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Relevé des maladies transmissibles au
Canada
Volume 28 • DCC-7
le 15 décembre 2002
Une déclaration d’un comité
consultatif (DCC) Comité canadien de
lutte antituberculeuse*†
RECOMMANDATIONS PORTANT SUR LE DÉPISTAGE ET
LA PRÉVENTION DE LA TUBERCULOSE CHEZ LES
PATIENTS INFECTÉS PAR LE VIH ET SUR LE
DÉPISTAGE DU VIH CHEZ LES PATIENTS ATTEINTS DE
TUBERCULOSE ET LEURS CONTACTS
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Préambule
Le Comité canadien de lutte
antituberculeuse (CCLA) fournit à Santé
Canada des conseils courants, à jour et
reposant sur de solides bases scientifiques au sujet
des stratégies et des priorités
à adopter à l'échelle nationale
pour prévenir la tuberculose et lutter contre
cette maladie au Canada. Santé Canada
reconnaît que les conseils et les
recommandations figurant dans cette
déclaration se fondent
sur la pratique médicale et les connaissances
scientifiques les plus récentes, et les
diffuse dans le but d'informer les professionnels de
la santé appelés à prodiguer des
soins aux personnes atteintes de tuberculose et/ou
infectées par le VIH ou atteintes du sida.
Dépistage et prévention de la
tuberculose chez les patients infectés par le
VIH
L'épidémie d'infection à VIH a
eu des répercussions catastrophiques sur les
taux de tuberculose (TB) et sur la lutte
antituberculeuse dans les populations où
sévissent ces deux infections(1).
L'infection à VIH, et en particulier le stade
avancé de l'infection (sida), est le facteur
de risque d'évolution vers la maladie clinique
le plus important pour les cas d'infection
récente ou ancienne par Mycobacterium
tuberculosis(2). Le VIH agit en
détruisant les deux types les plus importants
de cellules immunitaires aptes à freiner le
bacille de la tuberculose (soit les macrophages et
les lymphocytes T à récepteurs
CD4)(3). Chez les sujets infectés
par M. tuberculosis qui ne reçoivent
pas de traitement antirétroviral hautement
actif (HAART), on estime que le risque de tuberculose
évolutive pour les patients ne
présentant pas de facteur de risque connu est
de 170,0 dans les cas de sida et de 113,0 dans le cas
d'infection à VIH sans sida(2). Les
cas de tuberculose ainsi
produits font augmenter le risque de transmission de
M. tuberculosis au sein de la
collectivité, ce qui constitue un
deuxième mécanisme, indirect, par
lequel l'infection à VIH accroît la
morbidité liée à la
TB(4).
Au Canada, la tuberculose latente ou
«dormante» frappe principalement quatre
groupes : les personnes nées dans des pays
où la TB est endémique, les
Autochtones, les personnes défavorisées
et les sans-abri vivant dans les grandes villes, et
les personnes âgées (5). Il
n'est pas rare que les personnes vivant dans les
grandes villes qui ont des antécédents
d'utilisation de drogues injectables
présentent une co-infection
TB-VIH(6). Selon des données
récentes, il semble que l'incidence du
VIH/sida soit à la hausse chez les
Autochtones(6-8) et chez les personnes
nées dans des pays où la tuberculose
est endémique(9). On a
constaté que le traitement de la tuberculose
latente réduit le risque d'évolution
vers la maladie clinique chez les sujets qui
présentent une co-infection
TB-VIH(10,11). On recommande ce qui suit :
-
Chaque fois que l'on diagnostique un nouveau cas
d'infection à VIH, il faut rechercher la
présence éventuelle d'une TB
évolutive. Il faut questionner le sujet
pour déterminer s'il présente des
symptômes évocateurs d'une TB
évolutive (toux, surtout s'il s'agit d'une
toux productive ou accompagnée
d'hémoptysie, fièvre, sueurs
nocturnes, perte de poids) et déterminer
s'il a des antécédents de TB ou
s'il a déjà été
exposé, ou a pu être exposé,
à la TB. Si un patient a
déjà reçu un traitement pour
une TB évolutive ou latente, il faut
déterminer si ce traitement était
adéquat. Il faut également
procéder à un examen physique
comprenant l'examen des sièges
extrapulmonaires de la maladie, comme les
ganglions lymphatiques(12), et
effectuer une radiographie thoracique pour
rechercher des signes de TB actuelle ou
passée. Le médecin qui effectue
l'examen doit être conscient que le tableau
clinique de la TB peut être
différent en présence d'une
infection à VIH et que les
caractéristiques radiographiques peuvent
être altérées ou absentes en
fonction du déficit immunitaire que
présente le sujet(3). Les
sujets chez qui l'on soupçonne une TB
évolutive doivent fournir des
échantillons d'expectorations, ou autres
échantillons appropriés, qui seront
soumis à une culture visant à
détecter la présence de bacilles
acido- résistants (BAR).
-
Les travailleurs de la santé qui
s'occupent de patients infectés par le VIH
doivent fortement soupçonner la
présence de TB chez ces personnes.
-
À l'exception des sujets ayant des
antécédents de TB évolutive
ou qui ont déjà subi un test
cutané à la tuberculine (TCT) pour
lequel les résultats étaient bien
documentés et positifs, toute personne
infectée par le VIH doit subir un TCT
faisant appel à un dérivé
protéinique purifié et
administré par la méthode de
Mantoux, qui sera interprété 48
à 72 heures plus tard par un travailleur
de la santé ayant de l'expérience
dans la lecture des résultats des TCT.
-
Le TCT doit être administré le plus
tôt possible après le diagnostic
d'infection à VIH car la fiabilité
du TCT peut diminuer à mesure que le
nombre de lymphocytes CD4 diminue.
-
Chez les sujets appartenant à des groupes
dont les taux d'infection élevés
justifient des tests annuels, il faut envisager
l'administration d'un TCT de
référence en deux
étapes(2).
-
Une induration de gt;=5 mm à la suite d'un
TCT doit être considérée
comme un signe d'infection
tuberculeuse(2,3).
-
Il n'est pas recommandé de procéder
systématiquement à des tests pour
déterminer la présence d'une
anergie(13,14). Le recours à un
traitement prophylactique de la TB chez les
sujets infectés par le VIH
présentant une anergie ne s'est pas
révélé utile ou rentable en
l'absence de toute autre indication (voir
ci-dessous)(15-17).
-
Lorsque des patients ayant obtenu des
résultats négatifs au TCT
présentent des signes de lésions
anciennes et cicatrisées de TB à la
radiographie thoracique, et en particulier
lorsqu'ils ont des antécédents
d'exposition à la TB, il faut envisager un
traitement prophylactique après avoir
exclu la présence d'une tuberculose
évolutive. On peut envisager de
répéter le TCT après avoir
entrepris un traitement anti-rétroviral et
constaté des signes d'une reconstitution
immunitaire(3).
-
À moins que cela ne soit
spécifiquement contre-indiqué, il
faut encourager fortement le traitement
prophylactique des sujets infectés par le
VIH qui a) ont obtenu un résultat positif
au TCT (induration >=5 mm), b) qui n'ont pas
déjà été
traités pour une infection tuberculeuse et
c) qui ont obtenu des résultats excluant
la présence d'une TB
évolutive(1,18-20). Le
traitement prophylactique est indiqué
même si la date de l'infection
décelée par le TCT ne peut
être déterminée. À
cause du risque très élevé
d'évolution vers la maladie clinique chez
les sujets présentant une co-infection
TB-VIH, il faut trouver des moyens
créatifs de favoriser l'observance du
traitement, par exemple, par une prophylaxie
directement suivie, surtout si l'on a des doutes
sur la faculté du patient à
respecter le traitement. Les différents
traitements prophylactiques et systèmes de
surveillance de la tuberculose sont
décrits dans la 5e édition des
Normes canadiennes pour la lutte
antituberculeuse, qu'on peut consulter
à l'adresse suivante : http://www.lung.ca/cts-sct/pdf/tbstand07_f.pdf.
-
Les contacts étroits infectés par
le VIH des sujets présentant une
tuberculose infectieuse doivent être
traités comme s'ils étaient
atteints d'une tuberculose latente, même si
le TCT répété, après
le contact, n'évoque pas la
présence d'une infection
latente(20). Étant donné
la possibilité d'une réinfection,
il faut parfois traiter de nouveau un sujet qui a
déjà subi un traitement.
-
Il est recommandé d'administrer un
traitement prophylactique aux femmes enceintes
infectées par le VIH qui ont obtenu un
résultat positif au TCT ou qui ont des
antécédents récents
d'exposition à un cas de tuberculose
évolutive, après avoir exclu la
présence d'une tuberculose
évolutive.
-
Il faut procéder à des examens
périodiques des sujets infectés par
le VIH qui sont candidats à un traitement
prophylactique contre la TB, mais qui n'en
reçoivent pas, pour rechercher les
symptômes de TB évolutive, dans le
cadre du traitement qui leur est dispensé
pour l'infection à VIH. Les cliniciens
devraient les sensibiliser aux symptômes de
la TB et leur conseiller de consulter
immédiatement un médecin si ces
symptômes apparaissent.
-
L'administration du vaccin BCG à des
patients infectés par le VIH est
contre-indiquée car cela pourrait
favoriser la diffusion de la maladie.
-
Il faut avertir les patients infectés par
le VIH que certaines activités ou certains
emplois peuvent faire augmenter leurs risques
d'exposition à la TB. Parmi ceux-ci,
mentionnons le bénévolat ou le
travail dans des établissements de
santé, des établissements
carcéraux et des refuges pour les
sans-abri, ainsi que les voyages dans des pays
où la TB est endémique.
La TB chez un sujet infecté par le VIH est une
maladie donnant lieu à la définition de
sida. Tant les cas de TB que ceux de sida doivent
être déclarés au
Département de santé
publique(21).
Dépistage du VIH chez les patients atteints
de tuberculose et leurs contacts
Les patients atteints de TB constituent une
importante population «sentinelle» pour
le dépistage du VIH. Dans certains pays
d'Afrique où la prévalence de la TB est
élevée, la prévalence de
l'infection à VIH est de > 50 % chez les
patients atteints de TB(22). Entre 1985 et
1992, les patients atteints de TB aux
États-Unis étaient 204 fois plus
nombreux à être atteints du sida que les
membres de la population
générale(23). Le
dépistage des cas d'infection à VIH
jusque-là non décelés
représente des avantages considérables;
en effet, cela permet de prévenir la
transmission future du VIH, tout en fournissant au
patient la possibilité de
bénéficier des bienfaits
indéniables que peut lui apporter un
traitement antirétroviral(3). Le
fait de savoir qu'un patient atteint de TB est
séropositif pour
le VIH peut également influer sur le cours de
son traitement antituberculeux(17). Il
existe un risque accru d'effets indésirables
provoqués par les médicaments
antituberculeux même chez les patients qui ne
reçoivent pas de traitement
antirétrovireral(24). Étant
donné que les sujets infectés par le
VIH sont exposés à un risque de
neuropathie périphérique, il peut
être judicieux d'associer de la pyridoxine
à l'isoniazide.
Chez certains patients atteints de TB et
infectés par le VIH, on a signalé une
malabsorption de leurs médicaments
antituberculeux; il peut donc être
nécessaire de mesurer les concentrations
sériques des médicaments si l'on
constate une mauvaise réponse au
traitement(3). On recommande ce qui suit :
-
Il faut encourager fortement tous les patients
chez qui l'on vient de diagnostiquer une TB de
subir un test sérologique de
dépistage du VIH, selon les lignes
directrices établies(25,26).
-
Il faut envisager de procéder à un
dépistage du VIH chez les contacts des cas
de TB infectieuse si ces personnes sont à
risque pour le VIH(27,28).
-
Les patients pour qui le dépistage du VIH
est recommandé, ainsi que les autres
patients vus dans le cadre de programmes
antituberculeux, devraient avoir à leur
disposition des ressources supplémentaires
qui pourraient leur fournir de l'information au
sujet du VIH.
Les soignants, les administrateurs et les
responsables des programmes de lutte antituberculeuse
doivent promouvoir la prestation de soins
coordonnés pour les patients atteints de TB et
infectés par le VIH, et chercher à
améliorer l'échange d'information entre
les programmes de lutte antituberculeuse et les
programmes de lutte contre le VIH/sida.
Remerciements
Les auteurs désirent remercier le Centre de
prévention et de contrôle des maladies
infectieuses, Agence de la santé publique du
Canada, Santé Canada, la Société
canadienne de thoracologie et la
Société canadienne des maladies
infectieuses, pour l'examen critique qu'ils ont fait
de ces recommandations et leur approbation finale.
Ils remercient également Susan Falconer pour
le soutien fourni à la rédaction de cet
article.
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* Membres : Dr V. Hoeppner (président);
Dr M. Baikie; Dr C. Balram; Mme P. Bleackley; Mme C.
Case; Dr E. Ellis (secrétaire
général); R.K. Elwood (ancien
président); Mme P. Gaba; Dr B. Graham; Dr B.
Gushulak; Mme C. Helmsley; Dr E.S. Hershfield; Mme R.
Hickey; Dr A. Kabani; Dr B. Kawa; Dr R. Long; Dre F.
Stratton; Mme N. Sutton; Dr L. Sweet; Dr T.N.
Tannenbaum.
† Cette déclaration a été
rédigée par les Drs R. Long, S. Houston
et E.S. Hershfield. Elle a été
approuvée par le Comité canadien de
lutte antituberculeuse, la Société
canadienne de thoracologie de l'Association
pulmonaire du Canada, la Société
canadienne des maladies infectieuses et le Centre de
prévention et de contrôle des maladies
infectieuses, Agence de la santé publique du
Canada, Santé Canada.
[Relevé des maladies
transmissibles au Canada]
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