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Septembre/Octobre 2003
Vol. 35, no 5
ISSN 1492-4684

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À propos du Canada : un regard sur notre pays par l’entremise des abécédaires

Andrée Côté Moxon, Services de recherche et d’information

Il peut être surprenant d’apprendre que les livres d’images canadiens existent depuis le milieu du XIXe siècle. Selon Jeffrey Canton, conférencier invité par Bibliothèque et Archives Canada (BAC) dans le cadre de la série d’exposés SAVOIR FAIRE, Amelia Howard-Gibbons s’est inspirée des rimes anglaises classiques de « Tom Thumb’s Alphabet » et des souvenirs qu’elle conservait de son enfance passée dans le Sussex, en Angleterre, pour créer An Illustrated Comic Alphabet en 1859.

On croit que Mlle Howard-Gibbon, préceptrice individuelle qui enseignait le dessin à Sarnia (Ontario), a conçu son abécédaire fantaisiste à l’intention de ses élèves ou tout simplement pour atténuer le mal du pays dont elle souffrait. En 1865, elle offre à un ami, en cadeau de Noël, un cahier de dessin usagé qui renferme une courte dédicace. Malheureusement, ce cahier n’a été publié que cent ans plus tard. À partir du trésor d’Amelia Howard-Gibbons, Jeffrey Canton a donné un aperçu des abécédaires canadiens, de différentes époques et de thèmes variés.

Les premiers abécédaires

Charmant et subtil, mais tout de même humoristique et amusant, An Illustrated Comic Alphabet distrait les enfants auxquels il présente les rudiments de l’orthographe.

L’abécédaire d’Amelia Howard-Gibbon est un livre d’images réellement unique en son genre pour l’époque : très peu de livres canadiens étaient publiés pour les enfants avant 1960. A Canadian Child’s ABC est une autre exception qui vient confirmer la règle. Il a été publié en 1931. Les textes sont de R.K. Gordon et les illustrations de Thoreau MacDonald, fils de J.E.H. MacDonald, membre du Groupe des Sept. Il renferme de merveilleux poèmes comme celui dédié à Ottawa et l’hymne au castor. L’ouvrage, qui évoque un vif sens du lieu, suscite un sentiment de fierté et d’identité nationales.

Jeffrey Canton a expliqué que quelques autres livres d’images avaient également été rédigés à l’époque, mais qu’ils étaient beaucoup plus didactiques, moralisateurs et tenaient davantage compte des classes, des clivages et des rôles à jouer dans la société. Ils ne dégagent qu’une infime partie du charme évident des livres de Howard-Gibbon et R.K. Gordon : par exemple, l’entreprise Christie Cookies publie un abécédaire sur la cuisson des biscuits et la compagnie London Life en produit un vantant les mérites de connaître les personnes influentes. Pendant cette période, on écrit très peu de livres qui prennent en considération l’univers des enfants.

 

En 1968, la University of Toronto Press publie Alphabet Book, un magnifique abécédaire créé spécialement par Anne et Alexander Wyse pour de petites mains. Un groupe d’enfants du sud-ouest de l’Ontario a conçu cet ouvrage simple et attrayant.

L’abécédaire de Louise Ellis, publié en 1976 et intitulé Alphavegetabet, comporte une série de poèmes en l’honneur des légumes. Amusant et plein de fantaisie, il rend hommage… à la tomate !

Le sens du lieu

By the Sea d’Ann Blade célèbre les formes et les couleurs vives. Il suscite chez les lecteurs un vif sens du lieu avec ses magnifiques illustrations de plages de Vancouver, d’orques de la Colombie-Britannique, de montagnes de la rive nord, toujours sous un ciel bleu. Les dessins de Mme Blade rappellent les paysages du Canada, ses arbres, ses animaux, ses sports, et l’importance de l’environnement; le texte tient compte des valeurs des enfants.

Seaside Alphabet Book, écrit par Donna Grassby et illustré par Susan Tooke, est un livre d’images plus subtil qui devrait intéresser les enfants plus âgés. Il ressemble d’ailleurs beaucoup aux livres de la collection Où est Charlie ?

Abécédaires didactiques

Publié en 1993, l’ABC des petits Canadiens met en valeur les héros du passé francophone (tel Samuel de Champlain) et des symboles des traditions canadiennes (p. ex. : le sirop d’érable, les forêts et l’orignal). Même si cet abécédaire a d’abord été conçu comme un outil pédagogique, il montre aussi que ces valeurs et ces paysages contribuent à définir les Canadiens que nous sommes.

L’Abécédaire des animots, de Marjolaine Bonenfant et Robert Soulières, est à plusieurs égards un ouvrage charmant et attrayant : son côté plus recherché devrait enchanter les enfants et impressionner les adultes. Les illustrations en noir et blanc de Ted Harrison dans A Northern Alphabet sont amusantes, et ses dessins au trait simples ne manquent pas d’humour. Ces abécédaires sont des outils d’apprentissage à la fois ludiques et originaux.

Juste pour s’amuser

L’Alphabet de Roger Paré adopte une démarche légère et fantaisiste pour enseigner l’alphabet aux jeunes enfants. On en a même fait un jeu.

Tout à fait canadiens

L’abécédaire tout en rimes Eh? to Zed, de Kevin Major, présente le Canada dans sa diversité multiculturelle et son immensité. Celui de Stéphane Poulin, Ah Bell Cité !, associe le sens du jeu et l’identité canadienne. Trunks All Aboard, écrit par Barbara Nichol et illustré par Sir William Cornelius Van Horne, et L’abécédaire de Pitatou, de Louise Pomminville, ont aussi été signalés au cours de l’exposé comme étant nettement canadiens. M is for Maple, écrit par un auteur canadien, mais destiné aux États-Unis, a été conçu pour faire connaître à ses lecteurs ce qui est typiquement canadien.

Les abécédaires canadiens, lorsqu’on les compare à ceux qui viennent d’Angleterre et des États-Unis, ont la particularité de mettre davantage l’accent sur le lieu. Cependant, au sein même du Canada, les styles sont assez différents d’une culture à l’autre : les auteurs canadiens anglais ont plus souvent tendance à concevoir leurs abécédaires comme des outils d’apprentissage, alors que les auteurs canadiens français font des ouvrages plus dynamiques, nerveux et amusants, inspirés de l’Europe.

Au cours de son exposé, Jeffrey Canton a précisé que les abécédaires font partie des genres littéraires les plus sous-représentés. Même si les abécédaires canadiens sont des outils qui jouent un rôle central dans la définition de nos valeurs, on a écrit très peu à leur sujet.

Dans sa conclusion, M. Canton a cerné plusieurs des éléments importants qui constituent un bon abécédaire : des images vivantes, un texte plein d’esprit, de l’humour, et des personnages qui prennent vie dans des poèmes. Le côté fantaisiste ou ludique des abécédaires canadiens plaît à la plupart des enfants; toutefois, grâce au fort sens du lieu que ces abécédaires évoquent et aux paysages canadiens qu’ils montrent, ils peuvent aussi enchanter les adultes.

Jeffrey Canton, éditeur responsable de la partie littérature jeunesse dans Books in Canada, était le conservateur invité de l’exposition Au-delà des lettres : une rétrospective des abécédaires canadiens, qui a eu lieu du 2 juin au 8 septembre 2003, à Bibliothèque et Archives Canada (BAC), à Ottawa. Le mardi 17 juin 2003, il y a présenté un aperçu des abécédaires canadiens.

On peut consulter un site Web portant sur l’exposition Au-delà des lettres à partir de celui de BAC, à www.nlc-bnc.ca/abc.