était une entente de principe dans laquelle les gens s'entendaient pour dire qu'ils étaient d'accord avec ça. Mais chacun, après avoir établi la liste, s'organisait pour faire respecter la loi chez eux.

Alors, M. Cliche disait, le 2 octobre 1996: «Nous ne pouvons rester indifférents au fait que cet accord ouvre la porte aux chevauchements entre l'éventuelle législation fédérale et la loi déjà en vigueur depuis 1989-on parle de la loi québécoise-une loi qui fonctionne bien et qui donne déjà des résultats. Nous risquons de vivre de nouvelles lourdeurs administratives plutôt que de consacrer nos énergies à ce qui nous tient réellement à coeur, c'est-à-dire le sort des espèces menacées.» On voit très bien, autant le Bloc québécois que le Parti québécois qui forme le gouvernement du Québec à l'heure actuelle, que tout le monde cherche à protéger le sort des espèces menacées.

Cependant, on n'est pas d'accord avec les moyens que se donne le ministre dans l'actuel projet de loi C-65. S'il voulait que ce projet de loi soit acceptable, tant par les provinces que par le Bloc québécois, pourquoi n'a-t-il pas accepté les amendements que nous avons déposés au comité et pourquoi n'accepteront-ils pas les amendements que nous déposons aujourd'hui encore, à l'étape du rapport?

(1600)

Je rappelle que les amendements que l'on dépose n'ont pour but que de s'assurer, parce qu'il y a une disposition légale qui fait en sorte que ce n'est pas formel, et comme il y a vice de procédure, le fédéral essaie de s'ingérer, de prendre un peu plus de territoire au niveau de la juridiction de l'environnement, et cela ne fait pas l'affaire du Québec, de l'Ontario, du Manitoba et du Nouveau-Brunswick. Ils ont déjà de telles législations.

Somme toute, le projet de loi C-65 octroie des pouvoirs extrêmement larges au fédéral en matière de protection des espèces. Ce qui est d'autant plus choquant, c'est que ce projet de loi a été fabriqué 30 jours après qu'on ait conclu un accord entre les provinces. Ce volte-face a fait réagir plus d'un ministre provincial.

Encore une fois, pour un ministre qui prônait une harmonisation lors de la rencontre de Charlottetown, le ministre actuel de l'Environnement a accouché d'une loi englobante un peu trop écrasante par rapport aux juridictions des autres provinces. Nous demandons


10197

aux collègues d'en face de comprendre le bon sens et de bien vouloir voter pour les propositions du Bloc québécois.

[Traduction]

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, nous examinons aujourd'hui le projet de loi C-65, qui vise à mettre en place des mesures pour protéger les espèces en péril.

Le Canada jouit d'un environnement naturel extrêmement riche, l'un des plus riches au monde, et nous en sommes très fiers. L'environnement joue un rôle important dans la qualité de la vie au Canada. C'est un legs merveilleux que nous devons préserver et protéger pour nos enfants.

Le cinquième principe fondamental du Parti réformiste est le suivant: «Nous croyons que l'identité canadienne et la vision de notre avenir devraient découler et s'inspirer d'une nouvelle reconnaissance de notre pays et de l'importance suprême du fait que notre bien-être, de même que l'exploration, le développement, le renouvellement et la conservation de nos ressources naturelles et de notre environnement physique font partie de notre culture.» En outre, la politique réformiste prévoit un certain nombre de mesures dans le domaine de la réforme de l'environnement, dont le développement durable, une action concertée, le contrôle de la pollution et un zonage respectueux de l'environnement.

Étant donné le rôle essentiel que les écologistes, les travailleurs forestiers, les agriculteurs, les éleveurs et beaucoup d'autres citoyens jouent dans la protection des espèces en péril, nos législateurs et la législation doivent tenir compte de tout un tas de besoins et d'intérêts et trouver un juste milieu.

Le projet de loi C-65 donne au ministre le pouvoir de prendre des arrêtés d'urgence visant la protection d'une espèce sauvage. Quand cela a pour conséquence de restreindre les activités socio-économiques dans une région, les pertes et les coûts ou les charges financières correspondant doivent être justement répartis.

Beaucoup d'utilisateurs de terres veulent que l'on tienne compte de leurs droits et de leurs préoccupations lorsque sont mises en oeuvre des mesures visant à protéger notre habitat naturel. Cela inclut la dépréciation de la propriété, la réduction des possibilités de loisirs et la réduction des terres disponibles à des fins d'activités économiques. Je ne suis pas persuadée que le projet de loi C-65 soit adéquat sur cette question importante. Il faut trouver des façons de dédommager comme il se doit les citoyens qui perdent leurs droits d'utilisation de terrains. Cela va exiger des consultations étroites avec les intéressés de toutes les régions.

Il est très intéressant de remarquer, comme d'autres députés l'ont signalé, qu'on a élaboré un accord cadre avec certaines des provinces au sujet de la protection des espèces en voie de disparition. En fait, c'est un accord que les gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral ont conclu il y a environ sept mois, et nous voilà maintenant saisis d'une mesure, le projet de loi C-65, qui va tout à fait à l'encontre de cet accord cadre conclu entre tous les ordres de gouvernement.

(1605)

Nous devons demander comment, en tant que législateurs fédéraux, nous pouvons maintenir la confiance des gens, notre crédibilité et la collaboration au sein de la fédération si nous concluons un accord cadre et si, sept mois plus tard, nous essayons d'adopter un projet de loi qui viole cet accord et en fait complètement fi.

J'ai en main deux lettres de ministres de l'Environnement qui, de la façon la plus polie possible, nous font part de la colère et des craintes des gouvernements provinciaux face à cette action répugnante de la part du gouvernement fédéral et du ministre fédéral de l'Environnement.

Dans une lettre du 24 janvier 1997 que M. Graham, le ministre de l'Environnement du Nouveau-Brunswick, dit ce qui suit à son homologue fédéral:

On m'a demandé, au nom des ministres provinciaux et territoriaux responsables de la faune, de vous faire part de nos observations au sujet du projet de loi C-65.
Il parle ensuite des efforts concertés que tous les ordres de gouvernement ont déployés au cours des 25 dernières années pour préserver et protéger les espèces en voie de disparition et, en fait, toutes les espèces au Canada. Il ajoute:

Grâce à des efforts acharnés et une coopération continue au cours des deux dernières années entre les organismes provinciaux, territoriaux et fédéraux responsables de la faune, on a pu élaborer un cadre national pour la conservation des espèces en péril au Canada. Il s'agissait d'une réalisation marquante étant donné la complexité biologique et politique d'un pays aussi grand et diversifié que le nôtre en ce qui concerne les espèces et le type de terres. On a officialisé l'appui politique pour ce cadre et un engagement clair en ce qui concerne la conservation des espèces en péril au Canada lorsque tous les ministres responsables de la faune au Canada ont souscrit à l'Accord national sur la protection des espèces en péril à l'occasion d'une réunion tenue à Charlottetown, à l'Île-du-Prince-Édouard, le 2 octobre 1996.
On ajoute dans la lettre que le projet de loi C-65 viole l'esprit et la lettre de cet accord. On précise exactement les dispositions qui posent un problème. Si des députés veulent prendre connaissance de cette lettre, je serais heureuse de la déposer à la Chambre.

Nous estimons que l'Accord national et le Cadre national illustrent les résultats que l'on peut attendre quand on travaille en collaboration. Cette occasion, nous ne devrions pas la laisser échapper sous prétexte que nous ne pouvons ou ne voulons pas collaborer entre nous à la résolution de nos différends. Nous croyons savoir que le comité permanent terminera son examen début février. De toute évidence, il est urgent de régler ces problèmes.
Malheureusement, les préoccupations qui ont été exprimées si clairement et dûment portées à l'attention du ministre de l'Environnement et des membres du Comité de l'environnement sont restées sans réponse.

J'ai une lettre en date du 26 mars 1997 du ministre de la Protection de l'environnement de l'Alberta. Le ministre dit ceci:

Je vous écris pour vous exprimer l'inquiétude grandissante que m'inspire le projet de loi C-65, Loi concernant la protection des espèces en péril au Canada. Tous les ministres provinciaux et territoriaux qui s'occupent de la faune au Canada ont formulé plusieurs réserves sérieuses à l'égard du projet de loi. L'honorable Alan Graham a récemment écrit à l'honorable Sergio Marchi lui-même, au nom de mes collègues et de moi-même, pour lui faire part de ces préoccupations.


10198

La lettre du ministre est celle dont je viens tout juste de citer des extraits.

Le Comité permanent de l'environnement et du développement durable a terminé ses délibérations et, malheureusement, la plupart des inquiétudes soulevées n'ont pas trouvé réponse.
Le ministre a réclamé une réponse aux principaux problèmes et aux grandes préoccupations qu'ont soulevés les gouvernements provinciaux et territoriaux. Le ministre souligne la nécessité d'une approche axée sur la collaboration et l'harmonie avec les organismes provinciaux et territoriaux qui s'occupent de la faune et inscrite dans une entreprise collective visant à modifier cette mesure législative. Malheureusement, cette fois-ci encore, ces accords et les discussions auxquels ils ont donné lieu, de même que leurs résultats, sont, dans une large mesure, laissés-pour-compte dans cette mesure législative.

(1610)

Voici le moment d'offrir une vue d'ensemble à partir de tous ces éléments. Nous constatons deux approches différentes au niveau fédéral lorsqu'il s'agit de régler des problèmes qui touchent le Canada et les Canadiens. La protection des espèces en péril dont il est question ici n'est qu'un exemple parmi tant d'autres de ces deux approches.

L'approche ancienne, celle que pratique malheureusement le gouvernement libéral, consiste à adopter une attitude paternaliste, centralisatrice, qui revient à cantonner le processus décisionnel à Ottawa. Il importe peu que les autres parties intéressées aient des préoccupations. Peu importe même si des ententes claires sont simplement écartées du revers de la main. On a l'impression que le gouvernement fédéral et ses ministères peuvent tout simplement faire abstraction des désirs d'autres paliers de gouvernement, voire des ententes auxquelles ils sont parvenus après des discussions, et mettre son propre cadre en place.

Il y a une meilleure façon de faire. Le Parti réformiste estime que le gouvernement fédéral doit concentrer ses efforts sur dix secteurs précis qui lui incombent et, pour les autres, collaborer avec les provinces et leur permettre d'organiser leurs affaires afin qu'elles tiennent compte des possibilités et des besoins propres à leurs secteurs. Les documents que j'ai présentés montrent très clairement que cette façon de faire fonctionne bien.

J'exhorte le gouvernement fédéral à respecter la compétence et la participation des provinces et des territoires et à retirer ce projet de loi.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole sur ce projet de loi qui touche, de près ou de loin, ma circonscription électorale.

Ce projet de loi peut, à première vue, toucher ma circonscription électorale, puisque Berthier-Montcalm est situé entre Montréal et Trois-Rivières. Ce comté compte toutes les îles de Sorel et de Berthier où, tous les ans, beaucoup d'oiseaux migrateurs, certains en voie de disparition, viennent passer quelques jours ou quelques semaines. Ensuite, ils partent pour d'autres lieux.

Malheureusement, bien qu'il touche les espèces en voie de disparition, je dois dire que je ne suis pas favorable à ce projet de loi. Non pas parce que le sujet n'est pas important, non pas parce qu'on ne touche pas des éléments essentiels, mais tout simplement parce que je crois que le projet de loi C-65 ne respecte pas les juridictions provinciales.

Ce n'est pas d'hier que le gouvernement fédéral tente d'intervenir dans ce champ de juridiction, sans doute dans le souci de respecter le livre rouge, les promesses électorales de 1993. Cela vous rappellera sans doute des souvenirs, madame la Présidente, quand le ministre disait: «Nous souhaitons une société qui protège à long terme la santé et la diversité de toutes les espèces qui peuplent notre planète.»

Je suis persuadé que vous vous souvenez de cette phrase du livre rouge. Je ne sais pas si c'est à partir de cet engagement qui n'était pas trop clair quant aux espèces en voie de disparition-on peut interpréter cela de toutes sortes de façons-mais de toute façon, dans le livre rouge, il y avait des éléments beaucoup plus clairs pour lesquels le gouvernement n'a pas respecté sa promesse. Je l'aurais invité à ne pas respecter celle-ci, compte tenu des juridictions des provinces. Mais le gouvernement a décidé plus d'une fois de vouloir légiférer dans ce domaine.

(1615)

Vous vous souviendrez que c'est au printemps 1995 que la cheftaine des cerfs-volants et des drapeaux, l'actuelle vice-première ministre, qui était à l'époque ministre de l'Environnement, avait déposé un projet de loi qui allait dans le même sens que le projet de loi à l'étude aujourd'hui.

À l'époque, cela a fait un tel tollé dans le monde de l'environnement, dans les provinces également et pour toutes les personnes qui devaient appliquer cette loi qu'un an plus tard, à la suite d'un changement de ministre au ministère de l'Environnement, l'actuel ministre a décidé de convoquer tous les ministres de l'Environnement des provinces à une rencontre pour tenter d'en arriver à un accord.

Effectivement, le 2 octobre 1996, à Charlottetown, le fameux Charlottetown qu'on voit souvent dans l'histoire du Canada, on a eu une entente, un accord de principe. Cependant, quand on compare ce qui se reflète dans le projet de loi C-65 et le prétendu accord de principe qu'on avait eu le 2 octobre 1996, ce n'est pas la même chose.

Peut-être que dans ce pays, on ne parle pas la même langue ou on ne comprend pas les mêmes choses. Pourtant, un oiseau c'est un oiseau et une baleine c'est une baleine, mais on ne comprend pas les mêmes éléments lorsqu'il s'agit de mettre l'accord en vigueur sur papier, sous forme d'un projet de loi.

C'est tellement vrai que dans la même année, le 2 décembre 1996, le ministre de l'Environnement du Québec, M. David Cliche, a écrit à l'actuel ministre de l'Environnement du Canada pour lui dire qu'effectivement, il y avait une dysfonction entre l'entente de principe qu'il avait signée et le projet de loi. Je ne vous lirai pas toute la lettre, parce que je sais que le ministre l'a entre les mains, mais pour les gens qui nous écoutent et des nombreux députés libéraux qui sont devant moi et qui m'écoutent attentivement, je vais quand même leur lire quelques passages de la lettre deM. David Cliche.

Ce passage dit: «Il n'a jamais été accepté non plus que la conclusion d'un traité par le Canada modifiait la répartition des compétences et attribuait au gouvernement fédéral la compétence exclusive


10199

pour mettre en oeuvre l'objet du traité.» L'objet du traité c'est toujours les animaux en voie de disparition.

Il ajoute un peu plus loin: «Au nom de la conservation des espèces en péril, le projet de loi veut, en fait, réécrire ou réinterpréter la Constitution canadienne et la répartition des responsabilités qu'elle accorde à chaque ordre de gouvernement.» C'est un ministre de l'Assemblée nationale du Québec qui écrit au ministre fédéral de l'Environnement pour lui dire: «Écoutez, entre ce sur quoi on s'est entendu et ce qu'il y a dans loi, il y a plusieurs différences dont, entre autres, une différence notable au niveau des juridictions.»

Il dit un peu plus loin: «Ainsi, le gouvernement fédéral se définit aux fins de la présente loi comme étant un territoire domanial qui ne correspond nullement à la réalité. Il n'a jamais été compris jusqu'à maintenant que la gestion des pêches et la navigation sur les eaux intérieures et les eaux côtières signifiait que le gouvernement fédéral avait compétence sur l'ensemble des écosystèmes aquatiques de même que sur le fond, le sous-sol et l'espace aérien de ces eaux.»

Vous comprendrez qu'en légiférant dans ce domaine, le gouvernement fédéral en a profité pour en mettre plus que ce qui était demandé et tenter, encore une fois, de contrecarrer certaines visions du Québec, même sur des questions qui sont, je pense, franchement neutres, sur des questions à propos desquelles on pourrait facilement s'entendre, si les gens voulaient véritablement respecter les ententes de principe intervenues et la Constitution canadienne. Le minimum, ce n'est pas trop demander, mais à ce stade, il semble être extrêmement difficile d'avoir une entente sur ces éléments.

Sur le projet de loi C-65, le Bloc québécois sera fidèle à son mandat de défendre les intérêts du Québec et ceux de la véritable législature au Québec qui est l'Assemblée nationale car je pense que c'est là que tous les Québécois et toutes les Québécoises se retrouvent. Il est tout naturel pour nous d'avoir présenté des modifications et des amendements au projet de loi pour refléter ces choses.

(1620)

Une des motions a pour but d'obliger les paliers de gouvernement à se concerter. Je comprends qu'un oiseau migrateur qui atterrit dans le comté de Berthier-Montcalm peut partir et atterrir plus loin dans le comté de Beauséjour. Je peux le comprendre et je pense que cela demande de la concertation entre les différents paliers de gouvernement.

Plus loin, dans les motions nos 16, 24 et 26, ce sont vraiment des modifications voulant que la législature provinciale ait la primauté. Pourquoi? Tout simplement pour respecter la Constitution canadienne. Qu'on ne vienne pas nous reprocher à nous, des bloquistes, des souverainistes, des nationalistes, tout ce qui finit en «iste» si vous voulez, de ne pas vouloir respecter, en cette Chambre, la Constitution canadienne, la Constitution que les libéraux d'en face ont signée en 1982, la Constitution dont les libéraux fêtaient le 15e anniversaire, il n'y a pas si longtemps. Nous, on ne le fêtait pas, pour d'autres raisons.

Mais je pense que c'était le minimum que de vouloir respecter la Constitution où chaque palier de gouvernement a des responsabilités, à l'heure actuelle. Mais non, ça semble être difficile.

Je vais vous lire la motion no 24 pour qu'on comprenne que ce qu'on demande, finalement, ce n'est pas sorcier. La voici:

(3) Par dérogation au paragraphe (2), le ministre compétent ne peut conclure d'accord en vertu de ce paragraphe avec une organisation ou une personne dans une province à moins que le ministre n'avise le ministre provincial de cette province de l'intention du ministre compétent de conclure un accord avec cette organisation ou cette personne et que le ministre provincial de cette province n'informe le ministre compétent que le gouvernement de la province ne s'oppose pas à ce que le ministre compétent conclue un tel accord avec cette organisation ou cette personne.»
C'est très clair. Finalement, on dit: si vous voulez faire des ententes, passer des contrats avec des organismes qui, par exemple, sont au Québec, il faudrait tout simplement informer le ministre de l'Environnement du Québec.

Madame la Présidente, j'aurais pu parler tout l'après-midi sur ces éléments importants, mais vous m'indiquez que mon temps de parole est écoulé. Est-ce que c'est exact? Est-ce que je pourrais avoir le consentement unanime de la Chambre pour terminer? J'en ai à peu près pour cinq ou dix minutes, si la Chambre y consent. Je pourrais peut-être compléter mon argument sur ces éléments.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Est-ce que nous avons le consentement unanime de la Chambre?

Des voix: D'accord.

M. Bellehumeur: Madame la Présidente, je savais que ce que je disais était tellement intéressant que j'obtiendrais facilement le consentement unanime de cette Chambre. J'en remercie mes collègues, entre autres, le député de Beauséjour qui sourit, et qui, un peu plus, et il m'applaudissait.

M. Robichaud: On se retient, on se retient.

M. Bellehumeur: Vous vous retenez, n'est-ce pas?

Je disais qu'avec la motion no 24 qu'on présentait, somme toute, c'était très clair que le gouvernement du Québec avait son mot à dire sur toutes sortes d'ententes que le gouvernement fédéral pouvait adopter relativement au projet de loi sur les espèces en voie de disparition.

Il y a une autre motion qui est extrêmement importante et qui va dans le même sens. Je comprends que la Présidence ait regroupé les motions nos 2, 16, 21, 24, 26, 34, 35, 44, 49, 55 et 64 du Bloc québécois, parce que ce sont des motions qui reviennent au même. C'est la logique que nous présentons dans les amendements, pour véritablement indiquer que ce sont les législatures provinciales qui ont le dernier mot sur des ententes conclues au sujet des espèces en voie de disparition.

J'en profite pour souligner l'excellent travail de la députée de Laurentides qui a examiné cette question avec un sérieux peu commun. Je pense qu'elle a eu une écoute extrêmement attentive de la problématique. Elle a pris beaucoup d'initiative dans le dossier. Elle a pris le temps de consulter ses collègues de l'Assemblée nationale pour avoir une position très claire, pour véritablement représenter, de façon importante, les intérêts supérieurs du Québec.


10200

(1625)

Ce sont toujours des intérêts suprêmes quand on défend les intérêts du Québec parce que ça nous touche profondément, ça nous touche au coeur. On est ici pour ça. Au lendemain des élections, nous serons encore ici pour défendre les intérêts du Québec, et plus que jamais, par les temps qui vont courir, après les élections.

Cela étant dit, la motion no 44 dit:

«(1.1) Si le ministre provincial signifie au ministre que le gouvernement de la province ne veut pas que le paragraphe (1) s'applique dans la province à l'égard d'une espèce faunique pour autant que les individus de l'espèce se trouvent dans cette province ou sur un territoire ne faisant pas partie du territoire domanial, ce paragraphe ne s'applique pas à cette espèce [. . .]»
Donc, encore là, la modification qu'on propose vise à permettre au gouvernement provincial d'exclure des espèces que le gouvernement fédéral voudrait peut-être protéger, mais que, lui, pour toutes sortes de raisons, ne voudrait pas, ou vice-versa. Toutes les motions qu'on a présentées vont véritablement dans ce sens-là, c'est-à-dire qu'elles veulent permettre de façon très claire d'établir de façon évidente la juridiction des provinces dans ce domaine qui, de toute façon, est de juridiction provinciale. Cependant, le fédéral veut légiférer dans ce domaine. On va lui permettre de le faire avec des modifications extrêmement importantes, pour mettre des balises de façon très claire, afin d'avoir une bonne entente.

Au lendemain de la souveraineté, le Québec voudra avoir des ententes avec le fédéral et les autres provinces. Je pense qu'on est capables de le démontrer présentement avec un projet de loi comme celui que nous avons devant nous à l'étude.

Je finirai ainsi, parce que je ne veux pas non plus abuser des bonnes choses en ce jeudi. Je finirai avec une citation du ministre de l'Environnement du Québec, David Cliche, qui a mis en perspective le projet de loi C-65 dans un exemple concret. Un projet de loi, qui semble banal à première vue, avec lequel tout le monde devrait être d'accord pour protéger les petits moineaux, peut avoir, dans son application, des effets extrêmement importants pour l'économie du Québec même.

Le 26 novembre 1996, M. David Cliche a dit ce qui suit: «Avec le projet de loi C-65, le fédéral, en prétextant la protection du canard arlequin-c'est un exemple comme tant d'autres-pourrait intervenir directement dans notre politique énergétique en disant que pour la protection du canard arlequin, le ministre des Ressources naturelles pourrait faire en sorte qu'une rivière soit exclue du développement hydroélectrique et de son utilisation rationnelle. C'est un exemple flagrant d'intervention fédérale dans nos juridictions. C'est une intervention inconcevable, irrecevable et inacceptable de la juridiction canadienne dans nos juridictions.»

Vous voyez, c'est un projet de loi ordinaire sur lequel tout le monde s'entend. Il faut protéger les petits moineaux qui sont en voie de disparition, ainsi que les baleines, etc. Cependant, le gouvernement pourrait utiliser cette arme pour intervenir dans des champs de juridiction encore plus provinciale et même freiner une certaine partie de l'économie québécoise, comme dans l'exemple que j'ai donné, dans tout le domaine de l'hydroélectricité.

Je vais finir, ce ne sera pas tellement long. Il dit également: «Le ministre fédéral-je ne nommerai pas le nom parce qu'il le nomme-vient de déposer en Chambre des communes un projet de loi inquiétant pour le Québec. Je tiens à mettre en contexte, parce que ceci témoigne des difficiles relations fédérales-provinciales. C'est ainsi que récemment, je défendais les intérêts du Québec et je représentais le Québec au niveau de l'environnement et de la faune à Charlottetown. Nous nous étions entendus. Nous avions même signé un accord écrit à cet effet, que si le fédéral déposait une législation visant la protection des espèces menacées de juridiction fédérale, ceci devait se faire dans le respect des juridictions provinciales, notamment des juridictions territoriales. Nous pensions avoir convenu avec Ottawa le principe suivant, qui est simple: si nous convenons qu'une espèce est menacée, il est du ressort de la juridiction qui a la juridiction sur le territoire et l'habitat de cet animal de faire en sorte que son habitat soit protégé et de faire ainsi en sorte que l'animal soit protégé.»

Le ministre poursuivait: «Ce que le Québec reproche principalement à ce projet de loi, c'est que le fédéral change complètement les règles du jeu en n'établissant plus que le territoire sur lequel se trouve une espèce a lui aussi son importance aux fins de déterminer la juridiction applicable. Au contraire, il tente même de s'arroger plus de pouvoir en élargissant la portée de la définition de «territoire fédéral».»

J'aurais pu citer le ministre de façon beaucoup plus large, mais ce court extrait nous permet de très bien voir qu'il y a un problème. On voit surtout que le Bloc québécois est utile en cette Chambre pour faire le lien entre ce qui se passe à Québec et ce qui se passe à Ottawa. Encore une fois, le Bloc québécois est ici pour défendre les intérêts du Québec. On le fait très bien et on le fera encore au lendemain des élections.

Sur ce, je vous remercie de votre bonne collaboration et de votre écoute accompagnée d'un sourire tout au long de mon discours. Je crois qu'il s'agit d'un sourire approbateur et je vous en remercie.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir au sujet du groupe no 2 d'amendements au projet de loi C-65.

Je doute que les amendements de ce groupe fassent beaucoup pour corriger ce projet de loi qui comporte clairement des lacunes. Je voudrais présenter quelques questions que j'ai reçues à cet égard d'agriculteurs et d'éleveurs de mon coin de pays et de l'extérieur de l'Alberta. J'ai regroupé ces questions, qui doivent être posées avant que le projet de loi ne soit adopté.

Je me reporterai à des lettres, dont une du ministre de la Protection de l'environnement de l'Alberta, Ty Lund.


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Qu'est-ce que le projet de loi C-65? C'est la nouvelle mesure législative sur les espèces en péril que le gouvernement présente. C'est une tentative, que je crois très sincère, pour protéger les espèces en péril. Au fil de mon exposé, je ferai des commentaires sur ce qui risque de se produire si jamais cette mesure, même amendée, est adoptée.

Comment cette mesure est-elle apparue? D'où vient-elle et pourquoi? Le travail de base du projet de loi C-65 a été effectué par le gouvernement Mulroney à la conférence de Rio. En 1992, le Canada a signé un accord mondial où il acceptait notamment de protéger les espèces en péril. Le Canada a convenu de mettre en place une loi qui assurerait cette protection. Cette mesure permet donc au gouvernement du Canada de tenir son engagement.

Cependant, au cours du processus, plusieurs facteurs ont fait qu'aujourd'hui, le projet de loi n'est vraiment pas acceptable pour de nombreux Canadiens. Certains facteurs ont été cités par les bloquistes qui sont d'avis que le gouvernement actuel n'a vraiment pas tenu compte des souhaits exprimés au Québec. C'était également l'avis du ministre de la Protection de l'environnement de l'Alberta, Ty Lund.

Voici d'ailleurs un extrait de la lettre qu'il m'a envoyée concernant le projet de loi: «Je vous écris pour vous exprimer l'inquiétude croissante que j'éprouve à l'égard du projet de loi C-65 qui est proposé, Loi sur la protection des espèces en péril au Canada. Les ministres provinciaux et territoriaux chargés de la faune au Canada ont tous relevé plusieurs lacunes importantes dans cette mesure.»

L'hon. Alan Graham a écrit récemment au ministre de l'Environnement, au nom de mes collègues et de moi-même, pour attirer son attention sur ces préoccupations. J'ai une copie de cette lettre. Ma collègue de Calgary en a parlé tout à l'heure.

(1635)

Le Comité permanent de l'environnement et du développement durable a terminé ses travaux. Malheureusement, la majorité des problèmes soulevés n'ont pas été réglés.

Les amendements que le gouvernement fédéral a déposés le21 mars 1997 ne règle pas les problèmes, et nous sommes encore saisis d'un projet de loi qui mine l'approche nationale préconisée dans l'accord national pour la protection des espèces en péril.

Le ministre de l'Alberta a expliqué très clairement ce qui se produit. Les amendements dont nous discutons ne répondent pas aux questions et préoccupations soulevées par le ministre de l'Environnement.

Le ministre de l'Environnement ajoute que l'Alberta est déterminée à jouer son rôle, celui dont il est fait état dans l'entente-cadre nationale pour la conservation des espèces en péril. Le ministre compte respecter les engagements qu'il a pris dans cet accord, au nom de la population de l'Alberta.

Il ajoute que, à son avis, l'approche qui est fondée sur les programmes de coopération et les mesures législatives complémentaires et qui est proposée dans l'entente-cadre est le seul moyen d'assurer la conservation des espèces en péril. De plus, il estime que l'idée de coopération n'a pas été respectée lors de l'élaboration du projet de loi. Il faut s'en inquiéter. Les bloquistes ont dit que cela les préoccupait. Le ministre du Nouveau-Brunswick, qui a écrit au nom de tous ses homologues au ministre fédéral de l'Environnement, a dit clairement qu'ils sont mécontents du processus et du projet de loi. Le ministre de l'Alberta a abondé dans le même sens.

Le gouvernement a adopté une approche maladroite. En tant que gouvernement fédéral, c'est lui qui décide comment tout doit fonctionner, peu importe ce que les provinces peuvent en penser. Voilà encore une preuve de cette approche. Je comprends la colère des députés bloquistes. Nous, de l'Alberta, sommes tout aussi furieux.

Les Canadiens de l'Ouest se sont déjà révoltés contre la façon de faire des gouvernements libéraux et conservateurs précédents. C'est pour cette raison que des députés réformistes sont ici aujourd'hui. Nous nous attendons à ce que les provinces aient leur mot à dire dans un plus grand nombre de secteurs. Nous refusons que le gouvernement fédéral adopte cette approche interventionniste maladroite, comme il l'a fait à l'égard de nombreuses mesures législatives, dont le projet de loi C-65.

Que reprochent au projet de loi C-65 les électeurs de ma circonscription et d'ailleurs? Bien des choses, dont certaines que j'ai expliquées ce matin.

Les Canadiens veulent protéger les espèces en péril dans un contexte de coopération. Cette coopération a permis, dans le passé, de protéger très efficacement certaines espèces. Par exemple, elle a bien fonctionné pour la chouette des terriers. L'organisme Canards Illimités Canada a beaucoup fait pour reconstituer la population de canards.

Ce fut une initiative coopérative. Il n'a pas fallu de loi sévère. Il n'y a pas fallu menacer d'imposer des amendes. Dans ce projet de loi, les amendes s'élèvent jusqu'à un million de dollars. Des amendes peuvent être imposées à un propriétaire foncier ou à un utilisateur de terres. L'approche coopérative n'a pas nécessité l'adoption d'une loi obligeant un propriétaire foncier à clôturer, à ses frais, ce qui semble être l'habitat d'une espèce en voie de disparition. L'organisme Canards Illimités Canada n'a pas eu besoin d'une loi pour obtenir des résultats et il n'a pas fallu une loi non plus pour que l'initiative relative à la chouette des terriers soit couronnée de succès, à l'instar d'autres initiatives semblables. Ces gens-là ont adopté l'approche coopérative. L'approche interventionniste, musclée ne convient pas. C'est une des raisons pour lesquelles les gens se plaignent au sujet de ce projet de loi.

Une autre raison a trait au fait que le projet de loi ne prévoit guère d'indemnisation.

(1640)

Cela ne convient pas du tout. Je le répète, un propriétaire foncier ou quiconque utilise des terres pourrait être forcé de clôturer, à ses frais, un secteur pour protéger une espèce en péril. La personne en cause perdrait alors la capacité productive de ses terres sans indemnisation. Autrement dit, elle serait forcée de renoncer à l'usage de


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ce secteur. Elle ne pourrait pas utiliser cette portion de terre sans être indemnisée.

Quel genre de pays est celui qui empêche quelqu'un d'utiliser ses propres terres, qui l'empêche d'en tirer les fruits, sans compensation? C'est inacceptable. C'est une autre mesure contre laquelle les gens à qui j'en ai parlé sont révoltés.

De plus, le projet de loi prévoit que n'importe qui peut porter plainte de façon anonyme. N'importe qui peut porter plainte de façon tout à fait anonyme et intenter une action contre un propriétaire foncier ou un utilisateur de terres.

Même celui qui commet un crime aussi violent qu'un meurtre a le droit de faire face à la personne qui l'accuse devant le tribunal et de savoir de qui il s'agit. Or, dans ce projet de loi, des Canadiens sont privés de ce droit. Cela ne convient absolument pas, et c'est une autre mesure contre laquelle les Canadiens sont révoltés.

Par ailleurs, il y a les dispositions de perquisition, qui sont très semblables à celles du projet de loi C-68, le projet de loi sur le contrôle des armes à feu, qui est inacceptable et qui met vraiment de côté certaines des procédures judiciaires fondamentales de notre système de justice, mais qui ne figurent pas dans ce projet de loi.

Cet ensemble de modifications du groupe 2 ne feront rien pour régler les problèmes de façon significative.

La meilleure chose que les libéraux puissent faire avec ce projet de loi, c'est le laisser mourir. Toutefois, ils devraient en tirer des enseignements. Si les libéraux forment de nouveau le gouvernement après les élections, ils pourront présenter un autre projet de loi. Si, par contre, c'est le Parti réformiste qui forme le gouvernement, nous allons présenter un projet de loi qui adoptera une approche bien différente de l'approche musclée du gouvernement.

[Français]

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ): Madame la Présidente, je vois mon collègue de Beauséjour qui a l'air à supputer sur mes chances de me retrouver ici, en cette Chambre, après la prochaine élection, je voudrais qu'il dorme en paix, je sais qu'il va nous quitter bientôt pour occuper d'autres fonctions dans le futur dont on ne connaît pas encore la teneur et je lui souhaite la meilleure des chances. J'ai l'impression qu'on connaîtra bientôt un nouveau sénateur Robichaud dans l'autre Chambre.

Cela étant dit, je suis très heureux d'intervenir sur le projet de loi C-65 qui nous parle des espèces menacées. Il s'agit d'un projet de loi très sérieux qui intervient dans des champs de juridiction provinciale, et j'y reviendrai.

Je trouve que le hasard fait particulièrement bien les choses de parler d'espèces menacées au moment où nous allons dans quelques heures nous retrouver en élections. Le parallèle que je veux faire, c'est que, quand on regarde l'absence de ce gouvernement par les temps qui courent, on n'a qu'à assister à la période des questions orales pour constater à quel point les ministres sont occupés à autre chose qu'à répondre aux questions de l'opposition.

(1645)

Quand on regarde l'improvisation dont fait preuve ce gouvernement, comme mon collègue du Parti réformiste vient de le dire, puisqu'il annonçait que le Parti réformiste allait former le prochain gouvernement, je voudrais entonner le même refrain et dire que le gouvernement libéral qui est devant nous est certes une espèce menacée par les temps qui courent.

Nos concitoyens et concitoyennes de tout le Canada, particulièrement du Québec, sont à même de constater qu'il faut nous débarrasser de ce gouvernement. En fait, je dirais que la principale menace qui existe n'est pas que ce gouvernement disparaisse, mais bien qu'il revienne pour un autre mandat, puisqu'on constate, je l'ai mentionné tout à l'heure, que la préoccupation première de ce gouvernement, par les temps qui courent, est d'annoncer des bonnes nouvelles que l'opposition officielle a exigées tout au cours du mandat.

Cette semaine, l'entente sur la main-d'oeuvre a été annoncée par le ministre du Développement des ressources humaines, après32 ans de négociations, dois-je le mentionner. Si ce n'est pas un record en ce qui concerne la durée des négociations, c'est certes une bonne moyenne. À ce rythme, il n'y aura pas grands collègues en cette Chambre qui assisteront au résultat de la prochaine négociation qui devrait porter, je ne sais trop sur quoi, peut-être sur les espèces menacées. Au rythme où on négocie, l'avenir de ce gouvernement fédéral, de cette institution, est menacé.

Pensons maintenant à l'attitude du ministre des Affaires intergouvernementales vis-à-vis de la demande du gouvernement du Québec concernant l'adoption d'une modification à la Constitution pour établir des commissions scolaires linguistiques; on voit tout le mépris affiché par ce gouvernement à la veille des élections.

Quand ce n'est pas pour remettre à plus tard une décision qu'on voudrait voir prise maintenant, comme celle au sujet des commissions scolaires linguistiques, on annonce, avant même qu'un projet de loi ne soit sanctionné-et je fais référence à la Loi sur le tabac-que des amendements seront apportés. Le premier ministre a réussi ce tour de force incroyable d'annoncer, avant même que le projet de loi C-71, la Loi sur le tabac, soit sanctionné, qu'on allait l'amender au cours de l'automne prochain. Il faut vraiment le faire. Si le ridicule tuait, on constaterait, de toute évidence, qu'on n'a plus de premier ministre.

Cela étant dit, je voudrais revenir pendant quelques minutes sur le projet de loi C-65 pour démontrer que ce projet de loi est dans la plus pure tradition de l'action de ce gouvernement. Lors de leurs discours, les représentants du gouvernement et le premier ministre, qu'on voit ici à l'occasion à la période des questions orales, nous rebattent les oreilles avec le fait que leur gouvernement, au cours des dernières années, a été celui qui a fait preuve de la plus grande ouverture concernant la décentralisation de notre fédération.

Eh bien, chaque fois que ce gouvernement dépose un projet de loi, il nous prouve le contraire. Dans ma région, on a une expression pour décrire cela, on dit que le premier ministre parle des deux côtés de la bouche, puisque, d'une part, on dit qu'on est le gouvernement le plus ouvert à la décentralisation mais que, d'autre part, quand on dépose un projet de loi, et c'est le cas du projet de loi C-65, on prend


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des mesures pour centraliser davantage. Ce qu'on dénonce en tant qu'opposition officielle, c'est le fait que ce projet de loi touche précisément à une juridiction provinciale. Le Québec, dans le domaine de la protection des espèces menacées, comme dans une foule d'autres domaines, a déjà pris ses responsabilités.

(1650)

Depuis 1989, il existe un projet de loi qui concerne les espèces menacées. Il existe un consensus au Québec où tous les intervenants se sont réunis et ont demandé à leur gouvernement, le gouvernement du Québec, d'intervenir en la matière, ce qui a été fait et qui répond aux aspirations et aux demandes de la population du Québec.

Cela a été la même chose en Ontario, au Manitoba, et dans la province dont vous êtes originaire et dont vous êtes fière, avec raison, madame la Présidente, le Nouveau-Brunswick, qui a légiféré concernant les espèces menacées.

Or, le gouvernement fédéral, comme c'est la coutume, a décidé de mettre de côté cette volonté qu'ont les provinces de se prendre en main, cette volonté qu'ont les provinces de vouloir régler leurs propres problèmes en se parlant entre elles, en faisant en sorte que leurs lois respectives puissent avoir le même impact d'un côté ou de l'autre de leurs frontières provinciales. Eh bien non, le gouvernement fédéral, avec ses gros sabots, intervient, décide qu'il va exclure les provinces de ce champ de juridiction et décide que lui-même va imposer ses propres points de vue, ses propres décisions.

Voilà l'essentiel de ce qu'on retrouve dans ce projet de loi. Voilà pourquoi l'opposition officielle va, dans ce dossier comme dans tous les dossiers où on veut remettre en question les compétences du Québec, où on veut remettre en question les intérêts du Québec-et je sais, madame la Présidente, que vous êtes fière de l'opposition officielle-dans ce sens-là l'opposition officielle va prendre ses responsabilités et va défendre les intérêts des Québécois et des Québécoises. Elle va s'opposer à ce projet de loi et fera en sorte que ce projet de loi meure au Feuilleton pour qu'on n'en parle plus, non seulement durant la prochaine campagne électorale, mais plus jamais.

Vous me permettrez également de souligner le fait que le gouvernement, en intervenant dans ce champ de juridiction, crée plus de problèmes qu'il ne veut en régler, comme c'est son habitude. C'eut été beaucoup plus productif et efficace, si le gouvernement fédéral avait tout simplement demandé aux provinces de s'entendre entre elles en la matière, avait d'abord constaté qu'un bon bout de chemin avait été fait dans ce sens, puisque, je le rappelle, des lois existent en Ontario, au Manitoba, au Nouveau-Brunswick, et bien sûr au Québec depuis 1989. L'application de ces lois, nécessairement, tient compte des besoins de la population.

Madame la Présidente, vous m'indiquez que mon temps est échu. Respectueux des règles de cette Chambre comme je le suis, je vais obtempérer à vos ordres et cesser de ce pas mon intervention.

[Traduction]

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir dans le débat sur le deuxième groupement de propositions d'amendement au projet de loi C-65, qui porte sur la nécessité de protéger les habitats des espèces en péril au Canada.

Le projet de loi vise à instaurer une loi nationale équilibrée. Il préconise également une forme de fédéralisme coopératif où les gouvernements provinciaux, les administrations municipales et les organismes locaux travailleraient de concert avec le gouvernement national et avec les autres pays du continent où passent les routes migratoires des oiseaux, notamment les autres pays d'Amérique du Nord et certains pays d'Amérique du Sud.

S'il y a une cause juste et noble, c'est bien, à mon avis, celle de la protection par tous les moyens possibles, des espèces en péril. C'est le but visé ici. Cependant, nous devons aussi tenir compte des personnes touchées, c'est-à-dire des propriétaires de terrains, qu'il s'agisse des particuliers ou des gouvernements fédéral et provinciaux. De plus, il faut conclure des ententes de coopération avec les pays voisins.

(1655)

J'ai examiné cette mesure et certains des amendements portant sur les habitats. L'autre jour, j'ai vu une émission sur ce projet de loi à la télévision. L'homme qui prenait la défense de toutes les espèces en péril a fait un commentaire qui mérite d'être rapporté. Il a dit que le projet de loi garantissait la protection des oiseaux lorsqu'ils se posaient dans un parc national, sur des immeubles fédéraux ou ici, sur la colline du Parlement. J'ai pensé que c'était peut-être vraiment comme cela.

Après cela, j'ai reçu une lettre du ministre de l'Environnement, comme d'autres membres de cette assemblée, dans laquelle il résumait les préoccupations des provinces, expliquant que le projet de loi C-65, que nous étudions aujourd'hui, ne touchait pas seulement les terres fédérales, les parcs nationaux, les immeubles fédéraux d'un bout à l'autre du pays et la colline du Parlement. Il reconnaissait que cette mesure législative créait un chevauchement avec la compétence et les responsabilités des provinces. C'est une erreur grave de la part du ministre fédéral.

Le 25 septembre 1996, le ministre fédéral a signé, avec les provinces, un accord intitulé «Accord national pour la protection des espèces en péril». Cet accord a été signé avec l'idée que les provinces seraient capables d'assumer les principales responsabilités dans ce domaine et seraient indépendantes du gouvernement fédéral, ce dernier s'abstenant de rédiger des lois qui réduirait leur autonomie ou leurs responsabilités. Toutes les provinces étaient d'accord.

Elles ont accepté de participer au Conseil canadien de conservation des espèces en péril afin de coordonner leurs activités et résoudre les questions de protection des espèces en péril au Canada.

Elles ont accepté de reconnaître le Comité sur le statut des espèces en péril au Canada comme étant une source indépendante d'avis sur le statut des espèces en péril au niveau national et d'établir une législation et des programmes complémentaires qui assureront la protection efficace des espèces en péril partout au Canada.

L'accord énumère ensuite une longue liste de choses précises que les provinces s'engagent à faire. Elles acceptent de transmettre tout litige qui surviendrait dans le cadre de l'accord au Conseil canadien de conservation des espèces en péril.


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Les provinces ont accepté de faire tout cela, pensant que le ministre fédéral de l'Environnement rédigerait une mesure législative afin de faciliter ce genre de collaboration. Ce n'est pas ce qui s'est passé.

Par la suite, comme l'ont rappelé mes collègues de Végréville et de Calgary-Nord, nous avons reçu des lettres du ministre de l'Environnement nous informant que le gouvernement fédéral n'avait pas tenu ses engagements et qu'il avait rédigé un projet de loi qui aura pour effet de doublonner ou de multiplier les mesures réglementaires visant à protéger les espèces menacées au Canada. C'est inacceptable.

Les provinces ont maintenant acquis la maturité qui leur permet d'exercer des responsabilités pareilles et c'est pourquoi nous devrions décentraliser et leur céder ces responsabilités. S'il est nécessaire d'avoir une loi générale uniquement pour faciliter la coordination ou pour combler certains trous, le projet de loi serait alors acceptable.

(1700)

Comme le fait remarquer très clairement le président des ministres provinciaux et ministre d'une des provinces atlantiques, le projet de loi C-65 n'est pas le produit d'un fédéralisme coopératif, même avec les modifications contenues dans les groupes un à quatre et les amendements proposés par le gouvernement pour régler la question. Le fédéralisme coopératif n'est tout simplement pas au rendez-vous dans ce projet de loi. Le ministre, le gouvernement et le caucus libéral n'ont pas compris ce que voulaient les provinces.

Récemment, un projet de loi semblable visait à favoriser la coopération entre le ministre fédéral de l'Environnement et ses homologues provinciaux. Il concernait un éventail de futurs programmes et ouvrages sur les rivières en Alberta et à la grandeur du Canada.

La province de l'Alberta voulait construire un barrage sur l'une de ses rivières. Nous avons effectué des études et tenu des audiences qui ont duré près de 20 ans. Il a finalement été décidé de construire un barrage sur la rivière Oldman dans la région des trois rivières. Alors que la décision avait été prise et que les travaux avaient déjà débuté, le gouvernement conservateur fédéral a trouvé une loi qui l'autorisait à intervenir et à entamer une nouvelle série d'audiences. Cela a coûté beaucoup de temps et d'argent. Heureusement, le gouvernement de la province a pu s'en sortir et poursuivre la construction du barrage, qui sera une source précieuse de revenus pour la province pendant de nombreuses années à venir.

En définitive, le gouvernement fédéral a utilisé des lois qui font double emploi aux lois provinciales et cela n'a fait que compliquer et retarder le projet; la province de l'Alberta a dû dépenser beaucoup d'argent pour répondre aux intervenants et les travaux de construction ont accusé des retards. Nous avons compris et nous avons modifié le projet de loi.

Le gouvernement fédéral a réussi à rédiger une loi qui évitait les recoupements et les doubles emplois. Nous pensions que la Chambre des communes avait appris quelque chose, mais je suppose que non. Avec le projet de loi C-65, le gouvernement fédéral a rédigé une loi qui empiète sur les droits et les responsabilités des provinces. Je ne sais pas si ce sont les fonctionnaires qui sont coupables ou d'autres. Nous croyions que le gouvernement aurait appris sa leçon et qu'il ne le ferait plus.

Je fais probablement ma dernière intervention sur ce projet de loi, et je recommande donc au gouvernement de revoir sa position. S'il veut vraiment collaborer avec les provinces, comme il le dit clairement dans ce document d'appoint qu'il a distribué à tous les parlementaires, il devrait faire marche arrière et concevoir une sorte de loi générale qui facilite le travail des provinces. Il n'y aurait donc plus de recoupements ou d'intervention qui nuisent à l'autonomie des régions.

Comment ce genre de choses peut-il fonctionner pour les agriculteurs touchés? Il y a une chose qui préoccupe beaucoup mes électeurs, c'est l'absence d'indemnisation pour la présence d'une espèce en voie de disparition sur leurs terres. Le gouvernement promet seulement qu'on reconnaîtra la contribution d'une personne ayant fourni une partie de ses terres à des fins de conservation. Ce sera un don de terres critiques pour la protection de l'environnement, et une forme de partenariat.

Je conclus en demandant pourquoi un propriétaire terrien devrait assumer entièrement le coût de ce don. La protection des espèces en voie de disparition, c'est la responsabilité de tous les Canadiens.

[Français]

M. Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, je vous demande de vérifier le quorum.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Regan): Le député demande-t-il s'il y a Quorum? Convoquez les députés.

(1710)

Après le compte:

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Il y a quorum.

(1715)

[Français]

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Madame la Présidente, je prends la parole dans le cadre de ce projet de loi C-65.

D'entrée de jeu, je voudrais quand même souligner qu'avec ce projet de loi on a là une démonstration de l'approche gouvernementale pour l'ensemble de sa législation. Depuis que nous sommes ici, l'opposition officielle, le Bloc québécois, a accumulé une expérience solide au niveau parlementaire. Nous sommes maintenant expérimentés. Nous avons le résultat de trois ans et demi de sessions parlementaires. Nous avons maintenant, comme nouveau bagage, la capacité d'analyser, sur des bases réelles, ce que le gouvernement libéral du Canada fait de sa législation à l'égard du respect même des conditions et des impératifs de la Constitution, et aussi, quelle est sa préoccupation, à travers la législation, du respect des champs de compétence des provinces.

Depuis qu'il a été élu, ce gouvernement libéral a présenté en cette Chambre plusieurs lois dans lesquelles il venait constamment jouer dans les compétences des provinces, faire fi des champs de compétence et des ententes fédérales-provinciales. De surcroît, dans la


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législation, et on l'a vu, j'ai été à même de participer à plusieurs débats sur la refonte du ministère de l'Industrie, de la réorganisation du Bureau fédéral de développement régional, de la Banque fédérale de développement, la Banque fédérale du Canada maintenant, on a vu ce gouvernement utiliser chaque occasion, chaque projet de loi pour faire en sorte de se donner lui-même plus de pouvoir, soit à son ministère, soit à son ministre, pour ainsi arriver encore davantage, sans passer par des discussions fédérales-provinciales, se donner donc des pouvoirs accrus dans des champs reconnus de compétence provinciale.

Aujourd'hui, vous comprendrez qu'avec l'expérience législative que l'on a, l'opposition officielle sait maintenant comment freiner ce gouvernement dans ses envolées et ses démarches qui visent strictement à diminuer le pouvoir des provinces et à ne pas respecter, par ses propres démarches, les champs de compétence des provinces.

Qu'est-ce qui arrive ici sur cette table aujourd'hui? Le projet de loi C-65 concernant la protection des espèces en péril au Canada. J'aurais quatre observations générales avant d'entrer et de situer le projet de loi.

Premièrement, à la lecture du projet de loi, on constate que le champ de juridiction des provinces, les compétences des provinces en cette matière sont complètement niées et bafouées, comme d'habitude.

Je reviendrai tantôt dans des déclarations du livre rouge et du ministre, d'abord de la vice-première ministre qui était ministre du Patrimoine, puis maintenant le ministre Marchi, je reviendrai démontrer, par leurs propres déclarations, des contradictions profondes. D'abord, dans ce gouvernement qui dit toujours vouloir collaborer, établir des partenariats avec les provinces, lorsque les projets de loi arrivent, ils sont complètement à l'inverse. Il s'approprie le pouvoir. Il se donne des pouvoirs spéciaux, au détriment de ses propres partenaires qu'il dit vouloir respecter.

Deuxièmement, on ne respecte pas le partage des pouvoirs dans le projet de loi. Partager le pouvoir dans des champs de compétence provinciale, ça a toujours été un boulet pour le gouvernement fédéral.

(1720)

Même s'il essaie de convaincre, comme il l'a toujours fait, les Québécoises et les Québécois de sa volonté d'avoir un partenariat avec eux, il inscrit toujours, dans ses projets de loi, des pouvoirs accrus et confirme aussi à ses ministres des pouvoirs accrus.

On voit très clairement par les dispositions du projet de loi que le ministre lui-même se donne un large pouvoir discrétionnaire. Ce gouvernement, qui dit toujours vouloir en venir à un partenariat avec les autres, se donne, dans ses propres mécanismes, à travers son ministère et son ministre, des pouvoirs discrétionnaires très larges. On l'a vu, d'ailleurs, après les discussions pour procéder à l'entente interprovinciale sur le commerce, ajouter au projet de loi en cette Chambre des éléments qui n'avaient même pas été mentionnés dans la discussion entre les ministres responsables.

Mais il est comme ainsi, ce gouvernement. Tout le monde le connaît. Tout le monde connaît le gouvernement libéral fédéral, particulièrement au Québec, dans la démonstration qu'il a faite, ces 30 dernières années, de toujours dire une chose et de faire le contraire lorsqu'il arrivait au pouvoir.

On dit, dans ce projet de loi, que le ministre pourra nommer les membres du COSEPAC. Je définirai tantôt le COSEPAC, cet organisme de protection des espèces. Il les nomme lui-même, seul. Il se donne ce pouvoir. C'est ce gouvernement qui partage tout, mais, en bout de ligne, on retrouve toujours le petit article qui dit «je nommerai, comme ministre, tous ceux qui feront partie de cet organisme». Dans les discussions entre les ministres et les provinces, on dit toujours: «Nous sommes de bonne foi, nous ferons en sorte que la représentation soit égale pour tout le monde, que la représentation vienne de chaque partie du pays», et on s'assure que tout le monde y soit.

Mais qu'est-ce qui arrive? On dépose un projet de loi et dans le projet de loi, le ministre se permet lui-même de nommer le monde en dehors d'une entente avec ses partenaires. Est-ce que c'est ça, le respect des partenaires? Est-ce que c'est ça, dire aux gens, «on vous respecte»? On dit, lors des discussions et des négociations, qu'on va s'entendre avec les membres des comités. Enfin arrive le projet de loi et qu'y trouve-t-on? On y dit que le ministre nommera lui-même les membres.

M. Robichaud: En respectant tous les gens. Peut-être que les bloquistes ne sont pas nommés, mais cela ne veut pas dire qu'on reste. . .

M. Leroux (Richmond-Wolfe): Il décidera de ses propres pouvoirs. J'entends mon collègue libéral réagir, évidemment, parce que ça fait mal lorsqu'on dit la vérité. Mon collègue de Mégantic-Compton-Stanstead saluait tantôt notre collègue qui sera probablement nommé sénateur un de ces quatre matins. Les libéraux en ont besoin pour prendre le pouvoir au Sénat et assurer le processus. Ils ont besoin de gens serviables et dévoués, et probablement que notre collègue, cet Acadien fort joyeux et très coloré, sera un des futurs sénateurs, et je le salue d'ailleurs.

Non seulement le ministre décidera lui-même des gens qu'il nommera, mais en plus, que trouve-t-on dans le projet de loi sur les espèces menacées ou en voie de disparition? Il s'accorde même le pouvoir de décider quelle espèce sera désignée menacée ou en voie de disparition. Ce n'est pas à peu près. Il y a là-dedans des provinces et des organismes à travers le Canada qui s'occupent de cela depuis fort longtemps, depuis 1978, mais j'y reviendrai. Et le ministre propose cette première législation fédérale qui n'existait pas auparavant.

Il y a une législation provinciale, on le sait, au Québec, en Ontario, au Nouveau-Brunswick et au Manitoba. Mais pour une première fois, le gouvernement fédéral vient mettre ses gros sabots dans ce secteur d'activité qui appartient déjà, en termes de compétences, aux provinces. Qu'est-ce qu'il fait? Il vient se donner non seulement une loi, mais accorde le pouvoir au ministre lui-même, en dehors de tout le monde, de décider quelles seront les espèces menacées ou en voie de disparition.


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(1725)

Il va également se donner le pouvoir de décider si oui ou non il va mettre en oeuvre les plans de rétablissement lorsqu'on aura reconnu des espèces, il va lui-même se donner le vote.

Madame la Présidente, vous me dites que j'ai déjà fini alors que je croyais avoir 20 minutes pour parler. Puis-je avoir le consentement unanime de la Chambre pour finir mon exposé? Si j'ai le consentement unanime, je voudrais continuer mon discours.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Est-ce que l'honorable député a le consentement unanime pour poursuivre? Je ferais remarquer à la Chambre qu'il reste seulement cinq minutes.

M. Leroux (Richmond-Wolfe): En cinq minutes, je pourrais finir mon exposé.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Avons-nous le consentement unanime?

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Nous n'avons pas le consentement unanime.

M. Leroux (Richmond-Wolfe): La démocratie a parlé de l'autre bord; elle s'appelle non, la démocratie de l'autre bord.

M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Cheap!

M. Leroux (Richmond-Wolfe): C'est la société du non, la société de la négation.

[Traduction]

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Madame la Présidente, j'ai pensé qu'il serait bon de dire quelques mots à propos de la Loi sur les espèces en péril. Je suis tenté de faire certaines allusions aux députés de l'autre côté, compte tenu des élections qui approchent. Je pourrais m'étendre indéfiniment sur le sujet, et nous nous amuserions bien.

Ce projet de loi est très sérieux. C'est toujours difficile quand les émotions sont en cause. Nous voulons protéger les animaux, la faune et les diverses espèces en péril. Nous ne voulons pas qu'il leur soit fait du mal, nous ne voulons voir aucune espèce éradiquée, pas même les députés de l'autre côté. Nous devons en conserver quelques-uns. Je ne résister à la tentation.

Un projet de loi comme celui-ci pose des problèmes. Le gouvernement a peut-être voulu faire quelque chose de très significatif et de très valable pour protéger les espèces en péril, mais, qu'il ait été mal conçu ou que, pour une raison quelconque, on ait voulu lui donner cette forme, ce projet de loi pose des problèmes. Les gens dans les collectivités, dans les milieux d'affaires, dans les différentes organisations, dans les associations sportives ont des réserves à l'égard du projet de loi.

Dans les différents comités auxquels j'ai siégé, j'ai remarqué une très mauvaise tendance dans le cas de beaucoup d'autres mesures législatives proposées par le gouvernement. C'est un style de gouvernement qui m'a incité à faire partie du gouvernement dans l'espoir de voir à certaines réformes. Il y a des réunions de comité faites pour examiner les mesures législatives à ce niveau et pour recueillir les avis des gens qui disent ce qui leur plaît et ce qui ne leur plaît pas, et ce qu'ils veulent voir inclus. Or, le gouvernement n'est pas prêt à les écouter.

J'ai participé à une ou deux études faites par un comité qui ont suscité des réactions fantastiques de la part du public, les électeurs, les contribuables de ce pays, et, pour une raison que j'ignore, le gouvernement n'en a pas tenu compte. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement dépense les sommes qu'ils consacre aux consultations publiques s'il n'est pas prêt à écouter ce qu'on lui dit. Des industriels, des éleveurs, des agriculteurs, des personnes qui vont dans les bois pour leurs loisirs et qui pensent que même elles risquent d'avoir des problèmes, nous ont fait part de leurs préoccupations.

Nous avons proposé de nombreux amendements. Nous voulions pouvoir l'appuyer, mais nous ne pouvons pas le faire sous sa forme actuelle. Nous nous trouvons devant un véritable dilemme car le gouvernement a dit qu'il prenait ces mesures pour protéger les espèces en péril, par conséquent quiconque vote contre ce projet de loi refuse de protéger les espèces en péril. Ce n'est pas vrai.

Au fond de leur coeur, les députés le savent. C'est peut-être un peu difficile pour eux de l'admettre à la veille des élections, mais ils le comprennent. J'espère que lorsque nous reviendrons après les élections que, quelle que soit la composition de la Chambre, nous pourrons travailler un peu mieux ensemble. J'espère que le gouvernement, quel que soit le parti qui formera le gouvernement, proposera des mesures législatives et écoutera ce que le public en dira. J'espère qu'il écoutera les arguments de l'opposition et ceux qu'avancera le public. Toutefois, cela ne voudra pas dire qu'il les acceptera automatiquement. Parfois, bien sûr, l'opinion publique est divisée en plus de deux factions. Il faut prendre ces choses en considération.

(1730)

On a proposé beaucoup de bons amendements à ce projet de loi, mais ils ont été rejetés du revers de la main. C'est malheureux. Si le gouvernement avait modifié le projet de loi tel que proposé, on l'aurait appuyé. Ce projet de loi aurait pu franchir rapidement toutes les étapes à la Chambre, même à la veille des élections.

J'espère que lorsque nous reviendrons après les élections, les députés d'en face auront appris à collaborer, peut-être avec l'opposition ou en tant qu'opposition. J'attends cela avec impatience.

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