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Des étiquettes sur les pots, pas sur les gens!

par Judy McCann-Beranger, M.A.

Il n'y a pas très longtemps, j'ai acheté pour mon mari T-shirt fort intéressant en guise d'appui pour le Conseil des personnes handicapées de notre région. Ce T-shirt était d'un bleu foncé, avec le dessin d'un gros pot et avec des lettres jaune vif qui disaient 'Des étiquettes sur les pots, pas sur les gens'. Pour moi, ce message a frappé juste en ce sens que j'y pensais depuis bien des années: nous n'hésitons pas à 'étiquetter' les autres qui, de quelque façon, s'écartent de la norme.

Règle générale, notre société étiquette des myriades d'individus, de situations familiales et d'expériences de vie. Prenons l'exemple des familles qui sont aux prises avec une rupture du couple. Nous les rangeons sous de nombreuses étiquettes qui, au pis aller, sont offensives et au mieux, ne sont aucunement vivifiantes. Des termes comme 'famille naturelle, famille normale, famille intacte, foyer brisé, l'ex-conjoint, la garde des enfants, l'accès et le droit de visite' n'aident en rien ceux et celles qui vivent l'expérience. En fait, ils préparent d'autres problèmes. L'expression 'vivre avec ma mère ou mon père pour la fin de semaine' communique un message psychologique 'd'appartenance' beaucoup plus positif que l'autre, 'visite chez le parent qui n'a pas la garde'. Tandis que les tribunaux s'attachent à protéger les droits de l'enfant au soutien financier et à 'l'accès', ils utilisent un language qui ne protége pas, pour autant, son droit de bien grandir du point de vue psychologique.

Plus que toute autre génération dans le passé, nous sommes aujourd'hui de plus en plus sensibilisés aux effets que les étiquettes défavorables risquent d'avoir, soit consciemment ou inconsciemment, sur les individus, les familles et les collectivités. À notre époque de lumières, il nous incombe de choisir, dans la mesure du possible, des termes moins défavorables.

Par défaut de connaissance, il nous arrive souvent de ranger les gens sous des étiquettes négatives sans vraiment comprendre les répercussions qui y donnent suite. Nous faison cela tant et aussi longtemps que quelqu'un ne dise avec candeur comment ces étiquettes lui ont causé du tort. Je me souviens d'un étudiant de douzième année que j'avais il y a quelques années. Le père avait 'obtenu la garde absolue de l'enfant'. Ses parents étaient divorcés depuis plusieurs années mais ils continuaient à se disputer du fait que le jeune voulait passer plus de temps avec sa mère, le parent 'qui n'avait pas obtenu la garde'. Le jeune homme avait assisté à plusieurs échanges houleux entre ses parents, au sujet de 'la garde et du droit de visite'. Pendant tout son secondaire, ses parents s'étaient disputés pour savoir lequel d'entre eux avait 'la garde' et combien de 'visites' le jeune devait faire à l'autre parent. Un jour, il est venu me moir à mon bureau pour décharger ses frustrations. Il voulait que tout le monde sache qu'il n'avait fait rien de mal. 'Je ne suis pas un prisonnier, donc je n'ai pas besoin d'être sous la garde de quelqu'un. Je ne veux plus faire visite à ma mère, je veux tout simplement vivre avec elle parfois'. Chose certaine, il est temps que notre système judiciaire cesse de parler d'enfants de parents séparés ou divorcés comme s'il parlait de prisonniers.

Dans bien des cas, on attribue le phénomène séculaire des enfants et adolescents qui contestent l'autorité de leurs parents, des écoles et d'autres établissements au fait qu'ils viennent de 'foyers brisés'. Il reste que les faits ne confirment pas cette croyance. Selon le docteur Atilla Turgay, psychiatre éminent, plus de la moitié des adolescents contestent l'autorité de leurs parents, quel que soit le type de famille dans lequel ils vivent. Les termes 'brisé' et 'intacte' s'inscrivent dans un problème de plus grande envergure, en ce sens que bon nombre de familles signalent que la vraie 'rupture' est survenue avant la séparation, quand tout était 'intact' aux yeux des autres. Pour ces familles, le bien-être ou le véritable 'état d'être intact' est devenu une réalité seulement lorsqu'elles ont commencés à vivre dans une unité familiale plus saine, à savoir, une famille monoparentale.

Comme éducateurs intéressés et engagés à la vie de famille, il nous importe de faire notre part. Nous devons réfléchir sur nos propres étiquettes, amener nos collègues à repenser les leurs et faire comprendre à la collectivité, à toutes les occasions qui se présentent, le besoin de remplacer la terminologie et les étiquettes négatives par des termes respectueux et non jugeurs.

Judy McCann-Beranger, M.A.,
Éducateur certifié à la vie de famille
ECFV coprésidence
Comité national des EFV


Cet article a été publié par Services à la famille - Canada. Affiché par Services à la famille - Canada.


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