Partie IV
Les négociations collectives : exposés sectoriels

LA FABRICATION

LES GRANDS DE L'AUTOMOBILE

Les Trois Grands et la CAMI emploient ensemble tout près de 55 000 membres des TCA. La moitié des véhicules assemblés au Canada sont vendus au pays – ce ratio est le plus élevé parmi les pays industrialisés. Le Canada assemble environ le sixième de tous les véhicules fabriqués en Amérique du Nord (Canada, États-Unis et Mexique). Chez les Trois Grands, la productivité et la qualité se sont accrues, elles sont supérieures à celles de l'Europe et sont aussi élevées, sinon plus, qu'aux États-Unis. Les coûts de la main-d'oeuvre figurent parmi les plus bas de l'ensemble du monde développé (à cause de la faiblesse du dollar canadien, du niveau de cotisations sociales le plus bas de tous les principaux pays producteurs d'automobiles et – particulièrement par rapport aux États-Unis – du coût relativement plus bas des soins de santé).

Lorsque nous avons entamé les négociations en 1993, les augmentations de salaire dans l'ensemble de l'économie avaient atteint des planchers historiques (moins de 1 % par année), les gouvernements faisaient des compressions dans des programmes essentiels pour les travailleurs et nous faisions face à la perspective d'importantes pertes d'emplois – particulièrement chez GM, où nous risquions de perdre pas moins du quart de nos membres. Pourtant, nos revendications globales étaient probablement plus ambitieuses qu'elles ne l'avaient jamais été et, en dépit de la conjoncture, nos réalisations ont été nombreuses. À la CAMI, où nous avons bâti un syndicat solide même dans le contexte du système de production japonais, nous avons obtenu une convention modèle analogue à celles qui existaient chez les Trois Grands. Ces conditions contrastaient radicalement avec l'orientation donnée par les gouvernements, qui prêchaient la retenue et les concessions de la part des travailleurs, fermaient les yeux sur la question de la création d'emplois, menaçaient les régimes de pension, réduisaient la sécurité du revenu en diminuant les prestations d'assurance-chômage et sapaient les programmes sociaux.

Dans l'accord que nous avons négocié, l'augmentation de salaire moyenne correspondait à environ 2,4 % par année, les augmentations de salaire étaient un peu plus élevées pour les corps de métiers, les pensions augmentaient environ du tiers et, en reconnaissance du «revenu de remplacement», les corps de métiers ont revendiqué et obtenu des augmentations plus élevées de prestations de retraite. Nous avons limité les mises à pied de jeunes travailleurs liées à la restructuration de l'entreprise enprévoyant des forfaits de rachat d'emploi de 35 000 $ pour encourager les travailleurs âgés à prendre leur retraite. Et nous avons fait progresser le dossier de l'égalité en instituant des coordonnateurs de l'équité, des cours de sensibilisation au harcèlement, le droit de refuser de se soumettre au harcèlement et un poste de responsable de la défense des droits des femmes ayant pour fonction de venir en aide aux femmes qui sont victimes de harcèlement au travail ou de violence au foyer, ainsi qu'en donnant de l'expansion à notre programme de garderies.

Nous avons continué à réaliser des gains en ce qui concerne la réduction du temps de travail, notamment : 24 heures additionnelles de congé; l'action menée par les travailleurs de Ford pour amener les employés à prendre toutes les périodes de congé que nous avions négociées; et l'introduction de la journée de 7,5 heures à un salaire correspondant à 8 heures (dans le cadre de la mise sur pied d'un troisième quart de travail créateur d'emplois) à l'usine de mini-fourgonnettes de Chrysler.

Il est clair que les principaux enjeux lors de la prochaine série de négociations seront la sécurité (la lutte contre l'approvisionnement externe à rabais et la sous-traitance, la création d'un plus grand nombre de possibilités d'emplois par une réduction du temps de travail) et les conditions de travail (l'accélération de la cadence, les normes de production, la santé et la sécurité). C'est également le cas maintenant à la CAMI, où, pour la première fois, des licenciements permanents ont été annoncés. Dans tous nos lieux de travail, les employés éprouvent de vives frustrations à cause du contraste entre la réduction des effectifs et l'augmentation des profits et, en parallèle, l'accélération de la cadence et les pressions auxquelles les travailleurs font face et les gratifications accordées aux dirigeants responsables.

Chez GM Canada, les bénéfices ont atteint un niveau record. Les effectifs canadiens de GM, qui représentent 5 % de tous les travailleurs de l'entreprise au monde, sont à l'origine de 20 % des bénéfices de GM. La compagnie a réalisé 2,7 milliards $ après impôts au cours des trois dernières années. Ford, qui était auparavant déficitaire – largement parce que ses activités sont moins importantes que celles des autres compagnies au Canada et qu'elle ne bénéficie donc pas autant des coûts plus bas au Canada – est redevenue rentable l'an dernier. Chrysler, qui dépend du Canada davantage que les autres entreprises, enregistre d'incroyables profits à la hausse depuis quelque temps.

Trois dirigeants – les grands patrons de GM, Ford et Chrysler – se sont octroyé près de 60 millions $ en rémunération au cours des trois dernières années. Ce n'est pas si mal, à une époque où le reste d'entre nous se fait dire – et en fait l'expérience quotidiennement – que les temps sont durs.

LES FABRICANTS INDÉPENDANTS DE PIÈCES D'AUTOMOBILE

Le secteur des fabricants indépendants de pièces d'automobile comprend près de 32 000 membres des TCA, répartis entre 180 lieux de travail. Ce sont des travailleurs dans les sous-secteurs de l'estampage du métal, des composants en plastique, des pièces de moteur, des matrices et outils, des garnitures, de l'électricité, des roues et des freins, des volants et des pièces de suspension. L'emploi dans ce secteur a doublé entre le milieu des années 1970 et le milieu des années 1980, et représente une part croissante des emplois canado-américains dans le secteur indépendant des pièces. Aujourd'hui, le niveau de l'emploi est retombé au niveau connu au milieu des années 1980. La vigueur du secteur canadien trouve son origine dans l'accès à une forte concentration d'usines d'assemblage au Canada, les coûts moindres de la main-d'oeuvre au Canada et – comme le soulignait une récente étude gouvernementale – la qualité de la main-d'oeuvre.

En dépit des pressions exercées par les Trois Grands et les compagnies japonaises transplantées afin de réduire le prix payé aux fournisseurs, les grands fabricants de pièces du secteur se portent bien («Forte tendance à la hausse des valeurs des fournisseurs de pièces d'automobile à Wall Street», Ward's Automotive, le 29 avril 1996). Le problème, toutefois, c'est que la croissance et les succès des grands fabricants cachent un degré énorme de restructuration et de perturbations dévastatrices pour les travailleurs. Au cours de la dernière décennie, des centaines d'usines ont fermé leurs portes alors que d'autres prenaient de l'expansion et que de nouvelles usines étaient ouvertes. De plus, même si nous avons mis l'accent sur le secteur des pièces et intégré des dizaines de nouvelles usines aux TCA, le niveau de syndicalisation fléchit alors que les changements rapides se poursuivent.

Dans le contexte de l'insécurité qui plane aussi bien sur les emplois que sur la vigueur du syndicat dans le secteur, la solidarité avec les confrères et les consoeurs des Trois Grands est cruciale. En vue d'éviter un conflit possible quant aux emplois alors que les travailleurs des Trois Grands mettront de l'avant leurs préoccupations concernant l'approvisionnement externe, les délégués du secteur des pièces à la réunion d'avril du Conseil des TCA ont adopté la déclaration suivante :


Réagir à l'approvisionnement à rabais
et à la désyndicalisation dans le secteur

Travailler à mettre en place un code de conduite
établi par le syndicat pour les entreprises

La restructuration des entreprises dans l'industrie de l'automobile a engendré la perte d'emplois syndiqués et l'érosion des normes syndicales. Les compagnies ont confié des emplois à des entreprises de l'extérieur, ont fait appel à des sous-traitants et ont exploité l'insécurité en poussant des groupes de travailleurs à se faire concurrence pour obtenir des emplois en se nuisant les uns aux autres.

En luttant contre ce programme, les travailleurs luttent pour se défendre, limiter les dissensions et préserver la force du syndicat. Nous adhérons aux principes suivants :

Même si nous pouvons résister à la restructuration des entreprises et la limiter, nous n'y mettrons pas fin dans un avenir prévisible. S'il y a de l'approvisionnement externe, il devrait être confié à des lieux de travail syndiqués qui s'efforcent d'améliorer le niveau de vie de leurs membres. À cette fin, le syndicat :

Ce code de conduite, qui sera élaboré dans le cadre de discussions entre les membres de la base et entre les dirigeants dans tous les segments de l'industrie de l'automobile, comprendrait les éléments suivants :


L'AÉROSPATIALE

Les TCA représentent un peu plus de 10 000 travailleurs de l'aérospatiale, regroupés en 24 unités de négociation, ce qui est beaucoup plus bas que le sommet de 16 000 membres que nous avons atteint en 1990. Au cours des six ans qui se sont écoulés depuis, l'industrie mondiale de l'aérospatiale est tombée à son niveau le plus bas avec le ralentissement des commandes d'avions commerciaux et l'escalade des annulations, une décroissance massive dans le secteur de la défense et une restructuration généralisée des entreprises. Cela a entraîné la perte de milliers d'emplois. Toutefois, une reprise s'est amorcée depuis le début de 1995 dans l'industrie.

Le secteur de l'aérospatiale est composé de plusieurs sous-secteurs hétérogènes : l'aviation civile ou commerciale, les systèmes et produits d'avionique, les systèmes spatiaux et les réparations et révisions. Chaque sous-secteur compte jusqu'à trois paliers d'entreprises. Le secteur est dominé par les entreprises de premier palier : les grands assembleurs de cellules d'avion – Bombardier-de Havilland, McDonnell Douglas, Boeing – et les principaux intégrateurs de systèmes – Pratt & Whitney et Spar Aérospatiale. La majorité des membres des TCA dans le secteur est concentrée chez ces grandes entreprises; les autres sont répartis entre les entreprises de deuxième et de troisième palier.

C'est dans un contexte d'incertitude et de décroissance que le syndicat a engagé des négociations avec les grands de l'aérospatiale, à commencer par la section locale 2169/Boeing, à Winnipeg, en 1993. Nous sommes parvenus à conclure une bonne convention collective avec Boeing en dépit de la conjoncture difficile. Puis, cela a été le tour de Bombardier-de Havilland et des sections locales 112 et 673 en 1994; dans ce cas, les emplois et les régimes de retraite étaient nos principaux enjeux. À la suite d'une série de négociations incroyablement difficile – alors que l'employeur exigeait des concessions massives et que le nombre de nos membres était plus bas qu'il ne l'avait été depuis des années –, nous avons conclu une entente qui comprenait des emplois promis par l'entreprise pour le travail d'assemblage final du Global Express et du Dash-8-400, une incitation spéciale à la retraite pour les travailleurs touchés par la restructuration, une augmentation de 20 % des prestations de retraite de base, une augmentation de 3 $ des prestations de retraite de base pour les retraités, etc. Aujourd'hui, les perspectives chez Bombardier-de Havilland sont excellentes : le rythme de livraison des Dash-8 est stable, la nouvelle série Dash-8-400 est en train d'être mise au point, l'assemblage final des Global Express a débuté et le premier vol est prévu pour septembre 1996, et le nombre total de nos membres s'est accru à bien au-delà de 3 000 travailleurs.

La structure de base de la convention avec Bombardier-de Havilland a ensuite été appliquée, avec des variantes locales, aux travailleurs des sections locales 1967 et 673/McDonnell Douglas, de la section locale 510/Pratt & Whitney et ailleurs dans le secteur.

Cependant, la restructuration généralisée des entreprises dans le secteur de l'aérospatiale continue de faire des victimes parmi les travailleurs des TCA. Nos confrères et consoeurs de la section locale 3005/Bristol Aerospace ont perdu la moitié de leurs membres (environ 500 travailleurs) depuis le dernier Congrès sur la négociation collective, surtout à cause de l'annulation du programme de modernisation des CF-5. Et, alors que la compagnie tente de se repositionner comme fournisseur commercial de l'aérospatiale, nos membres en paient le prix sous forme de pertes d'emplois et d'insécurité. En outre, peu après une fructueuse série de négociations en 1995, les travailleurs de McDonnell Douglas font de nouveau face à un avenir très incertain. L'attribution du contrat de la nouvelle génération de MD-95 à Hyundai, en Corée du Sud, et l'annonce faite récemment par la compagnie de son intention de confier à des fournisseurs de l'extérieur la fabrication des petites pièces et le travail d'assemblage partiel, et de centraliser plusieurs fonctions de travail de bureau aux États-Unis, redessinent encore une fois le cadre des relations.

Ces difficultés illustrent le caractère inégal de l'évolution dans le secteur de l'aérospatiale, mais les perspectives générales sont positives : les commandes commerciales connaissent une reprise par suite du retour mondial à la rentabilité des compagnies aériennes; les grands de l'aérospatiale continuent d'être rentables; on prévoit que la demande de nouveaux avions s'accroîtra alors que les transporteurs aériens voudront remplacer leurs avions plus âgés équipés d'une technologie désuète. Pour ne mentionner qu'un exemple, Boeing a annoncé qu'elle prévoyait doubler ses achats auprès des fournisseurs canadiens de l'aérospatiale en 1996-1997. C'est dans ce contexte que nous engagerons des négociations en 1996 et au cours de la période à venir.
L'ÉLECTRICITÉ, L'ÉLECTRONIQUE ET LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

Le secteur est diversifié; il se compose de plus de 55 unités et regroupe plus de 9 000 membres. Les membres des TCA dans ce secteur fabriquent toute une gamme de produits, allant du matériel de commutation téléphonique aux turbines, aux ordinateurs personnels et aux appareils électroménagers. De plus, les membres de la section locale 2000 fournissent des services de télécommunications à longue distance sous la bannière d'Unitel.

Tout comme l'industrie de l'électricité et de l'électronique dans son ensemble, les membres TCA de ce secteur ont connu des années d'agitation considérable depuis l'avènement de l'Accord de libre-échange. Les entreprises ont transformé leur production et leurs stratégies d'investissement afin d'approvisionner le marché mondial plutôt que leurs clients domestiques canadiens. Il en a résulté une vague continue de fermetures d'usines et de mises à pied, qui s'est poursuivie même si d'autres secteurs canadiens de la fabrication (comme l'automobile et les pièces) ont pu retomber sur leurs pattes après l'ALE et la récession.

Le pire exemple à cet égard est celui de Northern Telecom : une grande entreprise soi-disant prospère qui s'est bâtie au pays, abritant plus de 3 500 travailleuses et travailleurs depuis 1993 (près de 30 % de ses employés de production canadiens), jusqu'au moment où elle a fermé, réduit ses effectifs ou vendu de nombreuses usines, y compris celles de London, de Brampton et, plus récemment, de Kingston. Cette compagnie a profité de contrats de premier choix pour l'approvisionnement du système canadien de téléphonie; mais après coup, le marché canadien – tout comme les travailleurs canadiens – méritent à peine une pensée. D'autres employeurs syndiqués par les TCA ont également contribué à la débâcle : pensons notamment aux fermetures d'usines chez Alcatel (section locale 521) et Westinghouse (section locale 504). Le nombre total d'emplois du secteur canadien de la production électrique et électronique a été réduit du tiers entre 1989 et 1995 (une perte de 50 000 emplois), et ce nombre continue de diminuer.

D'un côté plus positif, les usines établies au Canada sont devenues plus concurrentielles, même dans un environnement mondialisé, grâce à la faiblesse du dollar canadien et à la grande productivité; de plus, on observe des signes avant-coureurs d'une reprise dans certains secteurs. Par exemple, CAMCO a annoncé qu'elle fabriquerait une nouvelle ligne d'appareils électroménagers, ce qui se traduira par de nouveaux emplois pour les membres de la section locale 504 à Hamilton, et les emplois continuent d'augmenter dans le secteur canadien de la fabrication d'ordinateurs, largement non syndiqué. Néanmoins, pour que le Canada puisse se ménager une part avantageuse et rentable de cette industrie vitale, une véritable reprise dans ce secteur très éprouvé ne se produira que lorsque des politiques efficaces seront mises en oeuvre (par exemple, des mesures visant à promouvoir le contenu canadien des futurs projets de «super-inforoutes»).

Malgré cet environnement économique en général négatif, nous avons remporté de bons succès à la table de négociation à la suite du Congrès de 1993 : les membres des TCA chez Northern Telecom et Générale Électrique (sections locales 524 et 512) ont conclu des conventions collectives apportant des améliorations dans divers domaines, notamment les régimes de retraite, les encouragements à la retraite anticipée, les salaires et les avantages sociaux.
LES ALIMENTS ET BOISSONS

Le secteur des aliments et boissons regroupe environ 4 000 membres (secteur des pêches non compris) des TCA répartis entre 43 unités de négociation. Dans ce secteur, nos membres produisent une vaste gamme de biens divers : depuis la bière chez Molson et Connors jusqu'au sel fin et au sel gemme à la Société canadienne de sel; depuis les spiritueux chez Hiram Walker et Seagram jusqu'au chocolat chez Nestlé; depuis l'eau embouteillée chez Eau de source Boischatel jusqu'aux fruits, légumes et soupes en conserve chez Nabisco; depuis le Coca-Cola chez TCC Bottling jusqu'aux céréales à la nouvelle unité des TCA chez Quaker Oats, à Peterborough (Ontario).

Le syndicat a réalisé des gains à la table de négociation dans l'ensemble du secteur et a enregistré des succès notables dans le domaine des régimes de retraite, ainsi que dans d'autres domaines, aux sections locales 1959 et 240/Société canadienne de sel, à la section locale 385/TCC Bottling (après que les travailleurs eurent été forcés de faire la grève), à la section locale 2027/Hiram Walker et à la section locale 2098/Seagram. Une série de négociations difficile est actuellement en cours avec Les Entreprises Nestlé, où nos membres sont résolus à faire des progrès sur plusieurs fronts, notamment dans le domaine clé des régimes de retraite, alors que la compagnie exige que l'on prenne un virage continental.

Pour ce qui est de l'avenir, les questions liées au commerce, le changement technologique et la restructuration des entreprises continueront d'engendrer de l'incertitude chez les travailleurs et, en conséquence, la sécurité d'emploi, la sécurité du revenu et l'amélioration des régimes de retraite seront des revendications clés dans le cadre des négociations collectives.
L'ÉQUIPEMENT LOURD

Les TCA représentent plus de 10 000 membres qui fabriquent et réparent de l'équipement lourd traditionnel : camions lourds de route et tous terrains, autobus, locomotives, équipement de transport urbain rapide et wagons de chemins de fer, tracteurs et outillage agricole, moteurs diesel, remorques et machines de construction.

Paccar a récemment annoncé la fermeture de l'usine Kenworth, le rentable fabricant de camions lourds dont le siège social se trouve aux États-Unis. L'usine de Sainte-Thérèse, employant plus de 800 membres des TCA, était une entreprise rentable pour Paccar. Mais l'érosion des dispositions du Pacte de l'automobile, tout d'abord par l'Accord de libre-échange canado-américain, puis par l'ALENA, a procuré à Paccar la souplesse patronale dont elle avait besoin pour regrouper ses activités au Mexique et aux États-Unis sans être frappée de sanctions. Les TCA ont réclamé des politiques commerciales protégeant le marché pour les entreprises qui s'engageaient à maintenir des emplois au Canada. Au moment d'écrire ces lignes, les discussions se poursuivaient avec Paccar à propos de l'avenir de l'usine.

Le nombre de membres des TCA dans le secteur de l'équipement lourd s'est accru entre 1993 et 1995; l'augmentation était répartie de façon relativement uniforme entre les unités, mais, comme d'habitude, cette hausse était cyclique et les mises à pied ont maintenant repris. Les ventes et la production de camions lourds, jusqu'à la fin de 1995, ont grimpé à un niveau record, les ventes de tracteurs et d'autobus étaient en hausse et régulières, et le travail se poursuivait dans le domaine des wagons de chemins de fer et de métro. Même si une bonne part de cette croissance a fléchi, particulièrement en ce qui concerne les camions et l'équipement agricole, il y a quelques éclaircies au tableau. Par exemple, New Flyer Industries, à Winnipeg, a connu une bonne année 1995 et prévoit que l'année 1996 sera encore meilleure; la compagnie a annoncé une expansion de 67 000 pieds carrés de son usine. Nos membres à l'emploi de la compagnie entameront des négociations plus tard cette année.

Sur le front des négociations, les conditions types des TCA ont été étendues à l'extérieur du secteur de l'automobile pour être appliquées chez Navistar en 1993. Cette convention vient à échéance en octobre de cette année. Les travailleurs de la section locale 2224 chez Versatile ont obtenu d'importantes améliorations dans les domaines des régimes de retraite, de la retraite anticipée et de la sécurité du revenu après avoir fait la grève en 1994. Les membres de la section locale 275 chez John Deere ont résisté aux concessions de type américain exigées par l'entreprise et ont négocié une convention qui comprenait des améliorations aux régimes de retraite et aux conditions de la retraite anticipée. D'autres conventions dans le secteur ont été renouvelées avec succès et comportaient des améliorations dans la plupart des domaines.

LES TRANSPORTS

Le syndicat des TCA est le syndicat le plus diversifié dans le secteur des transports. Il représente des travailleuses et des travailleurs des différents modes de transport : ferroviaire, aérien, maritime, par camion et par autobus.
LE SECTEUR FERROVIAIRE

Dans le passé, les chemins de fer ont joué un rôle clé dans l'unification du Canada, la création d'emplois et le développement de l'économie nationale. Mais, ces dernières années, les sociétés ferroviaires ont subi une décroissance massive. Depuis 1986, les sociétés ferroviaires ont supprimé plus de 10 000 km de voies ferrées. En 1994, CP Rail a cessé toute activité à l'est de Sherbrooke (Québec). De pair avec ces pertes d'emplois dévastatrices, on compte la fermeture d'importants ateliers à travers le pays. Le nombre d'emplois dans les entreprises ferroviaires est passé de 85 000 en 1986 à 56 000 en 1994 et les suppressions d'emplois se poursuivent. Le gouvernement libéral a poursuivi le programme du précédent gouvernement conservateur et a adopté des lois en vue de privatiser et de déréglementer le système des transports.

À la suite des recommandations du rapport Nault, le CN a été privatisé en 1995. Outre une disposition générale qui limite la propriété à 15 % pour un même actionnaire, aucune restriction n'a été imposée à la propriété étrangère. En 1995 également, le gouvernement a adopté la Loi sur les transports au Canada, qui donne aux sociétés ferroviaires plus de liberté pour ce qui est de l'abandon ou de la vente des lignes de chemin de fer. La LTC ouvre le chemin qui permettra à un CN privatisé de rationaliser ses opérations dans l'intérêt de ses actionnaires. Pour aider encore davantage les exploitants de lignes secondaires qui réclament des sociétés ferroviaires non syndiquées, le gouvernement conservateur de l'Ontario a modifié la Loi sur les relations de travail pour annuler les obligations du successeur envers les travailleurs syndiqués lorsqu'une partie du réseau fédéral est vendue et devient de compétence provinciale.

Dans le budget de 1995, le gouvernement fédéral a réduit les subventions au transport ferroviaire des passagers, a supprimé les subventions au transport de marchandises dans les provinces de l'Atlantique et a poursuivi la déréglementation du transport des céréales. Il a mis fin au tarif du Nid-de-Corbeau et le tarif appliqué au transport des céréales en vertu de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest sera graduellement éliminé d'ici l'an 2000. Auparavant, les dispositions de cette loi faisaient en sorte que les céréales soient transportées par le réseau ferroviaire canadien jusqu'aux ports canadiens. Des milliers d'emplois canadiens sont en jeu à cause de l'implantation du nouveau régime.

Les TCA représentent 17 000 membres employés dans le secteur du rail. En décembre 1993, les conventions collectives conclues avec le CN, le CP, VIA et ONR venaient à échéance. La vive concurrence engendrée par la déréglementation, la récession économique et les compressions gouvernementales dans les domaines des subventions aux transports ont rendu les négociations collectives extrêmement difficiles. Les employeurs se sont présentés à la table de négociation en exigeant des concessions. En particulier, les sociétés ferroviaires réclamaient l'annulation des clauses relatives à la sécurité d'emploi (SE) négociées en 1985. Selon ces clauses, les compagnies de chemin de fer doivent maintenir la rémunération des employés qui ont de l'ancienneté si les pertes d'emploi sont attribuables à une restructuration amorcée par l'employeur.

Le conciliateur désigné par le gouvernement a réprimandé les employeurs parce qu'ils avaient démesurément exagéré les problèmes posés par la SE et recommandait que le syndicat et les patrons continuent de négocier. Néanmoins, lorsque les négociations ont été rompues, le gouvernement fédéral a adopté une loi sur le retour au travail et a nommé des commissaires pour la médiation et l'arbitrage des conflits au CN, à CP Rail et à VIA.

Les commissaires ont modifié la sécurité d'emploi au CN et au CP : l'admissibilité et la durée ont été limitées, le montant a été réduit et les exigences visant la réinstallation ont été étendues. Chez VIA, la SE a été temporairement suspendue jusqu'à ce que l'employeur supprime 400 emplois. Il y a eu des améliorations sur le plan des salaires et des avantages sociaux.

Chez Ontario Northland, les syndicats de métiers d'atelier associés ont fait la grève pendant près de quatre mois. On est parvenu à une entente qui comportait des améliorations salariales et n'apportait aucun changement à la SE. Les conventions viennent à échéance en 1995 chez BCR et en 1996 chez ACR.

Le gouvernement fédéral soutient que la sécurité économique des Canadiens réside dans un marché des transports déréglementé. Mais, depuis le début de la déréglementation en 1987, les travailleurs du secteur ferroviaire font face à de l'insécurité, à une charge de travail accrue, à des salaires qui stagnent et à une détérioration de leurs rapports avec leur employeur.

Résultats financiers pour 1995
(en millions de dollars, sauf pour le ratio d'exploitation)

Recettes d'exploitation Bénéfice d'exploitation Résultat net Ratio d'exploitation
CN 4 098 (1 013) (1 085) 89%
CP 3 757 360,3 (608,2) 90%
VIA (1994) 176,4 (332,2) (39,3) S/O
ONR 73,7 1,6 1,6 98%


Notes:
* BC Rail a fait état d'un bénéfice net de 47 millions $ pour 1995 (montant non vérifié) et d'un ratio d'exploitation de 80% sur 5 ans.
* Les données relatives à ONR et à VIA comprennent les remboursements gouvernementaux.

Le gouvernement fédéral prétend que la sécurité économique des Canadiens réside dans un marché déréglementé des transports. Mais depuis le début de la déréglementation, en 1987, les travailleurs des chemins de fer n'ont connu que de l'insécurité, des charges de travail accrues, des salaires stagnants et la détérioration de leurs relations avec l'employeur.
LES COMPAGNIES AÉRIENNES

Les TCA représentent environ 8 000 travailleurs des lignes aériennes. Nos membres travaillent dans le domaine des services à la clientèle comme l'enregistrement des bagages, les réservations, le fret, la manutention des bagages, les horaires des équipages, l'entretien et les industries connexes comme les stationnements d'aéroport et les services alimentaires à bord des avions.
Les mesures législatives

Le gouvernement fédéral a poursuivi le programme conservateur de privatisation et de déréglementation de l'industrie des transports. Ces politiques gouvernementales se sont traduites par de l'insécurité et des pertes d'emplois de même que par une diminution des salaires et des avantages sociaux.

Dans le cadre de cette nouvelle politique, Air Canada a instauré des vols sur la route de Hong Kong, où les Lignes aériennes Canadien sont le transporteur principal. Air Canada s'est aussi vu attribuer la route d'Osaka (Japon) en 1991, peu après avoir renoncé à sa lutte juridique contre les Lignes aériennes Canadien à propos du système informatisé de réservations Gemini.

L'accord aérien bilatéral entre le Canada et les États-Unis a été signé en février 1995. Les nouvelles politiques libéralisées intensifieront la concurrence dans le secteur du transport aérien, d'autant plus que les transporteurs canadiens entreront en concurrence avec les immenses méga-transporteurs américains, qui bénéficient d'économies d'échelle, de plaques tournantes et d'années d'expérience en milieu déréglementé.

Les dispositions législatives actuelles qui limitent la propriété étrangère à 25 % demeurent en vigueur en dépit des discussions gouvernementales antérieures sur l'augmentation de cette limite. Quand AMR a investi dans 25 % du capital-actions de PWA, c'était la première fois qu'un transporteur canadien éprouvant des difficultés économiques cherchait à obtenir un niveau si élevé d'investissements étrangers. Dans l'avenir, les transporteurs aériens pourraient exiger un relèvement du plafond imposé à la propriété étrangère, et les gouvernements pourraient très bien considérer cela comme une façon de parvenir rapidement à une solution, au lieu de régler le problème fondamental de l'industrie du transport aérien : l'instabilité financière engendrée par la vive concurrence issue de la déréglementation.

Actuellement, Transports Canada possède ou exploite 150 aéroports. Selon la politique nationale des aéroports adoptée en 1994, l'exploitation des 26 aéroports les plus achalandés du Canada sera commercialisée. La commercialisation signifiera l'application de mesures de réduction des coûts qui auront des effets sur la sécurité et sur les conditions de travail des employés des aéroports, et qui pourraient accroître les frais imputés aux voyageurs. Chez Horizon Air, en Colombie-Britannique, les travailleurs ont été soumis à de nouvelles restrictions durant un conflit de travail. Les lignes de piquetage ont été confinées à des endroits précisés. Peu après la privatisation de l'aéroport de Vancouver, une «taxe d'aéroport» de 10 $ a été instituée – signe du fait que les frais d'entretien seront transmis aux usagers.

Les négociations collectives ont été difficiles dans le secteur du transport aérien. Air Canada et Lignes aériennes Canadien tentent d'accroître leur capacité sans faire augmenter leurs coûts. Ce sont les travailleurs qui en paient le prix.

Lorsque les Lignes aériennes Canadien ont exigé des concessions salariales de leurs employés en 1992, Air Canada s'est présenté à la table de négociation en exigeant également des concessions salariales. En juillet 1995, les Lignes aériennes Canadien ont annoncé qu'elles entendaient négocier des règles de travail plus souples et économiser 125 millions $ dans les coûts d'exploitation. Les Lignes aériennes Canadien pourraient alors accroître leur capacité dans le milieu concurrentiel des ciels ouverts. Un mois plus tard, Air Canada réagissait en faisant l'annonce d'une économie de 150 millions $ dans les coûts, réalisée grâce à l'attrition et à un gel de l'embauchage. De même, Air Canada annonçait des plans visant à accroître sa capacité, à commencer par 20 nouvelles destinations aux États-Unis.

Les travailleurs des lignes aériennes ont vu leurs conditions de travail se détériorer même si les entreprises ont réalisé des gains de productivité substantiels ces dernières années. Les employés travaillent beaucoup plus, sans amélioration correspondante de leur salaire ni de leurs avantages sociaux.

Il y a eu certaines réalisations à la table de négociation. Les programmes de retraite progressive ont connu du succès chez Air Canada et Lignes aériennes Canadien. Le seul autre programme des TCA est un projet pilote négocié en 1993 chez les Trois Grands de l'automobile.

Les grands transporteurs aériens ont également accepté le régime des avantages sociaux au titre des soins de santé pour les conjoints de même sexe qui sera mis en place chez les transporteurs partenaires. À ce sujet, une contestation déposée par les TCA est présentement soumise à l'examen du tribunal canadien des droits de la personne et met en cause le régime de retraite d'Air Canada.

Résultats financiers de 1993 à 1995
(y compris les transporteurs partenaires)
(en millions de dollars) 1995 1994 1993
Air Canada


Recettes d'exploitation 4 507 4 024 3 598
Bénéfice d'exploitation 275 244 1
Bénéfice net 52 129 (326)
Canadien


Recettes d'exploitation 3 141 2 965 2 754
Bénéfice d'exploitation (26,7) 55,0 (65,0)
Bénéfice net (194,7) (53,7) (292)

LE CAMIONNAGE

Les TCA représentent 4 600 membres dans le secteur du transport routier, y compris les services de messagerie. Le plus important groupe est, de loin, celui des employés de Loomis, qui compte 2 000 membres. Parmi les autres groupes qui comprennent plus de 200 membres, on compte ceux de Reimer Express, de Dolphin Delivery et de Meyers Transport.

L'industrie du camionnage au Canada est dans une certaine mesure revenue à la normale après les conditions tumultueuses qui avaient régné immédiatement après la déréglementation en 1988. L'aspect le plus important de la déréglementation dans ce secteur a été la modification du critère d'admission pour les transporteurs interprovinciaux, qui est passé de «la commodité et la nécessité publiques» à un critère basé sur le simple fait d'être «prêt, apte et disposé». Cette «inversion du fardeau de la preuve» – auparavant, le nouveau transporteur devait prouver que son nouveau service était nécessaire, alors qu'à présent, on doit accorder le permis si l'on ne peut pas prouver que le transporteur n'est pas apte – a engendré un afflux considérable de nouveaux transporteurs. La norme d'aptitude appliquée n'était pas la plus élevée et la situation a été aggravée par l'approbation trop expéditive de l'arriéré de demandes qui s'était accumulé au cours des premières années de la déréglementation.

La surcapacité générale et la vive concurrence dans les prix se sont traduites par une vague de faillites et un processus de fusions et d'acquisitions. Dans le sous-secteur des messageries, l'une des importantes actions récentes a été l'achat, par la Société canadienne des Postes de Purolator – entreprise de messagerie de premier plan. (Comme on aurait peut-être pu s'y attendre, les autres services de messagerie se sont inquiétés de la perspective d'un interfinancement par la Société canadienne des postes à partir de ses activités postales principales, ce qui risquait de nuire à leur situation concurrentielle.)

Le «cannibalisme» commercial qui a régné dans le secteur a engendré un énorme degré d'insécurité chez les employés et des pertes d'emplois. Les salaires réels dans le secteur ont diminué davantage que dans l'ensemble de l'économie. Les prises de contrôle par les employés – tout particulièrement, l'achat du réseau de camionnage du CP par un groupe de gestionnaires, de superviseurs et d'employés sous la bannière d'Interlink – ont pataugé péniblement. Le tumulte dans l'industrie a même ébranlé une partie du secteur des affréteurs, pour qui la déréglementation était largement conçue comme une façon d'améliorer la compétitivité.

Le pilier jumeau de la déréglementation dans le secteur a été l'entrée en vigueur de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, puis l'élargissement de sa portée avec la conclusion de l'ALENA. Ce qui en a résulté, c'est un passage marqué du trafic est-ouest à une structure de transport nord-sud. Cela s'est accompagné d'une présence accrue, au Canada, des immenses compagnies de camionnage possédées par des intérêts américains. Un enjeu en particulier a eu des répercussions négatives sur les camionneurs canadiens : c'est l'exigence, dans le cadre de l'ALENA, de se soumettre à des tests obligatoires de dépistage de drogues comme condition préalable au transport de charges de l'autre côté de la frontière.

Malgré la relative stabilité actuelle dans l'industrie, les employeurs continuent d'adopter une ligne dure dans les négociations. Nos 800 membres chez Loomis, en Colombie-Britannique, ont dû déclencher une grève en avril contre un employeur difficile, et on prévoit une âpre lutte en août chez Reimer Express. Les principaux enjeux chez Loomis – et ils sont sans doute représentatifs des défis qui se posent ailleurs dans le secteur – comprenaient les salaires, l'équité salariale, les garanties pour les exploitants propriétaires, la propriété du travail et le changement technologique. Dans ce dernier domaine du changement technologique, par exemple, les répercussions négatives sur les emplois de bureau engendrées par l'utilisation des petits ordinateurs portatifs de saisie de données suscitent de graves préoccupations dans l'ensemble du secteur.
LE TRANSPORT MARITIME

Les TCA représentent 2 700 travailleurs dans le secteur du transport maritime. Il s'agit d'un secteur qui n'est représenté que depuis récemment par les TCA, puisque ces travailleurs ont été intégrés aux TCA par suite de la fusion avec l'ancienne FCCET&AO. Notre principal groupe de membres dans le secteur est celui des travailleurs des services de traversier sur la côte Est – en particulier, les travailleurs de Marine Atlantique et de Northumberland Ferries. Le deuxième groupe en importance est celui des membres qui travaillent pour l'Administration de la Voie maritime du Saint-Laurent au Québec et en Ontario. Dans la région des Grands Lacs, nous représentons également les employés de navigation d'ULS (Upper Lakes Shipping). Enfin, nous représentons quelques plus petits groupes qui fournissent des services liés au transport maritime, comme le ravitaillement en carburant et le remorquage.

Le secteur maritime est le dernier des modes de transport à être soumis à la mode actuelle de privatisation et de commercialisation. Sous le couvert d'une nouvelle politique maritime, le gouvernement fédéral est en train de mettre en oeuvre une orientation qui comprend notamment l'imposition de frais aux utilisateurs dans le secteur du transport maritime. Cette politique touche tous les segments du secteur maritime – l'administration portuaire, les services de pilotage et de garde côtière, les services de traversier et l'exploitation des voies maritimes. Nos membres de la Voie maritime du Saint-Laurent et des services de traversier de la côte Est sont gravement touchés. L'Administration de la Voie maritime du Saint-Laurent fonctionne sur des bases quasi-commerciales depuis un certain temps. Elle s'est vu refuser des transferts de capitaux du gouvernement fédéral et on lui a commandé de se fier à ses propres ressources internes. Il en a résulté un mélange de détérioration des installations, d'augmentation excessive des droits de péage et d'occasions ratées d'afflux d'un nouveau trafic qu'aurait permis l'augmentation de la capacité d'accueillir de plus gros navires dans le réseau. Les pressions à l'autosuffisance ont entraîné une détérioration de la relation de négociation collective, avec d'importantes pertes d'emplois et la présence, à la table de négociation, d'un employeur cherchant à faire en sorte que les employés subventionnent le système par leurs concessions.

La proposition actuellement mise de l'avant consiste à confier l'administration de la Voie maritime à un consortium d'exploitants privés regroupés sous la bannière d'une société à but non lucratif. La seule conclusion possible est que cela nuira à la relation de négociation collective, car ces exploitants privés appliqueront des mesures encore plus brutales axées sur la rentabilité et la réduction des coûts.

Nos membres des services de traversier de la côte Est ressentent les pénibles effets de la manie de réduction des coûts et de commercialisation. Dans le budget fédéral de 1995, les subventions annuelles à Marine Atlantique ont été réduites de près de 40 %, ce qui se traduira par des pertes d'emplois occasionnées par la réduction du service à Yarmouth. Les employés de Marine Atlantique – et particulièrement ceux du service de l'Île-du-Prince-Édouard – sont également sacrifiés du fait que le gouvernement fédéral a donné le feu vert à la construction du pont reliant l'Î.-P.-É. et le continent, en dépit d'un processus entièrement vicié d'examen des conséquences environnementales de ce projet. Environ 425 membres des TCA auront perdu leur emploi d'ici la fin de 1997 à cause du nouveau pont. La négociation d'une entente de fermeture avec Marine Atlantique a été un processus difficile et le dossier est maintenant entre les mains d'un arbitre. Les négociations ont été rendues encore plus complexes par la participation de trois autres syndicats.

DÉCLARATION DES TCA SUR LES TRANSPORTS ET L'ENVIRONNEMENT


Le smog toxique et le changement climatique

La pollution de l'air dans les villes et le changement climatique planétaire sont de graves problèmes.

La pollution de l'air clairement perceptible : le smog et le brouillard brunâtre qui planent au-dessus des zones urbaines sont visibles à l'oeil nu et il est manifeste que l'asthme, les autres maladies du système respiratoire et les maladies du coeur sont plus fréquents et s'aggravent lorsque les gens doivent respirer un air de plus en plus pollué.

Le changement climatique est moins perceptible car il se produit graduellement; pourtant, si le réchauffement planétaire se poursuit, nous pourrions être frappés par une catastrophe dans un avenir pas si lointain. L'effet de serre provoqué par l'émission d'une quantité excessive de dioxyde de carbone lors de l'utilisation des combustibles fossiles réchauffera la Terre. Au Canada, les répercussions de cet effet de serre sur le niveau des eaux, la capacité de production hydroélectrique, les pêches et l'agriculture seront désastreuses.

Ces deux problèmes sont directement liés aux transports car, lorsque nous nous servons de nos voitures, nous consommons des combustibles fossiles et nous émettons ainsi des polluants qui sont à l'origine du smog toxique et du changement climatique.

Afin de réduire ces émissions nocives, nous devons prendre plusieurs mesures et, notamment, nous servir de combustibles propres et de véhicules propres.

Les combustibles propres

Le meilleur genre de combustible est celui qui ne produit aucune émission nocive. Ces sources d'énergie qui ne dégagent aucune émission sont l'électricité et l'hydrogène, lequel brûle si proprement qu'il ne produit que de l'eau. Certains trains, métros et tramways, de même que des chariots élévateurs à fourches sont mus à l'électricité. Les véhicules de transport sont alimentés à partir de rails ou de câbles aériens. Les chariots élévateurs à fourches sont alimentés par une batterie d'accumulateurs. General Motors est le premier des Trois Grands à avoir lancé sur le marché une voiture particulière fonctionnant à l'électricité. À l'heure actuelle, les voitures électriques sont coûteuses, mais l'expansion du marché viendra en réduire le coût pour les consommateurs. Nos membres fabriquent des autobus alimentés par des piles à hydrogène, que l'on commence tout juste à utiliser comme moyens de transport public. Puisqu'ils en sont encore au stade expérimental, ils sont coûteux.

D'autres sources d'énergie comme le gaz naturel et le propane produisent moins d'émissions nocives que l'essence. À l'heure actuelle, nos membres fabriquent des véhicules alimentés par chacune des sources d'énergie de rechange.

Pour les véhicules existants qui fonctionnent à l'essence et au diesel, nous avons besoin de programmes obligatoires de vérification des émissions. De plus, nous avons besoin de règlements prescrivant des teneurs en soufre plus basses pour le carburant diesel. Et nous devons veiller à ce que les batteries d'accumulateurs des voitures électriques soient recyclées selon des méthodes respectueuses de l'environnement.

Les voitures propres

Aujourd'hui, les véhicules sont plus sûrs, plus confortables, plus propres et ont un plus haut rendement énergétique que jamais auparavant. Mais les voitures sont si grosses et si lourdes qu'il faut beaucoup plus d'énergie pour les déplacer que pour déplacer les passagers qu'elles transportent. Afin de réduire le gaspillage d'énergie et la consommation excessive de combustibles fossiles, nous avons besoin de voitures plus légères.

Notre syndicat doit étudier les solutions de rechange possibles pour la conception et le mode de propulsion des véhicules, comme les moteurs hybrides électricité-essence et l'utilisation de matériaux composites, afin que nous puissions comprendre les répercussions de ces nouvelles technologies sur l'environnement et que nous fassions en sorte, si ces solutions de rechange sont adoptées, que nos lieux de travail soient convertis à la fabrication de ces nouveaux produits et matériaux.

Nous avons besoin que le gouvernement mette en place des programmes de mise à la ferraille tels que le nouveau système implanté en Colombie-Britannique, qui vise à faire quitter la route aux vieilles voitures émettant beaucoup de polluants. Dans le cas des véhicules récupérables, nous avons besoin de programmes de démantèlement et de recyclage des voitures afin que les pièces puissent être recyclées et réutilisées.

Il nous faut des lois

Avec le temps, il nous faudra remplacer le parc automobile actuel par des véhicules qui ne dégagent aucune émission et nous devrons insister pour que ces véhicules soient fabriqués par nos membres. Durant la période de transition, il devra y avoir un parc automobile mixte, composé de certains véhicules ne produisant aucune émission et d'autres produisant un niveau d'émissions plus faible. Tout au long de cette période, nous devrons faire en sorte que nos membres reçoivent la formation requise pour pouvoir fabriquer ces nouveaux produits et que nos lieux de travail actuels soient convertis pour être en mesure de les fabriquer. Afin qu'il y ait un marché suffisant pour réduire les prix à la consommation, il faut que des lois soient le catalyseur de ces changements. Nous devons appuyer l'adoption de lois et de règlements comme le règlement sur les véhicules propres et les combustibles propres entré en vigueur en Colombie-Britannique. Ces lois et règlements devraient être adoptés par le gouvernement fédéral et s'appliquer à l'ensemble du pays, de sorte que tous les Canadiens soient protégés et que des véhicules appropriés pour toutes les provinces soient fabriqués au Canada.

Nous ne pouvons pas barrer la route aux changements technologiques progressistes. Nous pouvons soit prendre les devants et orienter la technologie dans une voie bénéfique pour nos membres, soit retarder les innovations – sous peine de les voir, à la longue, mettre nos membres au rancart.

L'engorgement et l'aménagement urbain

Avec l'augmentation du nombre de voitures utilisées dans les zones urbaines, les rues et les voies rapides deviennent de plus en plus engorgées. Cet engorgement intensifie les problèmes locaux de pollution, de sécurité et de bruit. À la longue, il devient difficile de circuler dans les zones urbaines, et désagréable et malsain d'y vivre. Pourquoi la construction d'un nombre sans cesse croissant de grandes routes est-elle considérée comme un investissement par le gouvernement alors qu'elle draine si manifestement les ressources publiques?

Au début du siècle, les habitants des villages et des villes marchaient beaucoup plus car ils habitaient près des lieux où ils travaillaient et faisaient leurs achats. Une densité urbaine plus élevée avait pour effet de rendre efficaces et peu coûteux les réseaux de transport public comme les tramways électriques. Depuis la Seconde Guerre mondiale, cependant, les villes canadiennes se sont développées différemment et, avec l'étalement des banlieues, les gens en sont venus à avoir besoin de voitures pour se déplacer. À cause de la faible densité démographique des banlieues, les réseaux de transport en commun y sont inadéquats.

Nous devons réaménager nos villes de manière à vivre plus près des endroits où nous travaillons et faisons nos achats. Nous devons accroître la densité urbaine pour créer de véritables collectivités, et non des collectivités-dortoirs. Nous devons pouvoir nous rendre en toute sécurité, à pied ou à vélo, là où nous voulons aller. Nous devons faire en sorte que les transports en commun soient abondants et économiques. L'utilisation des deniers publics pour aider financièrement le transport en commun ne devrait pas être considérée comme une subvention, mais bien comme un investissement dans l'épanouissement de la collectivité, du milieu urbain et de la planification urbaine. Nous devons appuyer le covoiturage afin que des groupes de travailleurs puissent se servir du même véhicule pour se rendre ensemble au travail.

Le transport de marchandises

À cause de la déréglementation, il y a de plus en plus de camions, de plus en plus lourds, qui transportent des marchandises sur nos grandes routes; pourtant, nos membres de l'industrie du camionnage ont encore du mal à gagner leur vie. Nous avons besoin d'une re-réglementation de l'industrie du camionnage. Nous devons nous montrer résolus à accroître le transport de marchandises par chemin de fer. Nous avons besoin de systèmes intermodaux afin que la plus grande partie du transport des marchandises se fasse par chemin de fer ou par eau, et que les livraisons locales soient assurées par les camions. Le transport ferroviaire réduit l'engorgement des routes et a un rendement énergétique beaucoup plus élevé que les camions.

Nous avons réclamé des compagnies qu'elles travaillent à mettre au point des véhicules légers, à haut rendement énergétique, non polluants et sûrs il y a plus de 40 ans (en 1948), mais les compagnies ont rejeté ce conseil. [...] Après la première crise de l'énergie [...], leurs investissements et leurs compétences techniques ont permis de réduire de 90 % les principaux polluants et de doubler le rendement énergétique; [...] dans l'avenir, les changements devront être plus radicaux et les adaptations devront être plus substantielles.
- Déclaration des TCA sur les transports, 1992

Nos emplois

Les TCA doivent être le fer de lance des revendications concernant la protection de nos emplois dans le secteur des transports. Si les nouvelles technologies viennent transformer la nature des produits que nous fabriquons ou la façon dont nous les fabriquons, nous devons veiller à ce que nos membres reçoivent la formation requise pour assumer ces nouvelles fonctions et nous devons faire en sorte que les lieux de travail existants soient convertis à la fabrication de ces nouveaux produits.

Conclusion

Nous sommes un syndicat des transports. Nos membres fabriquent, entretiennent et conduisent des voitures, des camions, des autobus, des rames de métro, des trains de passagers et de marchandises, des bateaux, des navires et des avions. Nous voulons conserver nos bons emplois, fabriquer des produits et travailler avec des produits qui contribuent à la société au lieu de lui nuire. Nous exigeons que les entreprises pour lesquelles nous travaillons fabriquent, entretiennent et utilisent des produits respectueux de l'environnement et socialement responsables. Tout en protégeant l'environnement dans lequel nous vivons tous, cela assurera la viabilité de l'industrie canadienne de transports et la sécurité de nos emplois.

Lors des négociations, nous devons obtenir la création d'un fonds, calculé en cents par heure travaillée, pour l'étude des questions environnementales et les interventions dans ce domaine.

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