Rapport sur la situation des drogues illicites au Canada - 2008
Les amateurs des produits du cannabis forment encore le plus important groupe de consommateurs de stupéfiants du monde.ii Les dérivés du cannabis comprennent la marihuana (fleurs et feuilles de cannabis), le haschich (résine de cannabis) et l’huile de haschich, qui sont obtenus à partir de diverses parties de la plante. La marihuana est le plus répandu des dérivés du cannabis produits au Canada et expédiés à l’étranger.
La marihuana désigne généralement les feuilles et les fleurs séchées du plant de cannabis, aussi appelé Cannabis sativa L. La drogue est fumée ou ingérée pour ses effets euphorisants et hallucinogènes. Le principal agent psychoactif qu’elle contient est le 9-tétrahydrocannabinol, plus connu sous le sigle THC. Comme sa puissance est fonction de sa teneur en THC, plus celle-ci est élevée, plus la drogue produira des effets importants.9
Les jeunes adultes canadiens forment le plus vaste groupe de consommateurs de cannabis. Comparée à la demande dont ont fait l’objet les autres types de drogues, la demande de cannabis au Canada est restée forte en 2008, et ce malgré le léger déclin observé ces dernières années quant à la consommation de cannabis10 et aux infractions relatives à cette drogue.iii Au Canada, les infractions relatives au cannabis, en particulier la possession, constituent encore la majorité des infractions relatives aux drogues. En fait, Statistique Canada a enregistré une baisse pour tous les types d’infractions relatives aux drogues en 2008, sauf pour celles de possession de cannabis et d’exportation ou d’importation de cannabis.iv
En 2008, les organismes canadiens d’application de la loi ont saisi 37 196 kg de marihuana et 1 828 861 plants de marihuana, ce qui représente presque 75 % de toutes les saisies de drogues effectuées au Canada. Fidèle à la tendance précédemment observée, la plus grande partie de la marihuana saisie avait été produite au pays. Des cargaisons en provenance de la Jamaïque, des États-Unis, des Pays-Bas et de l’Afrique du Sud ont néanmoins aussi été interceptées.
En 2008, de grosses cargaisons de marihuana en provenance de la Jamaïque ont été interceptées à l’aéroport international Pearson de Toronto. Plus de 500 kg de marihuana ont été expédiés de la Jamaïque vers le Canada soit par fret aérien, par des passeurs ayant pris un vol de passagers. Auparavant important fournisseur de marihuana pour des pays comme le Royaume-Uni, les États-Unis et le Canada, la Jamaïque ne produit plus qu’une mince portion du volume de cannabis saisi dans ces pays. Le fait que le Canada, les États-Unis et le Mexique produisent de la marihuana de qualité a considérablement réduit la demande pour le « ganja » jamaïcain en Amérique du Nord.v
Bien que la marihuana produite au Canada soit cultivée aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur, les installations de culture intérieure ont gagné en popularité ces vingt dernières années en raison des avantages qu’elles présentent : plus de discrétion, des récoltes potentiellement plus abondantes et une plus haute teneur en THC. Statistique Canada a signalé récemment qu’environ 60 % des infractions relatives à la production de cannabis étaient commises dans des résidences, et environ 30 % sur des sites extérieurs.vi
Quoique la Colombie-Britannique, l’Ontario et le Québec soient demeurés les principales provinces productrices, le cannabis a été cultivé dans toutes les provinces. De vastes installations intérieures ont été découvertes dans des milieux urbains et ruraux des Prairies, tandis que, dans les Maritimes, ce sont les installations de culture extérieure en milieu rural qui sont apparues les plus courantes. Malgré le problème grandissant de production de marihuana dans les Prairies et les Maritimes, les tendances en matière de mouvement de la marihuana indiquent qu’elle est régulièrement acheminée dans ces régions depuis la Colombie-Britannique, l’Ontario et le Québec afin de suppléer à l’offre locale.
En Colombie-Britannique, la culture de la marihuana est concentrée dans le Vancouver Lower Mainland, en particulier dans la région de Surrey et de Coquitlam. En 2008, des installations de culture intérieure abritant entre 40 et 7 000 plants ont été découvertes dans des résidences privées de cette région. La police a en outre repéré de vastes sites de culture intérieure et extérieure dans le territoire continental de la Colombie-Britannique. La marihuana britanno-colombienne, quoiqu’essentiellement destinée au marché américain, continue d’être acheminée dans les autres provinces avoisinantes et ce jusqu’à Terre-Neuve-et-Labrador.
Chaque année, des centaines de contrôles routiers donnent lieu à des saisies de marchandises de contrebande. Les saisies effectuées en 2008 dans le cadre du programme Pipeline / Convoy de la GRC11 ont permis d’établir que la marihuana était expédiée vers l’est à partir des principales provinces productrices. Des véhicules privés ont été utilisés pour le transport de multi-kilos, tandis que des cargaisons de l’ordre de la centaine de kilogrammes ont été introduites aux États-Unis au moyen de véhicules commerciaux.
Selon les renseignements, des tonnes de marihuana continuent de faire l’objet de contrebande aux États-Unis chaque année. En 2008, tous les modes de transport ont été utilisés pour ce faire, mais la frontière canado-américaine est le plus souvent franchie aux postes frontaliers terrestres situés en Colombie-Britannique (Washington), en Ontario (Michigan et New York) et au Québec (Vermont).
La contrebande de marihuana est demeurée en 2008 l’une des plus lucratives activités du crime organisé au Canada, et elle le restera sans aucun doute pour les années à venir. Si la marihuana est la marchandise numéro un sur le marché noir canadien, cela tient à la forte et constante demande dont elle fait l’objet, à la relative simplicité de son processus de production ainsi qu’à l’aspect lucratif que son trafic procure. Il est cependant rare que les narcotrafiquants se limitent au commerce d’un seul type de marchandise : la cocaïne et la MDMA (ecstasy) font partie des autres stupéfiants populaires offerts sur le marché canadien de la drogue. Il semble que, dans toutes les provinces du pays, la marihuana et la cocaïne soient les principales drogues dont les groupes du crime organisé font le trafic.
Les groupes criminalisés impliqués dans la production de marihuana imaginent sans cesse de nouvelles stratégies pour échapper aux autorités. Il est fréquent qu’un producteur choisisse de localiser ses installations dans une région où il croit qu’elles auront le moins de chances d’être repérées, par exemple dans une région rurale. En 2008, c’était encore les groupes criminalisés vietnamiens qui dominaient la production de marihuana cultivée à l’intérieur. Des individus associés à des groupes du crime organisé est-européen et indo-canadien basés en Colombie-Britannique et en Ontario ont été impliqués dans la contrebande transfrontalier de marihuana au moyen de véhicules commerciaux.
Le haschich est une résine ou une pâte produite à partir des fleurs de cannabis. L’huile de haschich est une préparation liquide obtenue par dissolution du haschich ou de bourgeons de marihuana dans un solvant comme l’alcool isopropylique. Le haschich est fumé et ingéré pour ses effets psychotropes. Le haschich et l’huile de haschich ont une teneur en THC plus élevée que la marihuana.13
Il est difficile de préciser l’ampleur de la demande pour les produits du haschich car les enquêtes menées rangent le haschich et la marihuana sous une seule catégorie, celle du cannabis. Les provinces de l’Ontario et du Québec restent les principaux débouchés canadiens pour les produits du haschich. Près de 75 % des saisies de haschich effectuées en 2008 visaient des cargaisons destinées à Toronto (Ontario) ou à Montréal (Québec). Même si le mouvement de haschich est plus considérable dans les provinces de l’Est du Canada, on constate également des activités liées à cette drogue dans les provinces de l’Ouest, comme l’illustre l’interception, avant leur arrivée à destination, de deux cargaisons de haschich qui avaient été expédiées depuis la Colombie-Britannique vers une localité située non loin d’Edmonton (Alberta).
Des 1,6 t de produits du haschich saisis au Canada en 2008, 57 % provenaient de la Jamaïque, que le Rapport mondial sur les drogues 2009 qualifie de principal pays producteur des Amériques. Par ailleurs, 19 % des produits du haschich saisis au Canada en 2008 provenaient de l’Inde.
La plupart des cargaisons en provenance de la Jamaïque qui ont été saisies étaient transportées par voie aérienne, soit par fret aérien, soit par l’entremise de passagers. Le plus souvent, les voyageurs aériens avaient tenté de dissimuler la drogue sous la doublure intérieure ou le revêtement extérieur de leurs bagages.
Parmi les saisies effectuées en 2008, deux représentaient à elles seules 71 % de la quantité totale de produits du haschich saisis au Canada : l’une portait sur 751 kg d’huile de haschich en provenance de la Jamaïque, l’autre, sur 321 kg de haschich en provenance du Maroc. Ces saisies concordent avec les constatations du Rapport mondial sur les drogues 2009 selon lesquelles le Maroc serait le premier producteur mondial de haschich.
On a noté en 2008 une hausse significative de la quantité de produits du haschich saisis par rapport à 2007, mais cette quantité demeure inférieure à celle de l’année 2006, au cours de laquelle avait été effectuée une saisie de 22,5 t de haschich (voir annexe A).
Si une grande part de la contrebande de haschich et d’huile de haschich vient de la Jamaïque, c’est surtout à cause des vastes réseaux de narcotrafiquants implantés au Canada et en Jamaïque. Des individus faisant partie de ces réseaux aident les organisations criminelles à introduire la drogue au Canada par les points d’entrée.
À l’occasion de la saisie susmentionnée de 751 kg d’huile de haschich effectuée en Nouvelle-Écosse, les 12 hommes arrêtés faisaient partie d’un groupe criminalisé basé en Ontario. Certains membres de ce groupe avaient déjà été arrêtés sous des accusations relatives aux drogues et aux armes remontant à 1992. Il appert que ces individus soient impliqués dans l’importation d’huile de haschich, depuis environ 15 ans. En 1998, deux membres du groupe ont été arrêtés, également en Nouvelle-Écosse, pour avoir tenté d’introduire au pays 314 kg d’huile de haschich à bord d’un yacht de croisière.
9 En 2008, Santé Canada a établi que la teneur moyenne en THC de la marihuana saisie était de 11 %.
10 Selon l’Enquête de surveillance canadienne de la consommation d’alcool et de drogues de 2009 (voir la partie sur la prévalence), la consommation de cannabis aurait diminué au Canada.
11 Le programme Pipeline / Convoy de la GRC a pour objet la détection des véhicules servant au transport de marchandises de contrebande.
12 Les clones sont des boutures de plants de cannabis femelles employées pour produire des plants de qualité uniforme.
13 Santé Canada a établi qu’en 2008, la résine de haschich avait une teneur moyenne en THC de 33 %.
14 On appelle navire-mère le navire utilisé uniquement pour le transport de stupéfiants.