1993
Pêche à la morue : Moratoire

Assemblée lors de la fermeture de l'usine Pêcheries Norpro ltée.
Fonds Achille Hubert
AP1, C18, 52.6.1, Assemblée lors de la fermeture de l'usine Pêcheries Norpro ltée. négatif : coul. ; 35 mm

Depuis la découverte du nouveau monde, la Morue de l'Atlantique est l'espèce commerciale la plus pêchée dans l'Atlantique. Dès les premiers efforts de colonisation, les Portugais, Basques, Français et Espagnols viennent pêcher la morue près des côtes canadiennes. Aux Îles-de-la-Madeleine, les premiers exploitants à tenter de s'y établir sont désireux d'y faire la pêche à la morue et la chasse aux phoques. Encore aujourd'hui l'économie des Îles-de-la-Madeleine, bien que plus diversifiée, repose sur la pêche.

Les prises de morue qui sont d'environ 100 000 tonnes à la fin du dix-septième siècle, atteignent près de 400 000 tonnes au cours du dix-neuvième siècle et ce grâce à l'amélioration des techniques de pêche.

Les techniques de pêche pour la morue sont variées. Les pêcheurs côtiers utilisent trappes, palangres, filets maillants, lignes à main et turluttes. Les dernières années de pêche sont marquées par l'utilisation de sennes à morue. La pêche hauturière se fait au moyen de palangres mouillées, puis apparaissent les chalutiers, les treuils plus puissants, les écho-sondeurs, puis les navires-usines permettant la transformation et la congélation en mer.

Les prises sont en augmentation constante depuis l'avènement de ces progrès. Dans les années 1960, elles atteignent presque deux millions de tonnes. Pendant ces années, la pêche hauturière sur le plateau sud du Labrador, pendant et après la période de frai, nuit aux pêches côtières, ce qui entraîne une diminution des captures et de la taille des prises. Cette surpêche provoque une diminution des captures dans les années 1970, malgré l'extension de la zone canadienne de pêche à 360 kilomètres marins, et finalement l'effondrement de la pêche côtière et hauturière dans les années 1990.

En 1992, le ministère des Pêches et des Océans annonce la fermeture de la pêche à la morue du nord pour deux ans. En 1993, le moratoire s'étend au golfe Saint-Laurent; des milliers de pêcheurs et de travailleurs d'usine perdent leur gagne-pain. Aux Îles-de-la-Madeleine, environ quatre-cent cinquante personnes perdent leur travail. Les tensions montent et en mai les pêcheurs membres de la coalition des morutiers mobiles du golfe Saint-Laurent occupent les bureaux du ministère des Pêches et des Océans dans diverses régions. Les morutiers du Golfe, incluant ceux des Îles-de-la-Madeleine, demandent que le programme de compensation du sud du golfe soit ajusté à celui offert à l'est de Terre-Neuve. Ils demandent aussi que le ministère des Pêches et des Océans permette l'expérimentation sur la ralingue (un système qui laisse les mailles du chalut ouvertes pendant le chalutage, ce qui permet aux jeunes morues de sortir). Finalement, ils demandent que tous les bateaux qui pêchent dans la zone 4T avec un maillage de 130 cm carré ou de 145 mm losange soient munis d'un observateur. Les pêcheurs protestent aussi parce que le sous-ministre a permis la pêche durant l'hiver 1993, à l'entrée du golfe, sans qu'il y ait vérification et contrôle des débarquements à quai.

La crise socio-économique qui découle du moratoire touche durement les Madelinots au cours des années 1990. Pour venir en aide aux travailleurs et aux collectivités, le gouvernement fédéral met sur pied divers programmes d'aide; projet de développement de l'emploi et cours de formation offerts aux travailleurs d'usine et aux pêcheurs qui ne sont pas admissibles à l'assurance-emploi, rachat des permis de pêche (900 en tout sont rachetés). Au total, les travailleurs d'usine touchent près de 44 millions de dollars en compensation par le gouvernement fédéral.

Cinq ans après le moratoire, le gouvernement fédéral ouvre la pêche en quantité limitée. Selon les scientifiques, c'est encore trop, car les stocks de morue ne se renouvellent pas. Qu'elles sont les raisons de ce non-renouvellement des stocks de morue? La première hypothèse est la pêche. La réouverture de la pêche, même si on ne pêche que sept mille tonnes de ce poisson, permet également la capture de morues capables de se reproduire. La seconde théorie découle du fait que le nombre de femelles prêtes à frayer est très réduit. Plusieurs experts affirment que les prédateurs mangent de plus en plus de jeunes morues, ce qui limite la reconstitution des stocks. De plus, la croissance des jeunes morues est ralentie et plusieurs meurent du froid qui sévit dans le nord du golfe depuis une quinzaine d'années.

Le 24 avril 2003, un nouveau moratoire sur la morue dans le golfe et au large de Terre-Neuve est décrété. Le 2 mai 2003, deux populations de morues franches sont inscrites sur la liste canadienne des espèces menacées et en voie de disparition.

  "Malgré les crises ayant ponctué son évolution, la pêche conserve donc toute son importance aux Îles. Économie de ressources, polyvalence et qualité sont à l'ordre du jour. La population continue de guetter le moindre indice de reconstitution des biomasses dont l'absence à eu tellement de répercussions." (1)  

La morue:

La morue de l'Atlantique fait partie de la famille des Gadidae. Elle fréquente les eaux froides des mers du Nord. Elle se répartie sur l'ensemble du plateau continental, des eaux côtières peu profondes jusqu'aux eaux pouvant atteindre plus de 6 500 mètres de profondeur. On la rencontre le long des côtes du Groenland, au large de la baie de Frobisher et dans la baie d'Ungava. Cette espèce est plus abondante le long de la côte du Labrador et sur les bancs de Terre-Neuve, mais elle fréquente aussi le golfe Saint-Laurent, la plate forme Néo-écossaise et le golfe du Maine jusqu'au Cap Hatteras.

Elle est de couleur grise ou verte avec le ventre blanchâtre, possède trois nageoires et un barbillon sous la mâchoire. Le poids moyen de la morue est de deux à trois kilos et mesure de 60 à 70 cm. La femelle atteint sa maturité sexuelle vers 6 ans et la période de frai varie de mars à juin selon les endroits. Le taux de mortalité est énorme, en moyenne un œuf sur un million réussira à devenir un poisson mature. Les avelins se nourrissent principalement de copépodes et d'autres petits crustacés trouvés dans le plancton. Les jeunes consomment des crevettes, des amphipodes et des larves de divers organismes marins.

1- Fortin, Jean-Charles, Larocque, Paul. Histoire des Îles-de-la-Madeleine. Les Éditions de l'IQRC. 2003. p. 310.

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Dernière mise à jour: 11 mars, 2004
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