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Recherche sur la prestation de soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer au Canada : état actuel et perspectives d'avenirRésuméEn décembre 2002, un atelier national s'est tenu à Ottawa pour orienter la recherche sur les soins dispensés aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer au Canada. Avant l'atelier, une recherche avait été effectuée pour identifier les chercheurs du Canada ayant mené des recherches sur les soins aux personnes souffrant d'une déficience cognitive, de la maladie d'Alzheimer ou d'une autre démence, pour repétrer les études pertinentes menées au Canada et pour faire une synthèse des résultats et des thèmes ayant ressorti au cours de ces recherches. Le présent document résume les résultats de la recherche visant à recenser les études canadiennes, les thèmes de recherche ayant ressorti au cours de l'atelier national qui s'est tenu à Ottawa et les recommandations faites au cours de l'atelier. Le rapport décrit d'abord les modèles de prestation de soins et traite ensuite des effets de différents moyens utilisés pour aider ceux qui dispensent des soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. Il se termine en soulignant les défis méthodologiques associés aux études d'observation et d'intervention dans le domaine de la prestation de soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et les recommandations concernant les moyens d'accroître la capacité de recherche du Canada dans ce domaine. Mots clés : déficience cognitive; démence; dispensateurs de soins; maladie d'Alzheimer; prestation de soins; vieillissement IntroductionDe nombreuses recherches ont été menées sur la prestation de soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer au Canada, et il est nécessaire de faire le point sur les connaissances acquises et de décider des orientations futures de la recherche. Conséquemment, en décembre 2002, l'Institut sur la santé des personnes âgées de l'Université d'Ottawa associé à Service de santé SCO, en collaboration avec l'Institut du vieillissement et l'Institut de la santé des femmes et des hommes des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) ainsi qu'avec le Portefeuille de partenariats et application des connaissances des IRSC, a organisé un atelier national de recherche de deux jours pour orienter la recherche sur la prestation des soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer au Canada. Avant l'atelier, un recensement des études canadiennes avait été effectué pour :
MéthodologieStratégie de recherche visant à recenser les études canadiennes portant sur la prestation de soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer La recherche portait sur les études menées au Canada. Lorsqu'on
aura une bonne connaissance des réalisations canadiennes, on pourra
examiner les résultats obtenus dans d'autres pays et déterminer
dans quelle mesure ces résultats s'appliquent au contexte canadien.
Par conséquent, la recherche constituait une première étape
nécessaire dans le processus d'examen de la littérature internationale
sur la prestation des soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer.
Les références
nos 1 à 6 présentent les résultats de revues exhaustives
de la littérature inter-nationale. Les stratégies de recherche
auxquelles nous avons eu recours nous ont permis de recenser 1 525 références
parmi lesquelles 111 répondaient aux critères d'inclusion
dans l'étude. Prière de consulter le site Web suivant pour
obtenir une description détaillée des méthodes de recherche
et une liste des références qui répondaient aux critères
d'inclusion pour la revue : http://www.medicine.uottawa.ca/research/fra/instituts.html Atelier d'OttawaL'atelier a réuni des chercheurs, des cliniciens, des décideurs et des représentants d'organismes gouvernementaux et d'organisations non gouvernementales du Canada. M. Richard Schulz, de l'Université de Pittsburgh, chercheur reconnu à l'échelle internationale pour ses recherches sur les dispensateurs de soins, était aussi présent. Après une présentation d'affiches et une allocution de bienvenue prononcée par Réjean Hébert, directeur scientifique de l'Institut du vieillissement des IRSC, la première demi-journée de l'atelier s'est poursuivie par une présentation en séance plénière des résultats de notre recherche sur les études canadiennes réalisées dans le domaine de la prestation de soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et une discussion en panel sur les besoins des utilisateurs des études avec un repré-sentant d'une organisation non gouvernementale, un représentant d'un organisme gouvernemental et un clinicien. Le deuxième jour de l'atelier, le groupe de travail a recommandé que les IRSC mettent en oeuvre certaines initiatives pour stimuler la recherche sur les dispensateurs de soins. Rédaction du rapportLe présent rapport s'appuie sur les résultats de la recherche visant à recenser les études canadiennes portant sur la prestation des soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, les discussions tenues au cours de l'atelier national ainsi que les suggestions et commentaires des participants et des invités concernant les ébauches du document. Le rapport se termine par une discussion concernant les moyens d'accroître la capacité de recherche dans ce domaine au Canada. Le rapport a été présenté aux IRSC en mai 2003. RésultatsPour chacun des sujets suivants, consulter le tableau 1 pour connaître les questions de recherche et les domaines proposés pour la recherche future sur la prestation de soins aux cas de maladie d'Alzheimer au Canada.
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TABLEAU 1
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Profils de la prestations des soinsQui fournit les soins? Les membres de la famille et les amis sont les principaux dispensateurs de soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer qui vivent dans la collectivité7. En effet, la famille et les amis, particulièrement le conjoint et les enfants d'âge adulte (qui, dans certains cas, sont eux-mêmes des personnes âgées)10,11, prodiguent entre 75 % et 85 % des soins requis par les Canadiens âgés de santé fragile8,9. Habituellement, un membre de la famille, le plus souvent une femme7,11,12 assume la plus grande part des responsabilités, jouant le rôle de principal dispensateur de soins. Le plus souvent, les femmes s'occupent des travaux ménagers et des soins personnels et les hommes, de l'entretien de la maison, du transport et des questions financières13. Quels sont les types de soins fournis? Le rôle du dispensateur de soins est complexe et mal défini, mais comprend généralement l'aide pratique en ce qui concerne les activités de base et instrumentales de la vie quotidienne et l'hygiène personnelle, le soutien affectif, la médiation avec les organisations officielles et les fournisseurs de services, l'aide financière et, parfois, le partage du domicile10,14. Les études menées dans la population sont souvent limitées, car les dispensateurs et les bénéficiaires des soins ont de la difficulté à distinguer les différentes catégories de professionnels qui se rendent à leur domicile. Comment caractériser les transitions chez les dispensateurs de
soins? La prestation de soins est habituellement un processus évolutif
de longue durée. Schulz15 décrit la trajectoire suivie par
les dispensateurs et les bénéficiaires des soins ainsi que
les évaluations et les effets sur la santé associés à chaque étape
du modèle (voir la figure 1). Il sera important de mener des études
longitudinales et transversales pour évaluer le rôle des transitions
dans la prestation des soins. Des enquêtes nationales dans la population
sur les dispensateurs de soins, telles que l'Étude longitudinale
canadienne sur le vieillissement16 et l'Enquête nationale sur la
santé de la population FIGURE 1 Quelle est la quantité de soins donnée? Dans l'Étude sur la santé et le vieillissement au Canada (ESVC), les sujets âgés atteints de démence et vivant dans la collectivité bénéficiaient chaque mois d'une aide d'une durée moyenne de 63 heures de la part de leurs principaux aidants naturels. Les sujets qui n'étaient atteints d'aucune démence recevaient en moyenne une aide qui totalisait 44 heures par mois de la part d'un de leurs principaux dispensateurs de soins11. Même après le placement des sujets en établissement, les dispensateurs de soins du Canada continuent généralement à prodiguer une certaine quantité de soins aux sujets7,11,17,18. L'utilisation des services de santé diffère de la demande, comme en témoigne le degré d'utilisation réel des services. Par exemple, les « besoins », si l'on en juge par les taux de prévalence des problèmes de santé observés dans les études épidémiologiques, pourraient être beaucoup plus élevés que l'utilisation réelle19. Aspects négatifs de la prestation de soinsQuel est le fardeau financier de la prestation de soins? Hux et coll.20 ont mené une analyse en bonne et due forme du coût de la prestation des soins aux personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer à l'aide des données de l'ESVC. Le coût annuel, pour la société, des soins par personne augmente avec la gravité de la maladie, passant de 9 451 $ (CAN) pour les cas peu avancés à 36 794 $ (CAN) pour les cas graves. Le placement en établissement repré-sentait la plus grande partie des coûts pour les cas graves de la maladie. Au Manitoba, en 1991, les coûts associés uniquement aux services de santé et aux services sociaux étaient de 2 343 $ pour les personnes atteintes de démence, de 1 882 $ pour les personnes présentant une déficience cognitive sans démence (DCSD) et de 1 101 $ pour les personnes dont les facultés cognitives étaient normales21. Une proportion de 25 % des aidants naturels canadiens ont indiqué que le coût des fournitures, des médicaments, des rénovations et de l'équipement représentait pour eux un fardeau financier14,22. Les répercussions économiques des absences du travail, des possibilités de carrière perdues ou remises à plus tard et de la perte d'emploi peuvent aussi nuire au bien-être financier à long terme des dispensateurs de soins14,23. Pour pouvoir payer les frais de leur propre poche, certains aidants naturels doivent rajuster leur budget et utiliser leurs économies, ce qui peut avoir des effets sur leur bien-être économique et leur qualité de vie à long terme. Quels sont les effets de la prestation de soins sur la capacité de travailler des dispensateurs de soins? Au cours de la première phase de l'ESVC, le tiers des dispensateurs de soins non rémunérés ayant un emploi ont fait état de perturbations de leur travail en raison de la prestation de soins; ces perturbations ont été signalées deux fois plus souvent par ceux qui dispensaient des soins à des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer7. Les dispensateurs de soins n'ont souvent d'autres choix que d'utiliser leurs congés de maladie et leurs congés annuels pour fournir des soins. Au Canada, les milieux de travail appuient-ils les employés qui dispensent des soins à des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer? Medjuck, Keefe et Fancey24 ont évalué dans quelle mesure les milieux de travail actuels aident les femmes à équilibrer les exigences de leur emploi et leurs responsabilités en matière de soins à des personnes âgées. Pour ce faire, ils se sont fondés sur les politiques en milieu de travail et les résultats d'entrevues réalisées auprès de 246 dispensatrices de soins à un parent âgé dans 37 milieux de travail en Nouvelle-Écosse. Leurs résultats révèlent un biais lié aux soins pour les enfants dans les politiques d'aide à la famille, un biais lié au sexe dans la formulation des politiques et un accent sur la productivité en milieu de travail plutôt que sur le bien-être des employés. Les chercheurs ont conclu que les politiques actuellement en place dans les milieux de travail ne tiennent pas compte des besoins complexes et des situations diverses des femmes ayant un emploi qui fournissent des soins à des adultes âgés. Quels sont les effets de la prestation de soins sur la santé physique et psychologique? Trente pour cent des personnes qui dispensent des soins à des cas de maladie d'Alzheimer souffrent d'une dépression; une plus faible proportion des dispensateurs de soins présentent des problèmes de santé en raison de leurs rôles et de leurs responsabilités7,12,25. Les liens entre les tâches et la santé du dispensateur de soins sont complexes. Les soins prodigués à un cas de maladie d'Alzheimer qui vit dans la collectivité combinés à un faible soutien social sont associés à des troubles psychologiques et à des problèmes de santé26. La prestation de soins réduit également les interactions sociales et les loisirs et diminue l'énergie qui pourrait être consacrée à d'autres activités14,23. Il ressort d'études menées au Canada qu'un certain nombre de facteurs contribuent aux effets néfastes sur la santé, dont la fréquence accrue des problèmes compor-tementaux, les déficiences fonctionnelles et cognitives du bénéficiaire des soins et les traits de caractère du dispensateur de soins26-33. Aspects positifs de la prestation de soinsQuels sont les aspects positifs de la prestation de soins? Les recherches menées au Canada ont révélé que la prestation de soins ne comporte pas que des aspects négatifs34,35. Les dispensateurs de soins font état d'un certain nombre d'avantages personnels liés à la prestation de soins tels que la camaraderie, la satisfaction, le prolongement de la qualité de vie et le plaisir34. Les aspects satisfaisants de la prestation de soins sont souvent méconnus et sous-étudiés. Il est important de comprendre comment les bienfaits sont liés aux résultats36. Les dispensateurs de soins réagissent de façon très variée à leurs rôles et à leurs responsabilités et ne sont pas tous écrasés par la tâche à accomplir ni incapables de s'adapter à la situation14. Méthodes pour aider les personnes qui dispensent des soins aux cas de maladie d'AlzheimerIl existe trois méthodes pour concevoir et évaluer les interventions37. La première méthode consiste à concevoir des interventions comportant plusieurs éléments qui sont offerts à tous les dispensateurs de soins. Cette méthode est relativement simple à mettre en place et à évaluer, mais pourrait ne pas convenir à tous les besoins individuels. La deuxième méthode consiste à concevoir des interventions ciblées ou adaptées visant certains types de dispensateurs ou de bénéficiaires de soins et certaines étapes de la prestation des soins. Les interventions ciblées et adaptées peuvent être complexes et coûteuses et devraient être ancrées dans la théorie. Par contre, elles sont adaptées aux dispensateurs et aux bénéficiaires des soins. La troisième méthode consiste à mettre sur pied des interventions communautaires locales avec les bureaux locaux de la Société Alzheimer et d'autres groupes d'intérêts qui offrent gracieusement leur temps pour soutenir les aidants naturels. La mise sur pied des interventions devrait se faire en collaboration avec les dispensateurs de soins afin que ceux-ci puissent indiquer ce qui, à leur avis, fait la différence. Il faudrait interroger des personnes qui dispensent ou ont dispensé des soins à des cas de maladie d'Alzheimer afin d'en savoir plus sur les renseignements, la formation et le soutien qu'elles auraient souhaité obtenir. Quels types d'études d'intervention ont été menées jusqu'à présent au Canada sur les personnes qui prodiguent des soins aux cas de maladie d'Alzheimer?Nos recherches visant à recenser les études menées au Canada ont révélé que onze études d'intervention sur les dispensateurs de soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ont été publiées depuis 1990. Les études pilotes ont été exclues de notre revue. Nous avons aussi exclu les études portant sur les répercussions des dépenses faites par les dispensateurs de soins pour se procurer des médicaments pour traiter la démence chez les bénéficiaires de soins. Toutefois, plusieurs études récentes ont porté sur cette question38-40, et il faudra mener d'autres études pour déterminer les effets des médicaments d'ordonnance et des médicaments en vente libre utilisés pour le traitement de la démence sur ceux qui soignent des personnes âgées souf-frant d'une démence. En réaction aux critiques concernant l'inefficacité des groupes de soutien classiques destinés à aider ceux qui soignent bénévolement des personnes atteintes de démence41, des études d'intervention canadiennes récentes portant sur les aidants naturels des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ont mis en lumière les interventions cognitives et comportementales en groupe fondées sur la théorie. Ces programmes sont généralement conçus pour augmenter l'auto-efficacité des dispensateurs de soins42 et pour fournir à chaeun d'eux les outils pour les aider à surmonter la détresse psychologique associée à la prestation de soins à des personnes présentant des déficiences cognitives, par exemple, des outils pour augmenter la capacité à résoudre les problèmes, des cours d'affirmation de soi et la restructuration cognitive42-44. Les interventions destinées aux personnes qui dispensent des soins aux cas de maladie d'Alzheimer varient. L'une des approches consiste à augmenter la capacité des aidants à résoudre les problèmes. Roberts et coll.44 ont mis au point une intervention individualisée de résolution des problèmes. Leurs séances de « thérapie » comportent les étapes suivantes : orientation du problème, définition et formulation du problème, formulation de solutions possibles, prise de décision, puis mise en oeuvre et vérification de la solution. Un autre type d'intervention fait appel aux soins de relève45. Les soins de relève peuvent être prodigués par des préposés qui se rendent à domicile pour s'occuper du malade pendant que le dispensateur de soins quitte la maison ou demeure à la maison pour s'occuper d'autres tâches que celles liées aux soins. Il peut aussi s'agir de soins de jour, de programmes de jour dans un hôpital ou de lits réservés aux soins de relève dans un établissement qui accueille la personne atteinte de la maladie d'Alzheimer pendant quelques jours ou quelques semaines. Généralement, on favorise les soins de relève pour permettre aux bénéficiaires de soins de rester chez eux et d'éviter d'être placés dans un établissement de soins de longue durée et pour diminuer le fardeau du dispensateur de soins. D'autres interventions font appel à des méthodes combinées46-47. Ainsi, Mohide et coll.48 ont mis sur pied une intervention qui combine les soins de santé axés sur le dispensateur de soins, l'éducation au sujet de la maladie d'Alzheimer et de la prestation des soins, l'aide à la résolution de problèmes, les soins de relève à la maison prodigués à intervalles réguliers et l'accès à un groupe d'entraide pour les aidants membres de la famille. Dans un essai comparatif randomisé similaire, on a combiné l'information, le soutien social, la formation pour l'acquisition de nouvelles compétences et la modification du comportement46. Hébert et coll.47 ont conçu un programme de groupe de soutien doté de plusieurs éléments, soit de l'information sur la maladie d'Alzheimer, des techniques de résolution des problèmes comportementaux et affectifs et des techniques de relaxation. Hébert et coll.49,50 ont aussi mis sur pied une intervention psycho-éducative de groupe visant à augmenter la capacité des dispensateurs de soins à composer avec les exigences stressantes auxquelles ils doivent faire face lorsqu'ils prennent soin de personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. Leur programme de 15 semaines a été conçu pour aider les participants à améliorer leur évaluation cognitive des situations stressantes et leur fournir des mécanismes pour faire face à ces situations. Que savons-nous au Canada des interventions aux échelons communautaire, provincial ou national?En plus des interventions visant les personnes qui dispensent des soins à des cas de maladie d'Alzheimer, les études doivent évaluer les stratégies communautaires qui ciblent les familles des dispensateurs de soins, les soignants professionnels, les collectivités et les décideurs (voir la figure 2 pour des exemples). La recherche doit être orientée vers les systèmes de soins communautaires qui appuient les dispensateurs de soins (réseaux de soins pour les personnes souffrant d'une démence, sociétés Alzheimer locales, etc.) et les relations entre le gouvernement central et les autorités locales. Bien qu'il existe plusieurs initiatives du genre au Canada, les évaluations systématiques des interventions communautaires et des interventions en matière de politique sont peu nombreuses. La section suivante décrit les initiatives existantes et formule des suggestions pour la recherche à venir. FIGURE 2 Soutien à domicile et communautaireApproches locales, provinciales et fédérales. Dans le cadre de la Stratégie ontarienne visant la maladie d'Alzheimer et les démences connexes51, initiative unique en matière de politique au Canada, on a mis en place des politiques relatives aux soins prodigués par des aidants naturels qui ont des éléments communs avec les politiques adoptées aux échelons provincial et local. La Société Alzheimer de l'Ontario a augmenté le nombre de bureaux locaux qui répondent aux initiatives de la Stratégie. Les initiatives liées directement à la prestation des soins comprennent la sensibilisation de la population, l'information, l'éducation et la recherche sur la prestation des soins. Le ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l'Ontario procède actuellement à une évaluation systématique de cette initiative. Liens entre la prestation des soins par des aidants naturels et par des professionnels. Les chercheurs ont proposé différents modèles de prestation des soins pour illustrer comment les soins professionnels et non professionnels pourraient être reliés. Selon le modèle de prestation des soins fondé sur la spécificité des tâches, la structure de la tâche détermine la source des soins52. Selon d'autres modèles53,54, l'augmentation de la prestation de services professionnels est proportionnelle, et parallèle, à la diminution des soins prodigués par des aidants naturels. Un troisième modèle suggère que les profils de l'aide sont conformes à un processus ordonné de sélection hiérarchique déterminé par les préférences individuelles55. Selon le modèle complémentaire56, les soins professionnels complètent les soins prodigués par les aidants naturels. Modifications de l'environnement physique. On pourrait transmettre aux personnes qui dispensent des soins à des cas de maladie d'Alzheimer qui vivent toujours à domicile les nouvelles connaissances relatives à la conception des installations. Il s'agirait notamment des nouvelles technologies de surveillance médicale, comme la surveillance de la tension artérielle à domicile57. On pourrait aussi utiliser des ordinateurs programmés au moyen de techniques d'intelligence artificielle et d'algorithmes pour permettre aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer d'être moins dépendantes de leur dispensateur de soins à domicile, par exemple, pour se laver les mains58. Aide financièreLes crédits d'impôt, les indemnités directes et les régimes de retraite constituent d'autres moyens d'aider de façon tangible les dispensateurs de soins, et ces moyens pourraient être moins coûteux que les dépenses directes liées à la mise en oeuvre de services. Les politiques fiscales canadiennes qui soutiennent les aidants naturels comprennent le crédit d'impôt pour personnes handicapées, le crédit d'impôt pour personnes handicapées à charge, le crédit d'impôt pour frais médicaux et le crédit d'impôt aux aidants naturels. Ne sont pas admissibles au crédit d'impôt aux aidants naturels les conjoints qui dispensent des soins, les dispensateurs de soins qui n'habitent pas avec le bénéficiaire des soins et les aidants naturels de personnes dont les revenus dépassent 15 453 $. Par conséquent, 90 % des dispensateurs de soins canadiens ne peuvent pas profiter de ce crédit d'impôt, dont le montant maximum est de 560 $59. Une compensation directe sous la forme de droits à pension et de politiques d'allocation (telles que l'indemnisation pour accompagnateur fournie par le Ministère des Anciens Combattants et la politique adoptée par le gouvernement du Québec, qui offre 600 $ par année pour les services de relève) constituent d'autres moyens d'indemniser les dispensateurs de soins. Actuellement, le Régime de pensions du Canada (RPC) n'offre aucun avantage aux employés qui doivent prodiguer des soins et se voient donc dans l'impossibilité de travailler. Toutefois, le RPC permet aux employés d'exclure du calcul de la pension l'absence de revenus pendant la période où ils prennent soin d'un enfant de moins de sept ans. Une politique semblable pour les soins prodigués à des personnes âgées ferait en sorte que la baisse du revenu durant la période de soins ne réduirait pas par la suite les prestations de retraite. Les modifications majeures du RPC doivent être approuvées par au moins les deux tiers des provinces, et de telles modifications pourraient faire augmenter les coûts pour les individus et les employeurs. Les avantages des politiques telles que les crédits d'impôt, les régimes de retraite, les congés pour prendre soin d'une personne et la rémunération des dispensateurs de soins pourraient être insuffisants pour appuyer les aidants naturels des cas de maladie d'Alzheimer. Il est nécessaire d'adopter de nouvelles politiques financières et politiques en milieux de travail pour soutenir les aidants naturels. On pourrait évaluer ces politiques au moyen de sondages afin de déterminer à quel point les Canadiens sont en faveur des politiques de soutien aux personnes qui dispensent des soins à des cas de maladie d'Alzheimer. Chaque politique mise en place devrait faire l'objet d'une évaluation appropriée. Appui du gouvernement aux milieux de travailEn septembre 2002, le gouvernement fédéral a consenti à modifier des programmes existants afin de permettre aux Canadiens de prodiguer des soins de compassion à un enfant, un parent ou un conjoint gravement malade ou mourant sans risquer de perdre leur emploi ou des revenus (discours du Trône, septembre 2002). Le comité Kirby a aussi recommandé que des prestations d'assurance-emploi soient accordées aux membres de la famille qui soutiennent un malade en phase terminale, et la Commission Romanow60 a recommandé au gouvernement fédéral de « développer un plan pour offrir un soutien direct aux aidants naturels afin de leur permettre de s'absenter du travail pour assurer des soins de maintien à domicile nécessaires aux moments critiques » (p. 201). Le budget fédéral de 2003 a tenu compte de ces recommandations en élargissant les dispositions relatives à l'assurance-emploi de façon à permettre la prise d'un congé de compassion afin de fournir des soins de compassion à un enfant, à un parent ou à un conjoint gravement malade ou mourant. Le projet de loi à cet égard a récemment été rejeté. Plusieurs provinces (Colombie-Britannique, Québec et Ontario) ont aussi adopté des dispositions législatives pour permettre la prise d'un congé familial sans perte de revenu. Les résultats susmentionnés laissent croire qu'on ne dispose pas d'assez de données concernant les interventions générales, ciblées et communautaires destinées aux personnes qui soignent des cas de maladie d'Alzheimer pour asseoir des politiques visant à soutenir ces dispensateurs de soins. L'élaboration de telles politiques favoriserait les études dérivées et les partenariats entre les organismes gouvernementaux (p. ex., Statistique Canada) et les organisations non gouvernementales ainsi que parmi les organismes de financement (p. ex., les IRSC et le National Institute on Aging des É.-U.). Défis méthodologiques associés aux études d'observation et d'interventionMesures des résultats de la prestation de soins aux cas de maladie d'AlzheimerÀ la suite d'un examen exhaustif des essais d'intervention cités dans la littérature internationale6, nous avons relevé quatre construits servant à évaluer les résultats des études d'intervention : la qualité de vie, par exemple, le fardeau pour le dispensateur de soins, les mécanismes d'adaptation, le soutien social et l'adaptation conjugale; les symptômes de détresse psychologique, comme la dépression et l'anxiété; la portée sociale, comme l'utilisation des services de santé, les coûts pour le système de santé et les répercussions du placement en établissement; et la validité sociale, comme la satisfaction envers les processus de soins. Les études d'observation et d'intervention menées au Canada sont fondées sur un ou plusieurs de ces construits, et peu de ces études ont recours aux mêmes moyens pour les mesurer. Conception et mise en oeuvre d'études d'intervention visant à appuyer les dispensateurs de soinsLa plupart des études d'intervention comparatives randomisées canadiennes recensées faisaient état d'effets limités sans réduction importante du fardeau pour les dispensateurs de soins43-46,48,61. Bien que des différences se soient parfois manifestées immédiatement après l'intervention,43,46 elles étaient temporaires. Une exception a toutefois été observée, soit un essai comparatif randomisé multicentrique49 qui faisait état de différences importantes entre les dispensateurs de soins du groupe témoin et du groupe d'intervention en ce qui concerne les réactions aux problèmes comportementaux, particulièrement aux comportements perturbateurs, et la fréquence de ces problèmes. Les problèmes méthodologiques inhérents aux études d'intervention pourraient expliquer en partie les effets limités de ces études. Sept études comparatives ran-domisées ont été publiées au Canada43-46,48,49,61. La taille globale des échantillons pour les sept études variait entre 21 et 158 sujets, avec une moyenne au début de l'étude de 67 sujets. Toutefois, dans six études sur sept, le taux d'attrition des sujets était élevé43,44,48,49,61 en raison du décès ou du placement en établissement des bénéficiaires des soins, ce qui a pu se solder par un nombre de sujets trop bas pour l'obtention de résultats statistiquement significatifs. Dans plusieurs études, on a parlé de la difficulté à recruter des sujets, ce qui pourrait avoir entraîné une non-représentativité des échantillons de dispensateurs de soins, par exemple, ces échantillons ayant pu être composés de sujets disposant de plus de temps pour la prestation de soins ou dont le fardeau était modéré. Il est difficile d'interpréter les répercussions pratiques des résultats significatifs, car il est impossible de déterminer si les changements sont importants sur le plan clinique ou sont liés aux politiques. Les problèmes susmentionnés observés dans les études d'intervention correspondent à ceux mis en lumière par Schulz et coll. dans leur revue de 43 études d'intervention internationales publiées depuis 19966. Cette revue révèle que les interventions menées auprès des dispensateurs de soins évaluées à ce jour sont de courte durée, ont des résultats d'une importance mineure et n'ont pas d'effets appréciables sur la qualité de vie ou le fonctionnement psychologique des personnes qui dispensent des soins à des cas de maladie d'Alzheimer. Cette absence d'effets pourrait être attribuable à des problèmes méthodologiques dans les études ou au fait que les interventions n'ont pas les éléments requis pour avoir des effets assez importants sur les dispensateurs de soins. Comment peut-on augmenter la capacité de recherche sur les personnes qui prodiguent des soins aux cas de maladie d'Alzheimer au Canada de façon à s'assurer que les recherches proposées sont menées?L'un des obstacles à la recherche sur les dispensateurs de soins aux cas de maladie d'Alzheimer au Canada est le faible nombre de chercheurs dans ce domaine. Il faudrait prendre des mesures à l'échelle nationale pour appuyer la recherche existante et pour attirer de nouveaux chercheurs dans ce domaine. Les chercheurs qui mènent des travaux sur les dispensateurs de soins ont besoin d'une plus grande collaboration de groupes interdisciplinaires dans les universités et les collectivités (par exemple, psychiatrie, gériatrie, neurologie, sociologie, développement communautaire et psychologie) et de plus de temps à consacrer à la recherche. Les programmes d'éducation devraient comprendre plus de stages de recherche pour permettre aux étudiants d'acquérir une grande compétence en recherche. Les membres des corps professoraux devraient aussi être libérés de leurs tâches d'enseignement pour pouvoir consacrer plus de temps à la recherche; le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) du Canada, par exemple, dispose d'un programme qui permet aux membres des corps professoraux de demander une libération de leur tâche d'enseignement pour mener des recherches. Des conférences nationales sur la prestation de soins permettraient aussi la poursuite d'un dialogue concernant les besoins d'apprentissage et le perfectionnement des personnes qui s'intéressent à la recherche sur la prestation de soins aux cas de maladie d'Alzheimer par des aidants naturels. De plus, si le nombre d'études d'intervention portant sur les personnes qui dispensent des soins à des cas de maladie d'Alzheimer augmentait (besoin reconnu au cours de l'atelier de décembre 2002), il faudrait déterminer les possibilités que les chercheurs en sciences sociales établis modifient leur programme de recherche. Durant leur nouvelle formation, les chercheurs en sciences sociales acquérraient des compétences dans des domaines tels que la conception de plans de recherche non conventionnels, les méthodes de surveillance, la coordination et la réalisation d'essais comparatifs randomisés et d'études d'intervention connexes, les stratégies différentes de recrutement dans les essais, les techniques de randomisation et les analyses telles que l'analyse en intention de traiter. La bourse de réorientation de la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé est un exemple d'initiative qui aide à accroître le nombre de chercheurs dans le domaine des services de santé. Finalement, la recherche sur la prestation de soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer doit comprendre un examen des meilleures méthodes en ce qui concerne la diffusion des résultats des études et la collaboration en matière de méthodes de recherche. Les chercheurs devraient intégrer les utilisateurs de la recherche dans le processus de recherche. RemerciementsNous désirons remercier Fulvia Baldassarre et Nadia Scornaienchi pour leur aide au cours de la recherche dans la littérature. Nous désirons également remercier de leur contribution les personnes suivantes qui ont participé à l'atelier ou ont formulé des commentaires sur les versions antérieures du présent document :
Nos travaux ont été appuyés en partie par l'Institut du vieillissement, l'Institut de la santé des femmes et des hommes et le Portefeuille de partenariats et application des connaissances des Instituts de recherche en santé du Canada ainsi que par l'Institut de recherche Élisabeth-Bruyère. Références
Coordonnées des auteurs Larry W Chambers, Institut de recherche Élisabeth-Bruyère, Ottawa (Ontario) Canada, et Département d'épidémiologie et de médecine sociale, et Département de médecine familiale, et École des sciences infirmières, Université d'Ottawa, Ottawa (Ontario) Canada Alexandra Hendriks, Heather L Hall, Institut de recherche Élisabeth-Bruyère, Ottawa (Ontario) Canada Parminder Raina, Département d'épidémiologie clinique et de biostatistique, Faculté des sciences de la santé, et Evidenced-based Practice Centre de l'Université McMaster, Faculté des sciences de la santé, Université McMaster, Hamilton (Ontario) Canada Ian McDowell, Département d'épidémiologie et de médecine sociale, Université d'Ottawa , Canada au nom du groupe de travail sur les « soins aux dispensateurs de soins ». Correspondance : Larry W Chambers, Institut de recherche Élisabeth-Bruyère; 43, srue Bruyère, Ottawa (Ontario) Canada K1N 5C8; f ax : (613) 562-4266; courriel : lchamber@scohs.on.ca.
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Dernière mise à jour : 2005-01-28 | ![]() |