LES RESSOURCES

Les pêches de l'Atlantique

Le SPATA/TCA représente plus de 20 000 membres à Terre-Neuve et au Labrador, soit de 10 000 à 11 000 travailleurs dans une cinquantaine d'usines de transformation du poisson, un nombre analogue de pêcheurs côtiers dans environ 500 localités et 1 000 pêcheurs en haute mer. En outre, les TCA représentent 1 100 travailleurs d'usine en Nouvelle-Écosse et 600 pêcheurs en haute mer.

"Nous voulons du travail, pas des allocations de chômage
- ce sont un poison pour un peuple indépendant et industrieux comme le nôtre"
- Comité sur le chômage de Terre-Neuve, 1935

Sous ces chiffres, toutefois, se cache une triste histoire de stress, d'anxiété et d'insécurité, de fermetures d'usines et d'absence de solutions.

Partout dans la région de l'Atlantique, mais surtout à Terre-Neuve, des collectivités entières sont menacées par le déclin dramatique des stocks de poissons de fond (qui s'alimentent au fond de la mer), soit la morue, la plie, la sébaste et la sole.

Moins de la moitié des 50 usines de transformation du poisson représentées par le SPATA/TCA seront en activité en 1996 et bon nombre de celles qui survivront fonctionneront à capacité réduite. Moins de 200 des 1 000 pêcheurs à bord des navires de haute mer possédés par les entreprises auront la possibilité de travailler cette année. Les pêcheurs côtiers bénéficient d'un peu plus de souplesse, mais bon nombre d'entre eux resteront à terre ou pêcheront dans des conditions fortement limitées.

L'effondrement de la pêche du poisson de fond, qui était déjà largement en voie de se produire en 1990, a atteint son point critique avec la fermeture du plus important stock de poisson du Canada, celui de la morue du Nord au large de la côte nord-est de Terre-Neuve et du Labrador, en juillet 1992. Cette pêche reste fermée depuis ce temps et il y a maintenant un total de 14 stocks de poisson de fond qui font l'objet d'un moratoire dans la région de l'Atlantique.

Pour la plupart, ceux qui n'ont pas de travail ont droit à des paiements compensatoires qui vont de 225 $ à 382 $ par semaine dans le cadre de la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique (SPFA). Près de 40 000 Canadiens de la région de l'Atlantique étaient admissibles aux indemnités dans le cadre de cette stratégie; environ les deux tiers d'entre eux étaient des travailleurs des usines de transformation. Mais la durée des indemnités est liée aux antécédents de travail et les premiers 2 000 à 3 000 travailleurs ont été rayés de la liste de prestations de la Stratégie en mai 1996. Le programme est censé demeurer en vigueur jusqu'en mai 1999.

Pour certains, l'augmentation des stocks de crustacés et le marché relativement dynamique des crustacés ont compensé les pertes de revenu attribuables à l'effondrement de la pêche du poisson de fond, mais le secteur des crustacés exige beaucoup moins de main-d'oeuvre et les marchés sont extrêmement fluctuants.

En 1995, le gouvernement du Canada a enfin pris des mesures pour lutter contre la forte surpêche par les flottes étrangères dans les stocks qui chevauchent la limite de 200 milles des eaux canadiennes. L'arrestation, entourée de beaucoup de publicité, du chalutier espagnol Estai en mars 1995 et la crise diplomatique internationale qui en a découlé ont donné lieu à la conclusion d'un accord de mise en application entre les pays qui pêchent en bordure du plateau continental canadien, accord qui rend possible la récupération, à la longue, des stocks chevauchants. Les dirigeants du SPATA/TCA ont participé aux négociations qui ont mené à cet accord de mise en application de même qu'à l'élaboration, par l'entremise des Nations Unies, d'une convention internationale portant sur la préservation et la gestion des stocks de poissons chevauchants et fortement migrateurs.

Puisque cette industrie est essentiellement saisonnière, la pêche et les gens qui y travaillent sont extrêmement vulnérables aux attaques auxquelles on se livre actuellement contre le régime canadien d'assurance-chômage. Le SPATA/TCA a été l'un des chefs de file de la campagne de lutte contre les compressions proposées dans ce régime.

Les difficultés auxquelles se heurtent les travailleurs de la pêche déplacés, dont bon nombre (des milliers) ont entrepris un recyclage, sont fortement aggravées par l'absence de débouchés sur le marché du travail, non seulement dans la région de l'Atlantique, mais dans l'ensemble de l'économie canadienne.

Les récents progrès concernant une fusion entre les TCA et le Syndicat des pêcheurs et travailleurs assimilés (United Fishermen and Allied Workers) en Colombie-Britannique ouvrent la voie à une meilleure coordination à l'échelle nationale des interventions concernant les travailleurs de la pêche, notre syndicat national rassemblant des gens qui travaillent dans ce secteur aussi bien sur la côte Est que dans la région des Grands Lacs et sur la côte Ouest.

LES MINES ET LES FONDERIES

Les TCA représentent un peu plus de 4 500 travailleurs dans le secteur des mines et des fonderies. Même si le secteur des mines et des fonderies est relativement nouveau pour les TCA, nous tentons de jouer un important rôle de leadership dans la formulation d'une nouvelle approche concernant l'avenir du secteur.

Cet avenir en serait un où l'on travaillerait à tempérer certaines des caractéristiques traditionnelles du secteur qui ont eu des répercussions négatives sur les travailleurs et les collectivités. Le secteur a été marqué par d'importants cycles d'emballement et d'effondrement de la production et de l'emploi, étant soumis aux montagnes russes de l'évolution des prix internationaux des produits de base. Il existe une culture de recherche spéculative du profit par des pirates de l'industrie qui n'ont guère de considération pour les travailleurs et les collectivités, qui exploitent les ressources au rythme le plus rapide possible et n'ont guère de considération pour les employés, les collectivités ni l'environnement alors qu'ils se concentrent sur le prochain «coup» à réussir sur le marché.

La tentative continuelle, de la part des employeurs, de brandir la menace d'un remplacement de la production canadienne par des investissements étrangers est un important enjeu des négociations collectives. Les employeurs se servent de cette stratégie pour essayer de désamorcer le programme syndical d'amélioration des salaires et des avantages sociaux, et d'obtention de conditions de travail meilleures et plus sûres, entre autres par l'adoption de mesures environnementales efficaces pour limiter les répercussions négatives sur le milieu. Dans une large mesure, cette attitude est de l'affectation et la menace sonne creux, puisque les installations canadiennes sont extrêmement productives, les gouvernements ont favorisé les entreprises par des taux d'imposition relativement bas et les gisements canadiens présentent des avantages de qualité et d'emplacement. (Ces avantages sont clairement illustrés par la récente guerre d'enchères à laquelle se sont livrés Falconbridge et Inco pour la compagnie Diamond Fields Resources Inc. en vue d'obtenir les spectaculaires gisements de nickel et de cuivre à Voisey Bay, au Labrador; ces gisements, selon les estimations, pourraient représenter à eux seuls de 10 à 15 % de la production mondiale de nickel d'ici le tournant du siècle.)

Ces dernières années, il y a eu un mouvement général à la hausse du prix des métaux de base – nouvelle conjoncture favorable pour la réalisation de gains lors des négociations collectives. Voici les changements survenus dans les prix en 1995, comparativement aux deux années précédentes, pour certain des produits les plus importants : aluminium, hausse de 63 %; cuivre, hausse de 53 %; or, hausse de 7 %; nickel, hausse de 57 %. Cela s'est traduit par une montée en flèche des bénéfices des entreprises. Par exemple, les bénéfices par action d'Alcan ont triplé, passant de 34 cents (US) en 1994 à 1,06 $ en 1995, tandis que les bénéfices par action de Falconbridge doublaient, passant de 94 cents en 1994 à 1,89 $ en 1995.

Bien entendu, cette tendance ne s'applique pas systématiquement à tous les produits de ce secteur diversifié. Nos membres qui sont employés par la Société de développement du Cap-Breton, par exemple, font face à une constante insécurité en raison du sombre avenir de l'exploitation minière au Cap-Breton. Le gouvernement a retiré son soutien financier dans le cadre de ses efforts obsessifs de réduction du déficit, sans tenir compte des effets dévastateurs que cette fermeture aurait sur l'économie du Cap-Breton.

Les conventions avec Alcan, Similco et Royal Oak Mines viennent toutes à échéance durant la deuxième moitié de 1996. Il y a des priorités traditionnelles dans ce secteur : de meilleures conditions de sécurité; l'amélioration des horaires de travail; les interdictions visant la sous-traitance; enfin, la réduction du temps de travail. La question des régimes de retraite devient de plus en plus prioritaire, et nous avons réalisé d'importants gains récemment à ce titre. Par exemple, les travailleurs de Falconbridge ont obtenu des améliorations notables au titre des pensions dans leur dernière convention, tout comme les travailleurs de Similco.

Le plus important test à venir dans le domaine des régimes de retraite sera celui des négociations avec Alcan au nom de nos membres de Kitimat. Ce contrat de travail vient à échéance en juillet 1996 et les membres ont mis en tête de liste des revendications la question des primes d'encouragement à la retraite anticipée.

LES SERVICES

QUATRE MYTHES SUR LES EMPLOIS DANS LE SECTEUR DES SERVICES

CE NE SONT PAS DE VRAIS EMPLOIS

Le secteur des services est le segment de l'économie qui croît le plus rapidement; il représente plus des deux tiers du produit intérieur brut du Canada et compte plus de 70 % des emplois du pays.

CE NE SONT PAS DE VRAIS TRAVAILLEURS

La majorité des Canadiens travaillent dans ce secteur. Bon nombre d'entre eux ont des emplois durs et exigeants, que ce soit dans l'entreprise privée ou dans le secteur public. Traditionnellement, bien des gens considèrent les employés du secteur des services comme des travailleurs de deuxième classe, en partie parce qu'il y a beaucoup d'emplois temporaires et à temps partiel dans le secteur et en partie à cause du statut inégal conféré aux jeunes, aux femmes, aux immigrants, aux travailleurs de couleur, aux gais et lesbiennes et aux travailleurs handicapés qui ont trouvé une forte proportion de leurs emplois dans ce secteur.

DE TOUTE FAÇON, ILS NE TRAVAILLENT PAS LONGTEMPS

Il y avait une part de vérité dans cette affirmation... il y a bien des années. Aujourd'hui, beaucoup de travailleurs du secteur des services conservent leur emploi pendant des années et y travaillent même toute leur vie. On trouve un indice de cette nouvelle réalité dans le fait que les travailleurs des services accordent plus d'attention à la formation, aux possibilités de perfectionnement, aux avantages sociaux et aux régimes de retraite. Certains continuent de travailler dans le secteur parce qu'ils aiment leur emploi ou le considèrent comme utile à la société. D'autres restent parce que le secteur représente la part du lion des emplois qui existent au Canada et les autres options qui s'offraient à eux ont disparu. Ce n'est plus une question, pour ces travailleurs, d'exercer leur emploi «en attendant» de passer à autre chose.

ET ILS NE PARVIENNENT PAS À SE SYNDIQUER

C'est dans le secteur public des services que le nombre de syndiqués a connu la plus forte augmentation au cours des années 1960 et 1970. Pendant plus de deux décennies, le Syndicat canadien de la fonction publique a été le plus important syndicat du Canada. Il en va tout autrement du secteur privé des services. Celui-ci a été beaucoup plus difficile à syndiquer, en partie à cause de la plus petite taille des lieux de travail et de la prépondérance des emplois à temps partiel et temporaires. Mais quand les travailleurs de ce secteur décident de réagir à leur situation, ils le font de manière remarquable. Nos membres des 50 comptoirs de la chaîne Poulet frit Kentucky en Colombie-Britannique ont voté à près de 90 % en faveur d'une grève pour appuyer leurs revendications en 1995 et les travailleurs du casino de Windsor ont réalisé des percées dans leurs négociations lors d'une première grève âprement menée. Plus récemment, les membres du Syndicat des employés de la fonction publique de l'Ontario ont remporté une dure bataille contre le gouvernement Harris.

Pour avoir une idée de l'importance grandissante du secteur des services dans l'économie et dans notre propre syndicat, nous n'avons qu'à songer à la façon dont les TCA définissent leur présence au sein du mouvement ouvrier canadien. À une certaine époque, nous étions «le plus important syndicat industriel du Canada», mais de plus en plus, nous nous décrivons comme «le plus important syndicat du secteur privé du Canada». Autrement dit, nous reconnaissons la nécessité de représenter nos membres tant du secteur industriel que du secteur des services.

Les problèmes et leurs solutions adoptent des formes très différentes dans le secteur industriel et dans celui des services, mais les enjeux fondamentaux liés au travail, comme l'accélération de la cadence, la sous-traitance et la sécurité d'emploi, sont les mêmes dans les deux cas. À vrai dire, ce n'est pas très étonnant; les conditions économiques et politiques sous-jacentes touchent pareillement les deux secteurs.

Les travailleurs du secteur des services qui font partie de notre syndicat comprennent les membres des sections locales du transport aérien, ferroviaire, maritime et terrestre, de même que certains travailleurs des télécommunications; la situation de ces groupes est décrite plus en détail dans d'autres parties du présent rapport. Le reste des membres des TCA appartenant au secteur des services est hétérogène et disséminé aux quatre coins du pays. En 1995, nous avions plus de 300 conventions collectives dans le secteur des services, régissant plus de 17 500 membres (sans compter les importants groupes de membres des secteurs du transport aérien, ferroviaire, maritime et routier, de même que les employés de bureau).

Dans certains cas, nous représentons des travailleurs regroupés en une seule unité; dans d'autres, nous représentons un nombre important de travailleurs sur le terrain. Les membres des TCA sont répartis dans les secteurs suivants :

En outre, on considère souvent le secteur des services comme englobant les métiers liés aux services comme le travail de bureau dans tous les secteurs.

Bon nombre des emplois du secteur des services ne sont pas syndiqués, particulièrement dans l'entreprise privée. L'un des défis continus que doit relever notre syndicat consiste à fixer certaines priorités de syndicalisation parmi la diversité des services. Et même là, avec des unités dispersées, souvent plus petites, les services poseront un autre type de défi une fois que les campagnes de syndicalisation auront débuté. Ces réalités présentent déjà suffisamment de problèmes sans que vienne s'y ajouter la détérioration des lois sur les relations de travail et de notre droit légal de nous syndiquer, ce qui est manifestement l'une des pièces maîtresses du programme politique des gouvernements de droite, anti-syndicats, qui continuent de prédominer dans l'ensemble du pays. Voilà encore une autre raison de nous engager vis-à-vis de la défense de ces droits et de la défaite de ces gouvernements.

En ce qui a trait à l'image de faiblesse uniforme des salaires dans le secteur des services, le numéro du printemps de 1996 de Perspectives de Statistique Canada signale que, même si l'on trouvait dans ce secteur les vingt industries où le salaire hebdomadaire était le plus bas, on y trouvait également six des vingt industries à la rémunération la plus forte au pays. Les salaires ont tendance à être polarisés entre les industries de services à rémunération faible et à rémunération élevée. La masse salariale hebdomadaire de 4 milliards $ dans le secteur est versée à près de 8 millions de travailleurs qui gagnent en moyenne 520 $ par semaine, soit environ 22 % de moins que la moyenne des 2,4 millions d'employés qui travaillent dans le secteur de la production de biens.

Cette étude souligne en outre que la polarisation des salaires trouve une bonne part de son explication dans le volume de travail, c'est-à-dire le nombre d'heures de travail par semaine et par année. La prédominance des emplois à temps partiel et exercés durant une partie de l'année seulement dans le secteur des services, lequel connaît une croissance rapide, a des répercussions de première importance sur l'élaboration de nos politiques concernant le temps de travail, car nous avons eu tendance à nous concentrer sur la question du travail supplémentaire. En réalité, bon nombre de nos membres du secteur souhaitent que l'on adopte des politiques destinées à maximiser les heures de travail afin de les rapprocher davantage de la norme des 40 heures par semaine. L'élaboration de politiques dans ce domaine aurait une importance toute particulière pour les nombreux travailleurs de couleur et immigrants et les nombreuses femmes qui travaillent dans le secteur. C'est dans celui-ci que l'emploi des femmes a connu une forte expansion au cours des dernières décennies. En fait, pas moins de 87 % des femmes travaillent dans le secteur des services ou dans des emplois liés à ce secteur.

Le grand nombre d'emplois à temps partiel et exercés pendant une partie de l'année dans le secteur, auquel viennent s'ajouter des horaires de travail erratiques pour les employés à temps partiel aussi bien qu'à temps plein, est l'une des raisons pour lesquelles les syndicats et d'autres intervenants se sont si vivement opposés à la mise sur pied par le gouvernement fédéral d'un système horaire pour déterminer l'admissibilité aux prestations d'assurance-chômage et la durée des prestations. Bon nombre des employés qui travaillent de 15 à 34 heures par semaine seraient désavantagés par le nouveau système lorsqu'ils demanderaient des prestations ordinaires aussi bien que des prestations de maternité, parentales et de maladie dans le cadre du régime d'assurance-chômage.

L'importance des services pour notre économie et pour notre situation commerciale n'est pas toujours aussi évidente que l'importance du secteur de la fabrication, en partie parce qu'on mesure habituellement le rendement économique en dénombrant des éléments tangibles, par exemple, des stocks. Toutefois, l'accès à l'énorme marché des services du Canada occupait une place de premier plan dans les priorités de Washington lors des négociations de l'Accord de libre-échange canado-américain et de l'ALENA. En fait, ces accords présentent au moins tout autant de danger pour notre secteur des services que les dangers mieux reconnus qui menacent les secteurs de la fabrication et des ressources. Le potentiel de transfert outre-frontières et la tendance des entreprises établies aux États-Unis à concentrer leurs fonctions d'administration et de travail de bureau à leur siège social auront des effets sur de nombreux services – depuis les réservations de billets d'avion, d'excursions et de chambres d'hôtel jusqu'aux transactions financières. Cet «exode des données» est rendu possible par la déréglementation de la circulation des données qui découle du libre-échange. Même si certains services comme le réseau d'autobus local jouissent d'une protection «naturelle» contre le transfert outre-frontières, ils n'en sont pas moins exposés à des pressions attribuables à la concurrence et aux prises de contrôle potentielles par des intérêts américains. Des services publics de plus vaste ampleur comme les soins de santé font face à des pressions constantes en faveur de la privatisation et de la commercialisation alors que les entreprises géantes usent de leur influence pour avoir accès à la lucrative «industrie» de la santé du Canada, secteur qu'un négociateur commercial américain a appelé un «trésor non encore découvert».

Les TCA sont devenus un syndicat de première importance dans le secteur des services, processus qui a été amorcé par la fusion avec l'Association canadienne des employés du transport aérien en 1985. Étant donné son poids dans l'économie, ce secteur deviendra de plus en plus important pour nous au fil des ans. Avec l'ampleur de sa représentation, de son expérience, de ses ressources et de sa crédibilité, notre syndicat est bien placé pour jouer un rôle clé dans le secteur des services. En collaboration avec nos membres, nous pouvons mettre au point un plan d'action incluant de nouvelles stratégies de syndicalisation, une démarche de négociation mieux coordonnée et un programme de réformes législatives au fédéral et dans les provinces, en vue notamment de faire adopter des normes d'emploi et des lois sur le travail plus strictes qui faciliteraient la syndicalisation dans les petits lieux de travail.

Lors de nos négociations dans le secteur des services, nous devrons être prêts à pousser notre démarche concernant les meilleures pratiques et à nous attaquer à des enjeux critiques comme la maximisation des heures des travailleurs à temps partiel afin qu'ils puissent passer à des emplois réguliers à temps plein, l'application de nos régimes d'avantages sociaux aux employés à temps partiel et l'adoption de la gamme d'avantages sociaux qui est la norme dans nos conventions du secteur de la fabrication, l'inclusion de mesures de lutte contre la violence et le stress en milieu de travail et le resserrement des contrôles sur la sous-traitance.

Une récente étude du Conseil économique du Canada concluait que
plus de 70%
de la population active canadienne travaillait maintenant dans le secteur des services; cela représente environ trois travailleurs canadiens sur quatre.

LES SERVICES D'HOSPITALITÉ

Le secteur de l'hospitalité est l'un des plus importants employeurs au Canada; il compte plus d'emplois et représente une plus grande part du produit intérieur brut que toute industrie du secteur de la fabrication prise isolément. C'est aussi l'un des secteurs où le nombre de membres des TCA s'accroît le plus rapidement. En 1994, la syndicalisation par les TCA du secteur de l'hospitalité dans la région des basses-terres de la Colombie-Britannique a dépassé en importance celle de tout autre syndicat. Dans l'ensemble du pays, nous avons maintenant 86 conventions collectives qui régissent 164 lieux de travail et environ 12 000 travailleurs du secteur. Près de la moitié de ces membres travaillent dans des hôtels, notamment des hôtels de la chaîne du CP et certains établissements de Delta et de Best Western, pour ne mentionner que ceux-là. Nous avons également une concentration d'unités dans la zone de villégiature de Whistler en Colombie-Britannique, dans les provinces de l'Atlantique et au Québec. Les accréditations pour les hôtels étaient à l'origine la conséquence des fusions l'ACTIMA, la CTCU et la FCCET&AO, mais il y a de plus en plus de nouvelles accréditations sous la bannière des TCA. Nous avons d'autres membres qui travaillent dans des restaurants (en particulier, la chaîne White Spot), des chaînes de restauration rapide (entre autres, la chaîne Poulet Frit Kentucky en Colombie-Britannique), des clubs, des centres de loisirs, des cafétérias et des services de traiteur d'un océan à l'autre.

Au cours de la dernière année, nous avons déployé des efforts concertés pour nouer des liens plus étroits entre les membres du secteur en organisant des réunions régionales spéciales ainsi que des sessions lors des réunions du Conseil des TCA. Les membres ont parlé de la nécessité d'une meilleure coordination de nos négociations collectives avec les employeurs dans ce secteur. Pour répondre à cette préoccupation, nous avons passé en revue certaines des conventions et compilé un guide des «meilleures pratiques» contenues dans les conventions collectives conclues par les TCA dans le secteur de l'hospitalité. Les titres des chapitres de ce guide donnent une idée des priorités exprimées par les dirigeants locaux : les heures de travail et les pauses, les droits d'ancienneté, les méthodes d'établissement des horaires de travail et les droits connexes, les avantages sociaux, les systèmes de gratifications et de pourboires, la classification des emplois et les salaires, la définition de l'unité de négociation, la sous-traitance, le harcèlement, les droits de la personne, la santé et la sécurité et, enfin, le changement technologique.

Lors des réunions sectorielles, on a mis l'accent sur les éléments suivants :

Une étude récente du Conseil canadien des ressources humaines en tourisme décrivait l'évolution du profil de la main-d'oeuvre de 1,3 million de personnes (environ un employé sur dix au Canada) qui travaille dans des secteurs apparentés au tourisme, soit surtout les aliments et boissons, l'hébergement et les transports. De ce nombre, 51 % des employés travaillaient dans le secteur des aliments et boissons et 13 % travaillaient dans le secteur de l'hébergement. En 1994, le tourisme représentait une part d'environ 28 milliards $ du produit intérieur brut du Canada. Défini de façon plus étroite, l'emploi directement lié au tourisme correspond à environ un emploi sur vingt au Canada :

LES SERVICES DE BUREAU

Bon nombre des sections locales des TCA qui regroupent des employés et commis de bureau font partie de conseils des emplois techniques, de bureau et professionnels.

Souvent négligés par les analystes de la main-d'oeuvre, les métiers de commis et les autres métiers de bureau fournissent traditionnellement de l'emploi à une forte proportion de la population active. Des représentants des TCA ont participé à une étude approfondie réalisée en 1995 sur les besoins d'adaptation de l'effectif d'employés de bureau de la région métropolitaine de Toronto, étude qui a permis de déterminer que les employés de bureau représentaient le plus important groupe professionnel dans cette région métropolitaine, ce qui est probablement aussi le cas ailleurs au pays. Le rapport concluait en outre que ce groupe était celui, parmi tous les groupes professionnels, qui avait subi la plus importante perte d'emplois depuis 1989. Même si ces travailleurs sont employés dans toutes les industries, ils sont concentrés dans les secteurs des finances et des services.

Les employeurs ont eu recours à de nouvelles technologies comme les lecteurs optiques et les micro-ordinateurs fonctionnant en réseau pour restructurer le travail des commis et des employés de bureau. D'autres décisions des patrons sur l'organisation de leur entreprise ont aussi eu beaucoup d'importance. Le regroupement du travail de bureau de McDonnell Douglas avec DAC aux États-Unis en est un exemple. La tendance à établir le calendrier des services de bureau selon le principe du «juste à temps», y compris le recours accru aux agences temporaires, en est un autre.

Il y a eu une polarisation de ces emplois : certains d'entre eux ont été «déqualifiés», avec une réduction de l'autonomie et une augmentation du travail répétitif, tandis que d'autres sont devenus extrêmement complexes, souvent accompagnés d'une charge de travail insoutenable. Même si une partie du travail technique comme l'éditique et l'illustration, et même des fonctions d'administration ont été dévolues aux employés de bureau, une partie du travail de bureau traditionnel est passée aux mains du personnel de gestion et des professionnels qui assument leurs propres fonctions de réception d'appels téléphoniques grâce aux boîtes vocales, de dactylographie grâce aux ordinateurs et de correspondance grâce au courrier électronique. Les effectifs tant des employés de bureau que des professionnels ont souvent été réduits; en conséquence, les emplois dans les deux catégories sont devenus beaucoup plus stressants.

Le rapport sur la région métropolitaine de Toronto signalait également : «Les employeurs canadiens ont consacré environ 62 % moins d'argent à la formation en informatique de leurs employés de bureau pendant la deuxième moitié des années 1980 qu'entre 1980 et 1985. Nos observations nous indiquent que cette tendance s'est poursuivie par la suite.» L'offre d'une formation efficace et accréditée en milieu de travail pour les postes exigeant des connaissances plus poussées, et même en vue d'enseigner les compétences requises pour conserver des emplois existants, est négligée depuis trop longtemps. Les questions de la conception des tâches, du recyclage et de l'adaptation auxquelles font face les employés de bureau dans l'ensemble du pays requièrent davantage d'attention, y compris des initiatives dans le domaine législatif et à la table de négociation.

NorTel (Northern Telecom) et Bombardier (de Havilland) se sont tous deux récemment montrés intéressés à poursuivre ce que l'on appelle le «télétravail» pour certains employés de bureau, variante moderne de la pratique séculaire du travail industriel à domicile appliquée par les fabricants de vêtements et d'autres employeurs. Des syndicats comme l'Alliance de la fonction publique du Canada ont mis au point certaines approches utiles face à ce type d'initiative patronale, tout comme l'ont fait les législateurs dans d'autres pays comme l'Allemagne. Le vice-président du Congrès du travail du Canada, Jean-Claude Parrot, dans le rapport dissident qu'il a présenté au Comité consultatif sur l'autoroute de l'information du gouvernement fédéral, citait la conférence annuelle de 1995 de l'Organisation internationale du travail, qui a adopté des recommandations destinées à réduire au minimum les pratiques les plus exploiteuses associées au travail à domicile, y compris le travail par ordinateur. Ces nouvelles circonstances poseront certains défis de taille à notre syndicat et nous obligeront à adopter une politique concernant le travail électronique à domicile.

LES SERVICES DE SANTÉ

Les TCA comptent un important nombre d'unités dans le secteur des services de santé, particulièrement dans les hôpitaux et les foyers de soins infirmiers de la Nouvelle-Écosse, où nous avons environ 3 800 membres. Plus de 500 autres membres travaillent au Manitoba et en Ontario, dans des cliniques, des foyers de soins infirmiers, des centres de traitement et des services d'aide à domicile à l'intention d'adultes handicapés.

Les compressions effectuées ces dernières années dans les budgets des services sociaux et des soins de santé ont déjà fait leurs victimes. Les travailleurs, les patients, les pensionnaires et les membres de leur famille en ressentent les effets, tout autant que les collectivités où ils vivent. On s'est livré à une attaque particulièrement brutale contre les travailleurs de la fonction publique, notamment sous forme de gels de salaire et de concessions imposés par des lois, mais ce n'est que la pointe de l'iceberg. Nos membres du secteur de la santé ont eu à faire face à des fermetures de lits et à la restructuration qui supprime ou fusionne des établissements et force à tenir des scrutins de ballottage entre les syndicats. Des problèmes réels sont engendrés par le redéploiement des travailleurs «excédentaires» de même que par la décentralisation du pouvoir décisionnel aux mains des conseils locaux de la santé, lesquels ont tendance à être dominés par des intervenants puissants comme les médecins.

Bon nombre de nos membres ont également eu à faire face à une réduction des heures de travail, voire à des mises à pied, ainsi qu'au déclin de la valeur réelle de leur chèque de paye, qui n'était déjà pas si gros. Les compressions budgétaires ont eu une autre conséquence dangereuse : la création de nouvelles classifications de poste instituant des travailleurs de la santé «généraux», ce qui a conduit à des licenciements, ainsi qu'à la polyvalence et à la déqualification des employés restants. En fait, les programmes de «soins axés sur les patients» mis en place dans de nombreux établissements sont, dans le secteur de la santé, des variantes de la gestion de la qualité totale et des systèmes de travail en équipe que connaissent si bien les travailleurs industriels.

L'engouement initial pour les «soins communautaires» comme solution de rechange aux soins en établissement a cédé la place à une évaluation plus réaliste. Ce modèle s'est vu priver de ses possibilités par de cruelles compressions. Il est malheureusement devenu un nom de code pour la décharge des responsabilités sur les familles, essentiellement sous forme d'un «travail accru pour maman», comme le dit la chercheuse Pat Armstrong, et pour des soins à domicile fournis par des intermédiaires, de plus en plus privatisés et commercialisés et qui tendent à être farouchement contre les syndicats, à adopter des politiques du travail mesquines et à manifester un engagement minimal envers les soins de qualité.

Les sections locales des TCA, particulièrement celles de la Nouvelle-Écosse et de Windsor, de Sudbury et d'autres régions de l'Ontario, ont pris part à des efforts soutenus et considérables en vue de réunir des coalitions rassemblant des collectivités dans une lutte destinée à sauver les services et à contrer les tactiques gouvernementales qui tendent à «diviser pour mieux régner». Ce n'est pas une question qui relève seulement de la table de négociation. En Nouvelle-Écosse uniquement, jusqu'à 3 000 emplois du secteur de la santé pourraient disparaître au cours de la prochaine année.

Le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux qui est entré en vigueur le 1er avril engendrera encore davantage de privations, puisqu'un montant additionnel de 7,3 milliards $ sera sabré au cours des quelques années à venir dans les secteurs de la santé, de l'enseignement post-secondaire, du bien-être social et des services sociaux. Il remplacera le Régime d'assistance publique du Canada et d'autres mécanismes de transfert; selon ce nouveau régime, les sommes réservées par le fédéral à ces programmes seront transférées en bloc aux provinces et les programmes seront dépouillés de leurs normes nationales. Les effets s'en feront sentir partout. Nous devons faire campagne en faveur de solutions de rechange authentiques, de concert avec la Coalition canadienne de la santé et les autres partenaires sociaux à l'échelle nationale et locale.

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Mai 1996

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