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L'élection fédérale du 2 juin 1997 au Québec: une analyse des résultats



Pierre Drouilly
Université du Québec à Montréal


L'année politique au Québec 1996-1997

· Rubrique : Les élections et les référendums



Même si, avec moins de 38% du vote, le Bloc québécois a obtenu le 2 juin 1997 le pire résultat électoral des souverainistes depuis plus de 20 ans, l'électorat du Québec a néanmoins continué de bouder le Parti libéral du Canada. Depuis maintenant quatre élections, le Parti libéral obtient au Québec un pourcentage voisin du tiers des voix (35,4% en 1984, 30,2% en 1988, 33,0% en 1993 et maintenant 36,7% en 1997), c'est-à-dire un vote très en dessous des performances qu'il a connues depuis un siècle (depuis l'élection de Wilfrid Laurier en 1896), et qui lui ont permis, grâce à l'appui du Québec, de gouverner le Canada pendant les trois quarts du xxe siècle1 ] .

Les sondages annonçaient déjà, depuis la fin de l'année 1996, une baisse des intentions de vote pour le Bloc québécois: mais la polarisation du vote non francophone vers le Parti libéral, qui lui garantit un certain nombre de circonscriptions (que l'on peut chiffrer entre 15 et 20, sur un total de 75), permet une lecture différente des sondages, et une autre appréciation des forces électorales en présence. En effet, le vote francophone pour le Bloc québécois est toujours supérieur au chiffre global donné par les sondages, et comme la très grande majorité des circonscriptions du Québec sont massivement francophones, la position du Bloc québécois en nombre d'élus est donc toujours plus confortable que sa position en nombre de voix (le même phénomène se produit avec le Parti québécois).

Sur la base d'un modèle mathématique que nous avons développé depuis une vingtaine d'années2 ] , les simulations de l'élection à venir permettaient, au printemps 1997, d'anticiper que, même avec un vote qui descendrait sous la barre des 40%, le Bloc québécois était assuré d'élire plus de quarante députés3 ] . Ces mêmes simulations révélaient aussi que le statut d'opposition officielle échapperait au Bloc québécois dès le moment où le Reform Party conserverait l'essentiel de ses appuis de 19934 ] . C'est exactement ce qui se produisit le 2 Juin 1997: avec 37,9% des voix, le Bloc québécois fit néanmoins élire 44 députés, mais perdit le statut d'Opposition officielle, laquelle revint au Reform Party, qui augmenta même sa représentation parlementaire à 60 députés. Le Bloc québécois demeure toutefois, avec ses 44 députés, le second parti d'opposition, loin devant le NPD (21 députés) et le Parti conservateur (20 députés). Le Parti libéral fut réélu avec un gouvernement majoritaire, mais de justesse avec ses 155 députés sur un total de 301, bien qu'il ne fit élire que 26 députés au Québec: comme après l'élection de 1993, et pour la seconde fois donc depuis un siècle, le Parti libéral pourra gouverner le Canada sans l'appui du Québec.



Les députés élus

Aux élections de 1993, le Bloc québécois faisait élire 53 députés, le Parti libéral 19, le Parti conservateur un seul, auxquels s'ajoutait un député indépendant. Entre 1993 et 1997, quelques changements se produisirent dans la représentation du Québec à la Chambre des communes. Après le décès accidentel de Gaston Péloquin, député bloquiste de Brome-Missisquoi, le libéral Denis Paradis se fait élire au cours d'une élection partielle en février 1995; au même moment, Lucienne Robillard, ministre du gouvernement libéral de Daniel Johnson, battue aux cours des élections québécoises de 1994, se fait élire comme libérale dans Saint-Henri-Westmount, siège que lui cède David Berger par sa démission. Au cours d'une autre élection partielle en mars 1996, le bloquiste Stéphan Tremblay se fait élire dans la circonscription de Lac-Saint-Jean, laissée vacante par le départ de Lucien Bouchard, élu chef du Parti québécois et devenu premier ministre du Québec. C'est au cours d'élections partielles tenues au même moment que les libéraux Stéphane Dion et Pierre Pettigrew se font élire dans les circonscriptions de Saint- Laurent-Cartierville et de Papineau-Saint-Michel respectivement, circonscriptions laissées vacantes pour eux par les démissions respectives de Shirley Maheu (qui sera nommée au Sénat) et d'André Ouellet (qui quitte la politique). Avec ces diverses élections partielles, la représentation du Québec à la Chambre des communes est, au printemps 1997, de 53 bloquistes, 20 libéraux, un conservateur et un indépendant5 ] .

Des 53 députés bloquistes présents à la dissolution de la Chambre des communes, 35 seront réélus, neuf ne se représenteront pas (de ces neuf circonscriptions, sept resteront bloquistes et deux iront aux libéraux), et huit seront battus (quatre aux mains des libéraux, quatre aux mains des conservateurs, tandis que le neuvième, Jean Landry, se représente comme indépendant dans Lotbinière, et sera battu par le bloquiste Odina Desrochers). Des 20 libéraux présents, 17 seront réélus, deux ne se représenteront pas (Warren Allmand dans Notre-Dame-de-Grâce et Michel Dupuy dans Laval-Ouest, mais ces deux circonscriptions resteront libérales), et un sera battu (Patrick Gagnon, battu dans Bonaventure-Gaspé-Îles-de-la-Madeleine-Pabok par le bloquiste Yvan Bernier, député sortant de l'ancienne circonscription de Gaspé). Le seul député conservateur sortant, Jean Charest, sera réélu dans Sherbrooke, et le seul député indépendant sortant, Gilles Bernier dans Beauce, ne se représentera pas.

Au total donc, 53 députés ont été réélus (35 bloquistes, 17 libéraux et 1 conservateur), 10 députés ont été battus (9 bloquistes et 1 libéral), et 12 députés ne se sont pas représentés (9 bloquistes, 2 libéraux et 1 indépendant). Des 22 nouveaux députés (30% environ du total), 9 appartiennent au Bloc québécois, 9 au Parti libéral et 4 au Parti conservateur; 14 d'entre eux sont de nouvelles figures pour qui c'est la première candidature à une élection, et 8 sont des politiciens plus ou moins expérimentés. Parmi ceux-ci, on trouve deux anciens députés provinciaux (la libérale Hélène Alarie dans Louis-Hébert, élue députée de Kamouraska-Témiscouata aux élections québécoises de 1994, et le libéral Yvan Charbonneau dans Anjou, élu député de Bourassa aux élections québécoises de 1994); deux anciens députés fédéraux (le conservateur André Harvey dans Chicoutimi, élu conservateur dans cette circonscription en 1988 mais battu en 1993, ainsi que le libéral Guy Saintjulien dans Abitibi, qui avait été élu conservateur dans cette circonscription en 1984 et en 1988, puis battu en 1993); trois anciens candidats libéraux (Denis Coderre dans Bourassa, battu en 1988 dans Joliette, aux élections partielles de 1990 dans Laurier- Sainte-Marie et dans Bourassa en 1993; Raymonde Folco dans Laval-Ouest, battue en 1993 dans Laval-Est; Jacques Saada dans Brossard-Laprairie, battu en 1993 dans Laprairie); enfin un ancien candidat bloquiste (Daniel Turp dans Beauharnois-Salaberry, battu en 1996 lors d'une élection partielle dans Papineau-Saint-Michel).

En conclusion, le quart environ des députés élus en 1997 n'ont aucune expérience parlementaire, le cinquième environ sont des nouveaux venus sur la scène politique fédérale ou provinciale, et plus des deux tiers siégeaient déjà au parlement précédent.

L'élection de 1997 s'est tenue sur une nouvelle carte électorale (cartes 1 et 2). Sur la base de ces nouvelles circonscriptions, le Bloc québécois aurait fait élire 55 députés en 1993, le Parti libéral 18, le Parti conservateur 1, auxquels se serait ajouté 1 indépendant. Des 55 circonscriptions ayant une majorité bloquiste en 1993, 43 ont élu en 1997 des bloquistes, 8 des libéraux (Abitibi, Bellechasse-Etchemins-Montmagny-L'Islet, Saint-Lambert, Vaudreuil- Soulanges, Brossard-Laprairie, Brome-Missisquoi, AnjouRivière-des-Prairies et Verdun-Saint-Henri) et 4 des conservateurs (Chicoutimi, Shefford, Richmond-Arthabaska et Compton-Stanstead). Des 18 circonscriptions ayant une majorité libérale en 1993, 17 ont élu un libéral et une autre, un bloquiste (Gaspé-Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine-Pabok). La seule circonscription ayant une majorité conservatrice (Sherbrooke) en 1993 a réélu le chef conservateur Jean Charest; et la seule circonscription ayant donné une majorité à un candidat indépendant en 1993 a élu cette fois-ci un libéral (Beauce). C'est donc dire que 61 circonscriptions, soit plus de 80% du total, n'ont pas changé d'allégeance entre 1993 et 1997. La répartition géographique6 ] des élus selon leur allégeance politique (cartes 3 et 4) est exemplaire et illustre très bien la polarisation du vote selon les groupes linguistiques, comme nous le verrons ci-après.




La participation électorale

Avec un taux de participation de 73,3% (tableau 2), l'élection fédérale de 19977 ] marque un recul prononcé de la participation électorale par rapport aux élections précédentes de 1993 (77,1%), de 1988 (75,2%) ou de 1984 (76,2%)8 ] . Le taux de participation varie, en 1997, de 60,7% (Abitibi) à 83,5% (Lac- Saint-Louis). La baisse du taux de participation à l'élection fédérale de 1997 se fait néanmoins dans l'ordre: la structure de la participation électorale à travers les 75 circonscriptions du Québec ressemble à celles de la participation électorale au référendum de 1992 (corrélation de 0,812), de l'élection fédérale de 1993 (corrélation de 0,858) ou à celle de l'élection québécoise de 1994 (corrélation de 0,837). Elle ressemble cependant beaucoup moins à celle de la participation électorale au référendum provincial de 1995 (corrélation de 0,539), qui connut un taux de participation tout à fait exceptionnel (93,5%).

La répartition géographique des taux de participation (cartes 5 et 6) révèle les grandes tendances de l'abstentionnisme d'isolement sociologique9 ] : les régions périphériques (Abitibi, Saguenay-Lac-Saint-jean, Côte-Nord, Bas-du-Fleuve) et les parties centrales des grands centres urbains (Montréal en particulier) sont les régions les plus abstentionnistes, alors que c'est encore une fois le coeur du Québec (dans l'axe Montréal-Québec) qui constitue la région la plus participationniste, et notamment les banlieues de Montréal et de Québec (tableaux 8 et 9). On notera toutefois, à cette élection, le taux plus élevé de participation de la région de Montréal prise dans son ensemble, auquel s'associe sans doute une plus forte participation des électeurs anglophones (corrélation de 0,415) ou allophones (corrélation de 0,370), alors que la présence d'électeurs francophones est associée à un plus faible taux de participation (corrélation de - 0,461). On retrouve, parmi les 11 circonscriptions les plus participationnistes (taux de participation supérieur à 80%), 8 circonscriptions de l'ouest de Montréal (Lac-Saint-Louis, Pierrefonds-Dollard, Vaudreuil-Soulanges, Laval-Ouest, Brossard-Laprairie, Mont-Royal, Notre-Dame-de-Grâce-Lachine, Lasalle-Émard). Une analyse de régression10 ] indique que le taux de participation est de 83,8% parmi les électeurs anglophones, de 80,5% parmi les électeurs allophones et de seulement 71,2% parmi les électeurs francophones.

Le taux de participation en 1997 est associé positivement avec le vote libéral (corrélation significative de 0,346) et négativement avec le vote bloquiste (corrélation significative de - 0,359): dans la région de Montréal les corrélations correspondantes sont respectivement de 0,550 et de - 0,580. Cela indiquerait que l'élection de 1997 a provoqué une certaine démobilisation des électeurs bloquistes et une certaine mobilisation des électeurs libéraux: ce phénomène est évidemment dû aussi en partie aux taux de participation différentiels selon les groupes linguistiques.




Le vote bloquiste

Avec 26,8% des électeurs inscrits et 37,9% du vote valide (tableau 3), le Bloc québécois se retrouve au niveau du Parti québécois à la fin des années 1980 (élections québécoises de 1985 et de 1989). En votes valides, tout comme en votes calculés par rapport aux électeurs inscrits, le mouvement souveraniste a obtenu, en 1997, son plus mauvais résultat depuis plus de 20 ans, c'est-à-dire depuis l'élection québécoise de 1976. Le Bloc québécois a perdu en 1997 près de 10% des électeurs inscrits, soit 11,4% du vote valide: cela se traduit par une perte de près d'un demi-million de voix, c'est-à-dire très exactement le quart de ses voix de 1993.

Le recul du vote bloquiste est généralisé à travers tout le Québec et se manifeste dans 73 des 75 circonscriptions11 ] : ce recul est inférieur à 5% dans seulement 5 circonscriptions, et supérieur à 10% dans 47 circonscriptions (et supérieur à 15% dans 14 circonscriptions). Malgré cela, la structure générale du vote au Bloc québécois en 1997 demeure semblable à celle que l'on connaît habituellement au vote souverainiste: le vote bloquiste de 1997 a une corrélation de 0,939 avec le vote pour le NON lors du référendum de Charlottetown de 199212 ] ; une corrélation de 0,949 avec le vote bloquiste de 1993; une corrélation de 0,923 avec le vote péquiste de 1994; et enfin une corrélation de 0,961 avec le vote pour le OUI au référendum de 1995 (les corrélations correspondantes pour la région de Montréal sont toutes supérieures à 0,99).

C'est dire si le vote bloquiste de 1997, malgré sa faiblesse, ressemble au vote souverainiste tel qu'il s'exprime depuis le début des années 1990 (cartes 7 et 8). Le Bloc québécois obtient ses meilleurs résultats dans les circonscriptions les plus francophones, et dans les régions traditionnellement péquistes (SaguenayLac-Saint-Jean, Est de Montréal, banlieues de la couronne montréalaise). Ses plus mauvais résultais, il les obtient à Montréal (à cause du vote non francophone) et surtout dans l'Ouest et le Nord-Est de l'île de Montréal, dans l'Outaouais, et dans les régions frontalières (Cantons de l'Est, Chaudière-Appalaches).

Le vote bloquiste varie de 4,1% (Mont-Royal) à 63,5% (Lac-Saint-Jean). Des 44 députés élus par le Bloc québécois, 11 seulement l'ont été à la majorité absolue des voix, mais 14 autres ont obtenu entre 45% et 50% des voix. Sur les 10 circonscriptions dans lesquelles le Bloc québécois a obtenu moins du quart des voix, on retrouve 8 circonscriptions du West-lsland de Montréal, ainsi que Gatineau et Hull-Aylmer. À quelques exceptions près (Abitibi, Beauce, Bellechasse-Etchemins-Montmagny-L'Islet, Chicoutimi, Saint-Maurice, auxquels s'ajoutent Hull-Aylmer et Gatineau en Outaouais et Compton-Stanstead, Richmond-Arthabaska, Shefford et Sherbrooke en Estrie), le Bloc québécois a fait élire ses candidats dans presque toutes les circonscriptions du Québec français, aidé en cela par le mode de scrutin, tandis qu'à Montréal la carte politique épouse très exactement les frontières linguistiques (cartes 7 et 8). Des 44 députés élus par le Bloc québécois, 42 ont obtenu un vote supérieur au résultat bloquiste pour l'ensemble du Québec (37,9%), les deux autres élus du Bloc québécois ayant obtenu 37,1% des voix (Frontenac-Mégantic et Lotbinière): seulement trois candidats bloquistes ayant obtenu un vote supérieur au résultat pour l'ensemble du Québec ont été battus (dans Chicoutimi, Saint-Lambert et Saint-Maurice).




Le vote libéral

Avec un vote en légère progression par rapport à 1993 (36,7% du vote exprimé au lieu de 33,0%), le Parti libéral se retrouve pour la quatrième fois depuis 1984 en position de faiblesse au Québec13 ] . Le réalignement politique de l'électorat québécois au niveau fédéral, amorcé par l'élection de 1984, poursuivi par celles de 1988 et de 1993, aura donc été le changement majeur de cette fin de siècle du point de vue* des comportements électoraux au Québec.

La répartition du vote libéral à travers le Québec suit dans ses grandes lignes celle du vote libéral habituel (le vote libéral de 1997 a une corrélation de 0,887 avec le vote libéral de 1993 et une corrélation de 0,846 avec le vote libéral provincial de 1994) ou fédéraliste (le vote libéral de 1997 a une corrélation de 0,877 avec le vote au OUI lors du référendum de 1992 sur l'accord de Charlottetown, et une corrélation de 0,879 avec le vote au NON lors du référendum de 1995). Dans la région de Montréal, les corrélations correspondantes sont encore plus fortes (comprises entre 0,93 et 0,97), ce qui reflète la forte polarisation linguistique du vote, comme nous le verrons plus loin.

Entre 1993 et 1997, le vote libéral progresse dans 61 circonscriptions et recule dans les 14 autres, mais dans la moitié des cas le progrès ou le recul est inférieur à 5%. Il n'y a que 3 circonscriptions dans lesquelles la progression du vote libéral soit supérieure à 20%, Abitibi (où Guy Saint-Julien, ancien député conservateur, battu en 1993, se présentait comme libéral), Beauce (où le député indépendant Gilles Bernier avait mêlé les cartes en 1993), et Manicouagan (dans laquelle André Maltais, ancien député libéral en 1979 et 1980, tentait un retour); et trois autres dans lesquelles cette progression est comprise entre 10% et 20% (Beauport-Montmorency-Orléans, Bellechasse-EtcheminsMontmagny-L'Islet et Frontenac- Mégantic). Inversement, il n'y a qu'une circonscription dans laquelle le recul libéral soit supérieur à 20%, Mont-Royal (dans laquelle le candidat indépendant Howard Galganov a obtenu un peu plus de 20 % des voix), et une seule dans laquelle le recul libéral soit compris entre 10% et 20%, Compton-Stanstead. Dans Saint-Maurice, la circonscription de Jean Chrétien, le recul du vote libéral est de 5,8%.

Une fois de plus le vote libéral fédéral (cartes 9 et 10) se retrouve cantonné (à l'exception des circonscriptions d'Abitibi, de Beauce, de Manicouagan, et de Saint-Maurice), dans des circonscriptions à forte composante anglophone (ouest de Montréal), à forte composante allophone (nord et nord-est de Montréal), ainsi que dans les circonscriptions à forte présence anglophone le long des frontières (Brome-Missisquoi, Gaspé-Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine-Pabok et circonscriptions de l'Outaouais). Les 26 députés libéraux élus se retrouvent exclusivement dans ces régions, et 18 d'entre eux dans la région de Montréal. Malgré un vote global de seulement 36,7%, des 26 libéraux élus, 12 l'ont été avec la majorité absolue des voix (dont 7 avec plus de 60% des voix exprimées). Le vote libéral varie de 8,7% (Sherbrooke) à 70,1% (Saint-Laurent-Cartierville), mais dans 40 circonscriptions sur 75, le candidat libéral obtient moins du tiers des votes exprimés, ce qui illustre la profondeur de l'abîme électoral dans lequel s'est enfoncé le Parti libéral du Canada au Québec.

On notera cependant que cette fois-ci, les meilleurs résultats du Parti libéral, que l'on retrouve dans les circonscriptions de l'ouest de l'île de Montréal, se situent entre 60% et 70%, c'est-à-dire moins que d'habitude. Cela est dû au fait qu'en 1997 le Parti libéral n'a pas obtenu la totalité du vote anglophone: comme nous le verrons plus loin, le Parti conservateur a obtenu une part non négligeable du vote anglophone à Montréal (environ 20%), même si la presque totalité du vote allophone a cependant appuyé le Parti libéral. Ainsi, avec seulement le quart du vote francophone, le Parti libéral se retrouve, une fois de plus, cantonné dans un véritable ghetto électoral: des 26 députés libéraux, seuls quatre d'entre eux ont été élus dans des circonscriptions plus francophones que l'ensemble du Québec (Beauce, Bellechasse-Etchemins-Montmagny-L'Islet, Gatineau et Saint-Maurice). Dans le Québec français, le Parti libéral se retrouve en position de tiers-parti, même s'il a, semble-t-il, arraché au Bloc québécois un peu plus de 10% de ses électeurs de 1993.




Le vote conservateur

Au milieu du mois de mai 1997, les sondages donnaient au Parti conservateur environ le tiers des voix, à égalité avec le Parti libéral et le Bloc québécois. La remontée du Parti conservateur aura finalement été moins spectaculaire que prévue en milieu de campagne électorale, mais cela aussi les sondages l'ont clairement indiqué en fin de campagne. Avec 15,7% des électeurs inscrits et 22,2% du vote valide, le Part' conservateur augmente de plus d'une fois et demie son électorat de 1993, une augmentation de plus de 300 000 voix. Cette progression s'est faite largement aux dépens du Bloc québécois, et dans l'ensemble on peut estimer à environ 15% le pourcentage des bloquistes de 1993 qui ont finalement appuyé le Parti conservateur.

La progression du Parti conservateur se traduit par l'élection de cinq députés, dont quatre en Estrie. Un seul élu, Jean Charest dans Sherbrooke, obtient la majorité absolue des voix, et seulement trois autres circonscriptions accordent plus de 40% de leurs voix au Parti conservateur. Le vote conservateur de 1997 a une corrélation de seulement 0,630 avec le vote conservateur de 1993, ce qui indique une certaine restructuration de ce vote à travers les circonscriptions.

Bien entendu, le Parti conservateur a progressé dans toutes les circonscriptions, sauf quatre: mais, dans tous les cas de progression, sauf dans les circonscriptions des cinq élus, celle-ci reste inférieure à 20%. Elle est inférieure à 5% dans 14 circonscriptions, et comprise entre 5% et 10% dans 28 autres circonscriptions. Le résultat final de ce mouvement est que le vote conservateur se répartit d'une manière assez compacte autour de sa moyenne de 22,2%: 42 circonscriptions s'en écartent de moins de 5%, et 29 autres s'en écartent de plus de 5% mais de moins de 10%. Finalement, le Parti conservateur ne dépasse le tiers des voix que dans huit circonscriptions, et dans une lutte à trois (avec le Parti libéral et le Bloc québécois), c'est le minimum nécessaire pour se faire élire: le Parti conservateur a fait élire cinq de ses candidats dans ces huit circonscriptions. À l'exception de Chicoutimi, Jonquière et Joliette, c'est exclusivement dans la région des Cantons de l'Est que le Parti conservateur dépasse le tiers des voix, et il y a fait élire quatre de ses cinq députés. Est-ce à dire que la «vague Charest» s'est finalement réduite à la création d'une baronnie électorale dans les Cantons de l'Est, dont est originaire le leader du Parti conservateur? L'avenir seul nous le dira.

À part quelques exceptions (dont notamment Chicoutimi et Jonquière), les meilleurs résultats du Parti conservateur (cartes Il et 12) se situent dans ce que nous avons déjà qualifié de «Québec mou», c'est-à-dire la région qui s'étend le long de la frontière, sur la rive sud du Saint-Laurent, de Rivière-du-Loup aux Cantons de l'Est, en passant par la Beauce, les Bois-Francs et les Appalaches. Ce sont ces régions qui ont élu des députés libéraux en 1994 malgré la vague péquiste, et qui ont voté à 50-50 au référendum de 1995 alors que le reste du Québec francophone appuyait le OUI à 60%. C'est une vaste région, massivement francophone, dans laquelle le mouvement souverainiste rencontre depuis toujours de fortes résistances.




Les autres partis

Avec seulement 1,4% des électeurs inscrits et 2,0% du vote exprimé, le NPD réalise au Québec un aussi mauvais score qu'en 1993. Son vote varie en 1997 entre 0,9% et 6,4% (Outremont), ce qui le relègue une fois de plus au statut de particule. Néanmoins, la répartition du vote néo-démocrate de 1997 ressemble beaucoup à celle de 1993: on observe une corrélation de 0,751 entre les deux votes (corrélation qui s'élève à 0,927 pour la région de Montréal).

Comme le Bloc québécois a perdu le quart de ses électeurs, mais que l'on peut raisonnablement penser qu'il a conservé ses électeurs les plus souverainistes, et que cette débâcle bloquiste n'a pas favorisé le NPD, cela confirme qu'avant 1993, le plus clair des appuis du NPD au Québec lui venaient des souverainistes sociaux-démocrates, appuis que le NPD a perdus en 1993 avec l'apparition sur la scène électorale d'un parti souveraniste, et appuis qu'il ne pourra sans doute pas retrouver de sitôt. Il faut dire que le NPD social-démocrate aura tout fait pour creuser sa tombe électorale au Québec en opposant, par son chauvinisme «canadian», une fin de non-recevoir à la social-démocratie nationaliste québécoise, la direction du NPD n'accumulant, au cours des ans, que des gaffes vis-à-vis du Québec, et ne commettant que des impairs, avec la sanction qu'il connaît aujourd'hui pour la deuxième fois.

Parmi les autres candidats aux élections fédérales de 1997, on peut mentionner deux candidats indépendants qui ont dépassé 5% des voix exprimées dans leurs circonscriptions respectives: Howard Galganov, le militant anti-québécois bien connu, qui obtient 20,9% dans Mont-Royal; et jean Landry, ancien député bloquiste de Lotbinière qui y obtient 5,6% comme candidat indépendant. Les autres tiers partis n'obtiennent que des fractions négligeables du vote (Reforra Party, Parti vert, Parti de la Loi naturelle, Parti marxiste-léniniste, Parti de l'Héritage chrétien). Ils ne présentaient d'ailleurs chacun qu'un nombre réduit de candidats.




Le vote linguistique

Comme dans toutes les élections au Québec, le facteur linguistique s'avère le facteur déterminant pour expliquer les comportements électoraux. L'élection fédérale de 1997 n'échappe pas à cette règle: l'électorat du Bloc québécois est presque exclusivement francophone, et la très grande majorité (90%) des non-francophones ont appuyé le Parti libéral. Lorsque le pourcentage de francophones descend, le vote au Bloc québécois descend lui aussi: ainsi, dans les circonscriptions ayant moins de 50% de francophones, le Bloc québécois n'a obtenu que 13,3% du vote (tableau 7), et seulement 32,1% dans les circonscriptions ayant entre 50% et 80% de francophones, alors que son vote s'élève à 43,7% dans les circonscriptions ayant plus de 80%. de francophones.

Le Bloc québécois a remporté 43 des 53 circonscriptions comprenant plus de 80'X. de francophones (cartes 7 et 8; 13 et 14), tandis qu'il n'a remporté qu'une seule circonscription comprenant moins de 80% de francophones. Par contre, 21 des 26 députés libéraux élus l'ont été dans des circonscriptions comprenant un pourcentage de francophones inférieur à la moyenne du Québec, une douzaine d'entre eux étant élus dans les circonscriptions ayant plus d'un tiers d'électeurs non francophones (cartes 9 et 10; 15 et 16). Cette relation entre vote et composition linguistique des circonscriptions est illustrée par le calcul des coefficients de corrélation (tableau 4).

On constate qu'en 1997 les résultats du Parti libéral sont corrélés négativement avec le pourcentage de francophones (coefficient de - 0,838) et positivement avec les pourcentages d'anglophones (coefficient de 0,690) ou d'allophones (coefficient de 0,739), tout comme en 1993. Inversement, le vote au Bloc québécois est fortement corrélé avec le pourcentage de francophones (coefficient de 0,800) et négativement avec les pourcentages d'anglophones (coefficient de - 0,748) et d'allophones (coefficient de - 0,616), tout comme en 1993 ici aussi. Les coefficients de corrélation entre la composition linguistique et le vote au Parti conservateur et au NPD sont moins intenses, le Parti conservateur ressemblant davantage au Bloc québécois (à cause du vote francophone) et le NPD au Parti libéral (à cause du vote non francophone).

Dans la région de Montréal (tableau 5), dans laquelle se concentre la plus grosse part des non-francophones du Québec, les relations vont dans le même sens, avec dans le cas des francophones des relations presque parfaites, négatives avec le Parti libéral (coefficient de - 0,898) et positives avec le Bloc québécois (coefficient de 0,959). Par contre les coefficients de corrélation ne sont plus significatifs pour le Parti conservateur et le NPD, et cela est dû à la faiblesse de leur vote dans la région de Montréal, où la partie se jouait à deux.

Nous avons effectué une analyse spectrale14 ] du vote aux élections de 1993 et de 1997 dans les 25 circonscriptions de la région de Montréal: les résultats de cette analyse sont présentés dans le tableau 6. Pour chaque parti politique et chaque élection, on peut y lire les valeurs estimées du vote dans chaque groupe linguistique, avec les marges de confiance qui leur sont associées. Les résultats de ce tableau confirment les analyses précédentes.

Le Parti libéral a inversé, en 1997, la tendance à la baisse de son vote francophone, amorcée en 1984: il a obtenu 23,4% du vote francophone dans la région de Montréal, contre 15,5% en 1993, soit légèrement plus qu'en 1988 (21,3%). Par contre, parmi les anglophones de Montréal, le Parti libéral est passé de 98,3% en 1993 à 76,8% en 1997 (ce qui explique le recul du vote libéral dans certaines des circonscriptions les plus anglophones du Québec, comme Lac-Saint-Louis, Notre-Dame-de-Grâce-Lachine et Westmount-Ville-Marie), alors qu'il a conservé la presque totalité du vote allophone (98,9% en 1997 contre 96,9% en 1993). Avec 50,6% du vote francophone dans la région de Montréal, le Bloc québécois marque un recul important par rapport à 1993 (65,9%), ce qui lui assure tout juste la majorité absolue du vote francophone, et le ramène aux niveaux que le Parti québécois avait obtenus, parmi les francophones, au début des années 1970 ou au milieu des années 1980. La méthode statistique utilisée ne permet pas de déceler un vote anglophone ou allophone significatif pour le Bloc québécois, mais ce vote ne saurait dépasser les 10%. Le graphique 1 illustre la relation presque parfaite existant entre le pourcentage de francophones et le vote obtenu par le Bloc québécois dans la région du grand Montréal.



Figure 1


En supposant un vote exclusivement francophone pour le Bloc québécois, on arrive à un vote francophone bloquiste de 46,0% pour l'ensemble du Québec; et en supposant que 80% du vote anglophone et la totalité du vote allophone se sont reportés sur le Parti libéral, il ne reste à ce parti que 25% du vote francophone pour l'ensemble du Québec, un léger progrès par rapport à 1993 (19%) ou 1988 (22%), mais moins qu'en 1984 (32%): de ce point de vue, le Parti libéral n'est donc pas sorti de l'ornière dans laquelle il est embourbé depuis maintenant quatre élections. Il s'agit bien entendu ici de moyennes, mais dans plus de la moitié des circonscriptions du Québec, le Parti libéral a obtenu moins du tiers des voix, et dans une dizaine d'entre elles il arrive en troisième position, derrière le Bloc québécois et le Parti conservateur. En 1993, ce vote francophone libéral est nez-à-nez avec le vote francophone conservateur (25%), calculé en supposant que le cinquième environ des anglophones ont appuyé le Parti conservateur.

Si l'on calcule maintenant le vote francophone pour le Bloc québécois en supposant que seuls des francophones appuient ce parti, ce vote varie de 20% dans Mont-Royal à 67% dans Laurier-Sainte-Marie: les meilleures régions pour le Bloc québécois, en termes de vote francophone, sont encore l'Est de Montréal (55%), la couronne des banlieues montréalaises (53%), les Laurentides-Lanaudière (52%), le Saguenay-Lac-Saint-Jean (52%), la Montérégie (51%) (tableaux 8 et 9). Les plus faibles appuis francophones au Bloc québécois se situent en Outaouais (30%), dans Chaudière-Appalaches (32%), en Estrie (37%) et dans la partie Ouest de l'île de Montréal (40%).

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Les souveranistes ont commis des erreurs de parcours durant la campagne électorale; mais ces erreurs nous apparaissent relativement secondaires, et d'ailleurs elles ont été corrigées en cours de route. Ces erreurs ne feront qu'enrichir la petite histoire anecdotique de nos campagnes électorales.

Beaucoup plus grave, nous semble-t-il, parce qu'elle risque de se reproduire, est l'énorme erreur stratégique commise par les souverainistes à cette élection. C'est celle de ne pas avoir vu venir le missile jean Charest le long de la ligne politique médiane qui sépare d'un côté le fédéralisme «pur et dur» de jean Chrétien qui ne propose que le statu quo, et de l'autre le «séparatisme» et toutes les appréhensions. de beaucoup de Québécois face à une indépendance obtenue dans la turbulence.

jean Charest s'est habilement présenté comme le réconciliateur national, porteur d'un nouveau projet fédéraliste. Or de nombreuses enquêtes ont montré, depuis plusieurs années, que l'option qui fait le plus large consensus chez les Québécois francophones est celle d'une nouvelle «union canadienne» dans laquelle le Québec obtiendrait un statut d'État associé avec plus de pouvoirs et une reconnaissance de sa spécificité au sein du Canada.

C'est un Québec fort dans un nouveau Canada qu'une grande majorité de Québécois souhaitent, même si cette option apparaît comme utopique après 30 ans d'échecs constitutionnels, dont les derniers furent Meech et Charlottetown. C'est cette utopie que messieurs Chrétien et Manning ont oblitérée en fin de campagne, non pas par erreur mais en fonction de leurs propres stratégies électorales. Cela a aidé le Bloc québécois et l'a sauvé d'une déroute électorale, mais il ne faudrait pas que les stratèges souverainistes se disent qu'après tout ils se sont fait des peurs pour rien, et que finalement leur puissante machine électorale a fait la différence.

Lorsque les sondages nous apprirent, en milieu de campagne électorale, que les électeurs quittaient en masse le bateau bloquiste, séduits par le chant des sirènes de Jean Charest, qui promettait de nouveau une chimérique réforme du fédéralisme, aussi nébuleuse qu'improbable, les dirigeants souveranistes savaient-ils qui désertait et pourquoi? Nous en doutons. Et notre crainte aujourd'hui, c'est que le durcissement de la doctrine de la «souveraineté inéluctable parce qu'inscrite dans l'histoire et assurée par le renouvellement des générations» conduise les souverainistes à d'autres erreurs stratégiques et à d'autres échecs comme celui de l'élection du 2 juin 1997. Rien n'est acquis pour les souverainistes, telle est la leçon évidente de la dernière élection fédérale15 ] .















































































Note(s)

1.  Pour une analyse des élections fédérales au Québec depuis 1867, voir Pierre DROUILLY, Le paradoxe canadien. Le Québec et les élections fédérales, Montréal, Parti Pris, 1979, 238 p.

2.  On trouvera l'exposé détaillé de ce modèle dans notre récent ouvrage, Pierre DROUILLY, Indépendance et démocratie. Sondages, élections et référendums au Québec 1992-1997, Montréal et Paris, Éditions L'Harmattan, 1997, 354 p.

3.  Voir Pierre DROUILLY et Pierre-Alain COTNOIR, «Le Bloc: solide comme le roc ... », La Presse, 25 février 1997, B3; Pierre DROUILLY, «Le vote francophone garantit au Bloc une majorité d'élus», La Presse, 7 mai 1997, B4; et Pierre DROUILLY, «Le Bloc devrait conserver une quarantaine de députés», La Presse, 28 mai 1997, B3.

4.  Voir Pierre DROUILLY et Pierre-Alain COTNOIR, «En attendant le 2 juin ... », La Presse, 26 avril 1997, B3.

5.  En fait, il y avait un siège vacant, celui de Longueuil, représenté par le bloquiste Nic Leblanc qui a démissionné au printemps 1997 pour protester contre l'élection de Gilles Duceppe à la tête du Bloc québécois.

6.  Les cartes ici présentées ont été tracées sur un ordinateur Macintosh avec le logiciel MODÈLE, développé par Gontrand Dumont au Service de l'informatique de l'UQAM. Les calculs statistiques ont été effectués avec les logiciels EXCEL et SPSS pour Macintosh.

7.  Au moment d'écrire ces lignes, les résultats officiels de l'élection fédérale de 1997 n'étaient pas encore disponibles (directeur général des élections du Canada, Trente-sixième élection générale 1997. Résultats officiels du scrutin, Ottawa, à paraître). Nous nous sommes servis des résultats non officiels publiés par Élections Canada au début de l'automne 1997: Élections Canada nous a assurés que ces résultats non officiels étaient pratiquement exacts.

8.  On trouvera les résultats des élections fédérales au Québec depuis 1867 dans Pierre DROUILLY, Statistiques électorales fédérales du Québec 1867-1984, 21 édition, Montréal, VLB éditeur, 1986, 696 p., et des données sur les députés dans Pierre DROUILLY, Répertoire du personnel politique québécois 1867-1989, 3e édition, Québec, Bibliothèque de l'Assemblée nationale du Québec, 1990, 702 p.

9.  On trouvera les cartes des abstentions aux élections fédérales depuis 1867 dans notre ouvrage Atlas des élections fédérales au Québec 1867-1988, Montréal, VLB éditeur, 1989, 560 p. Cet ouvrage contient en outre les cartes du vote accordé aux partis et les cartes des députés élus depuis 1867, ainsi que les cartes de la composition linguistique des circonscriptions depuis 1867.

10.  Cette analyse a été conduite par une régression multiple passant par l'origine sous l'hypothèse de relations linéaires entre le taux de participation et la composition linguistique des circonscriptions. La variation expliquée est supérieure à 99%, et les valeurs résiduelles se situent dans les marges de confiance à 95% dans tous les cas sauf trois, soit les deux circonscriptions les moins participationnistes (Abitibi et Roberval), et la seconde circonscription la plus participationniste (Saint-Maurice dans laquelle se présentait jean Chrétien).

11.  Nous comparons les résultats de 1993 et de 1997 sur la base de la carte électorale de 1997: la transposition des résultats de l'élection de 1993 sur la carte de 1997 a été faite par le Directeur général des élections du Canada.

12.  Le calcul des corrélations entre le vote aux élections fédérales de 1997 et le vote dans les consultations provinciales est basé sur la transposition des résultats des consultations provinciales sur la carte fédérale. Cette transposition a été faite à partir d'un fichier informatisé des résultats électoraux détaillés pour les consultations provinciales (voir Pierre DROUILLY, Statistiques électorales du Québec par municipalités et secteurs de recensement 1970-1989, 2e édition, Québec, Bibliothèque de l'Assemblée nationale du Québec, 1990, 2 vol., 1422 p.), fichier mis à jour après chaque consultation.

13.  Pour l'analyse des élections fédérales de 1988, voir Pierre DROUILLY, «L'élection fédérale de 1988: une analyse des résultats», p. 111-126 dans Denis MONIÈRE (dit.), L'année politique au Québec 1988-1989, Montréal, Québec/Amérique, 1989; pour l'analyse des élections fédérales de 1993, voir Pierre DROUILLY, «L'élection fédérale du 25 octobre 1993: analyse des résultats», p. 63-81 dans Denis MONIÈRE (dir.), L'année politique au Québec 1993-1994, Montréal, Fides-Le Devoir, 1994.

14.  Cette analyse a été conduite par une régression multiple passant par l'origine sous l'hypothèse de relations linéaires entre le pourcentage de vote accordé aux partis et la composition linguistique des circonscriptions. Les variations expliquées sont de 98% pour le Bloc québécois, de 99% pour le Parti libéral, de 96% pour le Parti conservateur et de 78% seulement pour le NPD. Les valeurs résiduelles se situent dans les marges de confiance à 95% dans tous les cas sauf un, pour chacun des partis: dans Laurier-Sainte-Marie (Gilles Duceppe), le Bloc québécois obtient plus que prévu et le Parti libéral moins que prévu par le modèle; dans Laval-Est (Vincent Della Noce), le Parti conservateur obtient plus que prévu; dans Outremont le NPD obtient lui aussi plus que prévu. En 1993, les valeurs résiduelles se situent dans les marges de confiance à 95% dans tous les cas.

15.  Pour une analyse plus fouillée de l'opinion publique québécoise concernant la question constitutionnelle, on consultera les textes que nous avons signés avec Jean-Herman GuAY, Pierre-Alain COTNOIR et Pierre NORFAU, «Entre le lys et l'érable», parus dans La Presse des 4,5 et 6 septembre 1996, et reproduits dans le Bulletin d'histoire politique, vol. 6, no 1, automne 1997, p. 28-42.