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Les politiques gouvernementales



André Bernard
Université du Québec à Montréal


L'année politique au Québec 1990-1991

· Rubrique : Les politiques gouvernementales



Chaque année, le Conseil des ministres du Québec prend quelques milliers de décisions qui confirment ou modifient les orientations de politiques qu'il avait choisi de suivre. La plupart des modifications aux politiques gouvernementales sont mineures et suscitent peu de réactions; cependant, certaines réorientations, qui affectent beaucoup de personnes ou des groupes puissants, peuvent être contestées avec vigueur. Chaque année, il y a ainsi des décisions qui se démarquent en raison de leur effet.

En 1990-1991, les orientations controversées ont été exceptionnellement nombreuses. Parmi celles qui ont entraîné de très vifs débats, il y en a trois qui se distinguent particulièrement: la réforme présentée le 7 décembre 1990 par le ministre de la Santé et des Services sociaux, la réforme annoncée lors du discours du budget du 26 avril 1990 et précisée le 14 décembre 1990 par le ministre de la Sécurité publique et des Affaires municipales et, enfin, la réforme annoncée le 10 septembre 1991 par le ministre de l'Éducation. Trois autres réorientations aux politiques antérieures se distinguent également en raison des difficultés qu'elles ont suscitées: la réforme proposée le 14 décembre 1990 par la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration, la nouvelle stratégie de protection des forêts présentée le 22 janvier 1991 par le ministre délégué aux Forêts et, enfin, la politique de formation professionnelle dévoilée le Il décembre 1991 par le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Par rapport aux confrontations des années précédentes, sur la question des frais de scolarité universitaire ou sur la question de la nouvelle politique de sécurité du revenu notamment, ces confrontations de 1990-1991 ont été assurément exceptionnelles.

Par rapport à ces confrontations, celles qu'ont suscitées les autres réorientations opérées en 1990-1991 peuvent paraître mineures: c'est le cas, par exemple, de l'énoncé de politique en matière de tourisme rendu public en novembre 1990, de la nouvelle politique des Affaires internationales présentée en septembre 1991 et des diverses politiques de développement économique présentées en décembre 1991 par les titulaires des ministères à vocation économique.

Les réorientations dévoilées en décembre 1991 seront assurément précisées en 1992 et, alors, les personnes qui les contestent réagiront davantage. C'est également en 1992 que s'exprimeront vraiment les personnes mal servies par les nouvelles politiques promises ou attendues pour 1992. Parmi ces dernières, il en est trois qui poseront probablement de nombreux problèmes, celle que prépare le ministre délégué aux Autochtones, celle qu'envisage la ministre des Affaires culturelles et celle à laquelle travaille le ministre des Communications. Ces problèmes, cependant, seront vraisemblablement moins difficiles que ceux qu'ont posés les réformes les plus controversées de 1990-1991, en particulier celle de la santé et des services sociaux.



La santé et les services sociaux

La réforme de la santé et des services sociaux a été conçue dans une perspective qui devait forcément susciter des controverses. Elle impliquait un changement important dans l'organisation, ce qui allait nécessairement déplaire aux personnes qui perdraient leur position antérieure, et elle menait à une modification des pratiques traditionnelles, ce qui entraînerait inéluctablement des résistances.

Cette réforme, rendue publique le 7 décembre 1990, était l'aboutissement d'un long processus de réflexion. Le ministre de la Santé et des Services sociaux, monsieur Marc-Yvan Côté, l'a présentée comme la «dernière étape» d'une entreprise engagée cinq années plus tôt. Cette entreprise avait commencé en 1985 avec la création d'une commission d'enquête présidée par le docteur Jean Rochon. Le rapport de cette commission, publié en février 1988, préconisait de nombreuses mesures couvrant des questions aussi diverses que la pénurie relative de médecins dans certaines régions et la faible représentation des citoyens dans les organismes chargés des décisions relatives aux services offerts à la population. Après l'examen des réactions suscitées par ce rapport, la ministre responsable du dossier à l'époque, madame Thérèse Lavoie-Roux, avait publié, en avril 1989, un document qui présentait les vues du gouvernement. Ce document, intitulé «Pour améliorer la santé et le bien-être au Québec - Orientations», proposait une réforme des structures assez voisine de celle qu'avait recommandée la Commission d'enquête et une réforme des pratiques visant notamment une accessibilité accrue et une prévention plus active. Le successeur de madame Thérèse Lavoie-Roux, monsieur Marc-Yvan Côté, a ensuite soumis à consultation un avant-projet de loi inspiré du document d'orientation d'avril 1989. Cet avant-projet de loi a été examiné par la commission parlementaire des Affaires sociales, qui lui a consacré 26 séances entre le 23 janvier et le 11 avril 1990. Le livre blanc du 7 décembre 1990 et le projet de loi qui allait l'accompagner constituaient l'étape finale d'un long processus d'élaboration de la première réforme d'envergure du réseau constitué vingt ans plus tôt.

Cette réforme, le titre du document publié le 7 décembre 1990 («Une réforme axée sur le citoyen») le suggérait, visait à donner une influence plus grande aux consommateurs des soins qui, comme les personnes bien portantes payant elles aussi des impôts, contribuent au financement des soins de santé et des services sociaux. L'ambition officielle du gouvernement, selon le document, était en effet d'assurer que les citoyens soient mieux traités, davantage selon leurs besoins et le plus près possible de leur milieu de vie, d'assurer aussi que les citoyens puissent participer davantage à la prise des décisions, de façon responsable, le plus près possible de l'action, d'assurer enfin que les citoyens, qui assument le coût des services, en aient pour leur argent (page 12 du document). Pour progresser dans la voie des orientations retenues, une quantité de mesures étaient envisagées, allant de la distribution à chaque usager d'un code d'éthique énonçant ses droits et ses éventuels recours, jusqu'à l'instauration d'un service téléphonique d'information-santé accessible 168 heures par semaine. Parmi ces mesures, quelques-unes ont suscité une très vive opposition des médecins, car elles visaient à modifier leur pratique dans un sens qui n'était pas conforme à leurs conceptions, tout en leur retirant la place dominante qu'ils occupaient jusqu'alors dans les instances autorisées à prendre certaines décisions relatives à la nature et à la qualité des services offerts.

La réforme affectait en effet les médecins de diverses façons. L'expérience ayant démontré que la plupart des médecins sont très attirés par les grands centres urbains, le ministre a envisagé de régionaliser les budgets de la santé non plus en fonction des ressources de chaque région mais plutôt en fonction de ses besoins, tout en renforçant l'application des plans destinés à assurer une répartition géographique plus équilibrée des effectifs médicaux. Cette réorientation était complétée par la proposition de substituer aux Conseils de la santé et des services sociaux des régies régionales, dont 20 pour cent des sièges seraient réservés aux représentants des organismes communautaires, 20 pour cent aux élus municipaux, 20 pour cent aux représentants des groupes socio-économiques et 40 pour cent aux représentants de la population et des usagers membres des conseils d'administration des établissements du réseau dans la région, les conseils d'administration des établissements étant eux-mêmes composés majoritairement de citoyens représentatifs de milieux autres que celui de la santé et des services sociaux. Cette réorientation, de plus, s'ajoutait à diverses mesures particulières, notamment l'intention d'implanter en 1992 la rémunération à honoraires fixes pour les médecins pratiquant dans les «centre hospitaliers» universitaires, laquelle serait associée à l'exigence de rapports d'activités et à l'interdiction d'accorder des avantages monétaires en sus des honoraires fixés. Cette réorientation était assortie, enfin, du projet de faire contresigner par l'usager les feuillets de facturation utilisés par les professionnels en cabinet privé pour le remboursement de leurs honoraires par la Régie de l'Assurance-maladie du Québec et de faire parvenir à chaque citoyen un rapport annuel relatif aux services reçus en cabinet privé. Du point de vue des médecins, de nombreux aspects de la réforme proposée paraissaient inacceptables.

L'opposition des médecins à la réforme a été très vive. Dès le 15 janvier 1991, 4000 médecins avaient déjà signé une pétition dénonçant les aspects de la réforme qui ne leur plaisaient pas. En plus d'évoquer de nombreux aspects de la réforme, la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, dans un mémoire produit au début de février 1991, a proposé une solution «négociée» à la pénurie de médecins dans les régions dîtes éloignées. D'autres associations de médecins l'ont fait également. La Fédération des spécialistes du Québec, de son côté, a lancé, au début de mars, un manifeste intitulé «La médecine ligotée», dans lequel les contraintes envisagées par le ministre étaient condamnées. Une journée d'étude a été tenue le 21 mai, les hôpitaux ayant été forcés de fonctionner au ralenti. Le 29 mai, nouvelle journée de «sortie», quelque 3000 médecins ont manifesté devant l'Assemblée nationale. Une troisième «journée» a été tenue le 7 juin. Ces journées étaient accompagnées d'une publicité qui, selon la journaliste Michèle Côté (La Presse, 11 juin 199 1), aura coûté aux médecins près de 700 000 dollars. Finalement, le 12 juin, le gouvernement a décidé de reporter de deux mois l'adoption du projet de loi 120 qui traduisait en termes législatifs la réforme proposée le 7 décembre 1990.

L'annonce du report de l'adoption du projet 120 fut accompagnée de la confirmation de l'abandon, par le gouvernement, d'une disposition qui irritait beaucoup de monde: la mesure qui visait à ajouter au revenu imposable des contribuables le coût de certains services (ceux des dentistes et des optométristes notamment). Cet «impôt-service» n'aurait réduit le budget de la santé que de 100 millions de dollars par année, mais il aurait aussi réduit les revenus fiscaux du gouvernement d'un montant important (50 millions, possiblement) pour un gain net insignifiant, compte tenu des coûts administratifs et du prix ultérieur découlant d'une détérioration probable de la santé. Mais l'abandon de l'impôt-service était peu de chose par rapport aux concessions qui furent finalement accordées aux médecins.

Le texte du projet de loi 120, adopté le 28 août 1991 par l'Assemblée nationale, avait été tellement amendé qu'il semblait satisfaire les médecins. Le gouvernement avait abandonné l'idée de régionaliser les budgets de la santé en fonction des besoins. Il avait adouci les dispositions relatives aux plans d'effectifs médicaux destinés à combler les lacunes observées en dehors des centres urbains. Il avait accepté le principe de la participation de médecins aux conseils d'administration du réseau. Il avait modifié les dispositions relatives aux honoraires et il avait retiré du projet de loi la formule qui devait permettre aux usagers de contresigner les feuillets de facturation utilisés par les professionnels en cabinet privé pour le remboursement de leurs honoraires par la Régie de l'assurance-maladie du Québec... Ces amendements au projet initial et beaucoup d'autres (il y en eut 585) ont sans doute affecté les orientations de la réforme envisagée mais, de l'avis du ministre lui-même, ils l'ont rendue possible.

Cette réforme n'est cependant qu'un élément de la réorientation engagée dans le domaine de la santé et des services sociaux. Elle s'ajoute aux changements opérés précédemment, notamment à la suite du document publié en 1989 sous le titre de «Politique de santé mentale». Elle sera complétée, semble-t-il, par d'autres politiques, voire même une politique d'ensemble de la santé et du bien-être.




Les affaires municipales

La contestation de la réforme de la Santé et des Services sociaux a presque été égalée par celle qui a salué la réforme proposée par le ministre de la Sécurité publique et des Affaires municipales. Cette réforme, comme celle qu'ont contestée les médecins, a finalement été confirmée par un projet de loi dont le texte final présentait de nombreux adoucissements par rapport aux propositions initiales.

Les propositions initiales avaient été évoquées par le ministre des Finances, monsieur Gérard D. Lévesque, à l'occasion du discours du budget du 26 avril 1990. Il était question, à l'époque, de transférer aux municipalités des charges financières nouvelles, en matière de transport en commun entre autres. Les porte-parole des municipalités avaient condamné ce projet, qui entraînerait une forte hausse de l'impôt foncier. La crainte des maires était souvent exprimée dans la formule suivante: «le gouvernement veut pelleter son déficit dans notre cour».

C'était effectivement l'intention du ministre de la Sécurité publique et des Affaires municipales, monsieur Claude Ryan. Le 14 décembre 1990, présentant sa politique comme un pas menant «vers un nouvel équilibre», dans une communication présentée à la «Table Québec-Municipalités» et intitulée «Le partage des responsabilités entre le gouvernement et les municipalités: des ajustements nécessaires», le ministre a expliqué que le gouvernement du Québec, déjà pénalisé par la réduction des subventions du gouvernement fédéral, ne pouvait plus augmenter ses impôts et son déficit, alors que l'impôt foncier restait sous-utilisé. Ayant dit que «l'écart entre l'Ontario et le Québec était à cet égard considérable», le ministre a ajouté qu'il était «normal que le gouvernement fasse appel à la solidarité et à la collaboration de ses partenaires» (page 8 de la communication et page 4 du document intitulé «Vers un nouvel équilibre»). Cet appel à la collaboration des municipalités impliquait, par conséquent, un accroissement inéluctable de l'impôt foncier.

Cet accroissement de l'impôt foncier avait d'ailleurs déjà commencé puisque, en vertu de mesures annoncées lors du dépôt des crédits budgétaires pour l'exercice 1990-1991, les commissions scolaires avaient été autorisées à puiser, à même l'impôt foncier, des ressources accrues de 275 millions de dollars en 1990-1991 et de quelque 325 millions en 1991-1992. Malgré cette augmentation de l'impôt foncier scolaire, les commissions scolaires dépendent des subventions du gouvernement du Québec pour plus de 80 pour cent de leurs revenus; la situation du Québec est à cet égard bien différente de celles de provinces sises à l'ouest, l'impôt foncier y finançant environ 40 pour cent du budget de l'éducation pré-universitaire. La comparaison entre le Québec et les provinces de l'ouest du Canada justifiait l'augmentation.

Quant à l'augmentation du fardeau des municipalités au chapitre du transport en commun, elle était également justifiée, par le ministre, en vertu des «principes d'une saine gestion» (page 12 de la communication). Selon le ministre, et aux yeux du gouvernement, «suivant ces principes, le coût des services doit être assumé le plus possible d'abord par les usagers et en second lieu par les organismes publics habilités à prendre les décisions touchant [leur] fonctionnement». Or ces organismes de transport en commun recevaient, en 1990, moins de 25 pour cent de leurs revenus des municipalités qui en étaient responsables. La part des usagers était inférieure à 30 pour cent de ces revenus. Celle du gouvernement du Québec était voisine de 45 pour cent, alors qu'elle n'était que de 30 pour cent environ quinze ans plus tôt (vers 1976). Pour satisfaire à ses principes, le gouvernement avait envisagé de mettre fin, à compter de janvier 1992, aux subventions d'exploitation qu'il versait depuis une quinzaine d'années aux organismes publics de transport en commun (le montant de ces subventions étant de 266 millions de dollars de 1990).

Pour permettre aux municipalités d'assumer ce nouveau fardeau financier, le gouvernement envisageait alors (le 14 décembre 1990) de leur ouvrir l'accès à une taxe de stationnement non résidentiel (projet immédiatement dénoncé en raison de son incongruité) et à une taxe foncière spéciale sur les immeubles non-résidentiels, cette dernière remplaçant la taxe d'affaires. Les revenus attendus de ces deux nouvelles taxes, 80 et 186 millions de dollars de 1990 respectivement, devaient équilibrer le montant des nouveaux frais assumés par les municipalités (226 millions de dollars de 1990).

Des négociations subséquentes ont atténué ces propositions. Les municipalités ont obtenu, entre autres choses, la possibilité de conserver la taxe d'affaires au lieu de lui substituer la nouvelle surtaxe applicable aux immeubles non résidentiels, cette dernière ayant toutefois l'avantage de s'imposer aux immeubles des gouvernements (qui versent une «compensation» en lieu de taxes). De plus, le ministre a décidé d'augmenter de 30 dollars par année le montant des droits d'immatriculation des véhicules automobiles enregistrés dans le territoire des municipalités desservies par des organismes publics de transport en commun (régions de Chicoutimi, Hull, Montréal, Québec, Trois-Rivières et Sherbrooke). Cette dernière addition, touchant environ 60 pour cent des véhicules du Québec, devait apporter 50 millions de dollars au gouvernement, qui s'en servirait pour réduire de 266 à 216 millions de dollars la facture imposée aux municipalités concernées.

Comme les autres mesures financières, cette augmentation des droits d'immatriculation a été très mal accueillie. Elle s'ajoutait en effet à une autre augmentation de près de 60 pour cent appliquée dès 1991 et annoncée peu après la décision de financer partiellement les investissements dans le réseau routier grâce aux surplus de l'ancienne Régie de l'assurance-automobile, transformée (en juin 1990) en Société de l'assurance-automobile. Augmentés de 55 à 90 dollars en 1991, pour tous, les droits allaient atteindre 120 dollars dans les régions desservies par un organisme de transport en commun. Une telle hausse de 110 pour cent en moins de deux ans a suscité la grogne de très nombreux automobilistes.

Alors que les mesures relatives au transport en commun affectaient les agglomérations les plus peuplées, deux autres mesures de la réforme présentée le 14 décembre 1990 visaient surtout les petites municipalités. L'une de ces mesures concernait la voirie locale et devait se traduire par une charge financière additionnelle de l'ordre de 43 millions de dollars pour les municipalités. L'autre mesure concernait les services policiers fournis par la Sûreté du Québec à 1 247 petites municipalités (une trentaine de celles-ci ayant plus de 5 000 habitants et ayant préféré ne pas constituer de corps de police locaux ainsi que la loi le prévoit). Le ministre proposait de facturer les municipalités concernées jusqu'à concurrence de 79 millions de dollars de 1990, à raison d'une nouvelle tarification fixée à 0,10 dollar par 100 dollars d'évaluation foncière pour une première tranche de population de 3 000 ou moins, à 0,60 pour la tranche supérieure, à 5001 et à 0,475 pour la tranche intermédiaire. De nombreuses municipalités s'objectèrent à ces mesures.

Devant l'opposition très vive des porte-parole des municipalités concernées par ces mesures relatives à la voirie locale et à la Sûreté du Québec, le ministre a modifié quelques-unes des autres dispositions de son projet de réforme. C'est ainsi qu'il a accepté de maintenir pour trois ans la subvention de près de 8 millions de dollars par année accordée aux municipalités régionales de comté, qu'il avait initialement décidé de supprimer. De même, il a accepté de verser aux municipalités une compensation équivalant à 25 pour cent du montant de la taxe foncière applicable aux immeubles du réseau de l'enseignement primaire et secondaire (c'est-à-dire près de 50 millions de dollars de 1990 «en lieu de taxes»), alors qu'il avait proposé, en décembre 1990, de supprimer la compensation antérieure (alors fixée à 50 pour cent du «compte de taxe»), en raison du caractère essentiellement local des écoles. De plus, le ministre a permis le maintien «facultatif» de la taxe d'amusement (fixée à 10 pour cent du prix d'entrée des spectacles), qui a rapporté environ 25 millions de dollars en 1990, alors qu'il avait proposé, en décembre 1990, de la supprimer, en raison de l'extension du champ d'application de la taxe de vente du Québec alors prévue pour janvier 1992, En outre, il a réduit de moitié la facture prévue en décembre 1990 au chapitre de la voirie locale et adouci de 6 millions de dollars les barèmes appliqués au financement des services de police. Cependant, il a haussé le barème supérieur des droits obligatoires sur les mutations immobilières perçus par les municipalités (0,5 pour cent pour la tranche inférieure à 50 000 dollars, 1,5 pour la tranche supérieure à 250 000 et 1,0 pour cent pour la tranche intermédiaire, alors que les taux en vigueur auparavant étaient de 0,3 et de 0,6 en fonction de deux tranches, de part et d'autre de 50 000 dollars); la modification au barème proposé en décembre 1990 devait permettre d'accroître les revenus des municipalités de quelque 35 millions de dollars. L'ensemble de ces «adoucissements», confirmés le 14 mai 199 1, réduisait de quelque 50 millions le montant des additions imposées aux municipalités, ce qui s'ajoutait aux 50 millions obtenus grâce à l'augmentation des droits d'immatriculation et aux augmentations des revenus fiscaux consentis au chapitre de la taxe d'amusement et des droits sur les mutations immobilières (ou «taxe de bienvenue»).

Un projet de loi (le projet 145) présenté à l'Assemblée nationale le 15 mai 1990 et adopté le 20 juin, après l'adoption d'une motion de clôture le 14 juin, a formalisé la réforme pilotée par le ministre.

Les réaménagements prévus par le projet de loi 145 avaient finalement une conséquence indiscutable: une augmentation significative des impôts fonciers, des droits d'immatriculation des véhicules, des tarifs de transport en commun et des droits sur les mutations immobilières. La résistance opposée par les contribuables à cette augmentation du fardeau fiscal forcera vraisemblablement les autorités municipales à réduire certains services. Les révisions prévues pourront d'ailleurs prendre une importance considérable, puisque le gouvernement envisage encore d'autres réaménagements dans le champ des affaires municipales. Les réformes à venir soulèveront sans doute une opposition encore plus considérable car les contribuables, irrités par les hausses de l'impôt foncier, vont probablement s'en prendre aux élus locaux plutôt qu'au parti politique dont les dirigeants détiennent le pouvoir à Québec.

La rébellion des contribuables affectera sans doute les autorités locales parce que ce sont les impôts locaux qui augmenteront davantage par suite des réformes engagées par le gouvernement.




L'éducation

Il n'y a d'ailleurs pas que les tarifs du transport en commun et l'impôt foncier municipal qui soient en cause; il y a aussi l'impôt foncier scolaire, déjà en hausse depuis la décision du gouvernement, en 1990, de charger les commissions scolaires de l'entretien des équipements.

En 1990-1991, sous l'impulsion d'un nouveau ministre, les commissions scolaires et le milieu de l'éducation ont été informés de la décision du gouvernement de poursuivre les réaménagements amorcés au printemps de 1990. En effet, le 10 septembre 1991, le ministre de l'Éducation, monsieur Michel Pagé, en poste depuis le remaniement ministériel du 5 octobre 1990, a fait savoir qu'il voulait accroître le nombre de jours de classe dans l'année (officiellement il y en a 180 mais, selon le ministre, près d'une dizaine de journées sont "perdues") et réduire le nombre des journées pédagogiques (de 17 à 15) tout en les regroupant en cinq blocs de trois jours qui serviraient à diviser l'année scolaire en quatre étapes. Le ministre a aussi proposé d'accroître de 3 pour cent par année la proportion des jeunes qui obtiennent leur diplôme d'école secondaire en mettant en oeuvre des mesures diverses pour résoudre le problème des abandons (ou «décrochages») et celui de l'intégration des jeunes originaires d'autres pays. Cependant, pour allonger le calendrier scolaire et mettre en oeuvre les mesures envisagées, il faudra une augmentation substantielle des ressources financières des commissions scolaires.

Cette question des ressources financières a soulevé des craintes. Le ministre, en effet, propose d'accorder de plus en plus d'autorité aux commissions scolaires, ce qui signifie, apparemment, une augmentation correspondante de l'impôt foncier scolaire. De ce point de vue, la stratégie du gouvernement en éducation s'inscrirait dans la logique des réformes introduites dans le secteur des affaires municipales. En conséquence, la réforme proposée par le ministre de l'Éducation le 10 septembre 1991, qui a déjà suscité des objections majeures, fera sûrement l'objet de débats houleux quand elle sera précisée, au cours de 1992.




L' immigration

Par rapport aux débats houleux qui ont marqué l'examen des trois principales réformes de l'année 1990-1991, les débats qui ont suivi les autres réformes paraissent feutrés. C'est assurément le cas des débats relatifs à la nouvelle politique de l'immigration, qui a pourtant soulevé bien des interrogations.

Cette nouvelle politique de l'immigration a été rendue publique le 4 décembre 1990 par la ministre, madame Monique Gagnon-Tremblay. Intitulé «Au Québec, pour bâtir ensemble», l'énoncé de politique publié en décembre 1990 vise à favoriser l'implantation des immigrants dans les régions autres que celle de Montréal, celle-ci accueillant traditionnellement près de 90 pour cent des arrivants, et elle vise à faciliter l'intégration de ces personnes à la société québécoise, dont la plupart des membres sont francophones. Selon cet énoncé de politique, au Québec, le nombre d'immigrants francophones devrait être, en 1995, deux fois plus élevé que celui de 1990.

Cette nouvelle politique a été complétée par une entente, conclue entre le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral du Canada, en vertu de laquelle l'administration québécoise exercera dorénavant des responsabilités plus étendues que jadis. C'est ainsi, par exemple, que le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration gérera les cours de langue et autres services aux immigrants. Les compensations financières accordées par le gouvernement fédéral ont été augmentées en conséquence, dès le début de l'année financière 1991-1992 (ler avril 1991).

Cette politique a fait l'objet d'un examen en commission parlementaire au cours de l'hiver 1991 et elle a été suivie par la publication, le 20 juin 1991, d'un plan d'action qui en a précisé la portée. L'annonce du nombre définitif du contingent de 1992, faite le 4 juillet 199 1, a cependant montré que le gouvernement du Québec hésite à réaliser son objectif, qui est d'accueillir 25 pour cent des immigrants reçus au Canada. Cet objectif doit en effet être subordonné à celui qui vise une augmentation de la proportion des francophones parmi les immigrants reçus au Québec. C'est là, en tout cas, l'un des points de vue qui ont dominé lors des réunions de la Commission parlementaire consacrées à la politique d'immigration.




Les forêts

Le caractère «feutré» des débats consacrés à la politique d'immigration s'apparente à celui des discussions relatives à la stratégie de protection des forêts rendue publique le 22 janvier 199 1. Dans un document intitulé «Un projet de stratégie: aménager pour mieux protéger les forêts», le ministre délégué aux Forêts, monsieur Albert Côté, a cherché à minimiser l'utilisation des pesticides en soumettant tout épandage sur des superficies dépassant 600 hectares à une évaluation d'impact et en accentuant le recours à des méthodes sylvicoles offrant une plus grande résistance naturelle aux insectes et aux maladies. L'objectif de cette stratégie, comme celle du plan de gestion intégrée des forêts qui en est le complément, est d'assurer au Québec du futur des forêts abondantes et saines. Le compromis tend à concilier les intérêts des entreprises forestières et ceux d'autres catégories de citoyens, ce qui explique sans doute les réactions «modérées» des personnes intéressées.

Ces réactions «modérées» ont néanmoins comporté des objections importantes. En effet, assez bien accueillie par les compagnies forestières, cette stratégie a soulevé des objections dans plusieurs localités où on s'inquiète de ses effets sur la faune. De plus, elle a été critiquée par les écologistes qui auraient, semble-t-il, préféré une interdiction immédiate de tout épandage. Par ailleurs, il semble que l'intervention du ministre délégué aux Forêts dans le dossier de l'environnement était le signe que le gouvernement songeait vraiment à remettre aux ministères à vocation économique les responsabilités assumées jusqu'alors par le ministère de l'Environnement. Enfin, alarmées par les problèmes de l'industrie forestière du Québec, caractérisés par des fermetures d'usines, de nombreuses personnes ont réclamé une politique forestière conçue non seulement en fonction du XXII siècle mais aussi en fonction du temps présent. En définitive, malgré le caractère modéré des discussions, les questions soulevées par la stratégie de protection des forêts ont paru fort pertinentes.

Il en va de même des questions qui ont été soulevées par la nouvelle politique de formation de la main-d'oeuvre.




La formation de la main-d'oeuvre

La formation de la main-d'oeuvre est un aspect important dans le vaste domaine des interventions gouvernementales au chapitre des ressources humaines. Ces interventions impliquent des ministères distincts au Québec et elles impliquent plusieurs organismes du gouvernement fédéral du Canada. La multiplicité des intervenants a été longtemps considérée comme un frein majeur empêchant l'adoption d'une politique d'ensemble dans ce domaine: c'était là l'avis de la Commission d'étude sur la formation des adultes présidée par Michèle Jean, dont le rapport a paru le 25 février 1982; c'était encore l'avis du ministre responsable de la formation professionnelle jusqu'à la fin de 1991.

En dépit des difficultés, le gouvernement du Québec a créé plusieurs programmes de formation: formation en cours d'emploi, formation professionnelle des adultes dans les commissions scolaires, et ainsi de suite. En 1990, le gouvernement a créé un programme d'incitations fiscales en faveur des entreprises qui s'engageraient dans une démarche de développement de leurs ressources humaines. Ces actions, pourtant, de l'avis général, avaient des résultats limités.

Tout au long de 1990-1991, le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle a préparé un projet visant à obtenir davantage de résultats avec les ressources disponibles dans les programmes de formation professionnelle pour personnes en emploi et pour adultes sans emploi. Déjà, début janvier 199 1, il annonçait le dépôt imminent d'un énoncé de politique (dont déjà les grandes lignes étaient décrites dans un dossier spécial du quotidien Le Devoir, le 25 janvier 1991).

Cet énoncé de politique dépendait cependant d'une entente entre le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral du Canada en matière de formation professionnelle. Or le 20 mars 199 1, la ministre de l'Emploi et de l'Immigration du Canada (madame Barbara McDougall, à l'époque) a déclaré que les négociations étaient dans une impasse. Il fallut attendre la fin de novembre 1991 pour en arriver à un compromis.

Le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, monsieur André Bourbeau, a ainsi pu déposer, le 11 décembre 199 1, un document intitulé «Partenaires pour un Québec compétent et compétitif» et un projet de loi (projet 408) visant à créer une Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. La réforme envisagée dans ces textes a pour objectif de structurer les activités de formation de la main-d'oeuvre chez les adultes. La nouvelle structure devrait assurer une simplification dans la gestion des nombreux programmes de formation destinés aux adultes, assurer aussi une concertation entre les partenaires concernés par ces programmes, notamment les syndicats et les associations patronales. La gestion de ces programmes relèverait dorénavant de cette société et de sociétés régionales (lesquelles feraient disparaître la Commission de formation professionnelle).

Le succès de cette politique dépendait, en partie, du retrait annoncé du gouvernement fédéral des programmes de formation de la main-d'oeuvre et de l'obtention, par le gouvernement du Québec, des budgets correspondants. Les intentions des porte-parole du gouvernement fédéral à la fin de 1991 ont laissé comprendre que l'on avait, à Ottawa, admis le caractère distinct du marché du travail au Québec, et une entente a été signée le 21 novembre 1991 par monsieur André Bourbeau et son homologue du gouvernement fédéral, monsieur Bernard Valcourt.

Les réactions à l'énoncé de politique du ministre ont été variées. La porte-parole de l'opposition officielle, madame Louise Harel, parlementaire du Parti québécois, a dit que le ministre aurait dû réclamer le transfert au Québec de tous les programmes de main-d'oeuvre du gouvernement fédéral, y compris l'assurance-chômage. Elle a également regretté que le ministre n'ait pas modifié le programme incitatif institué l'année précédente aux fins d'inciter les entreprises à développer la formation de leurs personnels, puisque le programme, présenté lors du discours du budget du 26 avril 1990, ne semble pas avoir donné les résultats escomptés. Elle a enfin remarqué que le milieu de l'éducation était mal représenté au conseil de la nouvelle société.

Une consultation sur cette nouvelle politique, dont le début a été fixé au 4 février 1992, devrait permettre l'expression de points de vue complémentaires.

Même si le ministre a dit que sa politique était celle que le Québec attendait depuis vingt ans, il est évident qu'il y aura encore beaucoup à faire pour coordonner l'ensemble des activités du domaine des ressources humaines.




Le tourisme

Il y a également beaucoup à faire dans de très nombreux secteurs reliés au développement économique. Le secteur du tourisme en est un et le ministre du Tourisme, monsieur André Vallerand, l'a souligné avec force dans un «énoncé de politique en matière de tourisme». Dans ce document, le ministre a proposé de changer l'image du Québec dans la publicité touristique afin de faire valoir ses avantages comparatifs par rapport au continent nord-américain, en mettant notamment l'accent sur le tourisme d'affaires. Avec un budget de 100 millions de dollars de 1991 environ et sa nouvelle stratégie, le ministère espère accroître considérablement les recettes touristiques du Québec.

Cette nouvelle orientation a été assez bien accueillie et elle n'a guère soulevé de débats.




Le développement industriel et régional

Trois documents ont été publiés en décembre 1991 afin d'illustrer les nouveaux choix du gouvernement au chapitre des politiques de développement.

Le 2 décembre 1991, le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, monsieur Gérald Tremblay, a présenté une stratégie visant à développer l'emploi et la productivité dans ce qu'il a appelé des «grappes industrielles». Cette stratégie vise à rendre concurrentielles huit grappes industrielles qui ne le sont pas encore suffisamment et à accroître encore la compétitivité de cinq grappes qui sont déjà particulièrement performantes. D'autres grappes seront ultérieurement prises en considération dans cette perspective visant à favoriser le regroupement des forces économiques afin de leur donner la dimension nécessaire au développement d'un nouveau dynamisme.

Un peu plus tard, le 17 décembre 1991, le président du Conseil du trésor, responsable de la région de Montréal en matière de développement économique, monsieur Daniel Johnson, a déposé un plan stratégique quinquennal, d'environ 500 millions de dollars, intitulé «Pour un redressement durable». On a annoncé que la portée de ce plan serait précisée en 1992. Le 19 décembre 1991, le ministre de l'Agriculture, des Pêches et de l'Alimentation, responsable du développement régional, monsieur Yvon Picotte, a fait connaître la décision du gouvernement de remplacer l'Office de planification et de développement du Québec par une nouvelle structure chargée d'un nouveau mandat. Instituée pour les régions et non pour la métropole, cette nouvelle structure doit être constituée de Conseils régionaux composés d'élus municipaux, d'agents de développement et de représentants de divers organismes, ces conseils ayant un rôle de concertation, selon une démarche «d'accompagnement» des initiatives régionales. Les décisions financières les plus importantes relèveront cependant d'un secrétariat aux affaires régionales rattaché au bureau du premier ministre. En définitive, la philosophie nouvelle reflète le choix du gouvernement de privilégier le partenariat et d'accroître l'effet de ses dépenses.

Alors qu'il a pu dévoiler plusieurs de ses nouvelles politiques avant la fin de 199 1, le gouvernement n'a pu le faire pour toutes. Trois politiques, en particulier, sont encore en cours d'élaboration dans des secteurs où les compromis doivent être difficiles à trouver: c'est le cas des affaires autochtones, de la culture et des communications.




Les affaires autochtones

L'annonce d'un processus de consultation devant mener à l'énoncé d'une politique des affaires autochtones a été faite le 19 février 1991 par le Ministre délégué aux Affaires autochtones, monsieur Christos Sirros.

Par la suite, en avril et mai surtout, le ministre a rencontré les porte-parole de plusieurs agglomérations afin d'établir un état de la situation. Le 8 octobre 1991, il a réuni de nombreuses personnes pour le lancement d'une vaste consultation devant mener à la définition d'une politique réaliste, à laquelle la Convention de la Baie James pourrait peut-être servir de modèle. Cette nouvelle politique sera probablement élaborée puis adoptée au cours de 1992.




La culture

C'est également au cours de 1992 que devrait être publiée une nouvelle politique de la culture, s'il n'en tient qu'à la ministre responsable de ce dossier. Le 24 janvier 199 1, en effet, trois mois seulement après sa nomination à la tête du ministère des Affaires culturelles, madame Liza Frulla-Hébert a annoncé la création d'un comité chargé d'élaborer une politique de la culture. Une politique d'ensemble, dans le domaine de la culture, a été promise depuis longtemps afin de donner une impulsion nouvelle et un encadrement stimulant aux politiques particulières qui ont pu être élaborées précédemment pour guider les interventions gouvernementales dans le domaine de la culture. Une telle politique d'ensemble n'a jamais pu être conçue de façon satisfaisante, pour toutes sortes de raisons dont les plus significatives tiennent à la multiplicité des conceptions. En définitive, l'élaboration d'une politique culturelle n'est pas facile.

Le comité créé par la ministre et présidé par un fonctionnaire de grand talent et de grande expérience, monsieur Roland Arpin, a réussi, en six mois, à produire une proposition. Son document, intitulé «Une politique de la Culture et des Arts», publié en juin 199 1, proposait, comme condition préalable, le transfert au gouvernement du Québec des programmes du gouvernement fédéral du Canada. Ce document a fait l'objet de discussions passionnées tout au long de l'automne 1991, mais il n'est pas encore l'Énoncé de politique du gouvernement. La teneur des discussions de l'automne 1991 laisse penser que la politique définitive, attendue pour 1992, soulèvera des passions.




Les communications

Il est possible qu'il en aille de même de la future politique des communications, également annoncée pour 1992, et annoncée depuis longtemps. A ce sujet, le 5 septembre 1991, le quotidien Le Devoir a fait état d'un document interne du ministère des Communications intitulé «D'abord récupérer les pouvoirs». Le ministre des Communications, monsieur Lawrence Cannon, a fait savoir qu'il s'agissait là de la sixième version du projet de politique auquel lui-même et ses conseillers travaillaient depuis plusieurs mois; il a aussi dit que, comme d'autres politiques, la future politique des communications dépendrait des ententes que le gouvernement du Québec pourrait négocier avec le gouvernement fédéral du Canada.




Conclusion

Cette constatation, que l'élaboration de plusieurs politiques du gouvernement du Québec dépend d'ententes à négocier avec le gouvernement fédéral du Canada, révèle l'étroitesse de la marge de manoeuvre du gouvernement du Québec dans une quantité de secteurs, qui relèvent pourtant des compétences constitutionnelles des assemblées législatives provinciales. Ailleurs au Canada, semble-t-il, l'opinion accepte facilement que le gouvernement fédéral du Canada adopte des politiques pour l'ensemble du Canada dans des domaines qui relèvent de l'autorité législative provinciale. Au Québec, où la population de langue française présente indiscutablement des particularités importantes, il n'en va pas ainsi: la majorité, au Québec, préférerait que l'élaboration des politiques soit faite par des élus du Québec en fonction des particularités du Québec. Les débats consacrés aux politiques gouvernementales en 19901991 l'ont bien montré.

Ils ont montré en outre que les choix budgétaires du gouvernement fédéral du Canada ont imposé au gouvernement du Québec des réaménagements qui ont été fortement contestés. C'est le cas, de toute évidence, de la réforme effectuée dans le champ des affaires municipales, celle-ci ayant été décidée parce que les subventions fédérales diminuent et parce que l'impôt foncier est moins utilisé au Québec qu'en Ontario. Une telle logique, appliquée à une population comme celle du Québec qui souffre de disparités beaucoup plus importantes que les populations de l'Ontario ou de l'ouest du Canada, a soulevé de nombreuses objections. Elle montre, en tout cas, que les politiques du gouvernement du Québec doivent être examinées dans une perspective qui prend en considération les relations fédérales-provinciales.