Observations du vérificateur général du Canada

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Observations du vérificateur général du Canada sur les états financiers consolidés du gouvernement du Canada pour l'exercice clos le 31 mars 2017

Notre opinion fournit l'assurance que le gouvernement du Canada présente sa performance financière globale de manière approprié au Parlement et à la population canadienne. La communication des résultats financiers du gouvernement exige beaucoup de travail de la part des fonctionnaires. Le personnel des ministères et des organismes centraux déploie des efforts concertés pour préparer les états financiers consolidés du gouvernement du Canada. Pour le dix-neuvième exercice consécutif, nous avons exprimé une opinion non modifiée sur les états financiers consolidés. Nous remercions les personnes concernées de l'aide et de la coopération qu'elles nous ont accordées au cours de l'audit.

Les présentes observations visent des questions que nous souhaitons porter à l'attention du Parlement.

Administration de la paye

La paye et les avantages sociaux représentent ensemble une des dépenses les plus importantes du gouvernement du Canada. Afin de transformer l'administration de la paye des employés, le gouvernement a regroupé plusieurs de ses services de paye à Miramichi, au Nouveau-Brunswick, et a mis en œuvre un nouveau système de paye, Phénix, pour environ 290 000 fonctionnaires fédéraux. Ce système a été entièrement mis en œuvre à la fin d'avril 2016 et a permis de traiter environ 22 milliards de dollars de charges salariales au cours de l'exercice 2016-2017.

L'initiative de transformation de la paye a modifié bon nombre de processus de paye du gouvernement. Nous avons donc examiné la conception des contrôles internes du nouveau système pour déterminer si nous pourrions nous fier à ce dernier pour un traitement et un enregistrement exacts de la paye en vue d'étayer notre opinion d'audit. Au vu des déficiences que nous avons relevées, nous n'avons pas pu nous appuyer sur les contrôles internes. Dans certains secteurs, nous avons relevé des faiblesses, et dans d'autres, nous n'avons pas pu obtenir suffisamment d'information pour comprendre et tester le fonctionnement des contrôles. Par exemple, un système de technologies de l'information doit être doté de contrôles robustes en ce qui concerne les personnes ayant obtenu un droit d'accès, les personnes pouvant modifier les données et les changements auxquels ces personnes peuvent procéder. Ces contrôles sont particulièrement importants lorsqu'un grand nombre de personnes peuvent accéder à un système, comme c'est le cas avec Phénix. De plus, les tâches principales doivent être effectuées par des employés distincts; dans le cas contraire, des opérations de paye incorrectes pourraient être créées ou des utilisateurs pourraient accéder de manière non autorisée aux renseignements personnels d'autres employés. Le gouvernement n'a pas pu nous expliquer de manière suffisante les tâches que certains utilisateurs étaient en mesure d'accomplir dans Phénix.

Comme nous avons déterminé que nous ne pouvions pas nous appuyer sur les contrôles du nouveau système, nous avons dû changer notre méthode d'exécution de l'audit des charges salariales. Par conséquent, nous avons examiné un échantillon d'opérations beaucoup plus large que lors des exercices précédents. Pour 2016-2017, nous avons testé l'ensemble des paiements versés à un échantillon d'employés pendant toute l'année. Nous avons examiné environ 18 000 opérations de paye dans 48 des 101 ministères ayant utilisé Phénix. Nous avons constaté que des montants avaient été versés en trop ou en moins aux employés. De fait, nous avons constaté que 62 pour cent des employés dans notre échantillon ont reçu une paye inexacte au moins une fois au cours de l'exercice. En moyenne, les employés qui ont reçu des payes inexactes ont été confrontés à des erreurs touchant trois types d'éléments, tels que les heures supplémentaires et les indemnités d'affectation temporaire trop élevées. Certaines de ces erreurs se sont reproduites sur plusieurs périodes de paye. Au 31 mars 2017, des corrections devaient être apportées à la paye de 56 pour cent des employés de notre échantillon.

La saisie de renseignements erronés sur la paye, des retards dans le traitement des changements et de multiples entrées d'ajustement ayant, dans certains cas, créé des erreurs additionnelles ont tous contribué au versement de salaires en trop ou en moins. Nous avons constaté que de telles erreurs se sont produites pendant tout l'exercice et à chaque étape du processus de paye.

La modification de notre stratégie d'audit a augmenté de façon importante l'ampleur des travaux à réaliser. Par rapport aux exercices précédents, nous avons consacré environ 10 000 heures de plus à l'audit des charges salariales. La stratégie d'audit utilisée s'est révélée coûteuse en main-d'œuvre et dispendieuse, et elle devra être appliquée aux audits à venir jusqu'à ce que les déficiences des contrôles soient corrigées et que nous puissions nous appuyer sur ceux-ci.

Nous avons conclu que les états financiers consolidés donnaient une image fidèle des charges salariales, et ce, malgré le nombre important d'erreurs relevées dans la paye des employés. Nous sommes parvenus à cette conclusion du fait que les salaires versés en trop ou en moins aux employés se compensent partiellement et que le gouvernement a comptabilisé des redressements comptables de fin d'exercice pour améliorer l'exactitude de ses charges salariales. Ces redressements ont seulement permis de modifier les charges salariales présentées dans les états financiers consolidés; ils n'ont pas permis de corriger les problèmes sous-jacents ni les erreurs de paye qui continuent de toucher les employés.

L'étendue des erreurs constatées et le temps nécessaire pour faire les corrections sont inacceptables en raison de leur incidence directe sur les employés. La résolution des problèmes de paye constitue une responsabilité partagée à l'échelle du gouvernement. Même si Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC) est chargé du traitement des opérations relatives à la paye, les ministères jouent aussi un rôle important en communiquant à SPAC de l'information actuelle et exacte sur les changements qui concernent la paye des employés.

En plus de notre audit annuel des états financiers consolidés du gouvernement du Canada, nous avons entamé deux audits de performance sur l'initiative de transformation de l'administration de la paye du gouvernement. Nous prévoyons déposer le premier de ces audits à la Chambre des communes en novembre 2017.

Estimations de la direction – le choix des taux d'actualisation

Comme nous l'avons rapporté au dernier exercice, le gouvernement du Canada a un projet en cours visant à actualiser la méthode utilisée pour déterminer les taux d'actualisation servant à calculer le montant estimatif des passifs à long terme. Le caractère raisonnable de ces estimations a une incidence directe sur l'information financière présentée dans les états financiers consolidés et utilisée par le Parlement et la population canadienne pour la prise de décisions. Même si le gouvernement a analysé des solutions possibles à cet égard, il n'a pas encore décidé de la manière dont il va modifier sa méthode pour déterminer les taux d'actualisation.

Les taux d'actualisation, qui servent à estimer la valeur en dollars courants de plusieurs passifs importants à long terme, peuvent avoir une incidence considérable sur ces montants estimatifs. Par exemple, une baisse de 1 pour cent du taux d'actualisation utilisé pour mesurer l'obligation au titre des prestations constituées pour les prestations de retraite sans capitalisation entraînerait une augmentation du passif lié de 7,7 milliards de dollars. Pour déterminer les taux d'actualisation, il est important que le gouvernement applique un processus rigoureux et étayé par des données observables et pertinentes. Même si nous avons conclu que les hypothèses qui sous-tendent les estimations importantes du gouvernement se situent dans une fourchette de valeurs raisonnables, certains taux d'actualisation se sont trouvés par le passé dans la limite supérieure de la fourchette acceptable par rapport aux tendances du marché. L'utilisation d'un taux d'actualisation plus élevé a pour effet de donner un montant estimatif des passifs à long terme plus faible.

Vu l'importance de ces montants estimatifs pour les états financiers consolidés, nous nous attendrions à ce que le gouvernement achève son projet et modifie la méthode qu'il utilise pour déterminer les taux d'actualisation lors de l'exercice 2017-2018. Au moment où le gouvernement mènera ce projet à terme, nous lui recommandons, dans les exigences prévues par les Normes comptables pour le secteur public du Canada, de tenir compte des pratiques sectorielles établies dans les secteurs public et privé, des changements dans les normes ainsi que de l'évolution du marché financier canadien. Dorénavant, le gouvernement devrait valider régulièrement ses estimations en les comparants aux données réelles et adapter ses méthodes au besoin.

Défense nationale – Stocks et éléments d'actif groupés

Stocks

Les stocks du ministère de la Défense nationale représentent un élément important des états financiers consolidés du gouvernement du Canada, leur valeur étant établie à environ 5,8 milliards de dollars au 31 mars 2017, soit 85 pour cent du total des stocks du gouvernement.

Les stocks du Ministère se divisent en deux catégories : les munitions et les articles qui ne sont pas des munitions (dits biens consommables). La valeur des stocks de munitions dépasse 3,3 milliards de dollars. Les biens consommables, qui sont généralement des articles de faible valeur à grand volume d'achat, comme des vêtements, du carburant ainsi que des fournitures médicales, sont évalués à près de 2,5 milliards de dollars.

Le gouvernement comptabilise les stocks comme un actif. Une charge n'est comptabilisée que lorsqu'un article est retiré des stocks, soit parce qu'il sera utilisé, soit parce qu'il n'est plus utilisable.

Éléments d'actif groupés

En plus des stocks, le ministère de la Défense nationale possède des articles comme de grosses pièces de rechange qui servent à réparer ou à entretenir les flottes, l'équipement et le matériel, qu'il comptabilise comme des éléments d'actif groupés. Contrairement aux stocks, les éléments d'actif groupés viennent appuyer les immobilisations corporelles et sont donc comptabilisés de manière similaire. Une charge d'amortissement est comptabilisée pour ces éléments pendant la durée de vie utile des immobilisations corporelles qu'ils appuient.

Au 31 mars 2017, la valeur comptable nette des éléments d'actif groupés du Ministère se chiffrait à environ 3,6 milliards de dollars.

Il peut être difficile de distinguer les stocks et les éléments d'actif groupés. Or il est primordial de les identifier correctement puisque les stocks et les éléments d'actif groupés ne sont pas comptabilisés de la même façon.

Plan d'action pour améliorer la gestion des stocks

Il y a 14 ans, nous avons signalé pour la première fois les difficultés éprouvées par le ministère de la Défense nationale pour comptabiliser et évaluer correctement ses stocks. Depuis, les problèmes persistent. Au cours des dernières années, toutefois, nous avons noté des améliorations.

Au cours de l'exercice 2016-2017, le Ministère a déposé, à la demande du Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, un plan d'action à long terme pour améliorer ses méthodes de gestion des stocks. Vu les caractéristiques particulières des stocks du Ministère, comme la quantité importante d'articles et de lieux d'entreposage, il est plus difficile d'améliorer ces méthodes. Par conséquent, le plan pluriannuel s'échelonne jusqu'en 2026.

Le ministère de la Défense nationale a procédé à des ajustements comptables au cours de l'exercice 2016-2017 pour améliorer l'exactitude des valeurs de ses stocks dans les états financiers consolidés. Ces ajustements de fin d'exercice permettent de corriger les valeurs présentées dans les états financiers consolidés, mais ils ne règlent pas les problèmes sous-jacents de gestion des stocks. De fait, ils indiquent que pour régler les problèmes qui persistent, le Ministère doit maintenir les nouvelles pratiques mises en œuvre et continuer d'améliorer les autres processus de gestion des stocks qui sont décrits dans son plan d'action.

Résultats de l'audit

Nous prélevons et examinons un échantillon d'articles des stocks du ministère de la Défense nationale tous les ans afin de déterminer si le Ministère a :

Les résultats de chacun des tests sont résumés ci-après :

Quantité. Au fil des ans, le ministère de la Défense nationale a accru le nombre de dénombrements des stocks qu'il exécute. Les dénombrements sont effectués sur une base cyclique et sont axés sur les articles qui posent des risques élevés en raison de leur nature, de leur valeur ou de l'attrait qu'ils suscitent. Cette année, nous avons étendu les établissements pour nos tests liés au dénombrement et nous avons constaté que le Ministère disposait d'une méthode rigoureuse pour dénombrer les stocks entreposés dans les établissements que nous visitons régulièrement. Nous avons cependant relevé un nombre important d'erreurs dans les quantités de stocks entreposés dans les établissements non généralement sélectionnés à des fins de tests. Le grand nombre d'erreurs relevées indique que le Ministère n'a pas encore adopté de méthode rigoureuse pour faire l'inventaire dans tous les établissements où des stocks sont détenus.

Évaluation et obsolescence – Munitions. Un des projets à court terme du plan d'action présenté par le ministère de la Défense nationale au Comité permanent des comptes publics prévoyait l'examen et la révision de la méthode utilisée par le Ministère pour attribuer un coût aux munitions. Nous avons constaté que le Ministère avait effectué une analyse approfondie de ses codes d'inventaire pour les munitions et qu'il avait corrigé les erreurs relevées. À la suite de ce vaste nettoyage dans les codes, nous n'avons relevé aucune erreur d'évaluation pour les stocks de munitions testés.

Nous avons cependant déterminé que le ministère de la Défense nationale avait encore des munitions qui étaient obsolètes. Nous avons estimé que des munitions en stock d'une valeur de plus de 260 millions de dollars auraient dû être dépréciées. Le Ministère doit continuer d'améliorer la manière dont il détecte les articles obsolètes dans ses stocks de munitions.

Évaluation et obsolescence – Biens consommables. Nous avons relevé des erreurs dans les coûts attribués aux biens consommables. Selon nos estimations, ils auraient été surévalués d'environ 140 millions de dollars. Le Ministère a comptabilisé une provision pour dépréciation de 154 millions de dollars, dont une partie sert à compenser partiellement ces erreurs et l'autre partie à tenir compte de l'obsolescence des biens consommables.

Classement. Au cours de l'exercice considéré, après avoir analysé les éléments de ses stocks et ses charges, le ministère de la Défense nationale a reclassé certains articles de ses stocks dans les éléments d'actif groupés. Nous estimons cependant que le Ministère a comptabilisé des articles d'une valeur de près de 145 millions de dollars dans les stocks alors qu'ils auraient dû être comptabilisés dans les éléments d'actif groupés.

Constatation générale

Nous avons constaté que le ministère de la Défense nationale semblait être en voie de terminer le plan d'action présenté au Comité permanent des comptes publics. Le Ministère a grandement amélioré ses connaissances sur les quantités d'articles en stock dans ses principaux dépôts, mais il doit perfectionner ses méthodes d'inventaire dans les autres lieux de stockage. Il devra encore déployer des efforts considérables pour améliorer l'attribution des coûts aux articles en stock, la comptabilisation des articles obsolètes et le classement des articles entre « stocks » et « éléments d'actif groupés ».

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