A-388-03
2004 CAF 387
Mathew Englander (appelant)
c.
TELUS Communications Inc.
(intimée)
et
Le Commissaire à la protection de la vie
privée du Canada (intervenant)
Répertorié: Englander c. TELUS
Communications Inc. (C.A.F.)
Cour d'appel fédérale, juges Décary,
Nadon et Malone, J.C.A.--Vancouver, 7 octobre; Ottawa, 17
novembre 2004.
Protection des renseignements personnels
-- Loi sur la protection des renseignements personnels et
les documents électroniques (la LPRPDE) -- Publication
de renseignements des clients dans les annuaires
téléphoniques -- Peut-il être
demandé des droits aux abonnés qui veulent que
leur numéro de téléphone reste
confidentiel? -- Nature du consentement requis des nouveaux
abonnés -- La Cour fédérale a-t-elle
compétence pour statuer sur la question des tarifs? --
Examen et historique de la LPRPDE -- Principes établis
par les lignes directrices de l'Organisation de
coopération et de développement
économiques (OCDE), intégrées dans le
code type d'autoréglementation de l'Association
canadienne de normalisation, qui a été
approuvé par le Conseil canadien des normes -- Le code
est devenu l'annexe 1 de la Loi -- Le gouverneur en conseil
craignait que les droits à payer pour le service de
non-publication des numéros dissuadent les
abonnés d'obtenir la non-publication des
renseignements les concernant -- Le CRTC a pris un
décret prévoyant que le droit payable pour un
numéro non inscrit ne devait pas dépasser 2 $
par mois -- Les principes et règles
d'interprétation utilisés dans le contexte de
la Loi sur la protection des renseignements personnels ne
peuvent être d'emblée appliqués à
la LPRPDE car les objets des deux textes sont très
différents -- La LPRPDE concilie deux
intérêts rivaux: la protection des
renseignements personnels et les besoins des organisations
commerciales -- Le code et le texte législatif
reflétaient un compromis obtenu après
d'intenses négociations -- Difficulté
d'intégrer dans une loi un code conçu comme un
instrument d'application volontaire --
L'interprétation donnée par la Cour devait
être pragmatique et flexible -- Les procédures
prévues par la Loi sur les langues officielles sont
applicables car elles sont semblables -- L'appelant avait-il
l'intérêt pour agir sur la question du
consentement? -- Nécessité à la fois de
la connaissance et du consentement -- Il appartient à
l'organisation de préciser tous les objets de la
collecte des renseignements -- Le moment est une
considération essentielle: les brochures fournies
après la collecte et l'utilisation ne sont pas la
preuve d'un consentement adéquat -- Le juge a commis
une erreur en faisant reposer sur l'abonné
l'obligation de s'enquérir lui-même des options
de publication -- Absence de consentement
éclairé -- Le mécanisme
détaillé des plaintes qui est prévu par
la LPRPDE a préséance sur la Loi sur les
télécommunications -- La LPRPDE n'interdit pas
expressément d'imposer un droit pour le service de
non-publication des numéros -- TELUS a contrevenu
à l'art. 5 de la Loi en n'informant pas les nouveaux
clients, dès leur inscription, des fins
premières et secondes de la collecte des
renseignements, et de l'existence du service de
non-publication des numéros.
Télécommunications
-- Publication de renseignements personnels dans les
annuaires téléphoniques --
Interprétation de la Loi sur la protection des
renseignements personnels et les documents
électroniques -- Points litigieux: celui de savoir si
des droits peuvent être demandés pour le service
de non-publication des numéros, celui de la nature du
consentement requis par la Loi pour la publication des
renseignements personnels des nouveaux clients et celui de
savoir si le CRTC est investi d'une compétence
exclusive sur les droits demandés pour les services de
protection des renseignements personnels -- TELUS a
contrevenu à l'art. 5 de la LPRPDE en n'informant pas
ses nouveaux clients, dès leur inscription, des fins
premières et secondes de la collecte des
renseignements.
Compétence de la Cour fédérale
-- La Cour a-t-elle compétence pour examiner la
légalité de tarifs imposés par le CRTC
pour le service de non-publication des numéros de
téléphone? -- Le juge de la Cour
fédérale a estimé que la Cour n'avait
pas cette compétence -- Jugement infirmé par la
C.A.F. -- La question est une question de compétence
concurrente ou chevauchante.
Il s'agissait d'un appel interjeté contre un
jugement de la Cour fédérale, qui avait
rejeté une demande d'audience présentée
conformément à l'article 7 de la Loi sur la
protection des renseignements personnels et les documents
électroniques (la LPRPDE).
L'appelant avait déposé une plainte à
l'encontre de TELUS, en vertu de l'article 11 de la Loi, en
demandant au Commissaire de dire si le consentement que TELUS
affirmait obtenir de ses nouveaux abonnés à la
communication de renseignements personnels les concernant
remplissait les conditions fixées par la loi et si
TELUS pouvait demander une redevance mensuelle pour son
service de non-publication des numéros (la question du
tarif), redevance à laquelle TELUS subordonne la
non-publication de renseignements personnels dans ses
annuaires téléphoniques. Le Commissaire avait
rejeté la plainte de l'appelant, affirmant simplement
que TELUS avait le pouvoir de demander une redevance
mensuelle pour son service de non-publication des
numéros. Quant à la question du consentement,
il avait conclu que, dans sa procédure
d'établissement du service, TELUS obtenait un
consentement valide à la publication de renseignements
personnels dans ses pages blanches.
L'appelant a alors présenté à la Cour
fédérale une demande selon l'article 14, mais
cette demande a été rejetée, le juge
Blais estimant que la Cour n'avait pas compétence pour
statuer sur la question du tarif, puisqu'il s'agissait d'une
affaire relevant de la compétence exclusive du CRTC.
Sur la question du consentement, le juge a estimé que
TELUS obtenait effectivement un consentement valide.
Pour bien interpréter la LPRPDE, il était
nécessaire d'examiner son historique. En 1980,
l'Organisation de coopération et de
développement économiques (OCDE) publiait des
lignes directrices exposant huit principes qui sont encore
considérés comme les règles
fondamentales de la loyauté en matière de
services d'information. Ces huit principes concernaient les
aspects suivants: la limitation en matière de
collecte, la qualité des données, la
spécification des finalités, la limitation de
l'utilisation, les garanties de sécurité, la
transparence, la participation individuelle et la
responsabilité. Mais il y avait une contradiction
entre l'approche d'autoréglementation proposée
par l'OCDE et l'approche législative
préconisée par le Conseil de l'Europe. Au
Canada, un code type d'autoréglementation sur la
protection des renseignements personnels a été
adopté par l'Association canadienne de normalisation
(ACN) en 1995, puis approuvé en 1996 par le Conseil
canadien des normes. Le code exposait dix principes dans sa
partie 4, reprenant les huit principes établis dans
les lignes directrices de l'OCDE, les deux principes
additionnels, celui du consentement et celui de la
possibilité de déposer une plainte,
étant déjà formulés à
l'intérieur des articles 7 (Principe de la limitation
en matière de collecte) et 13 (Principe de la
participation individuelle) des lignes directrices de l'OCDE.
La partie 4 de la norme de l'ACN est devenue l'annexe I de la
Loi. La norme de l'ACN avait été
«élaborée selon le principe du
consensus», ce qui signifie qu'il y avait eu un accord
substantiel--mais pas nécessairement
l'unanimité--entre les intérêts
concernés.
Vers la même époque, le ministre de
l'Industrie avait établi le Comité consultatif
sur l'autoroute de l'information, chargé de
définir la manière dont le Canada pourrait
tirer le meilleur parti possible de l'autoroute de
l'information. En réponse à un document public
de réflexion sur le sujet, les représentants
des consommateurs s'étaient déclarés en
faveur d'une protection législative de la vie
privée tandis que les entreprises
privilégiaient la formule de
l'autoréglementation selon la norme de l'ACN. Le
Comité avait recommandé au gouvernement
d'élaborer une législation cadre souple,
inspirée de la norme de l'ACN. Les rédacteurs
du texte ont décidé d'incorporer en tant
qu'annexe le texte de la norme de l'ACN, [traduction]
«un document établi avec soin suivant le
principe du consensus et dont chaque clause, encore qu'elle
ne fût pas rédigée en style
législatif, avait été
négociée», et d'apporter au corps de la
loi les modifications qui se révéleraient
inévitablement nécessaires pour ajuster le
libellé du code à un acte législatif. La
Loi a reçu la sanction royale en 2000 et est
entrée en vigueur en phases successives entre 2001 et
2004. En 2001, la Commission européenne jugeait que la
LPRPDE remplissait les conditions fixées par la
Directive sur la protection des données qu'avait
adoptée l'Union européenne en 1995, ce qui
signifiait que les données personnelles des
États membres de l'Union pouvaient être
transférées au Canada.
Le service de non-publication des numéros (SNPN)
est réglementé par le CRTC; en
Colombie-Britannique, le tarif est de 2 $ par mois, ce
à quoi il faut ajouter un droit d'ouverture de dossier
de 9,50 $. Le CRTC a ordonné aux compagnies de
téléphone d'indiquer aux clients demandant le
service ou ayant des doutes sur la protection de leurs
renseignements personnels les moyens par lesquels ils
pouvaient faire retrancher leur nom des listages vendus ou
loués à des parties tierces. En 1996, le
gouverneur en conseil, estimant que la tarification du
service de non-publication des numéros pouvait
dissuader les abonnés de faire supprimer leurs
renseignements personnels des annuaires
téléphoniques, obligeait le CRTC à
présenter un rapport évaluant le service de
non-publication des numéros. Le CRTC a alors
présenté un rapport de 25 pages, dans lequel il
concluait que, par l'effet d'une pratique établie de
longue date, les abonnés savaient que, sauf s'ils
demandaient un numéro non inscrit, leurs
numéros seraient publiés dans les annuaires et
diffusés par l'assistance annuaire, et le CRTC
estimait par conséquent que l'on pouvait
considérer que les abonnés consentaient
à telle utilisation s'ils s'abonnaient au service
téléphonique sans demander un numéro non
inscrit. Le CRTC ajoutait que, en raison de la plus grande
accessibilité des renseignements tirés des
inscriptions d'abonnés sous des formes facilement
manipulables, il était plus important que jamais que
la tarification du service de non-publication des
numéros ne soit pas financièrement hors de la
portée des abonnés. Après avoir
lancé un appel d'observations concernant les tarifs du
service de non-publication des numéros, le CRTC a pris
l'Ordonnance Télécom 98-109, dans laquelle il
concluait qu'il était opportun «que les
compagnies de téléphone fournissent un service
de numéros non inscrits à un tarif qui ne
dépasse pas 2 $ par mois pour les abonnés du
service de résidence». En 2003, la
Décision Télécom 2003-33 était
rendue. Dans cette décision, le CRTC concluait que le
consentement implicite n'était pas une forme de
consentement suffisante pour ce qui concernait la
communication, à des affiliées, de
renseignements personnels confidentiels sur les
abonnés, abstraction faite du nom, de l'adresse et du
numéro de téléphone inscrit. La
décision mentionnait que la compétence du CRTC
venait de la Loi sur les
télécommunications et que, en
exerçant les pouvoirs discrétionnaires que lui
conférait cette Loi, le CRTC pouvait appliquer des
normes différentes de celles prévues par la
LPRPDE.
Les points en litige étaient les suivants: celui de
savoir s'il pouvait être demandé des droits aux
abonnés qui voulaient que leur numéro de
téléphone demeure confidentiel; celui de la
nature du consentement requis par la Loi pour l'inscription,
dans les annuaires téléphoniques, de
renseignements personnels sur les nouveaux abonnés;
enfin celui de savoir si le CRTC avait compétence
exclusive pour statuer sur la légalité des
droits perçus pour les services de protection des
renseignements personnels. Les questions procédurales
concernaient notamment la qualité pour agir devant la
Cour fédérale sous le régime de
l'article 14 de la LPRPDE.
Arrêt: l'appel doit être accueilli en
partie.
Les principes et règles d'interprétation
élaborés dans le contexte de la Loi sur la
protection des renseignements personnels ne doivent pas
être appliqués trop hâtivement à la
partie 1 et à l'annexe 1 de la LPRPDE, et cela en
raison de la dissemblance de leurs dispositions respectives
énonçant leurs objets. La LPRPDE concerne la
protection des renseignements personnels, mais elle concerne
aussi la collecte, l'utilisation et la communication de
renseignements personnels par les organisations commerciales.
Elle s'efforce de concilier deux intérêts
rivaux: le droit à la vie privée et les besoins
de l'organisation. Elle reconnaît expressément
que le droit à la vie privée n'est pas absolu.
Un auteur a même expliqué que, [traduction]
«fruit d'intenses négociations menées
entre le secteur privé, les groupes de défense
des consommateurs et le gouvernement», le Code
constitue un compromis. Ce compromis a été
repris par le texte législatif. L'annexe 1 n'est pas
tant axée sur la prévention de la collecte, de
l'utilisation et de la communication de renseignements
personnels--toutes activités qui sont
considérées comme allant presque de soi--que
sur l'examen des fins de cette collecte, de cette utilisation
et de cette communication. Ces fins doivent être
appropriées et légitimes, et des efforts
raisonnables doivent être déployés pour
faire en sorte que l'intéressé en soit
informé et les comprenne. Il était
intrinsèquement difficile d'incorporer dans une loi un
code conçu à l'origine comme un instrument
d'application volontaire, et la Cour n'était
guère aidée par des expressions telles que:
l'intéressé doit être informé et
donner son consentement «à moins qu'il ne soit
pas approprié de le faire». Il revenait à
la Cour d'établir un équilibre entre deux
intérêts rivaux. Puisque la rédaction non
juridique de l'annexe 1 ne se prêtait pas à
l'interprétation rigoureuse habituellement possible,
la Cour devait s'en rapporter à la flexibilité,
au bon sens et au pragmatisme.
Les points soulevés ici n'étaient pas sans
rappeler ceux que devait trancher la Cour dans l'arrêt
Forum des Maires de la Péninsule acadienne c.
Canada (Agence d'inspection des aliments). Cette affaire
relevait de la Loi sur les langues officielles, mais
les procédures qui pouvaient être introduites
devant la Cour fédérale en application des deux
textes étaient si semblables que le raisonnement suivi
dans l'arrêt Forum des Maires pouvait être
appliqué à la présente affaire. Les
enquêtes que mène le Commissaire aux langues
officielles et le Commissaire à la protection de la
vie privée à la suite d'une plainte suivent le
même schéma. Dans les deux cas, ce qui est en
cause, ce n'est pas le rapport du Commissaire, mais la
conduite de la partie contre laquelle la plainte est
déposée. L'audience visée par le
paragraphe 14(1) de la Loi est une procédure de
novo, et, puisque l'article 15 de la Loi prévoit
que le Commissaire a qualité pour comparaître
comme «partie» à la procédure, il
ne serait pas équitable de montrer de la
circonspection pour son rapport car il serait de la sorte
avantagé.
TELUS a fait valoir que l'appelant n'avait pas
qualité pour agir sur la question du consentement
puisqu'il n'avait pas prétendu que son droit à
la vie privée avait été violé, et
TELUS a invoqué les mots «tout
intéressé», dans la version
française du paragraphe 11(1). Mais, alors que le
Commissaire pourrait bien avoir la faculté de refuser
d'établir un rapport s'il estime que le plaignant n'a
aucun intérêt personnel, une fois qu'un rapport
a été rédigé, et si la
décision du Commissaire de le rédiger n'a pas
été contestée, la personne qui a
déposé la plainte est un plaignant aux fins
d'une demande présentée à la Cour en
vertu de l'article 14--et cela quand bien même ses
propres renseignements personnels ne seraient pas en jeu.
De nombreux arguments ont porté sur l'article 7 de
la Loi et sur l'alinéa 1a) du Règlement,
mais ces dispositions n'étaient pas applicables ici.
Elles ne pourraient pas s'appliquer à l'organisation
elle-même qui recueille au départ ces
renseignements afin de publier un annuaire
téléphonique qui deviendra, une fois
publié, accessible au public. Le fait que
l'utilisation de renseignements personnels figurant dans des
annuaires téléphoniques accessibles au public
puisse être aussi répandue à cause de ce
Règlement donnerait à penser que la Cour doit
montrer d'autant plus de circonspection lorsqu'il s'agit de
décider les points se rapportant à
l'inscription initiale dans un annuaire
téléphonique.
Les principes 2 («Détermination des fins de
la collecte des renseignements») et 3
(«Consentement») formaient les questions
centrales de cet appel, et le principe 3 exigeait à la
fois la connaissance et le consentement. Selon le principe 2,
une organisation doit indiquer les fins de la collecte au
moment ou avant le moment où les renseignements sont
recueillis. Par ailleurs, si les renseignements doivent plus
tard être utilisés à une fin non
précisée antérieurement, cette fin
nouvelle doit être précisée et le
consentement de l'intéressé doit être
obtenu avant que les renseignements ne puissent être
utilisés à cette fin nouvelle. Les articles
4.2.3 et 4.2.4 imposent manifestement à l'organisation
l'obligation de préciser à
l'intéressé, au moment de la collecte ou avant
la collecte, toutes les fins auxquelles les renseignements
personnels sont recueillis. Le moment est une
considération essentielle pour ce qui concerne
à la fois le principe 2 et le principe 3. On ne
saurait s'appuyer sur les brochures communiquées
à l'intéressé après la collecte
(voire après l'utilisation) pour dire si le
consentement a ou non été obtenu à
temps. L'application du principe 8 (transparence) arrivera
généralement trop tard pour valoir celle du
principe 3.
En affirmant que TELUS disposait d'un consentement valide
à la publication des renseignements personnels des
clients dans ses annuaires, le juge avait fait observer que,
en raison d'une pratique de longue date et bien
établie, les clients pouvaient raisonnablement compter
que, à moins de demander le service de non-publication
des numéros, leurs renseignements personnels seraient
publiés dans l'annuaire téléphonique. Il
appartenait à l'abonné de s'informer des
options qui s'offraient à lui. La Cour n'a pu
cependant admettre que les nouveaux clients donnaient un
consentement valide à l'utilisation par TELUS de leurs
renseignements personnels dans le cadre de son service
d'assistance annuaire sur Internet, de ses services de base
de données--désignés Directory File
Service et Basic Listing Interchange File
Service--et de son service CD-Rom, puisque les clients
n'étaient pas informés de l'existence de ces
services au moment de l'abonnement et que rien ne prouvait
que les nouveaux clients pourraient raisonnablement les
considérer comme appropriés. Rien n'indiquait
que TELUS s'était efforcée d'informer ses
nouveaux clients des fins secondes au moment de la collecte.
Comme le juge n'a tiré aucune conclusion
précise sur les services en question, il a commis une
erreur sujette à révision.
La conclusion du juge relative aux fins premières,
conclusion selon laquelle il appartenait aux clients de
demander que leur numéro ne soit pas publié,
était incompatible avec l'obligation d'obtenir un
consentement éclairé, une obligation
imposée par la partie 1 et l'annexe 1 de la Loi. Il
n'y a aucun consentement éclairé si le nouvel
abonné n'a pas connaissance de la possibilité
pour lui de ne pas être inscrit. Ces nouveaux clients
ont le droit de savoir--avant que les renseignements
personnels les concernant ne deviennent des renseignements
«auxquels le public a accès», au sens de
l'article 7--qu'ils peuvent exercer leur droit à la
vie privée en choisissant de ne pas être
inscrits.
Le juge a estimé que la Cour n'avait pas
compétence pour statuer sur la question du tarif car
il s'agissait là d'une affaire relevant de la
compétence exclusive du CRTC. Le Commissaire à
la protection de la vie privée n'est pas un tribunal
administratif, et son rapport n'est pas une
«décision», mais le CRTC est un organe
décisionnel. Selon l'alinéa 32g) de la
Loi, le CRTC est habilité à trancher toute
question touchant les tarifs et tarifications des entreprises
canadiennes ou les services de
télécommunication qu'elles fournissent et,
selon l'article 52, il est habilité, dans l'exercice
de ses pouvoirs, à trancher toute question de droit ou
de fait. Il s'agissait de savoir si la compétence du
CRTC pour statuer sur la question du tarif--compétence
dont la Cour était disposée à
présumer l'existence--empêchait la Cour de
décider ce point. La LPRPDE prévoit un
mécanisme de recours qui est détaillé
et, eu égard aux circonstances décrites au
paragraphe 4(3), elle a préséance sur la Loi
sur les télécommunications. Pour que la
Cour fût en mesure de dire si une organisation a
contrevenu au paragraphe 5(1), elle devait être
habilitée à dire si l'imposition d'une
redevance était admissible, et c'était
là une pure question de droit. Il n'y avait dans la
Loi sur les télécommunications aucune
disposition expresse excluant la compétence de la
Cour. Il y avait soit compétence concurrente, soit
compétence chevauchante et, si la Cour devait juger
que des droits ne pouvaient pas être demandés,
alors le CRTC serait tenu de revoir sa tarification.
La Cour n'a pu accepter la proposition de l'appelant selon
laquelle la Loi sur les
télécommunications n'autorisait pas
l'imposition d'un droit pour le service de non-publication
des numéros, ni sa proposition selon laquelle la
LPRPDE a préséance sur la Loi sur les
télécommunications. Les deux textes ne sont
pas contradictoires: la LPRPDE n'interdit pas
expressément l'imposition de droits.
TELUS a contrevenu à l'article 5 de la LPRPDE parce
qu'elle n'a pas informé ses nouveaux clients,
dès leur abonnement, des fins premières et
secondes auxquelles les renseignements étaient
recueillis, ni de l'existence du service de non-publication
des numéros. Mais le plaignant n'ayant pas
été personnellement lésé, la Cour
ne lui accorderait pas une réparation
monétaire, mais rendrait seulement une ordonnance de
nature prospective.
lois et règlements cités
Charte canadienne des droit et libertés, qui
constitue la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982
annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11
(R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44].
Convention pour la protection des personnes
à l'égard du traitement automatisé
des données à caractère
personnel, S.T.E. no 108, Strasbourg,
28.I.1981. |
Décret modifiant la décision
Télécom CRTC 95-14 et demandant à
la CRTC de faire rapport sur la question des listes
d'inscriptions d'abonnés, DORS/96-322. |
Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. (1985),
ch. C-5. |
Loi sur la protection des renseignements
personnels, L.R.C. (1985), ch. P-21, art. 2. |
Loi sur la protection des renseignements
personnels et les documents électroniques,
L.C. 2000, ch. 5, art. 1, 3, 4(1), (3), 5, 7, 11,
13(1)a),(2), 14, 15, 16, 17, 27(1), ann. I. |
Loi sur la révision des lois, L.R.C.
(1985), ch. S-20. |
Loi sur le Conseil canadien des normes,
L.R.C. (1985), ch. S-16. |
Loi sur les Cours fédérales,
L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 1 (mod. par L.C. 2002, ch.
8, art. 14), 18 (mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 4;
2002, ch. 8, art. 26). |
Loi sur les langues officielles, L.R.C.
(1985) (4e suppl.), ch. 31, art. 77(1). |
Loi sur les
télécommunications, L.C. 1993, ch.
38, art. 7i), 25 (mod. par L.C. 1999, ch. 31,
art. 199), 27, 32a),g), 47, 48, 52. |
Loi sur les textes réglementaires,
L.R.C. (1985), ch. S-22. |
Règlement précisant les
renseignements auxquels le public a accès,
DORS/2001-7, art. 1. |
jurisprudence citée
décision appliquée:
Forum des maires de la Péninsule acadienne c.
Canada (Agence d'inspection des aliments), [2004] 4
R.C.F. 276; (2004), 243 D.L.R. (4th) 542; 324 N.R. 314; 2004
CAF 263.
décision distincte:
R. c. Badger, [1996] 1 R.C.S. 771; (1996), 133
D.L.R. (4th) 324; [1996] 4 W.W.R. 457; 181 A.R. 321; 37 Alta.
L.R. (3d) 153; 105 C.C.C. (3d) 289; [1996] 2 C.N.L.R. 77; 195
N.R. 1; 116 W.A.C. 321.
décisions examinées:
BC Tel--Besoin en revenus pour 1993 et 1994,
décision Télécom CRTC 94-1;
Concurrence locale, décision
Télécom CRTC 97-8; Fourniture de
renseignements tirés des bases de données de
l'annuaire et accès en temps réel aux bases de
données de l'assistance-annuaire, décision
Télécom CRTC 95-3; Référence:
8665-C12-14/01 et 8665-B20-01/00. Clauses de
confidentialité des entreprises canadiennes,
décision Télécom CRTC 2003-33; Dagg
c. Canada (Ministre des Finances), [1997] 2 R.C.S. 403;
(1997), 148 D.L.R. (4th) 385; 46 Admin. L.R. (2d) 155; 213
N.R. 161; R. c. Côté, [1996] 3 R.C.S.
139; (1996), 138 D.L.R. (4th) 385; 110 C.C.C. (3d) 122;
[1996] 4 C.N.L.R. 26; 202 N.R. 161; ordonnance
Télécom CRTC 98-109, 4 février 1998.
décisions citées:
Eastmond c. Canadien Pacifique Ltée (2004),
16 Admin. L.R. (4th) 275; 33 C.P.R. (4th) 1; 254 F.T.R.
169; 2004 CF 852; Maheu c. IMS Health Canada (2003),
24 C.P.R. (4th) 70; 226 F.T.R. 269; 2003 CFPI 1; conf.
par (2003), 29 C.P.R. (4th) 425; 314 N.R. 393; 2003 CAF 462;
Chiasson c. Canada (2003), 226 D.L.R. (4th) 351; 303
N.R. 54; 2003 CAF 155; St. Anne Nackawic Pulp & Paper
Co. c. Syndicat canadien des travailleurs du papier
(Section locale 219), [1986] 1 R.C.S. 704;
(1986), 73 N.B.R. (2d) 236; 28 D.L.R. (4th) 1; 184 A.P.R.
236; 86 CLLC 14,037; 68 N.R. 112; Weber c. Ontario
Hydro, [1995] 2 R.C.S. 929; (1995), 125 D.L.R. (4th)
583; 30 Admin. L.R. (2d) 1; 12 C.C.E.L. (2d) 1; 24 C.C.L.T.
(2d) 217; 30 C.R.R. (2d) 1; 183 N.R. 241; 82 O.A.C. 321;
Regina Police Assn. Inc. c. Regina
(Ville) Board of Police Commissioners, [2000]
1 R.C.S. 360; (2000), 183 D.L.R. (4th) 14; [2000] 4 W.W.R.
149; 189 Sask. R. 23; 50 C.C.E.L. (2d) 1; 241 N.R. 16;
2000 CSC 14; Québec (Procureur
général) c. Québec (Tribunal des droits
de la personne), [2004] 2 R.C.S. 223; (2004), 240 D.L.R.
(4th) 609; 2004 CSC 40; Nouvelle-Écosse (Workers'
Compensation Board) c. Martin; Nouvelle-Écosse
(Workers' Compensation Board) c. Laseur, [2003] 2 R.C.S.
504; (2003), 231 D.L.R. (4th) 385; 4 Admin. L.R. (4th) 1; 28
C.C.E.L. (3d) 1; 110 C.R.R. (2d) 233; 310 N.R. 22; 2003 CSC
54.
doctrine citée
Conseil de la radiodiffusion et des
télécommunications canadiennes. Rapport au
gouverneur en conseil sur les listes d'inscriptions
d'abonnés dans les annuaires et sur le service de
numéro non inscrit, 23 décembre 1996.
Drapeau, M. W. et M. A. Racicot. Federal Access to
Information and Privacy Legislation, Annotated 2004,
Toronto: Carswell, 2004.
Geist, Michael. Internet Law in Canada, 3rd ed.
Concord, Ont.: Captus Press, 2002.
Lignes directrices régissant la protection de la
vie privée et les flux transfrontières de
données de carractère personnel, 23
spetembre 1980.
Perrin, S. et al. The Personal Information Protection
and Electronic Documents Act: An Annotated Guide.
Toronto: Irwin Law Inc., 2001.
Résumé de l'étude d'impact de la
réglementation, Gaz. C. 2001.II.32.
APPEL interjeté contre un jugement de la Section de
première instance de la Cour fédérale
((2003), 235 F.T.R. 1) où étaient
soulevés de nombreux points se rapportant aux
renseignements personnels publiés dans les annuaires
téléphoniques. Appel accueilli en partie.
ont comparu:
Mathew Englander, en son propre nom.
Lisa A. Warren pour l'intimée.
Sean T. McGee pour l'intervenant.
avocats inscrits au dossier:
Farris, Vaughan, Wills & Murphy, Vancouver,
pour l'intimée.
Nelligan O'Brien Payne LLP, Ottawa, pour
l'intervenant.
Ce qui suit est la version française des motifs du
jugement rendus par
[1]Le juge Décary, J.C.A.: Le présent appel
soulève de nombreuses questions liées à
l'interprétation de la Loi sur la protection des
renseignements personnels et les documents
électroniques, L.C. 2000, ch. 5, (la Loi ou la
LPRPDE) et aux renseignements personnels publiés dans
les annuaires téléphoniques. Certaines d'entre
elles sont des questions de fond, touchant le point de
savoir: s'il peut être demandé des droits aux
abonnés qui veulent que leur numéro de
téléphone reste confidentiel; quelle est la
nature du consentement qu'exige la Loi pour l'inscription
dans les annuaires téléphoniques de
renseignements personnels concernant les nouveaux
abonnés; quelles règles devraient orienter
l'interprétation d'un code d'autoréglementation
incorporé dans une loi; et si le Conseil de la
radiodiffusion et des télécommuni-cations
canadiennes (le CRTC) a compétence exclusive pour
statuer sur la légalité des droits
perçus pour la protection des renseignements
personnels. D'autres questions sont de nature
procédurale: la qualité pour agir devant la
Cour fédérale sous le régime de
l'article 14 de la Loi; la nature de l'«audience»
y visée; la question de savoir s'il convient d'user de
retenue judiciaire à l'égard du rapport
établi sur une plainte par le Commissaire à la
protection de la vie privée du Canada (le
commissaire), M. Radwanski, sous le régime de
l'article 11, et, dans l'affirmative, la nature d'une telle
retenue; et l'adjudication de dépens à un
plaideur qui affirme être partie à un litige
d'intérêt public.
[2]Les faits pertinents de la présente
espèce sont exposés dans la décision
attaquée de la Section de la première instance,
publiée dans (2003), 235 F.T.R. 1 (C.F. 1re
inst.). Pour l'essentiel, la présente affaire
résulte d'une plainte déposée par
l'appelant contre l'intimée (TELUS) en vertu de
l'article 11 de la Loi. L'appelant avait demandé au
commissaire d'établir si le consentement que TELUS
affirmait obtenir de ses nouveaux abonnés à la
communication de renseignements personnels les concernant
remplissait les conditions fixées par la Loi (la
question du consentement) et si TELUS avait le droit de lui
faire payer une redevance mensuelle pour son service de
non-publication des numéros (service de
non-publication ou service de numéro non inscrit),
paiement auquel elle subordonne la non-publication de
renseignements personnels dans ses annuaires
téléphoniques (la question du tarif).
[3]Le commissaire a établi le rapport
demandé et rejeté la plainte (D.A., vol. 1,
à la page 68). Ses motifs sont--c'est le moins qu'on
puisse dire--plutôt laconiques.
[4]Concernant la question du tarif, il écrit ce qui
suit (D.A., vol. 1, à la page 70):
[traduction] [. . .] J'ai conclu que TELUS est
habilitée [. . .] de facturer à ses
clients des frais mensuels de 2 $ pour le service de
non-publication. J'estime que cette pratique n'est pas
déraisonnable et qu'elle ne contrevient pas au
principe 4.3.3 de l'Annexe.
[5]En ce qui a trait à la question du consentement,
ses conclusions peuvent être récapitulées
comme suit.
Concernant le paragraphe 5(3) de la Loi (ibid):
[traduction] [. . .] une personne raisonnable
jugerait que les pratiques de TELUS relatives à
l'établissement du service et à la publication
subséquente dans les pages blanches des renseignements
personnels sur ses abonnés constituent des pratiques
raisonnables de cueillette, d'utilisation et de divulgation
des renseignements.
Concernant le paragraphe 4.3 de l'annexe 1
(ibid):
[traduction] [. . .] TELUS, dans le cadre de sa
procédure d'établissement du service, obtient
un consentement valable de ses clients lui permettant de
publier leurs renseignements personnels dans son annuaire
public, les pages blanches.
Et enfin, concernant le paragraphe 4.5 de l'annexe 1
(ibid):
[traduction] [. . .] J'ai conclu que TELUS
obtenait de ses clients un consentement valable lui
permettant de publier leurs renseignements personnels dans
ses pages blanches et, par ce fait même, que les
clients consentaient à ce que leurs renseignements
personnels soient mis à la disposition du public.
TELUS communique seulement des renseignements publiquement
disponibles à Dominion Information Services, en
Colombie-Britannique, et à TELUS Advertising Services,
en Alberta, conformément à la LPRDPE et tel que
prévu par le Règlement précisant les
renseignements auxquels le public a accès. Par
conséquent, TELUS ne contrevient pas à la
LPRDPE.
[6]Ces motifs ne nous aident pas beaucoup. Cependant,
comme ce n'est pas le rapport, mais la plainte, que la Cour
doit examiner dans la présente espèce (comme on
verra plus loin), le rapport considéré dans son
ensemble n'a guère d'importance en fin de compte.
[7]L'appelant a ensuite demandé à la Cour
fédérale d'entendre les questions faisant
l'objet de sa plainte en vertu de l'article 14 de la Loi. La
Cour fédérale l'a débouté. Le
juge Blais a formulé les conclusions suivantes dans
l'exposé de ses motifs: l'audience n'était ni
un recours contre le rapport du commissaire ni une demande de
contrôle judiciaire de ce rapport, de sorte qu'il
devait instruire l'affaire de novo; il convenait
d'user d'une certaine retenue judiciaire à
l'égard du rapport du commissaire concernant les
décisions relevant manifestement de sa
compétence; l'appelant avait qualité pour
soulever la question du consentement, même en l'absence
d'éléments tendant à prouver que TELUS
aurait recueilli, utilisé ou communiqué des
renseignements personnels le concernant sans son
consentement; TELUS obtenait de ses abonnés un
consentement valable dans le cadre de la Loi avant de publier
dans ses annuaires des renseignements personnels les
concernant; et la question du tarif, étant du ressort
exclusif du CRTC, échappait à la
compétence de la Cour fédérale. De plus,
le juge Blais a refusé de reconnaître à
l'appelant la qualité de plaideur dans un litige
d'intérêt public et l'a condamné aux
dépens, taxés à 11 906,41 $.
Genèse de la partie 1 de la LPRPDE
[8]Il serait important, pour bien comprendre et
interpréter les dispositions applicables de la LPRPDE,
de passer brièvement en revue l'histoire de cette loi,
y compris de la partie de la norme de l'ACN [Association
canadienne de normalisation] qui y a été
incorporée en annexe 1. La plupart des observations
que je formulerai à ce sujet s'inspirent d'un ouvrage
intitulé The Personal Information Protection
and Electronic Documents Act: An Annotated Guide
(Perrin, Black, Flaherty et Rankin, Toronto: Irwin Law Inc.,
2001). Je tiens à exprimer ma reconnaissance aux
distingués auteurs de cet ouvrage et à
m'excuser auprès d'eux de les citer souvent
textuellement.
[9]On avait déjà essayé, avant les
années 1970, de protéger les renseignements
personnels au moyen de divers documents internationaux.
[traduction] «On s'est cependant vite rendu compte que
ces documents--étant donné, en particulier, le
raffinement croissant du traitement de
l'information--étaient trop vagues pour garantir
suffisamment les libertés civiles dans le domaine de
la protection des renseignements personnels» (Annotated
Guide, à la page 2). C'est dans ce contexte que le
Conseil de l'Europe a établi en 1981 la Convention
pour la protection des personnes à l'égard du
traitement automatisé des données à
caractère personnel (S.T.E. no 108,
Strasbourg, 28.I.1981). De son côté,
l'Organisation de coopération et de
développement économiques (OCDE) a
créé en 1978 un comité chargé
d'élaborer des lignes directrices touchant les
règles fondamentales qui devraient régir les
flux transfrontières de données, ainsi que la
protection des renseignements personnels et de la vie
privée. Ce comité a élaboré les
lignes directrices en question en consultant les experts qui
travaillaient sur la Convention 108 au Conseil de l'Europe,
[traduction] «mais l'activité de l'OCDE
n'était pas orientée dans le sens de la
réglementation, tandis que le Conseil de l'Europe a
élaboré un ensemble de principes semblables qui
ont été mis en oeuvre dans les
législations nationales» (ibid., à
la page 2). Les Lignes directrices de l'OCDE, publiées
en 1981 [traduction] «comprenaient un ensemble de huit
principes qui sont encore considérés comme les
règles fondamentales de la loyauté en
matière de services d'information». Ces huit
principes sont les suivants [Lignes directrices
régissant la protection de la vie privée et les
flux transfrontières de données de
caractère personnel, 23 septembre 1980]:
Principe de la limitation en matière de
collecte
[. . .]
7. Il conviendrait
d'assigner des limites à la collecte des
données de caractère personnel et toute
donnée de ce type devrait être obtenue par
des moyens licites et loyaux et, le cas
échéant, après en avoir
informé la personne concernée ou avec son
consentement. |
Principe de la qualité des
données
8. Les données de
caractère personnel devraient être
pertinentes par rapport aux finalités en vue
desquelles elles doivent être utilisées
et, dans la mesure où ces finalités
l'exigent, elles devraient être exactes,
complètes et tenues à jour. |
Principe de la spécification des
finalités
9. Les finalités en
vue desquelles les données de caractère
personnel sont collectées devraient être
déterminées au plus tard au moment de la
collecte des données et lesdites données
ne devraient être utilisées par la suite
que pour atteindre ces finalités ou d'autres qui
ne soient pas incompatibles avec les
précédentes et qui seraient
déterminées dès lors qu'elles
seraient modifiées. |
Principe de la limitation de l'utilisation
10. Les données de
caractère personnel ne devraient pas être
divulguées ni fournies, ni utilisées
à des fins autres que celles
spécifiées conformément au
paragraphe 9, si ce n'est: |
(a) avec le consentement de la personne concernée,
ou
(b) lorsqu'une règle de droit le permet.
Principe des garanties de
sécurité
11. Il conviendrait de
protéger les données de caractère
personnel, grâce à des garanties de
sécurité raisonnables, contre des risques
tels que la perte des données ou leur
accès, destruction, utilisation, ou divulgation
non autorisés. |
Principe de la transparence
12. Il conviendrait
d'assurer, d'une façon générale,
la transparence des progrès, pratiques et
politiques, ayant trait aux données de
caractère personnel. Il devrait être
possible de se procurer aisément les moyens de
déterminer l'existence et la nature des
données de caractère personnel, et les
finalités principales de leur utilisation, de
même que l'identité du maître du
fichier et le siège habituel de ses
activités. |
Principe de la participation individuelle
13. Toute personne physique
devrait avoir le droit: |
(a) d'obtenir du maître d'un fichier, ou par
d'autres voies, confirmation du fait que le maître du
fichier détient ou non des données la
concernant;
(b) de se faire communiquer les données la
concernant
i) dans un délai raisonnable;
ii) moyennant, éventuellement, une redevance
modérée;
iii) selon des modalités raisonnables, et
iv) sous une forme qui lui soit aisément
intelligible;
(c) d'être informée des raisons pour
lesquelles une demande qu'elle aurait présentée
conformément aux alinéas (a) et (b), est
rejetée et de pouvoir contester un tel rejet, et
(d) de contester les données la concernant et, si
la contestation est fondée, de les faire effacer,
rectifier, compléter ou corriger.
Principe de la responsabilité
14. Tout maître des
fichiers devrait être responsable du respect des
mesures donnant effet aux principes
énoncés ci-dessus. |
[10]La contradiction entre l'approche
d'autorégle-mentation proposée par l'OCDE et
l'approche législative préconisée par le
Conseil de l'Europe n'a pas manqué de s'exprimer aussi
au Canada. La plupart des secteurs d'activité
économique du pays pensaient qu'il serait
défavorable aux affaires de légiférer
sur la protection des renseignements personnels. Au
début des années 1990, on a invité
l'Association canadienne de normalisation (ACN)--organisme
réunissant des représentants des consommateurs,
de l'entreprise privée, des gouverne-ments
fédéral et provinciaux, des syndicats, des
associations professionnelles, etc.--à créer un
comité chargé d'élaborer une norme de
protection des données qui serait fondée sur
les Lignes directrices de l'OCDE. L'ACN a
élaboré une telle norme
d'autoréglementation entre 1993 et 1995. En septembre
1995, l'ACN adoptait le Code type sur la protection des
renseignements personnels, CAN/CSA-Q830-95 (la norme de
l'ACN), que le Conseil des normes du Canada a approuvé
en tant que Norme nationale du Canada en 1996. (Rappelons que
le Conseil des normes du Canada est un organisme régi
par la Loi sur le Conseil canadien des normes, L.R.C.
(1985), ch. S-16.)
[11]La norme de l'ACN énonce dix principes dans sa
partie 4. Elle reprend, dans une formulation et un ordre
différents, les huit principes établis dans les
Lignes directrices de l'OCDE. Les deux autres principes, soit
ceux du consentement et de la possibilité de porter
plainte, étaient déjà formulés
à l'intérieur des articles 7 (Principe de la
limitation en matière de collecte) et 13 (Principe de
la participation individuelle) des Lignes directrices de
l'OCDE. Cependant, la norme de l'ACN va beaucoup plus loin
que le libellé des lignes directrices de l'OCDE. La
partie 4 de la norme de l'ACN allait en fin de compte devenir
l'annexe 1 de la Loi, annexe dont le texte est reproduit plus
loin (au paragraphe 21 des présents motifs ).
[12]Dans la préface à la première
édition de sa norme, l'ACN note que celle-ci «a
été élaborée selon le principe du
consensus lequel est défini dans la
Réglementation CSA concernant la normalisation comme
étant "un accord substantiel auquel parviennent des
personnes intéressées. Le consensus comporte
une tentative de dissiper toute objection et va beaucoup plus
loin que la majorité simple sans constituer
nécessairement l'unanimité"». L'ACN
définit ensuite dans l'introduction du même
document le contexte dans lequel sa norme a été
adoptée:
Le Canada appartient à une économie mondiale
qui repose sur la création, le traitement et
l'échange de renseignements. La technologie sur
laquelle repose l'économie de l'information offre un
certain nombre d'avantages qui améliorent la
qualité de nos vies. Cette technologie soulève
toutefois des questions au sujet du respect du droit à
la vie privée et du droit des individus de
contrôler l'utilisation et la communication de
renseignements personnels qui les concernent. Par la mise en
oeuvre de méthodes honnêtes et
éprouvées de gestion des renseignements
personnels, les organismes peuvent témoigner
concrètement de leur engagement envers la protection
de ces renseignements. Les organismes doivent
déterminer leurs besoins de renseignements personnels
en tenant compte du désir des individus de garder un
certain anonymat.
Le présent document est une norme canadienne
volontaire visant la protection des renseignements
personnels. La norme aborde deux grandes questions, à
savoir la façon dont les organismes recueillent,
utilisent, divulguent et protègent ces renseignements
et le droit des individus de consulter les renseignements qui
les concernent et, si c'est nécessaire, de les faire
corriger. La norme est basée sur dix principes
interdépendants. Chaque principe est accompagné
d'un commentaire explicatif.
Les organismes qui se proposent d'adopter la norme
pourront se procurer un document de travail sur l'application
des principes, document qu'ils pourront utiliser comme guide
pour adopter des codes adaptés à leurs
besoins.
La présente norme:
a) établit des principes concernant la gestion des
renseignements personnels;
b) précise les exigences minimales que les
organismes participants doivent respecter pour bien
protéger les renseignements personnels qu'ils
possèdent;
c) sensibilise la population canadienne à la
façon dont devraient être protégés
les renseignements personnels;
d) fournit les critères permettant à la
communauté internationale d'évaluer la
protection accordée aux renseignements personnels au
Canada.
En 1984, le Canada s'est engagé à
protéger les renseignements personnels lorsqu'il a
signé les Lignes directrices régissant la
protection de la vie privée et les flux
transfrontières de données de caractère
personnel de l'Organisation de coopération et de
développement économiques (OCDE).
L'élaboration de la présente norme repose sur
les Lignes directrices de l'OCDE
[. . .] La protection des renseignements
personnels prend de plus en plus d'importance à
l'échelle internationale.
[13]Dans l'intervalle, soit en 1994, le ministre de
l'Industrie a créé le Comité consultatif
sur l'autoroute de l'information, chargé de le
conseiller sur la façon dont le Canada pourrait
profiter le plus possible de l'autoroute de l'information.
[traduction] «En réponse à un document de
réflexion public sur le sujet, la plupart des
représentants des consommateurs, commissaires à
la protection de la vie privée et autres
défenseurs de la vie privée ont
déclaré qu'ils souhaitaient que celle-ci
fût protégée par voie législative,
tandis que la plupart des entreprises ont affirmé
qu'elles pouvaient s'autoréglementer d'après la
norme de l'ACN». En 1995, le Comité consultatif
a adressé au ministre une recommandation comme quoi le
gouvernement devrait [traduction] «élaborer une
législation cadre souple inspirée de la norme
de l'ACN et se concerter avec les provinces afin d'harmoniser
leurs efforts» (Annotated Guide, à la page
XIV).
[14]Un document de consultation a été
publié en janvier 1998. Soucieux de parvenir à
un compromis par la discussion, le gouvernement a en fin de
compte établi les critères suivants (Annotated
Guide, aux pages XIV et XV):
[traduction]
· La
législation en question devrait être
fondée sur la norme de l'ACN, qui était
un document établi avec soin suivant le principe
du consensus et dont chaque clause, encore qu'elle ne
fût pas rédigée en style
législatif, avait été
négociée. |
· Des règles
uniformes devaient s'appliquer aux marchés de
l'ensemble du pays, dans un contexte où les
marchés convergeaient rapidement et où
les entreprises qui relevaient
précédemment de sphères de
compétence différentes
pénétraient maintenant sur les
marchés les unes des autres (banques, compagnies
d'assurances, sociétés de
télécommunications, fournisseurs de
services Internet, entreprises de tous secteurs
pratiquant la vente directe, etc.). |
· La
législation ne devait pas dresser d'obstacles
nouveaux et injustifiés aux échanges
intérieurs et internationaux, ni ne devait
désavantager les acteurs dignes de confiance en
permettant la constitution d'abris contre la
réglementation ou en donnant aux concurrents
étrangers la possibilité
d'échapper à celle-ci. |
· Le Commissaire
à la protection de la vie privée serait
chargé de la surveillance, suivant un
modèle souple et exempt de lourdeur. Non
seulement la mise en oeuvre de la législation
devait pouvoir être contrôlée par
des tiers indépendants, mais le commissaire
devait être investi du pouvoir de contrôler
les pratiques même en l'absence de plaintes. |
· Le succès
de la protection de la vie privée repose avant
tout sur la conscience qu'ont tous les
intéressés des droits, des attentes et
des responsabilités en jeu, ainsi que des
modalités réelles du traitement et de la
circulation des données. À cet
égard, le besoin de sensibilisation du public
est immense, et le Commissaire à la protection
de la vie privée a un rôle essentiel
à jouer. |
[15]En fin de compte, [traduction] «avec le plein
appui des représentants du secteur privé qui
avaient participé à l'élaboration de la
norme de l'ACN, mais en suscitant la plus grande
perplexité chez les experts de la protection de la vie
privée et les juristes de tous les horizons, les
rédacteurs de la législation en question se
sont mis à la tâche d'incorporer le texte de
cette norme tel quel dans la loi. Il a alors
été décidé de l'y intégrer
sous forme d'annexe et d'apporter au corps de la loi les
modifications qui se révéleraient
inévitablement nécessaires pour ajuster le
libellé du code à un acte
législatif» (Annotated Guide, à la page
11). C'est ainsi que la norme de l'ACN est devenue l'annexe 1
de la LPRPDE.
[16]La Loi a reçu la sanction royale le 13 avril
2000 et est entrée en vigueur en phases successives du
1er janvier 2001 au 1er janvier
2004.
[17]Le 20 janvier 2001, la Commission européenne a
décrété que la LPRPDE remplissait les
conditions fixées par la Directive sur la protection
des données qu'avait adoptée l'Union
européenne en 1995 dans le but de protéger les
renseignements personnels et d'harmoniser les lois
respectives de ses membres sur la protection de la vie
privée. Par la suite, les données à
caractère personnel des États membres de
l'Union européenne peuvent être
transférées au Canada (voir la décision
européenne rendue dans le cadre de la Directive
95/46/CE en date du 20 janvier 2001, dont le texte anglais
est reproduit à la page 1-558 de Drapeau et Racicot,
Federal Access to Information and Privacy Legislation,
Annotated 2004, Toronto: Carswell, 2004).
Le cadre législatif
[18]La Loi comprend cinq parties. Seule la
première, intitulée «Protection des
renseignements personnels dans le secteur
privé», porte sur les questions de fond. Les
autres parties règlent des questions techniques ou de
forme (les documents électroniques, ainsi que la
modification de la Loi sur la preuve au Canada [L.R.C.
(1985), ch. C-5], de la Loi sur les textes
réglementaires [L.R.C. (1985), ch. S-22] et de la
Loi sur la révision des lois [L.R.C. (1985),
ch. S-20]). Seules les dispositions de la première
partie sont applicables au présent appel.
[19]La première partie de la Loi est
complétée par l'annexe 1, intitulée
«Principes énoncés dans la Norme
nationale du Canada intitulée Code type sur la
protection des renseignements personnels,
CAN/CSA-Q830-96.» En vertu du paragraphe 5(1) de la Loi
et sous réserve d'autres articles de celle-ci, toute
organisation doit se conformer aux obligations
énoncées dans l'annexe 1.
[20]La première partie de la Loi et son annexe 1
sont résumées comme suit dans les Lois du
Canada:
La partie 1 du texte établit le droit à la
protection des renseignements personnels recueillis,
utilisés ou communiqués dans le cadre
d'activités commerciales, dans le cadre d'une
entreprise fédérale ou d'une province à
l'autre ou d'un pays à l'autre.
Elle énonce les principes qui doivent régir
la collecte, l'utilisation et la communication des
renseignements personnels: la responsabilité, la
détermination des fins de la collecte, l'obtention
d'un consentement, la limitation de la collecte, de
l'utilisation, de la communication et de la conservation,
l'exactitude, l'existence de mesures de
sécurité adéquates, l'accès
facile aux politiques sur la gestion des renseignements
personnels, l'accès d'un individu aux renseignements
qui le concernent et la possibilité de porter plainte
contre le non-respect des principes par une organisation.
De plus, elle octroie au Commissaire à la
protection de la vie privée le pouvoir de recevoir les
plaintes relatives au non-respect des principes, de
procéder à l'examen de celles-ci et de tenter
de parvenir à leur règlement. Certains
différends non réglés peuvent être
portés devant la Cour fédérale.
[21]Les dispositions suivantes sont
particulièrement applicables au présent
appel:
CHAPITRE 5
Loi visant à faciliter et à promouvoir le
commerce électronique en protégeant les
renseignements personnels recueillis, utilisés ou
communiqués dans certaines circonstances, en
prévoyant l'utilisation de moyens électroniques
pour communiquer ou enregistrer de l'information et des
transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada,
la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la
révision des lois
[. . .]
1. [. . .]
Loi sur la protection des
renseignements
personnels et les documents
électroniques
Partie 1
Protection des renseignements
personnels dans le secteur privé
[. . .]
Objet
3. La présente partie a pour objet de fixer,
dans une ère où la technologie facilite de plus
en plus la circulation et l'échange de renseignements,
des règles régissant la collecte, l'utilisation
et la communication de renseignements personnels d'une
manière qui tient compte du droit des individus
à la vie privée à l'égard des
renseignements personnels qui les concernent et du besoin des
organisations de recueillir, d'utiliser ou de communiquer des
renseignements personnels à des fins qu'une personne
raisonnable estimerait acceptables dans les
circonstances.
Champ d'application
4. (1) La présente partie s'applique
à toute organisation à l'égard des
renseignements personnels:
a) soit qu'elle recueille, utilise ou communique
dans le cadre d'activités commerciales;
b) soit qui concernent un de ses employés et
qu'elle recueille, utilise ou communique dans le cadre d'une
entreprise fédérale.
[. . .]
(3) Toute disposition de la présente partie
s'applique malgré toute
disposition--édictée après
l'entrée en vigueur du présent
paragraphe--d'une autre loi fédérale, sauf
dérogation expresse de la disposition de l'autre
loi.
Section 1
Protection des renseignements personnels
5. (1) Sous réserve des articles 6 à
9, toute organisation doit se conformer aux obligations
énoncées dans l'annexe 1.
(2) L'emploi du conditionnel dans l'annexe 1 indique qu'il
s'agit d'une recommandation et non d'une obligation.
(3) L'organisation ne peut recueillir, utiliser ou
communiquer des renseignements personnels qu'à des
fins qu'une personne raisonnable estimerait acceptables dans
les circonstances.
[. . .]
7. (1) Pour l'application de l'article 4.3 de
l'annexe 1 et malgré la note afférente,
l'organisation ne peut recueillir de renseignement personnel
à l'insu de l'intéressé et sans son
consentement que dans les cas suivants:
[. . .]
d) il s'agit d'un renseignement
réglementaire auquel le public a accès.
(2) Pour l'application de l'article 4.3 de l'annexe 1 et
malgré la note afférente, l'organisation ne
peut utiliser de renseignement personnel à l'insu de
l'intéressé et sans son consentement que dans
les cas suivants:
[. . .]
c.1) il s'agit d'un renseignement
réglementaire auquel le public a
accès; |
[. . .]
(3) Pour l'application de l'article 4.3 de l'annexe 1 et
malgré la note afférente, l'organisation ne
peut communiquer de renseignement personnel à l'insu
de l'intéressé et sans son consentement que
dans les cas suivants:
[. . .]
h.1) il s'agit d'un renseignement
réglementaire auquel le public a
accès; |
[. . .]
Section 2
Recours
Dépôt des plaintes
11. (1) Tout intéressé peut
déposer auprès du commissaire une plainte
contre une organisation qui contrevient à l'une des
dispositions de la section 1 ou qui omet de mettre en oeuvre
une recommandation énoncée dans l'annexe 1.
[. . .]
Rapport du commissaire
13. (1) Dans l'année suivant, selon le cas,
la date du dépôt de la plainte ou celle
où il en a pris l'initiative, le commissaire dresse un
rapport où:
a) il présente ses conclusions et
recommandations;
[. . .]
(2) Il n'est toutefois pas tenu de dresser un rapport s'il
est convaincu que, selon le cas:
a) le plaignant devrait d'abord épuiser les
recours internes ou les procédures d'appel ou de
règlement des griefs qui lui sont normalement
ouverts;
b) la plainte pourrait avantageusement être
instruite, dans un premier temps ou à toutes les
étapes, selon des procédures prévues par
le droit fédéral--à l'exception de la
présente partie--ou le droit provincial;
c) le délai écoulé entre la
date où l'objet de la plainte a pris naissance et
celle du dépôt de celle-ci est tel que le
rapport serait inutile;
d) la plainte est futile, vexatoire ou
entachée de mauvaise foi.
Le cas échéant, il en informe le plaignant
et l'organisation, motifs à l'appui.
[. . .]
Audience de la Cour
14. (1) Après avoir reçu le rapport
du commissaire, le plaignant peut demander que la Cour
entende toute question qui a fait l'objet de la plainte--ou
qui est mentionnée dans le rapport--et qui est
visée aux articles 4.1.3, 4.2, 4.3.3, 4.4, 4.6, 4.7 ou
4.8 de l'annexe 1, aux articles 4.3, 4.5 ou 4.9 de cette
annexe tels que modifiés ou clarifiés par la
section 1, aux paragraphes 5(3) ou 8(6) ou (7) ou à
l'article 10.
[. . .]
15. S'agissant d'une plainte dont il n'a pas pris
l'initiative, le commissaire a qualité pour:
a) demander lui-même, dans le délai
prévu à l'article 14, l'audition de toute
question visée à cet article, avec le
consentement du plaignant;
b) comparaître devant la Cour au nom du
plaignant qui a demandé l'audition de la question;
c) comparaître, avec l'autorisation de la
Cour, comme partie à la procédure.
16. La Cour peut, en sus de toute autre
réparation qu'elle accorde:
a) ordonner à l'organisation de revoir ses
pratiques de façon à se conformer aux articles
5 à 10;
b) lui ordonner de publier un avis
énonçant les mesures prises ou
envisagées pour corriger ses pratiques, que ces
dernières aient ou non fait l'objet d'une ordonnance
visée à l'alinéa a);
c) accorder au plaignant des
dommages-intérêts, notamment en
réparation de l'humiliation subie.
17. (1) Le recours prévu aux articles 14 ou
15 est entendu et jugé sans délai et selon une
procédure sommaire, à moins que la Cour ne
l'estime contre-indiqué.
[. . .]
Section 4
Dispositions générales
[. . .]
27. (1) Toute personne qui a des motifs
raisonnables de croire qu'une autre personne a contrevenu
à l'une des dispositions de la section 1, ou a
l'intention d'y contrevenir, peut notifier au commissaire des
détails sur la question et exiger l'anonymat
relativement à cette dénonciation.
[. . .]
ANNEXE 1
(article 5)
Principes énoncés dans la
norme nationale du
Canada intitulée code
type sur la protection des
Renseignements personnels,
CAN/CSA-Q830-96
4.1 Premier principe--Responsabilité
Une organisation est responsable des renseignements
personnels dont elle a la gestion et doit désigner une
ou des personnes qui devront s'assurer du respect des
principes énoncés ci-dessous.
[. . .]
4.1.4
Les organisations doivent assurer la mise en oeuvre des
politiques et des pratiques destinées à donner
suite aux principes, y compris:
a) la mise en oeuvre des procédures pour
protéger les renseignements personnels;
[. . .]
d) la rédaction des documents explicatifs
concernant leurs politiques et procédures.
4.2 Deuxième principe--Détermination des
fins de la collecte des renseignements
Les fins auxquelles des renseignements personnels sont
recueillis doivent être déterminées par
l'organisation avant la collecte ou au moment de
celle-ci.
[. . .]
4.2.2
Le fait de préciser les fins de la collecte de
renseignements personnels avant celle-ci ou au moment de
celle-ci permet à l'organisation de déterminer
les renseignements dont elle a besoin pour réaliser
les fins mentionnées. Suivant le principe de la
limitation en matière de collecte (article 4.4),
l'organisation ne doit recueillir que les renseignements
nécessaires aux fins mentionnées.
4.2.3
Il faudrait préciser à la personne
auprès de laquelle on recueille des renseignements,
avant la collecte ou au moment de celle-ci, les fins
auxquelles ils sont destinés. Selon la façon
dont se fait la collecte, cette précision peut
être communiquée de vive voix ou par
écrit. Par exemple, on peut indiquer ces fins sur un
formulaire de demande de renseignements.
4.2.4
Avant de se servir de renseignements personnels à
des fins non précisées antérieurement,
les nouvelles fins doivent être précisées
avant l'utilisation. [. . .]
[. . .]
4.3 Troisième principe--Consentement
Toute personne doit être informée de toute
collecte, utilisation ou communication de renseignements
personnels qui la concernent et y consentir, à moins
qu'il ne soit pas approprié de le faire. [Note
omise.]
4.3.1
Il faut obtenir le consentement de la personne
concernée avant de recueillir des renseignements
personnels à son sujet et d'utiliser ou de communiquer
les renseignements recueillis. Généralement,
une organisation obtient le consentement des personnes
concernées relativement à l'utilisation et
à la communication des renseignements personnels au
moment de la collecte. Dans certains cas, une organisation
peut obtenir le consentement concernant l'utilisation ou la
communication des renseignements après avoir recueilli
ces renseignements, mais avant de s'en servir, par exemple,
quand elle veut les utiliser à des fins non
précisées antérieurement.
4.3.2
Suivant ce principe, il faut informer la personne au sujet
de laquelle on recueille des renseignements et obtenir son
consentement. Les organisations doivent faire un effort
raisonnable pour s'assurer que la personne est
informée des fins auxquelles les renseignements seront
utilisés. Pour que le consentement soit valable, les
fins doivent être énoncées de
façon que la personne puisse raisonnablement
comprendre de quelle manière les renseignements seront
utilisés ou communiqués.
4.3.3
Une organisation ne peut pas, pour le motif qu'elle
fournit un bien ou un service, exiger d'une personne qu'elle
consente à la collecte, à l'utilisation ou
à la communication de renseignements autres que ceux
qui sont nécessaires pour réaliser les fins
légitimes et explicitement indiquées.
4.3.4
La forme du consentement que l'organisation cherche
à obtenir peut varier selon les circonstances et la
nature des renseignements. Pour déterminer la forme
que prendra le consentement, les organisations doivent tenir
compte de la sensibilité des renseignements.
[. . .]
4.3.5
Dans l'obtention du consentement, les attentes
raisonnables de la personne sont aussi pertinentes.
[. . .]
4.3.6
La façon dont une organisation obtient le
consentement peut varier selon les circonstances et la nature
des renseignements recueillis. En général,
l'organisation devrait chercher à obtenir un
consentement explicite si les renseignements sont
susceptibles d'être considérés comme
sensibles. Lorsque les renseignements sont moins sensibles,
un consentement implicite serait normalement jugé
suffisant. [. . .]
4.3.7
Le consentement peut revêtir différentes
formes, par exemple:
a) on peut se servir d'un formulaire de demande de
renseignements pour obtenir le consentement, recueillir des
renseignements et informer la personne de l'utilisation qui
sera faite des renseignements. En remplissant le formulaire
et en le signant, la personne donne son consentement à
la collecte de renseignements et aux usages
précisés;
b) on peut prévoir une case où la
personne pourra indiquer en cochant qu'elle refuse que ses
nom et adresse soient communiqués à d'autres
organisations. Si la personne ne coche pas la case, il sera
présumé qu'elle consent à ce que les
renseignements soient communiqués à des
tiers;
c) le consentement peut être donné de
vive voix lorsque les renseignements sont recueillis par
téléphone; ou
d) le consentement peut être donné au
moment où le produit ou le service est
utilisé.
Le contexte réglementaire du service de
non-publication des numéros
[22]Le service de non-publication des numéros est
un service de télécommunication
réglementé par le CRTC. Le tarif applicable
à ce service en Colombie-Britannique est fixé
à l'article 145 du Tarif général, CRTC
1005. La redevance mensuelle à payer pour ce service
est de 2 $, en plus de droits ponctuels de 9,50 $ à
percevoir au moment de l'abonnement (D.A., vol. 1, aux pages
87 et 88).
[23]Dans la décision Télécom CRTC
94-1 [BC Tel--Besoin en revenus pour 1993 et 1994], en
date du 25 janvier 1994, le CRTC a déclaré
estimer «que la fourniture des annuaires fait partie
intégrante du service téléphonique de
base de la compagnie et en accroît sensiblement la
valeur» (D.A., vol. 2, à la page 393). Par la
décision Télécom CRTC 97-8
[Concurrence locale] du 1er mai 1997, le
CRTC a décrété que les annuaires
téléphoniques devaient être fournis
gratuitement aux abonnés (D.A., vol. 2, à la
page 309).
[24]Le 8 mars 1995, dans sa décision
Télécom CRTC 95-3 [Fourniture de
renseignements tirés des bases de données de
l'annuaire et accès en temps réel aux bases de
données de l'assistance-annuaire], le CRTC a
ordonné à diverses compagnies de
téléphone, dont TELUS, d'envoyer à leurs
clients des encarts de facturation pour les informer de la
fourniture à des tiers de renseignements non
confidentiels tirés des inscriptions et des moyens par
lesquels ils pouvaient faire retrancher leurs noms et les
renseignements connexes. En outre, le CRTC ordonnait aux
compagnies qui ne l'avaient pas encore fait de mettre en
oeuvre des mesures pour faire connaître aux
abonnés qui appellent pour lancer le service ou qui
ont des préoccupations en matière de protection
de la vie privée la méthode selon laquelle leur
nom peut être retranché des inscriptions qui
sont vendues ou louées à des tiers (D.A.,
vol. 1, à la page 185).
[25]Le 25 juin 1996, le gouverneur en conseil par
décret C.P. 1996-1001 [Décret modifiant la
décision Télécom CRTC 95-14 et demandant
à la CRTC de faire rapport sur la question des listes
d'inscriptions d'abonnés, DORS/96-322] a
ordonné au CRTC de lui faire rapport «sur la
question des listes d'inscriptions d'abonnés, y
compris le niveau de protection de la vie privée qu'il
convient d'accorder aux inscriptions ainsi qu'une
évaluation du service de numéro non
inscrit» (D.A., vol. 1, à la page 172; Gaz.
C. 1996.II.2172). Deux «attendus» de ce
décret devraient retenir notre attention (D.A., vol.
1, page 171; Gaz. C. 1996.II.2172):
Attendu que le gouverneur en conseil est d'avis que le
coût du service de numéro non inscrit peut
décourager les abonnés de faire supprimer les
renseignements qui les concernent des annuaires des
compagnies de téléphone et que ce service
devrait être disponible aux abonnés d'autres
services de télécommunications;
Attendu que le gouverneur en conseil est d'avis que les
mesures de protection de la vie privée devraient
être efficientes et neutres par rapport à la
concurrence et ne devraient pas nuire à
l'établissement de nouveaux services,
[26]Le CRTC a alors publié un appel d'observations
sur ces questions. Le Commissaire à la protection de
la vie privée du Canada a répondu à cet
appel et formulé, entre autres, les recommandations
suivantes (D.A., vol. 2, aux pages 489 à 491):
[traduction]
RECOMMANDATION 2.--Lorsqu'elles recueillent des
renseignements auprès de leurs abonnés,
nouveaux ou non, les compagnies de téléphone
devraient les informer de tous les usages premiers et de tous
les éventuels usages seconds des renseignements
personnels qui les concernent, de l'identité de ceux
qui pourraient les utiliser et de tous les moyens dont ils
disposent pour contrôler ou interdire ces usages.
RECOMMANDATION 3.--Les fournisseurs de services devraient
toujours demander aux nouveaux abonnés s'ils veulent
que les renseignements les concernant soient inscrits
intégralement ou partiellement, ou ne soient pas
inscrits ou publiés.
RECOMMANDATION 4.--Les fournisseurs de services ne
devraient pas faire payer le retrait ou la non-publication
des inscriptions d'abonnés.
Les observations introduisant la quatrième
recommandation du commissaire sont rédigées
comme suit (D.A., vol. 2, aux pages 490 et 491):
[traduction]
Les abonnés doivent normalement payer pour que les
renseignements les concernant ne soient pas publiés ou
ne soient pas inscrits. Aux États-Unis, les redevances
mensuelles de non-publication vont de 0,65 $ en Californie
à 2,54 $ dans l'État de New York. Au Canada,
ces redevances sont en moyenne 132 % de celles des
États-Unis, s'inscrivant entre 1,55 $ au Manitoba et
5,75 $ dans les Maritimes.
Le Commissaire à la protection de la vie
privée aussi bien que le cabinet fédéral
pensent que ces redevances élevées risquent de
décourager les abonnés de demander le retrait
des répertoires ou la non-publication de leurs
inscriptions, et donc d'empêcher un bon nombre d'entre
eux de protéger leur vie privée. Entre le tiers
et le quart des abonnés américains ont fait
retirer leurs inscriptions des annuaires et des
répertoires de l'assistance-annuaire. Les statistiques
correspondantes pour le Canada ne sont pas disponibles, mais
le commissaire a le sentiment que les Canadiens profitent de
ce service en moins grand nombre.
Il est vrai que le retrait des répertoires et la
non-publication des inscriptions influent aussi bien sur le
contenu des annuaires publiés que sur le niveau
d'assistance-annuaire exigé des fournisseurs de
services ou des éditeurs qui leur sont
affiliés. Le commissaire, cependant, ne croit pas que
cela justifie de porter atteinte au droit à la vie
privée des abonnés. En fait, le manque à
gagner attribuable aux retraits des répertoires serait
compensé par la réduction des frais
d'impression (les annuaires s'en trouvant amincis). Qui plus
est, les revenus provenant de l'assistance-annuaire en
seraient augmentés.
[27]Le 23 décembre 1996, le CRTC a
présenté à ce sujet un document de 25
pages intitulé Rapport au gouverneur en conseil sur
les listes d'inscriptions d'abonnés dans les annuaires
et sur le service de numéro non inscrit (D.A.,
vol. 1, à la page 182).
[28]Ce rapport contient une liste de principes
établis par Industrie Canada qui doivent être
pris en considération (D.A., vol. 1, aux pages 190 et
191; pages 6 et 7 du Rapport):
(1) Les Canadiens attachent beaucoup d'importance à
leur vie privée. Il faut explicitement tenir compte de
ce facteur dans la fourniture, l'utilisation et la
réglementation des services de
télécommunication.
(2) Les Canadiens doivent connaître les incidences
possibles de l'utilisation des services de
télécommunication sur leur vie privée.
Il revient à tous les fournisseurs de services de
télécommunication et au gouvernement de les en
informer clairement.
(3) Quand un nouveau service de
télécommunication menace de porter atteinte
à la vie privée, il faut prendre des
dispositions pour la protéger sans frais, à
moins qu'il existe des raisons impérieuses de ne pas
le faire.
(4) Il est essentiel, pour protéger la vie
privée, de limiter la collecte, l'utilisation et la
communication de renseignements personnels découlant
de l'emploi de réseaux de
télécommunication et obtenus par les
fournisseurs de services. Sauf s'il y va de
l'intérêt général ou si la loi
l'autorise, de tels renseignements ne devraient être
recueillis, utilisés ou communiqués qu'avec le
consentement éclairé et exprimé des
intéressés.
(5) Le droit d'être laissé tranquille va au
coeur même de la vie privée. Il faudrait
contrebalancer l'utilisation légitime des
communications automatiques, d'une part, et l'intrusion dans
la vie privée qu'elles peuvent constituer, d'autre
part. Toutes les parties en cause ont la
responsabilité de s'entendre sur les règles de
base ainsi que sur les recours dont les Canadiens pourront se
prévaloir pour se protéger des
télécommunications non désirées
et donc importunes.
(6) Il est possible que les attentes des Canadiens en
matière de protection de la vie privée changent
avec le temps. Il faut donc réévaluer
périodiquement les méthodes utilisées
pour protéger la vie privée par rapport aux
télécommunications, pour tenir compte notamment
de l'évolution des technologies et des services
offerts.
On doit ajouter à ces principes la décision,
rendue dans le décret C.P. 1996-1001, selon laquelle
les mesures de protection de la vie privée devraient
être efficientes et neutres par rapport à la
concurrence et ne devraient pas nuire à
l'établissement de nouveaux services.
Le Conseil fait observer que les principes ci-dessus
peuvent se contredire et estime que les choix à faire
quant à ceux qui doivent l'emporter dans une situation
en particulier dépendraient d'une évaluation
des circonstances particulières, en tenant compte de
facteurs comme la nature du service, le caractère de
l'information et toutes les pratiques antérieures qui
ont pu évoluer.
[29]On trouve plus loin dans le Rapport les constata-tions
suivantes (D.A., vol. 1, aux pages 194 et 195):
[. . .] la fourniture du service local de base
par la compagnie de téléphone comporte
généralement une inscription dans l'annuaire,
la fourniture des annuaires des Pages Blanches et des Pages
Jaunes et la disponibilité du numéro de
téléphone de l'abonné dans le cadre de
l'assistance-annuaire. Font exception à cette
règle générale les cas où
l'abonné demande, moyennant des frais, que son
numéro de téléphone ne soit pas inscrit.
Le Conseil estime qu'en raison de cette pratique de longue
date, les abonnés s'attendent actuellement à ce
que, sauf s'ils demandent un numéro non inscrit, leur
numéro de téléphone soit publié
dans les annuaires des compagnies de téléphone
et soit diffusé par l'assistance-annuaire. De l'avis
du Conseil, on peut estimer que les abonnés ont
accepté cette utilisation s'ils s'abonnent au service
sans demander de numéro non inscrit.
[. . .]
Le Conseil estime que [. . .] les abonnés
au service local de base sont considérés comme
ayant donné leur accord pour publier les
renseignements qui les concernent dans des annuaires
indépendants. [Non souligné dans
l'original.]
[30]Le Rapport porte les observations suivantes concernant
le service de numéro non inscrit (D.A., vol. 1,
à la page 201):
En évaluant l'équilibre qu'il convient
d'atteindre à l'égard du service de
numéro non inscrit, le Conseil estime que les facteurs
notés par Stentor doivent être
pondérés par rapport aux préoccupations
portant sur la protection de la vie privée, qui sont
devenues plus vives en raison de la plus grande
accessibilité des renseignements tirés des
inscriptions d'abonnés, en particulier sous des formes
qui sont manipulées facilement, et par rapport au fait
que l'abonnement à ce service pourrait
désormais constituer le seul moyen efficace, pour les
abonnés, de contrôler la diffusion des
renseignements sur leurs inscriptions. Compte tenu du
contexte actuel, il est de plus en plus essentiel que le prix
du service de numéro non inscrit ne soit pas,
financièrement, hors de portée pour les
abonnés.
Le Conseil a, dans le passé, établi des
tarifs pour le service de numéro non inscrit, afin de
maximiser les revenus des compagnies de
téléphone. Le Conseil est provisoirement d'avis
que cette politique ne convient plus à la
lumière du contexte actuel de la
réglementation. Le Conseil est initialement d'avis que
l'on ne doit pas éliminer entièrement les frais
et que la situation actuelle ne suffit pas pour justifier
d'offrir ce service à un prix inférieur au prix
coûtant. Le Conseil estime plutôt qu'un tarif
fondé sur les coûts constituerait un compromis
satisfaisant, en tenant compte de l'incidence d'un tarif
réduit sur les revenus éventuels et
étant donné qu'on favorise l'utilisation du
système de télécommunications si les
renseignements tirés des inscriptions d'abonnés
sont facilement disponibles. À la lumière de
ce qui précède, le Conseil estime qu'il
faudrait réexaminer les tarifs des numéros non
inscrits afin d'établir des tarifs fondés sur
les coûts actuels plus la contribution. [Non
souligné dans l'original.]
[31]Le 27 août 1997, le CRTC a lancé un appel
d'observations concernant les tarifs du service de
numéro non inscrit et des questions connexes (D.A.,
vol. 1, à la page 210). Après avoir reçu
de telles observations, notamment du Commissaire à la
protection de la vie privée du Canada (observations
qui n'ont pas été versées au dossier de
la présente espèce), le CRTC a publié
l'ordonnance Télécom 98-109, où il
formulait les conclusions suivantes (D.A., vol. 1, aux pages
229 et 230):
31. Compte tenu des renseignements déposés
dans la présente instance, le Conseil estime que
l'établissement d'un tarif fondé sur les
coûts ne tient pas adéquatement compte de
facteurs comme l'utilité d'un annuaire raisonnablement
complet et l'incidence de tarifs réduits sur les
revenus.
32. Toutefois, étant donné les
préoccupations croissantes relatives à la
protection de la vie privée, le Conseil estime
également qu'il ne convient pas que les tarifs
mensuels applicables au service de numéro non inscrit
pour les abonnés du service de résidence
restent aux niveaux établis dans le passé en
vue de maximiser les revenus disponibles pour subventionner
le service de résidence de base.
33. Compte tenu des préoccupations croissantes
relatives à la protection de la vie privée
ainsi que de facteurs comme l'incidence de tarifs
réduits applicables au service de numéro non
inscrit sur les revenus et la contribution que des
renseignements sur les inscriptions d'abonnés
facilement disponibles apportent à l'utilité du
réseau, le Conseil estime qu'il convient que les
compagnies de téléphone fournissent un service
de numéro non inscrit à un tarif qui ne
dépasse pas 2 $ par mois pour les abonnés du
service de résidence. [Non souligné dans
l'original.]
[32]Les observations proposées au CRTC par le
Commissaire albertain à l'information et à la
protection de la vie privée présentent un
intérêt particulier (D.A., vol. 2, aux pages 502
et 503):
[traduction] J'estime qu'il est tout à fait
inacceptable de fixer les tarifs du service de numéro
non inscrit en vue de maximiser les revenus du fournisseur de
services. Comme je le disais dans mon mémoire
précédent, je suis fondamentalement
opposé à l'idée que les personnes aient
à payer le droit de contrôler l'usage des
renseignements personnels qui les concernent. Par
conséquent, je crois que le système actuel,
fondé sur la maximisation des revenus, est
complètement injuste.
Il ne convient pas de fixer les tarifs du service de
numéro non inscrit de manière à
décourager les abonnés d'utiliser ce service.
Il y a de nombreux cas où les abonnés ont
besoin de ce genre de service pour s'assurer une protection
suffisante contre des circonstances défavorables.
Supposons par exemple qu'une personne victime de mauvais
traitements de la part de son conjoint ait besoin que son
numéro de téléphone reste confidentiel:
il ne devrait pas lui être demandé un prix
déraisonnable pour ce service. La redevance
demandée pour ce service devrait être
fondée sur le coût de revient pour le
fournisseur, non augmenté d'une marge
bénéficiaire, et non pas sur le manque à
gagner qu'est susceptible de lui causer le fait de ne pas
mettre le renseignement en question à la disposition
du grand public.
Je crois fermement que les citoyens ont droit à la
protection de leur vie privée. S'il y a
peut-être lieu de rémunérer ce service,
son prix devrait être justifiable et fondé sur
le coût réel de sa prestation. Si ce coût
réel n'est pas raisonnable, il conviendrait d'ordonner
aux fournisseurs de services de le réduire dans un
délai déterminé jusqu'à un niveau
acceptable. Je suis convaincu que la technologie
contemporaine rend cette réduction possible.
[33]Le 13 décembre 2000, le gouverneur en conseil a
pris le Règlement précisant les
renseignements auxquels le public a accès,
DORS/2001-7 (le Règlement), dont l'entrée en
vigueur était prévue pour le 1er
janvier 2001:
Règlement précisant les
renseignements
auxquels le public a
accès
renseignements
1. Les renseignements et catégories de
renseignements ci-après sont précisés
pour l'application des alinéas 7(1)d),
(2)c.1) et (3)h.1) de la Loi sur la
protection des renseignements personnels et les documents
électroniques:
a) les renseignements personnels--nom, adresse et
numéro de téléphone des
abonnés--figurant dans un annuaire
téléphonique accessible au public, si
l'abonné peut refuser que ces renseignements y
figurent;
b) les renseignements personnels, y compris les
nom, titre, adresse et numéro de
téléphone, qui figurent dans un
répertoire, listage ou avis à caractère
professionnel ou d'affaires qui est accessible au public, si
la collecte, l'utilisation et la communication de ces
renseignements sont directement liées à la
raison pour laquelle ils figurent dans le répertoire,
listage ou avis;
[34]Les observations suivantes du Résumé de
l'étude d'impact de la réglementation [Gaz
C. 2001.II.32] qui accompagne le Règlement (mais
sans en faire partie) présentent pour nous un
intérêt particulier:
Résumé de l'étude
d'impact
de la réglementation
(Ce résumé ne fait pas partie du
règlement.)
Description
[. . .]
Annuaires téléphoniques
Une association a souligné que dans le cas de
l'annuaire téléphonique, l'exception s'appuie
sur la possibilité pour une personne de refuser d'y
être inscrite mais que ce refus ne pouvait s'exercer
qu'en payant pour un numéro non inscrit (c'est une
condition fixée par plusieurs sociétés
de téléphone). L'association a fait valoir que
ce tarif était une barrière économique
pour les gens à faible revenu qui pourraient souhaiter
ne pas être inscrits mais qui ne pourront pas exercer
leur droit de refus et a suggéré d'ajouter
«sans assumer de coût pour un tel refus».
Bien que cet argument soit valable sur le plan de
l'égalité d'accès aux services,
l'application de frais ne concerne pas
spécifiquement la protection des renseignements
personnels. [Non souligné dans l'original.]
[35]Le 30 mai 2003, le CRTC a publié la
décision Télécom CRTC 2003-33
[Référence: 8665-C12-14/01 et
8665-B20-01/00. Clauses de confidentialité des
entreprises canadiennes], où il concluait que le
consentement implicite n'est pas une forme de consentement
suffisante pour ce qui concerne la communication à des
affiliées de renseignements personnels confidentiels
sur les abonnés, mis à part le nom, l'adresse
et le numéro de téléphone inscrit. Il y
concluait aussi qu'il convenait d'autoriser les
sociétés canadiennes de
télécommunications à se prévaloir
d'autres formes de consentement explicite que le consentement
écrit, soit: la confirmation orale
vérifiée par un tiers indépendant, la
confirmation électronique au moyen d'un numéro
sans frais et la confirmation électronique par
Internet. Les observations suivantes formulées par le
CRTC au paragraphe 23 de sa décision présentent
une pertinence particulière pour la présente
espèce:
Le Conseil fait remarquer que la LPRPDE établit les
règlements et les normes concernant la protection des
renseignements personnels. Toutefois, le Conseil fait
également observer que sa compétence en cette
matière ne vient pas de cette loi mais de la Loi
sur les télécommunications et qu'en
exerçant les pouvoirs discrétionnaires que
celle-ci lui confère, il peut appliquer des normes
différentes de celles prévues par la
LPRPDE.
Interprétation de la partie 1 et de l'annexe 1
de la Loi
[36]Il faut faire preuve de prudence lorsqu'il s'agit
d'appliquer à la partie 1 et à l'annexe 1 de la
LPRPDE des principes et des règles
d'interprétation élaborés dans le
contexte de la Loi sur la protection des renseignements
personnels [L.R.C. (1985), ch. P-21], ne serait-ce
qu'à cause des différences qui séparent
leurs dispositions respectives de déclaration
d'objet:
Loi sur la protection des renseignements
personnels et les documents électroniques
Objet
3. La présente partie a pour objet de fixer,
dans une ère où la technologie facilite de plus
en plus la circulation et l'échange de renseignements,
des règles régissant la collecte, l'utilisation
et la communication de renseignements personnels d'une
manière qui tient compte du droit des individus
à la vie privée à l'égard des
renseignements personnels qui les concernent et du besoin des
organisations de recueillir, d'utiliser ou de communiquer des
renseignements personnels à des fins qu'une personne
raisonnable estimerait acceptables dans les
circonstances.
Loi sur la protection des renseignements
personnels
objet de la loi
2. La présente loi a pour objet de
compléter la législation canadienne en
matière de protection des renseignements personnels
relevant des institutions fédérales et de droit
d'accès des individus aux renseignements personnels
qui les concernent.
[37]Le juge La Forest, au paragraphe 64 de l'arrêt
Dagg c. Canada (Ministre des Finances), [1997] 2
R.C.S. 403, a décrit l'objet de la Loi sur la
protection des renseignements personnels comme
étant double. Cet objet est d'abord «"[de
protéger]" [l]es renseignements personnels relevant
des institutions fédérales», et
deuxièmement, «[d]'assurer le "droit
d'accès des individus aux renseignements personnels
qui les concernent"».
[38]L'objet de la LPRPDE est tout à fait
différent. Il est certes axé sur la protection
de la vie privée des personnes, mais il se rapporte
aussi à la collecte, à l'utilisation et
à la communication de renseignements personnels par
les organisations. Cet objet est de faire en sorte que
lesdites collecte, utilisation et communication soient
exécutées d'une manière qui concilie,
dans toute la mesure du possible, le droit de la personne
à la vie privée et les besoins de
l'organisation. Il y a donc deux intérêts
concurrents dans l'objet de la LPRPDE: le droit de la
personne à la vie privée d'une part, et le
besoin commercial d'accès aux renseignements
personnels d'autre part. Cependant, il y est
expressément reconnu--par l'emploi des termes
«à des fins qu'une personne raisonnable
estimerait acceptables dans les circonstances», qui
sont repris au paragraphe 5(3)--que le droit à la vie
privée n'est pas absolu.
[39]La LPRPDE est un compromis, sous le rapport aussi bien
de la forme que du fond.
[40]Pour ce qui concerne le compromis sur le fond, Michael
Geist le définit comme suit à la page 303 de
son ouvrage Internet Law in Canada, 3e
éd., Concord (Ont.): Captus Press, 2002:
[traduction] Fruit d'intenses négociations
menées entre le secteur privé, les groupes de
défense des consommateurs et le gouvernement au
début et au milieu des années 1990, le Code
constitue un compromis entre la nécessité de
protéger la vie privée des personnes physiques
et le désir des organisations de recueillir des
renseignements personnels pour la commercialisation ou
à d'autres fins commerciales. Ce compromis reste
intact dans la nouvelle loi et s'exprime dans sa disposition
de déclaration d'objet, qui pose explicitement la
volonté d'assurer un équilibre entre les
intérêts concurrents des personnes physiques et
des entreprises. (Une version antérieure du projet de
loi ne parlait que du droit à la vie
privée.)
[41]Cinq des dix principes formulés à
l'annexe 1 (soit la responsabilité, l'exactitude, les
mesures de sécurité, l'accès aux
renseignements personnels et la possibilité de porter
plainte à l'égard du non-respect des principes)
comportent des obligations pour les organisations,
liées pour l'essentiel à la façon de
gérer les renseignements personnels une fois qu'ils
sont en leur possession. Un autre des dix principes (la
transparence) se rapporte à la politique de relations
publiques des organisations touchant leur gestion des
renseignements personnels. Les quatre principes restants (la
détermination des fins de la collecte des
renseignements; le consentement; la limitation de la
collecte; et la limitation de l'utilisation, de la
communication et de la conservation) sont de nature plus
fondamentale, en ce sens qu'ils visent à faire en
sorte que les individus n'aient pas à communiquer de
renseignements personnels les concernant à moins de
savoir à quelles fins précises ils seront
utilisés ou communiqués, à moins que ces
fins ne soient légitimes et sans avoir consenti
à l'usage et à la communication prévus
pour ces renseignements. Ce sont ces quatre principes qui
sont en jeu dans la présente espèce.
[42]Il ressort de la lecture de ses articles 4.2
(détermination des fins de la collecte des
renseignements), 4.3 (consentement), 4.4 (limitation de la
collecte) et 4.5 (limitation de l'utilisation, de la
communication et de la conservation) que l'annexe 1 n'est pas
tant axée sur la prévention de la collecte, de
l'utilisation et de la communication de renseignements
personnels--toutes activités qui y sont
considérées comme allant presque de soi--que
sur l'examen des fins de cette collecte, de cette utilisation
et de cette communication. Ces fins doivent être
appropriées et légitimes, et des efforts
raisonnables doivent avoir été
déployés pour faire en sorte que
l'intéressé en soit informé et les
comprenne. Une fois que l'intéressé est
informé de ces fins et qu'il a
donné--explicitement ou implicitement--son
consentement éclairé, il est permis de
recueillir, d'utiliser ou de communiquer les renseignements
personnels qui le concernent.
[43]La LPRPDE est aussi un compromis quant à sa
forme, comme le montre à l'évidence le
récit de sa genèse. L'annexe 1 reproduit
textuellement la partie 4 de la norme adoptée par
l'ACN en 1995, norme qui était elle-même
fondée sur les Lignes directrices adoptées par
l'OCDE en 1980 et auxquelles le Canada a signifié son
adhésion en 1984. La norme de l'ACN aussi bien que les
Lignes directrices de l'OCDE sont des textes issus d'intenses
négociations entre les défenseurs
d'intérêts concurrents, qu'on a
élaborés suivant le principe de
l'autoréglementation et auxquels on n'a pas
donné, ni voulu donner, un libellé
législatif.
[44]Les auteurs de l'Annotated Guide ont
énuméré à la page 6 de cet
ouvrage un certain nombre de raisons qui rendaient
intrinsèquement difficile la tâche d'incorporer
dans une loi un code conçu à l'origine comme un
instrument d'application volontaire [à la page 6]:
[traduction] Premièrement, la norme était un
mélange de recommandations et de prescriptions,
lesquelles sont en général respectivement
formulées au conditionnel et à l'indicatif.
Dans le régime des normes volontaires, les
propositions au conditionnel («il conviendrait»,
«on devrait», etc.) sont souvent
considérées comme l'expression de pratiques
exemplaires et comme d'application nécessaire sauf
raisons impératives, alors que ce genre de
flexibilité n'existe pas dans la rédaction
législative.
Deuxièmement, les définitions
utilisées dans la norme ne sont pas conformes aux
principes de la rédaction législative, et dans
certains cas (par exemple celui de la définition de
«consentement»), elles exprimaient des
décisions de principe qu'il eût mieux valu
réserver au corps du Code.
Troisièmement, on trouve dans le Code un certain
nombre de répétitions et de
références internes qui posent problème
dans un texte législatif.
Quatrièmement, le Code traite dans des notes deux
des questions les plus difficiles à décider,
soit celles des exceptions à l'obligation d'obtenir le
consentement et des exceptions au droit d'accès. Des
propositions générales assorties d'exemples ont
été incorporées dans le Code sous forme
de notes, en partie parce qu'il était très
difficile de parvenir à un accord sur le corps du
texte dans le cadre de l'élaboration d'un document
d'application volontaire. Ces notes n'étaient pas
formulées avec suffisamment de précision pour
la loi, mais comme elles prévoyaient de très
importantes exceptions, il fallait en tenir compte d'une
façon ou d'une autre. Toutes ces difficultés
faisaient de l'incorporation du texte intégral du Code
dans la loi une solution peu attrayante du point de vue de la
rédaction législative.
[45]L'annexe 1 laisse parfois la Cour dans le brouillard,
ou même dans le noir le plus complet. L'article 4.3,
par exemple, dispose que l'intéressé doit
être informé et donner son consentement,
«à moins qu'il ne soit pas approprié de
le faire». L'article 4.3.4 formule le critère de
«la sensibilité des renseignements», mais
on apprend plus loin que «tous les renseignements
peuvent devenir sensibles suivant le contexte». Puis
l'article 4.3.5 pose que «[d]ans l'obtention du
consentement, les attentes raisonnables de la personne sont
aussi pertinentes».
[46]Tout cela pour dire que, même si la partie 1 et
l'annexe 1 de la Loi ont pour but de protéger le droit
à la vie privée, elles visent aussi à
faciliter la collecte, l'utilisation et la communication des
renseignements personnels par le secteur privé. La
Cour doit interpréter cette législation en
trouvant le juste milieu entre deux intérêts
concurrents. Qui plus est, étant donné le
caractère non législatif de sa
rédaction, l'annexe 1 ne se prête pas à
l'interprétation rigoureuse habituellement possible.
Cela étant, la meilleure solution pour la Cour est de
se confier aux critères de la souplesse, du sens
commun et du pragmatisme.
La nature de l'audience et la retenue judiciaire
à observer à l'égard du rapport du
commissaire
[47]Des questions analogues ont récemment
été examinées par notre Cour dans le
contexte de la Loi sur les langues officielles [L.R.C.
(1985) (4e suppl.), ch. 31] (voir Forum des
maires de la Péninsule acadienne c. Canada (Agence
d'inspection des aliments), [2004] 4 R.C.F. 276 (C.A.)
(Forum des maires)). S'il est vrai que cette affaire
relevait d'une loi différente, les dispositions de la
Loi sur les langues officielles concernant les
procédures qui peuvent être engagées
devant la Cour fédérale ressemblent à
tel point aux dispositions correspondantes de la LPRPDE qu'on
peut leur appliquer le même raisonnement (voir aussi la
décision Eastmond c. Canadien Pacifique
Ltée (2004), 16 Admin. L.R. (4th) 275; 2004 CF
852, le juge Lemieux, aux paragraphes 118 à 120). Je
ne vois aucune différence du point de vue
procédural entre la possibilité de
«former un recours devant le tribunal»
(«apply to the Court for a remedy»)
garantie par le paragraphe 77(1) de la Loi sur les langues
officielles et celle de demander «que la Cour
entende» une question («apply to the Court for
a hearing») que prévoit le paragraphe 14(1)
de la Loi. Les enquêtes qu'effectuent le Commissaire
aux langues officielles et le Commissaire à la
protection de la vie privée à la suite d'une
plainte suivent fondamentalement le même modèle.
Dans les deux cas, le plaignant peut former une demande
devant la Cour fédérale, demande qui fera
l'objet d'une instruction sommaire. Ce qui est en question
dans les deux sortes de procédures, ce n'est pas le
rapport du commissaire, mais la conduite de la partie contre
laquelle la plainte est déposée. Et le pouvoir
de réparation de la Cour sous le régime de la
LPRPDE, même s'il n'est pas défini dans le
langage de la Charte [Charte canadienne des droits et
libertés, qui constitue la partie I de la Loi
constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur
le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice
II, no 44]], est remarquablement large.
[48]Par conséquent, suivant l'interprétation
retenue dans l'arrêt Forum des maires,
l'audience visée au paragraphe 14(1) de la Loi est une
procédure de novo analogue à une action,
et le rapport du commissaire, s'il est produit en preuve,
peut être contesté ou contredit comme n'importe
quel autre élément de la preuve documentaire.
Autre argument à l'appui de cette conclusion: selon
l'article 15 de la Loi, le commissaire a qualité pour
comparaître comme «partie» à la
procédure. Si l'on usait de retenue judiciaire
à l'égard du rapport du commissaire, ce dernier
serait avantagé dès le départ comme
partie, ce qui compromettrait l'équité de
l'audience. La Loi sur les langues officielles
comprend une disposition semblable, au paragraphe 77(1).
La qualité pour agir
[49]L'appelant concède qu'il n'a pas
d'intérêt personnel dans la question du
consentement, dans la mesure où il ne soutient pas que
l'activité de TELUS ait porté atteinte à
son droit à la vie privée. TELUS excipe de ce
fait pour affirmer que l'appelant n'a pas qualité en
common law pour agir devant la Cour touchant la question du
consentement. Elle ne conteste cependant pas sa
qualité pour agir relativement à la question du
tarif.
[50]Il se trouve que le paragraphe 14(1) de la Loi permet
expressément au «plaignant» d'ester en
justice. S'il est vrai que peut être
considéré comme plaignant «tout
intéressé» qui a déposé une
plainte auprès du commissaire en vertu du paragraphe
11(1), il faut déduire du paragraphe 14(1) que seul le
plaignant dont la plainte a fait l'objet d'un rapport du
commissaire peut ester devant la Cour. Dans le cas où
le commissaire n'a pas dressé de rapport pour l'une ou
l'autre des raisons énumérées au
paragraphe 13(2)--par exemple s'il a conclu que la plainte
est futile, vexatoire ou entachée de mauvaise foi --,
le plaignant ne peut agir devant la Cour en vertu de
l'article 14 et doit donc se contenter de demander un
contrôle judiciaire sous le régime de l'article
18 [mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 4; 2002, ch. 8, art. 26]
de la Loi sur les Cours fédérales
[L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 1 (mod. par L.C. 2002, ch. 8,
art. 14)]. (Je note en passant que le recours prévu
à l'article 14 ne semble possible que pour le
plaignant, et non pour l'organisation faisant l'objet de sa
plainte, ce qui a pour fâcheuse conséquence que
cette dernière pourrait n'avoir d'autre recours que le
contrôle judiciaire.)
[51]TELUS, se fondant sur les termes «tout
intéressé» du texte français du
paragraphe 11(1), fait valoir qu'il faut être
personnellement intéressé pour déposer
une plainte auprès du commissaire et que l'on ne
devrait concéder à quiconque ne l'est pas que
le rôle de dénonciation prévu à
l'article 27 de la Loi. Ce pourrait bien être le cas
dans la sphère de compétence du commissaire, et
il se pourrait bien que celui-ci ait la faculté de
refuser d'établir un rapport sur une plainte dont il
conclurait que l'auteur n'est pas personnellement
intéressé, mais je ne me prononcerai sur ni
l'une ni l'autre de ces questions. Toutefois, dans le cas
où le commissaire a effectivement dressé un
rapport et où sa décision de le faire n'a pas
été attaquée, la personne qui a
déposé la plainte devient un plaignant, aux
fins de la faculté d'ester devant la Cour en vertu de
l'article 14 de la Loi, dès qu'il a reçu le
rapport, que les renseignements personnels en jeu le
concernent ou non lui-même. (Comparer Maheu c. IMS
Health Canada (2003), 24 C.P.R. (4th) 70; [2003 CFPI 1],
le juge Lemieux, au paragraphe 59; confirmé par
(2003), 29 C.P.R. (4th) 425 (C.A.F.)
[52]J'admets qu'il est exceptionnel qu'on reconnaisse la
qualité pour agir dans de tels cas, mais je ne puis
interpréter autrement les dispositions de la Loi,
d'autant plus que le libellé même du paragraphe
14(1) porte que le plaignant peut demander que la Cour
entende «toute question qui a fait l'objet de la
plainte--ou qui est mentionnée dans le rapport».
Toutefois, la reconnaissance de la qualité pour ester
devant la Cour n'influe pas sur la compétence
inhérente de celle-ci pour refuser d'entendre une
question qui n'a plus d'objet ou qui n'est normalement pas
considérée comme relevant de la
compétence des tribunaux judiciaires (voir Chiasson
c. Canada (2003), 226 D.L.R. (4th) 351 (C.A.F.)). Elle
n'influe pas non plus sur le devoir de la Cour de ne pas
accorder de réparation qui la détournerait de
son rôle d'arbitre judiciaire (voir Forum des
maires).
La question du consentement
[53]Il a beaucoup été question, devant nous
et dans l'exposé des motifs de la Cour
fédérale, de l'article 7 de la Loi et de
l'alinéa 1a) du Règlement. Le premier
dispense l'organisation de l'obligation,
énoncée à l'article 4.3 de l'annexe 1,
d'informer la personne et d'obtenir son consentement dans le
cas où il s'agit d'un renseignement «auquel le
public a accès». Selon le second, sont
réputés appartenir à cette
catégorie les renseignements personnels--nom, adresse
et numéro de téléphone des
abonnés--figurant dans un annuaire
téléphonique accessible au public (mais
seulement si l'abonné peut refuser que ces
renseignements y figurent).
[54]Soit dit en toute déférence, j'estime
que ni l'article 7 de la Loi ni l'alinéa 1a) du
Règlement ne sont applicables à la
présente espèce. En effet, ces dispositions
s'appliquent au cas où les renseignements
personnels--nom, adresse et numéro de
téléphone de l'abonné--figurent
déjà dans un annuaire
téléphonique accessible au public. Elles
permettent aux organisations de recueillir, d'utiliser ou de
communiquer à leurs propres fins ces renseignements
déjà existants. Mais ces dispositions ne
s'appliquent pas, et en fait ne peuvent pas s'appliquer,
à l'organisation même qui recueille au
départ ces renseignements afin de publier un annuaire
téléphonique qui deviendra, une fois
publié, accessible au public.
[55]On peut même dire que le fait que l'utilisation
des renseignements personnels figurant dans les annuaires
téléphoniques accessibles au public puisse
être aussi répandue à cause de ce
règlement doit inciter la Cour à faire preuve
d'autant plus de prudence s'agissant de décider les
questions relatives à l'inscription initiale
dans un annuaire téléphonique.
[56]Les principes 2 «Détermination des fins
de la collecte des renseignements» et 3
«Consentement» forment les questions centrales du
présent appel. Je m'empresse d'ajouter que suivant le
principe 3--qui se révèle ainsi comporter plus
que ce que son nom indique --, «il faut informer la
personne [. . .] et obtenir son consentement»
(article 4.3.2). Autrement dit, le principe 3 exige le
consentement éclairé.
[57]Selon le principe 2, les fins auxquelles les
renseignements personnels sont recueillis doivent être
déterminées par l'organisation avant la
collecte ou au moment de celle-ci (article 4.2). Ce
principe prévoit aussi l'obligation pour
l'organisation de préciser à
l'intéressé les fins auxquelles les
renseignements sont destinés avant la collecte ou
au moment de celle-ci (article 4.2.3). En outre, dans le
cas où l'organisation prévoit d'utiliser les
renseignements personnels recueillis à des fins non
précisées antérieurement, ces nouvelles
fins doivent être précisées avant
l'utilisation et il faut obtenir le consentement de la
personne concernée avant d'utiliser les
renseignements à cette nouvelle fin (article
4.2.4).
[58]Les articles 4.2.3 et 4.2.4 sont
particulièrement pertinents pour la présente
espèce dans la mesure où ils imposent
manifestement à l'organisation la charge de
préciser à la personne toutes les fins
auxquelles elle recueille les renseignements personnels qui
la concernent avant la collecte ou au moment de celle-ci.
[59]Selon le principe 3, «[t]oute personne doit
être informée de toute collecte, utilisation ou
communication de renseignements personnels qui la concernent
et y consentir, à moins qu'il ne soit pas
approprié de le faire». On ne précise pas
le sens des termes «pas approprié»; j'ai
le sentiment qu'ils se rapportent peut-être au moins
à l'article 7 de la Loi, qui autorise la collecte de
renseignements personnels à l'insu de
l'intéressé et sans son consentement dans
certains cas (voir le paragraphe 21 [des présents
motifs]). (Je note que le texte anglais des paragraphes 7(1),
(2) et (3) porte «without the knowledge
or consent», tandis que le texte
français dit «à l'insu de
l'intéressé et sans son
consentement» (non souligné dans l'original).
Cette différence de formulation est à mon sens
dénuée de signification, puisqu'il ressort
à l'évidence de l'article 4.3 de l'annexe 1 que
le principe du consentement exige à la fois
l'information de l'intéressé et son
consente-ment.)
[60]Les organisations doivent faire un effort
raisonnable pour s'assurer que la personne est
informée des fins auxquelles les renseignements
seront utilisés (article 4.3.2). Il faut
obtenir le consentement de la personne concernée--et
donc l'informer--avant de recueillir des
renseignements personnels à son sujet et d'utiliser ou
de communiquer les renseignements recueillis;
généralement, une organisation obtient le
consentement des personnes concernées relativement
à l'utilisation et à la communication des
renseignements personnels au moment de la collecte
(article 4.3.1). La forme du consentement que
l'organisation cherche à obtenir et la
façon dont elle obtient ce consentement peuvent
varier selon les circonstances et la nature des
renseignements (articles 4.3.4 et 4.3.6). Dans l'obtention du
consentement, les attentes raisonnables de la personne sont
pertinentes (article 4.3.5). Lorsque les renseigne-ments sont
moins sensibles, un consentement implicite serait normalement
jugé suffisant (article 4.3.6). Le consentement peut
revêtir différentes formes, pouvant par
exemple être donné dans un formulaire de demande
de renseignements, en ne cochant pas une case, au
téléphone ou au moment de l'utilisation; toutes
ces formes impliquent que le consentement est donné au
moment de la collecte et avant l'utilisation.
[61]Le moment est donc une considération
essentielle pour ce qui concerne le principe 3, comme il
l'est pour le principe 2. Dans la plupart des cas,
l'obligation d'informer l'intéressé et
d'obtenir son consentement doit être remplie au moment
de la collecte et avant l'utilisation. On ne peut s'appuyer
sur les brochures et autres documents communiqués
à l'intéressé au moment de la collecte,
et parfois même après l'utilisation, pour
établir si l'intéressé a
été informé et a donné son
consentement au moment de la collecte. Ces brochures et
autres documents sont communiqués par l'organisation
en application du principe 8 «Transparence»,
selon lequel l'organisation doit faire en sorte que des
renseignements précis sur ses politiques et ses
pratiques concernant la gestion des renseignements personnels
soient facilement accessibles à toute personne.
L'application du principe 8 arrive généralement
trop tard pour valoir celle du principe 3. Toutefois, la
transparence peut évidemment préparer la voie
à une constatation de consentement implicite dans le
cas où il serait démontré que les
nouveaux abonnés connaissaient le contenu des
brochures en question au moment de leur abonnement.
[62]Le juge de première instance a constaté
que TELUS et ses affiliées utilisent et communiquent
les noms, adresses et numéros de
téléphone figurant dans les annuaires
téléphoniques de TELUS (renseignements dont
nous avons souligné ici les désignations
diverses) dans le cadre des services suivants (au paragraphe
15 des motifs):
- des annuaires téléphoniques,
communément appelés les pages blanches, qui
sont publiés une fois par année dans la
région métropolitaine de Vancouver; plusieurs
autres annuaires sont publiés pour les
différentes régions et les quartiers de
Vancouver. Dans chaque annuaire figurent les inscriptions
des abonnés de TELUS qui résident dans la
région ou le quartier concerné et qui n'ont pas
adhéré au service de non-publication;
- lorsque de nouveaux clients s'abonnent au service local
résidentiel, ils sont automatiquement inscrits dans
les annuaires, à moins qu'ils n'aient souscrit au
service de non-publication. Si un client s'abonne au service
de non-publication, son inscription doit être
«consignée» manuellement pour s'assurer
que les coordonnées du client ne
soient pas inclues dans les données fournies à
l'assistance-annuaire et dans celles utilisées pour
l'édition des annuaires. Les comptes visés par
un numéro non publié doivent également
faire l'objet de mesures de sécurité
additionnelles constantes et être traitées de
manière particulière. La prestation du service
de non-publication entraîne donc certains coûts
pour TELUS;
- l'assistance-annuaire par téléphone, le
«411», que TELUS offre aux membres du grand
public moyennant des frais;
- l'assistance-annuaire sur Internet pour trouver une
personne (People Finder), également offerte au
grand public par TELUS. Ce service, assuré par une
affiliée de TELUS, TELUS Advanced Services
Inc., comprend également une fonction de recherche
inversée permettant au public de retrouver des
renseignements sur un abonné au moyen d'un
simple numéro de téléphone. Toutefois,
les renseignements concernant les abonnés ayant
souscrit au service de non-publication ne figurent pas dans
cette base de données;
- par le biais de services de bases de données
appelées Directory File Service et Basic
Listing Interchange File Service, TELUS divulgue,
moyennant rémunération, les données
relatives aux inscriptions de ses abonnés. Le CRTC
oblige TELUS à fournir ces services à des
éditeurs d'annuaires indépendants et à
certaines organisations en Colombie- Britannique,
conformément aux articles 23 et 210 du Tarif;
- la société chargée de publier les
annuaires de TELUS, Dominion Information Services Inc.
[Dominion], fournit contre rémunération
certaines données relatives aux inscriptions
à des organisations choisies [les services de
répertoire]. Ces données ne comprennent
aucune information sur les abonnés au service de
non-publication et les abonnés ayant demandé
que leur numéro soit retiré des listes;
- Dominion propose également un CD-ROM contenant
les données relatives aux inscriptions,
également vendu au détail et accessible
à quiconque souhaite acquérir cette
information. Le CD-ROM peut être utilisé en mode
consultation seulement, les fonctions d'impression sont
limitées et il est protégé contre la
copie et chiffré pour empêcher toute utilisation
malveillante. La licence précise qu'il est interdit
d'utiliser le CD-ROM pour publier d'autres annuaires ou
imprimer l'intégralité de son contenu.
[63]La pratique de TELUS concernant l'obtention du
consentement de ses nouveaux abonnés a
été résumée comme suit par le
juge de première instance (aux paragraphes 38 à
40):
Dans sa déclaration assermentée, Jim Brooks,
vice-président à la transformation des
activités chez TELUS, nous informe de la
procédure suivie lorsqu'un client s'abonne à
une nouvelle ligne téléphonique. Les
représentants du service à la clientèle
de TELUS ont reçu pour directive d'aviser le client
que la ligne téléphonique comprend la
publication de son inscription dans les annuaires de TELUS.
Ils demandent au client de quelle manière celui-ci
souhaite que ses renseignements personnels apparaissent dans
les annuaires. Les représentants discutent
également des questions se rapportant à la
protection des renseignements personnels et lui
présentent les options de publication disponibles si
ce dernier indique qu'il ne souhaite pas figurer dans les
publications. Les nouveaux clients reçoivent
également une lettre de bienvenue accompagnée
d'une brochure les informant de l'engagement de l'entreprise
en matière de protection des renseignements personnels
(Our Privacy Commitment to You). Dans la brochure,
TELUS précise notamment pourquoi elle recueille,
utilise et divulgue les renseignements personnels sur les
abonnés; elle informe également les clients
qu'ils ont le droit de faire rayer leur nom des listes.
Dans les pages blanches, TELUS explique clairement comment
elle utilise les renseignements personnels et elle
définit les différentes options de service
offertes aux clients pour protéger leur vie
privée. TELUS indique également à qui
les renseignements sont divulgués et de quelle
manière ces renseignements sont susceptibles
d'être utilisés. Des directives précises
sont également mises à la disposition des
clients sur la manière de retirer leur consentement et
de vérifier ou modifier leurs renseignements
personnels en tout temps.
En outre, TELUS offre un numéro sans frais
spécialement destiné à fournir de
l'information aux clients qui souhaitent discuter de
questions se rapportant à la protection des
renseignements personnels. TELUS met également
à la disposition de ses clients un site Web où
ils peuvent obtenir de l'information concernant les pratiques
de l'entreprise en matière de vie privée. En
plus de ces services, TELUS emploie à plein temps un
commissaire à la protection des renseignements
personnels qui doit rendre compte des politiques et des
pratiques en matière de vie privée.
[64]Le juge, avant de formuler au paragraphe 48 sa
conclusion selon laquelle TELUS avait «obtenu un
consentement valable en vertu de la LPRPDE lui permettant de
publier les renseignements personnels concernant ses
abonnés dans les annuaires téléphoniques
de l'entreprise», a exprimé les opinions
suivantes (aux paragraphes 41 et 47):
La publication d'annuaires téléphoniques
dans le cadre du service de téléphone
résidentiel est une pratique de longue date largement
répandue parmi les fournisseurs de services
téléphoniques. Ainsi, outre le fait que TELUS
les informe de cette pratique, les clients s'attendent
raisonnablement à ce que leurs renseignements
personnels soient publiés dans l'annuaire
téléphonique, à moins qu'ils ne
souscrivent au service de non-publication.
[. . .]
[. . .] je crois que lorsqu'un
représentant de TELUS demande à un nouveau
client quelles sont ses préférences quant
à la manière dont ses renseignements personnels
doivent figurer dans l'annuaire téléphonique,
ce client est libre de demander les options qui s'offrent
à lui. Si le caractère confidentiel de ces
renseignements est fondamental pour le client ou si celui-ci
souhaite simplement qu'ils ne soient pas publiés, il
lui appartient d'obtenir l'information pertinente, soit en
s'adressant au représentant, soit en se servant des
différents outils que TELUS met à la
disposition du public.
[65]Je conclus, vu les faits, que les nouveaux
abonnés n'ont pas donné, ni ne pouvaient
donner, un consentement valable à l'utilisation par
TELUS des renseignements personnels les concernant dans le
cadre de son service d'assistance-annuaire sur Internet, de
ses services de base de
données--désignés Directory File
Service et Basic Listing Interchange File
Service--et de son service CD-ROM. Les clients
n'étaient pas informés de l'existence de ces
services au moment de l'abonnement, et aucun
élément de la preuve ne donne à penser
qu'ils soient liés de si près à l'objet
premier des annuaires téléphoniques que les
nouveaux abonnés puissent raisonnablement les
considérer comme appropriés. Aucun
élément de la preuve ne tend à
établir que TELUS ait fait un «effort»,
encore moins un «effort raisonnable», au sens de
l'article 4.3.2, pour faire en sorte que les nouveaux
abonnés soient informés des fins secondes de la
collecte au moment de celle-ci. Le juge de première
instance ne formule pas de conclusion distincte au sujet de
ces services, ce qui constitue en soi une erreur susceptible
de révision.
[66]Pour ce qui concerne les fins premières de la
collecte, le juge a conclu que les nouveaux abonnés
raisonnables n'ignoreraient pas que les compagnies de
téléphone ont pour habitude d'inscrire leurs
abonnés dans des annuaires et sur les listes de
l'assistance- annuaire (service 411) dans le cadre de leurs
services résidentiels et qu'une personne raisonnable
considérerait ces fins comme appropriées. Cette
connaissance présumée autoriserait TELUS
à supposer que les nouveaux abonnés sont au
courant des fins premières auxquelles sont recueillis
les renseignements personnels qui les concernent et
consentent implicitement à ce que leur nom, leur
adresse et leur numéro de téléphone
figurent dans les annuaires et les répertoires de
l'assistance-annuaire, sauf avis contraire au moment de
l'abonnement. Les conclusions du juge de première
instance semblent fondées sur un court passage du
Rapport au gouverneur en conseil sur les listes
d'inscriptions d'abonnés dans les annuaires et sur le
service de numéro non inscrit. (voir le paragraphe
29 [des présents motifs]).
[67]La conclusion du juge de première instance et
le postulat du CRTC, comme quoi les nouveaux abonnés
peuvent être considérés comme ayant
consenti à l'utilisation aux fins premières
s'ils ne demandent pas de leur propre initiative que leur
numéro ne soit pas inscrit, ne me semblent pas
compatibles, soit dit en toute déférence, avec
la recherche même d'un consentement
éclairé au moment de l'abonnement ou avant
celui-ci, dont la partie 1 de la Loi et son annexe 1 font une
obligation. Le consentement n'est pas éclairé
si la personne qui est censée l'avoir donné ne
savait pas, au moment où elle l'a donné,
qu'elle avait la possibilité de ne pas être
inscrite. Les nouveaux abonnés ont le droit
d'être informés, avant que les renseignements
personnels les concernant ne deviennent des renseignements
«au[x]quel[s] le public a accès» au sens
de l'article 7 de la Loi--compte tenu de toutes les
conséquences que peut entraîner cette
publication --, qu'ils peuvent exercer leur droit à la
vie privée et choisir de ne pas être inscrits.
Cela me paraît être un compromis équitable
entre le droit à la vie privée des personnes
physiques et les besoins des entreprises.
Le point de savoir si la Cour a compétence pour
examiner la légalité des tarifs fixés
par le CRTC pour l'utilisation du service de
non-publication
[68]Si je comprends bien la thèse de l'appelant,
TELUS ne pourrait être autorisée à faire
payer à ses clients le simple exercice du droit
à la vie privée que leur garantit la loi. Cette
pratique contreviendrait à l'article 4.3.3 de l'annexe
1, selon lequel «[u]ne organisation ne peut pas, pour
le motif qu'elle fournit [. . .] un service, exiger
d'une personne qu'elle consente à la collecte de
renseignements». Je reviendrai à cette
disposition lorsque j'examinerai au fond la question du
tarif. Je ne la cite ici que pour préciser de quel
type de compétence il s'agit en l'occurrence.
[69]Le juge de première instance conclut au
paragraphe 60 de l'exposé de ses motifs que la Cour
n'a pas compétence relativement à la question
du tarif, «car il s'agit d'une question relevant de la
compétence exclusive du CRTC». L'avocate de
l'intimée invoque à l'appui de cette conclusion
la logique découlant des arrêts suivants de la
Cour suprême du Canada: St. Anne Nackawic Pulp &
Paper Co. c. Syndicat canadien des travailleurs du papier
(Section locale 219), [1986] 1 R.C.S. 704; Weber c.
Ontario Hydro, [1995] 2 R.C.S. 929; Regina Police
Assn. Inc. c. Regina (Ville) Board of Police
Commissioners, [2000] 1 R.C.S. 360; et enfin
Québec (Procureur général) c.
Québec (Tribunal des droits de la personne),
[2004] 2 R.C.S. 223.
[70]Je dois dire d'entrée de jeu que je ne vois
guère d'utilité à toute cette
argumentation, et ce, pour deux raisons. Premièrement,
la question sera en fin de compte et de toute façon
décidée par la Cour d'appel
fédérale, dans le cadre d'un appel soit--comme
dans le cas présent--d'une décision de la Cour
fédérale rendue sous le régime de la
LPRPDE, soit--à propos d'une question de droit--d'une
décision du CRTC rendue sous le régime de la
Loi sur les télécommunications [L.C.
1993, ch. 38]. Deuxièmement, le CRTC n'a pas
revendiqué, et encore moins exercé, de
compétence sur cette question, de sorte qu'il n'y a
pas risque de décisions contradictoires. En mettant
les choses au pis, le CRTC semble penser, comme le
révèle le passage cité au paragraphe 35
[des présents motifs], que ses normes relatives
à la protection des renseignements personnels
pourraient être différentes de celles
qu'établit la LPRPDE. Cette étonnante
proposition pourrait devoir être examinée quand
l'occasion s'en présentera.
[71]La question que soulève la présente
espèce est de savoir si la Cour
fédérale--et non le Commissaire à la
protection de la vie privée--a compétence. Le
commissaire, de toute façon, n'est pas un tribunal, et
la LPRPDE ne lui confère pas de pouvoir
décisionnel. Le plus qu'il peut faire est de se former
une opinion sur la question et de l'exprimer dans son
rapport. Comme le rapport n'est pas une
«décision», il ne peut entrer en conflit
avec la décision d'un tribunal judiciaire ou
administratif qui serait déclaré avoir
compétence-- exclusive, concurrente ou par
chevauchement--pour trancher la question.
[72]Le CRTC, lui, est un tribunal décisionnel.
L'article 25 [mod. par L.C. 1999, ch. 31, art. 199] de la
Loi sur les télécommunications dispose
que l'entreprise canadienne doit fournir les services de
télécommu-nication en conformité avec la
tarification, déposée auprès du CRTC et
approuvée par celui-ci, fixant les tarifs à
imposer ou à percevoir. L'article 27 porte que tous
les tarifs des services de télécommunication
doivent être «justes et raisonnables».
L'alinéa 7i) inscrit parmi les objectifs de la
politique canadienne des télécommunications
celui de «contribuer à la protection de la vie
privée des personnes».
[73]L'alinéa 32a) habilite le CRTC, pour
l'application de la partie III (celle qui nous
intéresse ici), à «approuver
l'établissement de catégories de services de
télécommunication et [à] permettre que
soient imposés ou perçus des tarifs
différents pour chacune d'elles».
L'alinéa g) du même article autorise le
CRTC, «en l'absence de disposition applicable dans la
présente partie, [à] trancher toute question
touchant les tarifs et tarifications des entreprises
canadiennes ou les services de
télécommunication qu'elles
fournissent».
[74]L'article 47 dispose que le CRTC doit exercer ses
pouvoirs de manière à réaliser les
objectifs de la politique canadienne de
télécommunications et à assurer la
conformité des services et tarifs des entreprises
canadiennes avec les dispositions de l'article 27. L'article
48 habilite le CRTC à «instruire et trancher
toute question relative à une interdiction, obligation
ou autorisation découlant de la partie [. . .]
III» (c'est-à-dire les articles 25 à 46).
L'article 52 porte que le CRTC «connaît, dans
l'exercice des pouvoirs et fonctions qui lui sont
conférés au titre de la présente loi
[. . .], aussi bien des questions de droit que des
questions de fait».
[75]On pourrait donc soutenir, compte tenu des
dispositions applicables et des circonstances, que le CRTC a
compétence pour statuer sur la légalité
des tarifs qu'il approuve par ailleurs (voir
Nouvelle-Écosse (Workers' Compensation Board) c.
Martin; Nouvelle-Écosse (Workers' Compensation Board)
c. Laseur, [2003] 2 R.C.S. 504, à la page 537).
Cependant, comme le CRTC n'est pas intervenu dans la
présente espèce, je me contenterai de supposer
qu'il a compétence, sans trancher la question.
[76]La question qui reste à décider est
celle de savoir si la compétence du CRTC touchant la
question du tarif prive la Cour fédérale de sa
compétence sur cette même question.
[77]La LPRPDE prévoit un mécanisme de
recours détaillé, devant le Commissaire
à la protection de la vie privée d'abord, puis
devant la Cour fédérale. En outre, en vertu de
son paragraphe 4(3), elle l'emporte sur la Loi sur les
télécommunications.
[78]Sous le régime de l'article 11 de la Loi, les
plaintes sont déposées «contre une
organisation qui contrevient à l'une des dispositions
de la section 1 [qui réunit les articles 5 à
10] ou qui omet de mettre en oeuvre une recommandation
énoncée dans l'annexe 1». Pour pouvoir
décider, dans l'exercice de la compétence que
lui confère l'article 14 de la Loi, si une
organisation, en violation du paragraphe 5(1), ne s'est pas
conformée aux obligations énoncées dans
l'annexe 1, en l'occurrence à son article 4.3.3, la
Cour fédérale doit être habilitée
à décider si la perception de droits est
permise sous le régime de ce dernier article. C'est
là une pure question de droit qui relève de la
loi même dont la Cour est chargée d'assurer
l'exécution. Il faudrait une disposition explicite
dans la Loi sur les télécommunications
pour priver la Cour fédérale de sa
compétence lorsqu'elle agit en vertu de la LPRPDE. Or,
on n'y trouve pas de disposition de cette nature. (Voir les
paragraphes 92 à 117 de la décision
Eastmond, citée au paragraphe 47
ci-dessus.)
[79]Je conclus donc qu'il y a ici soit compétence
concurrente, soit chevauchement de compétence, pour
reprendre les termes employés par la Cour
suprême du Canada dans Weber et au paragraphe 69
de l'arrêt Québec (Procureur
général) c. Québec (Tribunal des droits
de la personne). Dans le cas où la Cour
fédérale, ou notre Cour en appel,
déciderait qu'il ne peut être perçu de
droits pour le service en question, le CRTC devrait
réviser sa tarification, de la même façon
qu'il aurait dû le faire s'il avait
décidé au fond que la législation
permettait de percevoir de tels droits et que sa
décision sur ce point eût été
infirmée dans le cadre d'un appel interjeté
devant la Cour sous le régime de la Loi sur les
télécommunications.
Le point de savoir si la perception de droits enfreint
les dispositions de la LPRPDE
[80]L'appelant soutient qu'en subordonnant la
non-inscription d'un numéro au paiement de droits par
l'abonné, TELUS enfreint l'article 4.3.3 de l'annexe.
Nous reproduisons de nouveau cet article pour la
commodité du lecteur:
4.3.3
Une organisation ne peut pas, pour le motif qu'elle
fournit un bien ou un service, exiger d'une personne qu'elle
consente à la collecte, à l'utilisation ou
à la communication de renseignements autres que ceux
qui sont nécessaires pour réaliser les fins
légitimes et explicitement indiquées.
[81]L'appelant ne soutient pas que l'exercice d'un droit
garanti par la loi ne peut jamais être
subordonné au paiement d'une redevance, mais
plutôt qu'il ne peut être perçu de
redevance de cette nature que si une loi le
prévoit.
[82]Je ne peux souscrire à la proposition de
l'appelant selon laquelle aucun texte législatif ou
réglementaire ne permet la perception de droits dans
le cas qui nous occupe. Bien au contraire, il ressort du
libellé explicite de la Loi sur les
télécommunications que, lorsqu'il approuve
les tarifs et les services, le CRTC doit tenir compte des
objectifs de la politique canadienne des
télécommunications, y compris de celui qui
consiste à contribuer à la protection de la vie
privée des personnes. Il peut donc être fourni
des services de protection de la vie privée, et des
droits peuvent être perçus en contrepartie de
tels services. On ne saurait imaginer d'indication plus
claire que le législateur envisageait le paiement de
droits pour la prestation de services de protection de la vie
privée.
[83]L'appelant soutient cependant que la LRPRDE l'emporte
sur la Loi sur les télécommunications.
Il ne pourrait en aller ainsi que si des dispositions de
l'une contredisaient des dispositions de l'autre. Or, je ne
trouve dans la LRPRDE aucune disposition interdisant
expressément la perception de droits ou redevances, et
l'article 4.3.3 de l'annexe 1, qu'invoque l'appelant, ne peut
en aucune façon être interprété
dans le sens qu'il propose. Le «service» dont il
est question dans ce paragraphe est le service
téléphonique, et ledit paragraphe a pour effet
d'interdire à TELUS de demander à ses
abonnés un consentement d'application plus large qu'il
n'est nécessaire pour la prestation de ce service.
[84]L'appelant n'a pu citer devant la Cour aucun
précédent directement pertinent à
l'appui de sa proposition. Il a invoqué deux
arrêts de la Cour suprême du Canada concernant
les droits des autochtones. Je ne suis pas disposé
à appliquer en bloc à des questions relevant
typiquement du droit administratif des principes
élaborés dans le contexte du droit des
autochtones. De toute façon, ces arrêts n'aident
pas beaucoup l'appelant. Dans R. c. Badger, [1996] 1
R.C.S. 771, la Cour suprême a conclu que le
traité en question et la Convention sur le transfert
des ressources naturelles ne permettaient pas de subordonner
l'exercice d'un droit garanti par ce traité au
paiement de droits de licence. Dans l'arrêt R. c.
Côté, [1996] 3 R.C.S. 139, rendu dans une
affaire où un règlement prévoyait
l'obligation de payer des droits d'utilisation à
l'État pour l'exercice d'un droit autochtone
lié à la terre, la Cour suprême a conclu
que la perception de droits pouvait être
autorisée dans le cas où ceux-ci étaient
des droits d'utilisation dont le produit devait être
consacré à l'amélioration des voies de
communication de la zone en question. La Cour a même
ajouté (au paragraphe 80) que les droits
d'accès perçus «ne restreign[aient] pas
les droits constitutionnels des appelants, mais [que] dans
les faits ils en facilit[aient] plutôt
l'exercice».
[85]Dans la présente espèce, comme dans
Côté, la redevance facilite plutôt
qu'elle ne restreint le droit de l'appelant à la vie
privée, et la charge qu'elle représente pour
l'appelant n'est pas en question. On n'a en effet produit
aucun élément de preuve tendant à
établir que la redevance perçue par TELUS
serait excessive. Au contraire, la preuve montre que l'un des
grands soucis du gouverneur en conseil, des divers
intervenants et en fin de compte du CRTC lui-même
était que fût fixé un tarif qui ne
découragerait pas la non-inscription de sorte à
empêcher de nombreux abonnés de protéger
leur vie privée. En fait, le CRTC, dans son Rapport
au gouverneur en conseil sur les listes d'inscriptions
d'abonnés dans les annuaires et sur le service de
numéro non inscrit, fait observer qu'«il est
de plus en plus essentiel que le prix du service de
numéro non inscrit ne soit pas, financièrement,
hors de portée des abonnés» (passage
cité ci-dessus au paragraphe 30). Le CRTC a ainsi
approuvé la perception d'une redevance qui ne
dépasserait pas 2 $ par mois pour les abonnés
résidentiels. Personne n'a soutenu devant nous que ce
taux contreviendrait à l'article 27 de la Loi sur
les télécommunications, selon lequel
«[t]ous les tarifs doivent être justes et
raisonnables», argument que la Cour aurait de toute
façon refusé de considérer, puisque
cette question relève de la compétence
exclusive du CRTC.
La question de savoir si l'appelant est partie à
un litige d'intérêt public
[86]L'appelant demande que les dépens lui soient
accordés quelle que soit l'issue de l'appel, au motif
qu'il est partie à un litige d'intérêt
public.
[87]L'appelant se représente lui-même. Il a
droit tout au plus au remboursement des frais raisonnables
qu'il a supportés. J'ordonnerai que lui soient
remboursés les frais raisonnables qu'il a
supportés devant la Cour fédérale et
devant notre Cour, étant donné que son appel
est en fin de compte partiellement accueilli. Je n'ai pas
à décider s'il aurait eu droit à un tel
remboursement dans le cas où il aurait
été débouté à tous
égards.
Décision
[88]Vu tout ce qui précède, j'accueillerais
l'appel en partie, j'annulerais la décision de la Cour
fédérale en date du 3 juin 2003 et je
déclarerais bien fondée en partie la plainte
déposée par le demandeur contre TELUS le
1er janvier 2001.
[89]Je conclurais que TELUS a enfreint l'article 5 de la
Loi sur la protection des renseignements personnels et les
documents électroniques en n'informant pas ses
nouveaux abonnés, au moment de leur abonnement, des
fins premières et secondes auxquelles les
renseignements personnels les concernant étaient
recueillis et en ne les informant pas non plus à ce
moment de la possibilité pour eux de
bénéficier du service de non-publication des
numéros.
[90]Comme l'appelant n'a pas été
personnellement lésé, je ne suis disposé
à ordonner qu'une réparation non
pécuniaire et orientée vers l'avenir.
J'ordonnerais donc à TELUS de se conformer à
l'obligation énoncée au paragraphe
précédent. L'avocate de TELUS a fait valoir
à l'audience que dans le cas où serait rendue
une décision défavorable à cette
entreprise, celle-ci devrait avoir la possibilité de
présenter des observations écrites concernant
la réparation, ce à quoi la Cour a souscrit. Je
donnerais à TELUS quatre semaines à compter de
la date de la présente ordonnance pour signifier et
déposer des observations touchant les modalités
et le calendrier de sa mise en oeuvre de la réparation
établie ci-dessus. Je donnerais ensuite deux semaines
à l'appelant pour présenter sa réponse
à ces observations. En conséquence, le jugement
sera prononcé ultérieurement.
[91]Pour ce qui concerne les dépens, j'ordonnerais
à TELUS de rembourser à l'appelant les frais
raisonnables qu'il a supportés devant la Cour
fédérale et devant notre Cour. J'ordonnerais en
outre à TELUS de rembourser à l'appelant les
dépens de 11 906,41 $ qu'il lui a payés en
exécution de la décision de la Cour
fédérale.
Le juge Nadon, J.C.A.: Je souscris aux présents
motifs.
Le juge Malone, F.C.A.: Je souscris aux présents
motifs.