«Trop vieux pour travailler, trop jeune pour mourir.»

LA LUTTE POUR LE SYSTÈME PUBLIC DE PENSIONS DU CANADA

Dans le budget fédéral de 1996, le gouvernement a annoncé la fin de l’universalité de la Sécurité de la vieillesse. Les nouvelles «prestations aux aînés» seront versées en fonction des revenus. Après avoir démoli un des principaux piliers du système public de pensions du Canada, les Libéraux songent maintenant à sabrer le Régime de pensions du Canada (RPC).

Pour préparer les Canadiens à ces coupures, les médias regorgent de reportages qui prétendent que le RPC est en faillite; que les Canadiens devraient être plus responsables et économiser pour leur retraite; qu’à l’heure actuelle, les personnes âgées sont trop choyées. Ils invitent les Canadiens à se poser la question : «Pourquoi les jeunes devraient-ils payer pour les pensions des personnes âgées?» La solution, prétendent-ils, réside dans les Régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER).

Le secteur financier mène l’attaque contre les pensions publique en pratiquant la désinformation et en menant des campagnes d’épouvante. En réalité, le Canada a créé un système public de pensions rentable qui assure à des millions de travailleuses et de travailleurs une retraite à l’abri du besoin.

C’est notre régime de pensions, et nous devons nous impliquer dans le débat. Prévenez vos députés que vous exigez un système public de pensions solide, que vous vous opposerez à toute diminution du RPC, que vous exigez l’universalité de la SV.

Buzz Hargrove


Président, TCA-Canada

Le système public de pensions du Canada : un programme modèle pour le bien commun

Avant que le système de pensions n’existe, de nombreux Canadiens, particulièrement des ouvriers et des pauvres, travaillaient «jusqu’à ce que mort s’ensuive». Les syndicats et le CCF/NPD, auxquels se sont joints des églises et d’autres groupes communautaires, ont lutté afin d’obtenir l’universalité des pensions.

Aujourd’hui, nous pouvons tirer une grande fierté de notre système de pensions. Le Canada a progressé considérablement en éradiquant la pauvreté parmi les personnes âgées. Mais notre système public de pensions n’est pas uniquement une mesure provisoire pour les pauvres. Les pensions publiques ont permis aux Canadiens dont les revenus sont moyens ou faibles de maintenir une qualité de vie décente une fois à la retraite.

Notre système public de pensions représente un excellent exemple de Canadiens qui oeuvrent ensemble pour le bien commun.

• Dans les années 1960, à l’époque où le RPC/RRQ, l’assurance-maladie et le SRG ont été mis en oeuvre, 40 % des aînés Canadiens vivaient dans la pauvreté. À l’heure actuelle, 20 % des aînés Canadiens vivent dans la pauvreté.1

• Les améliorations apportées au SRG ont fait diminuer de beaucoup la pauvreté parmi les femmes âgées, qui est passée de 70 % en 1980 à 45 % en 1993.2

• Aujourd’hui, les revenus de retraite des personnes âgées proviennent à 58 % des pensions publiques, contre 34 % tirés de régimes d’entreprise et 8 % de régimes enregistrés d’épargne-retraite.3

La lutte du mouvement ouvrier pour un système public de pensions

Aucun gouvernement n’a «fait cadeau» aux Canadiens du système public de pensions. Les syndicats et le CCF/NPD se sont joints aux églises et à d’autres groupes progressistes afin de forcer les gouvernements à mettre en oeuvre le système public de pensions. La bataille qui est menée actuellement en vue de maintenir les pensions publiques n’est qu’un épisode dans une longue série de luttes.

1930 Introduction de la Sécurité de la vieillesse

J.S. Woodsworth de la CCF mène une coalition du mouvement ouvrier afin de forcer un gouvernement libéral minoritaire à introduire la SV. La prestation mensuelle est de 20 $ à compter de 70 ans. Les autochtones et les immigrants n’y ont pas droit.

1952 Augmentation des prestations mensuelles de la SV à 40 $ (puis à 75 $ en 1963)

Les TUA-Canada négocient un «complément» pour obtenir des prestations mensuelles de 100 $.

1957 La SV s’applique désormais à tous les Canadiens âgés de 70 ans.

1958 La CCF réclame un plan de pension canadien : «La moitié de votre revenu à 65 ans».

1965 Introduction du RPC/RRQ et SV payable à 65 ans

Bien que l’objectif de «moitié du revenu» ne soit pas atteint, le RPC/RRQ octroie au travailleur moyen 25 % de son revenu.

1966 Supplément de revenu garanti disponible à compter de 65 ans

Le SRG est un revenu versé temporairement aux personnes âgées dont les revenus sont faibles, jusqu’au plein effet du RPC/RRQ. Mais aujourd’hui, 40 % des prestataires de la SV sont admissibles au SRG.4 La majorité sont des femmes.

1975 Introduction de l’allocation au conjoint (AC)

L’AC est une prestation calculée en fonction du revenu payable entre 60 et 65 ans et offerte uniquement au conjoint d’un prestataire de la SV.

1977 SV réduite pour les immigrants

Auparavant, toute personne résidant au Canada depuis 10 ans était admissible à la SV entière. Maintenant, pour être pleinement admissibles, les immigrants canadiens doivent résider au Canada depuis 40 ans.

1983 Groupe de travail parlementaire sur la réforme des pensions

Reconnaissant la pauvreté extrême des femmes âgées, le mouvement ouvrier se joint aux églises, aux regroupements contre la pauvreté et aux regroupements féministes, pour revendiquer la hausse des régimes publics de pension à 50 % des gains.

1985 Le gouvernement fédéral introduit certaines réformes aux régimes publics : amélioration des caractéristiques pour les femmes et les personnes invalides, renforcement du financement. Mais le gouvernement s’effondre devant les pressions du monde des affaires, rehausse les abris fiscaux pour les REER et refuse d’augmenter les prestations de base du RPC/RRQ.

Les Conservateurs tentent de désindexer la SV, mais reculent lorsque les aînés manifestent sur la Colline parlementaire. Mulroney introduit la «récupération» de la SV – une version moins rigoureuse de la désindexation.

Les Conservateurs annoncent également l’augmentation de 10 % à 20 % du plafond d’investissement à l’étranger des fonds de pensions avant l’année 1994.

1996 Les Libéraux annoncent que d’ici l’an 2001, la SV/SRG sera remplacée par des «prestations aux aînés» calculées en fonction du revenu.

Le fonctionnement du système public de pensions du Canada

SÉCURITÉ DE LA VIEILLESSE (SV)

La SV est financée par le biais des recettes générales. Il s’agit d’une prestation mensuelle uniforme (395 $ en janvier 1996)† payable à l’âge de 65 ans et indexée en fonction de l’inflation. La SV a constitué pendant de nombreuses années un modèle en matière d’universalité. Tous les Canadiens résidant au pays depuis 10 ans avaient droit aux mêmes prestations. La contribution apportée à la société par les ménagères, les banquiers et les ouvriers était reconnue d’une façon uniforme. Les mesures de «récupération» et les «prestations aux aînés» viennent mettre un terme à l’universalité des prestations de la SV.

SUPPLÉMENT DE REVENU GARANTI (SRG)

Le SRG est offert à tous les prestataires de la SV dont les revenus sont faibles. La moitié des prestataires de la SV sont admissibles au SRG. Le maximum est de 469 $ pour les célibataires et de 306 $ pour les personnes mariées. Une allocation peut être versée au conjoint d’un prestataire de la SV âgé de 60 à 65 ans.

PRESTATIONS AUX AÎNÉS

En 2001, les prestations aux aînés remplaceront la SV et la SRG. Dans l’intervalle, les Canadiens auront à choisir entre l’actuelle SV/SRG et les prestations aux aînés.

Procédant d’une façon malhonnête en reportant à plus tard les coupures, le gouvernement tente d’éviter un contrecoup politique en évitant de cibler les retraités actuels et ceux sur le point de l’être.

Sous le régime des «prestations aux aînés», les personnes âgées célibataires sans revenu recevront 11 420 $ par année et les couples, 18 440 $. Les personnes qui bénéficient d’un autre revenu, quant à elles, verront leurs prestations soumises à des mesures de «récupération». Les prestations aux aînés seront calculées en fonction du revenu familial. Une femme qui n’a aucun revenu personnel ne pourra réclamer de «prestations aux aînés» si le revenu de son mari dépasse le plafond fixé.

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA ET LE RÉGIME DE RENTES DU QUÉBEC

Le RPC/RRQ est financé par des cotisations de l’employeur et de l’employé. Le taux total de cotisation est de 5,6 % des revenus. Le plafond des gains est de 35 400 $; tout travailleur qui gagne un minimum d’argent (3 500 $) est membre du régime.

Les prestations de pension sont établies à 25 % du salaire industriel moyen à vie (en dollars actuels). La prestation maximale se chiffre à 727 $ et est pleinement indexée en fonction de l’inflation. Les prestations sont calculées en fonction des revenus gagnés la vie durant, mais la disposition d’«abandon» permet aux travailleurs de ne pas tenir compte de 15 % des années pendant lesquelles leurs revenus ont été faibles (soit près de 5 ans en 1996) ainsi que de toute année supplémentaire passée à élever un enfant jusqu’à l’âge de 7 ans.

Le RPC/RRQ est caractérisé par le fait qu’il tient compte des circonstances de la vie. En plus des prestations de retraite normales payables à 65 ans, les régimes offrent une retraite anticipée à 60 ans, une pension d’invalide à n’importe quel âge, une somme forfaitaire d’indemnité de décès, des prestations au survivant ainsi que des prestations aux personnes à charge.
†Toutes les données ont été compilées le 1er janvier 1996.

«Quand j’étais jeune, je croyais que l’argent était la chose la plus importante dans la vie; maintenant que je suis âgé, je sais que ça l’est.»

Oscar Wilde
Dramaturge anglais, 1890

Pourquoi le public est mieux que le privé

Les financiers prétendent que les Canadiens devraient abandonner le RPC et acheter individuellement des REER. Mais le RPC/RRQ offre d’excellentes caractéristiques :

UNIVERSALITÉ

La plupart des travailleuses et des travailleurs sont couverts en vertu du RPC/RRQ. Ils n’ont pas à négocier avec leur employeur.

TRANSFÉRABILITÉ

Les travailleuses et les travailleurs sont protégés même s’ils changent d’emploi ou déménagent ailleurs au pays.

FRAIS MODESTES

La protection à large échelle fait que les frais d’administration sont modestes. L’administration du RPC ne coûte que 1,3 % des dépenses, contre 5 % ou davantage pour les régimes privés.

QUALITÉ

Les prestations du RPC/RRQ sont fixes : 25 % des revenus. La protection contre l’inflation et les prestations supérieures d’invalidité et de survivant du RPC/RRQ sont tout simplement trop coûteuses ou impossibles à obtenir par le biais des REER.

STABILITÉ

Les contributions de l’employeur au RPC/RRQ et les prestations des employés sont réglementées par la loi, ce qui assure la stabilité du RPC/RRQ.

CONTRÔLE

Les citoyens canadiens se prononcent démocratiquement lorsqu’il s’agit du système public de retraite. Les personnes qui détiennent des REER déposés dans des banques diverses ne disposent d’aucune voix collective.

EMPLOIS

Les programmes gouvernementaux génèrent des emplois syndiqués. Les REER génèrent des profits au bénéfice des banques et des institutions financières qui rémunèrent chichement leurs travailleuses et leurs travailleurs et qui sont, tout le monde le sait, contre les syndicats.

INVESTISSEMENT SOCIAL

Les fonds du RPC/RRQ sont investis au Canada. Jusqu’à 20 % des fonds de pension privés peuvent être investis en-dehors du Canada.

Qu’y a-t-il de si extraordinaire dans l’universalité?

Pourquoi ne pas se contenter de veiller sur les intérêts des pauvres?

• L’universalité des régimes les rend simples à administrer, donc leurs coûts sont faibles. Il en coûte moins de 1 % des dépenses pour administrer la SV.

• Les programmes qui s’adressent aux pauvres sont plus susceptibles d’être sabrés. Nous n’avons qu’à constater ce que Ralph Klein et Mike Harris ont fait avec les prestations d’aide sociale. Le fait de s’orienter vers des prestations pour les pauvres est un pas en direction de la disparition des programmes.

• Les Canadiens de la classe moyenne et de la classe ouvrière ont également besoin de la protection des régimes universels. Une perte d’emploi, des périodes de mise à pied, une blessure, ou même une maladie prolongée dans la famille peut réduire à néant la planification d’une retraite confortable. Les pensions publiques universelles constituent un important filet de sécurité.

• Les Canadiens tirent une grande fierté des programmes sociaux comme la SV, le RPC/RRQ, l’assurance-maladie. Le fait d’oeuvrer ensemble pour créer un système de retraite sérieux contribue aussi à unifier la nation.

«Être vieux, c’est magasiner aux comptoirs à rabais pour des fruits et des légumes moisis emballés dans du cellophane.»
Une Canadienne de 70 ans 1980

Le RPC est-il en faillite?

Le RPC est un régime financé par répartition. Les cotisations de l’employeur et de l’employé financent les réclamations des retraités à mesures qu’elles se présentent. Il n’existe aucun fond à «mettre en faillite».

Depuis les débuts du RPC en 1966, les cotisations se chiffrent à plus qu’il n’en faut pour payer les prestations. Les provinces ont emprunté l’excédent des cotisations pour bâtir des systèmes de transport en commun et de chemins de fer, des bibliothèque, des hôpitaux. Les fonds du RPC ont été investis dans nos collectivités et ont profité à tous les Canadiens, peu importe leur âge.

Tous les cinq ans, les provinces et le gouvernement fédéral révisent le barème des cotisations qui s’applique pendant 25 ans. Dans la révision de 1995, l’actuaire en chef a proposé une hausse prématurée du barème actuel (1990) :





BARÈME ACTUEL % DES REVENUS BARÈME REVISÉ % DES REVENUS
1996 5,60 5,60
2006 8,10 9,20
2016 10,10 11,80
2021 - 12,80
Remarque: L'employeur et l'employé paient chacun 50% de ces taux.

Contrairement aux allégations des prophètes de malheur, l’actuaire n’a pas «soudainement découvert» une crise du vieillissement. Il a toujours été prévu que les cotisations augmenteraient avec le temps et atteindraient éventuellement environ 14 %. L’augmentation devra simplement se produire plus tôt que prévu.

Donc, pourquoi l’actuaire n’a-t-il pas établi le barème comme il se devait à l’origine? Plusieurs événements inattendus ont eu un impact sur le RPC : la récession du début des années 1990 s’est traduite par une diminution des cotisations, et les prestations d’invalidité ont connu une augmentation. La croissance économique future, la diminution des prestations d’invalidité et plusieurs autres facteurs pourraient être utilisés en vue de réduire les taux de cotisations.

Ces taux sont-ils raisonnables? Pendant de nombreuses années, le Canada a payé moins que tout autre pays du G-7, y compris les États-Unis et le Japon.

«Je vous conseille de continuer à vivre, simplement pour faire enrager ceux qui paient vos rentes.»

Voltaire
Écrivain français, 1750 <
P>
TAUX DE COTISATION AUX RÉGIMES PUBLICS DE PENSIONS DES PAYS DU G-7 (1993)5
Employeur Employé
Canada 2,5% 2,5%
France 8,2 6,6
Allemagne 8,75 8,75
Italie 18,93+ 8,14
Japon 7,3 7,3
Royaume-Uni 4,6-10,4 2-10*
;tats-Unis 6,2 6,2

* Varie en fonction du revenu.

Par conséquent, où est le problème?

En 1995, l’actuaire en chef a publié son rapport sur le financement du RPC. Tout à coup, les médias ont été saturés de d’articles sur l’effet «bombe à retardement» et sur l’effondrement du Régime de pensions du Canada. Qu’a donc bien pu dire l’actuaire pour créer un tel émoi?

Ce qu’il a réellement dit...

«Les projections financières qui figurent dans ce rapport indiquent que l’actuel barème des cotisations de 25 ans doit être réévalué afin d’éviter que le Compte ne soit épuisé avant la fin de 2015.»

«L’appréhension des gens n’a pas de raison d’être. Le RPC est coûteux, mais ne se dirige pas vers la banqueroute.»
Bernard Dussault, actuaire en chef, 1995

Ce qu’ils ont dit qu’il a dit...

«Les Canadiens ont raison d’être anxieux à propos de l’avenir du RPC. L’actuaire en chef prévient que si la tendance actuelle se maintient relativement au paiement des prestations et des cotisations, nous serons dans de beaux draps au début du prochain siècle. Certaines estimations suggèrent que d’ici à l’an 2015, les fonds du RPC seront épuisés. Baby-boomers, bienvenue à votre retraite.»
Financial Post, 9 janvier 1996

«Comme on estime que les dépenses seront beaucoup plus élevées que prévu, l’actuaire en chef prévoit que le fonds du RPC sera épuisé d’ici l’an 2015. C’est face à cette crise alarmante que le Reform Party a entrepris une révision du RPC...»
Preston Manning, novembre 1995

La privatisation des régimes publics de pensions

Que pouvons-nous tirer de l’expérience d’autres pays?

Preston Manning, chef du Reform Party, a proposé des «super-REER» afin de privatiser le système public. Le RPC serait éliminé graduellement et les travailleurs contribueraient obligatoirement aux REER. Le secteur financier l’applaudit à pleines mains.

Preston Manning tient cette idée du général Pinochet, dictateur militaire chilien. En 1981, le général Pinochet a passé une loi afin de privatiser le système public. Malgré les déclarations selon lesquelles les Chiliens se sont transformés en «une nation de gens prévoyants», près de la moitié des travailleurs accusent du retard dans leurs contributions. Il existe des problèmes sérieux :

• 10 % des revenus sont déduits du chèque de paye du travailleur et déposés dans un compte bancaire spécial (AFP). L’employeur n’a aucune cotisation à verser.

• Le gouvernement ne réglemente pas les frais d’administration de l’AFP. Une part de l’investissement du travailleur pouvant s’élever jusqu’à 30 % est consacrée aux frais d’administration qui sont, pour la plupart, des frais de publicité.

• L’Organisation internationale du travail de l’ONU estime que les futurs retraités récupéreront moins de 30 % de leurs revenus du régime de l’AFP.

Mais nous n’avons pas besoin d’aller en Amérique latine pour obtenir des exemples de privatisation des pensions. En Grande-Bretagne, le gouvernement Thatcher a privatisé en partie les pensions en 1988.

Les Britanniques pouvaient abandonner le régime du gouvernement et/ou le régime de leur employeur. Huit années plus tard émerge une vague de protestations de la part des enseignants, des mineurs et des travailleurs des soins de santé, qui ont choisi des régimes de l’employeur pour se retrouver avec moins d’argent dans des régimes privés.

Même le journal d’affaires conservateur, The Economist, a condamné le plan de privatisation de Mme Thatcher :

En Grande-Bretagne, une vague d’enthousiasme gouvernemental en faveur des régimes de pension privés... [a] permis aux vendeurs ambitieux de convaincre un grand nombre de personnes de passer de régimes de pension parfaitement valables offerts à leur lieu de travail, à des régimes trop coûteux et qui ne conviennent pas... Depuis, les compagnies d’assurance ont été forcées de verser des dédommagements. Ce sont de tels incidents qui nous font penser que le gouvernement doit jouer un important rôle de réglementation des régimes privés de pension... particulièrement lorsqu’il accorde une subvention sous forme d’allégement fiscal.
– 27 janvier 1996

C’est à votre argent qu’ils en veulent!

Considérons les instigateurs des attaques menées contre les régimes publics de pension. Les financiers expliquent aux Canadiens que le RPC est en faillite. Puis ils mènent des sondages d’opinion publique qui rapportent que les Canadiens craignent grandement que le RPC soit en banqueroute. Enfin, ils en déduisent que nous devrions démanteler le RPC!

La solution, prétendent-ils, réside dans les REER individuels. Mais les institutions financières vendent les REER! Cela ne les arrange pas que les pensions soient publiques car ils ne peuvent pas faire de profits sur les 40 milliards $ du système public. Leur façon de voir les choses est dans leur unique intérêt, fondée sur l’âpreté du gain.

Bien que les riches et les institutions financières se plaignent que des «Canadiens irresponsables se fient aux pensions publiques», ils n’ont aucun scrupule à bénéficier des abris fiscaux consentis pour le programme qu’ils ont choisi pour leur retraite : les régimes privés et les REER.

Les dispositions fiscales sur les REER favorisent les personnes dont le revenu est élevé : ces dernières peuvent contribuer davantage à leurs régimes et reçoivent un abri fiscal intégral. Une personne qui gagne 75 000 $ par année peut contribuer 13 500 $ à un REER et obtenir une réduction d’impôt de 6 700 $ : une fois et demie le montant de SV consenti à l’heure actuelle aux personnes âgées.

Le gouvernement se sert de l’argent des contribuables pour subventionner la retraite des Canadiens dont le revenu est élevé et, en même temps, sabre dans les programmes qui s’adressent aux Canadiens à faible et moyen revenu.

Le recours au système fiscal pour financer des régimes privés est une façon de faire onéreuse qui ne profite qu’à un petit groupe de riches Canadiens.

Voici quelles sont les intentions véritables qui se cachent derrière la privatisation des pensions publiques : transférer des milliards de dollars du contrôle public vers le secteur financier; créer un régime de retraite généreux pour les riches en recourant aux abris fiscaux des régimes privés; forcer les gens à prendre des REER individuels et se débarrasser du régime public et démocratique qui offre à tous les Canadiens un minimum de sécurité financière et une voix collective.

Je vois les modifications qui s’annoncent, et elles m’effraient à mesure qu’ils tentent de nous enlever tous les gains que nous avons faits. Je lutte donc en tant que retraitée, pour le droit de mes petits-enfants à un avenir libre.
Extrait de la VALSE DES RETRAITÉS par Arlene Mantle

Comment les contribuables canadiens financent la retraite des riches

• 10 % des Canadiens les plus riches versent presque toutes leurs contributions à des REER.

• 10 % des Canadiens les plus riches contribuent en moyenne 5 000 $ à des REER, ce qui se traduit par un abri fiscal moyen de 2 200 $. 30 % des Canadiens les plus pauvres contribuent en moyenne 900 $, en contrepartie d’un abri fiscal moyen de 240 $. Et les travailleurs, qui sont pris à la gorge lorsqu’ils sont sans emploi, sont souvent obligés de retirer leurs REER.

• En 1991, les gouvernements fédéraux et provinciaux ont perdu 8,5 milliards $ en recettes fiscales uniquement à cause des REER. Cette somme correspond à près de la moitié des dépenses complètes du programme de la SV pour la même année.6 La SV offre des prestations de près de 15 % du salaire industriel moyen à des millions de personnes âgées.
COÛT DU RÉGIME DE PENSIONS (1992)7


Canadiens admissibles En % de la main d'oeuvre Cotisations Coût approx. impôt fédéral*
RPC/RRQ 11,9 millions 86% 11,6 milliards $ 0$
Régimes privés 5,2 millions 38% 19,7 milliards 9,4 milliards
REER 4,8 millions 35% 14,8 milliards 5,5 milliards


*Remarque : Ne tient pas compte des pertes fiscales au niveau provincial.

Position des TCA-Canada sur les pensions publiques

Le Canada a mis sur pied un système public modèle en matière de pensions. Dans l’ère actuelle de changements économiques, les Canadiens ont plus que jamais besoin d’un programme collectif. Le gouvernement fédéral doit renforcer notre système public de pensions et rendre plus équitables les mesures fiscales qui s’appliquent aux régimes privés. Nous réclamons que le gouvernement fédéral prenne les mesures suivantes :

Mettre en oeuvre des politiques de plein emploi


• Le chômage élevé se traduit par une diminution des cotisations au RPC/RRQ et affaiblit la situation financière du régime.
• Si toute la population en âge de travailler bénéficiait d’un emploi et profitait d’une qualité de vie décente, le maintien des pensions des personnes âgées ne serait pas vu comme un fardeau.

Stabiliser le financement du RPC/RRQ


• L’actuaire en chef a proposé un barème révisé prévoyant l’augmentation des cotisations au RPC. Ce barème doit être adopté.

Maintenir les prestations actuelles du RPC/RRQ


• Certains «alliés» du RPC/RRQ ont suggéré de couper les prestations afin de maintenir les régimes. Mais il n’y a pas de gras à couper. Diminuer le programme du RPC ou réduire les prestations d’invalidité ou de survivant rendra la vie difficile aux Canadiens à faible revenu. Retarder l’âge de la retraite détruirait nos efforts en faveur de la pré-retraite et mettrait encore plus en danger la création d’emploi pour les jeunes travailleurs.
• Le Canada est une société hautement productive et les entreprises réalisent des profits records. Pourquoi les travailleurs devraient-ils accepter de voir leur système de pensions amputé?

Réglementer l’investissement des fonds de pension


• Les abris fiscaux qui s’appliquent aux fonds de pension d’entreprise et aux REER ont coûté plus de 15 milliards $ au gouvernement fédéral en 1991. Si le gouvernement doit absolument financer ces régimes, les contribuables canadiens doivent en retirer un certain profit.
• Le gouvernement doit rétablir la limite de 10 % qui s’applique à l’investissement à l’étranger (comme en 1989). Une part pouvant aller jusqu’à 20 % des régimes de pension peut être investie à l’extérieur du pays à l’heure actuelle. Le plafonnement des investissements assurerait l’investissement des fonds de pension dans des industries canadiennes. En 1993, plus de 40 milliards $ provenant des fonds de pension d’entreprise ont été investis à l’extérieur du Canada.8
• Le secteur financier prétend que les travailleuses et les travailleurs ont de l’argent dans les fonds de pension investis et qu’ils tirent des bénéfices par le biais de rendements d’intérêt élevés. Alors qu’un nombre minime de travailleurs ont la possibilité de profiter d’un investissement spéculatif en devises étrangères ou d’investissements dans des usines d’assemblages d’automobiles au Mexique, des milliers d’autres continuent de faire face à des pertes d’emplois. Les travailleuses et les travailleurs canadiens ne vivent pas des produits de leurs investissements.
• Le gouvernement doit établir dans la loi quelle part des fonds de pension doit être investie dans des secteurs d’activité comme les logements à prix modique, la production alimentaire, le développement communautaire et les industries canadiennes stratégiques : des investissements qui créent des emplois et qui améliorent la qualité de vie de la majorité des Canadiens.

Maintenir l’universalité de la SV


• Les mesures de récupération de la SV doivent être éliminées. La moindre des choses serait de rehausser le seuil et de l’indexer totalement en fonction de l’inflation.
• Les propositions visant à établir des prestations aux aînés en fonction des revenus font planer la menace d’érosion de notre système public de pensions. Les Canadiens comptent sur l’universalité de la SV.

Limiter les abris fiscaux qui s’appliquent aux REER


• Les déductions d’impôt qui s’appliquent aux REER ne profitent qu’aux riches. Pour créer un système plus équitable, le gouvernement pourrait fixer le plafond des revenus admissibles aux abris fiscaux à deux fois le salaire industriel moyen (environ 70 000 $). De plus, les déductions d’impôt, qui favorisent les personnes dont les revenus sont élevés, devraient être transformées en crédits d’impôt.

1. Lendemains troublés – Groupe de travail sur l’épargne-retraite de l’ICA, janvier 1995.
2. The Poverty Report, National Welfare Council, 1994.
3. Gouvernement du Canada, Les prestations aux aînés, mars 1996.
4. The Caledon Institute of Social Policy, Roundtable on Canada’s Aging Society and Retirement Income System, 5 juin 1995.
5. US Department of Health and Human Services, Social Security Programs throughout the World (1993), mai 1994.
6. Sid Ingerman et Robin Rowley, «Tax Expenditures and Retirement Savings», Canadian Business Economics, été 1994.
7. The Caledon Institute of Social Policy, Roundtable on Canada’s Aging Society and Retirement Income System, 5 juin 1995.
8. Statistique Canada, Les caisses de retraite en fiducie, 1993.
Photographie : Vincenzo Pietropaolo

Une publication du syndicat national des TCA-Canada
Volume 1, numéro 3

Produit par les services des Pensions et avantages sociaux et des Communications des TCA, 1996

205, Placer Court
North York, Willowdale, Ontario
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Téléphone : (416) 497-4110
Télécopieur : (416) 495-6552

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