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Relevé des maladies transmissibles
au Canada Une déclaration d’un comité consultatif
(DCC) DÉCLARATION SUR LES VACCINS CONTRE L’HÉPATITE A À L’INTENTION DES VOYAGEURSDocument Adobe télédéchargeable (189 KB) PRÉAMBULE Le Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages (CCMTMV) donne à Santé Canada des conseils courants et à jour de nature médicale, scientifique et de santé publique concernant les maladies tropicales infectieuses et les risques pour la santé associés aux voyages internationaux. Santé Canada reconnaît que les conseils et les recommandations figurant dans cette déclaration reposent sur la pratique médicale et les connaissances scientifiques les plus récentes et les diffuse dans le but d’informer les voyageurs ainsi que les professionnels de la santé qui sont appelés à leur prodiguer des soins. Les personnes qui administrent ou utilisent des médicaments, des vaccins ou d’autres produits devraient bien connaître la monographie du produit ainsi que toute autre norme ou instruction approuvée concernant leur usage. Les recommandations relatives à l’usage des produits et les autres renseignements présentés ici peuvent différer de ceux qui figurent dans la monographie ou toute autre norme ou instruction approuvée pertinente établie par les fabricants autorisés. Rappelons que les fabricants font approuver leurs produits et démontrent leur innocuité et leur efficacité uniquement lorsqu’ils sont utilisés conformément à la monographie ou à toute autre norme ou instruction approuvée semblable.
L’hépatite A est une infection du foie causée par le virus de l’hépatite A (VHA). C’est un virus à ARN, qui était officiellement classé comme un entérovirus de type 72(1), mais qui fait maintenant partie du genre Hepatavirus(2) et de la famille des Picornaviridae. Bien que 1,4 million de cas soient recensés chaque année dans le monde, l’incidence réelle peut être de trois à 10 fois supérieure(3). Le virus est presque toujours transmis par la voie oro-fécale à la suite d’un contact direct avec une personne infectée ou d’un contact indirect (ingestion) avec de l’eau ou des aliments contaminés, en particulier des mollusques et crustacés crus ou mal cuits(3-5). Un petit nombre de cas (< 5 %) sont infectés lors de relations sexuelles ou après avoir reçu des produits sanguins contaminés(6). Le virus peut survivre à l’état sec pendant au moins une semaine dans des conditions ambiantes et peut survivre dans l’eau jusqu’à 10 mois(3,7,8). Parmi les maladies évitables par la vaccination, l’hépatite A est celle qui est la plus fréquente et dont les taux de mortalité et de morbidité sont les plus élevés chez les voyageurs(9,10). La période d’incubation de l’hépatite A dure de 15 à 50 jours, la moyenne étant de 28 jours(8). La maladie qui en résulte se caractérise par une anorexie, des nausées, de la fièvre, de la fatigue et un ictère chez les adultes et les enfants plus âgés. Le virus est présent dans la bile, le sang, les selles et le foie durant la dernière phase de la période d’incubation et au début de la phase aiguë de la maladie. La période d’infectivité varie grandement mais se situe habituellement de 2 à 5 semaines après l’exposition au virus, soit juste avant le début des symptômes jusqu’à une semaine ou plus après la disparition de l’ictère. Durant cette période, le virus est excrété dans les selles. L’excrétion du virus peut persister longtemps chez les enfants mal nourris et les personnes immunodéprimées. La maladie dure en moyenne 1 mois, mais faiblesse et léthargie peuvent persister jusqu’à 12 mois. Un tableau clinique plus sévère avec nécrose du foie, insuffisance hépatique fulminante et décès éventuel est rare, le taux estimé de mortalité s’établissant à 0,14 %(11). Les lésions subies par les hépatocytes sont une réponse à médiation cellulaire et ne sont pas causées par le virus lui-même(8). La gravité de la maladie varie selon l’âge, les taux de mortalité étant jusqu’à 20 fois plus élevés chez les adultes de > 40 ans que dans les groupes plus jeunes(12). La maladie est habituellement asymptomatique chez les jeunes enfants et peut être confondue avec la grippe ou un malaise général. Ces enfants peuvent cependant, dans certains cas, excréter le virus pendant plusieurs mois(13) et le transmette à des personnes réceptives autour d’eux(12). Au début de la maladie, l’organisme réagit en produisant des anticorps de la classe des IgM, lesquels persistent cependant plusieurs mois. Durant la convalescence, les anticorps de la classe des IgG prédominent et peuvent persister indéfiniment, conférant une immunité pour la vie entière(12). L’hépatite A n’évolue pas vers la chronicité et les personnes exposées ne demeurent pas porteuses du virus(14). PRÉVENTION Les voyageurs qui se rendent dans des pays où les normes d’hygiène et de salubrité facilitent la transmission oro-fécale du virus devraient prendre des précautions strictes à l’égard des aliments et de l’eau afin de réduire au minimum le risque de contracter la maladie. Le risque auquel sont exposés les voyageurs non immuns qui séjournent dans des pays en voie de développement varie entre 3 et 5/1 000 par mois, les hommes étant 1,5 fois plus souvent infectés que les femmes(11). Le risque est jusqu’à six fois supérieur dans le cas des voyageurs à petit budget qui mangent dans des endroits où les conditions hygiéniques laissent à désirer. Pratiquement 100 % des personnes qui ont passé leur enfance dans des milieux modestes ou pauvres dans des pays en développement seront immunisées contre l’hépatite A(15). Certaines études montrent que l’immunité chez les sujets qui ont passé même les 5 premières années de leur vie dans ce type de milieu atteint déjà 90 %(3). Par contre, les adultes qui ont grandi dans des pays industrialisés, comme le Canada, ne devraient pas être considérés comme immunisés contre l’hépatite A à moins que leurs antécédents médicaux ou leurs déplacements antérieurs indiquent qu’ils peuvent déjà avoir souffert de la maladie ou qu’ils sont nés avant 1945(16). Les signes biologiques d’une exposition antérieure à l’hépatite A ne s’observent pas dans tous les groupes d’âge. Par exemple, environ le tiers des adultes nord-américains présentent des signes sérologiques d’exposition au VHA à l’âge de 40 ans(15,17). Si le coût des tests n’est pas trop élevé et si le temps le permet, il pourrait être rentable de rechercher la présence d’IgG anti-VHA chez ces adultes avant qu’ils ne partent en voyage et d’immuniser ensuite ceux qui sont susceptibles. Il n’est cependant pas contre-indiqué d’administrer ces vaccins à une personne déjà immunisée contre l’hépatite A(18-20). L’hépatite A se présente habituellement sous une forme bénigne chez les enfants(21), et la vaccination de ce groupe d’âge peut être indiquée uniquement pour prévenir la transmission de l’infection à des personnes non immunes au retour à la maison. Les enfants de > 5 ans devraient être vaccinés. Bien des gens estiment que le vaccin devrait être offert à tous les enfants de > 2 ans. S’il est indiqué d’administrer également le vaccin contre l’hépatite B (p. ex., séjour pendant > 6 mois dans un pays où l’hépatite B est endémique; contacts étroits avec la population locale de ces pays, avec risque de contact avec du sang ou d’autres liquides organiques(22); adoptions internationales) et si le vaccin n’a pas déjà été donné dans le cadre d’un programme de vaccination systématique des enfants, le vaccin combiné contre l’hépatite A et B, TwinrixMC (pour adultes) (SmithKline Beecham Pharma) peut être utilisé. Une dose de TwinrixMC conférera une protection contre l’hépatite A, mais on obtiendra une moyenne géométrique des titres plus élevée si le sujet reçoit deux doses avant de partir en voyage(23). PRÉPARATIONS VACCINALES Immunoglobulines sériques Dans le passé, le traitement prophylactique contre l’hépatite A consistait en une immunisation passive à l’aide de préparations d’immunoglobulines sériques (IGS). Ces dernières peuvent prévenir une hépatite A patente si elles sont administrées avant l’exposition et peuvent atténuer la maladie si elles sont prises au début de la période d’incubation. L’arrivée d’agents d’immunisation active a contribué à mettre pratiquement au rancart les IGS comme agents prophylactiques chez les voyageurs. Font exception les cas où l’utilisation de vaccins actifs contre l’hépatite A est contre-indiquée ou peut ne pas être efficace (voir Voyageurs immunodéprimés ci-dessous). On croyait auparavant que l’administration simultanée d’IGS et d’un des vaccins actifs contre l’hépatite A était souhaitable si l’on prévoyait de partir en voyage dans les 2 semaines. L’on sait maintenant que la réponse sérologique induite par ces vaccins est assez rapide pour que l’administration d’IGS soit superflue(24). En fait, l’administration simultanée d’IGS et de vaccins actifs contre l’hépatite A pourraient entraîner une réponse immunitaire plus faible que l’utilisation des seuls vaccins actifs(25).
Vaccins contre l’hépatite A Actuellement, six vaccins inactivés contre l’hépatite A sont homologués au Canada : AvaximMC (Aventis Pasteur Limitée), Epaxal Berna® (Swiss Serum and Vaccine Institute), HavrixMC 1440 et HavrixMC 720 (SmithKline Beecham Pharma) et Vaqta® pour les adultes et Vaqta® pour les enfants et les adolescents (Merck Frosst Canada & Co.). Il existe également deux vaccins combinés contre l’hépatite A et B, TwinrixMC pour les adultes et TwinrixMC Junior pour les enfants (SmithKline Beecham Pharma). Tous sont fabriqués à partir de virus issus d’une culture cellulaire, inactivés par le formaldéhyde et adsorbés sur de l’hydroxyde d’aluminium(11,18-20). Il n’y a pas de norme internationale pour la teneur en antigène des divers vaccins, de sorte que la composition de chaque produit diffère. AvaximMC contient 320 U/mL d’antigène de même que du 2-phénoxyéthanol-formaldéhyde comme agent de conservation. Deux doses de 0,5 mL IM sont administrés à un intervalle d’au moins 6 mois(18) et son usage n’est autorisé que pour les personnes de >= 12 ans. Epaxal Berna® renferme 500 unités RIA d’antigène du virus de l’hépatite A par dose de 0,5 mL IM ainsi que du thimérosal comme agent de conservation. Son usage est autorisé dès l’âge >= 1 an. Une dose de rappel est recommandée après 1 an(26). HavrixMC 1440 contient 1 440 ELISA U/mL d’antigène inactivé du virus de l’hépatite A. Son usage est autorisé chez les personnes de >= 18 ans et deux doses sont administrées IM, la seconde 6 à 12 mois après la première. HavrixMC 720 renferme 720 ELISA U/mL d’antigène et est indiqué pour les personnes de 1 à 17 ans, le même schéma posologique que celui de HavrixMC 1440 étant utilisé. Les deux préparations contiennent des traces de 2-phénoxyéthanol employé comme agent de conservation(20). Vaqta® contient 50 U/mL d’antigène inactivé du virus de l’hépatite A alors que la formulation pour enfants renferme 25 U/0,5 mL. La préparation pour adultes est destinée aux sujets de >= 18 ans; deux doses de 1 mL IM sont administrées à 6 mois d’intervalles. La formulation de Vaqta® pour enfants et adolescents est destinée aux sujets de 2 à 17 ans, deux doses de 0,5 mL IM étant administrées à un intervalle de 6 à 18 mois. Aucune des deux préparations ne contient d’agents de conservation mais elles peuvent renfermer des résidus de formaldéhyde(19). TwinrixMC contient 720 ELISA U/mL de vaccin inactivé contre l’hépatite A et 20 mg d’antigène purifié du virus de l’hépatite B (HBsAg) (issu du génie génétique) dans 1 mL. Il est recommandé pour les adultes de >= 18 ans. La préparation TwinrixMC Junior, destinée aux enfants de 1 à 18 ans, contient 360 ELISA U/mL de vaccin inactivé contre l’hépatite A et 10 mg d’HBsAg purifié dans 0,5 mL. Les deux préparations renferment des traces de 2-phénoxyéthanol et de néomycine. Les deux sont administrées en trois doses IM, à l’âge de 0, 1 et 6 mois(27). Les titres d’anticorps obtenus après l’administration de ces vaccins contre l’hépatite A sont 10 à 100 fois plus faibles que les taux d’anticorps après une infection naturelle et pourraient donc ne pas être détectés aux épreuves diagnostiques habituelles(15). Des titres d’anticorps suffisants pour assurer une protection (> 10 UI/mL) sont observés chez 98 % des vaccinés 4 semaines après l’immunisation(28). Deux semaines après la première dose de ces vaccins, plus de 70 % des sujets bénéficiaient d’une protection(21,24). Compte tenu de la durée de la période d’incubation de l’hépatite A, l’administration d’un vaccin tout de suite avant le départ en voyage conférera une protection adéquate(29). Si la deuxième dose est administrée passé l’intervalle recommandé, elle peut être donnée à n’importe quel moment sans qu’on ait à répéter la première dose(11,30) . Plusieurs études ont montré qu’on peut utiliser un vaccin différent contre l’hépatite A pour la deuxième dose, peu importe le vaccin employé la première fois(15,31). La seconde dose assure une protection qui peut persister au moins 10 ans(32-34); selon d’autres études, cependant, la protection durera >= 20 ans(8,30,35-37). D’autres études s’imposent pour confirmer si la protection persiste toute la vie. La dose de rappel chez les adultes devrait correspondre à la dose initiale complète, mais il a été démontré que la dose pour enfants du vaccin Vaqta® (25 U) était aussi efficace que la dose complète de Vaqta® pour adultes(15). D’autres études révèlent que l’administration en rappel de la dose complète pour adultes de HavrixMC 1440 permettra au départ d’obtenir une moyenne géométrique des titres d’anticorps plus élevée, mais que les deux vaccins assureront une protection durable(23). Comme l’immunogénicité de ces quatre vaccins semble similaire, on pourrait présumer, à la lumière de ces études, qu’ils sont interchangeables(8,15). Il n’est pas nécessaire d’effectuer un contrôle sérologique post-vaccinal systématique à cause du taux très élevé de réponse. Administration concomitante L’administration concomitante de vaccins contre l’hépatite A et du vaccin antityphoïdique inactivé (oral et parentéral) et/ou du vaccin contre la fièvre jaune est sûre et suscite une réponse immunitaire(38). Certaines données montrent également que l’administration simultanée du vaccin contre l’hépatite A et des vaccins contre la diphtérie, la poliomyélite (vaccin oral et inactivé), le tétanos, le choléra, l’encéphalite japonaise ou la rage ne réduit pas la réponse immunitaire à l’un ou l’autre des vaccins ni n’accroît la fréquence de survenue d’événements indésirables(39-41). Effets secondaires Les effets secondaires associés aux vaccins susmentionnés sont bénins et transitoires. Des réactions locales, comme une sensibilité et une rougeur au point d’injection, sont observables dans environ 56 % des cas. Une céphalée et un malaise ont également été signalés(18-20). Grossesse Les vaccins contre l’hépatite A, à l’instar d’autres vaccins viraux inactivés, sont fort probablement sans danger durant la grossesse et la lactation(11,42). Leur usage devrait cependant être clairement indiqué avant la vaccination d’une femme enceinte vu que leur innocuité durant la grossesse n’a pas été établie hors de tout doute. Contre-indications Ces vaccins ne doivent pas être administrés aux personnes hypersensibles à l’un de leurs constituants ni aux personnes atteintes d’une maladie fébrile sévère(18-20). Voyageurs immunodéprimés Les vaccins ne présentent pas de danger pour les sujets séropositifs à l’égard du VIH et ne précipitent pas la survenue du sida(43), mais il faut vérifier la réponse immunitaire après la vaccination car il peut être nécessaire d’offrir des doses de rappel additionnelles(44). Il convient toutefois de rappeler que les méthodes de dosage commerciales peuvent ne pas être suffisamment sensibles pour détecter des niveaux protecteurs plus faibles d’anticorps induits par les vaccins. Des méthodes de dosage plus sensibles devraient être employées dans la mesure du possible(45). L’administration d’IGS juste avant le départ en voyage conférera une protection adéquate pendant une courte période (jusqu’à 6 mois); c’est une solution qui pourrait être envisagée dans le cas des voyageurs immunodéprimés, jumelée ou non à une vaccination. Conservation du vaccin Les vaccins devraient être conservés à une température variant entre 2 oC et 8 oC, mais des études montrent que la stabilité de HavrixMC 720 après 3 semaines à 37 oC n’était pas réduite(20). Des études similaires de Vaqta® ont révélé que le vaccin conservé à 37 oC pendant > 12 mois était aussi efficace que celui conservé à la température recommandée(46). RECOMMANDATIONS Le tableau 1 présente les catégories empruntées à la médecine fondée sur les preuves pour la fermeté et la qualité des preuves à l’appui des recommandations qui suivent (tableau 2).
MISE À JOUR Cette déclaration sera mise à jour tous les 4 ans ou lorsqu’on disposera de nouvelles données. RéFéRENCES
* Membres : Dr B. Ward (président); H. Birk; M. Bodie-Collins (secrétaire générale); Dre S.E. Boraston; Dr H.O. Davies; Dr K. Gamble; Dr L. Green; Dr J.S. Keystone; Dr P.J. Plourde; Dr J.R. Salzman; Dre D. Tessier. Représentants de liaison : Dr R. Birnbaum (SCSI); L. Cobb (CUSO); Dr V. Marchessault (SCP et CCNI); Dre H. Onyette (SCMI); Dr R. Saginur (ACSP); Dre F. Stratton (CCE). Membres d’office : Dre E. Callary (SC); Dr M. Cetron (CDC); R. Dewart (CDC); Dr E. Gadd (SC); Dr H. Lobel (CDC); Dre A.E. McCarthy (MDN); Dre M. Parise (CDC). Membre émérité : Dr C.W.L. Jeanes.
† Ce document a été préparé par le Dr R. Birnbaum et approuvé par le CCMTMV. [Relevé des maladies transmissibles au Canada]
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Dernière mise à jour : 2001-01-15 |