Volume 29-01
le 1er janvier 2003
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UTILISATION DE L'ALCOOL POUR L'HYGIÉNE
DES MAINS : DE NOUVELLES ÉTUDES COMPARATIVES
S'AJOUTENT AUX DONNÉES EXISTANTES
Deux études réalisées récemment en
France ont corroboré les données selon lesquelles la désinfection
des mains avec de l'alcool ou avec une solution à base d'alcool
constitue un élément essentiel de la prévention des infections.
La première étude traite de l'hygiène des mains dans
les unités de soins et la deuxième dans les salles d'opération.
Ces deux scénarios sont passablement différents.
L'hygiène des mains dans les unités de soins
nécessite une intervention rapide afin de tuer ou d'éliminer
les contaminants acquis par contact direct («contaminants transitoires»),
par exemple avec la peau du patient ou des surfaces inertes. Girou et
coll.(1) ont comparé les effets de 3 à 5 mL
d'alcool (un mélange de propan-1-ol et de propan-2-ol, totalisant
75 % d'alcool) avec une solution aqueuse de chlorhexidine sur la
réduction des contaminants transitoires acquis naturellement qui
sont présents sur les mains du personnel des unités de soins
après un contact avec un patient. (Dans la plupart des études
précédentes, la contamination était artificielle.) On faisait
pénétrer l'alcool en frottant les mains jusqu'à
ce qu'il s'évapore, tandis que la chlorhexidine était
utilisée pour laver les mains. La friction des mains au moyen d'une
préparation à base d'alcool a entraîné une réduction
nettement supérieure du nombre de bactéries retrouvées
sur les mains comparativement au lavage des mains à l'eau (83
% c. 58 %; p = 0,012).
Pour être efficace dans les faits, une procédure
d'hygiène des mains doit non seulement permettre de tuer ou
d'éliminer un nombre considérable de micro- organismes
contaminants, mais elle doit aussi s'intégrer facilement aux
procédures courantes des unités de soins. Le lavage des mains
et la friction à l'alcool prenaient tous deux 30 secondes, mais
dans le premier cas le sujet devait se rendre au lavabo et y demeurer
pendant tout le processus pour avoir accès à l'agent de
nettoyage, à l'eau, à l'essuie-tout et au récipient
d'élimination. Même dans les nouvelles unités de soins,
il est possible que les lavabos soient trop loin des lits pour qu'il
soit facile de procéder au lavage des mains. Les préparations
à base d'alcool (aussi appelées rince-mains) ont plus de
chances d'être pratiques; après que l'agent a été
appliqué sur les mains, le sujet n'est pas contraint de rester
au même endroit jusqu'à ce que l'alcool se soit évaporé.
Les distributeurs de préparations à base d'alcool peuvent
être installés au mur, autoporteurs et installés un peu
partout dans l'unité; il peut aussi s'agir de petits contenants
que le personnel peut transporter dans une poche ou attacher à un
chariot.
Le plaidoyer en faveur de l'utilisation des préparations
à base d'alcool pour le lavage des mains dans les unités
de soins gagne du terrain; le United Kingdom Hand Hygiene Liaison Group(2)
recommande que des préparations à base d'alcool soient
disponibles à proximité du lit des patients et dans les lieux
où il y a des contacts étroits et qu'elles soient utilisées
lorsque les mains ne sont pas sales.
La désinfection chirurgicale des mains, contrairement
à la désinfection hygiénique des mains mentionnée
précédemment, devrait permettre de tuer ou d'éliminer
tous les micro-organismes présents sur les mains du chirurgien, et
par le fait même empêcher une nouvelle croissance de la flore
bactérienne cutanée dans les conditions propices (analogues
à celles d'une «serre») pro voquées par le port
des gants. La perforation des gants pendant une intervention chirurgicale
est chose courante et il arrive que le porteur des gants ne s'en
aperçoive pas. Dans ces circonstances, le mouvement des mains favorisera
le passage des liquides de l'extérieur vers l'intérieur
du gant et vice versa, de sorte que des micro-organismes provenant de
la peau du chirurgien se déposeront dans la plaie. Ces micro-organismes
ont habituellement un faible pouvoir pathogène, mais ils peuvent
représenter un risque réel chez les sujets immunodéprimés
ou si du matériel étranger de taille importante, comme une orthèse
orthopédique, est implanté. On croit depuis longtemps que les
préparations à base d'alcool pourraient remplacer les brossages
chirurgicaux classiques.
Dans un article, Parienti et coll.(3) ont comparé
l'efficacité et l'acceptabilité d'agents utilisés
pour la désinfection chirurgicale des mains dans trois hôpitaux
selon le taux d'infection du champ opératoire, en utilisant
un modèle d'essai croisé à phases multiples. Les agents
étudiés étaient des détergents aqueux (soit la polyvidone
iodée à 4 % ou une solution aqueuse de gluconate de chlorhexidine
à 4 %) et le même mélange d'alcool que celui utilisé
dans l'étude de Girou mentionnée précédemment.
Le protocole consistait à utiliser des détergents aqueux comme
des agents de nettoyage classiques pendant au moins 5 minutes, et l'alcool,
après un lavage avec du savon ordinaire au début de la journée,
à titre de rince-mains en deux applications successives de 5 mL,
la durée totale de friction des mains étant de 5 minutes. Mis
à part les chirurgies contaminées, le taux d'infection
du champ opératoire était de 2,48 % (53/2 135) dans le groupe
ayant utilisé le détergent aqueux et de 2,44 % (55/2 252) dans
le groupe ayant utilisé le rince-mains. La différence entre
les deux groupes n'était pas marquée. Toutefois, l'observation
de la durée de la préparation a mis en évidence une meilleure
observance chez les utilisateurs d'alcool que chez les utilisateurs
d'un détergent aqueux; en outre, l'alcool prévient
le dessèchement et l'irritation de la peau.
Les deux articles ont dénoté des problèmes
d'observance des procédures de désinfection des mains parmi
les membres du personnel. Le lavage hygiénique des mains à l'eau(1)
a duré moins de 30 secondes dans 65 % des cas observés et, au
cours du lavage chirurgical des mains(3), l'observance
en ce qui a trait à la durée était faible dans le groupe
s'étant lavé les mains avec de l'eau (28 %) et légèrement
meilleure dans le groupe ayant utilisé une préparation à
base d'alcool (44 %; p = 0,008). Les désinfectants pour
les mains à base d'alcool ne constituent donc qu'une partie
de la solution; l'éducation et l'encouragement sont toujours
nécessaires.
Références
1. Girou E, Loyeau S, Legrand P
et coll. Efficacy of handrubbing with alcohol based solution versus
standard handwashing with antiseptic soap: randomised clinical trial.
BMJ 2002;325:362-65. URL : <http://bmj.com/cgi/reprint/325/
7360/362.pdf>.
2. Cookson B, Teare L, May D et
coll. Draft hand hygiene standards. J Hosp Infect 2001;49:153.
3. Parienti JJ, Thibon P, Heller
R et coll. Hand-rubbing with an aqueous alcoholic solution vs traditional
surgical hand-scrubbing and 30-day surgical site infection rates. A randomised
equivalence study. JAMA 2002;288:722-27. URL : <http://jama.ama-assn.org/issues/v288n6/rpdf/joc20200.pdf>.
Source : Eurosurveillance, vol 6, no
36, 2002.
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