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L'importance des routines de l'habillage hivernal pour les poupons et les tout-petits

par Jennifer Murphy-Hupé

Les routines de l'habillage hivernal peuvent se révéler une tâche frustrante, exténuante et longue! Toutefois, au lieu de considérer cette activité comme une corvée, les parents et les intervenantes en services de garde devraient l'envisager comme une occasion d'interactions sociales positives d'apprentissage pour les enfants. Par exemple, communiquer avec les poupons et les tout-petits pendant les routines d'habillage et de déshabillage les aide à apprendre les signaux verbaux et non verbaux. Encourager les jeunes enfants à s'habiller et à se déshabiller favorise aussi l'autonomie et le développement de nouvelles aptitudes. Le scénario suivant donne un exemple de comment les intervenantes peuvent faire des routines d'habillage hivernal une activité d'apprentissage pour les poupons et les tout-petits.


Benjamin a dix-huit mois et parle très peu. Lui et plusieurs autres jeunes enfants s'en vont jouer dehors dans la neige. Une des intervenantes apporte les habits de neige et les bottes de chaque enfant et les place en tas séparés.

Benjamin joue avec des anneaux colorés sur le tapis près de la porte. Christiane, une des intervenantes de la garderie, se dirige vers Benjamin, se penche au niveau de ses yeux, sourit et dit : «Benjamin, nous allons jouer dehors dans la neige. Viens et nous mettrons ton habit de neige.» Benjamin laisse tomber les anneaux et se traîne à côté de Christiane qui est maintenant assise près de ses vêtements d'hiver. Benjamin s'asseoit sur le tapis à côté d'elle et dit : «Benjamin, il est temps de t'habiller.»

Pendant que Christiane vérifie les vêtements de Benjamin pour s'assurer que tout ce qui est dans le tas lui appartient, elle dit : «Benjamin, est-ce ton chapeau?» et il tend la main vers ce dernier et dit : «Moi, mon chapeau!» Christiane attend que Benjamin tienne son chapeau fermement dans ses mains. Ensuite, elle prend les autres morceaux de vêtements en répétant des phrases similaires, «Benjamin, est-ce ton foulard? Est-ce ton habit de neige? Voici une des mitaines de Benjamin! Où est l'autre mitaine?» Benjamin regarde la pile de linge en avant de lui. Christiane soulève son habit de neige et dit : «Benjamin, voici ton autre mitaine. Tu es maintenant prêt à t'habiller.»

Chris commence maintenant à préparer Benjamin à s'habiller en défaisant les lacets de ses souliers et en expliquant : «Nous devons d'abord enlever les souliers de Benjamin avant d'aller dehors.» Entre temps, Benjamin a échappé son chapeau et se penche vers ses souliers en faisant des sons qui ressemblent à «mes souliers, mes souliers». Christiane se tourne vers Benjamin et dit : «Oui, ce sont les souliers de Benjamin. Un soulier, deux souliers. On a maintenant enlevé tes souliers». Christiane place les souliers à côté du lot de vêtements de Benjamin.

Christiane dit ensuite : «Benjamin, mettons ton habit de neige». Elle place l'habit de neige, dont la fermeture éclair est ouverte, sur le tapis. Elle demande ensuite à Benjamin de s'asseoir au centre de son habit de neige et l'aide à le mettre. «Mettons ta jambe dans l'habit de neige», dit Christiane. Elle encourage Benjamin à trouver la jambe de son habit de neige. Il soulève son pied droit et Christiane guide son pied dans la jambe de l'habit de neige tout en disant : «Ça va très bien! Il faut maintenant enfiler l'autre jambe.» Christiane l'aide encore une fois. «Benjamin, tu as les deux pieds dans ton habit de neige. J'ai besoin de ton aide pour les trouver. Tu dois m'aider à tirer.» Christiane commence à tirer sur la jambe droite de l'habit de neige. Benjamin répète le mot «tirer» trois fois en saisissant la jambe de son habit de neige. «Un pied est sorti. L'autre pied maintenant», dit Christiane. On répète les actions. Christiane sourit et s'exclame : «Voici ton autre pied. Tu as réussi!»

«Il faut maintenant mettre tes bras dans l'habit de neige. Lève-toi», dit Christiane tout en aidant Benjamin. «Où est ton bras? Mettons-le dans la manche de ton habit de neige!» Christiane s'agenouille à ses côtés. Benjamin est intéressé par une autre activité qui se déroule dans la pièce. Christiane attend qu'il démontre à nouveau de l'intérêt et lui répète la phrase. Benjamin étire son bras droit. Ensemble, ils mettent son bras dans la manche et Christiane, le regardant dans les yeux dit : «Très bien! Mettons maintenant ton autre bras dans l'autre manche de ton habit de neige. Oh, où est ta main? Voilà, tes deux manches sont enfilées. Nous pouvons maintenant fermer la glissière.» Benjamin regarde Christiane enfiler la glissière et quand il entend le mot «lève» il lève sa tête vers le visage de Christiane.

Un autre enfant s'approche de Christiane et dit : «Regarde! Regarde!» Mais, Christiane continue à s'occuper de Benjamin et dit : «Je ne peux regarder maintenant, Caroline. J'habille Benjamin. Je te verrai quand j'aurai fini.»

«Benjamin, mettons tes bottes», dit Christiane en les prenant. Elle soulève le pied de Benjamin pour mettre une botte et remarque : «Il y a une botte à ton pied, pour l'autre maintenant.» Christiane lève l'autre pied de Benjamin et y place la botte. Pendant ce temps, l'enfant lui tient l'épaule pour ne pas perdre équilibre.

«Voici le temps de mettre ton chapeau, tes mitaines et ton foulard.» En prenant le chapeau, elle dit : «Nous devons attacher ton chapeau pour que tu aies les oreilles au chaud. Où sont tes mitaines?... Tu es maintenant prêt à aller dehors. C'est beau. Tu as réussi.»


Ce scénario illustre une série d'actions proactives : l'intervenante répond à l'enfant, l'enfant répond à l'intervenante et ainsi de suite... Les routines hivernales comme celles-là devraient constituer une période d'apprentissage et de bien-être pour l'enfant et l'intervenante en services de garde. La sensibilité est cruciale au développement de relations et de partenariats imbus de confiance, de respect et de réciprocité entre les intervenantes et les jeunes enfants. L'objectif est de donner la priorité aux besoins des enfants.

Janet Gonzales-Mena et Dianne Widmeyer Eyer, dans Infants, Toddlers and Caregivers (1989; pp. 3-21), soulignent les dix principes de la garde à l'enfance qui résument leur philosophie sur l'interaction entre poupons et tout-petits :

Faire participer les poupons et les tout-petits aux activités qui les concernent. Benjamin et son intervenante, Christiane, ont fait des choses ensemble. Le principal objectif de Christiane est d'interagir avec Benjamin et de mettre l'accent sur ce qui arrive à son corps, fournissant ainsi une expérience éducative à Benjamin.

Investir dans le temps de qualité. Christiane s'était donnée comme tâche d'aider Benjamin à s'habiller. Elle accordait de la valeur à cette expérience et en a souligné l'importance à Caroline quand cette dernière a tenté de l'interrompre. Les intervenantes devraient toujours parler avec l'enfant, non pas à l'enfant, et attendre sa réponse.

Apprendre les façons uniques que chaque enfant a de communiquer et leur enseigner les vôtres. Christiane disait à Benjamin ce qui se passait et ses mots s'harmonisaient à ses actions. Quand Benjamin a choisi son pied droit, Christiane a respecté son initiative et l'a aidé avec ce pied. Elle a observé les actions de Benjamin et y a accordé les siennes.

Investir du temps et de l'énergie pour façonner une personne entière. Les enfants exigent du temps pour explorer leurs environnements et s'exprimer. Dans le présent scénario, Christiane a étiqueté tous les articles du lot de vêtements qui appartenaient à Benjamin, lui a donné l'occasion d'aider et a attendu qu'il ait son chapeau bien en main avant de passer à une autre tâche. Elle a aussi décrit ce qu'elle faisait, ce que faisait Benjamin et ce qui se passait dans l'environnement. Les enfants ont besoin d'être stimulés afin de devenir des personnes à part entière.

Traiter les poupons et les tout-petits avec respect. La meilleure façon de gagner le respect pour soi-même est de donner l'exemple. Dans le cas d'espèce, Christiane s'est dirigée vers Benjamin, s'est penchée au niveau de ses yeux, a souri, puis l'a invité à se joindre à elle pour qu'il s'habille et aille dehors jouer. Christiane a expliqué à Benjamin ce qui se passerait avant de faire quoi que ce soit.

Respecter vos sentiments. Il est important pour les intervenantes en services de garde d'exprimer leurs sentiments de façon honnête, servant ainsi de modèles à émuler pour les enfants. Expliquez immédiatement à l'enfant les effets de ses actions sur vos sentiments sans le blâmer, le juger, l'accuser ou le rabaisser. Les intervenantes devraient exprimer leurs sentiments et les lier à la situation. Dans la première scène, Christiane a exprimé des sentiments de joie et d'accomplissement à Benjamin par le biais de signaux verbaux et non verbaux.

Émuler le comportement que vous désirez transmettre. Si vous vous exprimez dans un langage approprié, les enfants vous imiteront. Les routines sont importantes pour aider les enfants à connaître leurs environnements et à rajuster leur comportement. Les intervenantes devraient promouvoir les trois règles d'or de l'interaction : le respect, la réciprocité et la réaction appropriée au moment d'habiller et de déshabiller les enfants. On doit louer les réalisations des enfants et les encourager à se sentir de plus en plus compétents.

Considérer les problèmes comme des possibilités d'apprentissage. Laisser les poupons et les tout-petits tenter de résoudre leurs problèmes. Comme animatrices, les intervenantes devraient accorder aux enfants la possibilité de résoudre leurs problèmes. Elles peuvent aider les enfants en jouant des jeux d'association d'étiquettes et de mots ainsi qu'en simplifiant leur langage. Les poupons et les tout-petits réagissent bien aux instructions simples, par exemple, quand Benjamin a répété le mot «tire» trois fois en tenant la jambe de son habit de neige. Les poupons et les tout-petits apprennent par l'interaction avec les intervenantes et par la manipulation d'objets qui font partie de leur environnement.

Augmenter la sécurité par l'apprentissage de la confiance. Les intervenantes créent des partenariats empreints de confiance par le biais d'interactions positives avec les enfants. Par exemple, quand Christiane a expliqué à Benjamin ce qui arriverait pendant la routine d'habillage, elle le traitait comme une personne plutôt qu'un objet. Cela a aussi aidé Benjamin à considérer Christiane comme une adulte fiable. Apprendre à prédire ce qui arrivera joue un rôle important dans l'apprentissage de la confiance.

Considérer la qualité du développement à chaque stade. Les enfants devraient pouvoir décider de répéter l'exercice de compétences nouvellement acquises. Les intervenantes doivent appuyer et encourager les enfants dans leur apprentissage par tâtonnements. Le fait de louer les enfants pour leurs réalisations favorise l'autonomie, accroît leur sentiment de compétence et de contrôle de soi. Il est important d'appeler les enfants par leur nom et d'étiqueter tous leurs vêtements et articles personnel. Rappelez-vous qu'il faut être patiente quand les jeunes enfants éprouvent de la difficulté à mettre un chapeau, un manteau et à se tenir en équilibre en mettant leurs bottes.

Jennifer Murphy-Hupé est agente à l'information auprès de la FCSGE et éducatrice de la petite enfance.


Références

Anselmo, Sandra (1987). Early Childhood Development: Prenatal Through Age Eight. Ohio : Merril Publishing Company.

Gonzalez-Mena, Janet & Widmeyer Eyer, D. (1989). Infants, Toddlers, and Caregivers. Californie: Mayfield Publishing Company.

Murphy-Hupé, Jennifer; Nelson, Bev & Louis, Grace (1992). The Dressing and Undressing of Infants and Toddlers: A Research Paper.

Reynolds, Eleanor (1990). Guiding Young Children: A Child-Centered Approach. Californie : Mayfield Publishing Company.


Cet article a paru dans Interaction (hiver, 1995),
publié par la Fédération canadienne des services de garde à l'enfance.
Affiché par la Fédération canadienne des services de garde à l'enfance, septembre 1996.


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