Bulletin 19, 1972

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Résumé

Cézanne, Vollard et la lithographie: 
la maquette d'Ottawa de la chromolithographie
les Grands baigneurs

par Douglas W. Druick

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Page  1

Cézanne ne s'essaya au procédé populaire de la lithographie que sur les instances de Vollard. Le marchand de tableaux pressait les artistes de lui fournir des estampes, et surtout des lithographies en couleurs. Préoccupé à l'extrême par ce procédé d'expression, il en arriva à oublier le principe directeur de L'estampe originale qui mettait l'accent sur le caractère autographe de l'oeuvre. Lorsque l'artiste n'était pas disposé à s'engager dans le processus complexe de la chromolithographie, Vollard avait recours à un expédient, soit une maquette que son imprimeur, Auguste Clot, pouvait interpréter. Cette maquette était parfois simplement une huile, un pastel ou une aquarelle. Ou encore, l'artiste exécutait d'abord une lithographie en noir pour servir de dessin-matrice à l'estampe en couleurs, et coloriait ensuite l'épreuve obtenue par report pour guider l'imprimeur dans la mise en couleur des pierres. Dans l'un et l'autre cas, l'intégrité de l'estampe originale se voyait compromise.

Les cinq maquettes attribuées à Cézanne (fig. 2, 5, 6, 7 et 12) ont été exécutées selon le second procédé décrit ci-dessus. Les différences qui existent entre les maquettes et entre les lithographies en noir à partir desquelles les maquettes ont été préparées permettent toutefois d'établir la chronologie de ces diverses pièces.

Bien que seule la lithographie les Petits baigneurs (fig. 8) ait été publiée, on commettrait une erreur en la considérant comme la première oeuvre de Cézanne dans le genre. Deux indices permettent de présumer que l'estampe mère des Petits baigneurs (fig. 9) est la dernière d'une série de trois. Tout d'abord, des trois lithographies en noir, elle est la seule à n'avoir pas été exécutée sur papier report, mais dessinée directement sur la pierre, ce qui mettait l'artiste devant le problème de l'inversion de l'image. En second lieu, elle seule possède le dépouillement qu'on attend d'une lithographie sur laquelle la couleur viendra s'ajouter ultérieurement. L'existence de maquettes coloriées exécutées à partir des trois lithographies en noir donne à penser qu'en présence du succès des Petits baigneurs chez la critique, Vollard aurait demandé à Cézanne de préparer des maquettes en couleurs à partir de lithographies qui au départ, n'étaient pas destinées au tirage en polychromie. Cet enchaînement s'appuie sur l'application plus généreuse de l'aquarelle dans les maquettes des Grands baigneurs (fig. 2, 5 et 6) et du Portrait de Cézanne (fig. 12). Les lithographies en noir furent donc réalisées entre le moment où Vollard rencontra Cézanne (1895) et la publication des Petits baigneurs (fin de l'année 1897). Les maquettes du Portrait de Cézanne et des Grands baigneurs furent préparées par la suite.

Seule lithographie de Cézanne à suivre de près une composition antérieure, les Grands baigneurs témoignent de l'importance du prototype Baigneurs au repos (fig. I) pour l'artiste et le marchand. La maquette les Grands baigneurs de la Galerie nationale revêt un intérêt particulier par le fait qu'elle est la seule des maquettes connues à avoir été respectée fidèlement dans l'estampe en couleurs. Il en existe deux états qu'on ne distinguait pas auparavant, et dont chacun reflète les efforts de l'imprimeur pour obtenir une réplique de la maquette d'Ottawa. Celle-ci étant une des trois maquettes préparées pour la chromolithographie les Grands baigneurs, nous pouvons présumer que plusieurs maquettes ont été préparées à partir d'impressions en noir et blanc des Petits baigneurs et du Portrait de Cézanne.

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